Notes de Cours
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2 Nombres complexes 8
2.1 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
3 Suites 23
3.1 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
1 Polynômes
Définition 1 (Polynôme). Un polynôme à coefficients réels est une suite de nombres réels
ayant un nombre fini de termes non nuls. L’indice du dernier terme non nul est appelé le
degré du polynôme. La suite dont tous les termes sont nuls est appelée polynôme nul et
son degré et −∞. L’ensemble des polynômes à coefficients réels est noté R[X].
Un polynôme P de degré zéro est une suite dont seul le premier terme a0 est non nul.
Un tel polynôme est appelé polynôme constant, est identifié à son premier terme et on
note P = a0 .
1
Addition des polynômes
Soit P et Q deux polynômes. Le polynôme P + Q est le polynôme dont les coefficients
sont les sommes terme à terme des coefficients de P et Q. Si P = (a0 , . . . , ap ) et Q = (b0 , ,̇bq )
avec p ≤ q, alors
(
(a0 + b0 , . . . , ap + bp ) si p = q ,
P +Q=
(a0 + b0 , . . . , ap + bp , bp+1 , . . . , bq ) si p < q .
En notation avec l’indeterminée, on a, si p ≤ q,
p q
X X
i
P +Q= (ai + bi )X + bi X i
i=0 i=p+1
2
Remarques
– L’unicité du couple (Q, R) est garantie par la condition do (R) < do (B).
– Si le reste de la division euclidienne de A par B est nul, on dit que B divise A, ou
que B est un diviseur de A ou que A est un multiple de B.
– Les constantes non nulles divisent tous les polynômes.
Exemples
Division euclidienne de X 4 + X 2 + 1 par X 2 + 1.
X 4 + X 2 + 1 = X 2 (X 2 + 1) + 1 .
X 4 + X 2 + 1 = (X 2 + X + 1)(X 2 − X + 1) .
Par abus de notation, on note encore P cette fonction, et sa valeur en x est notée P (x).
Définition 4 (Racine d’un polynôme). Soit P un polynôme. Le nombre réel λ est appelé
racine de P si la fonction polynôme associée à P s’annule en λ.
3
On obtient comme conséquence immédiate de ce résultat que si P est de degré 2, P est
irréductible si et seulement si P n’admet pas de racines réelles. Rappelons qu’un polynôme
de degré 2 aX 2 + bX + c, a 6= 0 admet des racines si et seulement si b2 − 4ac > 0, et se
factorise alors de la façon suivante
√ √
2 −b + b2 − 4ac −b − b2 − 4ac
aX + bX + c = a X − X− .
2a 2a
Théorème 2. Les seuls polynômes irréductibles de R[X] sont les polynômes de degré 1 et
les polynômes de degré 2 sans racines réelles.
Définition 5 (Racine multiple). Soit P un polynôme. Le réel λ est une racine de multi-
plicité (exactement) m si (X − λ)m divise P et (X − λ)m+1 ne divise pas P .
où
– a 6= 0 ;
– les nombres réels λi sont deux à deux distincts et les nombres qi sont des entiers non
nuls appelés multiplicités respectives des racines λi ;
– les couples de réels (bi , ci ) sont deux à deux distincts et tels que b2i − 4ci < 0 ; les
nombres pi sont des entiers non nuls.
X 4 + X + 1 = (X 2 + X + 1)(X 2 − X + 1) .
Corollaire 2. Soit P un polynôme de degré au plus n tel que la fonction polynôme associée
à P s’annule en n + 1 nombres réels distincts. Alors P est le polynôme nul.
4
Exemple Soit P un polynôme quelconque. Grâce au résultat précédent, on peut identifier
le reste de la division euclidienne de P par X 2 − 1 sans avoir besoin de l’effectuer. Soit Q et
R le quotient et le reste de la division euclidienne de P par X 2 − 1, i.e. P = (X 2 − 1)Q + R,
avec do (R) ≤ 1. Puisque −1 et 1 sont les racines de X 2 − 1, si l’on évalue P en −1 et 1,
on obtient
P (1) = R(1) , P (−1) = R(−1) .
Soit S = aX + b un poylnôme de degré au plus 1 qui coı̈ncide avec P en 1 et −1. On a
alors
a + b = P (1) , −a + b = P (−1) ,
d’où
P (1) − P (−1) P (1) + P (−1)
a= , b= .
2 2
Le polynôme S ainsi défini coı̈ncide avec R en 1 et −1, R et S sont de degré au plus 1,
donc R = S. On a donc identifié le reste de la division euclidienne de P par X 2 − 1, sans
connaı̂tre P explicitement.
o
Alors d (P ) ≤ n − 1 et P (xj ) = yj pour tout j = 1, . . . , n. Prouvons maintenant l’unicité.
Soit Q un polynôme de degré au plus n − 1 tel que Q(xj ) = yj , 1 ≤ j ≤ n. Alors P et Q
sont de degré au plus n − 1 et coı̈ncident en n nombres réels distincts, donc sont égaux par
le corollaire 2.
5
Remarque Cette méthode est en pratique une très mauvaise méthode d’interpolation.
Son intérêt est essentiellement théorique.
Théorème 5 (Bézout). Soit P et Q deux polynômes premiers entre eux. Il existe alors
des polynômes A et B tels que AP + BQ = 1. On peut de plus choisir de façon unique A
et B tels que do (A) < do (Q) et do (B) < do (P ).
Corollaire 3. Soit P et Q des polynômes premiers entre eux. Pour tout polynôme R, il
existe des polynômes U et V tels que R = U P + V Q.
On définit les polynômes dérivés d’ordre supérieur par récurence : P (n) = (P (n−1) )0 .
On a vu que l’on peut identifier un polynôme de degré n par ses valeurs en n + 1 points.
On peut aussi identifier un polynôme de degré n par les valeurs de ses dérivées successives
en un point fixe a.
Proposition 5. Soit P un polynôme de degré au plus n. Soit a un nombre réel tel que
P (a) = 0 et P (k) (a) = 0 pour k = 1, . . . , n. Alors P = 0.
6
Démonstration. Supposons que do (P ) ≤ 0. Alors P = a0 et P (a) = 0 implique a0 = 0,
d’où P = 0. Procédons maintenant par récurrence. Supposons que pour un nombre entier
n ≥ 1, on ait prouvé que tout polynôme de degré au plus n − 1 dont les dérivées successives
s’annulentP en un même point soit nul. Soit maintenant P un polynôme de degré au plus
n, P = ni=0 ai X i , tel que P et toutes ses dérivées successives s’annulent en a. Puisque
P (n) est le polynôme constant n!an , si P (n) (a) = 0, on a nécessairement an = 0, et donc P
est de degré au plus n − 1. On peut donc applique l’hypothèse de récurrence à P , et l’on
obtient P = 0.
Comme précédemment, on peut écrire ce résultat sous une form équivalente. si P et Q
sont deux polynômes de degrés au plus n et a est un nombre réel tel que P (a) = Q(a) et
P (k) (a) = Q(k) (a) pour k = 1, . . . , n. Alors P = Q. On obtient alors le corollaire suivant
très important.
Corollaire 4. Soit P un polynôme et a un nombre réel. Soit P (k) (a), 1 ≤ k ≤ n les valeurs
des dérivées successives de la fonction polynômiale associée à P . Alors
n
X P (k) (a)
P = P (a) + (X − a)k .
k=1
k!
1.5 Exercices
Exercice 1.1. Trouver tous les polynômes P de degré inférieur ou égal à 3 tels que P (0) =
1, P (1) = 2, P (2) = −1 et P (3) = −2.
Exercice 1.2. Déterminer tous les polynômes P ∈ R[X] de degré 3 tels que
P (X + 1) − P (X − 1) = X 2 + 1 .
Exercice 1.3. Effectuer la division euclidienne de A par B dans les cas suivants :
1. A = X 4 − 1, B = X + 2,
2. A = X 4 + X 3 − X 2 + X + 1, B = X 2 − X + 1,
3. A = X 4 + 2X 3 + 4X 2 + 2, B = X 2 + X + 1.
Exercice 1.4. Déterminer sans calculs le reste de la division euclidienne de (cos a +
X sin a)n par X 2 + 1.
Exercice 1.5. Le polynôme X 4 + 4 est-il irréductible dans R[X] ?
Exercice 1.6. Factoriser dans R[X] le polynôme X 6 + 1.
7
Exercice 1.7. Soit θ ∈ R. Factoriser dans R[X] le polynôme X 4 − 2X 2 cos(θ) + 1.
Exercice 1.8. Soit a 6= b. Si les restes des divisions euclidiennes d’un polynôme A par
X − a et par X − b sont α et β, respectivement, quel est le reste de la division de A par
(X − a)(X − b) ?
Exercice 1.11. Soit P ∈ R[X] n’ayant pas de racine réelle. On suppose que P (x) ≥ 0
pour tout x ∈ R. Montrer qu’il existe A et B dans R[X] tels que P = A2 + B 2 .
2 Nombres complexes
On a vu que certains polynômes sont irréductibles dans R, ce qui est équivalent à dire
qu’ils n’admettent pas de racines réelles. De même que certains polynômes à coefficients
rationels n’ont pas de racines rationelles, mais ont des racines réelles, peut-on construire un
ensemble contenant R, auquel on pourrait étendre l’addition et la multiplication, et dans
lequel les polynômes du second degré ne seraient pas irréductibles ? Et quel serait l’intérêt
d’une telle construction ? C’est l’objet de cette section de définir les nombres complexes
et de montrer leur utilité. Il existe plusieurs constructions, à partir d’idées algébriques ou
géométriques, mais l’étude des propriétés des nombres complexes repose toujours en fin de
compte sur les propriétés fondamentales topologiques de la droite réelle. Nous choisissons
une approche algébrique, puis nous montrerons les propriétés géométriques des nombres
complexes.
P ∼ Q ⇔ X 2 + 1 divise P − Q .
Cette relation est appelée relation d’équivalence, car elle a les propriétés suvantes.
– Réflexivité : ∀P ∈ R[X], P ∼ P . En effet, P − P = 0, donc X 2 + 1 divise P − P .
– Symétrie. Il est clair par la définition que P ∼ Q ⇔ Q ∼ P .
– Transitivité. Si P ∼ Q et Q ∼ R, alors P ∼ R. En effet, si X 2 + 1 divise P − Q et
Q − R, alors X 2 + 1 divise P − Q + Q − R, et P − Q + Q − R = P − R.
Cette relation est de plus compatible avec les opérations sur les polynômes.
Soit P ∈ R[X]. La classe d’équivalence de P , notée C(P ) est le sous ensemble de R[X]
constitué de tous les polynômes Q tels que P ∼ Q. En particulier, P est dans sa propre
classe d’équivalence. Si P et Q sont dans la classe d’équivalence d’un même polynôme R,
8
alors par transitivité, P ∼ Q. Ceci entraı̂ne que deux classes d’équivalences sont disjointes
ou égales, i.e. si C(P ) ∩ C(Q) 6= ∅, alors C(P ) = C(Q). Les classes d’équivalences pour la
relation ∼ forment donc une partition de R[X].
Remarquons maintenant que l’on peut choisir un représentant particulier dans chaque
classe d’équivalence, qui est le reste de la division euclidienne par X 2 + 1 d’un polynôme
quelconque de la classe.
9
L’ensemble R peut alors être identifié au sous-ensemble de R2 formé des couples de la
forme (a, 0), et on notera a(a0 , b0 ) le produit (a, 0) · (a0 , a0 ). Tout nombre complexe (a, b)
peut donc être écrit sous la forme
(a, b) = a(1, 0) + b(0, 1) .
La multiplication définie plus haut entraı̂ne la relation fondamentale suivante
(0, 1) · (0, 1) = −1 .
Pour parvenir à l’écriture usuelle des nombres complexes, on va introduire la notation
i = (0, 1) et comme on a déjà identifié le nombre complexe (1, 0) avec le nombre réel 1, on
peut alors écrire tout nombre complexe z sous la forme
z = a + ib .
L’identité (0, 1) · (0, 1) = −1 prend maintenant la forme célèbre
i2 = −1 .
Les nombres complexes de la forme (a, 0) sont identifié aux nombres réels, et les nombres
de la forme (0, b) ou ib sont appelés imaginaires purs.
L’ensemble C à la même structure algébrique que R : c’est un corps. Notamment, tout
nombre complexe non nul admet un inverse pour la multiplication. Soit z = a + ib avec
ab 6= 0. Alors
a b
(a + ib) × −i 2 =1.
a2 + b 2 a + b2
Définition 8 (Partie réelle, partie imaginaire, conjugué, module). Soit z un nombre com-
plexe, z = a + ib. Le nombre réel a est appelé partie réelle de z et noté Re(z). Le nombre
réel b est appelé partie imaginaire de z, et noté Im(z). Le conjugé de z, noté√ z̄, est le
nombre complexe a − ib et le module de z, noté |z|, est le nombre réel positif z z̄.
L’écriture d’un nombre complexe z sous la forme z = a + ib avec a, b réels est unique, et
appelée représentation cartésienne du nombre complexe z. Cette unicité signifie que deux
nombres réels z et z 0 sont égaux si et seulement si leurs parties réelles et imaginaires le
sont :
z = z 0 ⇐⇒ Re(z) = Re(z 0 ) et Im(z) = Im(z 0 ) .
En particulier,
z = 0 ⇐⇒ Re(z) = 0 et Im(z) = 0 .
On obtient aisément les identités suivantes
z + z̄ z − z̄
Re(z) = , Im(z) = .
2 2
On en déduit immédiatement qu’un nombre complexe est réel si et seulement si il est égal
à son conjugué, et imaginaire pur si et seulement si il est égal à l’opposé de son conjugué.
z ∈ R ⇔ z = z̄ , z ∈ iR ⇔ z = −z̄ .
10
Exemple Soit a, a0 , b, b0 des nombres réels et soit z = a + ib et z 0 = a0 + ib0 . Si z 0 6= 0,
déterminons les parties réelle et imaginaire de la fraction z/z 0 .
z z z̄ 0 aa0 + bb0 + i(a0 b − ab0 )
= = .
z0 z 0 z̄ 0 a0 2 + b 0 2
On a donc
aa0 + bb0 a0 b − ab0
Re(z/z 0 ) = , Im(z/z 0 ) = .
a0 2 + b 0 2 a0 2 + b 0 2
Proposition 8. Soit z, z 0 ∈ C.
zz 0 = z̄ z̄ 0 , z n = z̄ n , |zz 0 | = |z||z 0 | , |z n | = |z|n .
Si z 0 6= 0,
z̄ z |z|
(z/z 0 ) = , 0 = 0 .
z̄ 0 z |z |
Par abus de notation, on note encore P cette fonction, et sa valeur en x est notée P (x).
Une racine complexe d’un polynôme P est un nombre complexe z tel que P (z) = 0.
Par exemple, nous savons maintenant que le nombre complexe i est une racine complexe
du polynôme X 2 + 1 puisque i2 = −1. Le polynôme X 2 + 1 est donc factorisable dans C :
X 2 + 1 = (X − i)(X + i). Ce polynôme qui est irréductible dans R ne l’est plus dans C.
C’est en fait vrai de tous les polynômes de degré 2 irréductibles dans R.
Théorème 6 (D’Alembert-Gauss). Les seuls polynômes irréductibles de C[X] sont les
polynômes de degré 1.
Corollaire 5. Tout polynôme de degré n a coefficients complexes admet n racines (non
nécessairement toutes distinctes).
Théorème 7. Les racines complexes d’un polynôme à coefficients réels sont deux à deux
conjuguées.
11
Dérivée d’un polynôme à coefficients complexes
On peut dériver formellement les polynômesP à coefficients complexes de la même façon
que les polynômes à coefficients réels. Si P = ni=0 ai X i , où les coefficients ai sont com-
plexes, alors on définit à nouveau le polynôme dérivée P 0 de P par
n
X n−1
X
P0 = iai X i−1 = (i + 1)ai+1 X i .
i=1 i=0
Définition 11 (Le nombre π). Le nombre réel π est la longueur du demi-cercle, définie
par
Z 1 Z 1
dx dx
π= √ =2 √ .
−1 1 − x2 0 1 − x2
Nous allons maintenant définir pour x ∈ [−1, 1] la fonction arccos(x) (arc-cosinus)
comme la longueur de l’arc de cercle compris entre le point (0, 1) et le point du cercle
d’abcisse x. Cf. Figure 1.
6
arccos(x) ' $
@
I
@ -
−1 x 0 1
12
La fonction qui a θ ∈ [0, π] associe le nombre complexe du demi-cercle unité z = eix
est une bijection de [0, π] sur le demi-cercle. Son extension à R n’est pas bijective mais
conserve la propriété
∀θ ∈ R , eiθ = cos2 (θ) + sin2 (θ) = 1 .
Fixons x0 et notons g(x) le membre de droite. Pour x = 1, on a bien l’égalité des deux
membres. Il suffit donc de montrer que l’on a égalité des dérivées par rapport à x des deux
membres. En appliquant la formule des dérivées composées, on obtient
( √ )
1 x 1 − x 02 1
g 0 (x) = q × x0 + √ =√ ,
p 2 2 1 − x 2 1 − x 2
0 2
1 − (xx − (1 − x )(1 − x ))0
Théorème 9. La fonction exponentielle est périodique de période 2iπ : pour tout nombre
complexe z, on a
ez+2iπ = ez .
13
0 0
Proposition 9. Pour tout z, z 0 ∈ C, on a ez+z = ez ez .
Démonstration. Posons z = x + iy et z 0 = x + iy 0 . On a alors, par définition
0 0 0
ez+z = ex+x ei(y+y ) .
Pour tout θ ∈ R, on a
14
Interprétation géométrique des nombres complexes
Tout point du plan R2 peut être représenté par un nombre complexe z appelé l’affixe.
Si z 6= 0, alors z/|z| est dans le cercle unité, et donc il existe un unique θ ∈ [0, π] tel que
z = |z|eiθ . Le nombre θ est alors appelé l’argument de z, noté arg(z). Si z 0 est un nombre
0 0
complexe tel que z 0 = r0 eiθ , alors zz 0 = rr0 eθ+θ , i.e. |zz 0 | = rr0 et arg(z + z 0 ) = θ + θ0
(modulo 2π).
La multiplication par un nombre complexe non nul z peut donc être vue comme une
transformation géométrique. Soit r = |z| et θ = arg(z). Soit A un point du plan d’affixe z 0 .
Alors zz 0 est l’affixe du point obtenu par rotation d’angle θ, et homothétie de rapport r.
Une telle application, composéé d’une rotation et d’une homothétie est appelée similitude.
Cf. Figure 2.
6 zz 0
*
z0
:z
-
Grâce à cette interprétation, on voit aisément comment trouver une racine carrée de
tout nombre complexe. Soit z ∈ C, z 6= 0. Soit r son module et θ son arguemnt, i.e. z = reiθ .
Les racines carrées de z sont donc les nombres complexes z1 et z2 définis par
√ √ √
z1 = reiθ/2 , z2 = − reiθ/2 = rei(θ/2+π) .
Remarquons que si√ z ∈ R+ alors les reux racines carrées de z sont réelles, et par
convention on dénote z la racine positive. Si z ∈ R∗− , alors les reux racines carrées de z
sont imaginaires pures.
aX 2 + bX + c = 0
15
La discussion quant au signe de b2 − 4ac n’a plus de raison d’être. Soit z1 une racine carrée
(complexes) de (b2 − 4ac)/4a2 . On a alors
2 b b
aX + bX + c = a X + − z1 X+ + z1 .
2a 2a
Les racines complexes de l’équation aX 2 +bX +c = 0 sont donc −b/(2a)+z1 et −b/(2a)+z1 ,
ce que l’on peut écrire symboliquement
√ √
−b + b2 − 4ac −b − b2 − 4ac
x1 = , x1 = .
2a 2a
Remarquons que si les coefficients a, b, et c sont réels, alors les racines sont réelles si
b2 − 4ac ≥ 0, ou complexes et conjuguées si b2 − 4ac < 0.
'$
6
j
•
1
• -
•
j2&%
16
Utilisation des nombres complexes pour le calcul des sommes
trigonométriques
Soit z un nombre complexe différent de 1. On a l’identité
n−1 zn − 1
z + ··· + z + 1 = .
z−1
Posons r = |z| et soit θ ∈ [0, 2π[ tel que z = reiθ . On a donc
n−1 n−1
X
k
X rn einθ − 1
z = rk eikθ = .
i=0 i=0
reiθ − 1
Si r = 1, on obtient
n−1
X einθ − 1 sin(nθ/2)
eikθ = iθ
= ei(n−1)θ/2 .
i=0
e −1 sin(θ/2)
17
Linéarisation
L’exponentielle complexe permet de transformer des puissances des fonctions trigonométriques
en sommes. Ce procédé sera utile pour les calculs d’intégrales. Rappelons la formule du
binôme, valable pour a, b nombres complexes quelconques :
n
X
n n k n−k
(a + b) = a b ,
k=0
k
n n!
avec k
= k!(n−k)!
. Appliquons cette formule pour calculer cosn (θ).
n n n
eiθ + e−iθ
n −n
X n ikθ −i(n−k)θ −n
X n i(2k−n)θ
cos (θ) = =2 e e =2 e
2 k=0
k k=0
k
n n
X n X n
= 2−n cos((2k − n)θ) + i2−n sin((2k − n)θ) .
k=0
k k=0
k
Le membre de gauche de cette équation est réel, donc le membre de droite doit l’être aussi.
On en déduit donc les deux identités, valables pour tout θ ∈ R :
n
n −n
X n
cos (θ) = 2 cos((2k − n)θ) ,
k=0
k
n
−n
X n
2 sin((2k − n)θ) = 0 .
k=0
k
Par identification des parties réelle et imaginaire (nulle), on obtient les formules
n
n −n
X n
sin (θ) = 2 (−1)k cos(nπ/2 + (2k − n)θ) ,
k=0
k
n
X n
2−n (−1)k sin(nπ/2 + (2k − n)θ) = 0 .
k=0
k
18
On peut simplifier les formules précédentes en distinguant selon la parité de n.
q−1
( )
X 2q
cos2q (θ) = 2−2q 1 + 2 cos((2q − 2k)θ) ,
k=0
k
q
2q+1 −2q
X 2q
cos (θ) = 2 cos((2q + 1 − 2k)θ) ,
k=0
k
q−1
( )
X 2q
sin2q (θ) = 2−2q (−1)q 1 + 2 (−1)k cos((2q − 2k)θ) ,
k=0
k
q
2q+1 −2q q+1
X 2q + 1
sin (θ) = 2 (−1) (−1)k sin((2q + 1 − 2k)θ) .
k=0
k
Inversement, on obtient des formules pour exprimer cos(nθ) et sin(θ) comme polynômes
trigonométriques.
n
inθ n
X n
Re(in−k ) cosk (x) sinn−k (x) ,
cos(nθ) = Re e = Re ((cos(θ) + i sin(θ)) ) =
k=0
k
n
inθ n
X n
Im(in−k ) cosk (x) sinn−k (x) .
sin(nθ) = Im e = Im ((cos(θ) + i sin(θ)) ) =
k=0
k
En utilisant la relation cos2 (θ) + sin2 (θ) = 1, on peut réécrire les formules ci-dessus en ne
faisant intervenir qu’une seule fonction trigonométrique.
Exemples
Linéarisons cos4 (θ) et sin4 (θ). En appliquant les formules, on obtient
1 1 1
cos4 (θ) = 2−4 {1 + 8 cos(2θ) + 2 cos(4θ)} = + cos(2θ) + cos(4θ) ,
16 2 8
1 1 1
sin4 (θ) = 2−4 {1 − 8 cos(2θ) + 2 cos(4θ)} = − cos(2θ) + cos(4θ) .
16 2 8
Remarquons à titre de vérification que pour θ = 0, le membre de droite de la dernière
formule est bien nul. Exprimons mainteant sin5 (θ) comme un polynôme trigonométrique en
sinus. On va appliquer la formule générale obtenue plus haut, en remarquant que Im(ik ) = 0
si k est pair et Im(ik ) = (−1)q si k = 2q + 1, puis remplacer tous les cosinus par des sinus.
sin(5θ) = sin5 (θ) − 10 cos2 (θ) sin3 (θ) + 5 cos4 (θ) sin(θ)
= sin5 (θ) − 10{1 − sin2 (θ)} sin3 (θ) + 5{1 − sin2 (θ)}2 sin(θ)
= 16 sin5 (θ) − 20 sin3 (θ) + 5 sin(θ) .
19
2.1 Exercices
Exercice 2.1. Quels sont les nombres complexes dont le carré est égal au conjugué ?
Exercice 2.2. Montrer que
Exercice 2.3. Déterminer et représenter l’ensemble des points M du plan dont l’affixe z
vérifie l’égalité z + z̄ + z z̄ = 0.
Exercice 2.4. x, y et z étant trois nombres complexes de module égal à 1, comparer les
modules des nombres complexes x + y + z et xy + yz + zx.
Exercice 2.5. Mettre sous la forme a + ib (a, b ∈ R) les complexes
2
1 − 3i 2 − 3i i+5
, , .
3−i 1 + 7i (i + 3)2
Exercice 2.6. Montrer que (1 + 2i)(2 − 3i)(2 + i)(3 − 2i) est réel sans en calculer la valeur.
√
Exercice 2.7. Calculer les racines carrées des nombres complexes 1 + i 3, 8 − 6i et
8i − 6.
Exercice 2.8. Résoudre dans C l’équation z 2 − (2 + 6i)z + 2i − 5 = 0.
Exercice 2.9. Calculer les racines carrées dans C des nombres suivants : 100, −100, 3 + 4i,
−5 − 12i.
Exercice 2.10. Donner en fonction de θ l’argument des nombres complexes suivants :
z1 = cos θ − i sin θ,
z2 = − sin θ + i cos θ,
z3 = sin θ + i cos θ,
z4 = − sin θ − i cos θ,
z5 = − cos θ + i sin θ.
20
√
Exercice 2.14. Calculer les racines cubiques de z = (1 − i)/ 2.
Exercice 2.15. Trouver tous les couples (x, y) réels tels que (1 + i)/(1 − i) = xeiy .
Exercice 2.16. Donner sous forme cartésienne les racines de l’équation
21
Exercice 2.28. Déterminer les réels t tels que toutes les racines de l’équation
z 2 − 2zeit + 1 = 0
(i) Montrer que −i est une racine du polynôme P . Préciser son ordre de multiplicité.
(ii) Montrer que P admet une racine réelle. Préciser son ordre de multiplicité.
(iii) Factoriser le polynôme P en produit de polynômes irréductibles dans C.
(iv) Soit Q et R le quotient et le reste de la division euclidienne de P par (X + i)2 .
(a) En utilisant les questions précédentes déterminer les polynômes Q et R.
(b) En déduire la factorisation dans C puis dans R du polynôme Q.
Exercice 2.35. Calculer 2n−1 2p
P
k=0 cos (x + kπ/n).
22
3 Suites
Définition 14 (Suite réelle ou complexe). Une suite réelle est une application de N dans
R. Une suite complexe est une application de N dans C. L’image d’un entier n par une
suite u à valeurs réelles ou complexes est généralement notée un et appelée n-ième terme
de la suite.
Définition 15 (Suite majorée, minorée, bornée). Une suite réelle u est dite majorée si il
existe un réel A tel que un ≤ A pour tout n ≥ 0 ; elle est dite minorée si il existe un réel
A tel que un ≥ A pour tout n ≥ 0 ; elle est dite bornée si elle est majorée et minorée. Une
suite complexe u est dite bornée si la suite réelle des modules |un |, n ≥ 0 est majorée.
Définition 17 (Suite monotone). Une suite réelle u est dite croissante à partir du rang
n0 si pour tout n ≥ n0 , un ≤ un+1 ; elle est dite décroissante à partir du rang n0 si pour
tout n ≥ n0 , un ≥ un+1 . Elle est dite monotone à partir du rang n0 si elle est croissante ou
bien décroissante à partir du rang n0 .
Définition 18 (Suite convergente). Une suite à valeurs réelles ou complexes u est dite
convergente si il existe un nombre réel ou complexe ` tel que
Remarque La limite d’une suite réelle convergente est un nombre réel. Si une suite
complexe converge, sa partie réelle et sa partie imaginaire forment des suites convergentes,
et la limite de la partie réelle (resp. imaginaire) est la partie réelle (resp. imaginaire) de la
limite.
Théorème 10. Soit u une suite convergente. Alors u admet une unique limite.
Théorème 13. Soit u une suite convergente ayant pour limite zéro et v une suite bornée.
Alors la suite uv est convergente et a pour limite zéro.
23
Définition 19 (Suite divergente). On dit qu’une suite réelle u tend vers +∞ si
∀A ∈ R , ∃n0 ∈ N , ∀n ≥ n0 , un ≥ A .
On dit qu’une suite réelle u tend vers −∞ si −u tend vers +∞, soit
∀A ∈ R , ∃n0 ∈ N , ∀n ≥ n0 , un ≤ A .
Une suite est dite divergente si elle tend vers +∞ ou bien vers −∞.
Définition 20 (Suites géométriques). Une suite u à valeurs complexes est dite géométrique
si il existe un nombre complexe w tel que pour tout n ≥ 0, un+1 = wun .
Somme d’une suite géométrique Soit u une suite géométrique de premier terme u0
et de raison w ∈ C. Alors
n
X 1 − wn−q+1
uj = uq .
j=q
1−w
Pn
Soit S la suite définie par Sn = j=0 uj . Alors si |w| < 1, la suite S est convergente et sa
limite est donnée par
u0
lim Sn = .
n→∞ 1−w
Si |w| ≥ 1 la suite S est divergente. Si la raison w est de la forme w = e2ipπ/q , où p et q
sont des entiers premiers entre eux et p < q, alors la suite S est périodique de période q.
En effet, wq = 1, et donc 1 + w + · · · + wq−1 = 0. La suite S prend donc q valeurs disctintes.
Exemple 3.1. Calculer en fonction de n la valeur de nk=0 e2ikπ/3 . Posons w = e2ikπ/3 .
P
Critères de convergence
Théorème 14. Une suite réelle croissante (au delà d’un certain rang n0 ) et majorée est
convergente. Une suite réelle décroissante (au delà d’un certain rang n0 ) et minorée est
convergente.
Ce théorème est une propriété fondamentale de l’ensemble R des nombres réels, et ne
peut pas être démontré sans avoir construit rigoureusement R à partir de l’ensemble des
nombres rationnels.
Remarque Si la suite u est croissante (au delà d’un certain rang n0 ) et majorée par le
réel A, alors
lim un = sup un ≤ A .
n→∞ n≥n0
24
De même, si la suite u est décroissante (au delà d’un certain rang n0 ) et minorée par le
réel A, alors
lim un = inf un ≥ A .
n→∞ n≥n0
Corollaire 6. Si une suite est croissante mais non majorée, alors elle tend vers +∞. Si
une suite est décroissante et non minorée, alors elle tend vers −∞.
Exemple 3.2 (Série harmonique). On appelle série harmonique la suite u de terme général
un = 1 + 1/2 + · · · + 1/n, n ≥ 1 est croissante mais non majorée donc divergente. En effet,
pour tout n ≥ 1, on a
2n 2n
X 1 X 1 1
u2n − un = ≥ =
j=n+1
j j=n+1
2n 2
La suite u n’est donc pas bornée. Puisqu’elle est croissante, elle tend donc vers +∞.
Définition 21 (Suites adjacentes). Deux suites réelles u et v sont dites adjacentes si u est
croissante, v est décroissante, si la suite v − u est positive et tend vers 0.
Théorème 15. Deux suites adjacentes sont convergentes et ont la même limite.
Démonstration. Par hypothèse, la suite u est croissante et majorée, et la suite v est
décroissante et minorée, donc les deux suites convergent. Soit `1 et `2 leurs limites re-
spectives. Soit > 0. Par définition de la convergence, et puisque l’on a aussi supposé que
u − v tend vers 0, il existe un entier n0 tel que pour tout n ≥ n0 , on ait
On a donc obtenu que pour tout > 0, |`1 − `2 | ≤ . Ceci n’est possible que si `1 = `2 . On
conclut donc que les deux suites ont la même limite.
Exemple 3.3. Soit u la suite réelle définie par
n
X (−1)j
un = .
j=0
2j + 1
25
L’exemple précédent rentre dans le cadre plus général des séries alternées.
Théorème
Pn 16. Soit u une suite décroissante convergent vers zéro. La suite v définie par
vn = k=0 (−1)k uk est convergente.
Démonstration. Les suites s et t définie par sn = v2n et tn = v2n+1 sont adjacentes.
Définition 22 (Suite de Cauchy). Une suite à valeurs réelles ou complexes u est appelée
suite de Cauchy si
∀ > 0 , ∃n0 , ∀n, m ≥ n0 , |un − um | ≤ .
Théorème 17. Une suite convergente est de Cauchy.
Théorème 18. Une suite de Cauchy est convergente.
Démonstration. Soit v et w les suites définies par
vn = inf uk , wn = sup uk .
k≥n k≥n
soit
∀n ≥ N , wn − ≤ vn ≤ wn + ,
c’est-à-dire, finalement
∀n ≥ N , |wn − vn | ≤ ,
ce qui signifie précisément que la suite w − v converge vers 0. Les deux suites v et w sont
donc convergentes et ont la même limite, notée `. Montrons que la suite u converge vers
`. Soit > 0 et soit N tel que pour tout n ≥ N , on ait simultanément |vn − `| ≤ et
|wn − `| ≤ . Puisque par définition vn ≤ un ≤ wn pour tout n, on a donc
∀n ≥ N , ` − ≤ vn ≤ un ≤ wn ≤ ` +
et donc |un − `| ≤ pour tout n ≥ N , ce qui montre que la suite u est convergente, avec `
pour limite.
26
Corollaire 7. Une suite de Cauchy est bornée.
Exemple 3.4. Soit u la suite définie par un = 1+ 212 + 312 · · ·+ n12 . La suite u est de Cauchy.
En effet, on a, pour m > n > 0,
m m
X 1 X 1 1 1 1
um − un = 2
≤ = − ≤ .
k=n+1
k k=n+1
(k − 1)k n m n
Cette inégalité est vraie pour tout m > n, et puis que 1/(nn!) → 0, pour tout , il existe
un N tel que pour tout m, n ≥ N , |um − un | ≤ . La suite u est donc de Cauchy, et donc
converge.
Exemple 3.5. Soit u la suite définie par un = 1 + 12 + 3!1 · · · + n!1 . La suite u est de Cauchy
et sa limite est notée e, le nombre tel que log(e) = 1. En effet, on a, pour m > n > 0,
m m
X 1 1 X 1
um − un = =
k=n+1
k! n! k=n+1 (n + 1) × · · · × k
m
1 X 1 1 1 1 1
≤ = − ≤ .
n! k=n+1 (k − 1)k n! n m n × n!
Cette inégalité est vraie pour tout m > n, et puisque 1/(n × n!) → 0, on obtient que pour
tout , il existe un N tel que pour tout m, n ≥ N , |um − un | ≤ . La suite u est donc
de Cauchy, et donc converge. La même majoration permet de montrer que sa limite e est
irrationnelle. Cf. Exercice 3.11.
Notations de Landau
Définition 23. Soit u et v deux suites réelles ou complexes. On dit que un = O(vn ) (u est
grand O de v) si
∃K ≥ 0 , ∃n0 ∈ N , ∀n ≥ n0 , |un | ≤ K|vn | .
On dit que un = o(vn ) (u est petit o de v) si
∀ > 0 , ∃n0 ∈ N , ∀n ≥ n0 , |un | ≤ |vn | .
On dit que la suite u est équivalent à la suite v à l’infini et l’on note un ∼ vn si un − vn =
o(un ) et un − vn = o(vn ).
Remarque Ces définitions permettent de considérer des suites dont les termes peuvent
s’annuler. Si les termes de la suite v sont non nuls, alors on a les équivalences
un = O(vn ) ⇐⇒ la suite u/v est bornée ,
un
un = o(vn ) ⇐⇒ lim =0,
n→∞ vn
un
un ∼ vn ⇐⇒ lim =1.
n→∞ vn
27
Dire qu’une suite est O(1) est équivalent à dire qu’elle est bornée ; dire qu’une suite est
o(1) est équivalent à dire qu’elle est converge vers 0.
Suites récurrentes
On appelle suite récurrente une suite u telle que un soit fonction d’une ou plusieurs
valeurs précédentes. Plus précisemment, un suite u est dite récurrente d’ordre k s’il existe
une fonction f : Rk → R telle que pour tout n ≥ 0, un+k = f (un+k−1 , . . . , un ). Une telle
suite est entièrement déterminée par la fonction f et les k premières valeurs u0 , . . . , uk−1 .
Proposition 12. Si f est continue et si la suite réelle u est convergente, alors sa limite `
est solution de l’équation f (`) = `. Si f (u0 ) = u0 , alors la suite est constante.
p
Exemple 3.6. Soit f la fonction définie sur [0, ∞) par f (x) = (x2 + 7x)/2 − 1 et soit
u la suite récurrente définie par u0p≥ 1 et un = f (un ). Les limites possibles de la suite u
vérifient l’équation f (x) = x, soit (x2 + 7x)/2 − 1 = x, i.e. x2 − 3x + 2 = 0. Les seules
limites possibles sont 1 et 2. Remarquons de plus que l’on a f (x) > x si et seulement si
x2 − 3x + 2 < 0, i.e. x ∈]1, 2[. On a donc les cas suivants.
– Si u0 = 1 ou u0 = 2, la suite u est constante.
– Si x > 2, alors 2 < f (x) < 2 et donc si u0 > 2, on a 2 < f (un ) < un pour tout n, et
donc la suite est décroissante et minorée, donc convergente, et sa limite est donc 2.
– Si 1 < x < 2, on a 1 < x < f (x) < 2, et donc si u0 ∈]1, 2[, alors pour tout n on a
1 < un < un+1 < 2. La suite un est croissante et majorée, donc convergente, et sa
limite est donc 2.
Remarquons enfin que si 0 < x < 1, alors f (x) < x, et donc si u0 ∈]0, 1[, la suite u est
décroissante. Mais il existe un n tel que u2n + 7un < 0, et donc la suite u n’est pas définie
pour tout n.
28
Comme dans l’exemple précédent, l’étude des suites récurrentes générales repose sur
des propriétés de monotonie.
Théorème 19. Soit f une fonction continue sur un intervalle I (non réduit à un point) et
admettant un unique point fixe x∗ dans I. Soit u la suite définie par la donnée de u0 ∈ I et
un+1 = f (un ) et soit g la fonction définie sur I par g(x) = f (x) − x. Si g est décroissante
sur [x∗ , ∞[∩I et croissante sur ] − ∞, x∗ ] ∩ I, alors la suite u converge vers x∗ .
Si f est de plus dérivable, on peut obtenir une vitesse de convergence.
Théorème 20. Soit f une fonction continument dérivable sur un intervalle I (non réduit
à un point), admettant le point fixe x∗ dans I et telle que |f 0 (x)| < 1 sur I. Soit u la suite
définie par la donnée de u0 ∈ I et un+1 = f (un ). Alors la suite u converge vers x∗ et il
existe une constante positive C et un nombre réel r ∈ [0, 1[ tel que |un − x| ≤ Crn .
Exemple 3.7. Considérons la fonction f (x) = log(x + 3) et la suite u définie par la donnée
de u0 et un+1 = f (un ). La fonction f est définie sur ] − 3, ∞[ et admet un unique point
fixe x∗ (x∗ ≈ 1.5052415). Le graphe de la fonction f est donné Figure 4. Le point fixe x∗
correspond à l’intersection du graphe de f et de la droite y = x. Les premières valeurs de la
suite u pour u0 = 5 et u0 = 0 sont données Table 1. La dérivée de f est f 0 (x) = 1/(x + 3).
On a donc f 0 (x) < 1 si et seulement si x > −2. La suite est donc convergente pour tout
choix de u0 > −2 et sa limite est x∗ . On voit que la convergence est très rapide. Comme
la fonction f est de plus concave (c’est-à-dire que sa dérivée est décroissante), on obtient
que si u0 ≥ x∗ , on a 0 ≤ un − x ≤ (u0 − x∗ )(x∗ + 3)−n pour tout n ≥ 0.
Considérons tout d’abord le cas le plus simple où P admet q racines distinctes, réelles ou
complexes.
29
Figure 4 – Le graphe et le point fixe de la fonction f (x) = log(x + 3).
où les constantes α1 , . . . , αq sont déterminées par les conditions initiales u0 , . . . , uq−1 (ou
par n’importe quel q-uplet de valeurs successives de la suite uk , . . . , uk+q−1 ).
Exemple 3.8. Soit u la suite définie par l’équation de récurrence un = un−1 + un−2 (suite
de Fibonacci).
√ Le polynôme
√ caractéristique est P =√X 2 − X − 1, dont les racines sont
(1 + 5)/2 et (1 − 5)/2. La racine positive √ (1 + n 5)/2 est √appelée nombre d’or. Les
solutions sont donc de la forme un = a((1 + 5)/2) + b((1 − 5)/2)n . Soit u0 et u1 les
deux premières valeurs (arbitraires). On doit avoir
√ √
u0 = a + b , u1 = a(1 + 5)/2 + b(1 − 5)/2
soit
√ √
u0 (1 − 5)/2 − u1 u1 (1 + 5)/2 − u1
a=− √ , b= √ .
5 5
Exemple 3.9. Soit u la suite définie par l’équation de récurrence un + un−1 + √un−2 = 0.2
2
Le polynôme caractéristique est X + X + 1, dont les racines sont j = (−1 + i 3)/2 et j
(les racines cubiques de l’unité). Les solutions sont donc de la forme un = ajn + bj2n . Soit
u0 et u1 les deux premières valeurs (arbitraires). On doit avoir
u0 = a + b , u1 = aj + bj2
soit, en remarquant que 1 + j + j2 = 0 et que j2 = j̄,
u0 − u1 j u0 − u1 j2
a= , b = .
1 − j2 1−j
30
Remarquons que si u0 et u1 sont réels, alors tous les termes de la suite doivent être réels.
Or, si u0 et u1 sont réels, les coefficients a et b sont conjugués. Les solutions sont donc de
la forme 2Re(ajn ), i.e. sont réelles.
Dans le cas où le polynôme P a des racines multiples, on peut alors écrire
k
Y
P = (X − λi )mi ,
i=1
Vitesse de convergence
Définition 24. Soit v une suite réelle décroissant vers 0 et soit u une suite (réelle ou
complexe) convergente de limite `. On dit que la suite u converge converge vers sa limite
à la vitesse v si |un − `| = O(vn ).
Exemple 3.10. La suite u de l’exemple 3.3 converge vers sa limite π/4 à la vitesse 1/n.
3.1 Exercices
Exercice 3.1. Soit u et v deux suites à valeurs dans [0, 1] telles que limn→∞ un vn = 1.
Montrer que limn→∞ un = limn→∞ un = 1.
Exercice 3.2. Soit u une suite et ` un réel tels que limn→∞ (un − un−1 ) = `.
(i) Montrer que limn→∞ n−1 un = `.
(ii) Si ` 6= 0, montrer que nk=1 uk ∼ 12 `n2 .
P
31
Exercice 3.4. Le but de cet exercice est de prouver que la suite u définie par
1 1
un = 1 + + · · · + − log n
2 n
est de Cauchy. On rappelle l’inégalité, valable pour tout u ∈ [0, 1],
u 1
0 ≤ log(1 + u) − ≤ u2 .
1+u 2
Soit v la suite définie pour n ≥ 1 par vn = un+1 − un .
1
(i) Montrer que vn = n+1
− log(1 + n1 ).
1 1
(ii) Montrer que pour tout n ≥ 2, 0 ≤ −vn ≤ 2n2
≤ n−1
− n1 .
(iii) En déduire que pour m ≥ n ≥ 1, on a 0 ≤ −vn+1 − · · · − vm ≤ 1/n.
(iv) En déduire que la suite u est de Cauchy.
(v) En déduire que 1 + 12 + · · · + 1
n
= O(log n).
Exercice 3.5 (Moyenne de Cesàro). Soit u une suite réelle convergente et soit ` sa limite.
Soit v la suite définie par vn = (u1 + u2 + · · · + un )/n, appelée la moyenne de Cesàro de la
suite u.
(i) Montrer que vn − ` = {(u1 − `) + (u2 − `) + · · · + (un − `)}/n.
(ii) Montrer que pour tout > 0, il existe un entier n0 tel que pour tout n ≥ n0 ,
0 n
1X
|vn − `| ≤ |uk − `| + .
n k=1
Exercice 3.6. Soit u une suite réelle convergente et soit λ sa limite. Soit v la suite définie
Pn vn = (u1 + 2u2 + · · · + nun )/n(n + 1). On rappelle que pour tout entier n ≥ 1,
par
k=1 k = n(n + 1)/2.
(u1 −λ)+2(u2 −λ)+···+n(un −λ)
(i) Montrer que vn − λ/2 = n(n+1)
.
(ii) Montrer que pour tout > 0, il existe un entier n0 tel que pour tout n ≥ n0 ,
n
1 X X
|vn − λ/2| ≤ n0 k|uk − λ| + k.
n(n + 1) k=1 n(n + 1) k=1
32
Application. Montrer que la suite v définie par
n
X 2k 2 + 3 sin(k)
1
vn =
n(n + 1) k=1 3k + 5
Exercice 3.8. Calculez les trois premiers termes, puis le terme général de chacune des
suites récurentes suivantes et déterminez sa limite (si elle existe).
(i) u0 = 1, u1 = 1, un+2 = un + un+1 .
(ii) u0 = 1, u1 = 2, un+2 = 6un − un+1 .
(iii) u0 = 1, u1 = 0 un+2 = −2un + 3un+1 .
(iv) u0 = 1, u1 = 1, un+2 = −un + 2un+1 .
(v) u0 = 1, u1 = 2, un+2 = −un − 2un+1 .
(vi) u0 = 1, u1 = 0, un+2 = −4un + 4un+1 .
√
(vii) u0 = 1, u1 = 1, un+2 = − 2un + 2un+1 .
(viii) u0 = 1, u1 = 2, un+2 = −un + un+1 .
(ix) u0 = 1, u1 = 0, un+2 = −un − un+1 .
p
Exercice 3.9. Etudier la suite u définie par u0 > 0 et un+1 = (u2n + 7un )/2 − 1.
Exercice 3.10. Soient an et bn les suites définies de la façon suivantes :
(i) Montrer que ces deux suites sont bien définies, que an est décroissante, bn est crois-
sante, et ∀n ∈ N, an < bn .
(ii) Montrer que ∀n ∈ N, 0 ≤ an − bn ≤ (an−1 − bn−1 )2 /4.
√
(iii) En déduire que an et bn sont adjacentes et convergent vers 2.
Exercice 3.11. On considère la suite u définie par un = nk=0 k!1 (en posant par convention
P
0! = 1). Le but de l’exercice est de montrer que la suite u de Cauchy et que sa limite, notée e,
est irrationnelle.
(i) Montrer que pour tout m ≥ n ≥ 1, m 1 1
P
k=n+1 k! < n! .
(ii) En déduire que la suite u est de Cauchy.
(iii) Soit e la limite de la suite u. Montrer que pour tout n ≥ 1, on a un < e < un + 1/(n!).
33
(iv) On suppose qu’il existe deux entiers p et q premiers entre eux (sans diviseurs com-
muns) tels que e = p/q. Montrer qu’il existe alors un entier n tel que n!e soit un
entier pour lequel on a n!un < n!e < n!un + 1. Conclure que e est irrationnel.
Exercice 3.12. Soient a, b, c, d des nombres complexes tels que ad − bc 6= 0. Soit f la
fonction (appelée homographique) définie sur C par h(z) = (az + b)/(cz + d).
(i) Déterminer, lorsqu’elle existe la réciproque de h.
(ii) Résoudre dans C l’équation h(z) = z.
(iii) On suppose dans toute la suite que a, b, c, d sont réels avec ad − bc = 1. Tracer le
graphe de la restriction de h à R.
(iv) Soit u la suite définie par :
aun + b
u0 6= −d/c , un+1 = h(un ) = .
cun + d
Etudier la suite un dans les cas suivants.
(a) c = 0 et |a| = 1.
(b) c = 0 et |a| < 1.
(c) c = 0 et |a| > 1.
(d) c 6= 0. On posera alors wn = cun + d et l’on supposera que a + d > 2 et
u0 ∈/ [(a + d)−1 ; 2[. (Pourquoi ?)
Exercice 3.13. Soit a > 0 et soit u la suite réelle définie par u0 6= 0 et
1 a
un+1 = un + .
2 un
On définit sur R∗+ la fonction f par f (x) = (x + a/x)/2, x > 0.
√ √
(i) Montrer que pour tout x > 0, x 6= a, f (x) > a.
√
(ii) Montrer que si x > a, alors f (x) < x.
√
(iii) En déduire que pour tout n ≥ 1, un ≥ a et la suite u est décroissante à partir du
rang 1.
√ √
(iv) Montrer que pour tout x > 0, f (x) − a = (x − a)2 /(2x).
√ √ √
(v) En déduire que pour tout n ≥ 1, 0 ≤ un+1 − a ≤ (un − a)2 /(2 a).
(vi) En déduire que la suite u converge vers a.
√
(vii) Montrer que pour tout γ > 0, un − a = O(γ n ).
Exercice 3.14. Soit u et v deux suites réelles dont les termes sont strictements positifs.
(i) Montrer que si un a une limite non nulle ` et un ∼ vn alors limn→∞ vn = `.
(ii) Montrer que si un = O(vn ) alors upn = O(vnp ) pour tout p > 0.
(iii) Montrer que si un ∼ vn alors upn ∼ vnp pour tout p > 0.
√
(iv) On pose un = n et vn = n + n. Montrer que un ∼ vn mais les suites α et β définies
par αn = eun et βn = evn ne sont pas équivalentes.
34