1 PB

Télécharger au format pdf ou txt
Télécharger au format pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 20

LE PILOTAGE DE LA PERFORMANCE : COMMENT LES

MANAGERS MAROCAINS UTILISENT DES PRATIQUES DE


CONTROLE INNOVANTES POUR CONDUIRE UN
RENOUVELLEMENT STRATEGIQUE DANS LES ENTREPRISES ?

MANTOUZI SARA
Doctorante en sciences de gestion
Ecole nationale de commerce et de gestion de Casablanca
Laboratoire de Recherche Prospective en Finance et Gestion (LRPFG)
Université HASSAN II – CASABLANCA
Mantouzi.sarah@gmail.com

Résumé

L’innovation managériale est aujourd’hui perçue comme un levier de performance et de


compétitivité, elle permet aux entreprises de s’adapter à leur environnement ce qui
entraînerait un accroissement de l’efficacité et de l’efficience des processus internes.

A cet effet, Il est important d’étudier le comportement des contrôleurs de gestion dans
un environnement turbulent pour construire un modèle qui nous permettra d’appréhender
comment les managers marocains utilisent des pratiques de contrôle innovantes pour conduire
un renouvellement stratégique dans les entreprises.

Mots clés : Innovation, performance, contrôle de gestion, pratiques innovantes, outils de contrôle,
stratégie, éthique, responsabilité sociale des entreprises.

Abstract

Managerial innovation is perceived as a lever of performance and competitiveness, it


allows companies to adapt to their environment which would increase the efficiency and
effectiveness of internal processes.

For this purpose, it is important to study the behavior of management controllers in a


turbulent environment, to build a model that will allow us to understand how Moroccan
managers use innovative control practices to drive strategic renewal in companies.

Keywords: Innovation, performance, management control, innovative practices, control tools, strategy,
ethics, corporate social responsibility.

Revue de Consolidation Comptable et de Management de la Performance


ISSN: 2665-752X Numéro 5, Juillet 2020 Page 1
INTRODUCTION

L’internationalisation et la mondialisation des marchés constituent le nouveau challenge


des entreprises. En effet, l’évolution des technologies de l’information et de la communication
a rapproché les distances et a éliminé les frontières, réduisant ainsi le monde en un grand
marché dans lequel les informations, les capitaux et les marchandises circulent facilement et
rapidement. Ces mutations apportent certainement de nouvelles perspectives, mais surtout de
nouveaux défis à cause de l’apparition des nouvelles contraintes.

Pour pouvoir surmonter la complexité de ce nouvel environnement, les organisations


doivent réapprendre à gérer le présent pour pouvoir maîtriser l’incertitude de l’avenir. En
effet, la gamme des produits s’élargit, le cycle de vie des produits se réduit, les réactions des
concurrents sont rapides, les prix sont de plus en plus volatils.

L’anticipation est devenue essentielle, et les outils du contrôle n’ont pas échappé à ce
besoin. De nouveaux outils viennent enrichir les pratiques du contrôle de gestion à un rythme
de plus en plus élevé (Activity-Based Costing ABC/ABM, ABB, balanced scorecard ou
tableaux de bord stratégiques, …).

Aujourd’hui, la problématique du contrôle de gestion devient celle de la créativité, c'est-


à-dire la capacité de ce dernier à créer de la valeur ajoutée et à influencer les acteurs pour
qu’ils mettent en œuvre des actions concrètes permettant d’exploiter les ressources par les
réductions des coûts.

Les pratiques traditionnelles du contrôle de gestion sont de moins en moins pertinentes


dans un environnement en perpétuelle mutation. Or, La situation du contrôle de gestion au
Maroc, appelle deux commentaires : l’implantation des systèmes de contrôle de gestion au
niveau des entreprises marocaines reste très limitée à cause du déficit de culture managériale
et d’information sur les apports d’une telle fonction. Sans oublier le faible poids accordé à
cette fonction en termes de positionnement hiérarchique et sa dotation en ressources
suffisantes.

2
Revue de Consolidation comptable et de Management de la Performance
ISSN: 2665-752X Numéro 5 Juillet 2020
Ce constat nous conduit à poser une question principale : Comment les managers
marocains utilisent des pratiques de contrôle innovantes pour conduire un renouvellement
stratégique dans les entreprises ?

Notre objectif est d’étudier l’adoption des innovations managériales en contrôle de


gestion au sein des entreprises marocaines à travers l’introduction des indicateurs (RSE,
management d’éthique, qualité…) et définir comment contextualiser ces indicateurs au sein
de ces organisations. En effet, les travaux de recherche sur les pratiques innovantes du
contrôle de gestion adaptées aux particularités des entreprises marocaines sont limités, il serait
important d’étudier les systèmes de mesure de la performance pour détecter la place occupée
par ces indicateurs et évaluer leur relation avec la stratégie. L’objet de cet article est de
proposer un modèle explicatif susceptible d’analyser le comportement des contrôleurs de
gestion dans un environnement turbulent, déterminer leur capacité d’adaptation à la
complexité qui relève de la mondialisation et de l’accroissement de la concurrence,
d’identifier les déterminants du recours aux indicateurs innovants, expliquer la réelle
motivation des entreprises à les intégrer dans le système du contrôle de gestion et
d’appréhender leur impact sur l’efficacité stratégique de l’entreprise.

Dans cet article, nous allons établir une remise en cause des outils traditionnels du
contrôle de gestion, en présentant l’évolution des pratiques du contrôle de gestion et les
apports théoriques. Dans une deuxième partie, nous allons déterminer les pratiques
innovantes en donnant l’exemple de l’introduction des indicateurs du management d’éthique
et la RSE, et par la suite nous allons construire notre modèle théorique.

1- REMISE EN CAUSE DES OUTILS TRADITIONNELS DU CONTROLE DE


GESTION POUR LA MESURE DE LA PERFORMANCE.

On assiste aujourd’hui à un renouvellement des pratiques de gestion dans les


entreprises visant à instaurer des stratégies proactives. Cette tendance crée une remise en
cause des critères traditionnels de performance et des outils de contrôle dans l’objectif est la
réalisation d’un élargissement des critères et des périmètres de prise des décisions.

1-1- EVOLUTION DES PRATIQUES DU CONTROLE DE GESTION.

3
Revue de Consolidation comptable et de Management de la Performance
ISSN: 2665-752X Numéro 5 Juillet 2020
L’examen de la littérature nous permet de constater que le contrôle de gestion a été
défini d’une manière différente par chaque auteur, et ceci ne fait que retracer l’évolution de la
conception même du contrôle de gestion. Le contrôle de gestion apparaissait comme le garant
du « non gaspillage » avec la définition du (R.N. Anthony 1965) qui considère que : « le
contrôle de gestion est le processus par lequel les dirigeants obtiennent l'assurance que les
ressources sont obtenues et utilisées de manière efficace et efficiente dans la réalisation des
objectifs de l’organisation ».
En 1988, RN. Anthony offre une vision un peu différente et précise du contrôle de
gestion comme « processus par lequel les managers influencent d'autres membres de
l‘organisation pour mettre en œuvre les stratégies de I ‘organisation ». Ouchi (1979) propose
un nouveau mode de contrôle par socialisation (contrôle clanique) 1alignant les intérêts des
individus avec ceux de l’organisation (Langevin P. et Naro G. 2003).

Face à la complexité de l’environnement due à la mondialisation et à


l’internationalisation des marchés. Les pratiques du contrôle doivent s’adapter à ces
évolutions pour assurer la performance interne et externe des organisations. De nombreux
travaux ont montré l'effet des variables de contingence sur les caractéristiques des systèmes et
outils de contrôle. La façon dont les outils du contrôle de gestion sont utilisés et évalués varie
notamment suivant la taille de l’entreprise, l’incertitude à laquelle elle est confrontée, le type
de stratégie qu’elle poursuit, etc. Il est donc raisonnable de penser que, en fonction des
situations contingentes différentes, des critiques elles-mêmes différentes puissent être
exprimées.
Le degré d’incertitude a été l’une des principales variables de contingence mobilisées
pour remettre en cause les systèmes de contrôle de gestion utilisés par les entreprises. Pour
Berland (2001), il est difficile d’établir des prévisions fiables et la fixation des objectifs
budgétaires devient un exercice délicat du fait de l’incertitude.
En tout état de cause, l’incertitude influence les modalités suivant lesquelles les budgets
sont utilisés et probablement aussi la façon dont ils sont perçus. Ainsi, en environnement
turbulent, le budget ne peut plus être utilisé comme instrument de mise en œuvre d'objectifs
stables, mais plutôt comme outil d'analyse et de simulation permettant d'anticiper et/ou
d'exploiter les changements de l'environnement en facilitant notamment l'expression des
1
Le contrôle par le clan (ou la tradition) : il s’impose quand il n’est pas possible d’établir de règles de
production, et quand les résultats définitifs ne sont pas disponibles. Il repose sur des rites, des coutumes, sur une
forte socialisation des individus, internalisant le contrôle en chacun d’entre eux par son adhésion, plus au moins
volontaire, aux principes et valeurs de l’organisation. C’est le cas des activités de recherche et développement,
des hôpitaux, etc.
4
Revue de Consolidation comptable et de Management de la Performance
ISSN: 2665-752X Numéro 5 Juillet 2020
compétences locales et l'émergence des stratégies adaptées (Gervais et Thenet, 1998 ;
Gervais, 2000).Or, dans un environnement turbulent, les stratégies efficaces sont le résultat
d'une série de décisions souvent initiées par des cadres de niveaux intermédiaires au contact
des marchés et des technologies (Barwise, 1997). Nous passons alors d’une vision purement
mécaniste, à une vision ou l’influence des acteurs est primordiale.
Robert Simons (1995) définit le contrôle de gestion comme « l’ensemble des processus
et procédures formels, construits sur la base de l’information que les managers utilisent pour
maintenir ou modifier certaines configurations des activités de l’organisation ».Ainsi, Simons
décrit, les systèmes de contrôle « diagnostic » comme « les systèmes d’informations formels
que les managers utilisent pour surveiller les résultats de l’organisation, et corriger les
déviations par rapport aux standards définis de performance »(p.59). Ce type de contrôle est
réalisé à travers un nombre important d’indicateurs reflétant les différentes dimensions de la
performance. L’auteur considère que le contrôle « diagnostic » correspond au contrôle de
gestion dit classique, car il est le sujet de la majeure partie de la littérature en contrôle de
gestion. Les exemples les plus parlants sont les plans et les budgets (P.61).Il décrit ensuite les
systèmes de contrôle « interactifs » comme « les systèmes formels d’information que les
managers utilisent pour s’impliquer régulièrement et personnellement dans les décisions de
leurs subordonnés » (p.95).Nous assistons alors à une introduction des indicateurs physiques
ou opérationnels à côté des indicateurs financiers ou comptables.
Henri Bouquin situe le contrôle de gestion comme interface entre le contrôle stratégique et le
contrôle d’exécution (ou opérationnel), « garant de la cohérence entre la stratégie et le quotidien ».
Selon lui, « la position clé du contrôle de gestion ne réduit pas son rôle à une dimension technique de
coordination, de planification et de suivi : elle l’amène, et ce sont les conditions posées à son succès,
à viser des fonctions de motivation-évaluation et d’éducation des acteurs concernés ».

Selon Philippe Lorino (1991), le contrôle de gestion:

- Gère non seulement les coûts mais aussi la valeur par la construction d’indicateurs de
performance,
- Gère le changement dans une dynamique de progrès continu, par une pratique permanente
d’analyse et de diagnostic,
- Construit les moyens du pilotage, assurant la convergence des comportements.
Cette perspective remet en cause la vision traditionnelle du contrôle de gestion. En
effet, ce dernier devient non seulement un système d’analyse et de suivi mais aussi un système de
pilotage qui a pour vocation d’orienter les comportements afin de traduire la stratégie en actions.

5
Revue de Consolidation comptable et de Management de la Performance
ISSN: 2665-752X Numéro 5 Juillet 2020
1-2- APPORTS THEORIQUES EN CONTROLE DE GESTION
Dans notre étude nous allons explorer trois modèles théoriques à savoir : la théorie néo-
institutionnelle, la théorie de contingence, et la théorie instrumentale.

1-2-1- la théorie néo-institutionnelle en contrôle de gestion


La théorie néo-institutionnelle trouve ses origines en sociologie, avec les travaux de
Selznick (1949), qui montre que le comportement et la structure des organisations dépendent
non seulement des contraintes internes, mais aussi des contraintes culturelles et sociales.
Cette approche s’est développée en théorie des organisations dans les années 1980
(Meyer et Rowan, 1977 ; DiMaggio et Powell, 1983). Le fondement de la théorie stipule que
les organisations adoptent des structures pour répondre aux attentes externes (Meyer et
Rowan, 1977). Les organisations cherchent à préserver leur légitimité à travers l’adoption des
pratiques responsables socialement valorisées (chartes éthiques, plan de préservation de
l’environnement…) pour faire face aux contraintes placées sur elles.
Le niveau d’analyse de la théorie néo-institutionnelle est défini par DiMaggio et Powell
(1983) comme un ensemble d’organisations qui « agrégées, constituent une aire de vie
institutionnelle reconnue: fournisseurs clés, consommateurs de ressources et produits,
institutions réglementaires, et autres organisations qui produisent des services ou produits
similaires » (p.148-149). On peut y ajouter les organismes gouvernementaux, les groupements
d’intérêt, les associations professionnelles, l’opinion publique, la presse économique, etc. Au
sein de son champ organisationnel, l’entreprise est soumise à des contraintes (Powell et
DiMaggio, 1991) qui vont influencer son évolution. Celles-ci sont de nature coercitive (lois et
réglementations qui affectent de nombreux aspects du comportement de l’organisation),
normative (les normes professionnelles. Il s’agit pour (DiMaggio et Powell, 1983) «le combat
des membres d’une occupation pour définir les conditions et les méthodes de leur travail pour
contrôler la production des producteurs, pour établir une base cognitive et la légitimation de
l’autonomie de leur activité) et mimétique (l’impact de la concurrence qui amènent les
entreprises à copier les modes de fonctionnement des entreprises qui ont réalisé un succès).

6
Revue de Consolidation comptable et de Management de la Performance
ISSN: 2665-752X Numéro 5 Juillet 2020
Cependant, L’adoption de certaines pratiques managériales est parfois irrationnelle,
dans le cas de l’absence d’un lien direct entre la pratique adoptée et l’activité principale de
l’organisation, et devient une source de coûts supplémentaires. Ceci est expliqué par Meyer et
Rowan (1977, p.341) : « pour maintenir leur conformité cérémonielle, les organisations qui
reflètent des règles institutionnelles tendent à éloigner leurs structures formelles des
incertitudes liées aux activités techniques en se couplant de façon relâchée, introduisant des
espaces entre leurs structures formelles et les activités de travail proprement dites ». Ainsi,
« les règles catégoriques entrent en conflit avec la logique d’efficience. Les organisations
sont souvent confrontées à ce dilemme lié au fait que les activités célébrant les règles
institutionnalisées bien qu’elles comptent comme des dépenses cérémonielles vertueuses, sont
des coûts purs du point de vue de l’efficience », Meyer et Rowan (1977, p.355).
L’approche théorique néo-institutionnelle met l’accent sur l’impact de l’environnement
et sa capacité à influencer l’adoption des pratiques au sein des organisations qui cherchent la
performance. Or, certaines pratiques peuvent être jugées de douteuses lorsqu’elles sont mal
placées. Ces observations nous conduisent à poser les hypothèses suivantes :
Hyp 1 : L’intégration des pratiques innovantes en contrôle de gestion est nécessaire
quand la réglementation et les normes professionnelles sont contraignantes.
Hyp 2 : L’introduction des indicateurs RSE et éthiques est effectuée dans un objectif de
recherche de légitimité.
Hyp 3 : La dépendance à un groupe pousse les entreprises à recourir à des indicateurs
RSE et éthiques dans un objectif de reporting externe.

1-2-2- La théorie de la contingence en contrôle de gestion


Selon Pierre Pariente (1998), le contrôle de gestion ne se réduit plus aujourd'hui à des
procédures budgétaires bien codifiées et à des systèmes d'information comptable normalisés.
La fonction du contrôle de gestion qui pouvait être considérée comme universelle, invariante,
quel que soit le type d'organisation où elle se déployait, subit aujourd'hui une remise en cause
importante. Cette remise en cause se traduit par l'apparition de nouveaux concepts qui ont
sensiblement fait évoluer la discipline ou qui traduisent son évolution, comme le target
costing, les modèles d'apprentissage organisationnels, des tableaux de bord à la demande
assouplis par des procédures informatiques et multimédia de type EIS.

7
Revue de Consolidation comptable et de Management de la Performance
ISSN: 2665-752X Numéro 5 Juillet 2020
La théorie de la contingence en contrôle de gestion est, de ce fait, devenue un des
éléments fondamentaux de la rénovation de la discipline (Dent, 1990).Il s'agit d'introduire un
système d'information et de gestion intégrant des facteurs de contingence.
Selon (Sponem, 2002), la théorie de contingence explique les systèmes de contrôle de
gestion en fonction de son environnement technique, ces systèmes sont adoptés par les
entreprises qui cherchent une efficacité organisationnelle. Cette approche permet
d’appréhender les systèmes de contrôle et leurs relations avec les caractéristiques intrinsèques
de l'entreprise (Covaleski et al., 1996). En effet, le contexte organisationnel joue un rôle
important dans le choix des pratiques de contrôle des entreprises.
- La taille :
Merchant (1981), Kalika (1987), Jorissen et al. (1997) montrent que plus la taille est
importante plus les techniques budgétaires sont sophistiquées. A cet effet, la taille influence le
contenu des outils de contrôle de gestion. Selon Jorissen et al.(1997), l’utilisation des
indicateurs de performance non financiers est importante dans les grandes entreprises. Nobre
(2001) confirme ce point à travers sa recherche, dans laquelle il montre que la variable taille
explique le choix des pratiques de pilotage des entreprises. En effet, l’adoption des tableaux
de bord intégrant des mesures physiques reste faible dans les entreprises de moins de 100
salariés par rapport aux grandes entreprises. Cela nous conduit à construire l’hypothèse
suivante :
Hyp 4 : La mesure de la performance est d’autant plus « intégrante » que la taille des
entreprises est grande.
- L’incertitude de l’environnement :
Chapman (1997), Hartmann (2000) ont conclu qu’il existe un lien entre
l’environnement et les caractéristiques des systèmes adoptés par les entreprises. Gordon et
Narayan (1984), Chenhall et Morris (1986) dans leurs observations ont constaté que
l’incertitude de l’environnement entraine le recours aux informations non financières.
Gosselin et Dubé (2002) ont distingué deux types d’entreprises : les entreprises
« prospectrices » qui sont confronté à l’incertitude de l’environnement et mettent en place des
mesures de performance non financières, et les entreprises « défenderesses » qui œuvrent dans
un environnement stable et moins complexe. Notre hypothèse est la suivante :
Hyp 5 : Face à l'incertitude accrue de leur environnement externe, les entreprises
tendent à intégrer des pratiques innovantes dans leurs systèmes de contrôle de gestion.
- La structure organisationnelle :

8
Revue de Consolidation comptable et de Management de la Performance
ISSN: 2665-752X Numéro 5 Juillet 2020
La structure organisationnelle constitue «des moyens employés pour diviser le travail
entre des tâches distinctes et pour ensuite assurer leur coordination» (H.Mintzberg, 1982).
La définition de la structure organisationnelle impacte l'efficacité du travail, la
motivation des collaborateurs, les flux de partage d'informations et le système de contrôle
(Chenhall, 2003) (Kalika, 1987) démontre que les entreprises qui adoptent une politique de
différenciation et ayant une structure décentralisées disposent d’un système de contrôle plus
développé. Cette conclusion rejoint celle de Bruns et Waterhouse (1975) qui indique que les
entreprises décentralisées utilisent des pratiques budgétaires plus sophistiquées. Merchant
(1981) a également constaté que les entreprises décentralisées disposent d’un processus
budgétaire plus complexe et formalisé. Nous proposerons donc l’hypothèse suivante :
Hyp 6 : Le recours aux pratiques innovantes en contrôle de gestion est plus élevé que la
structure est décentralisée.
- La stratégie :
L’objectif du contrôle de gestion est d’assurer l’efficacité stratégique de l’organisation.
Cette efficacité dépend de la capacité des indicateurs de performance à construire des
informations qui peuvent aider dans le processus d’aide à la décision. Nous parlons du degré
de corrélation entre les stratégies et les indicateurs de performance (Nanni et al., 1992).
En effet, plusieurs recherches ont démontré que les entreprises adoptant une stratégie
de différenciation, utilisent souvent des indicateurs non financiers pour gérer leur
performance (Shank et Govindarajan, 1993; Essid, 2009). Nous pouvons donc construire
l’hypothèse suivante :
Hyp 7 : Les pratiques innovantes en contrôle de gestion basées sur des indicateurs non
financiers sont plus présentes dans les outils de pilotage des entreprises qui adoptent une
stratégie de différenciation.
- La culture
L’impact de la culture sur le comportement des organisations et son efficacité a été
démontré par la théorie de contingence (Chenhall, 2003). En effet, la culture, et par
conséquent l’ensemble des comportements qui distinguent un groupe d’individus, influence la
vision d’entreprise et son degré d’engagement. Cependant, (Chenhall, 2003) a montré que la
culture influence les systèmes de contrôle adoptés à l’intérieur de l’entreprise. Nous
proposerons donc l’hypothèse suivante :

9
Revue de Consolidation comptable et de Management de la Performance
ISSN: 2665-752X Numéro 5 Juillet 2020
Hyp 8 : L’introduction des pratiques innovantes basées sur des valeurs éthiques et
sociétale dans le processus de contrôle est d'autant plus élevée quand l’entreprise adopte une
culture imprégnée de valeurs.
1-2-3- La théorie instrumentale
Les travaux de Vygotski constituent un apport majeur dans la conception particulière
de l’outil. Ce dernier développé par Vygotski (1930), repose sur deux éléments importants : le
caractère sociotechnique des phénomènes psychologiques et le concept d’activité médiatisée
qui postule que toute activité humaine est médiatisée par des artefacts.
Vygotski (1934) indique que les phénomènes psychologiques ont un caractère socio-
historique. En conséquence, ils sont d’ordre social à deux niveaux : ils dépendent d’une part
des échanges avec d’autres personnes, et donc de l’expérience sociale ; d’autre part, ils sont
façonnés et engendrés par des objets socialement construits, qualifiés d’artefacts. Ces artefacts
structurent la modalité d’interaction entre l’individu et son environnement.
Selon Lev Vygotski (1997) : « Pour expliquer de manière satisfaisante le travail en tant
qu’activité de l’homme appropriée à une fin, nous ne pouvons-nous contenter de dire qu’il a
pour origine les buts, les problèmes qui se posent à l’homme, mais nous devons l’expliquer
par l’emploi des outils, par l’application de moyens originaux sans lesquels le travail
n’aurait pu apparaître ».
Les outils de gestion appartiennent généralement à une catégorie d’outils particulière,
les outils symboliques et ils sont régis par des règles de construction et d’utilisation. De plus,
Ils jouent un rôle important dans la conception de l’organisation, ils sont adaptés à sa
conjoncture et produisent un système de significations qui fonde socialement l’organisation.
Nous pouvons construire l’hypothèse suivante :
Hyp 9 : Les outils issus des pratiques innovantes en contrôle de gestion prennent en
considération le changement de la conjoncture et favorisent les interactions des individus
avec l’environnement.

2- L’INNOVATION MANAGERIALE EN CONTROLE DE GESTION


L’innovation managériale est aujourd’hui perçue comme un levier de performance et de
compétitivité. Tout comme l’innovation technologique, elle apporterait à l’entreprise un
surplus de valeur vis-à-vis de la concurrence.
Dans les années 1960, les chercheurs se sont intéressés aux innovations qui n’ont pas un
caractère technologique. Ces auteurs ont introduit le terme « innovation administrative ou

10
Revue de Consolidation comptable et de Management de la Performance
ISSN: 2665-752X Numéro 5 Juillet 2020
organisationnelle ». Evan (1966) a proposé la définition suivante : « L’innovation
administrative est une idée novatrice qui se rapporte au recrutement du personnel, à
l’allocation des ressources, à la définition des tâches, au mode de management ou à la
valorisation du personnel » (p. 51).
Kimberly (1981) est le premier chercheur qui a utilisé la notion innovation managériale,
« Une innovation managériale est un programme, un produit ou une technique qui est perçu
comme nouveau par l’individu ou le groupe d’individus considérant son adoption et qui au
sein de l’organisation ou elle est mise en affecte la nature, la localisation, la qualité et/ou la
quantité de l’information disponible pour la prise de décision ».
Damanpour (1984) a expliqué que les innovations administratives impactent le système
social d’une organisation. Dans le même sens, il a expliqué que les innovations managériales
sont indirectement reliées aux activités basiques de production de l’organisation, et requièrent
des changements dans l’organisation et dans les processus (Damanpour, 1988).Van de Ven
(1986) a défini l’innovation managériale comme une idée nouvelle qui peut découler d’une
combinaison d’idées anciennes ou d’un schéma qui modifie le présent ou une approche
unique nouvellement perçue par les individus concernés (p 591). Rogers (1995) a lié
l’innovation managériale à la perception de la nouveauté par les individus ou les
organisations.
Selon Alcouffe (2004) « une innovation managériale est une combinaison nouvelle des
moyens, matériels et/ou conceptuels, déjà existants et/ou nouveaux, par rapport à l’état de
l’art de la gestion au moment où elle apparaît pour la première fois et qui permet de mettre
en œuvre une technique de gestion qui peut être perçue comme plus ou moins nouvelle par
l’individu ou toute autre unité d’analyse la considérant ».
Cependant, l’innovation managériale est plus difficile à identifier par rapport à
l’innovation technologique car elle est plus tacite et subjective. A cet effet, Hamel (2006) a
donné la définition suivante : « L’innovation managériale peut être définie comme un écart
important par rapport aux principes, processus et pratiques traditionnels de management, ou
comme un écart par rapport aux formes organisationnelles courantes qui changent
significativement la façon dont le travail managérial est réalisé. En le disant simplement,
l’innovation managériale change la façon dont les managers font ce qu’ils font. » (p. 75).
Birkinshaw, Hamel et Mol (2008) ont lié l’innovation managériale à l’atteinte des buts
de l’organisation. Ils ont précisé que « L’innovation managériale est l’introduction d’une
nouveauté dans une organisation établie, qui représente un changement organisationnel

11
Revue de Consolidation comptable et de Management de la Performance
ISSN: 2665-752X Numéro 5 Juillet 2020
particulier. Dans son sens le plus large, alors, l’innovation managériale peut être définie
comme une différence dans la forme, la qualité ou l’état des activités managériales au fil du
temps dans une organisation, où le changement est nouveau ou sans précédent par rapport au
passé. » (p. 826).
Par ailleurs, nous pouvons qualifier d’innovation managériale, les outils de contrôle de
gestion destinés aux managers pour les aider à prendre les décisions afin d’assurer une
performance multidimensionnelle qui couvre les différents aspects de l’entreprise (financiers,
sociaux, environnementaux…).
En effet, la remise en cause des outils du contrôle de gestion à travers l’introduction
d’un certain nombre de nouveautés au niveau des pratiques de gestion, atteste que le contrôle
de gestion est un domaine où l’innovation est fortement présente.

De nouveaux outils ont vu le jour, permettant aux managers de s’adapter à l’évolution


de l’environnement et aux problématiques qui en découlent en vue d’assurer la performance
des entreprises.
Dans les années 1980, L’Activity Based Costing (comptabilité à base d’activités) a été
proposé par des professeurs de Harvard (R. Cooper et R. S. Kaplan) et par le CAM-I
(consortium de grandes entreprises essentiellement américaines). Cet instrument constitue une
réponse à la rigidité de la comptabilité de gestion traditionnelle. Le Target Costing inventé par
Toyota en 1965, et diffusé dans le reste du monde dans les années 1990, représente une
démarche qui vise à réduire les couts des produits sur l’ensemble de leur cycle de vie tout en
satisfaisant aux exigences du consommateur en matière de qualité et de fiabilité (Y. Kato).En
1992, le Balanced Scorecard (BSC) lancé par Kaplan et Norton traduit la mission et la
stratégie de l’entreprise en un ensemble d’indicateurs de performance qui constitue la base
d’un système de pilotage de la stratégie. La méthode EVA (valeur économique ajoutée)
permet d’évaluer la valeur créée par l’entreprise et mettre en cohérence les objectifs des
managers avec ceux des actionnaires. Elle a été présentée par la société de conseil Stern,
Stewart and co.
Pourtant, le contrôle de gestion ne peut être limité à une somme de techniques et
d’outils. Il est en effet un système dont la responsabilité incombe à l’ensemble des managers
qui doivent introduire des pratiques éthiques et citoyennes devenues essentiels pour se
différencier et s’adapter aux changements de l’environnement.

12
Revue de Consolidation comptable et de Management de la Performance
ISSN: 2665-752X Numéro 5 Juillet 2020
2-1- L’ENGAGEMENT ETHIQUE COMME INDICATEUR DU CONTROLE DE GESTION
Les différents scandales des dernières années ont poussé les entreprises à adopter des
réflexions sur l’importance de l’éthique. En effet, le scandale d’Enron a réveillé la conscience
d’éthique dans les entreprises du monde entier.
La notion d’éthique renvoie à l’importance d’une bonne conduite des affaires et aux
valeurs avec lesquelles les individus et les organisations interagissent. L’engagement éthique
devient alors un choix stratégique permettant à l’entreprise et ses dirigeants d’être responsable
vis-à-vis des individus et de son environnement.
Cependant, il existe un lien très fort entre éthique et contrôle de gestion. Selon
(Anthony 1988) « Le contrôle de gestion est le processus par lequel les managers influencent
d’autres membres de l’organisation pour appliquer les stratégies ». Cette définition montre
que le contrôle permet de s’assurer de l’application de la stratégie. Dans le même sens d’idées
H. Bouquin (1995) exprime :« Il conviendra d’appeler contrôle de gestion les dispositifs et
processus qui garantissent la cohérence entre la stratégie et les actions concrètes et
quotidiennes ».
La prise en compte des préoccupations éthiques dans la définition des stratégies incite à
réfléchir sur le rôle que peut jouer le contrôle de gestion comme garant de la bonne
application des stratégies.
2-1-1- Ethique et gouvernance actionnariale
L’éthique régit la conduite des relations entre les dirigeants et les actionnaires. A cet
effet, l’éthique régule les conflits d’intérêt, la légitimité du pouvoir, et assure la transparence
des décisions et des résultats.
Dans ce cas, l’éthique définit les obligations des dirigeants envers les biens et les
informations de l’entreprise en privilégiant l’intérêt social. L’objectif principal d’une telle
vision est de s’assurer que les actionnaires obtiennent un juste retour sur investissement. La
protection des intérêts des actionnaires contribuera à améliorer le bien-être collectif.
Pour Friedman (1970), la seule responsabilité de l’entreprise est de maximiser sa
richesse et donc celle de ses propriétaires. Cette maximisation entrainera l’amélioration du
bien-être social.
La corporate governance répond à une logique de marché financier qui exige la
disponibilité d’une information exacte. Cependant, les interactions de l’entreprise avec son
environnement remettent en cause les méthodes classiques de gestion.
2-1-2- Les avantages d’un management d’éthique.

13
Revue de Consolidation comptable et de Management de la Performance
ISSN: 2665-752X Numéro 5 Juillet 2020
La définition d’une éthique constitue une mesure préventive qui vise à assurer la
pérennité de l’entreprise (Supizet 2002). En effet, une gestion durable est conditionnée par un
investissement dans l’éthique (économique, sociale, environnementale…) à travers
l’établissement d’une charte de valeurs traduite en actions concrètes.
Cependant, la délégation de gestion nécessite une confiance réciproque. Un dirigeant ne
peut pas tout contrôler, il doit faire confiance à ses collaborateurs et faire preuve d’un
comportement exemplaire.
Le type de contrôle exercé au sein d’une entreprise détermine la vision du contrôleur de
gestion qui peut adopter soit une approche contractualiste ou conventionnaliste. La première
est orientée vers le passé et consiste à surveiller. Le contrôle de gestion peut être défini selon
cette approche comme « le processus par lequel les dirigeants s’assurent que les ressources
sont obtenues et utilisées avec efficience, efficacité et pertinence, conformément aux objectifs
de l’organisation et que les actions en cours vont bien dans le sens de la stratégie définie »
(Gervais, 2000).
Or, l’approche conventionnaliste repose sur l’importance de l’information dans le
processus de prise de décision et de la mise en place de la stratégie (Guedj, 2000). Le
contrôleur de gestion adopte une perspective de conseiller, il informe et assiste les
opérationnel dans le processus d’aide à la décision.
A cet effet, le contrôle de gestion devient non seulement un système d’analyse mais
aussi un système de pilotage qui a pour vocation d’orienter les comportements afin de traduire
la stratégie en actions. Dans ce cadre, nous pouvons définir le pilotage de la performance
éthique comme un indicateur du système de contrôle permettant de vérifier la conformité des
évaluations réalisées avec la charte des valeurs définie par l’entreprise.

2-2- L’INTRODUCTION DE LA RSE DANS LE SYSTEME DE GESTION DE LA PERFORMANCE


Dans un contexte de développement durable, Le recours aux indicateurs non financiers
devient une nécessité pour assurer une gestion efficace de la performance. En effet, cette
dernière ne se limite pas aux informations comptable et financière (Depoers et al. 2002).
Les indicateurs non financiers complètent les indicateurs financiers (Kaplan et Norton
2003), ils sont orientés vers des préoccupations sociales (Martory, 1999) et écologiques
(Oxibar et Déjean, 2003).
Plusieurs référentiels relatifs aux indicateurs de développement durable ont été mis en
place comme l’ISO 26000. Ces indicateurs contribuent à l’amélioration de l’image de

14
Revue de Consolidation comptable et de Management de la Performance
ISSN: 2665-752X Numéro 5 Juillet 2020
l’entreprise à travers des communications externes et à l’efficacité de la performance interne
quand ils sont instrumentalisés dans le système de management. La stratégie RSE est déclinée
au sein de l’entreprise par l’intermédiaire des systèmes de contrôle qui permettent d’assurer la
cohérence de celle-ci avec les pratiques de l’entreprise.
Les indicateurs RSE doivent prendre en considération la préservation de
l’environnement global en s’intéressant aux problèmes des changements climatiques. Ils
doivent assurer une croissance soutenable à travers la maitrise des ressources, l’accès aux
biens vitaux et la valorisation des patrimoines locaux… et un développement sociétal
soutenable en améliorant les conditions de vie, l’éducation, la santé et l’aménagement du
territoire.
Callens et Tyteca (1999) proposent un certain nombre d’indicateurs RSE permettant à
l’entreprise d’être socialement responsable et de piloter une performance globale.

Selon l’étude effectuée par (Germain et Gates 2007) la moyenne des entreprises qui
utilisent des indicateurs RSE reste faible par rapport aux autres indicateurs de performance
les plus classiques et les indicateurs RSE sont les moins reliés aux objectifs stratégiques.
Dans les années 80 Jonhson et Kaplan ont introduit les informations non financières
dans les outils de contrôle de gestion et plus particulièrement dans le balanced scorecard. Cet
outil combine entre les mesures financières et non financières, il regroupe quatre dimensions
les résultats financiers, la satisfaction des clients, les processus internes et l’apprentissage
organisationnel. Cependant, la satisfaction des clients, les processus internes et
l’apprentissage organisationnel ne constituent que des moyens qui permettent l’atteinte des
objectifs financiers et la satisfaction des attentes des actionnaires.
Plusieurs auteurs ont proposé d’adapter le BSC pour qu’il puisse mesurer la
performance globale. Kaplan et Norton (2001) suggère de matérialiser la RSE par
l’introduction d’indicateurs sur l’axe «processus internes» et d’étendre l’axe client en
regroupant tous les partenaires de l’entreprise. Hockerts (2001) propose l’élaboration d’un
Sustainability Balanced Scorecard (S.B.S.C.) qui se base sur des indicateurs d’évaluation de
la performance environnementale et sociétale. Bieker (2002) propose d’ajouter un cinquième
axe sociétal. Supizet (2002) propose le Total Balanced Scorecard (T.B.S.C.) qui explique les
relations entre les différentes parties prenantes : les actionnaires, les clients, les usagers,
l’entreprise elle-même en tant que personne morale, les partenaires, le personnel et la
collectivité. Les différentes adaptations apportées à cet outil pour assurer la performance

15
Revue de Consolidation comptable et de Management de la Performance
ISSN: 2665-752X Numéro 5 Juillet 2020
sociétale restent liées à la réalisation de la performance financière. Dans le même sens Le
navigateur Skandia constitue un tableau de bord composé de 5 axes (Axe financier; Axe
client; Axe humain; Axe processus; Axe innovation et développement). Le capital intellectuel
(l’axe humain) contient autant d’indicateurs que pour les autres dimensions de la
performance. Or, le capital intellectuel ne représente qu'une partie de la performance sociale,
celle liée aux salariés de l’entreprise.

3- CONSTRUCTION DU MODELE EXPLICATIF


La présentation de quelques repères dans la littérature nous permet de construire un
modèle qui présente les motivations qui poussent les entreprises à intégrer des pratiques
innovantes dans le processus du contrôle de gestion : pour assurer la performance de
l’entreprise ou pour une raison de légitimité. Or, la validation de ce modèle dans le contexte
marocain nous amène à réaliser une étude empirique de nature quantitative.

Figure 1 : Modèle théorique explicatif

Réalisé par nous-même.

16
Revue de Consolidation comptable et de Management de la Performance
ISSN: 2665-752X Numéro 5 Juillet 2020
CONCLUSION

Le postulat du départ était de remettre en cause les outils traditionnels du contrôle de


gestion et de rénover les systèmes de contrôle. La littérature mise en avant dans cette partie
théorique insiste sur le lien avec le pilotage stratégique qui s’est renforcé et devenu
primordial. En effet, la stratégie et le choix des outils de pilotage conditionnent le succès d’un
processus du contrôle de gestion. Par conséquent, la problématique de l’évaluation de la
performance s’est largement enrichie.

La problématique se fixait sur l’adoption des pratiques innovantes pour conduire un


renouvellement stratégique dans le contexte des entreprises marocaines. L’idée principale
était d’étudier l’adoption des innovations managériales en contrôle de gestion au sein des
entreprises marocaines à travers l’introduction des indicateurs (RSE, management d’éthique,
qualité…) et déterminer comment contextualiser ces indicateurs sur le tissu des entreprises
marocaines.

A travers l’exploration des trois modèles théoriques (la théorie néo-institutionnelle, la


théorie de contingence, et la théorie instrumentale) nous avons pu construire un modèle qui

17
Revue de Consolidation comptable et de Management de la Performance
ISSN: 2665-752X Numéro 5 Juillet 2020
permet de définir les raisons de recours à des pratiques innovantes. En effet, l’incertitude de
l’environnement, la taille de l’entreprise, la structure organisationnelle choisie, la culture
interne, constituent un ensemble d’éléments qui poussent les entreprises à se différencier en
intégrant certaines pratiques dans le processus de contrôle de gestion. Or, l’environnement
institutionnel conditionne également le choix d’introduire un certain nombre d’indicateurs
pour des raisons de recherche de légitimité et de reporting externe. A cet effet, les outils
adoptés doivent s’adapter avec l’ensemble de ces restrictions et favoriser les interactions des
individus avec l’environnement.

En outre, la situation conjoncturelle actuelle nous pousse à réfléchir sur des indicateurs
de natures éthiques, qui reposent sur des valeurs de transparence et de la bonne conduite des
affaires, ainsi que des indicateurs RSE devenus essentiels dans un contexte de développement
durable.

Cependant, la validation de notre modèle théorique dépend de la réalisation d’une étude


empirique de nature quantitative.

Bibliographie
- Anthony R.N. (1965), “Planning and control system a frame work for analysis”,
Boston, Harvard University Press.
- Bieker T. (2002), "Managing corporate sustainability with the Balanced Scorecard:
Developing a Balanced Scorecard for Integrity Management", Oikos PhD summer
academy.
- Birkinshaw J., Hamel G., Mol M.J. (2008). “Management innovation”, Academy of
Management Review, vol. 33, n° 4, p. 825-845.
- Chenhall R.H. (2003) "Management control systems design within its organizational
context: findings from contingency-based research and directions for the future",
Accounting, Organizations and Society, vol.28, n°2/3, pp. 127–168.
- Derujinsky-Laguecir, Aziza, Anja Kern, et Philippe Lorino. (2011) « Une approche
instrumentale des indicateurs de performance », Management & Avenir, vol. 42, no. 2,
pp. 111-132.

18
Revue de Consolidation comptable et de Management de la Performance
ISSN: 2665-752X Numéro 5 Juillet 2020
- Essid, M. (2009), "Les mécanismes de contrôle de la performance globale : le cas des
indicateurs non financiers de la RSE", Doctorat en sciences de gestion, Paris:
Université Paris-Sud.
- Germain C. et Gates S. (2007), "Le niveau de développement des indicateurs de
responsabilité sociale dans les outils de pilotage de contrôle de gestion: une analyse
des pratiques des entreprise", Actes du 28e Congrès de l’AFC, Poitiers.
- Gervais, M. (2000), « Contrôle de gestion », Paris, Economica, 7ème édition ;
- Hamel G. (2006). “The why, what and how of management innovation”, Harvard
Business Review, vol. 84, n° 2, p. 72-84.
- Hartmann F. (2000), « The Appropriateness of RAPM: Towards the Further
Development of Theory », Accounting, Organizations and Society, vol. 25, n° 4-5, p.
451-482.
- Henri Bouquin et Yvon Pesqueux, Vingt ans de contrôle de gestion ou le passage d'une
technique à une discipline, Dans Comptabilité - Contrôle - Audit1999/3 (Tome 5),
pages 93 à 105.
- J. DENT, "Strategy, organization and control: some possibilities for accounting
research", Accounting, Organizations and Society, 1990, n° 15: 3-25.
- J.W.Meyer, B. Rowan (1977), “Institutionalized organizations: formal structure as
myth and ceremony”,American Journal of Sociology,Vol.83, n°2, p.340-363.
- Kalika M. (1987), Structures d’entreprises, réalités, déterminants, performances,
Économica.
- Kaplan R.S. et Norton D.P. (2001), "Comment utiliser le tableau de bord prospectif ?
Pour créer une organisation orientée stratégie", Éditions d’organisation.
- Kaplan R.S., Norton, D.P. (2003), "Le tableau de bord prospectif ", Les Editions
d'Organisation, 311 pages.

- Langevin P. et Naro G. (2003) : « Contrôle et comportements : une revue de la


littérature anglo-saxone ». Congrès AFC-CCA.
- Merchant K. (1981), « The Design of the Corporate Budgeting System: Influences on
Managerial Behaviour and Performance », The Accounting Review, vol. 56, n° 4,
October, p. 813-829.
- Mokhtari B., Asdiou A. (2016), l'intégration des indicateurs de la RSE dans les
systèmes de contrôle: recherche d’efficience et d'efficacité ou recherche de légitimité

19
Revue de Consolidation comptable et de Management de la Performance
ISSN: 2665-752X Numéro 5 Juillet 2020
? Proposition d'un modèle explicatif, Revue D’études en Management et Finance
D’Organisation N°1 mars.
- Nanni, A.J., Dixon, J.R. and Vollman, T.E. (1992), "Integrated performance
measurement: management accounting to support the new manufacturing realities",
Journal of Management Accounting Research, Vol. 4, Fall, pp.1-19
- Philippe Lorino (1991), Le contrôle de gestion stratégique – La gestion par les
activités, Dunod Entreprise.
- Simons R. (1995), levers of control: how managers use innovative control systems to
drive strategic renewal, Harvard Business School Press.
- Supizet, J. (2002), « Le management de la performance durable », Paris, Editions
d’Organisation.

- Youssef E. (2007) « Les systèmes de contrôle traditionnels et modernes : articulation


et modes d'existence dans les entreprises françaises, «comptabilité et environnement »
Paris.
- Zakaria E. (2012), Le contrôle de gestion indicateur de l’engagement éthique de
l’entreprise : Perspective Institutionnelle. Cas d’une filiale française d’un
conglomérat allemand, 4ème Journée d’Etude en Contrôle de Gestion de Nantes.

20
Revue de Consolidation comptable et de Management de la Performance
ISSN: 2665-752X Numéro 5 Juillet 2020

Vous aimerez peut-être aussi