PPL PS Santé Menstruelle
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
SEIZIÈME LÉGISLATURE
PROPOSITION DE LOI
relative à la prise en compte de la santé menstruelle,
députés.
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Mesdames, Messieurs,
La notion de santé au travail est ancienne. Ainsi, dans l’Antiquité déjà, 2 500 ans avant notre ère, les
historiens ont pu établir qu’un médecin Égyptien était chargé de veiller sur l’état de santé des ouvriers
et des esclaves sur le chantier des pyramides. Plus proche de nous, le recours à des médecins d’entreprise
et à des visites d’embauche est apparu en 1810 pour les travailleurs des mines et des carrières et un
premier décret est pris pour imposer au patronat de payer les frais médicaux des ouvriers blessés lors
des accidents du travail. Formellement, l’inspection du travail est créée en 1874 et la loi sur les accidents
du travail qui instaure une réparation forfaitaire en fonction de la perte de salaire est promulguée en
1898. Le code du travail, quant à lui, naît en 1910 et la loi qui fonde sur le plan légal la médecine du
travail date du 28 juillet 1946. Enfin, le 23 décembre 1982, les comités d’hygiène, de sécurité et des
conditions de santé au travail pour les entreprises de plus de 50 salariés sont mis en place.
Alors que le cadre existe aujourd’hui dans notre pays pour permettre que le travail s’exerce dans des
conditions satisfaisantes sur le plan sanitaire, la santé menstruelle au travail reste encore non traitée sur
le plan législatif, plaçant les femmes dans une situation de fragilité en raison de leurs règles.
Alors, que l’Espagne a adopté le 16 février 2023 un projet de loi pour créer un congé menstruel pour
les femmes souffrant de règles douloureuses, devenant le premier pays européen à légiférer en ce sens,
il importe que la France lui emboîte le pas.
La loi espagnole permet dorénavant un « arrêt de travail d'une femme en cas de règles
incapacitantes » liées, par exemple, « à des pathologies comme l'endométriose ». Cet arrêt sera
« reconnu comme une situation spéciale d'incapacité temporaire » de travail. Le texte précise par
ailleurs que l'enjeu est d’« accorder à cette situation pathologique une réponse adaptée afin d'éliminer
tout biais négatif [pour les femmes] dans le monde du travail ». Enfin, l’arrêt de travail, qui devra être
accordé par un médecin et qui sera financé par la Sécurité sociale, n’a pas de limitation dans sa durée.
D’autres pays avant l’Espagne ont déjà ouvert la voie à une législation permettant aux femmes de
s’absenter de leur travail en raison de leurs règles. C’est ainsi le cas du Japon et de la Corée du Sud, où
ce congé est très majoritairement sans solde, ou encore de l’Indonésie, de Taïwan et de la Zambie, qui
prévoient pour leur part le paiement des congés menstruels.
La présente proposition de loi vise à faire entrer le congé menstruel dans notre code du travail et à
lever le tabou autour des cycles menstruels et de leurs conséquences physiques et mentales. Les effets
indésirables des règles douloureuses (dysménorrhée) sont bien connus et particulièrement handicapants :
douleurs abdominopelviennes, crampes, spasmes, fatigue, diarrhées, maux de tête, vertiges, nausées et
vomissements notamment.
Pour certaines femmes, touchées par des pathologies liées aux cycles menstruels telles que
l’endométriose, ces symptômes peuvent être aggravés et ainsi devenir d’autant plus handicapants dans
leur vie professionnelle. Selon le ministère de la Santé, 2,5 millions de femmes seraient touchées par
l’endométriose soit 10 % des femmes menstruées.
En plus du congé menstruel et pour tenter d’appréhender plus largement le sujet des tabous autour
de la santé des femmes dans le monde de l’entreprise, cette proposition de loi vise à ouvrir aux femmes
qui subissent une interruption involontaire de grossesse (fausse couche) le droit à des jours de congés
supplémentaires. Il est essentiel qu’elles puissent en effet bénéficier d'un congé payé ainsi que leur
conjoint ou conjointe. Ces drames malheureux, qui surviennent dans 15 % des cas et qui touchent en
moyenne une femme sur dix, restent tabous, au même titre que les menstruations douloureuses. Il est
donc essentiel et vital de réserver à ces personnes un droit de repos et de deuil sans qu’elles soient
contraintes par une activité professionnelle, ni privées d'une partie de leur salaire. Si toutes les personnes
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concernées ne ressentiront pas le besoin de prendre ces jours de congés, cette proposition de loi vise
cependant à leur en donner la possibilité, si elles en ressentent le besoin.
L’inscription d’un congé menstruel et d’un congé consécutif à une interruption involontaire de
grossesse dans le code du travail s’inscrit dans la jurisprudence de la Cour de cassation, dont la chambre
sociale a reconnu, dans un arrêt du 12 juillet 2017, qu’un accord collectif peut bénéficier aux seules
salariées de sexe féminin, dès lors que cette mesure vise à établir l'égalité des chances entre les femmes
et les hommes en remédiant aux inégalités de fait qui affectent les chances des femmes.
L’article 1er prévoit la possibilité, pour un médecin ou une sage-femme, de prescrire un arrêt
maladie de treize jours maximum valable un an, pour une durée ne pouvant pas excéder deux jours par
mois, pour les personnes souffrant de menstruations incapacitantes. Cet article prévoit par ailleurs que
les personnes arrêtées en raison de leurs dysménorrhées seront indemnisées dès leur premier jour
d’absence, sans délai de carence. Enfin, cet article a pour objectif de proposer un parcours de soin autour
la question de la santé menstruelle en établissant une consultation annuelle remboursée par la sécurité
sociale et sans avance de frais.
L’article 2 fixe les conditions d’une prise en charge, par l’assurance maladie, du congé maladie en
cas de dysménorrhée incapacitante, sans jour de carence.
L’article 3 inscrit dans le code du travail les mesures liées à l’instauration d’un congé menstruel en
cas de dysménorrhée sur justificatif médical mais sans préavis. Il laisse la possibilité aux entreprises
d’accorder une meilleure prise en charge via une convention ou un accord collectif d'entreprise ou, à
défaut, une convention ou un accord de branche.
L’article 4 prévoit que les agents publics bénéficient d’autorisations spéciales d’absence liées au
congé menstruel sans que ces absences soient considérées comme des congés annuels et dans les
conditions médicales prévues à l’article 1er de la présente proposition de loi. Cet article 4 prévoit enfin
que l’agent public n’aura pas de jour de carence lorsqu’il s’absentera en cas de dysménorrhée
incapacitante.
L’article 5 prévoit que les entreprises inscrivent dans leur règlement intérieur les mesures matérielles
leur permettant de prendre en compte la santé menstruelle des salariées comme, par exemple,
l’installation de sanitaires avec point d’eau ou encore la mise à disposition de protection hygiéniques.
Des dispositions sur l’aménagement des sanitaires sont d’ailleurs présentes dans le code du travail au
sein de sa partie réglementaire (article R. 4228-10) et peuvent servir de base à l’établissement de telles
mesures.
L’article 6 permet aux salariés et agents publics souffrant de dysménorrhée de demander à être en
télétravail. Cette possibilité ne pourra pas supplanter le droit au congé menstruel.
L’article 7 octroie aux salariés et aux agents de la fonction publique des jours de congé en cas
d’interruption spontanée de grossesse, autrement dit de « fausse couche » sans jour de carence.
PROPOSITION DE LOI
Article 1er
I. – Après l’article L. 162-4-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 162-4-1-1 ainsi
rédigé :
« 9°) La couverture des frais relatifs à un examen annuel de prévention de santé menstruelle. »
« 29° Pour les frais liés à l’examen de prévention de santé menstruelle mentionné au 9° de l’article
L. 160-8 ou relevant des soins mentionnés au 1° de l'article L. 160-9-1. »
« Art. L. 162-1-25. – Une consultation annuelle de prévention de santé menstruelle, réalisée par un
médecin généraliste ou spécialiste, est prise en charge en totalité par les régimes obligatoires de
l'assurance maladie et maternité, et les bénéficiaires de ces actes sont dispensés de l'avance des frais. »
Article 2
« Art. L. 323-1-2. – Par dérogation au premier alinéa de l’article L. 323-1, en cas d’incapacité de travail
résultant de dysménorrhée, l’indemnité journalière est accordée sans délai. »
« Art. L. 323-4-1 A. – Par dérogation à l’article L. 323-4, l’indemnité journalière versée dans le cas visé
à l’article L. 323-1-2 est égale à la totalité des revenus d’activité antérieurs soumis à cotisations à la date
de l’interruption du travail, retenus dans la limite d’un plafond et ramenés à une valeur journalière. »
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II. – Après le troisième alinéa de l’article 115 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances
pour 2018, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
Article 3
La section 1 du chapitre II du titre IV du livre Ier de la troisième partie du code du travail est complétée
par une sous-section 5 ainsi rédigée :
Article L. 3142-35-1. – La salariée a droit, sur justification mais sans préavis, à un congé menstruel dans
les conditions fixées à l’article L. 162-4-1-1 du code de la sécurité sociale. La durée de ce congé ne peut
être imputée sur celle du congé payé annuel.
Article L. 3142-35-2. – En cas de différend, le refus de l'employeur peut être directement contesté par le
salarié, visé à l’article L. 3142-35-1, devant le conseil de prud'hommes, statuant selon la procédure
accélérée au fond, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État.
Article L. 3142-35-3. – Pour mettre en œuvre le droit à congé du salarié mentionné à l'article L. 3142-
35-1, une convention ou un accord collectif d'entreprise ou, à défaut, une convention ou un accord de
branche déterminent une durée de ce congé supérieure à celle prévue à l’article L. 162-4-1-1 du code de
la sécurité sociale.
Article 4
I. – À la première phrase de l’article L. 622-1 du code général de la fonction publique, après le mot
« parentalité » sont insérés les mots : « , au congé menstruel dans les conditions fixées à l’article L. 162-
4-1-1 du code de la sécurité sociale »
II. – Le II de l’article 115 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 est
complété par un alinéa ainsi rédigé :
Article 5
I. – L’article L. 1321-2 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
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« 3° Le règlement intérieur rappelle l’égalité entre les sexes prévue par le présent code et établit les
dispositions nécessaires à la prise en considération matérielle de la santé menstruelle dans l’entreprise. »
Article 6
I. – Le II de l'article L. 1222-9 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 7° Les modalités d'accès des salariées souffrant de règles douloureuses et invalidantes à une
organisation en télétravail. »
II. – Après la quatrième phrase de l’article L.430-1 du code de la fonction publique, il est inséré une
phrase ainsi rédigée : « Le télétravail est accordé à la demande de l’agent public souffrant de règles
douloureuses et invalidantes. »
Article 7
« 6° Le salarié et son conjoint, concubin ou partenaire de pacte civil de solidarité ont droit chacun à un
congé en cas de survenue d'une interruption spontanée de grossesse ».
II. – Après l'article L. 622-2, il est inséré dans le code général de la fonction publique un article L. 622-
2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 622-2-1. – Les agents publics, ainsi que leur conjoint, concubin ou partenaire de pacte civil de
solidarité, bénéficient, de droit, d'une autorisation spéciale d'absence de cinq jours ouvrables en cas de
survenue d'une interruption spontanée de grossesse. »
III. – Le 6° du II de l’article 115 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018,
est complété par les mots : « ou consécutivement à la survenue d’une interruption spontanée de
grossesse »
Article 8
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La charge pour les organismes de sécurité sociale est compensée, à due concurrence, par la majoration
de l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les
biens et services.