Comment Faire Uninlay-Onlay Esthetique

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Restauratrice

f o r m at i o n

Comment faire
un inlay-onlay esthétique ?
De la préparation à la temporisation

ADDA
Académie De Dentisterie Adhésive
coordination Frédéric Raux

Frédéric Raux, Lucile Dahan

Quels matériaux
de restauration choisir ?
Dans le premier volet de cette série Avant même de se saisir de la turbine, il est important
de trois articles [3], nous avons vu de déterminer le matériau de restauration envisagé.
les critères de choix permettant En effet, ce choix conditionnera les paramètres
de poser objectivement l’indication architecturaux de notre préparation, les traitements
des restaurations partielles indirectes de surface dentaire et prothétique et le matériau
d’assemblage.
des secteurs postérieurs. Nous allons,
Quel est le cahier des charges des matériaux des res-
dans ce deuxième article, aborder taurations partielles ?
les étapes cliniques de réalisation
d’un inlay-onlay, depuis la préparation
cavitaire et l’empreinte jusqu’à Critères de sélection
la temporisation et la transmission du matériau de restauration
des informations nécessaires unitaire
Le matériau de restauration idéal doit répondre au
au prothésiste. Ce n’est que dans
cahier des charges suivant [5] :
le dernier article que nous verrons les clés • permettre une approche la plus conservatrice de
d’un assemblage esthétique, fonctionnel tissus sains possible, lors de l’aménagement de l’es-
et pérenne des inlays-onlays esthétiques pace prothétique nécessaire ;
postérieurs. • restaurer une morphologie naturelle et fonction-
nelle de la dent ;

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inlays-onlays

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1 2
1. Structure d’un composite micro-hybride (vue MEB, 2. lingotins de céramique disilicate de lithium (IPS E-maxPress®, Ivoclar
Pr M. Degrange). Vivadent).

• redonner une résistance mécanique à la dent res-


taurée, compatible avec sa fonction ; En savoir plus
• assurer une adaptation optimale au niveau des Différents types de composites sont encore utilisés
bords et des interfaces ; aujourd’hui pour les restaurations partielle indirectes
• être biocompatible ; postérieures : les composites micro-hybrides (charges
• être radio-opaque ; de 0,04 micron à 1 micron), les nanochargés (charges
• assurer la plus grande longévité. de l’ordre du nanomètre, dispersées ou regroupées
en “cluster”) et les nano-hybrides (charges
Trois matériaux répondent à ce cahier des nanométriques associées à des charges micrométriques
charges : de taille variable).
• les alliages métalliques ; Les micro-hybrides présentent une excellente
• les résines composites ; résistance mécanique (notamment à l’abrasion)
• les céramiques. et un bon état de surface (aptitude au polissage) [2].
Chacune de ces familles présente des avantages et La nouvelle tendance des composites nano-chargés
des inconvénients qui vont guider le choix du prati- et/ou nano-hybrides présente encore trop peu de recul
cien. Ayant décidé de traiter des restaurations esthé- clinique pour être conseillée dans la réalisation
tiques, nous n’aborderons ici que les deux derniers, à des inlays-onlays.
savoir les composites et les céramiques.
Comment choisir entre ces deux familles ? Et au sein
de chacune, quelle sous-catégorie retenir pour nos
restaurations partielles ? Tableau 1 - Avantages et inconvénients des composites
dans la réalisation d’inlay-onlay
Les composites
Avantages Inconvénients
Les résines composites sont constituées d’une
matrice de résine dans laquelle sont réparties des Perte des contacts proximaux dans
charges minérales silanisées (fig. 1). Les composites Esthétique
le temps
utilisés par les prothésistes pour les inlays-onlays
sont identiques ou équivalents à ceux utilisés dans Perte de la morphologie occlusale
Réparation possible
nos cabinets [1]. La seule différence réside dans le dans le temps
fait qu’ils sont polymérisés à des pressions et à des Résistance à l’abrasion proche Altération de la teinte dans
températures supérieures afin d’augmenter leur de celle de l’émail le temps
degré de conversion. Cependant, ces traitements
n’influent en rien le comportement mécanique ni Tolérant à la manipulation
leur vieillissement à long terme de ce matériau [12].
Les avantages et inconvénients des résines composi- Comportement mécanique
tes sont résumés dans le tableau 1.

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Les céramiques En savoir plus


En dentaire, la céramique est un matériau composé d’oxydes
(99 %), mis en forme à partir d’une poudre et dont la consoli- • Les vitrocéramiques : on distingue
dation mécanique se fait par frittage en phase liquide ou solide, les céramiques feldspathiques à haute teneur en
suivi ou non d’une injection de verre ou d’un usinage [15].
leucite (Empress®, IvoclarVivadent),
les dilisilicates de lithium (Empress II®
et IPS E-maxPress®, IvoclarVivadent)
Trois paramètres principaux nous orientent dans le
et les fluoroapatites (utilisées uniquement
choix du type de céramique pour nos inlays/onlays :
comme céramique cosmétique).
• La translucidité : les restaurations postérieures remplaçant
Les vitrocéramiques sont mis en forme à l’état de
une quantité importante d’émail, la translucidité du matériau
verre et subissent un traitement thermique
utilisé devient un facteur primordial en terme de mimétisme
de cristallisation volontaire, partiel et contrôlé
esthétique. Il peut être aussi nécessaire de jouer sur la transluci-
[15]. La microstructure est de type matrice
dité d’une restauration pour masquer des discolorations.
vitreuse à phase cristalline dispersée.
La céramique choisie devra présenter diffé- Elles possèdent d’excellentes propriétés
rents niveaux de translucidité. mécaniques (résistance à la flexion
• L’aptitude au collage : la pérennité des restaurations par- de 350 MPa pour les disilicates de lithium),
tielles postérieures est assurée par la fiabilité de leur mode d’as- une usure identique à celle des dents
semblage [6, 11]. Les propriétés biomécaniques des joints collés antagonistes, et d’excellentes propriétés optiques
compensent la fragilité de certaines céramiques. Actuellement, (il existe différentes opacités pour masquer
le collage le plus efficace et reproductible est obtenu grâce à un les dyschromies).
ancrage micro-mécanique (mordançage à l’acide fluorhydrique)
• Le système In Ceram® : on distingue
et à un couplage chimique (silane) [5].
l’In Ceram Alumina® (85% d’alumine),
La céramique choisie devra être mordançable l’In Ceram Spinell® (85% de MgAl2O4)
à l’acide fluorhydrique, et donc contenir du verre. et l’In Ceram Zirconia® (33% de Zircone, 67%
• La résistance mécanique : les céramiques sont des maté- d’Alumine In Ceram). Mise en point par
riaux fragiles : elles ne se déforment pas avant de casser. Elles M. Sadoun en 1985, cette technique comprend
présentent en général une résistance faible en traction et en une étape de barbotine, d’agglomération,
flexion, mais excellente en compression ce qui permet de les de frittage et d’infiltration. La microstructure
utiliser dans les secteurs postérieurs, où les dents peuvent sup- est de type matrice cristalline à phase vitreuse
porter jusqu’à 111 Newtons [13]. Le collage va permettre de infiltrée. Seule l’In Ceram Spinell® possède
compenser cette fragilité en agissant comme un amortisseur, en la translucidité nécessaire à la réalisation
dissipant à l’intérieur du joint collé les contraintes transmises à d’inlays/onlays céramiques. Ses propriétés
la céramique lors de la fonction [8]. mécaniques en flexion sont élevées, l’usure
La céramique choisie devra être résistante de la restauration est identique à celles des dents
mécaniquement et être collée. antagonistes et elle présente une grande
Seules deux classes de céramiques répondent à ces trois impéra- translucidité. Cette céramique est utilisée
tifs : les vitrocéramiques et l’In Ceram Spinell® (Vita) (tableau 2). uniquement en infrastructure : une céramisation
Les céramiques à base de zircone et alumine ne répondent ni cosmétique est donc nécessaire.
aux critères optiques ni d’aptitude au collage.

NB. La ténacité représente


la résistance à la propagation Tableau 2 - Propriétés des céramiques
d’une fissure. Plus elle est
élevée, plus le matériau sera Résistance en Ténacité Module de
Matériaux Translucidité Assemblage
résistant à la fracture. flexion (MPa) (MPa.m1/2) Young (GPa)
Le module de Young
caractérise la déformation Disilicate de lithium 250 – 350 1 90 - 110 + Collage +++
d’un matériau lorsqu’on
lui applique une contrainte.
Plus il est élevé, plus le Vitrocéramique
100 - 160 0,7 - 1 60 - 80 ++ Collage +++
matériau est dit « fragile ». renforcée à la leucite

In Ceram Spinell® 350 - 450 2,2 255 +++ Collage +/-

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inlays-onlays

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Si la céramique est retenue pour la réalisation Tableau 3 - Avantages et inconvénients
des inlays-onlays en céramique
d’inlays-onlays, la vitrocéramique (renforcée à la
leucite ou disilicate de lithium) semble le matériau Avantages Inconvénients
de choix à ce jour du fait de sa grande aptitude au
collage et de ses propriétés optiques (fig. 2). Exigeant en termes
Esthétique
de mise en œuvre clinique
Elle peut être mise en forme de façon artisanale
(technique de pressée) ou par un procédé de Biocompatibilité Coût élevé
Conception et Fabrication Assistée par Ordinateur
(CFAO). Le prothésiste a alors le choix de réaliser soit Stabilité dans le temps
une infrastructure de son inlay-onlay, sur laquelle des contacts proximaux Non réparable
et occlusaux
il montera de la céramique cosmétique (technique
dite de « pressée-stratifiée »), soit de confectionner Stabilité dans le temps Possible abrasion
la pièce dans son intégralité et de la maquiller dans de la teinte de l’antagoniste
un second temps. Les avantages et inconvénients des
Peu d’accumulation de plaque Nécessité d’un collage
céramiques sont résumés dans le tableau 3.

Comment choisir entre le composite et la céramique ?


(d’après Dietschi et Spreafico)[5]

Le composite est plus tolérant à la manipula- Tableau 4 - Comparaison des propriétés des composites
tion et peut être modifié, réparé par des ajouts et des céramiques dans le cas de restaurations unitaires partielles
de composite en technique directe. De ce fait,
Paramètres Céramiques Composites
il offre une plus grande sérénité aux praticiens
débutant dans la pratique des inlays-onlays. Facilité des procédures cliniques + ++
C’est son principal avantage.
Le composite sera préconisé pour les patients Facilité des procédures de laboratoire + +++
atteints de parafonctions (présences de facettes
Réparations et retouches intra - buccales 0 ++
d’usures sur les dents), en cas d’espace prothé-
tique faible ou quand les dents antagonistes Esthétique : - à court terme +++ +++
seront reconstituées par un matériau de moin- - à long terme +++ ++
dre résistance à l’abrasion comme les alliages
précieux, l’amalgame ou du composite. Polissage + ++

Résistance à l’usure du matériau +++ ++


Dans tous les autres cas, les propriétés méca-
niques supérieures des vitrocéramiques et la Fragilité + ++
meilleure pérennité de leur intégration esthéti-
que et des contacts occlusaux et inter-dentaires Coefficient d’expansion thermique +++ +
pousseront le praticien expérimenté à les préfé-
rer pour ses restaurations postérieures partiel- Efficacité du collage ++ ++
les (tableau 4).
Stabilité chimique +++ +

Biocompatibilité +++ ++

Coût 0 +

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Quels types de préparation


réaliser ?
Ce n’est qu’après avoir retiré les éventuelles restaurations
existantes et réalisé l’éviction des tissus carieux que nous
pouvons confirmer l’indication d’un inlay ou d’un onlay
(fig.  3). L’analyse du volume de la perte de substance, des
structures résiduelles et des rapports d’occlusion guidera
notre préparation. Le choix du matériau prothétique, fait en
amont de cette étape clinique de préparation peut à ce stade
être réévalué.
Important Pour que l’intégration esthétique de notre
restauration soit parfaite, le choix de la teinte doit être fait avant
de poser notre champ opératoire et de fraiser la dent. Cela 3
évite de recevoir un inlay-onlay trop lumineux, dont la teinte 3. Situation initiale de 35 et 36 après retrait
aurait été prise en fin de séance, sur un émail déshydraté. de l’ancienne obturation et des tissus carieux

Cliniquement, les préparations d’inlay-onlay


esthétiques doivent répondre à plusieurs
impératifs :
Économie tissulaire : cela passe par la conservation si
possible des crêtes marginales, la préservation de la vitalité
pulpaire (avec éventuellement la pose d’un fond de cavité),
la conservation des tissus infiltrés ou colorés non carieux, et
l’éventuel comblement des contre-dépouilles au composite.
Principes architecturaux : il faudra ménager un espace
homogène en épaisseur et largeur :
- minimum 2,5 mm pour un inlay-onlay céramique (3 mm au
niveau de la poutre occlusale) (fig. 4) ;
- minimum 1,5  mm pour les restaurations en composite
(2 mm au niveau de la poutre occlusale) (fig. 5) ;
- le fond de la cavité devra être plat et la préparation ne pas 4
présenter d’angles vifs, qui risqueraient de fracturer la pièce
prothétique ; 4. Préparation pour un onlay céramique sur 16.
- les parois auront une dépouille minimale de 10°. Le mode
d’assemblage par collage permet de tolérer des dépouilles plus
importantes .
Forme de la limite périphérique : congé large ou épaulement
à angle interne arrondi [5], sans chanfrein associé.
Situation des limites périphériques : la situation supra-
gingivale des limites permet une bonne lecture du profil
d’émergence, une isolation plus simple lors de l’assemblage et
l’élimination aisée des excès. Elles doivent être parfaitement
polies afin de faciliter leur enregistrement et leur reproduc-
tion sur le modèle de travail en plâtre. La présence d’émail
périphérique assure la pérennité de notre assemblage collé. En
vestibulaire, la limite pourra être déplacée cervicalement afin
que le joint dento-prothétique soit le plus invisible possible.
Limite occlusale : pour éviter de fragiliser le joint, les dents 5
antagonistes ne doivent pas avoir de contacts occlusaux sta-
tiques ni dynamiques avec les limites de notre prépara- 5. Préparation pour un onlay composite sur 16.
tion (absence d’interférence). Les cuspides jugées fragiles

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(≤ 2 mm d’épaisseur et/ou non soutenues par de la Fond plat
dentine) seront recouvertes (réalisation d’un onlay)
(fig. 6). Angles internes arrondis
Pas d’angles
Si les cuspides d’appui sont fragilisées, elles seront vifs
englobées et cerclées (congé ou épaulement à angle
interne arrondi) afin d’éviter tout phénomène d’écar- Dépouille de 10°
tement du joint lors de la fonction. Les cuspides Tolérance accordée
par le collage
guide peuvent quant à elles être seulement réduites
à plat (fig. 7a, b).
Gestion de l’espace proximal : si l’espace est Pas de chanfrein
≥ 2 mm, il existe un risque de fracture du matériau
6. Principes de préparation d’un onlay.
(fig. 8).

7a. Situation clinique


intiale : présence d’un
overlay métallique sur 47
avec reprise de carie.
b. Dépose
de l’overlay métallique
et préparation pour
un overlay céramique.

7a b
2 mm 8. Distance
maximale pour
la reconstruction
du point
de contact.
Faut-il hybrider
les tissus dentaires
avant l’empreinte ?
Contrairement aux idées reçues, l’hybridation de la
dentine (fig. 9a, b et c) doit idéalement être réali-
sée non pas au moment de l’assemblage de la pièce
prothétique, mais avant l’empreinte de celle-ci.
En voici les principales raisons :
Meilleures valeurs d’adhérence : tous les maté-
riaux utilisés depuis la préparation de la cavité
jusqu’à l’assemblage de l’inlay-onlay (empreinte,
Ahdérence en MPa

obturation temporaire, ciment provisoire) vont


contaminer la dentine. De même, les obturations
provisoires ne sont pas étanches : des bactéries,
protéines salivaires et/ou sanguines vont venir
s’adsorber à la surface dentinaire. Le collage à une
dentine fraîchement fraisée est donc de meilleure
qualité et permet d’obtenir de meilleures valeurs
d’adhérence quel que soit le système adhésif choisi
(M&R ou SAM) [9] (graphique ci-contre).

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9a. Coffrage avec une matrice sectorielle b. Réalisation de la couche hybride : c. Réalisation de la couche hybride : mise
avant de réaliser l’hybridation immédiate mordançage à l’acide orthophosphorique en place du système adhésif.
de la dentine. 15s.

Absence de sensibilités postopératoires : l’appli- Que faire en cas de limites


cation du système adhésif juste après la préparation
dentaire et avant l’empreinte permet l’obturation des
proximales sous-gingivales ?
tubuli dentinaires et diminue ainsi le risque de sen- La lésion carieuse amène souvent à la réalisation de cavités
sibilités postopératoires, notamment lors de la phase proximales profondes avec parfois des limites juxta voire
de temporisation. sous-gingivales. Cela pose plusieurs problèmes :
Lissage des parois cavitaires et comblement - violation de l’espace biologique (< 3  mm entre la crête
des contre-dépouilles : En plus de l’hybridation osseuse et la limite de préparation) entraînant une
immédiate, certains auteurs préconisent de réaliser inflammation gingivale et à terme une récession ;
une couche intermédiaire en composite entre les - collage à la dentine : faible épaisseur voire absence d’émail
parois et le fond de la cavité et l’inlay-onlay. Cette périphérique au niveau cervical garantissant un collage
couche a pour but de : prédictible et sûr ;
- combler d’éventuelles contre-dépouilles ; - difficultés d’accès : pour le polissage de la préparation, la
- lisser les parois et fonds de cavité ; prise d’empreinte (éversion gingivale, contrôle du saigne-
- éventuellement remonter la limite cervicale ; ment, etc.), la mise en place d’un champ opératoire étanche,
- homogénéiser l’épaisseur de la pièce prothétique ; le collage et le retrait des excès du matériau d’assemblage ;
- servir d’amortisseur des contraintes. - cariosusceptibilité accrue : accès difficile aux techniques
En effet, la qualité du joint collé est directement d’hygiène pour le patient.
liée à l’absence de hiatus en son sein, et donc à la Comment pallier ces situations pourtant fréquentes ? Deux
dissipation du stress de prise de la colle. L’existence grandes solutions sont aujourd’hui décrites [17] : la remon-
d’une couche “élastique” entre l’adhésif et le joint tée de la marche cervicale par des techniques adhésives ;
de colle permet une relaxation de ce stress [4]. Ce l’allongement de la couronne clinique par des techniques
rôle “d’amortisseur de contraintes” peut être assumé chirurgicales.
par un matériau placé au contact de l’adhésif [7]. Les Le choix entre ces deux approches se fait en
matériaux préconisés sont les composites fluides de fonction de la possibilité ou non d’obtenir un
moyenne viscosité [6] ou microhybrides [14]. Les site opératoire sec.
premiers possèdent une moindre rigidité que leurs
homologues microhybrides et permettent d’obtenir Remontée de la marche proximale
grâce à leur fluidité une meilleure adaptation aux par technique adhésive
parois cavitaires [6]. Les composites fluides s’utilisent La limite proximale de la cavité est juxta ou intra-sulculaire
en fine épaisseur (< 1 mm), ce qui ne génère pas ou mais l’éversion de la gencive marginale par l’utilisation
peu de contraction de prise, car ils sont appliqués en d’une digue placée dans le sulcus permet l’isolation parfaite
faible volume dans une cavité dont le facteur C est de la préparation. La limite peut alors être remontée et
favorable. placée de façon supra-gingivale.

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10a. Remontée de la marche cervicale. b. Réalisation d’un substitut dentinaire au composite
microhybride et finalisation de la préparation de 47.

La mise en œuvre se fait sous champ opératoire, à


l’aide d’une matrice métallique sectorielle galbée type
Palodent® Dentsply, Contact Matrice® Danville, etc.,
associée à un coin de bois. Ces artifices assurent la
restauration d’un profil d’émergence compatible avec
la santé parodontale. Un système adhésif est ensuite
appliqué sur la préparation et photopolymérisée.
Puis une fine couche de composite fluide ou de
composite micro-hybride (fig. 10 a, b et c) est mise en
place afin de rehausser la marche cervicale en supra-
gingivale. La limite proximale de la préparation sera
ainsi réalisée dans le composite. 11. Vue de la préparation de 47 après dépose du champ
opératoire. La pose d’un fil de rétraction gingivale peut
permettre de mieux enregistrer la zone du profil d’émergence.
Allongement chirurgical
de la couronne clinique Comment prendre
Lorsque la limite est trop enfouie et ne permet pas
d’obtenir la mise en place d’un champ opératoire
l’empreinte ?
étanche, le recours aux techniques chirurgicales est La prise d’empreinte ne représente alors pas un défi majeur
préconisé. Selon la position de la limite de prépara- puisque toutes les limites sont supra-gingivales (fig. 11). Elle
tion par rapport à la crête osseuse (évaluée à l’aide peut être réalisée le jour de la préparation, mais peut aussi
du sondage, et de radiographie rétro-alvéolaire), la être différée d’une semaine ou plus selon la cicatrisation
situation de l’éventuelle furcation et la hauteur de des tissus gingivaux, car l’hybridation associée à la couche
gencive attachée, on réalisera une élongation coro- intermédiaire protège la vitalité de la dent.
naire par gingivectomie simple ou par lambeau Les hydrocolloïdes et hydroalginates sont les matériaux de
déplacé apicalement associé ou non à un remodelage choix pour les préparations cavitaires de part leur hydrophi-
osseux. Cette approche chirurgicale restaure l’es- lie. Mais leur aptitude au déchirement, leur mise en œuvre
pace biologique entre la crête osseuse et la limite de complexe, la nécessité d’une coulée rapide et leur actuelle
la préparation qui devient supra-gingivale. confidentialité raréfient leur utilisation.

L’INFORMATION DENTAIRE n° 7 - 16 février 2011 21


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12. Empreinte
de 47 en
un temps-deux
viscosités avec
des matériaux
silicone
par addition.
13.
Temporisation
avec
un Systemp®.

12 13

Les élastomères (silicones par additions et polyéthers) Pour ne pas risquer une adhésion entre la résine et le
représentent une alternative plus courante et néan- composite intermédiaire, il est conseillé d’appliquer un
moins adaptée en raison de leur précision d’enregis- gel de glycérine sur les parois de la cavité.
trement, de leur bonne élasticité, de leur résistance à
la déchirure [8] et de leur omniprésence dans les cabi- ATTENTION : L’utilisation d’un ciment provisoire à base
nets dentaires. Ils peuvent être utilisés en «  double d’eugénol (IRM) peut s’avérer problématique quant à la
viscosité et un temps » (fig. 12) ou en monophase. Un contamination des parois cavitaires par l’eugénol (qui
cordonnet déflecteur pourra être placé au niveau des inhibe la prise des résines de collage). Cependant, Tjan
marches cervicales pour améliorer l’enregistrement et Nemetz [16] ont montré qu’un mordançage à l’acide
du profil d’émergence. orthophosphorique à 35  % neutralisait l’eugénol. Ce
Enfin, l’évolution (ou révolution) vient des perspec- type de temporisation peut donc être utilisé à condition
tives qu’offrent les empreintes optiques que nous ne de procéder ultérieurement à un nettoyage soigneux et
détaillerons pas plus ici, car elles mériteraient un arti- un mordançage total de la préparation [5].
cle à elles seules.

Comment temporiser ?
Idéalement, la temporisation doit être la plus courte
possible pour éviter tout désagrément au patient, et
permettre au prothésiste de réaliser l’inlay-onlay
(généralement une semaine).
Les étapes cliniques
1. Réalisation de l’anesthésie.
Cette étape permet aussi de valider les épaisseurs de
2. Choix de la teinte.
la préparation.
Les obturations provisoires peuvent être réalisées 3. Marquage des points d’impact occlusaux.
par une technique conventionnelle d’auto-moulage à 4. Pose d’un champ opératoire étanche (digue).
l’aide de résine acrylique (par exemple, Unifast®, GC 5. Retrait de l’ancienne restauration et/ou éviction des tissus
Corp). Elles sont ensuite scellées grâce à du ciment carieux.
temporaire, de préférence sans eugénol. Cette tech- 6. Hybridation immédiate : application du système adhésif
nique offre une très bonne adaptation marginale mais (avec mordançage préalable ou système auto-mordançant)
peut sembler chronophage. Une des alternatives est et photopolymérisation.
l’utilisation de résines chargées de particules élasto- 7. Eventuellement remontée des marches proximales,
mériques photopolymérisables ou duales (Fermit®, 8. Application d’une couche fine de composite fluide (< 1mm)
Systemp®, IvoclarVivadent, etc.) (fig. 13) dont la mani- ou micro-hybride et photopolymérisation.
pulation est pratique et la dépose aisée Ces obtura- 9. Finition des limites et polissage.
tions ne sont ni scellées ni collées, et ne sont donc pas 10. Retrait du champ opératoire.
du tout étanches. Elles sont toutefois cliniquement 11. Empreintes.
acceptables pour une temporisation de courte durée
12. Obturation temporaire vérification de l’occlusion.
dans les cavités préalablement hybridées [2].

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inlays-onlays

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Bibliographie
Conclusion 1. ADA Council on Scientific Affairs. Direct and indirct res-
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137-139.
- préparation de la cavité ;
3. Dahan L, Raux F. Pourquoi et quand faire un inlay-onlay.
- hybridation dentinaire ;
Information Dentaire 2010 ; 34 : 19-26.
- empreinte ;
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- temporisation. ses in adhesive luting cements. J Dent Res 1991 ; 70 :
La plus grande rigueur lors de chacune d’elle condi- 880-882.
tionne le résultat prothétique (intégration occlusale, 5. Dietschi D, Sperafico R. Restaurations esthétiques collées
rétention, résistance mécanique, etc.) et l’intégra- composite et céramiques dans les traitements esthéti-
tion biologique (absence de sensibilités thermiques, ques des dents postérieures. Quintessence Internationale
ed. ; 1997.
maintien de la vitalité pulpaire, santé parodontale,
6. Dietschi D Spreafico R. Current clinical concepts for adhe-
etc.) de notre thérapeutique. À l’issue de cette pre-
sive cementation of tooth-coloured posterior restora-
mière séance clinique, l’empreinte est envoyée au tions. PPAD 1998 ; 10 : 47-54.
laboratoire de prothèse pour la réalisation de la pièce 7. Dietschi D, Magne P, Holz J. An in vitro study of para-
prothétique. Sur la fiche de liaison seront précisés : meters related to marginal and internal seal of bonded
le matériau choisi, la teinte de base (avec la référence restorations. Quintessence Int 1993 ; 24 : 281-291.
du teintier utilisé), les caractérisations éventuelles 8. Magne P, Belser U. Restaurations Adhésives Céramiques
(présence de taches blanches au niveau des pointes sur dents antérieures : approche biomimétiques.
Quintessence Internationale ed. ; 2003.
cuspidiennes, etc.) et les caractéristiques des sillons
9. Magne P. Immediate dentin sealing: a fundamental pro-
à reproduire (anfractueux, fine coloration brune,
cedure for indirect bonded restorations. J Esthet Restor
etc.). L’envoi d’une photographie de la préparation Dent 2005 ; 17 (3) : 144-154 ; discussion 155.
avec la dent du teintier peut compléter notre fiche 10. Magne P, So WS, Cascione D. Immediate dentin sealing
de prothèse. supports delayed restoration placement. J Prosthet Dent
Le dernier pas consistera donc à assembler notre inlay- 2007 ; 98 : 166-174.
onlay à la dent. Comment l’essayer en toute sécurité ? 11. Manhart J, Chen HY, Hamm G, Hickel R. Review of the
Quels sont les paramètres à vérifier ? Quels matériaux clinical survival of direct and indirect restoration in pos-
terior teeth of permanent dentition. Oper Dent 2004 ;
d’assemblage utiliser et quels traitements de surface 29 : 481-508.
réaliser ? Ce sont les questions auxquelles nous tâche-
12. Pallesen U, Qvist V. Composite resin fillings and inlays.
rons de répondre dans le troisième article. An 11-year evaluation. Clin Oral Investig 2003 Jun ; 7
(2) : 71-79.
13. Reeh Es, Douglas WH, Messer HH. Stiffness of endodon-
tically-treated teeth related to restoration technique.
J Dent Res 1989 ; 68 : 1540-1544.
14. Rocca GT, Krejci I. Bonded indirect restorations for pos-
terior teeth : from cavity preparation to provisionaliza-
tion. Quintessence Int 2007 ; 38 : 371-379.
15. Sadoun M. Céramiques dentaires: matériau céramique
et procédé de mise en forme. Tech Dent 2000 ; 165 :
Auteurs 13-17.
Frédéric Raux, ancien assistant hospitalo- 16. Tjan AH et Nemetz H. Effect of eugenol-containing endo-
universitaire, pratique libérale, membre dontic ealer on retention of prefabricated posts luted
with adhesive composite resin cement. Quintessence Int
de l’ADDA-IdF 1992 ; 23 : 839-844.
Lucile Dahan, ancien interne des hôpitaux,
17. Veneziani M. Adhesive restorations in the posterior area
pratique libérale, membre de l’ADDA-IdF with subgingival cervical margins : new classification
Les auteurs remercient le Dr B. Jakubowicz and differential treatment approach. Eur J Esthet Dent
2010 ; 5 : 50-76.
pour son illustration.

Correspondance
Frédéric Raux, 16 avenue Pierre 1er de Serbie,
75116 Paris - drfredericraux@wanadoo.fr

L’INFORMATION DENTAIRE n° 7 - 16 février 2011 23

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