Les Accords Majeurs
Les Accords Majeurs
Les Accords Majeurs
Les autres familles d'accords à trois sons (mineurs, diminués, augmentés), ainsi que ceux enrichis à
4 sons ou plus, sont construits sur le socle des accords majeurs. Aussi, est-il vivement conseillé
de ne passez à l’apprentissage des accords mineurs, puis diminués et augmentés, que quand
la connaissance et la pratique des accords majeurs sont acquises.
d’une fondamentale (c’est la note qui porte le nom de l’accord. Exemple : accord de Mi
majeur, la fondamentale est la note Mi).
d’une tierce majeure, située à 2 tons au dessus de la fondamentale.
d’une quinte juste, située à 3 tons et demi au dessus de la fondamentale.
NB : la fondamentale est la note de référence qui est utilisée pour calculer tous les intervalles, quel
que soit la nature de ceux-ci (majeurs, justes, diminués ou augmentés).
Les chiffres situés à côté des notes symbolisent le nom des intervalles.
Les autres accords à 3 sons (mineurs, diminués et augmentés) ne sont en fait que des modifications
apportées à l’accord majeur. C’est pourquoi, il est crucial que votre connaissance des accords
majeurs soit parfaite, sans hésitation d’aucune sorte.
Dans la pratique, le paramètre le plus important est le temps de réaction, plus précisément le delai
qui vous sera nécessaire pour l'appliquer correctement sur le clavier. Vous devez, de la même
manière qu’un déchiffrage à vue d’une partition, maitriser parfaitement vos accords majeurs. Ils
correspondent à la première étape importante de votre apprentissage de l’harmonie moderne. C’est
sur eux que vous allez construire tout le reste de votre pratique.
Prenez le temps de les apprendre. Ne travaillez pas dans l’urgence et entraînez vous
régulièrement.
Renverser un accord consiste à utiliser les notes de l'accord pour les présenter dans un ordre
différent que la position fondamentale.
Exemple basique
C = do, mi, sol, en position fondamentale, peut devenir : sol, do, mi ou mi, do, sol.
Rien n’empêche un musicien de doubler, voire de tripler une même note : do, sol, do, mi, sol , do.
L’accord sera toujours celui de C, tant que l’on n’introduit pas de note autre que do, mi, sol. Pour
éviter toute confusion, il est important de préciser que la dénomination d'un accord est toujours
séparé de la mélodie. Cela signifie qu'un accord de Do majeur, restera un Do majeur, même si la
mélodie joue une note ré ou une note fa.
Exemple avec l'accord de Sol (sol, si, ré) : 1er renversement : si, ré, sol ; 2e
renversement : ré, sol, si.
2. Le renversement ouvert. C'est un accord présenté de façon « large » avec les deux
mains. Dans ce cas, les possibilités offertes sont nombreuses, mais sa pratique est
techniquement plus difficile, voire délicate. L’avantage de la sonorité d’un accord « ouvert »
est d’offrir une sonorité plus ample et plus profonde.
La sonorité de ces trois accords de Do sont évidemment très différentes. Vous pouvez mesurer, ici,
l’étendue des possibilités offertes. Elles sont énormes, et cela, rien que sur un seul accord. Entrainez-
vous à chercher d'autres positions.
C’est grâce aux positions ouvertes qu’il devient possible de jouer au piano des centaines d’accords
tous différents. Je ne dit pas ça pour vous décourager, mais seulement pour vous faire prendre
conscience des immenses possibilités offertes, comme ici, avec un seul accord. Il n’est donc pas
étonnant de rencontrer, notamment aux États-Unis des ouvrages consacrés exclusivement aux
présentations des accords (voicings).
Parfois, sur une partition ou dans une grille d’accords, il arrive qu’un compositeur note l’accord avec
une basse obligatoire. L’interprète se doit alors de présenter l’accord avec la note grave indiquée ; la
présentation des autres notes supérieures de l’accord restant libre.
La basse peut aussi être étrangère à l’accord et créer ainsi une tension harmonique. Ce genre de
présentation d’accord est répandue, notamment, dans le jazz moderne.
Par ailleurs, dans certaines compositions, la basse peut devenir « marchante » et sert alors de relais
entre les différents accords. C’est sur ce principe que sont souvent construites les lignes de basses
en jazz (walking bass). Ci-dessous, un exemple inspiré du morceau de Procol Harum : « A whiter
shade of pale », dont la source est à retrouver dans l'Aria en Si bémol de Bach.
J e ne vous apprendrai rien si je vous dis que la musique est construite sur des sons ou des bruits
organisés, c'est-à-dire que tout son génère un bruit, mais que l'inverse n'est pas forcément vrai. En
effet, la musique est un bruit qui s'organise dans le temps et dans l'espace par une répartition
"intelligente" de ses sons, en durée et en hauteur. Cela va de la musique primitive jusqu'aux
musiques les plus élaborées.
Le son est l'élément premier qui détermine la musique. L'homme, à un moment de son histoire, a
donc choisi des sons de façon arbitraire pour construire les premières musiques. Si l'on joue de la
musique à travers les quatre coins de la planète, on n'utilise pas tous la même échelle de sons. Elle
varie en nombre et en hauteur. L'échelle des sons est différente si l'on se trouve en Inde, en Afrique
ou en Occident. Les occidentaux ont choisi un système tonal construit sur 12 demi-tons et des
gammes, pour la plupart construites sur sept sons (exemple gamme de do : do, ré, mi, fa, sol, la, si).
Ceci nous amène à nous poser certaines questions :
Mais d'où vient ce choix ? Est-il fondé sur une théorie particulière ?
Le premier repère important est l'octave. Elle est la reproduction à l'identique d'un son, mais à une
hauteur plus aigüe ou plus grave. À partir de cette observation, l'homme a cherché à construire des
intervalles égaux à l'intérieur de l'octave. Ceux-ci pouvant être reproduits à leur tour, d'octave en
octave, vers l'aigu ou vers le grave. Ceci étant, il a fallu déterminer quels sons et en quelle quantité.
Un Africain ou un Hindou ne donne pas les mêmes réponses qu'un Occidental ou un Chinois.
En occident, la musique utilise le système de Pythagore basé sur l'utilisation d'une corde tendue qui
est divisée, selon des principes arithmétiques, par moitié, par tiers ou par quart et ainsi de suite ...
L'échelle des sons de la musique "classique" a donc pour référence une justification scientifique, ce
qui sera par la suite sa raison d'être.
Un accordeur avisé vous dira, que par commodité, la musique " classique " a quelque peu triché avec
ces données naturelles (l'accord des quintes en est un exemple). On qualifiera cette transgression
sous le nom de "système tempéré".
Le système "tempéré" signifie au XVIe / XVIIe siècle, pour permettre à celui-ci d'aller jusqu'à l'extrême
de ses possibilités, de diviser en douze intervalles rigoureusement égaux l'octave afin d'obtenir une
gamme dite "tempérée". Les sons ainsi obtenus, ne correspondent qu'approximativement aux
expériences de Pythagore et aux observations sur la résonance.
Depuis déjà plusieurs siècles, la musique occidentale est basé sur une échelle de douze sons, tous
situés à l'intérieur de l'octave et appelés demi-tons. Mais le côté arbitraire de la musique "classique"
fait que tous les demi-tons n'ont pas la même importance. Le système tonal en retient sept,
constituant la gamme majeure (exemple gamme de do : do, ré, mi, fa, sol, la, si).
Cependant, l'exclusion de certains demi-tons empêche d'avoir des intervalles égaux. La gamme est
donc constituée de tons et de demi-tons : cinq intervalles d'un ton et deux intervalles d'un demi-ton.
Si l'on joue tous les demi-tons constituant le "système tempéré", on exécute une gamme appelée
"chromatique" alors que la gamme majeure de do (exemple) est appelée "diatonique".
Le système tonal est par essence basé sur le "diatonique". Les compositeurs de musiques anciennes
vont exploiter toutes les possibilités offertes par les sept sons du système tonal (chansons de
troubadour, chants médiévaux), même si les compositeurs du 20e siècle mettront ce système à mal
en exploitant plus volontiers le "chromatisme".
Si l'on joue la gamme de do en partant de la note do et que l'on s'arrête à la septième note, la note si,
vous remarquerez une sensation étrange… une envie de poursuivre en continuant à monter jusqu'à
la note suivante, c'est-à-dire jusqu'à la note située à une octave du départ, le do supérieur. Le si est
séparé du do par seulement un demi-ton. Il en résulte une attraction "naturelle" sur le do aigu. La
gamme donne la sensation d'être tirée vers le haut de façon continue.
Un autre exemple de mode à tendance ascensionnelle est le mode de fa ( fa, sol, la, si, do, ré, mi, fa).
D'autres ont à l'inverse une tendance naturelle à attirer vers le grave comme le mode de mi (en
descendant : mi, ré, do, si, la, sol, fa, mi). C'est le mode de la musique grecque antique.
Partons à présent de la note ré et continuons à monter au ré supérieur (ré, mi, fa, sol, la, si, do, ré).
Nous avons à présent un ton de distance entre la septième note et la dernière et non pas un demi-ton
comme dans celui partant de do. Avec son côté "horizontal" (l'attraction a disparu), le mode de ré est
particulièrement apprécié par les compositeurs de musique religieuse et du chant médiéval.
Il faudra attendre finalement l'aube du 20e siècle pour que les compositeurs exploitent à nouveaux les
modes médiévaux, voire les modes orientaux (Ravel) et ceci à leur manière .... c'est ce qui
provoquera la crise du système tonal au cours du 20e siècle. Les musiciens de jazz utilisent de façon
plus prononcée cette approche du système tonal, mais en étant moins spartiate au niveau de
l'enchaînement des accords.
Revenons à présent sur le mode de DO. Celui-ci est l'axe central des musiques allant du 17e au 19e
siècles. Mais qu'en est-il des musiques antérieures ? Pourquoi la musique du moyen-âge, du 13e au
16e siècle, utilisant les monodies de plain-chant, superposant des lignes mélodiques de plus en plus
complexes, a-t-elle fini par se fixer sur le "système tempéré", plutôt que sur ceux dont elle était
sortie ?
Comme souvent, c'est l'oreille qui a le dernier mot. Au cours d'une lente évolution, les compositeurs
ont fini par reconnaître dans certaines agrégations de sons, une plénitude dans la sonorité, mais
aussi une sensation d'équilibre et un certain hédonisme.
Ces agrégations issues du mode tonal se sont justifiées par l'utilisation de la polyphonie sous forme
d'accords à trois sons appelés "accords parfaits".
Construisons ou plutôt cherchons à construire l'accord parfait majeur (pour mémoire, je rappelle qu'un
accord de base est construit sur un ensemble de 3 sons joués en même temps... 2 notes ne
constituant qu'un intervalle).
Prenons comme note de départ la première note de la gamme majeure, la note do et déterminons la
deuxième note. Jouons, en même temps que le do, la note suivante, la note ré. L'effet sonore obtenu
est dissonant. Sautons le ré et attaquons simultanément le do avec la note mi située au troisième
degré. Nous obtenons alors une consonance (les deux notes s'accordent). Nous devons à présent
trouver la troisième note qui finalisera l'accord.
Continuons à poursuivre notre recherche en utilisant la même approche. Associons aux deux
notes do et mi la note fa… le résultat est dissonant, mais avec la note du cinquième degré, la
note sol, nous obtenons à nouveau une consonance. Sol est donc la troisième note de l'accord parfait
majeur. Nous constatons alors que l'accord parfait majeur est construit sur une superposition de
tierces (do/mi et mi/sol).
À cause de la construction de la gamme diatonique qui utilise des tons et des demi-tons, la
superposition des deux tierces n'est pas identique. La plus grande (do/mi) est constitué de deux tons
et s'appelle majeure, alors que la plus petite (mi/sol) est basée sur une distance d'un ton et demi et
s'appelle tierce mineure.
Il en résulte qu'il existe deux types d'accords parfaits à trois sons. Ceux qui commencent par
une tierce majeure (accords parfaits majeurs) et ceux dont la tierce de base est mineure (accords
parfaits mineurs).
Ce qui est important à retenir, c'est le rapport qu'il existe entre la note dite de "basse" ou
"fondamentale" et les notes qui l'accompagnent pour construire l'accord. L'accord parfait s'identifie
par la tierce qui peut-être majeure ou mineure, et par la troisième note, basée sur l'addition immuable
de la superposition des deux tierces, majeure et mineure ou vice-versa. La quinte est donc un
intervalle toujours juste (d'où son nom… quinte juste). C'est un intervalle important et essentiel de la
musique tonale.
Si vous écoutez des chants médiévaux en quinte, ils seront pour vous tout de suite identifiables par
leur couleur typique. L'intervalle de quinte juste était considéré par les Grecs anciens comme la
consonance parfaite entre toutes, alors que la tierce était entendue comme une dissonance.
L'accord parfait majeur est considéré comme un accord fort, alors que l'accord mineur est un accord
affaibli. Pourquoi cela ?
La raison est d'ordre physique liée aux premiers harmoniques naturels. Dans l'accord majeur, la
basse ou fondamentale contient dans sa résonance les deux autres sons de l'accord, à savoir
la tierce majeure et la quinte juste, ce qui donne à ce type d'accord une couleur ronde et entière. En
revanche, dans l'accord mineur, la résonance de tierce mineure est absente à l'état naturel et cela
confère à cet accord son appauvrissement sonore.
Si nous observons l'ensemble des accords que nous pouvons construire sur les différents degrés du
mode de do, nous obtenons trois accords majeurs au 1er, 4e et 5e degré et trois accords
mineurs au 2e, 3e et 6e degré. L'accord diminué qui se trouve placé sur le 7e degré sera expliqué
plus tard, celui-ci compliquant trop les choses dans le cadre de cette leçon. En jouant les 3 accords
majeurs, nous constatons que l'ensemble des sept notes constituant le mode de do y figure.
Les trois accords majeurs constituent le fondement du système tonal et les trois basses qui les
accompagnent en sont les notes pivot. Toutes les principales combinaisons harmoniques du système
s'articulent autour de ces trois notes et c'est pourquoi on leur donne les noms suivants : la tonique
pour le 1er degré, la dominante pour le 5e degré et la sous-dominante pour le 4e degré.
Les variations harmoniques autour de la tonique et de la dominante sont sans conteste les plus
employées dans la musique classique. En poussant à l'extrême la simplification de certaines phrases
musicales, celles-ci se résument le plus souvent autour de l'utilisation des accords majeurs du 1er, 4e
et 5e degré. De nombreuses mélodies classiques reposent sur ce constat. Au départ, le morceau
débute avec l'accord du 1er degré qui précède celui du 5e degré, pour ensuite revenir avec la chute
de la mélodie sur le premier. Vous pouvez constater cela en analysant des morceaux
de Mozart ou Beethoven, pour ne citer qu'eux.
Pour construire le ”parfait accord“, l’octave est divisée en 2 parties : un intervalle de quinte et un
intervalle de quarte : (do… sol et sol…do, en do). Dans l’intervalle de quinte, la tierce joue un rôle
déterminant. Comme la quinte ne divise pas l’octave, la tierce ne fractionne pas l’intervalle de quinte
en moitiés. Si la quinte est divisée en grande et petite tierce, on parle alors d’accord majeur (do…
mi et mi… sol) ; et d’accord mineur quand la petite tierce précède la grande tierce (do… mi b et mi
b… sol).
La question de savoir comment on obtient cette structure d’accords se pose depuis longtemps. La
plupart du temps, l’explication est cherchée dans la série de notes harmoniques. Les 4e, 5e et 6e
notes harmoniques en do sont : do, mi, sol, qui forment ainsi l’accord majeur. La question de savoir
pourquoi cette combinaison fut choisie comme base de structure d’accords reste ouverte. Les plus
grandes difficultés résident dans le fait que l’accord mineur parfait n’est pas représenté dans la série
de notes harmoniques, ce qui conduit à la formation de théories en mode mineur particulières.
L’accord parfait se présente en 3 formes, c’est-à-dire qu’il peut subir 2 renversements. L’accord
parfait peut aussi être altéré. Sur les intervalles de la gamme en mode majeur, on trouve 3 accords
parfaits majeurs sur les 1er, 4e et 5e degrés, et 3 accords parfaits mineurs sur les 2e, 3e et 6e
degrés, alors que sur le 7e degré, l’accord parfait est réduit à un diminué.
Le mode, comme expliqué dans la leçon précédente, est formé par un certain ordre de succession
d'intervalles inégaux (ton et demi-ton) comprenant sept sons dans une octave. Pour le moment, il
s'agit encore d'intervalles relatifs, à la notion encore abstraite.
Quand on utilise le mode de do (ou d'ut), nous suivons une succession d'intervalles que nous devons
franchir. Nous montons la gamme des sept sons qui a comme point de départ la note do.
Sur un piano, le mode de do est constitué seulement par les touches blanches du clavier. Nous
rencontrons deux intervalles d'un ton (do/ré - ré/mi), suivi d'un intervalle d'un demi-ton (mi/fa), puis de
trois intervalles d'un ton (fa/sol - sol/la - la/si) et un dernier constitué par un demi-ton (si/do). À ce
moment précis, nous nous sommes déplacés à l'octave supérieure du premier degré
(le do supérieur).
Pour bien comprendre ce qui va suivre, nous allons faire appel à ces cinq notes que nous avons
provisoirement mises de côté lorsque nous avons exploré la tonalité des sons contenus dans
l'intervalle d'une octave et non plus seulement ceux qui ont servi de base au langage musical
classique. Pour mémoire, rappelons qu'ils étaient au nombre de douze, à égale distance les uns des
autres (que des demi-tons). Nous en avons retenu sept (do, ré, mi, fa, sol, la, si) et nous en avons
laissé cinq en réserve. C'est à présent le moment de les utiliser.
Partons de ré et refaisons ensemble le même chemin que pour la tonalité de do. Tout d'abord les 2
intervalles constitués d'un ton. Si ré/mi est correct, mi/fa pose problème, car il est constitué d'un demi-
ton. C'est le moment d'utiliser les notes mises en réserve. J'utilise un dièse que je positionne devant
la note fa… fa devient donc fa# et nous obtenons à présent un intervalle d'un ton.
Continuons notre chemin et parcourons les degrés suivants : fa # /sol (1/2 ton) sol / la (1 ton) la / si (1
ton) si / do (1/2 ton ). Ce dernier intervalle est incorrect. Nous devons obtenir un ton pour être
conforme à la succession des intervalles. Utilisons un # que nous plaçons devant le do pour obtenir
un ton (do #). Nous retombons, une fois franchi le dernier demi-ton (ré # / mi) sur l'octave de la
tonique, c'est-à-dire le ré.
En procédant ainsi, nous avons reproduit à l'identique les intervalles propres au mode de do. Nous
avons créé la tonalité de Ré (ré, mi, fa #, sol, la, si, do #, ré). La tonalité n'est plus, comme le mode,
quelque chose d'abstrait, une simple série d'intervalles. C'est un groupe unique de sept sons
nommément désignés et ayant entre eux les intervalles types d'un mode.
Normalement, vous devriez à présent voir plus clairement ce qu'est le système tonal. C'est un
système basé sur une certaine échelle de sept sons, que l'on reproduit à volonté à partir de n'importe
quel son initial, créant ainsi autant de tonalités différentes qu'il y a de degrés dans l'échelle
chromatique (constituée uniquement par des demi-tons).
Si nous partons de chaque demi-ton et reproduisons le même chemin que pour l'exemple en ton
de ré, nous arrivons à constituer un ensemble de tonalités basé sur un nombre d'altérations aléatoire.
En les classant par ordre d'importance, nous obtenons deux classements. Le premier est constitué de
sept tonalités comportant des dièses : sol (1 dièse), ré (2 dièses), la (3 dièses), mi (4 dièses), si (5
dièses), fa # (6 dièses), do # (7 dièses) et le second avec sept tonalités comportant des bémols : fa (1
bémol), si bémol (2 bémols), mi bémol (3 bémols), la bémol (4 bémols), ré bémol (5 bémols), sol (6
bémols), do bémol (7 bémols)… celle sans altérations étant la tonalité de do.
Nous rencontrons trois tonalités dites enharmoniques, c'est-à-dire reposant sur les mêmes sons, mais
pas sur les mêmes noms (exemple : do # peut être également un ré b ou fa # un sol b. Il s'agit bien
du même son, mais portant deux noms différents. Les six tonalités enharmoniques sont : do # et ré
b, si et do b et fa # et sol b.
Ces questions méritent d'être posées. Reportons-nous à nouveau sur l'échelle des intervalles et
partons de ré # comme note tonique.
Déjà, les deux premiers intervalles constitués chacun d'un ton posent problèmes. En effet, si le
premier ton donne ré # / mi #, le second donne mi # / fa x (double-dièse) et non pas la note sol. Le
problème se rencontre un peu plus loin avec le si # et le do x (double-dièse). Il est donc impossible de
suivre la même logique que pour la tonalité de do ou de ré sans être obligé d'utiliser des doubles
altérations ou par convenance, de sauter le nom de certaines notes.
Si l'on essaye tous les points de départ des douze demi-tons en partant des dièses (do #, ré #, mi #,
fa #, sol #, la #, si #) et des bémols (do b, ré b, mi b, fa b, sol b, la b, si b) par élimination, seules les
six tonalités précitées sont compatibles avec les dièses et les bémols.
LA MODULATION
Chaque fois qu'un compositeur passe au moyen d'un enchaînement harmonique ou par tout autre
artifice d'une tonalité dans une autre, il fait ce qu'on appelle une modulation. Ce n'est pas un hasard
si un compositeur utilise telle ou telle tonalité. Chacune d'entre-elles possède une couleur particulière
exprimant la douceur, la joie ou la mélancolie. Elle est pour le musicien le terrain de l'expérience
sonore, comme le peintre avec l'opposition de couleurs.
L'exemple de La Marseillaise utilise l'expression de la modulation en suivant au plus près son texte.
Jusqu'à "l'étendard sanglant est levé", la musique reste dans la tonalité d'origine en utilisant le
principe expliqué dans la leçon précédente, à savoir l'utilisation des accords de tonique, sous-
dominante et dominante. Arrivée à "Entendez-vous dans nos campagnes", nous dressons l'oreille et
sur le vers "mugir ces féroces soldats", le morceau module dans une nouvelle tonalité qui donne une
couleur sinistre à l'image évoquée par les paroles.
Autre exemple avec Le boléro de Maurice Ravel, pièce assez unique dans sa constitution où le
compositeur reste dans la tonalité de do majeur pendant un très long moment (plus de quinze
minutes). Soutenu par un rythme répétitif et l'utilisation d'une orchestration élaborée qui s'enrichit petit
à petit, le morceau trouve dans son final un dénouement inattendu avec l'utilisation de l'accord de
tonique de mi majeur. Ce principe sera utilisé également par les compositeurs de jazz modal ( Miles
Davis, John Coltrane ou Jean-Luc Ponty, par exemple).
Avec la diversité de ses nombreuses tonalités et la possibilité qu'il a de moduler d'un ton dans un
autre, le langage que le système tonal met à la disposition du musicien est d'une prodigieuse
richesse. Il l'est bien plus encore, si le compositeur utilise les tonalités mineures.
Vous avez certainement lu ou entendu parler de morceaux en La mineur ou Mi mineur... Nous avons
vu dans la leçon précédente que la tonalité de do majeur tournait autour de trois notes pivots, l'une
sur le premier degré, la tonique, une autre sur le cinquième, la quinte et une autre sur le quatrième,
la quarte. Les accords construits sur ces trois notes étaient tous trois des accords parfaits majeurs et
contenaient à eux trois l'ensemble des notes de l'échelle.
Considérons la note la comme une tonique. Elle supporte un accord parfait mineur (la, do, mi). À la
quinte du la, la note mi en supporte un autre (mi, sol, si). À la quarte du la, la note ré supporte un
troisième accord parfait mineur (ré, fa, la). Nous constatons une similitude avec la tonalité de do avec
la possibilité d'entendre toutes les notes de l'échelle et une position identique des trois accords
mineurs avec ceux de la tonalité majeure : premier, quatrième et cinquième degré.
On peut en conclure qu'un mode mineur, parallèle au mode majeur, existe bel et bien. Il est en
relation étroite avec lui, et est régi par les mêmes lois. Le mode mineur, à cause de cette relation, est
considéré comme un mode relatif du mode majeur. La tonalité mineure aura les mêmes avantages
que son homologue majeur : elle pourra être transposée, modulée.
Chaque tonalité majeure a donc sa tonalité mineure relative. Le compositeur se retrouve devant
des possibilités accrues. Il va pouvoir doubler le nombre des couleurs de sa palette.
Si nous jouons la gamme mineure relative (dite "harmonique") : la, si, do, ré, mi, fa, sol #, (la),
l'étrangeté sonore du septième degré (sol #)donne une couleur "arabisante" à la gamme. La
modification du septième degré sur la tonique à l'octave est un choix voulu par les musiciens anciens
qui ne purent se résigner à voir dans le mode de la un ton entier occuper cet emplacement. Ils
modifièrent en conséquence le mode mineur en diésant le sol.
Pour faire des accords dissonants, le musicien rajoute une tierce supplémentaire au-dessus de la
quinte. Ces accords à quatre sons sont appelés accords de septième. L'accord à cinq sons, partant
du même principe, par superposition de tierces, s'appelle neuvième. Ces accords sont, à travers
leurs utilisations outrancières, le langage de base de tout musicien de jazz.
En musique classique, il en va autrement. Les musiciens préclassiques, un peu intimidés par leur
conquête soudaine, utilisaient de façon prudente ces nouvelles couleurs sonores. À l'inverse du jazz,
qui naîtra bien plus tard, ces harmonies, pour ne pas choquer les oreilles des musiciens de l'époque,
mais pas seulement eux, devaient être préparées pour ensuite être résolues.
Préparer un accord consiste à faire entendre la note appelée à faire dissonance (à la faveur d'un
accord précédent), avant d'attaquer celui où sa présence doit créer une sorte de perturbation. Quant
à la résolution de la dissonance, cela consiste à lui faire suivre sa pente naturelle vers un autre son
où disparaît sa couleur subversive.
Sans trop entrer dans les détails, disons simplement que cette pente naturelle vient de ce que cette
note ajoutée à l'harmonie y engendre une sorte d'attraction/répulsion entre elle et l'une des autres
notes de l'accord. Ces deux notes tendent alors, soit à basculer l'une vers l'autre, soit au contraire à
s'éloigner, à la faveur de l'accord suivant.
Entre le si et le fa (quinte diminuée) de l'accord ci-dessus, il existe une attraction qui tend à les
rapprocher l'une de l'autre vers la consonance d'une tierce. Cette dissonance qui apparaît dans
l'accord de G 7, par l'attraction naturelle, s'est résolue vers l'accord parfait de la tonique.
La dissonance a joué dans l'enchaînement des deux accords un rôle essentiel dans le renforcement
de la tonalité de do. C'est ce qui explique toute l'importance de l'accord du cinquième degré ou
accord de dominante à exercer une fonction essentiellement tonale. Mais, malgré l'admission de cette
dissonance et de son rôle, la plupart des compositeurs classiques n'ont pu s'empêcher de résoudre
cet accord.
L'arrivée des musiques modernes du 20e siècle a bousculé cet état d'âme en éludant tout simplement
toute forme de préparation et de résolution de toute dissonance, si agressive soit-elle.
Une autre utilisation de la dissonance en musique classique et qui a beaucoup servi la musique
moderne en précipitant la désintégration du système est l'utilisation des notes en tension. Dans ce
cas précis, le compositeur utilise des sons voisins en remplacement de ceux constituant l'accord de
base. Après quoi, le musicien résout la dissonance en faisant glisser la ou les notes intruses vers la
ou les notes dont elles avaient usurpé la place. Cela s'appelle l'appoggiature.
Aujourd'hui, les compositeurs n'ont de cesse d'utiliser cet artifice, sans éprouver le besoin de le
résoudre. Petit à petit, ils créent des quantités d'agrégations harmoniques dont le sens sous-entendu
n'a plus de réalité que pour eux. D'ailleurs, ces agrégations ont fini par n'avoir aucune référence
quelconque au système tonal d'où qu'elles proviennent.
LEÇON GRATUITE
LA FIN DE L'HARMONIE CONSONANTE
Cette leçon n'est pas une suite de définitions purement théorique. Elle tente de
répondre de façon claire à la compréhension des bases de l'harmonie concernant
notamment les raisons de l'éclatement du système consonant.
À l'époque classique, les pièces musicales étaient marquées par une tonalité déterminée : sonate
en la majeur, concerto en mi mineur, etc... ce qui ne signifiait pas que toutes les harmonies
entendues durant toute l'étendue du morceau appartenaient à la tonalité décrite dans le titre, pas plus
que les différents mouvements d'une symphonie en fa n'étaient écrits en fa. La tonalité portant le titre
est d'une certaine façon la tonalité dominatrice, accompagnée le plus souvent par des modulations
dans les tonalités voisines.
Les tonalités sont voisines quand elles ont le plus grand nombre de notes (ou sons) en
commun. Elles sont distantes les unes des autres d'une quinte. Prenons l'exemple de do majeur. Les
tonalités voisines seront le sol (quinte supérieure), qui est la tonalité de la dominante et le fa (quinte
inférieure). Pour la tonalité de sol, seul le fa devient fa# et pour la tonalité de fa, le si devient si b.
Toutes les autres notes sont communes à ces trois tonalités. Il faut rajouter également la tonalité
relative mineure qui est très employée dans les œuvres classiques.
Dans une symphonie classique, le compositeur, sauf fantaisie de sa part, utilise un schéma-type qui
se déroule généralement comme ceci :
Le premier mouvement est du type allegro avec parfois une introduction. Le mouvement est
lui-même divisé en trois parties : l'exposition, le développement et la réexposition.
L'exposition est pour le compositeur le moyen d'annoncer la tonalité principale. Le
compositeur acclimate l'auditeur à la tonalité du premier thème avant de moduler et de
présenter le second thème, qui contraste avec le premier par une allure générale moins
rythmique, mais plus mélodique. La réexposition, comme le nom l'indique, revient au ton
général et conclut sur l'exposition rejouée. Le premier mouvement met en place les deux
thèmes de façon à imprimer la couleur, le climat particulier voulu par le compositeur. À partir
de la moitié du 19e siècle, pour se défier de l'impatience de l'auditeur, la reprise était parfois
supprimée.
Le rôle des changements de tonalités est très important. Si, en musique de films, le
compositeur est soumis à des exigences de "timing" qui l'obligent à écourter de temps en
temps le développement des tonalités et des différents tableaux sonores qui en découlent,
le compositeur classique a plus de liberté. Il peut aborder les changements de tonalités
avec plus de sérénité. Il utilise les thèmes et entame avec eux un jeu subtil et savant. Il les
fragmente, les superpose, les imbriquant les uns dans les autres. Il promène l'auditeur dans
d'autres tonalités nouvelles et assez éloignées de la principale, presque pour la faire
oublier, de façon que lorsqu'elle réapparaîtra au bout de quelques minutes, l'auditeur aura
une certaine satisfaction à l'entendre à nouveau, comme sécurisé.
Donc, quand le compositeur estime en avoir assez dit, il retourne à la tonalité principale et
réexpose le thème, mais par une écriture souvent différente, orchestrale ou rythmique, où
les deux à la fois. Cette réexposition a pour but de donner à l'ensemble de l'œuvre un
équilibre, une symétrie. Cette forme s'applique aussi bien à la symphonie qu'à la musique
de chambre ou la sonate.
Viennent ensuite deux ou trois autres mouvements.
Le second est soit un scherzo, soit un menuet. Le scherzo est généralement d'un tempo vif.
Il est de même forme que le menuet, mais comporte deux idées d'allure rythmique, plus ou
moins dérivées l'une de l'autre et qui sont jouées chacune deux fois. S'ajoute à cela,
parfois, une partie appelée trio, mélodique et expressive.
Le troisième est un mouvement lent, parfois inversé avec le second mouvement. Il est pour le
compositeur, le moment où celui-ci apporte du lyrisme. Comme pour le premier mouvement,
l'ensemble est symétrique. Il ramène la mélodie exposée au début, après un passage
modulant où surgissent des idées annexes.
Le quatrième mouvement porte souvent le nom de finale. Il est par principe vif et affecte
généralement la forme d'un rondeau. Le thème joue le rôle d'un refrain qui revient plusieurs
fois, venant s'insérer entre des couplets où la "fantaisie" du compositeur est souvent
présente.
La musique classique est donc construite au moyen de symétries entre des éléments thématiques
régulièrement ramenés au premier plan par une tonalité principale qui sert de lien à l'ensemble de la
structure..
1 - L'octave est l'intervalle dans lequel cohabitent les sons avec lesquels, nous occidentaux,
nous travaillons, écoutons et construisons la musique.
2 - L'échelle des douze sons divise l'octave en douze intervalles rigoureusement égaux… les
demi-tons.
3 - À partir de ces douze sons, sept sont sélectionnés et construisent une échelle musicale
appelée mode de do.
4 - La constitution de ce mode est définie par une succession immuable d'intervalles
comprenant des tons et des demi-tons.
5 - Chaque note est le point de départ d'une nouvelle tonalité qui utilise une ou plusieurs des
cinq notes laissées vacantes.
6 - Le mode donne naissance à des accords parfaits composés de trois sons. Ils sont
obtenus par la superposition d'intervalles de tierce majeure ou mineure. Ils sont hiérarchisés
de façon rigoureuse : l'accord du premier degré (tonique), du quatrième (sous-dominante) et
du cinquième degré (dominante). Ils déterminent sans équivoque la tonalité dans laquelle
on se trouve.
7 - La possibilité pour un musicien d'enrichir un accord en rajoutant des notes et par là-même
de créer des accords dit "dissonants".
8 - La possibilité à un compositeur de passer d'une tonalité à une autre, à l'intérieur d'une
œuvre. C'est la modulation.
Bien avant Mozart, la musique était beaucoup moins "savante", moins codifiée. Elle se contentait du
minimum. La mélodie, la ligne de basse et quelques chiffres répondant à une convention suffisaient à
l'artiste pour l'interpréter. Le musicien était libre d'agir en fonction de sa compréhension des écritures.
Il en disposait à son gré. Bien sûr, les notes constituant les accords n'étaient pas remises en
question.
Tant que nous ne nous écartons pas des notes composant la base de l'accord, celui-ci reste le
même. Si vous jouez sur un piano do, mi, sol (accord de do), rien ne vous empêche de doubler ou
tripler ces notes en utilisant vos deux mains. Cela reste toujours un accord de Do.
Mais attention ! Si par exemple, vous décidez d'utiliser la note mi en basse (ce qui donne pour
l'accord de do : mi, sol, do), vous opérez un renversement de l'accord. Ce n'est plus exactement un
accord parfait majeur à l'état fondamental, mais un accord dit de premier renversement ou accord
de sixte. Il reste tout de même un parent proche de l'accord Do fondamental, même s'il n'a pas une
forme aussi conclusive que l'accord en position fondamentale. Renverser un accord n'est donc pas
sans conséquence. Il ne joue plus le premier rôle.
En musique classique, les morceaux finissent souvent par des cadences parfaites, c'est-à-dire en
utilisant l'accord de dominante du cinquième degré (souvent un accord de septième) qui précède
l'accord de tonique du premier degré. Si à présent vous remplacez l'accord de Do position
fondamentale, par le renversement de sixte, voilà ce que cela donne :
Si vous jouez ces deux exemples, vous constatez que si le premier exemple à une couleur finale (pas
de renversement sur l'accord de tonique), le second appelle une suite.
Tout accord est donc individuel? mais également dynamique. Isolé des autres, il est statique. Si je
joue un accord tout seul, il n'appelle rien en particulier, puisqu'il n'est pas solidaire de ce qui précède
ni de ce qui suit. Un accord de do majeur, joué dans sa position fondamentale tout seul, nous installe
dans la tonalité de do majeur. Mais si j'imagine que cet accord de do majeur est le cinquième degré
de la tonalité de fa (accord de dominante) ou le quatrième degré de la tonalité de sol (accord de sous-
dominante), mon accord de do majeur n'est plus statique, mais dynamique. Il est donc nécessaire
d'avoir au moins deux accords en harmonie consonante pour déterminer de façon certaine
une tonalité.
Mais tout change avec l'adjonction d'un quatrième son et plus exactement avec l'utilisation de
l'accord de septième de dominante. Celui-ci a une place unique en mode majeur, celui
du cinquième degré. Il renforce la résolution de la cadence parfaite sur le premier degré.
Aujourd'hui, la musique moderne utilise cet accord d'une tout autre façon, voire de façon exclusive,
comme dans la musique blues où le musicien est capable de jouer uniquement des accords de
septième… mais ceci est une autre histoire !
Le musicien qui ne veut pas de cette cadence parfaite, peut faire ceci :
Dans ce cas, il y a modulation dans le ton de la. L'exemple suivant nous montre une modulation dans
le ton de fa :
En rajoutant une quatrième note aux accords du mode majeur, nous construisons un ensemble
d'accords bâti sur des intervalles de septième majeure et mineure. Les accords obtenus avec la
septième majeure au premier et quatrième degré ont une sonorité dure, mais aussi plus statique.
Jusqu'à l'époque des musiciens "impressionnistes" (Debussy, Ravel…) ce type d'accord était utilisé
de manière "raffinée" avec retard ou en arpège, comme chez Bach... d'où son modernisme. Ce
compositeur utilisant même des accords demi-diminué dans ses préludes. Accords que l'on retrouve
dans de nombreux standards de la musique brésilienne ou du jazz. Le cas particulier de cet accord
sera abordé une autre fois.
Dans l'exemple qui suit, l'utilisation de l'accord de do majeur 7 s'exécute en douceur par le jeu du
chromatisme (do, do majeur 7, do 7). L'emploi des arpèges accentue la dilution de la septième
majeure (note si) dans l'accord. L'accord do majeur 7 est utilisé ici comme accord de transition.
L'arrivée ou plutôt l'autorisation chez certains compositeurs du 19e siècle et 20e siècle de l'utilisation
de l'harmonie dissonante a mis à mal le système tonal qu'utilisaient les compositeurs plus anciens, la
couleur tonale étant moins marquée.
L'utilisation d'une cinquième note (9e), d'une sixième note (11e) voire de la septième note (13e) n'a
rien arrangé. Déjà l'utilisation de la neuvième majeure diminue le désir de résoudre sur la tonique,
bien qu'à nos oreilles, elle semble naturelle.
Ce type d'harmonie était déjà présent au 18e siècle, mais présentait alors à cette époque une
certaine fraîcheur. Aujourd'hui, la musique moderne et notamment la musique jazz abuse de ces
accords en expansion, comme une sorte de provocation pour l'oreille de l'auditeur. Ainsi, à mesure
que l'harmonie se complique par l'apport de nouvelles dissonances, ces nouvelles agrégations
deviennent plus contemplatives. Le musicien ayant tendance à s'y installer de façon durable.
La désagrégation du système tonal s'est accélérée avec l'introduction de note étrangère à la tonalité,
dont voici deux exemples.
La note fa # (#11) sur le premier accord et la note ré b (b9) sur le second accord n'appartiennent pas
au mode majeur.
Plusieurs possibilités s'offrent à nous. J'en ai choisi deux. L'accord est divisible en trois accords
successifs, le premier est l'accord de do (do, mi, sol), le deuxième est un sol majeur partant de la
note sol (sol, si, ré) et le troisième accord offre deux possibilités, celui d'un accord de ré mineur (ré,
fa, la) construit sur la tonalité de do ou un accord de ré majeur (ré, fa#, la) étranger à la tonalité
majeure de do. Dans ce dernier cas, l'accord est constitué de trois accords parfaits majeurs
consécutifs.
Utilisation dans l'exemple suivant d'un accord du cinquième degré et utilisant une neuvième mineure
et une onzième augmentée étrangères au mode majeur.
Ces accords aux couleurs jazz introduisent dans une harmonie supposée tonale, une ou plusieurs
notes étrangères à la tonalité de l'accord, créant ainsi un certain flottement dans le système tonal. La
force tonale se manifeste donc avant tout par l'utilisation des intervalles. Ainsi, si votre accord
démarre par la fondamentale suivie d'une quinte, il renforce sa couleur tonale. La quinte est un
intervalle de base puissant sur lequel on peut construire beaucoup de choses sans trop altérer la
couleur tonale.
Exemple d'une suite d'accord basée sur l'intervalle d'une quinte à la main gauche et passant d'une
couleur consonante à des tensions dissonantes.
Nous avons vu précédemment que le système tonal est un système diatonique. L'intrusion de notes
étrangères apporte un nouvel élément, celui du chromatisme. Dans un morceau classique écrit
en do, un compositeur n'est pas obligé de se servir uniquement des sept notes : do, ré, mi, fa, sol, la,
si. Rien ne lui interdit d'utiliser des dièses ou des bémols (fa#, la b, etc.), même sans avoir recours à
la modulation. Mais l'utilisation de ce chromatisme n'est qu'un cheminement pour aller d'un point à un
autre, ce sont des notes de passage ou bien un ornement, comme une broderie ou une appoggiature.
Elles ne sont qu'une simple inflexion à la tonalité.
Si nous regardons un peu du côté du jazz, ce procédé est très souvent utilisé, même de façon
systématique, pour développer des phrases improvisées. On parle même de "jeu out", lorsque le
musicien, volontairement, improvise dans une tonalité étrangère à l'accord. En musique classique,
pourtant plus sage du côté de la dissonance, l'utilisation de note étrangère à la tonalité commence à
se rencontrer à partir du 19e siècle (Bizet, Wagner) puis plus férocement à partir du 20e siècle
(Ravel, Debussy, Fauré, Satie, Bartök…) allant jusqu'à opposer la même note de façon naturelle et
altérée (la et la# ou si et si b, par exemple).