Formation Du Cueilleur - Découvrir L'herboristerie - HD
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DÉCOUVRIR L’HERBORISTERIE
Définitions et historique
Les plantes nous sont nécessaires, tant comme aliments ou comme remèdes que comme éléments
symboliques et culturels. Elles sont un recours universel aux maladies pour les hommes et certains
animaux1, même si l’homme est le seul à avoir constitué une véritable médecine, un système comprenant
à la fois des théories sur la maladie, le corps humain et les remèdes, ainsi que des pratiques comprenant
souvent une pharmacopée et d’autres techniques de guérison.
Évoluant au fil des siècles, chaque médecine s’est construite sur une conception particulière de la maladie
et a élaboré des remèdes, avant tout d’origine végétale, grâce à une compréhension intuitive, empirique
ou scientifique du vivant.
Rappelons par ailleurs qu’actuellement sur environ 400 000 espèces de plantes connues, seules
31 000 espèces ont au moins un usage documenté (soit moins de 10%). Même pour les plantes déjà
connues, de nombreux éléments sont encore incompris. Il reste donc encore beaucoup à découvrir ! 2
En France, même si la profession d’herboriste a été reconnue officiellement au XIVe siècle, le diplôme
d’herboriste a été supprimé en 1941 sous le régime de Vichy. Les herboristes diplômé.e.s avant 1941 ont
eu le droit d’exercer jusqu’à la fin de leur vie. Mais à l’heure actuelle, il n’existe plus à proprement parler
d’herboriste, puisque officiellement le métier s’est éteint avec eux.
Actuellement, les pharmaciens ont le monopole de la commercialisation des plantes médicinales (on parle
de monopole pharmaceutique), dès lors qu’elles sont inscrites à la pharmacopée.
Certaines plantes sont toutefois en vente libre, on parle de « plantes libérées ». Elles sont au nombre de
148 depuis 20083 mais ne peuvent pas être légalement accompagnées d’allégations thérapeutiques en
dehors du circuit pharmaceutique.
Les herboristes qui exercent actuellement, sans statut officiellement reconnu, se reposent donc
essentiellement sur cette liste limitative de plantes. Par le biais de la législation des cosmétiques et des
compléments alimentaires, ils peuvent également vendre un certain nombre d’autres plantes sous forme
transformée (baumes, alcoolatures, gélules, ampoules buvables, sirops, arômes alimentaires... du moment
que ces produits ne peuvent pas être considérés comme des médicaments).
Certains prennent parfois aussi la responsabilité de vendre des plantes du monopole pharmaceutique en
espérant faire évoluer la réglementation vers la reconnaissance officielle d’un nouveau métier d’herboriste.
Concernant les huiles essentielles, 15 sont aujourd’hui réservées à la vente en pharmacie4, du fait des
risques de toxicité qu’elles présentent (risque de neurotoxicité : absinthe Artemisia absinthium, hysope
Hyssopus officinalis, sauge officinale Salvia officinalis ; risque de cancérogénicité : sassafras Sassafras
albidum…).
> Phytothérapie
La phytothérapie, d’un point de vue étymologique, signifie « soigner avec les plantes » (du grec phyton,
« végétal », et therapeutes, « qui prend soin »). Au sens large, elle peut englober la grande majorité des
utilisations traditionnelles et modernes des plantes. Par contre, au sens strict, la phytothérapie désigne
l’usage pharmaceutique des plantes. Elle se réfère à des documents de référence décrivant avec
précision la plante et ses usages (dénomination botanique, partie utilisée, préparation et dosages aux
effets thérapeutiques) qui ont été soumis au préalable à des études rigoureuses afin d’assurer (autant que
possible) la sécurité et l’efficacité des remèdes décrits.
Quoi qu’il en soit, la phytothérapie est une approche scientifique des troubles fonctionnels ou des
pathologies qui repose sur la connaissance des molécules actives présentes et de leurs effets. Les remèdes
de phytothérapie peuvent être administrés par le biais de nombreux types de préparations que vous aurez
l’occasion de rencontrer au fil de la formation (extraits aqueux, alcoolatures, macérats huileux, extraits
secs…).
Une particularité essentielle de la phytothérapie est que l’on utilise la plante entière (ou certaines de ses
parties) sans en isoler un principe actif précis (molécule responsable d’un effet thérapeutique). On dit que
l’on part du totum de la plante.
• Une composition qui n’est pas connue de manière précise dans sa totalité
Le totum d’une plante étant une « soupe » de composés, à l’inverse d’un médicament classique, il n’est
pas possible de connaître la liste exhaustive des molécules présentes et la quantité de chacune.
Utiliser des plantes qui ont été correctement identifiées et dans certains cas, savoir où elles ont poussé
(ce qui impacte la composition chimique) est donc essentiel.
Pour l’ensemble de ces raisons, les plantes médicinales sont soumises à certaines réglementations, mais
leur utilisation reste tout de même très libre.
À SAVOIR
L’accès au diplôme universitaire de phytothérapeute, qui n’est pas reconnu officiellement comme
une spécialité, est réservé uniquement aux professionnels de santé diplômés d’état : médecins,
pharmaciens, dentistes, sages-femmes...
L’homéopathie10 est une médecine empirique inventée à la fin du XVIIIe siècle par le Dr Samuel
Hahnemann qui repose sur les principes de similitude (concept datant de l’Antiquité) et de dilutions
successives à partir de différentes matières premières : plantes mais aussi substances d’origine animale ou
minérale.
• Le principe de similitude est le principe selon lequel «toute substance capable de provoquer des
symptômes chez un individu sain est aussi capable, à doses diluées, de soigner ces mêmes symptômes
chez une personne malade» (par exemple, une plante qui provoquerait des spasmes chez un sujet sain
pourrait être utilisée comme antispasmodique à dose homéopathique).
• Le principe de dilution consiste en des dilutions successives. À chaque dilution, le volume est dilué 100
fois, on parle de CH (pour centésimales Hahnemanniennes du nom du médecin fondateur). Au-delà
d’une dilution à 12 CH, plus aucune molécule de la substance n’est présente. Le choix des différentes
dilutions se fait selon le principe de similitude (plus la similitude entre les symptômes observés lors de
l’expérimentation de la substance et les symptômes du malade est grande, plus la dilution sera forte).
De plus, les hautes dilutions (entre 15 et 30 CH) seront plutôt réservées aux pathologies chroniques
ou d’ordre psychologique alors que les basses dilutions (entre 4 et 5 CH) concernent les affections
localisées et les pathologies aiguës.
• L’homéopathie utilise aussi la dynamisation, une méthode de mise en mouvement de l’eau, par
agitation, ayant pour but de favoriser le transfert de l’information de la substance diluée au liquide.
Les médicaments homéopathiques peuvent se présenter sous différentes formes retrouvées dans la
médecine allopathique (comprimés, sirops, suppositoires, crèmes...). Les plus connus restent les formes
granules et globules (plus petits que les granules) qui sont des formes spécifiques composées de
saccharose et de lactose et imprégnées du mélange obtenu par dilutions et dynamisations successives de
la teinture-mère. Le nombre de dilution étant fonction de l’effet recherché.
L’application de l’homéopathie est complexe car elle repose sur une individualisation très précise du
traitement au sujet en prenant en compte le type de malade et son terrain.
LE SAVIEZ-VOUS ?
C’est Hahnemann qui a inventé le terme « allopathie » pour distinguer l’homéopathie des autres
médecines. Ce terme est essentiellement utilisé de nos jours pour parler de la médecine moderne.
L’aromathérapie est la thérapie par les huiles essentielles. C’est une branche de la phytothérapie.
Une huile essentielle est un extrait aromatique issu d’une plante aromatique, à savoir une plante qui
produit des essences qui sont ensuite stockées dans des organes spécifiques : poils ou « poches à essence ».
Les huiles essentielles sont obtenues par distillation à la vapeur d’eau (également appelée hydro-
distillation). Dans le cas des huiles essentielles extraites d’agrumes, on parle plutôt d’essences et le procédé
d’extraction peut se faire par expression mécanique à froid.
L’hydro-distillation se fait grâce à un alambic. Cette méthode consiste à entraîner les particules
aromatiques par la vapeur d’eau pour les recondenser ensuite grâce à un long tuyau (appelé serpentin)
froid. On obtient ainsi deux liquides non solubles, l’huile essentielle et l’hydrolat (parfois aussi appelé eau
florale ou hydrosol), qui se séparent par décantation.
Les hydrolats ont une composition chimique différente des huiles essentielles : ils contiennent des molécules
hydrosolubles et une partie des constituants de l’huile essentielle (composés aromatiques). Ils sont toutefois
moins riches en composés phénoliques (souvent responsables d’une activité antibactérienne et anti-
inflammatoire) que cette dernière14-16. Bien que moins connus, ils sont actuellement essentiellement utilisés
dans le domaine de la cosmétique mais ils présentent des applications très intéressantes en thérapeutique,
que ce soit pour un usage interne ou externe :
• L’hydrolat de mélisse (Melissa officinalis) et de
camomille romaine (Chamaemelum nobile) en
cas de stress, nervosité ou troubles du sommeil.
• L’hydrolat de menthe poivrée (Mentha piperita)
pour soulager les troubles digestifs et comme
antalgique par voie locale pour soulager les
piqûres d’insectes ou les migraines.
• L’hydrolat de romarin (Rosmarinus officinalis)
comme tonique général et digestif.
Retenez que les propriétés de la plante ne sont pas identiques en aromathérapie et en phytothérapie. En
effet, l’huile essentielle est un concentré des molécules volatiles de la plante, or les propriétés des plantes
peuvent aussi êtres liées à des constituants non volatils.
Avec les huiles essentielles, les précautions à prendre sont plus strictes que pour la plante entière. En effet,
la concentration très élevée en principes actifs et leur liposolubilité (affinité pour les corps gras favorisant
le passage au travers de la peau, des membranes cellulaires et une action au niveau du système nerveux)
sont responsables, entre autres, d’un risque de toxicité plus élevé.
La prudence sera donc de mise à la fois pour la voie cutanée et la voie orale.
> Gemmothérapie14
La gemmothérapie, appelée aussi phytoembryothérapie, a été créée dans les années 1950-1960 par
le Dr Pol Henry. Ici, ce sont les tissus embryonnaires comme les bourgeons d’arbres, d’arbustes ou
d’arbrisseaux ou les radicelles de plantes herbacées qui sont utilisés frais, sous forme de macérats
glycérinés.
La préparation fait penser à un remède de phytothérapie standard mais l’approche est légèrement
différente.
Les remèdes de gemmothérapie ne sont pas seulement basés sur les propriétés des molécules présentes,
même si l’intérêt des bourgeons réside aussi dans leur concentration en minéraux et oligo-éléments
apportés par la sève brute et la présence d’une grande quantité d’éléments intéressants (hormones,
facteurs de croissance, nutriments, enzymes, polyphénols, composés aromatiques…). Les bourgeons
seraient aussi utilisés pour leur « énergie » : partant du principe que le bourgeon possède tout le devenir
de la plante, qu’il contient des cellules totipotentes (capables de se transformer en n’importe quelle partie
de la plante), le Dr Pol Henri a supposé que cela apportait une énergie supérieure aux bourgeons et leur
conférait une efficacité spéciale par rapport aux autres parties de la plante. Par ailleurs, les principes
homéopathiques de dynamisation et de dilution sont parfois utilisés en gemmothérapie et l’on retrouve
également les notions d’information.
Dans la pratique, la gemmothérapie reste une pratique récente et peu d’études permettent de valider
l’efficacité clinique de cette branche de la phytothérapie. Et bien que le risque de toxicité semble rare, cette
pratique mérite d’être encadrée afin d’assurer l’efficacité et la sécurité des remèdes.
Notez qu’à l’heure actuelle, aucune étude scientifique n’a permis de valider ni de comprendre l’effet des
fleurs de Bach.
> Naturopathie
La naturopathie n’est pas une thérapie par les plantes à proprement parler. La naturopathie est une
approche globale de l’être humain et de la santé, prenant en compte à la fois la dimension physique,
la dimension psycho-émotionnelle et la dimension environnementale (le contexte de vie). C’est une
approche préventive qui vise à favoriser la santé d’une personne grâce à la mise en place d’une hygiène
de vie la plus adaptée possible.
Pour ajuster ses conseils, le naturopathe s’appuie sur le fait que chaque personne possède une constitution
innée et un tempérament bien précis, résultant du mélange entre la constitution et les habitudes de
vie. Cette conception s’inspire de certaines médecines traditionnelles, que l’on retrouve par exemple
chez Hippocrate, ou encore dans l’ayurvéda (les doshas). Pour le naturopathe, la constitution et le
tempérament permettent d’évaluer l’énergie dont dispose la personne, objectif principal du « bilan de
vitalité » et prérequis indispensable à tout conseil naturopathique.
Les trois axes principaux sur lesquels va s’appuyer le naturopathe sont l’alimentation, l’exercice physique et
le travail psycho-émotionnel. Le naturopathe peut également être amené à accompagner une personne
dans le cadre d’une pathologie, en complément d’un suivi par un médecin.
Dans tous les cas, l’objectif du naturopathe est d’optimiser l’énergie présente déterminée lors du bilan, puis
de faire en sorte d’en récupérer suffisamment. Le corps peut ainsi disposer des ressources nécessaires pour
s’adapter au mieux, que ce soit pour se maintenir en bonne santé ou pour combattre une maladie.
Aussi, pour donner un coup de pouce aux processus spontanés du corps, le naturopathe peut proposer en
complément des remèdes de phytothérapie et d’aromathérapie, remèdes qui sont souvent validés par
la communauté scientifique, ou aussi éventuellement de la gemmothérapie, des Fleurs de Bach ou des
remèdes homéopathiques, en fonction de ce qui lui semblera le plus approprié.
La médecine officielle, ou médecine moderne, conventionnelle s’appuie sur la recherche scientifique et sur
des technologies biomédicales pour diagnostiquer et traiter blessures et maladies, grâce à la prescription
de médicaments, à la chirurgie ou à d’autres formes de thérapies.
Souvent, nous avons tendance à opposer médecine moderne/conventionnelle et médecine naturelle, or en
y regardant de plus près, nous constatons que près de 70 % des médicaments proposent des molécules
naturellement présentes chez les plantes ou s’en inspirant !
Les molécules actives présentes dans les médicaments (hors vaccins) ont une structure chimique qui peut
provenir de sources différentes15 :
• De molécules dont la structure est présente dans la nature (42%), directement extraites ou reproduites
à l’identique.
• De molécules dont la structure n’existe pas dans la nature mais qui est inspirée par celles des
molécules naturelles (25 %).
• De molécules synthétiques dont la structure n’existe pas dans la nature et qui n’en n’est pas inspirée
(27%)15.
Parmi les principales molécules issues du monde végétal classiquement utilisées par l’allopathie, citons
par exemple la quinine (antipaludique issue du quinquina, Cinchona officinalis), ou la morphine (issue du
pavot à opium (Papaver somniferum) et antalgique puissant).
Certains principes actifs ont été découverts à partir des usages traditionnels. C’est notamment le cas
de l’acide salicylique (principe actif de l’aspirine), issu du saule blanc (Salix alba) que conseillait déjà
Hippocrate contre la fièvre sous forme de décoction d’écorce.
D’autres principes actifs ont, quant à eux, été découverts par hasard ou dans le cadre de recherches
systématiques. C’est le cas du taxol, une molécule anti-cancéreuse issue de l’if (Taxus baccata), identifiée
par criblage d’un grand nombre de substances pour un effet précis16.
Pour conclure sur ces pratiques, l’intérêt n’est pas d’avoir à en choisir une seule pour tout soigner
mais de pouvoir savoir quand les utiliser, car elles peuvent être complémentaires .
Par exemple, la phytothérapie et l’aromathérapie peuvent être utilisées pour des petits maux du
quotidien ou encore pour soulager des pathologies chroniques que la médecine peine à guérir, et
également diminuer les effets secondaires de certains traitements.
L’homéopathie et les fleurs de Bach peuvent permettre d’éviter une médication dans des cas
de pathologies bénignes ou accompagner psychologiquement la traversée de la maladie (que
leur effet soit placebo ou non, ce soutien n’est pas à rejeter car le vécu et la représentation de la
maladie sont essentiels dans le processus de guérison).
La naturopathie, elle, peut aider, par sa fonction de coaching, d’éducation à la santé, dans le
choix de compléments alimentaires adaptés…
Nous avons par ailleurs la chance d’avoir à notre disposition de nombreuses sources sur les traditions
médicinales et médicales : traditions orales, restes archéologiques, écrits plus ou moins complets (parfois
d’origine, parfois recopiés au fil des siècles), références à des textes médicaux perdus… Les sources les
plus anciennes ne constituent certes pas un reflet parfait des pratiques dans la mesure où beaucoup de
traditions se transmettent oralement et que bon nombre d’écrits ont certainement été perdus, mais ce qui
nous est parvenu offre déjà un bel aperçu des pratiques et de leur évolution. En voici ici un petit résumé.
Préhistoire (de 2,8 millions d’années au IIIe millénaire av. J.-C. environ)
Nous avons de plus en plus d’informations à disposition sur cette période, s’étendant de l’apparition du
genre homo à l’apparition de l’écriture. Nous savons aujourd’hui que l’Homme (au sens d’Homo sapiens),
ses ancêtres ainsi que l’Homme de Néandertal (qui a vécu entre 430 000 à 35 000 av. J.-C. et avec
qui nous partageons un ancêtre commun) utilisaient les plantes que ce soit pour se nourrir, se soigner
ou dans le cadre de rituels17. Des restes de certaines plantes sans valeur nutritive particulière telles que
l’achillée millefeuille (Achillea millefolium) ou encore la camomille (Chamaemelum sp.) ont été retrouvés
dans des dents, des excréments ou des récipients18. Des archéologues ont aussi retrouvé des plantes
considérées comme médicinales dans des tombeaux. On a également découvert des défunts couverts de
« tatouages », de marques sur la peau, réalisés avec des plantes actives sur des points précis du corps,
évoquant un usage thérapeutique certain. Le plus célèbre d’entre eux, Ötzi en comportait 61, répartis
principalement autour des articulations19. Il porte les plus anciens tatouages connus20.
Les pratiques sont basées sur le caractère sacré et divin des maladies. Il s’agit souvent de rechercher la
faute morale commise, d’apaiser le dieu irrité ou d’expulser le démon. Les remèdes sont donc souvent
des prières et des sacrifices mais de nombreuses plantes sont connues et occupent une place importante,
autant pour des fumigations anti-démoniaques que pour des recettes plus « médicinales », contre les maux
d’estomac ou la toux par exemple.
Même si cette conception divine de la maladie et de la guérison semble loin de nos conceptions actuelles,
la maladie comme punition, ou comme expérience initiatique existe encore dans certaines cultures ou dans
la représentation individuelle de la maladie.
Scène de guérison d’un patient, détail de la « plaque de Lamashtu », Musée du Louvre, Contrat sumérien: vente d’un champ et d’une maison.
VIIIe siècle av. J.-C. [CC BY-SA 2.0/Rama] Shuruppak, c. 2600 av. J.-C., écriture pré-cunéiforme.
Louvre, département des antiquités orientales (AO 3766)
[CC0/Jastrow]
La médecine ayurvédique est liée à la mythologie et aux religions de l’Inde qui font Un praticien ayurvédique appliquant des
remonter l’origine de la médecine traditionnelle indienne au légendaire Dhanvantari, huiles médicinales lors d’un massage de la
qui aurait reçu ses connaissances de Brahmâ, le Dieu hindou de la création. tête. [CC BY 3.0/Ch-info.ch]
Bien qu’elle ait été officiellement interdite et mise à mal lors de la colonisation britannique entre 1757 et
1947, elle a aujourd’hui des hôpitaux spécialisés et 80% de la population y a recours.
Représentation occidentale de la cosmologie Wuxing des Carte des points d’acupuncture [CC0]
chinois. Illustration de Description de la Chine (1736) par
Jean-Baptiste Du Halde. [CC0]
Au IIe siècle av. J.-C., un autre courant appelé l’école des empiristes rejette le rationalisme en vogue, dont
l’étude de l’anatomie, car selon eux la nature est si complexe qu’il est impossible de l’aborder selon la
logique seule24. Cela vaudra notamment à la dissection d’être interdite pendant plus de mille ans. Leurs
traitements sont constitués de mélanges de plantes très complexes.
D’autres médecins ont par la suite enrichi la pharmacopée et la pratique médicale dans le sillage
d’Hippocrate. On peut ainsi citer Dioscoride (médecin et botaniste du Ier siècle) ou encore Galien
(médecin du IIe siècle, considéré comme le père de la pharmacie : il a donné son nom à la « galénique »,
l’art de mettre en forme les médicaments pour les rendre administrables et au serment que prêtent les
pharmaciens).
Hippocrate, gravure de Peter Paul Rubens, 1638. Pedanius Dioscorides (Dioscoride) [CC0] Portrait de Claude Galien par Georg Paul
Bibliothèque nationale de médecine. [CC0] Busch25 [Copyright © 2012 Wellcome
Library, London]
Ainsi, l’approche scientifique n’est plus dominante. L’astrologie est souvent utilisée pour décrire le
fonctionnement des organes et les plantes médicinales sont beaucoup utilisées selon des conceptions
analogiques, symboliques, voire magiques, avec l’utilisation d’amulettes protectrices par exemple. 30,31
Au Moyen-Âge se développe aussi l’alchimie, dont les origines remontent à l’antiquité. Les alchimistes
préparent des huiles essentielles dans le but d’extraire la « quintessence » de la plante.
La connaissance des plantes médicinales se maintient de différentes manières.
D’une part grâce aux monastères avec la culture de jardins de « simples » (ici : plantes médicinales, et
plus généralement, désigne les substances végétales, minérales ou animales utilisées seules, sans mélange
avec d’autres substances) ordonnée par Charlemagne au VIIIe siècle dans le Capitulaire de Villis32, un acte
législatif destiné à restructurer l’agriculture et l’administration de ses terres.
Et d’autre part, elle se transmet oralement par les femmes, principales dépositaires de ces traditions.
Hildegarde de Bingen (XIIe siècle), abbesse bénédictine, compositrice, femme de lettres, naturaliste
et guérisseuse, reste l’une des figures marquantes de cette époque de part les écrits qu’elle a laissé
(notamment les scivias33) et de part son approche globale de la médecine qui passe par le soin par les
plantes, les pierres mais surtout par la nutrition. Elle mêle des influences hippocratiques à une approche
symbolique et mystique.
C’est aussi à cette époque, en 1 258, que Saint Louis reconnaît les apothicaires comme profession à
part entière. Cependant, la frontière est mince entre aliments qui soignent et plantes médicinales, ce qui
leur vaudra, plus tard, des conflits fréquents avec les épiciers qui délivrent des épices “thérapeutiques”
(muscade, girofle…).
Autoportrait de Léonard de Vinci [CC0] Études anatomiques par Léonard de Vinci [CC0]
Portrait d’André Vésale extrait de Portrait présumé du médecin Paracelse Apothicaire par Jost Amman et Hans
« De humani corporis fabrica » [CC0] (1493-1541), copie anonyme du XVIIe siècle Sachs, 1568 [CC0]
d’un portrait présumé de Paracelse, d’après
un original perdu de Quentin Metsys[1], huile
sur bois, musée du Louvre, Paris. [CC0]
Portrait de Galileo Galilei par Giusto Portrait de Blaise Pascal - Versailles [CC BY Portrait d’Isaac Newton âgé de 46 ans par
Sustermans en 1636. [CC0] 3.0] Godfrey Kneller (1689).[CC0]
Depuis quelques décennies se développe un intérêt particulier pour les cultures orientales dont l’approche
du vivant et de la thérapeutique est restée imprégnée des traditions ancestrales. En Inde comme en Chine,
la médecine traditionnelle a même un statut quasiment égal à celui de la médecine moderne, et on peut
trouver des hôpitaux consacrés à la médecine ayurvédique en Inde ou des hôpitaux mixtes en Chine.
Dans la plupart des pays occidentaux, c’est différent car l’héritage des anciens n’a pas été conservé de
la même façon, mais on voit se populariser des courants thérapeutiques qui tentent de faire revivre les
héritages orientaux ou occidentaux, en y intégrant parfois les avancées de la science moderne.
La diversité de ces pratiques est à la fois considérable et légèrement confuse, mais c’est aussi le signe d’une
mutation en cours des pratiques médicales reconnues et de la réintégration des plantes médicinales dans
notre quotidien.
Aujourd’hui, les pratiques semblent tendre à privilégier davantage des remèdes plus simples et faciles
d’accès en premier recours, comme les plantes médicinales, plutôt que de se tourner directement vers des
traitements sous forme de molécules isolées ou synthétisées et concentrées.
Il est assez fascinant de voir que les connaissances de certains peuples, nos ancêtres ou des peuples actuels
ayant conservé leurs traditions, puissent être expliquées aujourd’hui par des études alors que leur approche
du monde est très différente de la nôtre.
Toutes les médecines traditionnelles ont largement recours à une riche palette de plantes médicinales.
Mais alors… comment s’est constitué l’ensemble des connaissances sur les plantes dans les approches
traditionnelles ?
Ces connaissances se sont principalement constituées par empirisme, par des essais-erreurs successifs
(effet notable, absence d’effet ou intoxication par exemple…) desquels on a déduit des propriétés et des
indications aux plantes (ou autres remèdes) utilisés. Pour autant, les guérisseurs procèdent bien à un choix
initial avant d’administrer des plantes à un malade ou de les appliquer sur une blessure.
Mais les connaissances pouvaient aussi provenir d’analogies (théorie des signatures), de théories d’ordre
mystique ou symbolique ou encore de « révélations ». Ces dernières pouvant survenir dans un état
second, souvent lors de rituels chamaniques. L’état de transe pouvant en effet permettre d’amener à la
conscience une quantité beaucoup plus importante d’informations sensorielles issues du contact avec le
monde extérieur que dans un état normal, voire de révéler des informations autres, d’une façon encore bien
mystérieuse.
Pour autant, il ne faudrait pas croire que les médecines traditionnelles soient restées figées dans le
passé. Elles sont en perpétuelle évolution. Elles s’enrichissent continuellement de nouvelles expériences
et expérimentations, et elles se renouvellent en fonction des besoins de la société dans laquelle elles
s’inscrivent. Les tradipraticiens (praticiens de la médecine traditionnelle) expérimentent, de façon
empirique, pour faire évoluer leurs pratiques selon les résultats qu’ils peuvent observer. Et les scientifiques
explorent de plus en plus ces nouveaux champs, contribuant à apporter de nouveaux éléments de
compréhension.
> La richesse et la diversité de l’herboristerie d’aujourd’hui sont le résultat d’une longue
histoire qui lie les hommes aux plantes depuis des temps anciens et dans des pratiques
variées.
> L’histoire des hommes et des plantes médicinales de la Préhistoire à nos jours
On sait, grâce à l’archéologie, que les Hommes utilisent des plantes médicinales depuis
la Préhistoire. Les premières traces écrites, elles, remontent à l’Antiquité égyptienne et à
la Mésopotamie. Les écrits de la médecine grecque, quant à eux, ont eu une immense
influence dans le monde et dans le temps : ils marquent un tournant historique par la
volonté de se défaire de la dimension magique des plantes et de la thérapeutique. Pour
autant, les pratiques européennes traditionnelles empiriques et/ou sacrées subsistent,
le plus souvent oralement, de l’Antiquité à la fin du Moyen-Age. Par la suite, les
découvertes et les avancées techniques permettent le développement de la démarche
scientifique, d’une recherche rigoureuse et objective, qui s’impose progressivement
sur le champ de la connaissance et des pratiques, de la Renaissance à nos jours. Bien
qu’elles aient été mises à l’écart pendant de nombreux siècles, les traditions médicinales
n’ont jamais cessé de se transmettre, et ce jusqu’à aujourd’hui. A l’heure actuelle, les
avancées de la science moderne permettent d’appréhender de façon nouvelle, avec
plus d’objectivité, les plantes médicinales et les pratiques traditionnelles en général.
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http://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl10-750.html
http://www.senat.fr/notice-rapport/2017/r17-727-notice.html
Proposition de loi tendant à créer un diplôme d’herboriste Texte n° 315 (1979-1980) de M. Francis Palmero
et plusieurs de ses collègues, déposé au Sénat le 13 juin 1980 :
http://www.senat.fr/dossier-legislatif/s79800315.html
Whole plant extracts versus single compounds for the treatment of malaria: synergy and positive
interaction :
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3059462/
Homeopathy as Boundary Object and Distributed Therapeutic Agency. A Discussion on the Homeopathic
Placebo Response. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/28984633
Décret n° 2008-841 du 22 août 2008 relatif à la vente au public des plantes médicinales inscrites à la
Pharmacopée et modifiant l’article D. 4211-11 du code de la santé publique
https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000019375944&categorieLien=id
Bitter taste perception in Neanderthals through the analysis of the TAS2R38 gene
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2828008/
https://www.universalis.fr/
https://www.persee.fr/doc/rhs_0048-7996_1951_num_4_1_4320
Les orangs-outans sont des génies de la phytothérapie qui fabriquent leurs propres onguents de guérison à
l’aide de plantes forestières
http://www.memoriahistoricacartagena.com/2018/12/10/les-orangs-outans-sont-des-genies-de-la-
phytotherapie-qui-fabriquent-leurs-propres-onguents-de-guerison-a-laide-de-plantes-forestieres/