Fayolle 2004
Fayolle 2004
Fayolle 2004
Alain Fayolle
Revue internationale P.M.E. : économie et gestion de la petite et moyenne entreprise, vol. 17, n° 1, 2004, p.
101-121.
URI: http://id.erudit.org/iderudit/1008453ar
DOI: 10.7202/1008453ar
Note : les règles d'écriture des références bibliographiques peuvent varier selon les différents domaines du savoir.
Ce document est protégé par la loi sur le droit d'auteur. L'utilisation des services d'Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique
Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l'Université de Montréal, l'Université Laval et l'Université du Québec à
Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. Érudit offre des services d'édition numérique de documents
MOTS CLÉS
RÉSUMÉ
Ce travail présente des réflexions relatives à la formulation d’une nouvelle vision
de l’objet de recherche au cœur, selon nous, de la recherche en entrepreneuriat.
Nous décrivons, notamment, le concept de « situation entrepreneuriale ». Par
situation entrepreneuriale, nous entendons toute situation qui relie un individu, très
fortement engagé (consommation de ressources vitales : temps, argent, énergie,
etc.) dans une action entrepreneuriale (comportements, décisions, activités, etc.),
et un projet ou une organisation utilisé comme support de création de valeur. Une
des caractéristiques, voire une des spécificités de la perspective que nous adop-
tons est que nous ne nous intéressons pas seulement à un acteur (individu ou
groupe d’individus), une organisation ou une entreprise, mais bien davantage à un
couple sujet-objet, individu-projet ou encore individu-organisation. Ce couple ne
peut pas être dissocié dans toute approche scientifique (observation, analyse) d’une
situation entrepreneuriale. Nous pensons donc qu’une situation entrepreneuriale
peut être caractérisée par une conjonction sujet-objet et par un niveau de proximité
L’AUTEUR
ALAIN FAYOLLE est maître de conférences à l’Institut national polytechnique de Grenoble après
avoir été pendant 10 ans professeur d’entrepreneuriat et de management stratégique à l’EM
Lyon. Il est également chercheur au CERAG et dirige une équipe de recherche technologique,
EPI, de l’Université Pierre-Mendès-France et de l’Institut national polytechnique de Grenoble,
spécialisée dans l’étude des processus de création d’activités innovantes. Adresse : INPG-
ESISAR, 50, rue Barthélemy-de-Laffemas, B.P. 54, 26902 Valence, Cédex 9, France. Courriel :
<alain.fayolle@esisar.inpg.fr>.
Tiré de : Revue internationale P.M.E., vol. 17, no 1, sous la direction de Pierre-André Julien • PME1701N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
102 Alain FAYOLLE
ou de distance entre ces deux éléments. Dans ces conditions, une situation
entrepreneuriale pourrait être qualifiée par la « mesure » de la distance séparant
l’objet et le sujet impliqués dans cette situation. L’objet de recherche au cœur de
l’entrepreneuriat correspond, de notre point de vue, à ces situations entrepreneu-
riales qu’il est nécessaire de décrire et d’expliquer dans leurs dimensions statique
et dynamique, afin que les connaissances produites par ce type de recherche
puissent faciliter l’action des entrepreneurs et de ceux qui les accompagnent, tout
en accroissant l’efficience des processus d’action et de décision.
ABSTRACT
This work presents our thoughts on a new definition of the research object at the
heart of the research in entrepreneurship. We therefore propose a conceptual model
and a key concept which is the “entrepreneurial situation”. An “ entrepreneurial
situation” is any situation which links a strongly committed individual (use of vital
resources: time, money, energy, etc.) to an entrepreneurial action (decisions,
behaviours, tasks, etc.) and a project or an organisation. One of the characteristics,
or even specificity of our perspective is that we are not looking at just an actor,
individual or group, an organisation or company, but rather a subject-object, or
individual-project, individual-organisation couple. This couple can not be separated
in any scientific approach (observation, analysis) of an “entrepreneurial situation”.
We therefore think that an “entrepreneurial situation” can be characterised by a
subject-object conjunction, and by a level of proximity or distancing index between
the two elements. Under such conditions, an “entrepreneurial situation” could be
qualified by the “measuring” of a distance or proximity between subject and object
involved in it. The object of research at the heart of entrepreneurship corresponds,
we feel, to these “entrepreneurial situations” which need describing, explaining and
including in their dynamism and evolution, so that from the scientific knowledge
produced, the actions of entrepreneurs and accompanying support structures can
be made easier and more efficient.
RESUMEN
Este trabajo presenta reflexiones relacionadas a la formulación de una nueva visión
del objeto de investigación en el centro, según nosotros, de la investigación
empresarial. Nosotros describimos, especialemente, el concepto de « situación
empresarial ». Por situación empresarial, nosotros entendemos toda situación que
asocia un individuo, fuertemente comprometido (consumo de recursos vitales :
tiempo, dinero, energía...) en una acción empresarial (comportamientos, decisiones,
actividades...), y un proyecto o una organización utilizada como soporte de creación
de valor. Una de las características, incluso una de las especificidades de la
perspectiva que nosotros adoptamos es que no nos interesamos solamente por
un actor (individuo u grupo de individuos), una organización o una empresa, sino
por una pareja sujeto / objeto, individuo / proyecto u individuo / organización. Este
duo no puede estar disociado en todo enfoque científico (observación, analisis) de
una situación empresarial. Nosotros pensamos, entonces, que una situación
empresarial puede ser caracterizada por una conjunción sujeto / objeto y por un
nivel de proximidad o de distancia entre estos dos elementos. En estas condiciones,
una situación empresarial podria ser calificada por la « medida » de la distancia
Tiré de : Revue internationale P.M.E., vol. 17, no 1, sous la direction de Pierre-André Julien • PME1701N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
À la recherche du cœur de l’entrepreneuriat : vers une nouvelle vision du domaine 103
ZUSAMMENFASSUNG
Diese Arbeit stellt Überlegungen betreffend der Formulierung eines neuen
Forschungsobjekts dar, der Forschung in Unternehmertum. Wir beschreiben ins-
besondere das Konzept der unternehmerischen Situation. Unter einer unterneh-
merischen Situation verstehen wir jede Situation, welche ein Individuum an eine
unternehmerische Aktion (Verhalten, Entscheidungen, Aktivitäten usw.) und an ein
werteschaffendes Projekt verpflichtet und verbindet. Eine der Eigenschaften und
sogar eine der Besonderheiten der Perspektive, die wir annehmen, ist, dass wir
uns nicht nur für einen Beteiligten (Individuum oder Gruppeindividuen), eine
Organisation oder ein Unternehmen interessieren. Wir betrachten eine Verbindung
zwischen Subjekt und Objekt, so beispielsweise Individuum / Projekt oder
Individuum / Organisation. Wir denken, dass eine unternehmerische Situation cha-
rakterisiert ist durch diese Kombination und durch ein Nähe- oder ein Distanzniveau
zwischen diesen zwei Elementen.
Der zentrale Forschungsgegenstand im Unternehmertum entspricht nach
unserer Meinung der definierten Unternehmersituation. Diese Situation ist zu
beschreiben und zu erklären in ihren statischen und dynamischen Dimensionen.
Die Forschungserkenntnisse erlauben, einerseits das unternehmerische Verhalten
zu erkennen und vereinfacht darzustellen um andererseits die Leistungsfähigkeit
der Aktionsvorgänge und der Entscheidungen zu steigern.
Introduction
Le champ de l’entrepreneuriat est très diversifié et ses multiples composantes sont
étudiées par des économistes, des sociologues, des historiens, des psychologues,
des spécialistes des sciences du comportement et du management (Filion, 1997).
Même si des contributions de recherche significatives ont été faites dans le domaine
de l’entrepreneuriat, quelques chercheurs considèrent que l’étude scientifique de
ce champ en est encore à ses premiers pas (Brazeal et Herbert, 1999). Les approches
disciplinaires indépendantes ne suffisent plus aujourd’hui pour développer des
connaissances de nature à expliquer un phénomène qui apparaît de plus en plus
difficile à saisir (Wortman, 1987 ; Gartner, 1989 ; Bruyat et Julien, 2001). La com-
plexité des objets et du champ de recherche accroît considérablement les problèmes
qu’ont à résoudre les chercheurs et explique probablement en partie le manque de
continuité dans les travaux de recherche (Wortman, 1987 ; Gartner, 1989 ; Bruyat,
1993).
Tiré de : Revue internationale P.M.E., vol. 17, no 1, sous la direction de Pierre-André Julien • PME1701N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
104 Alain FAYOLLE
Dans ces conditions, il n’est pas surprenant que nous constations depuis
quelques années un très fort développement des contributions épistémologiques,
théoriques et méthodologiques en entrepreneuriat. La plupart d’entre elles tendent
à affirmer l’identité du champ et un positionnement en tant que champ scientifique
autonome (Johannisson et Landström, 1999). De nouvelles questions de recherche
apparaissent également qui tendent à souligner l’importance de quelques approches
conceptuelles1 et révèlent la nécessité de se concentrer sur l’étude des processus
(Bouchikhi, 1993 ; Bull et Willard, 1993 ; Venkataraman, 1997 ; Sarasvathy, 2000 ;
Bruyat et Julien, 2001).
Nous inscrivons ce travail dans ce contexte de foisonnement d’idées et de
travaux à la recherche, au fond, de perspectives nouvelles. L’objectif de notre
contribution est de présenter une vision du domaine comprenant la définition d’un
objet singulier de recherche et quelques idées sur la façon de l’étudier. La dernière
section est entièrement consacrée à ce projet de représentation de ce que nous
pensons être au cœur du domaine (section 4). Pour en arriver à la formulation de
ces conceptions qui constituent l’apport principal de la contribution, nous avons
souhaité suivre un cheminement particulier. Tout d’abord, nous avons voulu
montrer, même brièvement, toute la diversité qui caractérise aujourd’hui le champ
de l’entrepreneuriat et les questionnements de recherche (section 1). Pour bien
insister sur le fait que notre regard n’est qu’une façon, parmi d’autres, de voir le
domaine et que notre objet ne s’intéresse qu’à un sous-ensemble des questions qui
se posent dans le champ. Nous avons ensuite resserré notre analyse de la littérature
en la focalisant sur trois principaux courants de recherche qui s’intéressent à la
notion de processus (section 2). Cela est important pour nous dans la mesure où
nous inscrivons nos travaux en général et celui-ci, en particulier, dans cette orien-
tation processus. Nous essayons d’exposer les raisons qui nous amènent à écarter
les deux premières écoles et à ne retenir la troisième que d’une façon partielle. Il
nous a semblé difficile, enfin, d’entrer dans la formulation d’une vision nouvelle
du domaine sans expliciter notre positionnement de chercheur (section 3), lequel
influence, nous semble t-il, la visée et la manière dont nous regardons l’objet.
Tiré de : Revue internationale P.M.E., vol. 17, no 1, sous la direction de Pierre-André Julien • PME1701N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
À la recherche du cœur de l’entrepreneuriat : vers une nouvelle vision du domaine 105
ture de ce champ par toutes les différentes disciplines qui s’y sont intéressées.
Cela étant, nous avons souhaité, dans un but pédagogique, construire un tableau
de synthèse présentant les principales disciplines et leur articulation dans des pro-
blématiques de recherche (voir tableau 1). Le tableau proposé donne les principales
orientations et caractéristiques méthodologiques pour chacune des principales ques-
tions de recherche en entrepreneuriat : « quoi », « qui et pourquoi », « comment ».
Sa lecture doit être faite avec beaucoup de prudence, car, dans ce travail, seuls les
principaux courants sont mentionnés. Cela signifie que, dans certains cas, des
informations peuvent être absentes. Par exemple, des sociologues, comme Aldrich
(1999) se sont intéressés à la question du « comment » et parfois, des approches
quantitatives ont été ou sont utilisées pour étudier le processus entrepreneurial.
TABLEAU 1
Vue organisée et synthétique des recherches en entrepreneuriat*
Question principale Quoi Qui / Pourquoi Comment
Types d’approches Approches Approches Approches
fonctionnelles sur les individus sur les processus
Échelle du temps 200 dernières années Depuis le début des Depuis le début des
années 1950. années 1990.
Domaine Économie Psychologie, sociologie, Sciences de gestion
scientifique psychologie cognitive, Sciences de l’action
principal anthropologie sociale. Théories des organisations
Objet d’étude Fonctions Caractéristiques Processus de création :
de l’entrepreneur personnelles. – d’une nouvelle activité,
Traits des individus – d’une nouvelle
entrepreneurs et – entreprise.
entrepreneurs potentiels.
Tiré de : Revue internationale P.M.E., vol. 17, no 1, sous la direction de Pierre-André Julien • PME1701N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
106 Alain FAYOLLE
2. Voir les auteurs cités par Cunnigham et Lischeron (1991), dans le paragraphe consacré
à « The Great Person School of Entrepreneurship ».
3. Thèses de Bruyat (1993), Sammut (1995), Fayolle (1996), De la Ville (1996), Verstratete
(1997) et Marion (1999).
Tiré de : Revue internationale P.M.E., vol. 17, no 1, sous la direction de Pierre-André Julien • PME1701N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
À la recherche du cœur de l’entrepreneuriat : vers une nouvelle vision du domaine 107
4. Voir également les actes des deux dernières conférences de Babson (Frontiers of
Entrepreneurship Research) qui montrent que de très nombreux travaux s’inscrivent
maintenant dans ce courant.
Tiré de : Revue internationale P.M.E., vol. 17, no 1, sous la direction de Pierre-André Julien • PME1701N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
108 Alain FAYOLLE
2001 ; Van der Veen et Wakkee, 2002) s’inscrivant dans ce courant centré sur les
occasions d’affaires explorent conceptuellement ou empiriquement un aspect parti-
culier du domaine ainsi défini. Cette perspective, comme la précédente, porte sur
l’émergence, mais il s’agit ici de l’émergence d’une nouvelle activité économique
qui n’est pas nécessairement liée à la création d’une nouvelle organisation. Cette
approche présente également des inconvénients majeurs eu égard à l’idée que nous
avons de l’étude du processus entrepreneurial. Elle présuppose, tout d’abord, que
les occasions d’affaires existent dans la nature en tant que telles et qu’il suffit
d’avoir une capacité à les reconnaître pour se les approprier et les transformer en
réalités économiques : « Même si la reconnaissance des opportunités entrepreneu-
riales relève d’un processus subjectif, les opportunités, elles-mêmes sont des entités
objectives qui ne sont pas perçues par tout le monde au même moment » (Shane et
Venkataraman, 2000, p. 220). Nous pensons, pour notre part, que la possibilité
entrepreneuriale se construit au cours du processus de création de l’activité et non
pas qu’elle est le point de départ, élément « objectif » qu’il faut découvrir, de ce
processus. Le second problème que nous relevons dans cette approche est lié au
fait qu’elle préconise de se focaliser sur un processus d’exploitation (ou de concré-
tisation) d’une occasion d’affaires qui va déboucher sur la création d’un produit
ou d’un service. Il nous semble que l’entrepreneuriat pourrait également tirer
bénéfice de l’étude de processus n’ayant pas abouti, dès lors que l’objectif est de
mieux comprendre ce qui se passe dans ces situations entrepreneuriales. Quelques
chercheurs suédois essaient d’ailleurs de développer des projets et des travaux de
recherche qui, tout en s’inscrivant dans ce deuxième courant de pensée, s’efforcent
d’en atténuer les limites ci-dessus mentionnées.
La troisième conception est, entre autres, celle de Bruyat (1993). Pour cet
auteur, « l’objet scientifique étudié dans le champ de l’entrepreneuriat est la dialo-
gique individu / création de valeur » (Bruyat, 1993, p. 57). Le principe dialogique
proposé par Morin (1989) signifie que deux ou plusieurs logiques sont liées en
une unité, de façon complexe (complémentaire, concurrente et antagoniste) sans
que la dualité se perde dans l’unité. Cette dialogique s’inscrit dans une dynamique
de changement et peut être définie comme suit (Bruyat, 1993, p. 58) :
« […] l’individu est une condition nécessaire pour la création de valeur, il en détermine
les modalités de production, l’ampleur… Il en est l’acteur principal. Le support de la
création de valeur, une entreprise par exemple, est la « chose » de l’individu, nous avons :
INDIVIDU CRÉATION DE VALEUR
La création de valeur, par l’intermédiaire de son support, investit l’individu qui se
définit, pour une large part, par rapport à lui. Elle occupe une place prépondérante dans
sa vie (son activité, ses buts, ses moyens, son statut social, etc.), elle est susceptible de
modifier ses caractéristiques (savoir-faire, valeurs, attitudes, etc.), nous avons :
CRÉATION DE VALEUR INDIVIDU
Tiré de : Revue internationale P.M.E., vol. 17, no 1, sous la direction de Pierre-André Julien • PME1701N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
À la recherche du cœur de l’entrepreneuriat : vers une nouvelle vision du domaine 109
5. Si ce n’est que le processus n’est pas conceptualisé de la même façon par ces deux
auteurs. Dans les premiers travaux de Gartner (1985), le processus est assimilé à une
manière de faire, à une stratégie.
Tiré de : Revue internationale P.M.E., vol. 17, no 1, sous la direction de Pierre-André Julien • PME1701N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
110 Alain FAYOLLE
Tiré de : Revue internationale P.M.E., vol. 17, no 1, sous la direction de Pierre-André Julien • PME1701N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
À la recherche du cœur de l’entrepreneuriat : vers une nouvelle vision du domaine 111
Tiré de : Revue internationale P.M.E., vol. 17, no 1, sous la direction de Pierre-André Julien • PME1701N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
112 Alain FAYOLLE
Tiré de : Revue internationale P.M.E., vol. 17, no 1, sous la direction de Pierre-André Julien • PME1701N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
À la recherche du cœur de l’entrepreneuriat : vers une nouvelle vision du domaine 113
activités et le moment du démarrage effectif. Le dernier stade est celui d’une orga-
nisation entrepreneuriale « stabilisée9 » qui peut être évaluée par l’intermédiaire
d’indicateurs d’activités, de performances et de résultats.
Dans ce second cheminement, chaque stade renferme un potentiel de création
de valeur plus ou moins important qui dépend de la qualité des observations,
de celle du traitement des informations et de la pertinence des choix effectués.
Néanmoins, la création effective de valeur n’intervient généralement qu’au cours
du dernier stade. Cela pose la question de l’exploitation concrète de ce potentiel à
travers un dispositif organisationnel, un niveau de ressources et des orientations
et décisions stratégiques.
Mais le passage d’un stade à un autre n’est en rien automatique. Le chemi-
nement peut s’interrompre pour différentes raisons (abandon d’une idée, d’une
occasion d’affaires, d’un projet ; disparition prématurée, volontaire ou non, d’une
activité ou d’une entreprise). Le cheminement peut aussi se poursuivre sans heurts
ou à travers des réorientations significatives.
Dans ce contexte, centré sur les supports de la création de valeur, les
chercheurs peuvent vouloir répondre à des questions du type :
– Comment émergent les idées entrepreneuriales et comment développer
la créativité entrepreneuriale ?
– Comment reconnaître les opportunités entrepreneuriales ? D’où viennent-
elles ? Peut-on les construire ? Peuvent-elles être dissociées des individus
qui les ont repérées ?
– Comment les projets entrepreneuriaux se forment-ils et évoluent-ils ?
– Comment les organisations sont-elles conçues et mises en place ?
– Quels sont les facteurs clés de réussite d’une organisation entrepreneuriale ?
Après ce double cheminement où chaque perspective a été analysée en grande
partie indépendamment de l’autre, notre approche du cœur de l’entrepreneuriat va
les réunir de façon à retrouver dans une même unité d’observation et d’analyse le
Tiré de : Revue internationale P.M.E., vol. 17, no 1, sous la direction de Pierre-André Julien • PME1701N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
114 Alain FAYOLLE
FIGURE 1
Une représentation du concept de situation entrepreneuriale
Logique du sujet
Situatio
Situation entrepreneuria
entrepreneuriale
Disjonction Disjonction
Disjonction
Conjoncti
Conjonction
Logique de l’objet
Tiré de : Revue internationale P.M.E., vol. 17, no 1, sous la direction de Pierre-André Julien • PME1701N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
À la recherche du cœur de l’entrepreneuriat : vers une nouvelle vision du domaine 115
Tiré de : Revue internationale P.M.E., vol. 17, no 1, sous la direction de Pierre-André Julien • PME1701N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
116 Alain FAYOLLE
Conclusion
Nous avons essayé de préciser dans cette contribution notre conception de la
recherche en entrepreneuriat. Pour ce faire, nous avons cherché à nous inscrire
dans des tendances et à nous appuyer sur des données issues d’une revue des prin-
cipaux travaux et résultats de recherche disponibles. Notre position est basée sur
la conviction que pour avoir une compréhension globale du phénomène entrepre-
neurial, il est nécessaire d’adopter une orientation processus et d’intégrer dans un
même espace d’observation toutes les facettes qui le caractérisent (Cunningham
et Lischeron, 1991).
Avant de développer notre représentation, nous avons souhaité réaffirmer
l’importance de la place et du rôle du chercheur en entrepreneuriat. Pour nous
et dans notre discipline des sciences de gestion, il est fondamentalement un pro-
ducteur de connaissances, destinées à améliorer notre compréhension de l’action
des entrepreneurs.
L’objet de recherche, d’après nous, au cœur de l’entrepreneuriat est repré-
senté par ce que nous appelons une « situation entrepreneuriale », étudiée dans sa
dynamique (ensemble de configurations individu-support de création) et ses évo-
lutions. Dans notre conception, nous pouvons parler d’entrepreneuriat lorsqu’il y
Tiré de : Revue internationale P.M.E., vol. 17, no 1, sous la direction de Pierre-André Julien • PME1701N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
À la recherche du cœur de l’entrepreneuriat : vers une nouvelle vision du domaine 117
Tiré de : Revue internationale P.M.E., vol. 17, no 1, sous la direction de Pierre-André Julien • PME1701N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
118 Alain FAYOLLE
Bibliographie
ALDRICH, H. (1999), Organizations Evolving, Londres, Sage Publications.
AUTIO, E., R. KEELEY, M. KLOFSTEN et T. ULFSTEDT (1997), Entrepreneurial Intent
Among Students : Testing an Intent Model in Asia, Scandinavie and USA, Wellesley,
Mass., Babson College, Frontiers of Entrepreneurship Research, p. 133-147.
AVENIER, M.-J. (1999), « La complexité appelle une stratégie chemin faisant », Gestion
2000, no 5, p. 13-34.
BAUMARD, P. (1997), Constructivisme et processus de la recherche : l’émergence d’une
« posture » épistémologique chez le chercheur, Cahier de recherche 27/97, LAREGO,
Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, 18 p.
BOUCHIKHI, H. (1993), « A constructivist framework for understanding entrepreneurship
performance », Organization Studies, vol. 14, no 4, p. 549-570.
BOULDING, K. (1956), « General system theory : the skeleton of science », Management
Science, vol. 2, p. 197-208.
BRAZEAL, D.V. et T.T. HERBERT (1999), « The genesis of entrepreneurship », Entrepreneurship
Theory and Practice, vol. 23, no 1, p. 29-45.
BRUYAT, C. (1993), Création d’entreprise : contributions épistémologiques et modélisation,
Thèse de doctorat en sciences de gestion, Université Pierre-Mendès-France de
Grenoble, 431 p.
BRUYAT, C. (1994), « Contributions épistémologiques au domaine de l’entrepreneuriat »,
Revue française de gestion, no 101, p. 113-125.
BRUYAT, C. et P.-A. JULIEN (2001), « Defining the field of research in entrepreneurship »,
Journal of Business Venturing, vol. 16, no 2, p. 165-180.
BULL, Y. et G.E. WILLARD (1993), « Towards a theory of entrepreneurship », Journal of
Business Venturing, vol. 8, no 3, p. 183-195.
BYGRAVE, W.D. et C.W. HOFER (1991), « Theorizing about entrepreneurship »,
Entrepreneurship Theory and Practice, vol. 15, no 1, p. 13-22.
CONTI, S., E.J. MALECKI et P. OINAS (1995), The Industrial Enterprise and Its
Environment : Spatial Perspectives, Aldershot, Avebury.
CUNNINGHAM, J.B. et J. LISCHERON (1991), « Defining entrepreneurship », Journal of
Small Business Management, vol. 29, no 1, p. 45-61.
DAVIDSSON, P., M.B. LOW et M. WRIGHT (2001), « Editor’s introduction : Low and
MacMillan ten years on : achievements and future directions for entrepreneurship
research », Entrepreneurship Theory and Practice, vol. 25, no 4, p. 5-15.
DE LA VILLE, V.I. (1996), Apprentissages collectifs et structuration de la stratégie dans
la jeune entreprise de haute technologie, Thèse de doctorat en sciences de gestion,
Université de Lyon III.
DERY, R. et J.M. TOULOUSE (1994), « La structuration du champ de l’entrepreneurship :
le cas du Journal of Business Venturing », Cahier de recherche, HEC Montréal.
Tiré de : Revue internationale P.M.E., vol. 17, no 1, sous la direction de Pierre-André Julien • PME1701N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
À la recherche du cœur de l’entrepreneuriat : vers une nouvelle vision du domaine 119
Tiré de : Revue internationale P.M.E., vol. 17, no 1, sous la direction de Pierre-André Julien • PME1701N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
120 Alain FAYOLLE
Tiré de : Revue internationale P.M.E., vol. 17, no 1, sous la direction de Pierre-André Julien • PME1701N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
À la recherche du cœur de l’entrepreneuriat : vers une nouvelle vision du domaine 121
Tiré de : Revue internationale P.M.E., vol. 17, no 1, sous la direction de Pierre-André Julien • PME1701N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés