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SANTE FORME Benoît Vesselle*, Éric Chartier**

Médecin fédéral national*, CTF ligue de Seine-et-Marne**

LE TAÏSO-JUDO ADAPTÉ
POUR LES PERSONNES AGÉES
DÉPENDANTES
On connaît l’intérêt et les bienfaits d’une activité
physique régulière, adaptée, sécurisée et progres-
sive chez l’adulte. La pratique régulière d’une ac-
tivité physique permet de retarder ou de ralentir
certains processus délétères liés au vieillissement.
Dans la spirale du déclin fontionnel, la dégradation
de la fonction musculaire est un facteur majeur,
paramètre important dans la genèse des troubles
de l’équilibre.

D es programmes, combinant des exercices de renforcement musculaire années, que les personnes en situation de handicap mental, sensoriel,
des membres inférieurs, de souplesse et/ou d’endurance ainsi que des
exercices d’équilibre, permettent de réduire le risque de chutes chez le
sujet âgé. L’activité physique n’agit pas seulement sur la santé physique des
sujets mais également sur leur santé mentale en contribuant à leur bien-être
voire physique, aiment pratiquer le judo.
On peut revenir aux principes essentiels émis par le fondateur du judo
Jigoro Kano : « Le principe du maximum d’efficacité dans l’utilisation de
l’esprit et du corps est le principe fondamental gouvernant toutes les
et à leur qualité de vie. Plusieurs études permettent d’affirmer que l’activité techniques du judo mais est aussi quelque chose de plus : il peut être
physique a des effets bénéfiques sur le déclin cognitif. appliqué à l’amélioration du corps humain, le rendant fort, sain et utile,
Parmi les mesures indiquées dans le rapport établi par le groupe de travail constituant ainsi une éducation physique. Il peut aussi contribuer au déve-
sous la présidence du professeur Daniel Rivière, concernant les « Disposi- loppement de la force intellectuelle et morale, être appliqué au perfection-
tifs d’activités physiques et sportives en direction des âgés », une propose nement des institutions, des relations sociales, des méthodes de travail,
de « développer et généraliser l’offre d’activité physique et sportive dans constituant, de cette manière, l’étude d’un art de vivre. J’ai donné à ce
les foyers ou résidences pour personnes âgées et dans les établissements principe, d’une absolue généralité, le nom de judo. »
d’hébergement pour les personnes âgées ou pour les personnes âgées Concernant la deuxième maxime, Kano disait : « L’ultime but du judo est
dépendantes (EHPA ou EHPAD). » la perfection de soi-même et, par là, la contribution à la prospérité et au
Il n’est jamais trop tard pour pratiquer. En EHPAD, on peut viser à préser- bonheur du genre humain. Prospérité et bienfaits mutuels est la phrase qui
ver au mieux les possibilités existantes à l’entrée et, si possible, améliorer représente le domaine de l’idéal du judo, le but suprême, lequel peut être
la condition physique et limiter la dépendance. atteint seulement par ceux qui, ayant entièrement maîtrisé l’art et l’esprit de
combattre, ont dépassé toute notion de victoire et de défaite. »
POURQUOI LE TAÏSO-JUDO ADAPTÉ ?
On n’est pas surpris de l’intérêt du taïso, méthode d’éducation physique per- LES CONDITIONS DE PRATIQUE
mettant d’améliorer ses qualités corporelles, mais l’usage du judo comme On a besoin de quelques mètres carrés de tatami. On revêt la veste du judogi
vecteur peut paraître surprenant puisque l’image du judo est souvent assi- et sa ceinture et on pratique pieds nus. Le rituel du salut est maintenu. Les
milée à celle de la compétition. La forte médiatisation des JO ne renvoie exercices se font seul ou avec un partenaire. Du matériel de base (élastique,
toutefois qu’un aspect d’une pratique plus vaste et plus complexe que son bâton, siège…) est utilisé.
unique expression compétitive. Dans la réalité, les clubs proposent plu- Dans le cadre de l’animation dans l’établissement, avec un effectif d’une
sieurs facettes du judo-jujitsu qui sont présentées seules ou groupées. dizaine de personnes, l’activité peut être suivie par des résidants qui ne parti-
Le judo est une activité plurielle aux multiples composantes s’adressant cipent pas directement, contribuant ainsi à l’ambiance conviviale.
à un large public, même non sportif. Une minorité des judokas de la fé- Une animatrice ou éventuellement une ergothérapeute participe ou assiste aux
dération sont compétiteurs. Par ailleurs, on sait, depuis de nombreuses séances.

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 avec Partenaire officiel de la FFJUDO

En fonction de la population concernée, on peut être amené à apprendre à

réduire les facteurs de risques de blessures et de fractures lors des chutes
inopinées lors de la vie quotidienne. L’apprentissage de la chute arrière et
de la chute avant qui vise à éviter le contact brutal avec le sol avec un enrou-
lement du corps et la protection de la tête, peut être un complément utile.

QUI PEUT PARTICIPER ?

Il s’agit de personnes volontaires pour lesquelles une information est don-
née, et un avis demandé, au médecin traitant. L’activité adaptée, raisonnée
et raisonnable, a très peu de risques, même si l’activité humaine en a for-
cément mais on connaît les dangers de l’immobilité prolongée ! De plus, la
non-utilisation d’une fonction, quelle qu’en soit la cause, contribue à l’aug-
mentation de son involution.
Certes, de rares contre-indications absolues peuvent exister, le plus souvent
d’ordre cardio-vasculaire ou métabolique. Parfois, des troubles cognitifs ma-
jeurs ou du comportement peuvent être des facteurs limitant ou empêchant
la participation.
Cette activité s’intègre dans la vie de la résidence en associant volontiers
les personnels de l’institution. Le professeur de judo tient compte des infor-
mations et avis des professionnels, des paramédicaux. Comme il le fait pour
les personnes en situation de handicap, il y a toujours une période initiale
d’évaluation (postures, déplacements, expressions, comportement…).

CONCLUSION
Le taïso et le judo adapté sont des moyens de sollicitations physiques, mais
également mentales et psychiques : mobilité, équilibre, coordination, confiance
en soi, amélioration du lien social dans les établissements… Cela complète
les différentes activités proposées et intègre volontiers les personnels (anima-
teurs, ergothérapeutes…). ■
On peut citer différents promoteurs et précurseurs, qu’ils soient professeurs et dirigeants du judo,
Il ne s’agit pas de combat mais d’une activité avec partenaire, avec une responsables d’établissements, notamment en Ile-de-France qui aident à diffuser ces pratiques
novatrices. Que d’autres oubliés veulent bien nous excuser.
connotation forte de sociabilité puisque c’est une activité, certes indivi- BROSSARD D., CULIOLI S., DURAND-MOLEUR V., DYOT C., LE BERRE L., MOUCHET G., de PERETTI
duelle, mais souvent en duo et en groupe. On ne dénature en aucune G., PERRIN L., TCHEN R., THELLIER P.
façon les principes fondateurs.
BIBLIOGRAPHIE
QUELLES SONT LES FONCTIONS
SOLLICITÉES ? - BRONDANI J.C. : L’histoire du judo et ses valeurs éducatives.
Tout d’abord, il y a évidemment une activité musculo-squelettique, des In : Médecine du judo, Masson, Paris, 1991
membres inférieurs (quadriceps…), des membres supérieurs (notamment - CHARTIER E. : Judo adapté-Taïso, manuel pédagogique, Ligue
par le biais de la préhension du judogi ou d’exercices plus analytiques). La 77 de judo
sollicitation, sensorielle et sensitive (pieds nus), et de la sensibilité pro- - Inserm : Activité physique. Contextes et effets sur la santé.
fonde (proprioception) est à remarquer. La coordination existe par le biais Expertise collective, 2008, 147 p.
de l’amélioration des habilités psychomotrices. Les exercices permettent - DUJARDIN P., BIGOT J., DROLEZ B., DELRIO F. : L’équilibre et
de travailler la posture, de lutter contre l’instabilité articulaire, de favoriser les séniors, manuel pratique de prévention des chutes, Centre
l’équilibre statique et dynamique, seul ou à deux, avec même des consé- d’Information Sociale et d’Actions Gérontologiques, Troyes, 1999
quences pratiques : amélioration des transferts (comme par exemple les - MANIDI M.J., MICHEL J.P. : Activité physique pour l’adulte de
levers de fauteuil, les déplacements…). Paradoxalement, cette activité, qui plus de 55 ans, Masson, Paris, 2003
n’a justement pas pour but de faire tomber, est un moyen parmi d’autres - MORENO J.B. : Projet judo, Mémoire licence professionnelle
santé, vieillissement et activités physiques adaptées, UFR Staps,
pour diminuer le risque de chute de la personne âgée. Pour certains parti-
Paris XII, 2014/2015
cipants, on peut s’allonger sur le tatami et apprendre à se relever.
- MOUREY F. : La rééducation du relever du sol, Kinésithérapie
S’agissant des capacités cognitives, cela fait appel à l’attention. Il y a Scientifique, 2013, 542, 43-46
une nécessité de mémorisation des exercices, des termes techniques, - NIÉRAT M.C. : MASTROLIA-GAYDON D., VILLANOVA O., Les ate-
de la mise en place de la ceinture, des consignes à respecter… liers pluridisciplinaires de développement des habiletés motrices,
L’échauffement est volontiers effectué sur une chaise. On procède à un Kinésithérapie Scientifique, 2005, 429, 23-35
travail de la respiration, de mobilisation articulaire infra-douloureuse, des - RIVIERE D. : Dispositif d’activités physiques et sportives en direc-
étirements, du renforcement musculaire léger, éléments fondamentaux du tion des âgés. Rapport remis aux ministres, établi par le groupe de
taïso. Les techniques du judo se pratiquent sans chercher à provoquer travail, sous la présidence du Pr D. Rivière, décembre 2013
de chute. Il y a nécessité d’un bon placement du corps par rapport au - Sport, activité physique et vieillissement, colloque Pôle Allonge-
partenaire et il y a également possibilité de déplacement. ment de la Vie Charles  Foix , Paris , 2014.

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