Le Nombre D'or
Le Nombre D'or
Le Nombre D'or
Alexandre CAMBAKIDIS
30 Juin 2017
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1 Introduction
Le nombre d’or est une des curiosités mathématiques les plus connues de par
son aspect mystique, mais également car il apparait dans beaucoup de domaines
mathématiques comme la géométrie et l’arithmétique.
Le nombre d’or fut remarqué dans l’antiquité par le mathématicien Euclide. Il y
fait référence dans le livre VI des Élements d’Euclide. Le nombre d’or y est défini
géométriquement comme un rapport de longueur par la formulation suivante : « Une
droite est dite être coupée en Extrême et Moyenne raison quand, comme elle est toute
entière relativement au plus grand segment, ainsi est le plus grand relativement au
plus petit. ». Si on considère deux segments de longueurs a et b, alors on peut traduire
cette définition par « a est à b ce que a + b est à a » C’est à dire :
a+b a
=
a b
On démontrera par la suite que ce rapport est unique.
Au Moyen-Âge, Leonardo Pisano, plus connu sous le nom de Fibonacci, pu-
blia son livre Liber Abaci dans lequel il traite divers problèmes mathématiques.
En s’appuyant sur les travaux d’Al-Khawarizmi et d’Abu Kamil, deux mathémati-
ciens arabes du VIIIè et IXè siècles, il y démontre notamment que le nombre d’or est
l’unique solution positive de l’équation x2 = x + 1, soit l’équation du second degré
x2 − x − 1 = 0. Il introduisit également la célèbre suite de Fibonacci, très liée au
nombre d’or. Cependant ce lien ne sera établi que plus tard. Cet ouvrage apporta
une nouvelle vision du nombre d’or, mettant en évidence certaines de ses propriétés
arithmétiques.
En 1498 Fra Luca Pacioli, un moine professeur de mathématiques, écrit « De
divina proportione » (« La divine proportion » ) illustré par Léonard De Vinci. Dans
cet ouvrage, il considère que le nombre d’or a des propriétés esthétiques et montre
qu’il se retrouve dans le domaine de l’architecture et de la peinture.
Au XIXè siècle, le philosophe et professeur allemand Adolf Zeising (1810-1876)
renforça la dimension mystique du nombre d’or. En effet il étudia bon nombre
d’œvres architecturales et picturales où apparaissent le nombre d’or, le plaçant en
symbole d’harmonie confirmant ainsi la preuve d’esthétisme établie par Pacioli. Il
fut également le premier à introduire le terme de « section dorée ». C’est à cette
même époque que le scientifique Wilhelm Friedrich Benedict Hofmeister établit des
liens entre le nombre d’or et la phyllotaxie (arrangement des feuilles sur une plante),
confortant les idées de Zeising. L’appellation « nombre d’or » fût définitivement
adoptée en 1932 suite à la publication du livre du même nom par le mathématicien
roumain Matila Ghyka. Il s’inspire des travaux d’Adolf Zeising et se fonde sur le
pentagone pour renforcer l’idée de beauté et d’harmonie de celui-ci (Nous verrons
en quoi dans le développement de l’article).
2
2 Quelques propriétés préliminaires
Dans l’ensemble de l’article, on notera N l’ensemble des entiers naturels, Z l’an-
neau (totalement) ordonné des entiers relatifs, Q l’anneau (totalement) ordonné des
rationnels, R le corps (totalement) ordonné des réels et C le corps des complexes.
Nous travaillerons uniquement en géométrie euclidienne.
Théorème 2.1 (Division euclidienne dans Z). Soient a et b deux entiers relatifs
avec b 6= 0. Alors il existe un unique couple (q, r) ∈ Z2 tels que :
a = bq + r et 0 6 r < b = |b|
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Théorème 2.4 (Discriminant d’un polynôme de degré deux). Soient a,b,c trois réels
avec a 6= 0. On considère l’équation du second degré
aX 2 + bX + c = 0 (1)
4
— Si ∆ = 0, alors : !2
−b
a X−
2a
−b
Comme a 6= 0, on a donc bien une seule racine égale à
2a
— Si ∆ < 0, alors :
!2
b ∆
a X + − 2 > 0
2a 4a
Et donc ne s’annule pas.
Théorème 2.6 (relation coefficient racine dans un polynôme de degré deux). Soit
P = X 2 + bX + c un polynôme de degré deux unitaire (i.e a = 1) avec b, c des réels.
Soient α et β ces deux racines complexes. On a alors −b = α + β et c = α × β
Définition 2.7. Soient ABC et A0 B 0 C 0 deux triangles. Ces deux triangles sont dit
semblables si BAC
[ = B\ 0 A0 C 0 , ABC
[ = A\ 0 B 0 C 0 et ACB
[ = A\0C 0B0.
Proposition 2.8. Deux triangles sont semblables si et seulement si ils ont deux
angles et une longueur en commun.
5
Dans la proposition suivante, nous travaillerons sur des angles non-orientés.
•F
B
•D
A F0• •
E
Définition 2.10. Une hauteur d’un triangle est une droite passant par un sommet
et perpendiculaire au côté opposé.
6
et √
1− 5
x2 =
2
La fonction racine carrée étant par définition toujours positive, on en déduit donc
que x1 > √0 et x2 < 0 car les deux racines sont de signes opposés. Il en résulte
√ que
1+ 5 1+ 5
x1 = est l’unique racine positive de ce polynôme. On a donc ϕ = .
2 2
a a+b a
Proposition 3.4. Soient a, b deux réels positifs non nuls. Si = alors = ϕ.
b a b
a a+b a b a
Démonstration. On suppose = . Alors = + 1. En multipliant par on a
2 b a b a b
a a a 2 a a
= 1 + . Ce qui ce réécrit − − 1 = 0. Donc est racine de x2 − x − 1.
b b b b b
a a
Or comme a et b sont tout deux positifs, alors l’est également. Donc est l’unique
b b
racine positive de ce polynôme, soit ϕ.
1
Proposition 3.5. On a ϕ2 = ϕ + 1 et ϕ = 1 + .
ϕ
Démonstration. Comme ϕ2 − ϕ − 1 = 0, alors ϕ2 = ϕ + 1 et en divisant par ϕ,
1
ϕ=1+ .
ϕ
a b
Proposition 3.6. Soient a et b deux réels positifs distincts tels que = .
b a−b
a
Alors = ϕ et 0 6 a − b < b
b
a b a−b (a − b)a
Démonstration. On suppose = . Si on multiplie par , alors − 1 = 0.
b a−b b b2
2
a − ab a 2 a
On développe − 1 = 0. Et donc − − 1. Comme a et b sont deux réels
b2 b b
a a
positifs alors > 0 et donc = ϕ. Or ϕ > 1 donc 0 6 a − b < b.
b b
Proposition 3.7. ϕ est irrationnel.
a
Démonstration. Soit A = b ∈ N, ∃a ∈ N, ϕ = . Si A = ∅ alors ϕ est irrationnel.
b
Supposons que A soit non vide. Alors comme A est une partie non vide de N il
a
existe un plus petit élément. Notons b ce plus petit élément. On a donc ϕ = . Or
b
a b
ϕ= = et 0 6 a − b < b, c’est une contradiction. L’ensemble A est donc vide
b a−b
et ϕ est donc un nombre irrationnel.
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Exemple de triangle d’or :
ϕ ϕ
A B
1
Définition 4.2. Un triangle d’argent (gnomon d’or ou triangle d’or obtus) est un
1
triangle isocèle dont le rapport des côtés à la base est égal à .
ϕ
Exemple de triangle d’argent :
1 1
A ϕ B
Une propriété cruciale des triangles d’or et d’argent est qu’il est possible de les
couper en deux autre triangles, l’un d’or et l’autre d’argent.
Lemme 4.3. Soit ABD un triangle d’or, il existe un point C sur un des côté de
ABD tel que ABC est un triangle d’argent et BCD un triangle d’or. Soit ABC un
triangle d’argent il existe un point E sur les côtés du triangle ABC tel que ACE
soit un triangle d’or et BCE un triangle d’argent.
a a+b
Démonstration. Soient a et b avec a > b tel que = . Soit ABD un triangle
b a
d’or tels que A et B soient situés à une distance a l’un de l’autre et B et D à une
distance b. Soit C ∈ [AD] tel que AC = b et soit E ∈ [AB] tel que AE = b.
Les deux triangles ACE et ADB sont semblables (car tous ! deux isocèles de même
b a
sommet). Comme BD = b on a CE = a−b car = . Or CD = a−b et ACE
a−b b
et ABD sont semblables, l’angle ACE[ est égal à ADB.
\ Enfin, comme BD = AC les
deux triangles ACE et BCD disposent de deux côtés et d’un angle égaux, ils sont
donc semblables. Le triangle ACE étant semblable au triangle d’or ABD, c’est un
a
triangle d’or ainsi que le triangle BCD en proportion avec le triangle initial. Le
b
CE a−b b 1
triangle BCD étant d’or, on a BC = BD = b. On a alors = = = ,
BC b a ϕ
BCE est donc bien un triangle d’argent.
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D
C
b
b
A a E B
2π π
Proposition 4.4. Un triangle d’or possède deux angles de et un de , et un
5 5
π 3π
triangle d’argent de deux angles de et d’un angle de .
5 5
Démonstration. Soit ABD un triangle d’or. Soit C un point de [AD] tel que ACB
soit un triangle d’argent et CDB un triangle d’or. Soit θ, µ et ν les angles respec-
tivement formés par DAB,
\ ACB [ et DCB.
\ Le lemme précédent nous affirme que le
triangle ABC est isocèle de sommet C. Donc l’angle DCB \ est égal au double de
l’angle CAB
[ soit ν = 2θ. D’autre part, le triangle BCD
\ étant aussi un triangle d’or,
il est isocèle de sommet B. Ses angles sont θ, 2θ, 2θ. La somme des angles valant π,
π 2π 3π
on a 5θ = π, soit θ = . Il vient alors que ν = 2θ = puis que µ = π − ν = .
5 5 5
D
3π
µ= 5
π
θ= 5
A B
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On note P1 l’intersection différente de O de (OA) et C. Les points P1 ,P2 , P3 , P4 et
P5 forment un pentagone. Justifions maintenant que ce pentagone est régulier. Pour
cela il suffit de montrer que si deux sommets sont consécutifs, alors leur angle avec le
2π 2π
centre du cercle est de . On sait déjà de par notre construction que P\ 4 AP3 = .
5 5
En effet ceci est une conséquence du fait que les points P4 et P3 sont définis comme
l’intersection du cercle de centre O de rayon b avec le cercle de centre A et de rayon
a, on a donc OP3 = OP4 = b et OA = AP3 = AP4 = a. Les triangles P4 AO et
π
OAP3 sont donc d’or, les angles P \ 4 AO et OAP3 font donc chacun
\ , ce qui permet
5
de conclure. Intéressons-nous maintenant au triangle P4 AP5 . Par construction, la
distance entre O et P5 est égale à a + b, celle entre O et A ainsi que celle entre A et
P3 est égal à a. On en déduit que le triangle OAP2 est un triangle d’argent. L’angle
\5 fait donc 3π . Comme l’angle P
OAP \4 AO fait
π
et comme OAP
\5 = OAP \4 + P\ 4 AP5
5 5
2π
alors on en déduit que P\ 4 AP5 = . Pour le triangle P5 AP1 il suffit de remarquer
5
\4 + P\ 2π π 2π
que OAP 4 AP5 + P5 AP1 = π, soit P5 AP1 = π − − = . On effectue un
\
5 5 5
raisonnement analogue pour les deux autres angles et on obtient que les diagonales
du pentagone inscrit dans C forment des angles identiques, ce qui implique que
P1 P2 = P2 P3 = P3 P4 = P4 P5 = P5 P1 . Le pentagone ainsi tracé est donc bien un
pentagone régulier.
C 00
P5
•
P4 C
•
C0
• • •
O A P1
•
P3
•
P2
10
Si on trace toutes les diagonales du pentagone régulier on obtient un pentagramme :
E C
A B
D C
||
1− −
||
A ϕ B
Lemme 4.7. Soit ABCD un rectangle d’or. Il existe E et F , deux points du rec-
tangle tel que ADEF soit un carré et BCEF soit un rectangle d’or.
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D b E a−b C
b b
A a F B
Trigonométrie
π ϕ
Proposition 4.8. On a cos =
5 2
Démonstration. Soit ABC un triangle d’argent dont la base est égale à ϕ. On trace
sa hauteur principale. On note I l’intersection entre cette hauteur et la base AB.
Comme ABC est un triangle d’argent alors l’angle IAC[ est égal à π , comme CIA
5
est rectangle en I et que la somme des trois angles du triangle AIC est égale à π,
12
3π
[ = π − π − π = 3π = 5 . Comme ABC est isocèle, alors I est au milieu
on a ICA
5 2 10 2
ϕ
π AI ϕ
du segment [AB]. On a donc cos = = 2 = .
5 AC 1 2
C
1 1
A ϕ ϕ B
2
I 2
1
Démonstration. Soit (an ) la fraction continue définie par récurrence par an+1 = 1 +
an
avec a0 = 1. Si n ∈ N, celle-ci est bien définie car elle laisse l’ensemble des réels
|1 − ϕ|
invariant. On considère la propriété Hn : |an − ϕ| 6 . Au rang 0, on a
ϕn
|1 − ϕ|
|a0 − ϕ| = |1 − ϕ| = . Soit p 6 n, on suppose Hp vraie. Montrons que
ϕ0 !
1 1 |ϕ − an |
Hn+1 est également vraie. |an+1 − ϕ| = 1 + − 1+ = . Or
a n ϕ a n ϕ
|ϕ − an | 1 − ϕ 1 |1 − ϕ|
6 n × 1 × = n+1 . La condition Hn+1 est donc vraie. Donc par
an ϕ ϕ ϕ ϕ
|1 − ϕ|
récurrence, Hn est vraie pour tout entier naturel n. Comme ϕ > 1, converge
ϕn
vers 0. Alors par l’inégalité précédente, |an − ϕ| converge vers 0 et donc an converge
vers ϕ.
Remarque. — Le fait que cette fraction soit infinie montre également que ϕ est
un nombre irrationnel. En effet comme il s’agit d’une succession de divisions
euclidiennes et que la fraction est infinie, cela signifie que ϕ ne peut pas
p
s’écrire sous la forme avec p un entier relatif et q un entier non nul.
q
13
√
r q
— On peut démontrer avec un raisonnement tout à fait analogue que ϕ = 1+ 1+ 1 + ...
Définition 5.3. Un suite de Fibonacci est une suite définie par récurrence par
Fn+2 = Fn+1 + Fn .
Théorème 5.6. Les suites de Fibonacci forment un espace vectoriel engendré par
(ϕ)n et (ψ)n .
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L’ensemble F est donc un sous espace vectoriel de RN . Comme (ϕn ) et (ψ n ) sont deux
suites de Fibonacci, alors elles appartiennent à F . Soit (un ) ∈ F . Montrons main-
tenant qu’il existe un unique couple (a, b) ∈ R tels que un = aϕn + bψ n . Supposons
qu’il existe un tel couple, alors
u0
=a+b
b
u1
= aϕ −
ϕ
donc !
1 1
u0 + u1 = +ϕ a
ϕ ϕ !
1
ϕu0 − u1 = ϕ + b
ϕ
On en déduit que u0 u1
a
= +
ϕ+2 2
ϕ(u0 ϕ − u 1)
b =
ϕ+2
Si a et b existent alors ils sont de cette forme, et comme u0 , u1 et ϕ sont des
constantes alors a et b sont uniques. Montrons l’existence d’un tel couple. Si n ∈ N,
on pose l’hypothèse de récurrence Hn : un = aϕn + bψ n . On sait que pour n =
0 et n = 1 Hn est vraie. On suppose que pour tout entier p inférieur à n, Hp est vraie.
Montrons qu’alors Hn+1 est vraie. (un ) ∈ F donc, un+1 = un + un−1 , par hypothèse
de récurrence on a, un+1 = aϕn + bψ n + aϕn + bϕn−1 = a(ϕn + ϕn−1 + b)(ψ n + ψ n−1 ).
Or par le lemme précédent on obtient un+1 = aϕn+1 + bψ n+1 , donc Hn+1 est vraie
et donc par récurrence Hn est vraie pour tout entier naturel.
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!n
1 n
ϕ − −
1 ϕ
Remarque. Comme ψ = − , on peut réécrire cette égalité comme suit Fn = √ .
ϕ 5
ϕn
On obtient donc Fn ' √ .
5
Fn+1
Proposition 5.8. Soit Fn , n ∈ N une suite de Fibonacci. On a lim =ϕ
x→+∞ Fn
Fn+1
Démonstration. On pose Rn = pour n ∈ N∗ . Par définition de la suite de
Fn
Fn + Fn−1 1 1
Fibonacci on a Rn = = 1+ > 1. On rappelle que ϕ = 1 + . Donc
Fn Rn−1 ϕ
∀n ∈ N∗ , on a
!
1 1
|Rn − ϕ| = 1+ − 1+
Rn ϕ
1 1
=
−
Rn−1 ϕ
ϕ − R
n−1
=
Rn−1 ϕ
!n−1
ϕ − R 1 1 1
n−1
Or on a
≤ |Rn−1 − ϕ| ≤ |R1 − ϕ|. Or ϕ > 1 donc < 1.
Rn−1 ϕ ϕ ϕ ϕ
!n
1
On a alors lim = 0. Par la successions d’inégalités précédentes on en déduit
n→+∞ ϕ
Fn+1
que lim |Rn −ϕ| = 0. Et donc, par définition de Rn , on obtient lim = ϕ.
n→+∞ x→+∞ Fn
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