102-Article Text-367-1-10-20200729
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ISSN: 2665-7473
Numéro 4 : Juillet 2019
BENTHAMI Asmae
Enseignante chercheure
FSJES - Salé – UMV Rabat
Laboratoire : Finance, Entrepreneuriat et Développement
benasmae2002@gmail.com
Résumé :
Depuis la survenance de la crise financière de 2007, la gestion de la liquidité bancaire n’est
plus l’affaire que des banques, elle est devenue la préoccupation majeure de toutes les
autorités bancaires. Celles-ci cherchent à protéger la banque contre le problème d’insuffisance
de liquidité qui, s’il persiste, peut entrainer l’effondrement de cette banque et de l’ensemble
de l’économie.
Les banques sont donc obligées de se procurer la liquidité qui leur permettra de mener leur
activité et aussi d’améliorer leur rentabilité. Pour cela, elles peuvent recourir à différentes
sources : l’emprunt sur le marché interbancaire, la mobilisation des réserves ou encore la
collecte de nouveaux dépôts à travers la bancarisation.
Notre travail consiste à déterminer l’impact de la bancarisation, telle qu’elle est définie et
mesurée, sur le niveau de la liquidité des banques marocaines.
Abstract
Since the onset of the 2007 financial crisis, the management of bank liquidity is no longer
only the business of banks, it has become the major concern of all banking authorities. These
seek to protect the bank against the problem of insufficient liquidity which, if it persists, can
lead to the collapse of this bank and the entire economy.
Banks are therefore forced to obtain liquidity which will allow them to protect themselves
against the liquidity risk and also to improve their profitability. For this, they can use different
sources: borrowing on the interbank market, the mobilization of reserves or the collection of
new deposits through the bancarization.
Our research work consists of determining the impact of the bancarization, as it defined and
measured, on the level of liquidity of Moroccan banks.
Introduction
Les banques exercent de nombreuses activités, mais celle relative à l’intermédiation reste la
plus ancienne, la plus classique mais aussi la plus importante. Elle permet de résorber les
déséquilibres dans les comptes des agents économiques et d’accroître le volume d'épargne
dans l'économie (Fennassi Addouli & Achibane, 2018).
Du côté des banques, nous avons constaté que la marge d’intérêt, considérée comme le
résultat de l’effort fourni en matière d’intermédiation, demeure la principale composante de
leur Produit Net Bancaire (PNB) avec une part atteignant 70% (Bank Al Maghrib, 2017).
Il paraît bien clair que les banques comptent énormément, dans leur activité, sur l’opération
d’octroi de crédit qui, malgré les risques qu’elle présente, continue à être déterminante dans
l’assurance et l’amélioration de leur rentabilité. Néanmoins, les banques ne peuvent répondre
aux demandes de crédit que si elles disposent de la liquidité nécessaire.
Depuis la survenance de la crise financière de 2007, la liquidité bancaire est devenue la
préoccupation majeure de toutes les autorités bancaires. En effet, il s’est avéré que la
transmission de la crise des subprimes aux secteurs financier et bancaire a été causée par un
problème de liquidité. Ce n’est donc pas une dépréciation de la valeur fondamentale des actifs
ou des institutions, mais c’est leur illiquidité qui a alimenté le processus de diffusion en
chaîne (Pollin, 2009).
Face à cette situation, il est devenu nécessaire pour toute banque de puiser dans différentes
sources susceptibles de l’aider à se prémunir contre le risque de liquidité. A ce niveau, peut –
on considérer la bancarisation comme un moyen qui permettra à la banque de s’assurer la
liquidité nécessaire pour mener à bien son activité ?
Pour y répondre, nous allons, dans un premier axe, présenter le concept de la liquidité et
montrer son importance pour la banque et pour l’ensemble de l’économie. Dans un second
axe, notre intérêt va porter sur la détermination de la relation entre la bancarisation et la
liquidité bancaire. Le troisième et dernier axe sera consacré à l’étude de l’impact de la
bancarisation sur la liquidité des banques au Maroc.
« - Le premier niveau inclut l’encaisse, les avoirs auprès de la Banque Centrale, les Bons du
Trésor ainsi que certains titres souverains. Ces actifs sont pris en compte à leur valeur de
marché et sans limitation.
- Les actifs de niveau 2 doivent être soumis à des décotes et plafonds. Ils comprennent les
titres souverains, les titres de dettes privées, les actions, les obligations sécurisées et les parts
de fonds de placements collectifs en titrisation (FPCT), répondant à des conditions de
liquidité et de qualité de crédit » (Bank Al Maghrib, 2013).
Pour ce qui est des sorties nettes de trésorerie à horizon de 30 jours, elles sont déterminées
comme suit :
Sorties nettes de trésorerie = total sorties attendues – minimum (total entrées de trésorerie
attendues; 75% du total des sorties de trésorerie attendues)
Les sorties de trésorerie sont composées des éléments suivants, relevant des rubriques du
passif du bilan de la banque dont la maturité résiduelle n’excède pas 30 jours:
- Les dépôts des particuliers et des personnes morales,
- Les valeurs données en pension,
- Les opérations sur produits dérivés, et
- Les engagements confirmés de financement et de liquidité non utilisés
Les entrées de trésorerie comprennent :
- Les créances détenues par la banque à vue ou remboursable dans un délai maximum de 30
jours,
- Les valeurs reçues en pension dont l’échéance est inférieure ou égale à un mois,
- Les montants nets à recevoir sur produits dérivés, sur une période de 30 jours maximum.
En examinant les deux ratios de liquidité, à savoir le coefficient minimum de liquidité (tel
qu’il a été formulé par Bank Al Maghrib1) et le LCR, nous constatons que les dépôts
considérés comme des fonds reçus du public, constituent une composante essentielle de ces
deux ratios :
- Du côté du numérateur, les dépôts reçus par la banque sont pris en considération à travers
leur contrepartie comptable qui peut être « valeurs en caisse » lorsque le dépôt est effectué en
espèces, ou « banques centrales » s’il s’agit d’un dépôt par chèque.
- Du côté du dénominateur, l’accent est mis sur la détermination du montant des dépôts
susceptibles d’être retiré par la clientèle et sortir ainsi de la trésorerie de la banque. Ne font
partie des sorties de trésorerie que les dépôts dont la maturité résiduelle n’excède pas 30 jours
1
Pour plus de détail, voir annexe 1
avec application des pondérations suivantes (Tableau 1) qui se sont améliorées en passant du
coefficient minimum de liquidité au LCR :
1ère action : la gratuité des services bancaires : Depuis 2010, Bank Al Maghrib a imposé aux
banques d’offrir gratuitement et sans aucune condition, les services suivants (Tableau 2) :
Tableau 2 : Liste des services gratuitement offerts par les banques
1. Ouverture de comptes; 10. Emission de virement de compte à
2. Délivrance de chéquier; compte, entre particuliers, au sein de la
3. Délivrance du livret d'épargne; même banque;
4. Domiciliation de salaire; 11. Réception de virements nationaux;
5. Demande d'attestation du relevé 12. Réception de mises à disposition
d'identité bancaire; nationales, au sein du même
6. Versement en espèces, hors acquittement établissement;
du montant du timbre fiscal; 13. Etablissement et envoi du relevé de
7. Retrait d'espèces auprès du guichet compte au client;
détenteur du compte à débiter, à 14. Consultation et édition du solde et de
l'exclusion des retraits par 'Chèque l'historique du compte à travers le
Guichet' pour les clients détenteurs d'un guichet automatique bancaire et/ou
chéquier; internet, hors frais de souscription à ces
8. Retrait d'espèces sur présentation d'un canaux de distribution;
carnet d'épargne auprès du guichet 15. Changement des éléments
détenteur du compte à débiter; d'identification du titulaire du compte;
9. Retrait auprès des guichets automatiques 16. Clôture de comptes.
bancaires de l'établissement détenteur du
compte;
Source: Bank Al Maghrib, 2010a
2ème action: le droit au compte : depuis 2010, les banques sont devenues obligées d’accepter
l’ouverture d’un compte chèque aux personnes intéressées, n’ayant pas encore de compte
bancaire, tout en respectant les deux conditions suivantes :
- aucune exigence de versement de fonds au moment de l’ouverture
- aucun prélèvement de frais ou de commissions sur le compte « pendant une durée
minimum de six mois à compter de la date d'ouverture de ce compte et tant qu'il n'enregistre
aucun mouvement à son crédit » (Bank Al Maghrib, 2010b).
Ces deux actions sont destinées aux personnes qui, à cause de leur pouvoir d’achat limité,
n’arrivent pas à intégrer la banque en tant que clients. Elles visent à simplifier l’accès aux
services bancaires en éliminant les obstacles tarifaires.
3ème action : l’éducation financière : une enquête menée entre septembre et décembre 2013 sur
la capacité financière des ménages marocains, a fait ressortir que « les personnes disposant
d’informations sur le secteur financier sont plus à même de choisir les produits financiers qui
leur sont appropriés que ceux ayant moins d’informations » (Bank Al Maghrib, 2014). Pour
remédier à cette situation, il y a eu création en 2013 de la fondation nationale de l’éducation
financière qui a permis de renforcer l’action annuelle de sensibilisation, en parvenant à faire
2
Le programme s’étale sur une semaine et porte généralement sur des visites aux agences et au Musée de Bank
Al-Maghrib, à Dar As-Sikkah, à la Bourse de Casablanca, aux agences bancaires et aux compagnies d’assurance.
3
L’année 2006 est choisie comme début de période pour notre étude, car c’est l’année où Bank Al Maghreb a
imposé l’application du coefficient minimum de liquidité.
4
Les rapports annuels de Bank Al Maghrib sur la supervision bancaire de 2009, 2010 et 2011 ont précisé que
l’activité bancaire a évolué durant ces trois années dans un contexte de resserrement de liquidités, mais aucun
taux (de ratio de liquidité) n’a été donné.
Comme le montre le tableau n° 4, les actifs liquides et réalisables (y compris les dépôts) n’ont
pas cessé de croitre entre 2012 et 2017. Mais, ceci ne s’est pas traduit par un accroissement
continu du RL qui a augmenté entre 2012 et 2015 et a régressé en 2016 pour reprendre son
accroissement en 2017, mais sans atteindre le niveau réalisé en 2015. Cette 1ère action
(touchant le numérateur du ratio) s’avère insuffisante et doit ainsi être complétée par une 2ème
action qui consiste à agir sur le dénominateur en le diminuant. Cela implique pour la banque
de stabiliser les dépôts reçus et faire en sorte qu’ils ne soient pas rapidement retirés, cette
tâche n’est pas facile à réaliser surtout que les dépôts auprès des banques, et comme le montre
le tableau n° 5, sont dominés par les comptes à vue créditeurs :
Tableau 5 : Evolution de la part des comptes à vue créditeurs (en %)
Année 2012 2013 2014 2015 2016 2017
Comptes à vue créditeurs 57,9 57,8 58 57,8 59,8 61,4
Source : Rapports de Bank Al Maghrib de 2012 à 2017
Conclusion
Nous pouvons avancer que la bancarisation a un impact sur la liquidité, elle peut contribuer à
son amélioration à condition que :
- l’action de bancariser ne se limite pas à l’ouverture des comptes, mais qu’elle se traduise par
le dépôt des fonds auprès de la banque.
- Ces dépôts qui sont dans leur majeure partie des dépôts à vue, doivent être marqués par la
stabilité, ceci implique pour le gestionnaire actif – passif de parvenir à réduire la vitesse
d’écoulement de ces dépôts.
Références Bibliographiques
AZZOUZI IDRISSI Y. et MADIES Ph. (2012), « les risques de liquidité bancaire :
définitions, interactions et règlementation », Revue d’économie financière, V.3, N°107, p:
315 – 332.
BANK AL MAGHRIB (2006 à 2017), Rapports annuels sur la supervision bancaire.
BANK AL MAGHRIB (2013), Circulaire N°15/G/13 relative au ratio de liquidité des
banques
BANK AL MAGHRIB (2010a), Directive n°1/G/10 relative aux services bancaires
minimums offerts par les banques à leur clientèle, à titre gratuit
BANK AL MAGHRIB (2010b), Directive n°4/G/10 relative à l'ouverture de comptes de
dépôt devant être à vue, sans versement de fonds au préalable
BANK AL MAGHRIB (2006), Circulaire N°31/G/2006 relative au coefficient minimum de
liquidité des banques
BANK AL MAGHRIB (2004), rapport annuel sur le contrôle, l’activité et les résultats des
établissements de crédit
BANQUE CENTRALE DE TUNISIE (2017), rapport annuel sur la supervision bancaire
ANNEXE 1
Circulaire N° 31/G/2006 relative au coefficient minimum de liquidité des banques
(Articles 1, 2 et 3)
Article premier
Les banques sont tenues de respecter de façon permanente un coefficient minimum de 100%
entre:
- d'une part, leurs éléments d'actif disponibles et réalisables à court terme et engagements par
signature reçus - et, d'autre part, leurs exigibilités à vue et à court terme et engagements par
signature donnés.
Article 2
Les éléments du numérateur du coefficient de liquidité et les quotités à hauteur desquelles ils
doivent être pris en considération sont précisés ci-après:
Quotité de 100 %
- valeurs en caisse et assimilées ;
- excédent des créances à vue et des créances à échoir dans un mois au plus, détenues sur
Bank Al-Maghrib, le Trésor, les établissements de crédit et organismes assimilés marocains et
étrangers, par rapport aux dettes à vue et aux dettes à échoir dans un mois au plus, envers ces
mêmes entités ;
- excédent des titres de créance détenus, à échoir dans un mois au plus, par rapport aux titres
de créance émis, à échoir dans un mois au plus ;
- excédent des accords de financement, d'une validité minimale de 6 mois, reçus de la part des
établissements de crédit et organismes assimilés par rapport à ceux donnés en faveur de ces
mêmes établissements ;
- solde débiteur des opérations diverses sur titres.
Quotité de 90 %
- bons du Trésor émis par adjudication et bons du Trésor cotés en bourse, à échoir dans un
délai excédant un mois.
Quotité de 80 %
- échéances des crédits à la clientèle, à l'exclusion des soldes débiteurs des comptes à vue,
dont le règlement intervient dans un mois maximum ;
- bons du Trésor éligibles en tant que garantie aux avances de l'Institut d'émission, autres que
ceux pris en considération à hauteur de 100%et 90%.
Quotité de 60 %
- créances hypothécaires éligibles à une opération de titrisation ;
- parts de fonds de placements collectifs en titrisation des créances hypothécaires ;
- valeurs reçues en pension de la clientèle, à échoir dans un délai n'excédant pas un mois ;
- titres de créance négociables, à échoir dans un délai excédant un mois ;
- obligations cotées en bourse, à échoir dans un délai excédant un mois ;
- obligations non cotées en bourse, à échoir dans un délai excédant un mois, dont la liquidité
peut être considérée comme assurée, compte tenu notamment de la solvabilité notoire de
l'entreprise émettrice.
Quotité de 20 %