Le Treizième Siècle Artistique-Compactado
Le Treizième Siècle Artistique-Compactado
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4
VUVUVU
OOR
2015 juni
f
ܗܘ
ܝܗ܀
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܀܀
܀
LE TREIZIÈME SIÈCLE
ARTISTIQUE .
Du même auteur :
OUVRAGES DIVERS.
Siecle Artistique .
mille têtes , plus terrible dans ses fureurs que les pires despotes ,
les
mais plus beau à contempler, à l'heure des élans sublimes , que
science , plus funeste cent fois que l'ignorance elle- même . L'histoire
Le treizième siècle. 1
6 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
son génie ? C'est avant tout dans les arts et la littérature, mais plus
moyen âge surtout , les lettres, les écrivains , sont l'exception ; tandis
que les artistes, les artisans , pour employer le vieux mot , qui est le
l'étude des arts du moyen âge . A cette époque , les œuvres artis
besoin d'en lire davantage.Tout est dans ce mot. Ah ! vous n'êtes pas
comme M. Renan ! » Et, après avoir protesté que tous les Français,
voire même tous les Parisiens , n'étaient pas des disciples du trop
gressé , qui a atteint son apogée alors qu'il était le plus profondément
définir d'un mot : c'est un art qui pense ; et par là il est diamétra
pour l'art m'a toujours laissé froid . Au contraire, devant une de ces
rendre de belles formes, mais qui veut rendre surtout l'âme , l'âme
l'art du moyen âge , si méconnu naguère , cette justice , que, s'il a été
allait jusqu'à identifier la forme avec la beauté : elle n'avait qu'un mot
pour désigner ces deux choses ( forma ). Aussi triomphait - elle dans la
même pas à allumer dans les yeux de leurs belles statues cette
leur suffisait. Qu'on jette les yeux sur une miniature du quinzième
siècle , sur un des chefs - d'oeuvre de notre Jean Fouquet , par exem
ligne est négligée , les proportions mal gardées , si l'on veut ; mais
semble que cette bouche va parler ; mais elle n'en a pas besoin :
antique : réfugiés dans son sein aux siècles de barbarie, les arts
étaient devenus chez elle et par elle le plus universel des moyens
avaient des yeux , et tous buvaient par les yeux , en admirant les
dier sur les vitraux l'histoire des saints , et qu'on avait toutes les
autour de l'autel qu'il faut chercher les artistes et les merveilles artis
le génie de nos pères a , pour ainsi dire , épuisé ses ressources . Il s'y
est livré à toutes les hardiesses , à toutes les fantaisies, à toutes les
tout cela est déposé à ses pieds comme l'humble hommage de l'intel
peuple français.
ture ; avant de laisser tomber nos regards sur le contenu , il faut nous
temps où l'on ne comprenait pas le grec (je ne sais trop, il est vrai ,
C'est du grec ; cela ne se lit pas . Eh bien ! l'on disait de même de nos
lution , intelligente jusque dans ses folies, vint les mutiler en coupant
les têtes des statues qui décoraient leurs portiques , les têtes , c'est-à
ment de notre siècle , par une juste réaction , la faveur publique leur
çaise .
style gothique ? Qu'est-ce que l'ogive, dont on parle tant , et que l'on
prend vulgairement pour la forme d'un arc brisé , dont on fait à tort,
est sortie d'une pensée de foi, d'un élan d'amour. Nos artistes ont
mais , au contraire, pour élever les âmes jusqu'à lui . Afin de réaliser
ce rêve , ils ont donné des ailes à la pierre . Puis, lui prêtant leurs
Plus puissants que ceux qui essayent de faire parler la chair sur la
toile ou le marbre , ils ont pris la plus grossière , la plus stupide des
matières ; ils l'ont pétrie de leurs doigts inspirés , et lui ont dit : « De
n'excitent pas les premières productions de cet art , depuis les lon
fois de simples paysans jaloux d'abriter sous leur toit des statues
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE . 13
æuvres des meilleurs artistes. C'est ainsi que le goût populaire pré
moderne. Puis la peinture sur verre , qui , avec son éblouissant coloris ,
un art plus spécialement parisien , s'il faut s'en rapporter aux vers du
français :
L'onor di quell'arte
Ch' alluminare é chiamata in Parisi .
J'ajoute que c'est , en même temps , un art tout féminin , car il est
14 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
de nos diligentes aïeules l'ont- elles exercé parfois ayec un rare bon
veilles à illustrer des missels , des évangéliaires , des livres d'heures ; car
cet art , lui aussi, était exclusivement sacré , au moins dans la première
phase de son existence . Et quand ils avaient pâli sur le vélin de ces
des saintes, ils croyaient avoir fait avant tout une æuvre pie , ils
dommagés dès cette vie par des consolations célestes . Et c'est en les
qui font aujourd'hui le bonheur de nos yeux , quand nous ouvrons les
vieux manuscrits : cela ne valait - il point l'appât , trop souvent trom
vélin , ont disparu dans les temps modernes , qui n'ont plus fait que
des imitations. Mais les arts secondaires dont nous aurons à nous
siècles une série de chefs - d'auvre , enfantés par les célèbres écoles
âge. 1
d'attention , puis corroborée par des dessins , par des figures variées ,
du voile qui recouvre la vie quotidienne de nos pères ; elle nous fera
châtelaines ; elle nous initiera enfin à cette histoire intime , qui répond
cæurs , alma parens virûm ; il faut l'aimer, non de cet amour banal
qui court les rues sous le nom ridicule de chauvinisme , non de cet
amour platonique basé sur une préférence naturelle pour le sol qui
fait agir .
Il faut l'aimer enfin, aujourd'hui plus que jamais , parce qu'à tous
ses titres antérieurs elle en joint un qui doit toucher plus sensiblement
Ses fautes ont égalé ses services ? Peut - être. Mais ses malheurs à
leur tour sont montés jusqu'à la hauteur de ses gloires . Ils ont obs
curci sa radieuse auréole ; ils ont défiguré ses traits si beaux ; ils ont
toutes les barbaries , celle des Germains , celle des Sarrasins, celle des
Normands , celle des Turcs ; j'ai défendu l'Église, protégé les faibles,
poussière, l'odieuse poussière soulevée sur mon sol par les chevaux
matérialisme le plus grossier viennent tous les jours déposer sur mon
front une nouvelle couche d'ignominie ; tous les jours , les bouches
baver sur ma robe sans tache , cette robe que n'avaient jamais at
face, noir mon vêtement, noire ma misère , et noir serait jusqu'à mon
sacrifices. Et puis, je suis toujours votre mère , et , aux yeux de ses fils,
une mère ne change pas.
me connaître telle que je suis , telle que j'ai été ; c'est de sonder
LE
CHAPITRE PREMIER ,
domine les autres arts d'aussi haut que les tours de nos vieilles
produisit.
20 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
d'inégale durée : 1 ° le style gallo -romain ou latin , qui n'est guère que
ment dont le sol était un peu plus élevé , appelé d'une manière géné
la bourse. Contre les murs des galeries latérales, les marchands éta
blissaient leurs étalages .
Oblak Camera
(absis).
Suggestus (altarium )
Chorus
collater
collater
Plaza
Plaga
.
Navis.
Pronaos .
Alrium .
Anteporlices !
du magistrat , ils firent asseoir l'évêque . Dans les deux petits édicules
ainsi le chorus psallentium , plus tard le chour tout court. Plus bas
dans la nef, se tinrent les fidèles, qui purent aussi occuper les colla
téraux , les hommes d'un côté, les femmes de l'autre. Enfin , au bas
de cette même nef, un espace déterminé par une autre balustrade for
maine public , après s'être imposée aux Viollet- le- Duc et autres vul
le
garisateurs . Il me suffira d'avoir montré le point de départ , pour
attenant à l'un des côtés de l'édifice. On alla ainsi jusqu'à l'an 1000 .
Mais alors , une fois qu'on eut franchi cette date si longtemps redou
de défier la longue série de siècles qui s'ouvrait devant eux contre toute
per totum orbem . « Lorsque la troisième année après l'an 1000 allait
» quoiqu'elles ne fussent pas sans beauté ... On eût dit que le monde
en pierre est une chose très lourde et très difficile à soutenir en l'air.
diminuer les vides, c'est- à- dire réduire la largeur des arcades et des
forme élancée , qui est d'abord , dans le style roman , à l'état rudimen
à reproduire.
difficile ( une voûte pleine soutenue très haut en l'air sur deux rangées
moyens employés dans cette lutte par les artistes romans sont les
pierre appuyé , adossé contre un mur pour lui servir de tuteur ; dans
rieur , au dehors ) ; puis les arcs-doubleaux ,c'est-à -dire des arcades qui,
e
d
Rouen
Chedal
)
bir eiling
w
Annnnnnnnnnnnnnnnn
MUHIMU
blable ( la voûte en berceau est la voûte simple, arrondie sur les côtés
poids , toute la poussée , sur les quatre piliers de chaque travée , assez
la voûte , dans le carré formé par les quatre piliers de chaque travée,
procurée par ces six arcs est plus que suffisante, et permet tout de
le but cherché .
les églises entièrement dans ce style sont rares . On peut citer , parmi
fait revivre assez heureusement à nos yeux le type des belles cons
tructions romanes .
le plus célèbre et le plus durable que le moyen âge ait connu , celui qui
près inutiles ses jambes naturelles , qui sont les colonnes de l'inté
fice sacré l'aspect d'un corps éthéré , se soutenant sans effort dans
ser sur la terre que pour la forme. C'est l'idéal de la légèreté ; c'est
parenthèse.
ment l'ogive. Demandez aux dix - neuf vingtièmes des hommes de goût
ou même des hommes de l'art s'occupant de l'architecture du moyen
KOM
pointue. Or, il y a là, sans aucun doute, une de ces méprises de belle
Tout d'abord , l'ogive n'est pas l'ogive ; ou , pour parler plus claire
ment , je dirai , comme le poète , que l'ogive n'est pas ce qu'un vain
pas dans tout le moyen âge d'autre application de cet adjectif . Vint
la Renaissance , qui fit la nuit sur la littérature et les arts des siècles
leur patrie , osèrent jeter un furtif coup d'œil sur les édifices gothi
ques : mais ceux- ci étaient trop en défaveur pour faire l'objet d'une
étude sérieuse et attentive . Voilà comment il fit
que les rares ama
teurs dont je parle , peu versés dans la langue du moyen âge, virent
croisées, pour eux , ne pouvaient être autre chose que des fenêtres ),
et dans l'arcus augivus le cintre brisé usité dès la fin de l'époque ro
à cette date donna en même temps les deux sens, le mauvais à côté
rité n'existera plus pour ceux qui sauront faire la distinction , c'est
opposition à l'arc à deux points , qui est le plein cintre, ou celle d'arc
Cette forme d'arc brisé , appelée à tort ogive , a été encore l'objet
sion . Ainsi , l'on a cru que sa présence dans les monuments annonçait
trouve usité jusqu'à la fin du douzième . Elle n'est donc pas le signe
MULTI
RUWUNNERO
CONSERVERIGRI
VULDI
MERES
0001
cade à plein cintre , les pièces qui tendent le plus à tomber et qui
prochez les deux côtés qui restent : vous avez un cintre brisé , qui , par
une solidité , une résistance beaucoup plus grandes . Que des peuples
de l'antiquité aient connu cet artifice, c'est possible ; mais que nos
au retour des croisades , rien n'est moins prouvé, rien n'est moins
sur notre sol . C'est ainsi que , tout dernièrement , M. Dieulafoy, après
ment parce qu'il avait constaté certaines analogies entre les procédés
de produire.
d'émulation qui animait nos aïeux . L'arc tiers -point n'est pas plus
arabe que grec ; le style gothique lui-même ne vient pas plus des
Goths que des Allemands ; car le pays qui l'inaugura n'est autre que
aux noms , que cette appellation de gothique n'est pas plus rationnelle
que celle d'ogive pour le cintre brisé des portes, des fenêtres ou des
inventé par les Italiens , qui , ayant reçu la notion de cette architec
L'ensemble de l'église offre l'image d'une croix latine , dont les bras
sont formés par le transept. Ces bras sont très courts , composés
une fois le sacrement reçu . C'est ce que nous fait voir, entre autres,
KYKN
MAX
si nu
ment de leur part , et il paraît que cet acte de vandalisme leur fut
accordé ( 1 ).
damnés à faire trop étroite, est redevenue un peu plus large, grâce
aux facilités procurées par l'arc - boutant , quoique l'on profite plutôt
de ces facilités pour faire monter l'édifice que pour l'élargir. Souvent
dans ce cas , le second bas- côté ou collatéral extérieur peut être formé
l'aide des espaces vides compris entre les piliers des arcs - boutants ,
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE . 43
ment . Mais c'est le cheur et l'abside qui offrent les plus grands chan
11 .
HI
EXIMIIMMY
11
peu plus grande que les autres, et , d'ordinaire , elle est dédiée à la
Sainte Vierge . Ce n'est que plus tard que les petites chapelles se
XXXXXX
non seulement autour du cheur , mais tout le long des bas -côtés de
la nef.
exigences. Mais , pour les grandes églises , et surtout pour les cathé
mencé en 1194 et à peu près terminé en 1240 , peut nous donner une
tique , dont les architectes français n'ont pas voulu se séparer, parce
qu'il avait été adopté par les premiers siècles de l'Église et qu'ilétait
dans la nef trois étages : un rez - de -chaussée, formé par des piliers
aux nervures multiples, qui vont se perdre dans la voûte , et par de
lumière irrisée des vitraux ; puis un second étage , appelé par les An
glais clerestory, d'où la pierre est de plus en plus chassée pour faire
couronner le tout , nous avons cette voûte de pierre , dont les mem
car toutes les parties de l'édifice suivent les mêmes courbes et repro
compas .
bien observées par les Grecs . Je trouve qu'il obéit aux lois d'une pro
élève mon âme à Dieu . En même temps , le reflet discret des ver
Les trois étages , les trois nefs me parlent de la Très - Sainte Trinité .
signification morale. Les artistes qui l'ont élevée n'ont pas pensé
48 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE ,
l'on peut trouver plus d'une de ses règles formulée dans les auteurs
à leur tour ; peut- être ont - ils voulu voir des symboles là où il n'y
son utilité, sont des faits incontestables. On ne peut nier, par exem
qu'ils eurent trouvé l'arc - boutant , cet instrument magique qui leur
bles , dans quel sens dirigèrent - ils la force immense qu'il leur procu
ques , pour rendre à la largeur de l'édifice tout ce que l'art roman lui
lieu de cela , que font- ils ? Ils élargissent à peine le vaisseau , pour
donner un peu plus de place aux fidèles, et d'un seul bond ils s'é
l'âme, ont été prévues , ont été voulues . D'ailleurs , les tours, les
terrestres. Il faut lire sur les pierres de nos cathédrales ce qu'ils y ont
CHAPITRE DEUXIÈME .
matérielle d'un genre qui devait durer près de cinq cents ans . Mais
Mais la classification par régions , essayée bien des fois, est extrê
pour des gens naïfs, et qui appartenait plutôt lui-même à cette caté
son style particulier à lui ? Ne voyons - nous pas les choses se passer
TO
1. Quelques articles de Quicherat ont été seulement réunis en volumes par les soins de
deux ou trois de ses disciples sous le titre de Mélanges d'archéologie et d'histoire.
56 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
celles du triforium , ainsi que dans celles des tours ou des clochers ,
plus étroites et plus allongées , mais pas encore dans les fenêtres
plus aéré ; rien qu'à le voir, on devine que l'édifice a quelque part
des lois de la pesanteur. Ces points d'appui , les arcs- boutants , cor
ganir
nh
Fig . 17 - Types D'ARCS BRISÉS, IMPROPREMENT APPELÉS OGIVES.
A. Arc lancéolé. B. Arc à trois points. C. Arc à quatre points.
des artistes français de la nouvelle école avait donc déjà passé la mer.
parce que les arcs brisés qu'il emploie pour les percements se rap
ment aux arcs à trois ou à quatre points usités plus tard , qui vont
çaise tout entière d'un nom emprunté à la forme des cintres , il n'y
qui leur revient porte sur d'autres points. D'abord, ils ont doublé
s'élancer plus haut dans les airs ; c'est- à- dire que , contre un même
pilier butant , ils ont établi deux arcs superposés , allant en quelque
des voûtes . En même temps , ces piliers et ces arcs reçoivent une
monie fait modifier cette colonnade elle - même : les arcs de la voûte
française.
res au milieu de toutes les baies . Les procédés les plus heureux ne
Mans en 1217 , mais qu'ils vont jusqu'à démolir des églises déjà
c'est surtout celle -là qui a couvert le sol français d'une foule de cons
tant encore la puissance des piliers butants et des arcs - boutants , qui
composés de deux arcs, dont l'un est jeté du haut du mur jusqu'au
l'arc - boutant est formé de quatre arcs amenant toute la poussée sur
dans une bonne partie de leur hauteur , des piliers devenus trop mas
sifs pour n'être pas désagréables à l'ail . L'arc - boutant à double volée
est le nec plus ultra des expédients gothiques ; car c'est tout à fait
pans coupés ( la forme d'hémicycle avait déjà disparu , pour ces cha
atteignent une grâce sans égale ; à Reims , les portails sont tout à
fait somptueux ( 1 ) . La façade entière de ces églises rayonnantes,
les statues de JÉSUS - Christ, des anges , des saints , des rois même,
!. C'est ce que rappelle le dicton populaire qui résume les mérites particuliers de nos
principales cathédrales : « Cheur de Beauvais, portail de Reims, clocher de Chartres, nef
d'Amiens. > Sur les portails, voir ci- après le chapitre V.
68 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
02
t
mul
plus aux arcs de la voûte , mais à chacune des moulures de ces arcs ,
voûte sont réduits à leur plus simple expression , afin que l'inter
duire des ombres profondes entre les unes et les autres , et à donner
est percée à jour et divisée de telle sorte , par des montants de pierre
reste plus dans l'église , en fait de mur, qu'un petit coin à droite et
Mais , ce qui est surtout à noter, c'est que ces découpures, ces
figurer des dessins tracés au compas. Elles forment des rosaces , des
du moins celui qui saute le premier aux yeux . Chaque fenêtre sera
O MEU
gnifique monument , s'il ne tient pas le premier rang parmi ses con
tous les sous- genres que nous venons d'examiner. Elle fut commen
démolit , pour lui faire place , deux petites églises plus anciennes,
Maurice de Sully, prélat célèbre à plus d'un titre, bien qu'il ne dût
qu'à son bourg natal le nom que devait illustrer plus tard le ministre
d'Henri IV. C'est lui qui a composé le plus ancien recueil de ser
mons écrits en français. C'est lui aussi qui fut le héros d'une anec
dote assez connue , mais que l'on a prêtée à tort à différents person
nages. Il était d'origine très humble , car on prétend même qu'il avait
science nécessaire pour entrer dans les ordres . Or, un jour, à l'époque
mère , une bonne villageoise, vint de très loin pour le voir, et se pré
senta à lui dans une toilette d'apparat que de nobles dames, croyant
fort bien faire, l'avaient engagée à revêtir. Sous ces beaux habits , il
ma mère est une pauvre femme qui ne porte jamais qu'une robe de
bure . » Et , quand elle eut repris son humble costume , il se jeta dans
ses bras ( 1 ) . Ce trait charmant a été attribué depuis à plus d'un pré
lat , et , de nos jours même, on l'a encore réédité à propos d'une des
s'il n'aimait pas le luxe pour sa personne ni pour celle des siens , il ne
cathédrale qui lui est due , c'est - à - dire le chœur et les deux ou trois
nit les deux tours. C'est vers la même époque , ou très peu de
fussent les rois de Juda , et non les rois de France. Mais , en tout cas ,
ils passaient bien , au treizième siècle, pour être les rois de France ,
cette époque , intitulé Les vingt- deux manières de vilains. Une de ces
babuins est cil ki va devant Notre - Dame, à Paris, et regarde les rois,
bien celles des rois de France . Des galeries du même genre se voient
sur la façade de plusieurs autres cathédrales , notamment à Amiens ;
tail du nord, qui est de 1312 ou de 1313 ,et les chapelles bâties autour
du chœur, qui sont un peu moins anciennes . Ainsi , une bonne por
tion de l'édifice fut exécutée sous le règne de saint Louis , qui dut en
ca
ma part , sauf le respect qui leur est dû , que , s'ils voulaient tenir
centes ? Dans quelle église trouver une croix d'une taille si gigan
tesque , dont un des bras suffise pour séparer ainsi le cheur de la nef ?
dont elle brille , par les images qui s'y détachent sur un fond d'or,
d'un ordre à part ; mais je veux dès maintenant tirer de cet éloge
toutes des chefs -d'oeuvre anonymes . Il est très rare que les noms
de ces grands artistes du treizième siècle, qui ont semé sur le sol de
notre patrie les beaux monuments dont elle est si fière, nous soient
à des inconnus . Ont- ils voulu eux- mêmes rester dans l'obscurité
côtés . Non seulement des artistes de différents pays, mais des trou
pes d'ouvriers , que dis -je ? des populations entières apportaient leur
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE , 79
tres eut été brûlée, en 1194 , on vit les habitants du diocèse, on vit
réunir par bandes pour venir rebâtir une nouvelle Jérusalem sur les
larmes et des prières ; alors les prêtres engagent à étouffer les hai
nes, à remettre les dettes, etc. S'il se trouve quelqu'un assez endurci
n'est guère avant la fin du moyen âge qu'on voit apparaître de véri
tables architectes dans toute la force du terme . C'est pour ces
cle, il ne sera peut-être pas déplacé d'ajouter ici un simple mot sur
tiples exécutées par eux sur le thème du cintre brisé , les anses depa
nier, les accolades, les soufflets, les mouchettes, comme on les appelle,
style de décadence.
Viollet- le- Duc lui - même constate le fait avec une louable fran
I ÈME IQUE
82 LE TREIZ SIÈCLE ARTIST .
comprendre ... Les plans restèrent gothiques , les voûtes hautes con
bien plus préoccupés de placer les ordres romains dans leurs monu
rine de Médicis ) à tout ce qui venait d'outre - monts . L'oubli d'un passé
national sur son déclin : ce n'était pas une simple transformation qui
citait la tradition païenne dans les arts comme dans la société , s'est
plus sec , rien de plus froid, rien de plus contraire au bon goût qu'une
IR
avant tout à se bien loger, à se créer des palais somptueux , des hôtels
des plus belles inventions de leur génie : ils ont réservé celles - ci à
Dieu ; ils ont semé tous leurs trésors dans le lieu de son séjour,
a
CHAPITRE TROISIÈME .
hôtels - de - ville , les halles , les simples maisons reproduiront sous une
autre forme, mais toujours avec la même pensée et les mêmes carac
tères, le style de l'église . Ils varieront avec elle dans les procédés de
parties de ces édifices, les appareils , les murs , les portes , les fenêtres,
88 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
les supports , suivront la marche que nous avons observée chez elle
pour leurs analogues. Seulement , ils n'auront pas besoin d'étais exté
aussi vastes que les nefs des églises . Par conséquent, l'arc-boutant
parler des cloîtres et des hôpitaux , des hôpitaux , qui étaient autre
c'était le fort armé dont parle l'Écriture . Aucune , peut - être , ne pré
de la digue qui la relie depuis peu à la terre ferme, et que les uns vou
laient démolir, les autres déplacer , mais que les flots de la mer se
AMA
自由日自
A
S
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-
36.
BBAYE
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AINT
ICHEL
.-Du
-
90 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
des merveilles que l'on ne peut oublier quand on les a vues une fois ;
n'a joué un rôle dans nos guerres nationales ; et cela est si vrai ,
par les Anglais . Depuis l'an 1203 qu'il a été réédifié sur son rocher
besoin d'ajouter que cette aventure était mise par les mauvaises
1. V. les Anecdotes historiques tirées d'Étienne de Bourbon, p . 20. Les Italiens ont un
proverbe analogue : Passato il pericolo,gabbato il santo .
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE . 91
cisément avec celui qui fit rebâtir pos plus belles cathédrales . A la
tant elle est belle. Toute cette abbaye , du reste, est un monument
des plus précieux pour l'histoire de l'art , surtout les galeries claus
n'est autre que Viollet - le - Duc , peut suffire à les venger de cet excès
R
H
dor
M
MIT
dans les bâtiments ruraux les plus restreints , on se sent pris d'admi
où l'art véritable , l'art qui sait ne faire que ce qu'il faut, n'était jamais
que leurs écoles , leurs couvents , leurs églises , laissassent des souve
notamment , étaient plus simples : ils avaient des dehors plus aus
couvre le sol de vastes refuges pour les malades , pour les infirmes,
dans les villes , mais dans les plus petits villages. Un des principaux
qu'elle était faite pour trois cents habitants ( quinze fois vingt ) . Les
pris parmi les classes les plus déshéritées ; tel était , du reste , le but
Ailly
SMEER
elles -mêmes prenaient part au scrutin : nul besoin d'y voir clair pour
être électeur. Par tous les moyens on cherchait à rendre à ces infor
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE . 97
les demeures qu'on leur élevait s'appelaient -elles les maisons - Dieu ,
ou , comme nous disons maintenant, les hôtels- Dieu . Ce caractère de
l'air et de la lumière ; ils sont souvent séparés les uns des autres ;
Cet édifice est une immense bâtisse de forme oblongue , soutenue par
deux étages , dont le second est très élevé . Le jour y pénètre par deux
petites pièces de bois , sans une seule pierre. La grande salle était
autour, un peu plus haut, régnait une galerie d'où l'on pouvait sur
taux , comme celui de Beaune, qui est un peu plus récent , une
sans avoir été défiguré pour cela ; ce qui prouve une fois de plus
qui frappent tout d'abord nos regards au sortir des maisons de Dieu ,
comme l'indique son nom latin , une origine toute militaire : c'est la
jouer au prince : tout marquis veut avoir des pages , et tout seigneur
veut avoir son petit palais. D'autre part , les rois auront souvent be
moyen âge. Cette vaste pièce est voûtée comme la nef des églises ,
ron monumental, qui joue un grand rôle dans les cérémonies féoda
les . Elle - même sert de théâtre à des cours plénières, à des fêtes, à
des réunions de toute espèce ; notre salon moderne n'en sera que
de l'édifice a une forme très simple , celle d'un carré long . Il est
prison , une salle des gardes , des écuries, etc. Mais , en dehors de ces
des comtes de Poitiers, qui, par exception, avait jusqu'à trois étages
de saint Louis , celui que nous appelons encore le palais tout court ,
vraies dans leur expression qu'on les croirait vivantes ; puis cette
et dont la surface polie est illuminée par les rayons du soleil cou
vieille masse grise , remonte même plus haut que saint Louis ; mais
1. Hist. littér , de la France, t . XXIV, 709.
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE. 101
lais : c'est celui qui était situé entre les deux tours rondes donnant
Rido
FIG . 40. PALAIS DE SAINT LOUIS , AVEC LA SAINTE - CHAPELLE ET LE VERGER ROYAL.
Miniature du livre d'heures du duc Jean de Berry.
écrites qui puissent nous donner une juste idée de ce qu'il était ; mais
priété de Mgr le duc d'Aumale , nous en dit à ce sujet plus long que
causes de ses sujets. Ces petits saules qui bordent le ruisseau fai
les autres ont servi de cadre aux tableaux touchants que nous a dé
nous faisait asseoir autour de lui . Et tous ceux qui avaient quelque
reprendre dans les paroles de ceux qui parlaient pour lui , ou dans les
tête. Il faisait étendre des tapis pour nous asseoir autour de lui , et
tout le peuple , qui avait affaire par devant lui , se tenait autour de
rappelle que de très loin , comme l'on sait , les scènes patriarcales de la
1. Joinville, éd . de Wailly, p. 21 .
2. V. La chaire francaise au moyen âge, 2e éd ., p . 228.
104 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE ,
les autres aux yeux de nos pères : celles qu'ils qualifiaient ainsi
VINCENNES.
CHATEAU
remparts.
FIG.
41.
chapelle
DE
-
Donjon
et,
vraie croix, que saint Louis avait donné à son frère Robert , tige de
fondé dans cette ville par les croisés d'Occident, l'avait mise en gage
à Venise, dans un moment de détresse , contre une somme équi
de Sens , témoin oculaire , elle a sa place trop marquée ici pour que
vénéré, avec son frère Robert , qui donne les mêmes signes d'humi
portent avec eux les corps des saints et les autres reliques : on
dirait quc les saints se hâtent d'aller à la rencontre de leur Seigneur
Paris sorti de ses murs , la châsse est offerte aux regards du haut
de son allégresse .
deau dans la ville . Les prélats , les clercs , les religieux , les chevaliers
le précèdent nu - pieds . Que de démonstrations de joie sur leur par
l'extérieur , les arcs -boutants ont été remplacés par de longs contre
pelées sur les murs latéraux par une arcature dessinée des plus riches ,
tent en une couche de pâte de chaux très mince, sur laquelle , pen
saint Louis fit bâtir des logements spéciaux . Un peu plus tard ,
res surtout , tout cela pullulait dans tous les coins de la cour , le long
septième siècle . Non seulement les grosses tours dont j'ai parlé lui
00
PARIS
dessin.
DES
FIG.
LE
43.
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.
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construire des galeries , des portiques , une grande salle , qualifiés par
un écrivain moderne , appelé Corrozet , qui put encore les voir , « très
somptueux et magnifiques ouvrages, bâtis sous la direction de
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE. 113
employoit jadis à tels états, plutost que des affamez et des hommes
111IIl111Ir
TREIZIÈME
CHATEAU
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Fig
.44
Marigny n'en fut pas moins pendu , observe Viollet- le- Duc ; ce qui
114 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
yeux n'étaient plus habitués qu'aux grandes lignes droites, aux monu
plus éloignées, rentrant , comme je l'ai dit , dans la catégorie des châ
teaux .
lui - même . Tout a changé autour du royal Palais et sur son emplace
sans perdre une de ses beautés , comme si Dieu avait voulu nous
d'hui le vase est vide , et le trésor national oublié : fasse le Ciel que
N
A
B
ม
CHAPITRE QUATRIÈME .
Bientôt les castella devinrent , comme les castra eux -mêmes, des
t
les barbares eurent pénétré à l'intérieur , les castella se multiplièren
que furent élevés les castella, destinés à offrir un abri , non seule
fonder. Fortunat nous parle encore d'un castellum établi par Nice
étages, logis érigé sur une éminence factice qui s'appelait motta,
puis une seconde tranchée, creusée plus loin , séparait celle -ci de la
plicité austère . Avant l'an 1000, quelques princes très riches élevèrent
COLESTER
HD
loppèrent avec ces belles églises dont les avantages frappaient tous
pierre , et bientôt leurs salles voûtées . Sous les rois Henri Ier et
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE . 121
LRT
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CHELI
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A ART
A.2
Fig . 46. LA TOUR DU TEMPLE, A PARIS.
D'après un dessin de Nicolle.
de très près l'édifice ; les progrès réalisés dans les moyens d'attaque
et la basse cours.
reconnaître l'avantage des lignes courbes pour cet édifice élevé, dont
blement une tour ronde , d'un diamètre beaucoup plus grand que celui
gieuse ( voûte d'arêtes , puis croisée d'ogives ) . Les arcatures, les baies ,
à leurs analogues dans l'église : cintre plein , cintre brisé, plus tard
tellement sûre , que les rois de France y faisaient garder leur trésor .
plus complète .
qu'iis venaient lui payer, et devenue peu à peu un salon , puis , der
miné par une plate -forme crénelée d'où ils guettaient l'ennemi.
et une forteresse dont les dehors austères , aussi bien que la simplicité
lettre ce que dit à ce sujet M. Renan dans son Discours sur leat
armées ennemies que par les bandes franches, qui en faisaient des
timait pas à moins des deux tiers la quantité de ceux qui dispa
CHATEAU
DINAX
DE
.
re
Donjon
et
4.Fig
7
descendre dans la plaine . Leurs aïeux avaient posé leur nid sur les
qui fut achevé un peu plus tard par Diane de Poitiers ; Chambord ,
princier. Cet art céda bientôt la place à l'art italien , et les derniers
dans le goût italien sur les plans de Pierre Lescot , sous François Ier,
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE . 127
importé par les Italiens . Toutes les modes arrivaient d'Italie , surtout
elle - même nous avait enviés. Car, chose bizarre, tandis qu'on voit ce
une préférence que nos édifices religieux n'obtinrent jamais chez lui.
a gent, car c'est chose qui valt moult à délit donner ( 1 ).» Saint Louis
cour des barons féodaux n'était point assez étroite pour leur inter
de la fortification des villes , qui offre une grande analogie avec celle
pour les cités comme pour les castella. Les anciennes murailles
ciaux , appelés engeigneurs ou ingénieurs (du mot engin, fort usité chez
corbeaux furent réunis entre eux par de petits arcs à cintre brisé ,
tres , des archères , des meurtrières, des bretèches , étaient aussi ména
croisée , étendu peu à peu à la fenêtre elle -même, ce qui devait occa
élevées que lui , rondes sur leur face seulement , et s'enfonçant pro
fondément dans la place par leur partie postérieure. Telle était autre
fois la porte Saint - Martin , à Paris, qui n'est plus depuis Louis XIV
naître par Guibourc , son épouse , enfermée dans les murs d'Orange .
Alors Guillaume se jette encore une fois sur les païens , délivre
les prisonniers, et c'est seulement lorsqu'il revient avec eux que son
défenses, celles des villes comme celles des châteaux - forts, tom
qui les rendait plutôt nuisibles qu’utiles , et firent place aux murs
1. J'emprunte cette traduction littérale, où le texte est calqué vers par vers, au bel
ouvrage de M. Léon Gautier sur les Épopćes françaises ( III , 470).
136 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE.
lités . Mais ce n'est pas seulement le sol de la patrie que les cons
HEN
forme. Ils sont élevés sur des collines escarpées, d'une défense facile,
des fossés, creusés à grands frais dans le roc et remplis d'eau , comme
à Tortose et à Athlit , ainsi que par la hauteur des murailles , ils ont
plètement orientale ( 1 ) . »
le Kalaat -el - Hosn , et situé sur l'un des sommets qui dominent la
école , fut occupée par les Hospitaliers jusqu'à 1271. Elle est encore
à peu près dans l'état où ils l'ont
laissée . « Elle comprend deux en
les tours sont formidables, sur tous les points où des escarpements
Rien n'est plus propre que ce monument à donner une grande idée
1. G. Rey, Etudes sur les manuscrits de l'architecture militaire des croises en Syrie,
p. 14-17.
2. Ibid ., p. 42 .
140 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
5m
FIG . 53. MAISON DU MOYEN - AGE, A ROUEN.
bois , ou de brique et de bois , suivant les pays . Ce n'est pas là une fan
aigus , les pignons sur la rue , les ouvertures en cintre brisé , comme on
ges, tout cela rappelle encore le style des édifices sacrés. A l'intérieur,
142 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE.
21 Il ما،
TER
5 ml
cour, des boutiques ; au premier étage, une salle pour les réunions de
sur la cour, des cuisines, des dépendances . Ainsi , comme on l'a remar
nicipales , et dont tous ceux qui ont parcouru les Flandres ou nos
cimen , élevé et massif tout ensemble , fier et lourd comme les bour
avec les palais des princes . On sait quelle élégance, quelle richesse
elle atteignit dans les âges suivants. La région du nord prit alors
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égaler.
Il faudrait, pour être complet , parler encore des halles , dont quel
148 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE.
11
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TETES
000.00
chaque instant , les pèlerins étaient arrêtés dans leur marche par
blissaient - ils auprès des gués difficiles, pour transporter eux -mêmes
Une quantité de ponts , aussi solides que hardis , furent jetés sur
n'en reste aujourd'hui que les quatre arches les plus rapprochées
lui valut d'être mis en chanson . Mais , avant d'être célébré dans les
aussi vieille que lui , et dont le lecteur aimera sans doute à retrouver
ici la traduction .
trois fois : Benoît, mon fils, écoute la voix de Jésus -Christ. Qui
Je suis JÉSUS - CHRIST , qui , parune seule parole , ai créé le ciel , la terre ,
seignerai .
un bâton et une besace, et lui dit : Suis - moi sans crainte ; je te con
Esprit est en toi . Vois cette barque ; elle servira à ton passage . Va
152 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
TEN
les trois oboles qu'il possédait . Le juif, voyant qu'il n'en pouvait
extorquer davantage, les accepta et lui fit traverser le fleuve.
154 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
calme : Mon Seigneur JÉSUS -CHRisT m'a envoyé dans cette ville
nerai donc une pierre que j'ai dans mon palais , et, si tu peux seule
donc , lui dit l'évêque , et voyons les merveilles que tu promets. L'é
vêque , suivi de tout son peuple , se rendit au lieu désigné . Là, Benoît
chargea sans effort sur ses épaules , comme s'il se fût agi d'un cail
saint , et , lui baisant les pieds et les mains , il lui offrit trois cents sous .
Cette légende était lue au peuple chaque fois qu'on voulait quêter
1. Ibid. , p. 13.
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE . 155
VIGNON
-BÉNÉZET
.,ASAINT
RUINES PONT
Fig
.63.
–
par une gorge profon le , celui de Cahors, qui était fortifié, comme
il est à plein cintre , évidé dans les parties massives qui séparent les
UNI
arches , et fort étroit . Les offrandes des fidèles en firent tous les
frais ( 1 ) . »
pas assez des lettres, ce n'était pas assez des sciences ni des arts ; il
,A OURNAI
TTROUS
.POST
DES
.6Fig
5
qu'on eut soin d'y mettre bon ordre par la suite , en réservant cet
d'oeuvre : une foi réelle les a enfantés, cette foi qui agit , comme
dit Corneille . Et le sentiment de la foi a déteint même sur l'art pro
fane, sur les édifices purement civils , puisqu'ils ne sont que le reflet
terre ; l'art païen nous fait aimer la terre . La seconde tient plutôt du
ciel ; l'art chrétien , l'architecture française, pour lui donner son vrai
nom , nous attire en haut : Sursum corda ! Nous nous envolons vers les
régions célestes avec ces voûtes aériennes, avec ces flèches élancées
ici lequel de ces deux mérites a été poussé le plus loin , lequel de
ces deux arts est supérieur à l'autre. Mais je constate leur objectif
c'est que dans les lettres et les sciences le moyen âge a également
triomphé par lui . Quelle est la plus sublime des poésies ? La poésie
quel fut son esprit , quelle fut sa foi, quel fut son amour. Que d'autres
encore injuste en bien des cas) ; que d'autres l'accusent d'avoir été
pour nous , lors même que ces griefs seraient fondés, nous ne sau
rions lui en vouloir , car c'est lui qui , le premier, a fait servir l'archi
CHAPITRE CINQUIÈME.
des Pradier , a eu pour précurseurs les artistes obscurs qui ont ciselé
les autres arts , et elle sort encore moins de l'église que la peinture.
piration , qui seront acquis par le premier venu , placés ici ou là , et qui
châteaux , les hôtels - de- ville n'en auront que plus tard ; les places
comme elle, jusqu'au jour où une nouvelle forme de l'art lui succède
beau qu'au temps de saint Louis : les yeux fixés sur la nature, ils finis
sent par perdre de vue l'idéal , qui est la base essentielle de leur art.
Leur dessin a beau devenir plus minutieux , plus fouillé, plus savant :
c'est- à-dire du cintre brisé ; et voilà que , d'après les travaux des
ter la vie , qui circule dans le corps,et surtout dans le visage de leurs
statues ?
« Parmi les premiers croisés, nous dit Viollet - le- Duc , étaient par
lement les Français d'imiter les choses nouvelles qui attirent leur
P.V
tion , et je voudrais bien voir les faits à l'appui . C'est bientôt dit ,
tive , sont des caractères du Bas -empire. Mais ils tiennent aussi
Louis VI , et nous savons assez que tous les artistes du moyen âge,
tères du type national . Comment donc leurs auteurs auraient - ils pris
avaient sous les yeux , et qui représentaient pour eux la seule nature
leurs auvres , comme dans celle des peintres, des formes raides ,
le premier qui a pu léguer aux artistes romans les types que l'on
combien étaient rares les relations entre les Français et les Grecs
taire ou non ; mais elle est l'effet des mœurs et de l'objectif poursuivi.
intelligible que les artistes prennent pour idéal ; c'est l'âme qu'ils
encore Viollet- le- Duc , on ne sut mieux , sinon dans la belle anti
sissant avec l'art gracieux et affadi des siècles suivants. Plus tard les
sculpteurs feront des femmes : alors ils font des Vierges, et des
Vierges - Mères .
sereine qui lui convient se trahit jusque dans les habitudes popu
1. Ibid .
168 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
09:2 .
DAX
arriver. Cependant son désir était si vif, que , profitant d'un moment
tience. Force lui fut de chercher une hôtellerie pour prendre quelque
C'est à deux pas d'ici . Qui êtes - vous donc ? demanda notre
servir par Pierre, son écuyer , les mets les plus savoureux , les breu
et qui a voulu vous rendre l'hospitalité que vous réservez chez vous
classique fervent, qui semblait peu fait pour goûter les chefs - d'æuvre
chacun pût la comprendre. Les saints sculptés par les gothiques ont
une pareille bouche , une déclaration bien grave ; mais voilà aussi
jaune , rouge clair, vert pâle ; puis on accusait les lignes principales
par des traits noirs très finement tracés , et parfois le fond des plis
par des tons plus foncés. Mais nous verrons , à propos de la peinture ,
répondait cet usage . Du reste , les teintes pâles que l'on employait
étaient loin de donner aux statues peintes la dureté que leur donne
tions de celle - ci , qui sont généralement dans des tons beaucoup trop
que les artistes du moyen âge, sachant que leurs statues devaient
beauté , c'est qu'il ne l'a pas pu ; mais , lorsqu'il l'a pu , voilà ce qu'il
a fait .
les anges sont particulièrement bien réussis . Deux d'entre eux , sous
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE , 175
la forme ( 1 ) .
4
1
3
côté , les supplient avec ardeur. Et quand on songe que cette partie
séquent , sont peut - être des portraits , qu'elles sont , dans tous les cas,
Mais c'est peu de chose que l'art de nos anciens statuaires con
cette vaste synthèse de pierre qui s'appelle l'église. Pour cela, il suit
des règles fixes. Au dehors , illaisse les animaux , les êtres immondes
( foris canes ) : ceux - là sont bons pour orner les gargouilles, les
piliers butants, les angles des murs . Sur les façades seulement, les
32
SVE
par la Divinité qui trône sur l'autel , et qu'il n'y ait plus de place
INTO
i
S
097
partie principale .
les deux portes . Elle sen ble nous a : tendre au seuil de sa demeure ,
» Sous ses pieds , en statuettes du plus beau fini, mais mutilées mal
la prophétesse.
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE. 181
l'âme...
» La riche série des dais abritant les colossales figures dont nous
autre ordre d'idées. Nous étions sur la terre : nous allons entrer
dans le ciel .
dans la gloire. Ils partent du rang le plus étroit, au- dessus de la tête
Le treizième siècle. 12
182 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
comme d'un manteau , et la lune est sous ses pieds. Ici , comme le dit
Viollet- le- Duc , on a voulu une richesse sans égale, et les lignes de
l'architecture sont détruites par la sculpture.
que des mutilations , aient altéré ce bel ensemble , il est facile d'en
les saints qui lui tenaient de plus près ici - bas : ses ancêtres, les saints
de socle à la suivante ( 1 ) . »
Voilà bien cet art qui pense et qui fait penser, comme je le défi
tion est plus ou moins parfaite, suivant les temps et les lieux ; les
sujets et les détails diffèrent : mais le but est le même , le plan géné
ral est le même, et la piété intelligente des artistes est aussi toujours
le - Duc , qui trouve la trace d'un saut analogue et aussi subit dans
contient déjà une scène très belle et très dramatique , qui n'occupe
Chelles ( en 1257 ) , a des hauts -reliefs qui passent à bon droit pour
ÉVANGÉLISTES
EMBLÈMES
.DESNTOURÉ
DOCTEUR
QUATRE
ÉSUS
Fig
80.
—
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cathédrale
Chartres
Tympan
royale
porte
.de
àla
la
et les tombes plates. Les tombes levées , qui n'étaient que des sarco
pierre du monument lui - même . C'est de cette façon qu'a été fait le
et les moines qui garnissent les niches offriraient à eux seuls , par la
lippe , frère de saint Louis , qui date à peu près de la même époque,
analogie ( 1)
plus , entre 1230 et 1240, il fit renouveler , paraît- il , toutes les ima
ges des rois ses prédécesseurs , ensevelies dans cette célèbre basilique.
Ces statues sont aussi d'un très beau travail .
une simple petite table de pierre ou de métal , élevée de terre sur des
figures sculptées se produit sans que l'on distingue les traits de leur
qui orne la célèbre église de Brou . Les sculpteurs des âges suivants
nement de la sépulture .
Quant aux tombes plates , qu'on plaçait dans les églises comme les
est visible pour tout le monde, c'est qu'à partir du treizième siècle
elle prend ses idées, ses motifs, dans les champs et les bois de notre
pays. Elle reproduit les feuilles de chêne , les feuilles de vigne, les
est large, simple ; pas de détails , mais des masses fortement accen
guillochures, qui sont encore une espèce de semis soutenu par les
mailles d'un filet ; et les fonds arrivent ainsi à ressembler à des
la courbe, qui est la ligne naturelle dans l'ordre végétal . Voyez les
leurs fruits, et l'on est presque tenté de cueillir ces grappes de raisin .
sont remplacées par des rinceaux dirigés dans tous les sens, au ha
pas reconnu sur eux moins de trente plantes différentes, toutes plus
est à peu près celui du gothique primitif, qui a la forme d'une cor
dja
DAVU
RE
Le treizième siècle 13
198 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
bien réussi, que ,dans tout le moyen âge , on ne trouverait peut -être
pas , au dire d'un artiste qui s'y connait, deux chapiteaux absolument
parcils .
l'on tenait à être complet , étudier son æuvre sur les autels, les
FERR
C.MARADAN GAVESE
CATEVAECE SE
cent formes diverses le sentiment chrétien ? Ils ont pris les subs
tances les plus dures , les plus rebelles aux doigts de l'homme , et
ils leur ont dit : Bon gré , mal gré , tu chanteras avec nous la louange
nous avons cru en JESUS- CHRIST, que nous l'avons aimé , que nous
ayons dépensé notre vie et notre génie pour sa gloire. Voilà l'idée
féconde, voilà l'idée - mère d'où est sorti tout l'art du moyen âge , et
ou descendante. Il n'en était pas ainsi aux temps où tous les arts
Metsys, les Jean Fouquet , tous ces vieux maîtres tant admirés qui
en plein régime gothique . Ils ont peint , il est vrai , des tableaux, et
limite les pleins et les supports , n'a nullement empêché ces artistes
( je vais peut -être émettre une idée téméraire, mais en tout cas une
rore et le prélude.
pilastres , voûtes , fenêtres, etc ; mais elle n'est point pour cela réduite
traite aussi , sur les surfaces planes qui subsistent encore à cette
les traite avec des procédés encore rudimentaires , avec moins d'ha
bileté que de sentiment . Elle est en arrière sur l'architecture , et,
avant tout à glorifier Dieu , à élever l'âme humaine, étant par son
dément religieux encore , sont déjà de grands peintres. Mais les meurs
204 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE.
les côtés en cette qualité , elle arriva ainsi, par une voie moins noble
le moyen âge l'a semé partout dans ses vitraux , dans ses minia
tures, dans ses portails , et jusque sur ses autels . Les iconoclastes
répréhensible sous toutes ses formes chez des moines, qu'ils en vou
lieu , puisqu'il fit même retirer aux Bernardins le droit de visite des
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE , 205
contre cette tendance imaginaire. L'or qui scintille , la pierre qui fes
tonne, le verre peint qui flamboie sous les rayons du soleil , disent
des palais trop somptueux pour les princes, les orfèvres, les ciseleurs ,
1
les tailleurs dont les ouvrages favorisaient l'avarice ou le luxe mon
unique littérature des laïques qui ne savent pas lire, dit Honoré
gures nues était proscrite : la nudité n'était tolérée que pour les per
sonnages laids ou maudits, c'est-à- dire dans les cas où elle ne pouvait
que toutes les femmes fussent conformes à ce type, mais c'est que
206 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
les peintres et les sculpteurs étaient plus chastes que les poètes.
dans l'église , ils étaient tenus à une réserve toute particulière. Aussi
elle- même ; quelquefois ils négligent par trop la plastique ; mais cela
peinture sur verre , qui en est , pour ainsi dire , l'extension ou la pro
spécialité plus répandue et plus avancée que tous les autres genres .
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE . 207
que le vitrail envahissait peu à peu toute la place aux dépens des
sujets peints. Fortunat parle de ceux que saint Félix de Nantes fit
le- Duc , que dès l'époque gallo -romaine, c'est- à -dire vers le quatrième
soit sur un enduit couvrant les murs , et elle ne consistait , pour les
lequel étaient tracés des dessins très déliés en noir ou en ocre rouge .
d'Italie et d'Orient (2 ). »
du coloris, avec des tons clairs et doux , tels que l'ocre jaune , le brun
1. Hist . Franc ., X , 31 .
2. Dictionnaire d'architecture , VII , 56 et suiv.
208 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
rouge clair , le gris ; il sépare les teintes les unes des autres par des
les saillies par des rehauts presque blancs. Mais, dans le dessin ,
corps varient sans motif apparent ; les membres sont grêles . Les
pour les figures animées que pour les objets inanimés ( 1 ) . » L'art en
comme filets ou rehauts délicats ; l'ocre jaune n'est employé que pour
les accessoires. Les tons sont toujours séparés par un trait brun très
foncé, ou même noir. L'or apparait déjà en masse sur les vêtements ;
sombre même , s'il n'était par réveillé par l'or ( 2 ) . » Seulement , par
la force des choses , ces qualités ne trouvent presque plus leur appli
temps , ne pouvant plus utiliser les richesses de leur palette sur les
seau , depuis le bas des piliers jusqu'à la clef de voûte. Ils vont même
s'attachait plus qu'aux deux grandes arcades avec fenêtres, sous les
pierre ( 1 ). »
1. Ibid .
210 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
vaisseau dont toutes les parties , même les vitres des fenêtres, étaient
seules dans la nudité de la pierre. « Les artistes qui ont fait les
dans cette peinture des objets en relief, et cette harmonie n'est pas
la même que celle adoptée pour les peintures à plat ... Mais , vers la
oppositions . Ils poseront sur une même statue un ton rose et un ton
mise aux règles de la peinture sur toile , car elle était destinée à
ensuite en clair sur des fonds sombres , avec une grande économie
Avant , l'on trouve peut - être plus de majesté dans les figures, mais
aussi plus de raideur ; après, elles sont plus humaines, plus vivantes ,
qui avaient déjà fait faire à l'art ces progrès que l'on attribue à
gie puissant ( 1 ) . »
des miniatures plus encore que par l'étude des peintures murales ,
dans les unes et dans les autres, j'ai cru devoir le signaler dès à
1. Ibid .
212 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
Vierge que l'on fait remonter jusqu'au temps de saint Louis. Dans
que dessiné, trois anges soutiennent un voile vert et jaune , qui forme
assurent- ils, d'établir la filiation qui unit, à travers quatre cents ans ,
même cité de Gand une autre fresque à peu près aussi ancienne ,
SMARCARITA
a
оооо
chant sur le même beau fond bleu et encadrées dans le même galon ,
qui offre un perlé blanc à cheval sur un ruban dont la couleur passe
frappantes encore , ont été signalées par le même critique entre cette
OLIBRIVS
sur la décoration , mais sur les figures, les barbes , les couleurs, les
OLI
BRI
VS S MARCARITA
e
N
qui occupe dans l'église une niche pratiquée dans le mur occidental
du narthex . Il n'y a qu'à jeter les yeux sur cette grande image et
de l'art des deux époques . Il est vrai que certains détails , notam
ment les bras de la Vierge , sont encore très raides. Mais , à part
trône , au milieu d'une gloire , tient son Fils sur ses genoux . A droite
sur des nuages, dans une attitude d'adoration ; plus bas , deux
l'autre , qui paraît être une femme, est peut -être sainte Savine , dont
autels ( 1 ) . »
près de Vienne , etc. , mais sur ceux de quelques édifices civils , comme
PARIS
Peintures
Ferrande,
Laffillée
d'après
Pernes;
recueil
Didot
Gélis
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MM
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WALBE
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PAROC
CseUP6
AA
mis tous ses soins à rendre affreux. Sa grimace est assez naturelle :
la pointe d'une lance lui traverse le cou . Ce combat a lieu sous les
murs d'un monastère assiégé, indiqué par les campaniles qui dépas
sent les murs et par les figures anxieuses des moines qui y sont
renfermés. Du côté gauche , une cité orientale laisse voir ses mina
certains endroits privilégiés , comme les portails , les absides , les tribu
nes , les voûtes des chapelles , ont conservé des débris de peintures
qui sont aujourd'hui trop dégradés pour pouvoir supporter cette opé
ques , c'est - à - dire qu'elles ont été appliquées sur un enduit de inortier
OLD
POLO
sh
2 Joaca
10 LUTT
Douglas
moyen âge. « Les plus communs, d'après Viollet - le- Duc , sont la
pratiquée par les peintres des siècles suivants pour les mêmes
Bernhard ( 2 ) , est venu prouver sans réplique , non seulement que l'on
bien avant Jean Van Eyck . Et d'abord , ce n'est pas de Jean Van
Eyck qu'il faudrait parler dans tous les cas, quoi qu'en ait dit Vasari ,
l'historien des peintres : c'est de son frère Hubert Van Eyck , qui , en
1410, c'est -à- dire à l'époque où Jean ne pouvait avoir qu'une quin
ture , la difficulté d'appliquer une couleur sur une autre couleur encore
le répète . Il suffit, pour s'en convaincre , de jeter les yeux sur le docu
en 1356. Il y est dit en toutes lettres que toutes les peintures devront
connue , était entrée dans le domaine des faits et dans l'usage ordi
en est donnée par des auteurs ayant vécu à ces différentes époques .
Il n'y a pas de raison non plus pour qu'elle n'ait été employée alors
que pour de petits ouvrages , comme le veut Viollet - le - Duc ; car aucun
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE. 223
Van Eyck , on le pouvait aussi bien cent ans et cent cinquante ans
Volum
(Bis )
mençait à sortir de l'église pour aller décorer les murs des palais.
rains qui s'offriront ce luxe : les princes du sang , puis les grands sei
gneurs voudront les imiter : tout marquis veut avoir des pages . Les
ceau , sema dans les siens les chaufferettes enflammées, les devises ,
Bon , avait à Hesdin ( Pas -de- Calais ) une résidence non seulement
pont sur lequel on ne pouvait passer sans choir dans l'eau. Ailleurs ,
à chaque pas que les visiteurs faisaient sur les pavés , ils voyaient
jaillir des sources d'eaux qui mouillaient leurs vêtements, et, lorsqu'ils
ces sources , ils étaient soudainement enveloppés en des sacs , d'où ils
miroir à ceux qui avaient été ainsi noircis, et , au moment où ils s'y
regardaient, ils étaient tout blancs de farine . L'une des fenêtres, lors
livre de ballades , par lequel ceux qui voulaient y lire étaient couverts
siècle ; mais le duc Philippe le Bon , qui vivait au quinzième , les fit
restaurer, ainsi que les peintures du château , par son peintre Colard
les châteaux ; c'est alors qu'elle sera supplantée dans l'église par
une rivale plus glorieuse et plus féconde, la peinture sur bois ou sur
encore les yeux de mainte génération. Mais cet art nouveau , ne l'ou
tache n'est peut- être pas très visible dans le genre particulier que
sée , qui était bonne, demeure la même . Que le pinceau soit manié
par des mains laïques ou par des mains de clercs , peu importe ; ses
1
CHAPITRE SEPTIÈME .
du feu, comme on l'a fait plus tard . Cependant ils utilisaient plutôt
ration des fenêtres, par la raison bien simple que , dans les con
bien moins grandes dans ces pays que chez nous : on a toujours assez
deur d'une pièce de monnaie , que l'on enchâssait dans l'or ou l'ar
Tout cela , on le voit , était loin du vitrail. Cette belle invention est
d'origine purement chrétienne, et l'on peut dire que c'est une spécia
ses produits .
à éblouir par cette nouveauté les yeux des fidèles. Les poètes du
pays faisaient même école à l'étranger, car on les voit, aux septième
table doit être enduite d'une couche de craie détrempée dans de l'eau
1
#
HD
U /17
et frottée avec un linge. C'est sur cette préparation bien sèche que
pour chaque pièce au moyen d'un signe ou d'une lettre. Des mor
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE. 233
KOSTEN
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ÉTIENNE
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.Médaillon
VANCZA
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101.
Fig
DE
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et les linéaments principaux , qui sont ceux des plombs , sont calqués
234 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
sur ces verres , lesquels alors sont coupés au moyen d'un fer chaud
dôme, qui sont les plus anciens que nous possédions, passent , à la
vérité, pour être un peu antérieurs, mais ce n'est pas certain . Les
mais déjà, cependant , le modelé est ajouté après coup par le pin
morceaux de verre ne sont pas reliés entre eux par un mortier, comme
même fenêtre , toute une série de sujets formant ensemble une his .
Christ est retracée dans une seule verrière ; toute sa vie eșt racon
tée dans une autre ; la vie de saint Jacques , l'épisode de l'enfant pro
d'un éclat céleste , que le verre peint rend parfaitement , mais que
dans une barque, sur la Loire , leur précieux trophée, qui allait de
AL
6. RESEP.3C
leurs, qui se renferment toujours dans les nuances simples, bleu vif,
ploi plus général des fonds bleus foncés et violets. Leurs vitraux
méditation et au recueillement ?
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE. 239
DES
composition , mais devant bien plutôt nuire à son effet, est remplacée
gothique semble avoir été trop longue pour être remplie par un seul
LO
ARX PALLADIS
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MATHEMA ET
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STORICA
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10000
VOLUPTAS TONAV
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2. STUPORI METVSE
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1. IGNORANADA
EFER : A.S.
par cette raison même, ce qui rendit l'effet général plus confus et
des verrières valant, par la composition , les toiles des grands maîtres ;
ne jetaient pas autant d'éclat que celles du temps de saint Louis , qui
riers du douzième siècle étaient peut- être plus habiles dans le choix
bien dessiner la figure, leurs lignes étaient plus raides, plus archaï
ques , et enfin , de leur temps, les vitraux étaient infiniment moins
pour leur donner toute leur importance, toutes leurs vastes propor
art spécial , « que l'architecture des temples ne fût plus que la mon
ture de la vitrerie » .
ment artistique des âges chrétiens, aux dix- septième et dix- huitième
siècles. On ne fait plus alors de vitraux , parce que tout l'art gothique
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE . 243
nue à l'une et à l'autre , et l'on s'est mis à rechercher les secrets des
mencé sous la Restauration . Mais, bien que les auvres des verriers
leuses productions .
ancur LE TABLEAU..w.waru
à moins que l'on ne veuille faire rentrer dans ce genre deux dessins
au trait , faits au crayon rouge sur des plaques de marbre blanc , prove
pour ainsi dire , à nouveau , car pendant de longs siècles elle demeura
celui - ci trouvait sur les murs des édifices sacrés un champ très suffi
grande étendue des surfaces planes, offrant aux peintres des fonds
tout naturels et tout faits. La peinture murale était donc à peu près
système d'enseignement par les yeux , organisé pour eux dans les
cuivre , destinés à être posés ou appendus dans les endroits les plus
visibles et les plus honorables . En effet, les anciens tableaux sont des
retables, c'est - à- dire , comme leur nom nous l'apprend , des tableaux
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE. 247
W
A
Chenon
Cin
OKT
on
DISE
fort peu de temps après la fin du treizième siècle . C'est ce qui con
tableau s'annonça un peu plus tôt, et là elle tint à des causes diffé
que la nôtre. Dès l'an 1236 , Giunta ornait les églises de Pise et
Domenico. Mais c'est surtout Cimabue , et après lui son élève Giotto ,
nèrent, grâce à leur prodigieux talent , une vogue subite . Tous deux
tuée dans les chairs aux hachures bistrées et verdâtres des Byzan
1. La Peinture italienne, p . 56 .
maha
250 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
les gouvernaient . C'est même l'un d'eux , Philippe le Bon , qui donna
arts et du luxe . Les artistes étrangers, ceux des Pays- Bas surtout ,
venaient non seulement visiter ses ateliers , ses monuments , mais s'y
mands. N'enlevons donc pas à notre patrie une gloire de plus ; nous
à juste titre est également nôtre par ses origines , et ne séparons pas
ont cessé d'être Français ; mais nous devons nous souvenir, nous ,
cutés par cette école franco - flamande. Cette sorte d'ouvrage est
désignent les couleurs à employer pour peindre sur pierre , sur toile
et sur les retables (1 ). Très peu de temps après , nous voyons la même
1. V. , sur tous ces faits, le bel ouvrage de M. l'abbé Dehaisnes, Histoire de l'art en
Flandre, p. 138, 413, etc.
252 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
un document écrit qui nous l'atteste , c'est l'ouvrage lui - même qui a
2. s .
FIG . 108. PORTRAIT DE SAINT LOUIS.
Ancienne peinture de la Sainte-Chapelle . ( 1 )
effet, le portrait était un art tout nouveau , et cet art ne devait guère
sur son écu celui d'une femme qui lui était chère. Mais tous ces
essais ne nous sont connus que par les documents qui les mention
Chapelle . Cette peinture , qui sans doute faisait partie d'un retable
saint roi assez âgé, tel qu'il devait être vers la fin de son règne,
amaigri par les
les macérations
macérations et les fatigues des expéditions lointai
nes , les cheveux blancs ou gris, portant une barbe très courte , con
tude inclinée qu'a cette figure tient à ce que saint Louis était peint
à
genoux devant les saintes reliques rassemblées dans la chapelle
de son palais . Mais on peut dire qu'à cette époque le portrait était
roi René prit même l'habitude de porter sur lui, quand il s'en allait en
Bavon , près de Gand , par Jean Van der Most , en 1353. Ce mor
qui , paraît - il , n'aurait que dix ans de moins ; il est très curieux , mais
flamand font aussi observer qu'en 1370 Hugues Portier fit pour
le même couvent de Saint - Bavon un Saint Amand abattant l'autel
adopté au moyen âge , qui atteignit son plus haut degré de faveur
très recherchées des enfants, qui les appellent des images à sur
encore un produit de l'esprit de foi qui animait nos pères . Donc cet
leurs débuts dans notre pays auront toujours pour résultat , ( et c'est
mère des nations modernes, qui lui doivent , au contraire , avec leur
nunun L'ENLUMINURE. nu
cérémonies sacrées , puisque les plus beaux volumes , les plus riche
ment ornés , étaient les livres d'heures, les missels , les évangéliaires,
dit que peu à peu , et par une sorte de tolérance , aux livres pro
poser en principe que cet art spécial est encore un art hiératique dans
jusqu'à Michel - Ange et Raphaël , sont - ils autre chose que des pages
ture par l'aspect général ; ce sont , pour ainsi dire , des miniatures
dans notre art national, mais ce ne sera jamais cet art lui - même :
de ce double amour qui a procréé dans notre pays toutes les belles
dire la fidélité aux traditions des ancêtres, car c'est ainsi que je
tracer des initiales un peu plus fortes, un peu plus soignées que
les autres lettres ; on a fini par faire de véritables tableaux . Cet art
leurs vitraux , dans leurs costumes , ils se sont représenté les feuillets
couleurs vives, c'était , pour eux , faire le jour, c'était allumer ( illu
vement pour les clercs. Les livres qu'il décore sont des livres
genre , consistera à faire dire aux choses les plus simples ce qu'elles
de la scène ; il fera couler le sang divin dans un calice tenu par une
baptisé . Les couleurs elles - mêmes prendront parfois sous son pin
vention dans les arts ; c'est la période que nous avons qualifiée
puis dans les poèmes et les romans . Dès lors, elle s'adresse à une
clercs ; bien qu'une partie des fidèles soit familiarisée avec les sym
boles , il faut autre chose à ces esprits plus réalistes : le peintre est
obligé de parler avant tout aux yeux . Est -ce pour mieux se faire
aux types et aux costumes tradition nels , il représente tous les per
toutes les scènes dans le pays qu'il habite , au milieu des monuments
que tous les documents écrits à la vie intime de nos pères. La trans
formation ne s'opère pas d'un seul coup , tant s'en faut. Le symbo
acception . Elle s'ouvre au treizième siècle, bien que des essais isolés
gence des masses , plus conforme aux goûts modernes . C'est un art ,
smus
LES
posées .
( 1 ). Cette vignette et celles du même chapitre qui portent les numéros 115 , 116, 117, 118
et 120 sont empruntées à l'ouvrage cité plus haut (Les Manuscrits et la Miniature ),
faisant partie de la Bibliothèque de l'enseignement des Beaux- Arts publié par la maison
Quantin.
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE . 267
ressemblance, que l'artiste fit poser devant lui son personnage. Or,
que- là le souci de la vérité . Il suffit de jeter les yeux sur les oeuvres
rité de leurs figures est dessinée d'après le modèle. Ce sont des types
petits du portrait. »
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L. Sako
ment conçu : ainsi , dans la Bible de la reine Jeanne d'Évreux , les pro
s'en assurer , de jeter les yeux sur les riches peintures du psautier
tion de son monastère. Il est vrai que ces catégories de sujets seront
ba
2.Dokline
FIG . 117 - ABRAHAM COMBATTANT.
Tiré du psautier de saint Louis.
heure à être illustrées, et non sans élégance. Mais , dans cet ordre
liers, les font avec une certaine fierté fixer sur le vélin . C'est d'abord
écrit ses mémoires, fait peindre sur son propre exemplaire les
quatre grandes actions du bon roi , « les quatre faits où il mit son
ron , selon son habitude , recevant avec ses compagnons les jeunes
rage rapportés par l'auteur sur son héros vénéré. Ce sont les Chro
niques de Saint- Denis , que l'on enrichit d'un grand sujet à cinq
Nous nous mêlons à la foule qui se presse sur les pas de Philippe
tableaux qui rappelle ces dernières fêtes, et qui a été placée par
bien qu'elle n'ait aucun rapport avec cet ouvrage , nous offre sans
1. Cf. Wallon, Saint Louis, p. 56, 72 , 114 ; Joinville, éd. de Wailly, p. 2 , 3, 414, 448, etc.
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE. 275
grand luxe , l'art véritable , sont encore réservés pour les livres pieux.
Le peintre s'est très souvent représenté lui - même dans une des
pages de son cuvre : il n'a pas signé son nom , il n'a pas voulu dé
procédés . Ces vénérables têtes d'artistes peints par eux - mêmes ins
n'ai jamais pu voir, dit - il , sur le vélin des manuscrits , la figurine qui
1
Bibliothèque
manuscrit
Bruxelles
TRAVERSANT
royale
d'un
Tiré
de
la.
SAINT
E
LOUIS
Paris.
119.
Fig.
—
lage et des arabesques, s'agitent les démons, les sirènes et les dra
troublaient les manants , les gens d'armes et les seigneurs, lui , dans
thèque de Lille :
B
M
Une autre légende , plus récente , nous montre que les miniatu
ristes et les scribes des monastères , qui étaient très souvent les
rien , mon fils, tu vas te réjouir bientôt avec les habitants du ciel .
Parce que tu as pris soin d'honorer mon nom dans tes livres, le
tien à son tour vient d'être inscrit sur le livre de vie ; tu vivras avec
lettres, on vit des artistes laïques faire concurrence, dans les châ
très vite une prospérité tout à fait significative. A Paris surtout elles
sive scriptor ), sont compris dans une taxe que s'impose l'Université,
peu à peu un vrai peintre , et, dès 1383 , son art constitue une pro
mande , et l'autre renaissance , celle qui vint d'Italie, n'a fait que dé
282 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
Qui peut dire que les progrès matériels déjà réalisés par la peinture
même que cette renaissance païenne ne fût pas survenue ? Qui peut
dire que l'art n'eût pas atteint la même grandeur, la même perfection
âge : donc l'esprit du moyen âge ne lui était pas défavorable, bien
rait pas vu , par exemple , les peintres du dix - septième siècle, dignes
plus haut , jusqu'à des barres de bois posées , pour les soutenir , sur
plutôt une broderie : les lignes du dessin ont été d'abord tracées au
trait sur la toile, et l'espace compris entre ces traits a été ensuite
long des murailles, on a tiré pour l'étude du costume , des mæurs et des
leur marche , pour combattre, etc. Mais , si nous passons aux mérites
D'ANGLETERRE
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dix hauteurs de tête , personnages du second plan plus hauts que ceux
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productions de l'époque ( 1 ) . »
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le moyen
series à la marche, en raison des pédales ou marches par
branche de l'art serait encore française par son origine. Sans doute ,
même savant , confirmant la théorie que j'ai émise plus haut à propos
A Paris , les statuts des métiers rédigés vers 1250 ne font pas
mention des tapisseries de haute lisse , mais ils parlent des fabri
tion des ouvrages de haute lisse , dits aussi à la besche . Elle préten
nel de 1 303 , dix de ces derniers artistes jurèrent, au nom de tous leurs
traiter sur un pied d'égalité avec les sarrazinois, il fallait que leur
ils ont bien soin de spécifier qu'ils traitent non seulement pour eux ,
mais pour tout le commun du métier. Bien qu'il soit impossible d'éva
siens travaillant en haute lisse vers 1303 , il est permis de conclure des
certain temps pour que cette évolution s'accomplit ; aussi n'est - il pas
Paris un demi - siècle peut- être avant que leur existence fût officielle
d'art à peu près fixés. Elle se développera ensuite avec une grande
en - l'Ile, à Paris ; elle ne survit plus aujourd'hui que dans les dessins
perpétua dans les âges suivants. Une des belles tapisseries du quin
1. Ibid ., p. 22.
292 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE,
ses
coloris, que l'on expose encore dans la cathédrale les jours de fête :
Louis Jer, duc d'Anjou, avait simplement fait copier les six premières
Comment sipiatfondaleglise de
notre dame de tournayatfistles fons
d'où on les retirait à volonté ; car elles n'étaient mises qu'aux jours
grand'salle , qui était toute tendue. Toutes tendues aussi étaient les
tains textes nous apprennent que des tissus du même genre étaient
lis ( 1 ) . »
1. La Chevalerie, p. 596.
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE . 295
âge . Mais bientôt les tissus de soie ne suffirent plus au luxe des
gante architecture , ses fenêtres ogivales , ses voûtes , ses vitraux , ils
leurs tapisseries et leurs tapissiers attitrés. Cet art, comme tous les
tard encore, les allégories raffinées, puis les figures et les scènes
rajeuni. René d'Anjou, qui avait des goûts artistiques très déve
loppés , mais qui était souvent trop pauvre pour les satisfaire, se
et des plaisirs sans avoir « esté croqué ni laissé son plumage ( 1). »
smartu
pouvoir .
CHAPITRE ONZIÈME .
cette autre architecture , qui joue avec le métal comme les construc
très nombreuse : le livre des taxes de la ville n'en compte pas moins
sion où il était aisé de tromper le public fut sans doute pour quelque
orfèvres du moyen âge , dit Viollet - le- Duc , ne possédaient pas les
aussi ces artisans employaient- ils ces procédés qui , entre des mains 1
habiles , enlèvent à la fonte l'aspect mort et froid qu'elle conserve
tout sur ces pièces d'orfèvrerie ... Il ne faut donc pas y chercher la
que ces artisans du moyen - âge mettaient dans tout ce qu'il pro
nage ( 1). »
L'orfèvrerie, ainsi que plusieurs autres arts , avait suivi jusque sous
fois par le nombre et par le talent , à tel point qu'ils arrivent à sur
passer, de l'avis de Viollet -le - Duc , tout ce qui a été fait dans l'anti
riens froidement classiques, mais qui ne sera pas démentie par les
Or, dans quels monuments retrouve - t -on les traces de cet épanouis
orfèvres mettaient- ils leur savoir -faire ? Je suis obligé de répéter ici,
une fois de plus , ce que j'ai dit pour tant d'autres arts : l'orfèvrerie
vivait par l'église et pour l'église. Ses produits les plus beaux , les
d'avoir honoré les restes des martyrs mis à mort par les Romains
temps jetèrent sur les corps des saints la plus riche des parures , un
gothique , elle offre, sur son pourtour, un total de dix niches trilobées ,
fini si surprenant , que les traits du visage, les rides , les chevelures,
les barbes , semblent avoir été taillés dans une pâte molle : l'orfèvre
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE. 303
s'est joué avec le métal comme les architectes avec la pierre . Les
creuset ; mais elle revit pour nous, fort heureusement , dans l'His
toire des Arts industriels de M. Labarte . Celle de saint Marcel , repro
avec portiques, nef et bas -côtés Très souvent les reliquaires sont
ainsi conçus dans la forme des cathédrales gothiques . Et ces cathé
1. Bulletin des commissions d'Art et d'Archéologie de Belgique, XV, 191. Cf. la notice
descriptive consacrée à ce monument , dans la Revue ae l'Ait chritien , par M. L. Cloquet.
304 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
ÉLEUTHÈRE
DE
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130.
Fig
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Pignon
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DE.
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rubis , les saphirs, les émeraudes , les perles , brillent chacun à leur
place , orne le frontispice de la seconde édition du Saint Louis de
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE. 307
vercle plat ou en dos d'âne. Tel est celui de saint Saturnin , à Tou
certain nombre d'autres . Mais , quelle que fût leur forme, ils étaient
celles des grands personnages, qui , placées dans les églises , ren
Encore dans l'église, l'art des orfèvres était appliqué aux autels ,
donner le baiser de paix aux fidèles), aux crosses, aux croix , aux
ces artistes, et combien de petits chefs -d'oeuvre ils nous ont légués
EUM.SU
géliaire qui a gardé son nom . Celui qui fut donné au monastère de
les cabochons , les perles , les émeraudes , les saphirs, les améthystes
A.VINE
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Antiquités
Bruxelles
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des
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du Sauveur. Peu à peu les livres sacrés deviennent d'autres reli . '
parcelle.
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L'évangéliaire que l'on pense avoir été donné par saint Louis à la
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ROGERIE
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appuyés sur leur lance ou sur leur écu , le grand réveil du jugement
treizième siècle ( 1 ) .
applique aux objets les plus divers , depuis ceux qui servent à l'exer
cice du culte, crucifix , écussons de croix , ciboires , crosses , reliquaires,
ustensiles les plus profanes, aux bassins , aux vases, aux coffrets, aux
ment « ressortir sur un fond d'émail des figures sévères , tracées par le
plus l'émail que pour servir de fond à la silhouette des figures, qu'ils
bleu clair, dont les plis sont indiqués par des filets d'or et des lignes
#HS
qui a été plus d'une fois signalée : je veux parler de la gravure des
vant guère que du dessin linéaire, mais qu'à ce moment une ère nou
velle s'ouvrit pour eux . Cette ère eut son point de départ , comme
pour la plupart des autres genres , dans l'imitation de la nature. Au
ques - unes sont assez énigmatiques pour faire le tourment des plus
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style d'art. Il ordonna que les espèces royales fussent partout reçues,
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pur de douze deniers , qu'il nomma gros tournois ou gros blancs, par
Philippe le Hardi, elles sont les chefs -d'oeuvre des suites monétaires
du moyen âge. Les types des moutons, des écus, des masses et des
royaux d'or sont empruntés aux images des sceaux , dont l'art s'était
temps une corrélation intime entre les monnaies et les sceaux , deux
Quant aux légendes , elles sont une émanation des sentiments d'ar
dente piété de Louis IX . C'est une prière qui s'élève vers le ciel . Le
travail des pièces de Philippe le Bel est moins simple et moins pur
figures ( 1 ) . »
pendant des monnaies. Leur matrice métallique offre dans son dessin
les qualités de vie, de mouvement et de vérité des belles médailles
roi Robert, où le souverain , assis sur son trône , que soutiennent des
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populaire a prêté tant de bons mots. Saint Louis est plus grave, et
son effigie offre le meilleur type de cet art sobre et digne qui est
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d'un jupon . Le trône est une espèce de pliant assez bas , dont la sim
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plate ou ovoïde, il lève bien haut son épée à deux tranchants , qui
c'est-à - dire de pointe , car les coups de taille ne mordent plus sur le
324 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE.
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épouse de saint Louis, les reines de France sont abritées sous une
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d'étude. Puis les villes à leur tour s'ingénient à reproduire sur ces
sphragistique.
l'étain , sont d'accord avec la pierre, et , tout aussi durs qu'elle, ont
hommes de goût.
法 的
CHAPITRE DOUZIÈME .
étoffes, ou les armures ; et, dans chacun de ces débris d'un autre
nies, toutes choses que les historiens politiques laissent de côté sans
5
FIG . 150 . CHANDELIER A PIED.
( Musée de Cluny. )
sur le goût si délicat de nos pères et , par la même occasion , sur leur
vie privée .
de grand style, est posé debout , sous un dais de serge verte , avec
lits de plume , des oreillers , des draps de lin ou de soie , des couver
milieu, des escabeaux et des pliants ; les sièges moëlleux sont incon
s'asseoient sur les dalles , les dames sur des coussins. Le chef de la
Tina
une époque très voisine de la nôtre . Tousces meubles sont faits pour
DODO
croirait ? ) son argenterie à lui , car , dans les inventaires des gens de
332 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
OCH Red
MIR
Linen
WIELUPA
variés , des huches de bois sculpté , des lits confortables, des armoi
1. Tout le Dictionnaire du mobilier de Viollet-le- Duc pourrait être cité à l'appui de cette
observation.
334 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE.
le menu du festin : le métier culinaire n'a- t- il pas été, lui aussi , honoré
du nom d'art ? Les dîneurs sont assis, suivant leur rang, sur des bancs
appelés des chaières ; un dais plus riche, plus élevé que les autres,
et peut quelquefois abriter deux personnes . Les lits sur lesquels les
seul l'abime qui sépare les meurs des deux sociétés . Ce sont les
elle est aussi infiniment plus commode. Les sièges sont disposés sur
ter à toutes les modifications exigées par les circonstances. Elle est
couteau , une cuiller ; mais il n'y a de fourchettes que pour ceux qui
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE. 335
os
با ار
Fig . 155 . UN COUVERT PRINCIER.
D'après un manuscrit du Saint-Graal.
Les hanaps sont souvent en métal ciselé. A côté d'eux brillent des
ou de vulgaires gobelets . Chez les princes , les verres à boire sont des
quise à Rome et qui ne contient pas moins d'un setier ; devant Turpin,
appelle le style .
ritables monuments , comme les cygnes et les paons rôtis ; des pâtés
Même sur les tables moins somptueuses, dans les dîners de noces
nous a conservé le souvenir, le menu fut ainsi composé par les ordon
noix , avec trois cents æufs; 7 ° des tartelettes et autres desserts , suivis
d'hypocras, de vins fins, et , pour finir, d'un choix varié d'épices, très
débuts du dix - septième siècle. Ce détail n'est peut- être pas indifférent
doit reconnaître qu'elle n'est pas toujours sans influence sur son
humeur , sur son temperament. Nous disons à chaque instant que tel
mets est « excitant » . Or , combien devaient être excités des gens dont
quelque chose , car ce n'est pas sans raison que l'humeur de l'âme
l'allure quelque peu solennelle , ils étaient eux- mêmes épicés, aroma
pure . Joinville nous apprend qu'il avait soin de tremper le vin de ses
valets, et que , s'il n'en faisait pas autant pour le sien , le roi du moins
paraît traditionnelle dans certains pays du nord et qui s'y est con
carafe pleine d'eau , mais il n'en versait point dans son vin . Un jour,
ses fonctions, dînait avec lui ; tout en mangeant, il lui fit l'obser
vation que l'eau ne lui servait à rien , puisqu'il n'en mêlait jamais
1. Sur les crus les plus renommés au treizième siècle, et sur la culture de la vigne en
général, voyez Saint Louis, son gouvernement et sa politique, par Lecoy de la Marche,
p. 310 et suiv.
Le treizième siècle. 22
342 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
boire son vin pur. « Laissez - moi , leur dit - il , boire d'abord le vin ; je
boirai l'eau ensuite . » Comme c'était un usage reçu et que cela reve
nait au même , ils finirent par le lui permettre . Mais , quand il eut
Ces vins capiteux , d'un usage si répandu, n'étaient donc pas aussi
croire que l'ivresse était alors un phénomène assez rare, car non
nent pas de dispositions contre elle, mais , dans toutes les critiques
uniquement des villageois pauvres . Sauf dans les contrées tout à fait
et il l'emploie surtout pour les volailles. Sa table n'est donc pas celle
d'un indigent , tant s'en faut, et l'on y voit figurer, à côté des pots
riches . Toutefois ces derniers s'en font servir une bien plus grande
celle des habits, par son ordonnance de 1279 : chacun de ses sujets
ne dut plus avoir à ses repas qu'un nombre déterminé de plats , pro
Saint Louis agit plus sagement que son fils : il se contenta de prê
cher la réforme par l'exemple et le conseil . Il est vrai que son exem
toire , ce qu'il faisait assez souvent , il envoya ce qu'on lui avait servi
royale , après les avoir fait préalablement dépecer, pour faire croire
qu'il en mangeait. On prétend même que son dédain pour les lam
parfois trop bien , de tous côtés nous voyons les pauvres appelés à
partager leurs festins ou à en recueillir les restes. Les repas de corps
verselle . Ainsi les sujets les plus vulgaires nous fournissent l'occa
pères , et de constater que leur société était encore plus éloignée des
CHAPITRE TREIZIÈME .
Le siècle que nous étudions est un des plus dignes d'exercer cette
tefois il serait difficile, dans une étude comme celle- ci , de les séparer
déjections des vers, d'où il tira la soie , et puis les sucs des herbes,
réduire l'or en fil et à le mêler aux habits , aux draps , aux franges,
Il ne faut pas croire pourtant que les plaintes des orateurs sacrés
Mais on doit reconnaître qu'en réalité le luxe fait alors des progrès
trouve sur cette pente quelque peu glissante , et , si elle n'était retenue
par les efforts d'un monarque épris par- dessus tout de la simplicité ,
En effet, l'habillement des deux sexes est alors grandiose , mais prête
Depuis les invasions barbares , les hommes avaient porté des habits
courts. Mais , vers l'an 1100, une révolution s'opéra dans leur costume.
tera jusque vers 1340. C'est seulement sous le règne des premiers
Valois que sera inaugurée celle des nouveaux habits courts et ajus
tés , collants même , d'où sont issus les costumes modernes . Les con
clercs et les chevaliers sous les armes , vêtus d'une façon exception
taille par une ceinture ; par-dessus ces cottes , des surcots ou secondes
robes sans ceinture , presque aussi longues ; et par - dessus les surcots,
l'hiver, des chapes, des housses, des cotardies, des pelissons, c'est-à
davantage des femmes, bien qu'ils mettent quelquefois sur leur tête
fixés sur les hanches par un cordon appelé brayer, et des chausses ou
bas très montants , de couleur voyante , rejoignant les braies. Ils ont
enfin nous voulons pénétrer d'une façon plus intime dans les détails
de leur habillement, nous trouvons leur corps protégé par une pièce
DANA
a longtemps passé pour n'avoir pas été connue du moyen âge ; on est
même parti de là pour démontrer la malpropreté de ces temps soi
matin , lorsque vous vous lèverez , vous passerez d'abord votre che
mise où vos braies . »> On doit croire que cela pouvait très bien se
ANN
par d'autres indices) observait cet usage , et que son serviteur le plus
durant toute sa vie il ne lui avait jamais laissé voir que le bas de
riorer ce vêtement fin et fragile, qui était encore d'un prix assez
คน
Fig.
XIVe
siècle
DE
—
du
un.
plus haut , c'est - à- dire au treizième siècle, puisque nous trouvons dès
w
ww
354 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
Le costume des hommes est donc ample et élégant par lui -même.
drap teint fort coûteux , auquel saint Louis avait renoncé et dont
ordinairement rouge, employé pour les robes, les cottes d'armes , les
ils ont beau faire, on ne parlera jamais autant de leurs robes four
rées que du bout de manteau déchiré donné par saint Martin au
pauvre mendiant ( 1 ) . »
petit- gris utilisés pour la fourrure de ses habits dans un seul tri
tant un tissu assez commun , et saint Louis n'en portait même que
que maitre Robert était vêtu plus richement que ses père et mère ,
montre qu'à cette époque les différentes castes n'avaient déjà plus
fois de s'habiller mieux que leurs pères et aussi bien que leurs supé
régime, tels que le bon sénéchal , trouvaient encore une pareille pré
tention exorbitante ; mais enfin elle était tolérée par l'usage , et l'on
qui se faisait jour dans la législation et dans les moeurs, vers l'abais
sement des barrières sociales . Joinville , du reste , n'était pas plus parti
san des progrès du luxe chez les chevaliers ; il rappelait avec une noble
des cottes d'armes brodées adoptées sous son règne par les gen
autre. — Eh bien ! moi , lui répondit Philippe , j'ai tels atours brodés
à mes armes, qui m'ont coûté huit cents livres de parisis. Vous
n'est rien auprès du luxe qui éclate dans les toilettes féminines.
progrès aient été favorables, soit à l'art , soit aux bonnes moeurs .
On peut même affirmer que l'excès de coquetterie des femmes, qui
ΕΛΛΛΛΛΛΛΛΗΛΗ
T. SELLIER
Fig. 166 . COSTUMES DE MARCHANDS.
d'après un vitrail de la cathédrale de Bourges.
faste a valu bien des maux à notre pays ; et, n'eût- il pas influé sur
EE
EE
E
20
J.RONAULT E.MEINER
Fig. 167. – COSTUMES DE CHANGEURS,
d'après un vitrail de la cathédrale du Mars.
à son épouse . Mais la réciproque est juste, et cette même loi vous
oblige à vous conformer aussi à mes désirs ; vous allez donc me faire
question ( 1 ) . »
voit les modes devenir plus libres et les orateurs de la chaire les
bande d'étoffe raide qui était destinée à serrer le buste , comme le fut
fait les pieds. La ceinture est transportée sur la cotte , ou sur la robe
1. Bibl. nat., ms. latin 15034. Il faut se rappeler, pour comprendre cette anecdote,
que le costume masculin et le costume féminin n'offraient pas alors les différences essen
tielles qui les ont séparés depuis.
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE. 359
troubler les hommes qui prient. Pour sortir, on est obligé de relever
la queue de la robe ; la décence elle-même a quelquefois à en souf
abus est une exception à peine risquée par certaines femmes légères.
Quant aux audacieuses exhibitions qui sont entrées dans nos meurs
et dessinant le buste . Les draps fins, les soieries , les étoffes les plus
nées ; ce sont enfin tous les colifichets que peut inventer la frivolité.
1. Ibid ., p. 236.
362 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
qui veut que cette opération ait été pratiquée pour la première fois
à Bruges , en 1476 .
employés par les femmes comme par les hommes. Seulement elles y
et, comme toujours, elles les portent trop étroits. « Qu'ils prennent
garde à leur âme, dit Jacques de Vitry , ceux qui fabriquent des
résille . Les cheveux tombant en nattes, cette coiffure que l'on prend
de mise. Les jeunes filles laissent pendre sur le dos leur chevelure
crâne . Un peu plus tard , elles torturent leurs cheveux d'une autre
manière : elles se font sur les tempes deux touffes d'une proémi
celles qui se coiffent ainsi au cat cornu , c'est- à- dire chat -huant , en
thèses , nous fait voir que l'exploitation des têtes vivantes, pratiquée
miracles. Il vit venir, un jour, à lui plusieurs dames qui lui demandè
déposer vos boucles et tous les vains ornements qui couvrent votre
tête ; je consentirai alors à prier Dieu pour vous , et j'ai une double
raison de croire que vous serez guérie de la sorte, mais pas autre
rigides critiques de la chaire qui , par état , ne voyaient que les abus
Les larges manteaux , les vêtements aux mille plis donnent à la plu
part des classes dont se compose la société une allure noble et digne,
C'est encore là un des côtés par lesquels nous nous éloignons le plus
mếmes, nous trouverions plus d'un passage , plus d'un exemple édi
fiant pouvant faire contre - poids à ses amères critiques . Tantôt nous
parole de Dieu les a touchées, brûler leurs vains atours sur la place
et la beauté morale leur était encore plus chère que la parure du corps.
* *
CHAPITRE QUATORZIÈME.
fête des yeux aussi bien qu'une fête du cæur . Ceux - ci , à leur tour, y
qui est le prologue , elle débute par la Nativité de Jésus, le plus tou
cheminée de nos pères est immense : c'est un tronc d'arbre tout entier
ils en conserveront les cendres toute l'année , pour les rallumer l'été
quand ils redouteront les effets de la foudre. Leur maison est décorée
qui est moins agréable) on paye ses dettes, car cette date est une
ils font pleurer les autres . Tels sont les principaux usages observés
une chose bizarre , et qui prouve toute la force des traditions anti
( l'an neuf ) , parce qu'il inaugurait l'année chez les Romains , de donner
de consulter le sort , etc. Les spectacles ramenés par cette date sont
aussi un vestige des folies païennes : c'est cette fameuse Fête des fous,
que l'Église eut tant de peine à déraciner. Inutile de dire que les
pour l'interdire . Elle avait été supprimée dans la plupart des dio
nos pères, que la Fête des fous n'était dans certains pays que la Fête
offices solennels et des mystères : elle est déjà la fête des Rois , et
pagnent ; mais cette fête perd son nom savant pour prendre le nom
tiques qui lui sont distribués partout avec non moins de prodigalité.
abaissent la majesté de leur rang jusqu'à laver les pieds des pauvres
plus le prince honore les petits , plus il est honoré. Aujourd'hui les
font mépriser.
par les ténèbres firent peu à peu renoncer à cette tradition édifiante .
C'est dans cette nuit , sacrée entre toutes , qu'on bénit solennelle
dont tous les dimanches de l'année ne sont , pour ainsi dire, que les
octaves ; » et tout ce peuple , qui n'a pas dormi , trouve encore dans
des chants sacrés, qu'on ne lui rogne pas une syllabe. Au contraire,
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE . 373
vers les fêtes nocturnes d'un tout autre genre qui les ont supplan
Le treizième siècle. 24
374 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE ,
tanée...
nous dit- il , on ne leur donne que les eulogies, ou le pain bénit, « par
l'Église , qui est une mère tendre et indulgente, même pour ses
enfants infidèles, veut ménager leur amour - propre, éviter les médi
vent aussi l'avis d'avoir à surveiller leurs enfants pendant toute cette
car, après tant de fatigues, on se met enfin à table, et tous les bons
jour de Pâques, sermon court et diner long , » dit lui - même l'aus
jour après Pâques . Il faut avouer pourtant que ces abus ne parais
sent pas bien graves ; David ne dansa- t - il pas devant l'arche pour
épancher la joie qui débordait de son cœur ? Et les épouses qui pre
naient de telles libertés ne devaient- elles pas trouver à qui parler ?
temps désignés par ces trois jours , avant la loi , sous la loi , et sous
hommes , mais qui , après avoir régné pendant les deux premiers
âges , est maintenant presque déchu de sa puissance par la propa
paraît - il , à Paris jusque vers 1730 ; on pourrait lui trouver une quan
les maisons de leur dépendance. On vit donc naître , vers cette épo
est mon sang . » Toutefois des nuages récents étaient venus obscur
sion de l'hérésie , Dieu lui - même s'en ménageait une autre , plus
pieuse vierge fut encore vingt ans sans oser faire savoir au monde
son évêque , Robert de Torote, décida par décret synodal que toutes
susciter des obstacles à une dévotion qu'il savait devoir lui être
cette ville . Nous savons tous par nous- mêmes que nulle cérémonie
siècle, et, d'ailleurs, elles ne sont pas de celles qui peuvent obstruer
le chemin des âmes : nos yeux seuls ont perdu leur fête .
qui, étant ainsi initiés à tous les mystères, y prenaient le plus vif
prêcher, ce jour-là , des sermons sur tous les saints ; mais souvent
tembre . Le culte des morts , on le voit , n'est pas d'hier : chacun rend
alors à ceux qui lui sont chers les quatre devoirs pieux mentionnés
quelque part dans saint Thomas, les obsèques , les prières, les aumônes
poussée très loin , comme on en peut juger par les miniatures des
livres d'heures .
neur des saints, il faut en citer deux qui devinrent très vite popu
ques ( 1 ) . » Mais il y avait une fête ancienne qui se célébrait alors plus
par cette solennité unique en son genre , ne fût -ce que pour les
d'Arezzo
Florence
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lD'après
Spinelli
à'église
fresque
une rès
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de
BSÈQUES
BENOIT
SAINT
173.
Fig
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–
O
joignent aux prêtres ; mais ils n'ont pas tous la même constance , et ,
des jeux , des réunions profanes, des bombances, qui parfois vont un
peu trop loin . C'est pourquoi certains synodes prohibent ces vigiles ,
ou du moins leurs abus ; mais ils sont impuissants , et le pape Ur
antique : ne faut -il pas faire provision de forces pour chanter avec
allumez le feu ; voici venir saint Martin avec ses bras nus (car il n'a
lève tiède et clair, car cette fête a le don de ramener pour quelque
temps les beaux jours . La matinée est consacrée tout entière aux
1
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE . 385
n'est que justice, car celui dont on célèbre la mémoire les a tant
aimés, que sa fête est la leur. Le pauvre de saint Martin , dans les
le pain du corps. A Saint- Omer, par une exception qui n'a lieu que
trois fois par an , les lépreux sont autorisés, sans doute en mémoire
la basilique de Tours : les rois, les grands seigneurs lui offrent des
monnaies à l'effigie de son patron, des vases d’or, des draps de soie .
Enfin , à l'animation produite par toutes ces affaires, par ces cérémo
» Mais cela n'est rien encore . Voici le soir, voici les réjouis
protestante . Le repas fini , on chante des ballades, des lieds, des can
Flandre, on voit des feux de joie s'allumer sur les hauteurs voisines .
ceint de feuillage et courent ainsi par les rues, faisant résonner des
ont droit à une mention spéciale . Il ne sera peut - être pas sans
des conjoints, l'usage voulait dès lors que la demande fût adressée
les princes et les grands seigneurs de tous les temps ; c'est pour y
l'un à l'autre) . Lorsque saint Louis , âgé de vingt ans , fit demander
exerça sur lui une pression très adroite , qui montre d'une façon
tesse , l'ayant emporté , maria plus tard ses deux filles cadettes au
roi d'Angleterre et à son frère , et la dernière fut épousée avec une
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE. 389
et , comme elle était en âge , son mariage fut célébré moins d'un
San
Dim
os
Igor
plus tard , dans le concile de Trente. Mais les fiançailles par paroles
vie du sire de Joinville , qui avait été fiancé dès son enfance avec
ment ces avantages qui les ont fait subsister jusqu'à nos jours dans
la France , sous le regime dotal s'ils vivent au midi , dans les pays
nique , ou du droit au tiers des acquêts admis par celle- ci , est le plus
rait son douaire même sur les biens advenus à son époux durant le
mariage par voie de succession . C'est sur ces bases que sont conclus
mais , dans les autres classes , ce qu'on appelle les mariages d'argent
parait être un peu moins répandu . Dans tous les cas , cet abus, qui
pas la fiancée qu'on devrait conduire à l'autel , mais bien son argent
ou ses vaches ( 1 ) . »
publier des bans était dès lors en pleine vigueur. Il apparaît pour
la première fois dans les statuts rédigés par Eudes de Sully , évêque
Sur le chemin, le sol est jonché d'herbe verte , les rues sont « encour
se diront le soir :
L
Fig . 175 . LES FIANÇAILLES ET LE DON DE L'ANNEAU.
D'après un manuscrit du Vatican.
lumières , et les vitraux aux mille couleurs , et les statues des saints,
en habit noir, dans une salle froide et nue, au milieu d'un appareil
fait pour glacer les cæurs les plus chauds . Cette coutume de célé
qui, d'après le récit d'Étienne de Bourbon , fut écrasé par une des
2.
Fig. 176. LA BÉNÉDICTION NUPTIALE .
D'après un manuscrit du Vatican .
livre entre les mains , et sur ce livre un petit anneau d'argent qui
l'esprit concret des hommes du douzième siècle , que l'on disait com
annelet d'argent est aussi précieux que les riches bagues . « De cet
souvenir vivant de l'antique loi des Francs Saliens, qui voulait que
lui mettre entre les bras les champs, les bois et les manoirs dont il
396 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE .
frapper pour cet usage des deniers spéciaux , pour espouser. C'est
plus qu'à donner aux époux une marque du respect dont le nouveau
apprenne lui - même à lui être agréables dans votre corps et dans
il est à peine utile d'ajouter, avec les vieux rituels , que cette sorte
époux devront cacher leur vie intime, que Dieu bénit . J'aurais pré
féré qu'on eût gardé la forme même du voile antique , et qu'on eût
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE , 397
celle que l'Église romaine a insérée dans ses livres vraiment æcumé
tôt deux heures que tout ce monde de parents et d'amis est recueilli ,
sager une prospérité dans laquelle , en tout cas , ce vieux reste des
nent aux classes aisées , ils donnent dans leur maison des fêtes qui
aux pauvres. Des robes , des effets de toute sorte sont offerts aussi
est représenté souvent par un clerc vénérable , qui mêle ses graves
ont conservées les anciens rituels. Puis il prend l'encensoir des mains
de l'un des deux clercs, y jette les parfums liturgiques , et les répand
al
CHAPITRE QUINZIÈME .
LA MUSIQUE .
à peu près . Mais au moyen âge, au contraire, elle est l'objet d'une
faits dans cette voie . Un pape , saint Grégoire le Grand , avait res
tauré le chant sacré , auquel son nom est resté attaché , et fait de
soutenir les masses chorales par des voix ou des instruments exécu
ment disparaître.
1. Isidore, Sentences.
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE. 403
sions sont déjà mesurés . Les notes écrites prennent des formes
ceaux à deux, à trois, à quatre parties , combinés, soit pour les voix ,
avec ces caractères ; mais ce n'est peut -être qu'une affaire d'habitude ,
l'effet qu'on en attendait d'abord : l'oreille est plus rebelle que les
des contes et des légendes qui ont bercé avec eux notre enfance,
les sculptures et les textes du temps , ont permis d'en dresser la liste
1. Histoire de la Musique, p. 99 .
Le treizième siècle. 26
406 LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE.
res (genre timbale) ; les clochettes, les cymbales, les grelots, le trian
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE. 407
més sont placés par les statuaires ou les peintres dans les mains des
porains l'idéal des concerts célestes ; mais , sur la terre, ils n'étaient
les églises : c'étaient surtout , avec les orgues, le psaltérion , fait pour
le courage des soldats : c'étaient les cors, les trompes et toute leur
traient plutôt dans les mains des ménestrels, qui couraient les
hibait que les chanteurs trop libres et les baladins ) . Ils se trouvaient
aussi dans celles des jongleurs , qui colportaient partout les poésies
cour des artistes de ces deux catégories , quand il traitait ses barons ;
que les ménestreux eussent fini leurs chants ; mais , dans la vie
culte rendu sous la tente au Dieu des armées. Il parait même qu'il
LE TREIZIÈME SIÈCLE ARTISTIQUE. 409
تي
اس
éclat que nous les voyons prendre leur essor. Il n'est plus permis
saint Louis les a négligées. Elles étaient cultivées dans les écoles,
tique très accentué que l'histoire impartiale constate dans cet ordre
d'idées .
à se
mité , ou tout au moins la gravité, caractère qui ne tardera pas
qui effraye les âmes timides , mais cette gravité sereine , attrayante,
liberté dans l'unité , qui pousse les artistes à se dégager des entraves
les plus diverses , dans le type humain , dans le règne animal, dans
le règne végétal .
n'est pas fait pour l'art : il est fait pour honorer Dieu et pour éclairer
le peuple. L'édifice de l'église, qui concentre en lui tous les arts, est
y boivent par les yeux tout ce que la voix des docteurs ne peut leur
Aussi l'art est - il populaire, au lieu d'être, comme il l'a été depuis
ginal , au lieu d'un style éclectique , qui est l'absence même du style .
même est presque toujours sorti des rangs les plus obscurs de la foule.
Toutes les villes , tous les villages veulent avoir une belle église ,
mais aussi par une sorte d'aspiration naturelle vers la beauté parfaite.
Tous les chefs de famille veulent avoir chez eux , pour protéger leur
Les enfants eux - mêmes sont avides de contempler, avec leurs yeux
admirer de plus près le livre aux riches enluminures , si lourd pour ses
petites mains , qu'elle l'a posé à terre devant elle . Cette peinture est
pour nous tout un enseignement ; elle nous redit , sous une autre
pères ont été savants , s'ils ont été poètes, s'ils ont été artistes ,
c'est qu'ils ont été chrétiens dans leur vie publique comme dans leur
Et l'on ose dire que nous ne pourrions les imiter sans faire reculer
issue du moyen âge ; elle s'y retrouve en germe, elle en est le fruit :
Pages
Introduction. DE L'ART AU MOYEN AGE. 5
Chapitre Premier. - L'ARCHITECTURE RELIGIEUSE EN
GÉNÉRAL. — Les trois styles successifs de l'architecture chrétienne. -
Origine de la forme de nos églises. - La basilique païenne; son appropria.
tion aux besoins du culte chrétien . - Premiers perfectionnements.
Naissance de l'architecture romane ; son principe fondamental. Procédés
imaginés pour voûter l'église : voûte d'arêtes; croisées d'ogives. - Invention
de l'arc- boutant ; avènement du style gothique, ou plutôt français, qui est
celui du treizième siècle --- La prétendue ogive et son origine. - Caractères
généraux du gothique . — Plan de l'église. — Élévation ; les trois étages de
la nef. – Effet de l'ensemble ; impression morale qu'il produit. - Formes
symboliques ; pensée générale des constructeurs. 19
Chapitre Deuxième . - L'ÉGLISE GOTHIQUE ET SES VA
RIÉTÉS. - Fixité des styles de chaque période au moyen âge. — Clas
sification des différents genres de l'architecture gothique. Gothique
primitif : ses caractères et ses monuments principaux. - Gothique lancéolé,
premier genre propre au treizième siècle. – Modifications qu'il apporte à
l'extérieur : forme particulière d'arc brisé ; arcs -boutants doubles. -- A l'inté
rieur : perfectionnement de la croisée d'ogives ; claire - voie ; pilier à colon
nettes. — Élévation croissante du vaisseau . - Monuments du style lancéolé.
- Gothique rayonnant , genre du treizième siècle par excellence. -- Ses
caractères à l'extérieur : arcs boutants quadruples ; chapelles absidiales ;
clochers, portails, façade. – A l'intérieur : piliers formés de faisceaux de
colonnettes ; agrandissement de la fenêtre ; remplage, rosaces, éléments
rayonnants. — Notre Dame de Paris, type des différents genres gothiques ;
son fondateur ; sa galeries de statues ; son éloge par un contemporain .
Les architectes ; obscurité de la plupart. — Décadence du gothique ; style
flamboyant. — Arrêt produit par la Réforme. 51
Chapitre Troisième . LES CONSTRUCTIONS MONAS
TIQUES ET ROYALES . Édifices mixtes, ayant encore un caractère
religieux : les monastères ; les hôpitaux . -- Le Mont-Saint - Michel ; Cluny
et ses prieurés ; Saint - Germain des Prés, etc. · Hospices fondés par saint
Louis : les Quinze - Vingts. – Hôpitaux d'Ourscamps, de Tonnerre, de
Beaune . Caractère pratique des établissements de ce genre au moyen
ARCHITECTURE RELIGIEUSE .
Pages
1. Plan de la basilique païenne appropriée au culte chrétien. 22
2. Église primitive de Saint- Étienne de Caen ; spécimen du plan roman . 25
3. Voûte d'arêtes. 27
4. Cathédrale de Rouen ; spécimen de voûte en croisées d'ogives. 28
5. Église Saint-Sernin de Toulouse ; spécimen de basilique romane. 29
6. Saint- Front de Périgueux ; autre type d'église romane. 32
7. Coupe transversale de l'église Saint- Pierre et Saint- Paul, à Neuviller ;
type d'arc -boutant simple. 33
8. Formation naturelle de la prétendue ogive. 36
9. Église de Saint- Denis en France, un des plus anciens édifices gothiques . 37
10. Notre- Dame de Paris ; spécimen de plan gothique. 41
11. Église Saint-Ouen de Rouen ; plan gothique avec chapelle absidiale. 42
12. Cathédrale de Chartres ; spécimen de plan gothique avec sept cha
pelles absidiales. 43
13. Cathédrale du Mans ; abside entourée de chapelles et de bas- côtés
doubles. 44
14. Cathédrale d'Amiens ; coupe transversale : arcades, triforium , clerestory. 45
15. Saint-Remi de Reims ; spécimen de la croisée d'ogives et de la colonne
du gothique primitif. 53
16. Tour de la cathédrale de Laon ; spécimen des arcades extérieures du
gothique primitif. 56
17. Types d'arcs brisés : arc lancéolé ; arc à 3 points ; arc à 4 points. 58
18. Pinacle de la cathédrale de Reims ; arc- boutant double, appuyé sur
pilier butant à colonnettes et à clochetons, 60
26. Église Saint - Ouen de Rouen ; claire-voie continuant les fenêtres supé- Pages
rieures. 70
27. Arceaux trilobés ou en feuille de trèfle. 72
28. Rosace rayonnante. 72
29. Notre- Dame de Paris, mélange des différents genres gothiques ; façade
avec galerie de statues. 73
30. Notre -Dame la Grande, à Poitiers ; façade avec galerie de sta'ues. 76
31. Rosace flamboyante, à la cathédrale de. Lincoln . 80
32. Fenêtre flamboyante, à l'église Saint- Lambert de Münster. 80
33. Arcs brisés flamboyants et surbaissés. 82
34. Cathédrale d'Alby ; spécimen de style flamboyant. 84
35. Saint-Étienne du Mont , à Paris ; intérieur : le tombeau de sainte Gene
viève. 85
36. Abbaye du Mont-Saint-Michel. 89
37. Ancienne abbaye de Saint-Germain- des- Prés, prise du côté de l'orient. 92
38. Réfectoire du prieuré de Saint-Martin -des- Champs (aujourd'hui le
Conservatoire des Arts et métiers ) . 93
39. Ancien hôpital de Beaune. 96
40. Palais de saint Louis, avec la Sainte - Chapelle et le verger royal; minia.
ture du livre d'heures du duc Jean de Berry. IOI
41. Château de Vincennes ; donjon , chapelle et remparts. 101
42. Sainte- Chapelle du Palais, à Paris. 108
43. Palais des Tournelles, à Paris, d'après un ancien dessin . I12
44. Château du Louvre au treizième siècle. 113
45. Château de Montlhéry ; donjon et ruines de l'enceinte. I 20
46. La tour du Temple, à Paris, d'après un dessin de Nicolle. I 21
47. Château de Dinan ; donjon et remparts. 125
48. Château de Rouen ; enceinte fortifiée. 128
49. Château de Clisson ; manoir. 129
50. Porte de la ville d'Aigues -Mortes ; côté extérieur. 131
51. La Bastille de Paris, démolie en 1789. 136
52. Le Krak des chevaliers de l'Hôpital, en Syrie, restitué d'après les ruines
actuelles. 137
53. Maison du moyen âge, à Rouen . 140
54. Maison du moyen âge, à Amiens. 142
55. Beffroi de Tournai. 144
56. Beffroi de Béthune, 145
TABLE DES GRAVURES. 421
SCULPTURE .
PEINTURE .
113. Initiale à rinceaux, tirée d'une bible du séminaire de Tournai. Pages 267
114. Initiale fleurie, tirée d'un graduel du Musée germanique de Nuremberg. 268
115. Initiale à histoires superposées, tirée d'un évangéliaire de la Sainte
Chapelle. 269
116. Charles le Chauve sur son trône ; tiré du psautier de ce prince. 270
117. Abraham combattant ; tiré du psautier de saint Louis. 272
118. Joinville et ses compagnons ; tiré du Credo de Joinville. 273
119. Saint Louis traversant Paris ; tiré d'un manuscrit de la Bibliothèque
royale de Bruxelles . 276
120. Le roi de Navarre armé chevalier ; tiré d'un manuscrit de la Biblio .
thèque nationale . 277
121. Les capitouls de Toulouse ; tiré d'un manuscrit du quinzième siècle . 278
122. Frontispice de la Consécration des églises ; page du pontifical de
Ferry de Cluny. 281
TAPISSERIE .
ORFÈVRERIE .
MOBILIER .
COSTUME .
161. Saint Louis en costume royal, d'après un vitrail de l'église de Poissy. 349
162. Philippe le Hardi en costume royal , d'après un manuscrit de la Biblio
thèque de Bourgogne, à Bruxelles. 350
163. Marguerite de Provence et Blanche de Castille, d'après Montfaucon . 351
164. Costumes de seigneurs, d'après un manuscrit du quatorzième siècle. 352
TABLE DES GRAVURES. 425
CÉRÉMONIES .
MUSIQUE
179 Ange jouant du crowth , d'après une peinture murale de l'église Saint
Martin , à Hal . 406
180. Ange jouant de la guiterne, d'après une peinture murale de la même
407
église.
181. Ange sonnant de la trompette, d'après une peinture murale de la même
église. 408
182. Ange jouant du lympanon , d'après une peinture murale de la même
église. 409
183. Musiciens et ménestrels, d'après un manuscrit de la Bibliothèque
royale de Bruxelles . 410
t
1
ca .
721657
Nb843
131
41
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