Topologie Et Mesure
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TOPOLOGIE ET MESURE _________________________________________________________________________________________________________________
1. Espaces métriques. Il est utile de savoir que tout espace métrique peut-être complété :
étant donné ( E, d ) métrique, il existe un espace métrique complet
Espaces complets ( Eˆ , d̂ ) et une injection isométrique j : E → Eˆ telle que j ( E ) soit
dense dans Eˆ – c’est-à-dire que tout point de Eˆ est limite d’une
Soit E un ensemble. Une distance d sur E est une application : suite de points de j ( E ) . Cette propriété définit Eˆ à une isométrie
qui vérifie les trois conditions suivantes : Exemple : le plus simple, c’est ˆ = ; cette équation répond au
problème de l’irrationalité mentionné dans l’historique. Les espaces
(i) d ( x, y ) = 0 ⇔ x = y. fonctionnels fournissent des exemples plus profonds, que nous ver-
rons par la suite.
(ii) d ( x, y ) = d ( y, x ) pour tous x et y.
(iii) d ( x, z ) d ( x, y ) + d ( y, z ) pour tous x, y et z. Une distance d sur un ensemble E munit cet ensemble d’une
topologie, en d’autres termes d’une collection de sous-ensembles
ouverts, suivant la définition suivante.
La quantité d ( x, y ) est appelée la distance entre x et y. Un espace
métrique est un couple ( E, d ) , où d est une distance sur E, c’est-à-
dire un ensemble E muni d’une métrique d. Définition : soit ( E, d ) un espace métrique. Un sous-ensem-
ble V de E est dit ouvert si pour tout x ∈ V , il existe ε > 0 tel que
la boule :
Exemples : Soit E = ; d ( x, y ) = x – y est la distance ou métri-
que usuelle sur . B ( x, ε ) = { y ∈ E, d ( x , y ) < ε }
n
Plus généralement, si E = et x = ( x 1, x 2, …, x n ) , soit incluse dans V.
n
y = ( y 1, y 2, …, y n ) sont deux éléments de , et si on pose :
converge vers x ∈ E si pour tout ε > 0 , il existe N ∈ tel que si On vérifie aisément que f est continue si et seulement si f
–1
(V)
n N , alors : est ouvert dans E pour tout sous-ensemble ouvert V de F.
Remarquons que toute réunion d’ouverts est ouverte, et donc que
d ( x n, x ) < ε
toute intersection de fermés est fermée.
Cela permet de définir l’adhérence A d’un ensemble A comme le
On dit que la suite ( x n ) n 0 est de Cauchy si pour tout ε > 0 , il
plus petit fermé contenant A ; il est clair que A est aussi l’ensemble
existe N ∈ tel que si p q N , alors :
des limites de suites d’éléments de A.
Les distances permettent de formaliser, dans de nombreux cas, le
d ( x p, x q ) < ε
concept de limite. En toute généralité, elles ne suffisent cependant
pas.
C’est une conséquence facile de la propriété (iii) des distances
(l’« inégalité triangulaire ») que toute suite convergente est de
Cauchy. Exemple : une suite ( f n ) n 0 de fonctions de dans converge
simplement vers f si pour tout x ∈ :
La réciproque est vraie dans certains espaces métriques, mais pas
dans tous, d’où la définition suivante.
lim f n ( x ) = f ( x ) (1)
n→∞
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εk – 1
On poursuit par récurrence en prenant x k ∈ V k ∩ B x k – 1, ------------ et
–1
Comme f est continue, f ( V i ) est ouvert dans E. Par compacité,
2
il existe { i 1, i 2, …, i n } tels que : 1
ε k ∈ ] 0, -----k [ tels que l’équation (3) soit satisfaite pour tout k 1.
n 2
E = ∪ f –1 ( V i ) k
–n –k
On a clairement d ( x n, x n – 1 ) 2 et donc d ( x n, x k ) 2 si n > k ,
k=1
n par l’inégalité triangulaire. La suite ( x k ) est donc de Cauchy.
et on a donc f ( E ) ⊆ ∪ V ik . Nous avons montré que f ( E ) est
compact. k=1 ♦ Soit :
x = lim x k
La famille fondamentale des parties compactes nous est donnée k→∞
par un théorème montré par E. Borel et H. Lebesgue au début du
vingtième siècle : les parties compactes de sont les parties fer- D’après l’équation (3) on a :
mées bornées. Avec la proposition 2 cela nous montre le corollaire x n ∈ B ( x k, ε k ⁄ 2 )
suivant.
pour tout n > k 0 , et donc :
Corollaire 1 : soit ( E, d ) un espace métrique compact. Toute x ∈ B ( x k, ε k ⁄ 2 ) ⊆ B ( x k, ε k )
fonction continue f : E → est bornée et atteint ses bornes.
ce qui montre d’après les équations (2) et (3) que x ∈ B ( x, ε ) ∩ Ω , et
Si ( E 1, d 1 ), ( E 2, d 2 ), …, ( E n, d n ) sont des espaces métriques, le pro- donc que l’ensemble Ω est dense. ♦
duit E 1 × E 2 × … × E n est un espace métrique pour la distance : Le lemme 1 implique bien sûr que Ω est non vide, et c’est sou-
vent sous cette forme que le lemme de Baire est employé.
n
d ( x i ), ( y i ) = ∑ d i ( x i, y i ) Ce lemme est très utile pour établir des propriétés d’uniformité ou
de régularité cachées. Citons sans démonstration deux résultats élé-
i=1
mentaires de ce type :
Lorsque les E i sont tous égaux à , on définit ainsi une distance
n Exemple 1 : soit f : → une fonction partout dérivable. Alors la
sur , qui est équivalente à la distance euclidienne d 2 et qui définit
n dérivée f ′ est continue en tout point d’un sous-ensemble dense Ω de
la topologie naturelle de . . Donc, si la tangente à un graphe existe partout, il y a de nombreux
On montre qu’un produit d’espaces compacts est compact. Il points où cette tangente varie continuement.
∞
s’ensuit que le théorème de Borel-Lebesgue s’étend ainsi : les par- Exemple 2 : soit f : → une fonction telle que pour tout
n n(x)
ties compactes de sont des parties fermées bornées. Nous ver- x ∈ , il existe n ( x ) ∈ tel que la dérivée ( f ) de f d’ordre n ( x )
rons que cet énoncé caractérise les espaces de dimensions finies (cf. s’annule en x. Alors f est une fonction polynomiale ; donc, il y a un
[AF 100, théorème 4]). entier n ∈ qui marche pour tous les points x ∈ .
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La condition (iii) exprime que le volume d’une partie « solide » de qui ne dépend que de g d’après les propriétés de m n . Une fonction
n n –1
ne dépend pas de sa position. Les conditions (i) et (ii) sont les f : → est dite mesurable si f ( ]a, b[ ) ∈ n pour tout
2
propriétés naturelles d’une surface ou d’un volume. ( a, b ) ∈ .
Il n’existe pas de fonction d’ensemble définie sur toutes les par- Si f 0 est mesurable, on définit son intégrale ainsi :
3
ties de l’espace qui vérifie les conditions (i), (ii) et (iii). On peut
∫ ∫
cependant attribuer une mesure à toutes les parties « concrètes »,
f ( t ) dt = sup g ( t ) dt ; 0 g f, g étagée
en un sens très large.
n
n
Expliquons la construction dans le cas où n = 1. Un ouvert U de il se peut bien sûr que ce suprémum soit égal à +∞ . S’il est fini, on
est une réunion disjointe d’intervalles ouverts : dira que f est intégrable.
U = ∪i ]ai, bi [ Si f mesurable est à valeurs réelles quelconques, on pose :
+ –
et cette représentation est unique. f = max ( f, 0 ) ; f = – min ( f, 0 ).
On définit alors : + –
les fonctions f et f
sont mesurables.
m(U) = ∑ ( bi – ai ) + –
On dit que f est intégrable si f et f le sont et on pose :
i
∫ ∫ ∫
+ –
Si E est une partie quelconque de , on définit la mesure exté- f ( t ) dt = f ( t ) dt – f ( t ) dt
rieure m∗ ( E ) de E par la formule :
n
n
n
m∗ ( E ) = inf { m ( U ) ; U ouvert, E ⊆ U } Notons que cette définition montre que f est intégrable si et seu-
lement si f est intégrable. On vérifie que l’intégrale ainsi définie est
Suivant Lebesgue, on dit qu’une partie E de [ a, b ] est mesurable linéaire en f, et à l’aide de la σ – additivité de la mesure, on montre
si : les très utiles théorèmes suivants.
m ∗ ( E ) + m ∗ ( [ a, b ] \ E ) = b – a
Cette dernière condition veut dire qu’un ensemble mesurable E Théorème 2 : soit ( f k ) une suite de fonctions mesurables de
n n
est contenu dans un ouvert U et contient un fermé F tels que U et dans , telle que lim f k ( x ) = f ( x ) pour tout x ∈ .
k→∞
F aient presque la même mesure. Après avoir étendu la définition de On suppose qu’il existe une fonction F intégrable telle que :
n
la mesurabilité aux parties non bornées de , puis , Lebesgue
fk ( x ) F ( x )
montre le théorème fondamental suivant.
n
pour tout k ∈ et tout x ∈ .
n
Théorème 1 : l’ensemble n des parties mesurables de Alors f est intégrable et l’on a :
contient les ouverts et est stable par réunion dénombrable,
∫ ∫
intersection dénombrable et passage au complémentaire. Il f ( x ) dx = lim f k ( x ) dx
existe une application : n k→∞ n
m n : n → [ 0, +∞ ]
Qui vérifie (i), (ii), (iii), et qui est plus σ – additive, au sens sui- Ce « théorème de convergence dominée » énonce donc que sous
vant. une condition de domination, on peut intervertir la limite ponctuelle
(iv) Pour toute suite ( A k ) k 0 de parties mesurables disjoin- et l’intégrale.
tes, on a :
+∞ 2
Théorème 3 : soit f : → une fonction intégrable. On a
m n ∪ A k = ∑ mn ( Ak )
k 0 l’égalité :
k=0
n
Toutes les parties de que l‘on peut exhiber sans utiliser ∫
2
f ( t ) dt =
∫ ∫
f ( x, y ) dx dy =
∫ ∫
f ( x, y ) dy dx
∫
n
g ( t ) dt =
k=1
∑ λk mn ( Ak ) (5) l’accent sur la distribution de la fonction f et fait disparaître la varia-
ble d’intégration, constitue le point de vue moderne sur l’intégration.
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n n
3) Soit 1 ( ) l’espace des fonctions intégrales de dans . On
5. Espaces normés. Espaces n
définit une relation d’équivalence sur 1 ( ) par :
de Banach
En géométrie élémentaire, on définit la norme d’un vecteur
fg⇔
∫
n
f ( t ) – g ( t ) dt = 0
∫
est une application N : E → [0, +∞[ qui vérifie les propriétés sui-
f 1 = f ( t ) dt
vantes : n
(i) N(x) = 0 ⇔ x = 0 . L’un des grands avantages de la théorie de Lebesgue est que
n
(ii) N ( λ x ) = λ N ( x ) pour tout x ∈ E et tout scalaire λ . l’espace L 1 ( ), . 1 est complet.
2 Si p ∈ [1, +∞[ , on définit :
(iii) N ( x + y ) N ( x ) + N ( y ) pour tout couple ( x, y ) ∈ E .
n p n
Lp ( ) = f ; f ∈ L1 ( )
Un espace normé est un couple ( E, N ) , où N est une norme sur E.
La notation x est souvent utilisée pour désigner la norme d’un
qui est complet pour la norme :
vecteur x.
1⁄p
p
∫
Une norme N permet de définir une distance d sur E, par l’équa-
f p = f ( t ) dt
tion : n
d ( x, y ) = N ( x – y )
Le cas p = 2 est particulièrement important puisqu’il définit
On peut donc parler de suite de Cauchy et de suites convergentes
dans un espace normé. La définition ci-après permet d’appliquer l’espace de Hilbert (cf. [AF 100], § 2). Enfin, on définit sur l’espace
n
aux espaces fonctionnels les idées topologiques décrites dans le L ∞ ( ) des classes de fonctions mesurables bornées la norme :
paragraphe 1.
f ∞ = sup { t > 0 ; m n ( { f > t } ) > 0 }
Définition 2 : un espace normé ( E, N ) est un espace de = inf { s > 0 ; m n ( { f > s } ) = 0 }
Banach s’il est complet pour la distance associée à N, donc si
n
toute suite de Cauchy d’éléments de E converge dans E. Une fonction f ∈ L ∞ ( ) peut être modifiée sur un ensemble de
mesure nulle pour être à valeurs dans [ – f ∞, f ∞ ]. L’espace
n
Exemples : ( L ∞ ( ), . ∞ ) est lui aussi complet.
n
1) Sur l’espace , on peut considérer les normes suivantes. Si 4) Si 1 p < ∞ , l’espace p ( ) est l’ensemble des suites ( x n ) n 0
n
v = ( x 1, x 2, …, x n ) ∈ , on pose : de nombres réels telles que :
n ∞ 1⁄p
v 1 = ∑ xi ( xn ) p
= ∑ xn
p
< +∞
i=1 n=0
v ∞ = sup xi
1in L’espace p ( ) muni de la norme . p est un espace de Banach, qui
n 1⁄p n
p constitue un analogue discret de l’espace L p ( ) . Nous verrons en
v = ∑ xi (1 p < ∞) n
p
i = 1 [AF 100, § 2] que lorsque p = 2 , les espaces 2 ( ) et L 2 ( ) sont
isométriques.
La norme euclidienne . 2 définit la longueur géométrique usuelle
du vecteur v (cf. [AF 100, § 1]). Toutes ces normes sont équivalentes et
n Nous avons présenté tous ces exemples dans le cadre des espa-
définissent la structure métrique produit usuelle sur .
ces de Banach réels, c’est-à-dire sur le corps . Le cas complexe
fournit des exemples complètement analogues. La considération
2) Soit K un espace compact et soit X = ( K ) l’espace des fonc- des espaces de Banach sur le corps des nombres complexes
tions continues de K de . Si on pose : pose quelques petits problèmes géométriques (par exemple, il faut
préciser ce que l’on entend par « séparation » quand le corps de
f ∞ = sup { f ( x ) ; x ∈ K } base n’est pas ordonné ; cf. [AF 100, théorème 10]. Cependant, le
cadre complexe est beaucoup mieux adapté à l’analyse de Fourier, à
on fait de ( K ), . ∞ un espace de Banach. La norme . est appe-
∞ la théorie spectrale, au calcul fonctionnel, etc. Nous considérerons
lée norme de la convergence uniforme sur K. donc souvent des espaces de Banach complexes.
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