EHP Les Personnes
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La personnalité des personnes physiques débute à la naissance. Pour qu’un nouveau-né se voie
attribuer la personnalité juridique, il faut qu’il soit né vivant et viable. Une nuance est apportée
à ce principe en faveur de l’enfant conçu : lorsqu’il y va de son intérêt (p. ex. en matière
successorale), l’enfant conçu est réputé né, sous réserve de naître ensuite vivant et viable.
Les personnes physiques gardent leur personnalité juridique jusqu’à leur décès. L’absence est,
dans ses effets, assimilée au décès. Lorsqu’une personne ne paraît plus à son domicile et ne
donne plus de nouvelles, les parties intéressées ou le ministère public peuvent demander au juge
des tutelles de constater la présomption d’absence. Dix ans après le jugement ayant constaté cette
présomption, le tribunal d’arrondissement peut déclarer l’absence, qui emporte alors les mêmes
effets que le décès.
Pour ce qui est des personnes morales les plus courantes, la personnalité juridique leur est
acquise : dès la signature de leur acte constitutif pour les sociétés, à compter de la publication de
leurs statuts au Mémorial pour les associations sans but lucratif et à compter de l’approbation de
leurs statuts par le ministre de la Justice par voie d’arrêté Grand-Ducal pour les fondations.
La personnalité morale d’une société cesse à sa dissolution dont les causes les plus fréquentes,
outre l’arrivée de son terme, sont la liquidation volontaire ou judiciaire et la faillite. Mais par une
fiction légale, la personnalité morale de la société ne disparaît pas instantanément : elle subsiste
pour les besoins de la liquidation. Une fois la clôture de la liquidation publiée, une personnalité
purement passive subsiste pendant cinq ans pour permettre aux créanciers sociaux d’agir contre
la société en la personne des liquidateurs.
Les principaux éléments de l’état civil des personnes physiques sont la naissance, le mariage, la
filiation, le nom, le domicile, la nationalité, la capacité et le sexe.
L’acte de naissance indique le jour, l’heure et le lieu de naissance ainsi que le sexe de l’enfant, le
nom et les prénoms qui lui sont donnés. Y figurent également les prénoms, noms, sexe et
domicile des parents ainsi que leurs lieux et dates de naissance s’ils sont connus. Quant au décès,
l’officier de l’état civil en dresse l’acte sur la déclaration d’un des plus proches parents ou voisin
du défunt et, s’il est décédé hors de son domicile, de la personne chez qui il est décédé.
Le premier élément distinctif d’une personne est son nom. Alors que le prénom peut être
librement choisi par les parents, s’il ne nuit pas aux intérêts de l’enfant ou aux droits des tiers, le
nom de famille est « héréditaire ». Les parents peuvent choisir parmi leurs propres noms de
famille celui ou ceux que leurs enfants se verront attribuer : celui du père, celui de la mère ou
leurs deux noms, dans l’ordre choisi par eux. Tous les enfants de mêmes parents porteront le
même nom de famille.
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Toute personne de nationalité luxembourgeoise qui, selon la loi, a quelque raison de le faire peut
demander à changer son nom ou son prénom. L’effacement de l’ancien prénom des registres de
l’état civil, au nom du respect de la vie privée, n’est pas prévu. La raison du changement peut
résider dans un nom ou prénom à consonance ridicule ou péjorative, à consonance étrangère – le
but étant de faciliter l’intégration des étrangers naturalisés portant des noms à prononciation ou
orthographe complexe – ou qui ne correspond plus au sexe de la personne.
Le sexe en effet peut changer au cours de la vie. La personne concernée doit faire une demande
de changement d’état et prouver (le plus souvent par voie d’expertise psychiatrique) qu’elle
souffrait de son état depuis de longues années précédant son opération, qu’elle avait la
conviction profonde d’appartenir au sexe opposé et éprouvait le besoin de s’établir et de se
comporter comme une personne de l’autre sexe. Les juges considèrent qu’une personne ne peut
former une telle demande par simple convenance personnelle ou envie passagère.
Quant à la nationalité, elle s’acquiert soit par naissance ou adoption, soit volontairement
(naturalisation). Le droit de la nationalité a été réformé par une loi du 23 octobre 2008 afin
surtout de contribuer à consolider l’intégration des étrangers (presque aussi nombreux que les
Luxembourgeois) résidant au Luxembourg.
S’agissant des personnes morales commerçantes, même si on n’utilise pas à proprement parler le
terme d’ « état civil », le Registre de commerce et des sociétés, organisation analogue, constate
diverses qualités ainsi que les changements dans leur vie.
Il existe deux types d’incapables personnes physiques : les mineurs et les majeurs protégés.
Le mineur a la capacité de jouissance mais non d’exercice, il est sujet de droit mais ne peut
exercer ses droits et en demander seul la sanction en justice. La loi prévoit donc sa représentation
permanente par ses parents ou par un tuteur voire, en cas de conflit d’intérêts entre le mineur et
ses parents ou son tuteur, par un administrateur ad hoc.
Les parents sont les administrateurs légaux des biens de leur enfant mineur et le représentent
dans les actes civils. Chacun peut faire seul les actes de pure administration mais ils doivent agir
ensemble pour les autres actes.
Lorsque les deux parents de l’enfant mineur sont décédés, lorsqu’ils n’ont pas reconnu l’enfant
ou s’il y a cause grave, le juge peut décider l’ouverture d’une tutelle. Le tuteur soit est l’ascendant
le plus proche, soit est choisi par le dernier parent vivant ou par le conseil de famille dont le juge
aura désigné les membres. Le conseil de famille règle les conditions générales de l’entretien et
l’éducation de l’enfant, tandis que le tuteur prend soin de l’enfant mineur, le représente dans tous
les actes de la vie civile et administre ses biens en bon père de famille.
La loi protège également, soit à l’occasion d’un acte particulier, soit de manière continue, certains
majeurs que l’altération de leurs facultés mentales met dans l’impossibilité de pourvoir seuls à
leurs intérêts. Il en va de même du majeur qui, par sa prodigalité, son intempérance ou son
oisiveté, s’expose à compromettre sa situation financière. Trois régimes sont prévus, du moins au
plus protecteur : la sauvegarde de justice, la curatelle et la tutelle.
Les personnes morales, quant à elles, ne sont investies que d’une personnalité fonctionnelle,
conçue en fonction de leur but social et devant servir à l’accomplissement de celui-ci. La
spécialité statutaire vient restreindre la capacité de la personne morale qui ne peut agir que dans
la limite de son objet social.
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Si la personne morale a la personnalité juridique dès la signature de l’acte constitutif, la capacité
active (d’agir en justice) ne lui est acquise qu’une fois effectuée la publication de l’acte constitutif
au Mémorial. Avant cela, elle a uniquement la capacité passive.
La capacité active lui est reconnue sa vie durant et dans une certaine mesure pendant sa
liquidation, pour les besoins de celle-ci.
2. Droits de la personnalité
Les droits de la personnalité sont les « droits inhérents à la personne humaine qui appartiennent
de droit à toute personne physique (innés et inaliénables) pour la protection de ses intérêts
primordiaux » (Cornu). Ils assurent à celle-ci la protection de son intégrité tant physique que
morale.
Leur domaine est très vaste. On peut citer le droit au respect de la vie privée, le droit à l’image, le
droit au secret des correspondances et des communications téléphoniques, le droit à
l’inviolabilité du domicile, le droit à l’honneur et à la réputation, le droit au nom, le droit à la vie,
etc.
Ils sont régis par de nombreux textes à commencer, outre les conventions internationales, par la
Constitution luxembourgeoise, dont le chapitre II décline toute une série de droits qu’elle
garantit aux individus, comme les droits naturels de la personne humaine (art. 11), la protection
de l’environnement humain et naturel (art. 11 bis) et d’autres.
Pour ce qui est de ces droits naturels, la Cour constitutionnelle, amenée à se prononcer sur la
conformité à la Constitution d’une disposition du Code civil interdisant l’adoption plénière à une
personne célibataire, a précisé, dans un arrêt n° 2/98 du 13 novembre 1998, qu’ils « se
restrei[gnaient]aux questions essentielles de l’être humain, au respect de sa dignité et de sa
liberté » et qu’ils existaient même sans texte de loi.
Bon nombre des droits de la personnalité sont expressément visés par la loi. C’est le cas du
respect de la vie privée, garanti également par l’article 11 de la Constitution et, pour une
protection plus efficace, consacré par une loi du 11 août 1982 dont l’article 1er, reproduction
littérale de l’article 9 du Code civil français, donne à l’individu dont la vie privée subirait une
atteinte, une action en cessation. Cette loi prévoit également des sanctions pénales en cas
d’utilisation de dispositifs d’enregistrement ou d’écoute clandestins ou de violation du secret de
la correspondance.
Comme pour d’autres droits de la personnalité, on admet que le droit à la protection de la vie
privée puisse être contrebalancé, dans certaines limites, par d’autres droits, comme celui qu’on
pourrait appeler droit de savoir découlant de la liberté d’expression, également garantie par la
Constitution (art. 24), mais aussi par une loi du 8 juin 2004 sur la liberté d’expression dans les
médias.
Mais c’est surtout par le développement des nouvelles technologies que le droit à la vie privée
s’est, comme partout, trouvé le plus malmené. La protection des données a, à l’échelon
européen, été garantie pour la première fois en tant que droit distinct par la Convention 108 du
Conseil de l’Europe du 28 janvier 1981.
Le Luxembourg avait déjà anticipé. Après une première loi de 1979 devenue inapplicable en
raison de la lourdeur des obligations qu’elle imposait aux responsables de traitements automatisés
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de données (autorisation ministérielle préalable après avis d’une commission consultative), la
matière est aujourd’hui régie par la loi du 2 août 2002.
Cette loi vise à établir un équilibre entre les droits et libertés fondamentaux des personnes
concernées et la libre circulation des données en réduisant à la portion congrue le système
d’autorisation préalable et en organisant des mécanismes de contrôle et de recours efficaces.
Mais elle est déjà obsolète en raison de l’évolution rapide des technologies, tout comme le sera
probablement, à peine adopté, le nouveau règlement européen du 27 avril 2016. D’un autre côté,
l’augmentation des menaces – et des atteintes – à la sécurité par des groupes ou individus qui se
réclament de l’une ou l’autre idéologie oblige à repenser les choses : le droit à la vie privée
passera peu à peu au second plan et les exceptions à sa protection risquent, vis-à-vis de l’État, de
se multiplier.
Il est un domaine, celui de la santé, où ont été observés ces dernières années des changements
importants. L’homme se réapproprie peu à peu ses droits. Auparavant infantilisé, il devient
véritablement acteur.
L’information du patient sur son état de santé est, depuis une loi du 24 juillet 2014, expressément
élevée au rang de droit, que ce soit d’une manière générale, pour lui permettre de connaître son
état de santé et son évolution probable ou, plus spécifiquement, avant toute intervention
(l’exception thérapeutique est toutefois maintenue « à titre exceptionnel » lorsque le médecin, qui
doit motiver sa décision dans le dossier de son patient, craint de causer un préjudice trop grave à
son patient par la révélation de son état).
Le libre arbitre du patient est en revanche désormais parfaitement respecté à deux moments
cruciaux de sa vie : l’état de grossesse et la fin de vie.
Une loi de décembre 2014 a consacré le droit à l’autodétermination des femmes qui n’ont
désormais plus besoin de se justifier pour avoir recours à l’avortement, à condition qu’il soit
pratiqué avant la fin de la 12e semaine de grossesse. Jusque-là, tant le médecin pratiquant
l’avortement que la femme y ayant recours étaient passibles de sanctions pénales si, au minimum
et uniquement pour ce qui est de la femme, aucune situation de détresse ne justifiait l’opération.
Peut-être cette ouverture conduira-t-elle, peu à peu, sinon à l’abandon du moins à l’aménagement
de l’accouchement sous X, dont les conséquences sont extrêmement lourdes sur les enfants
abandonnés qui voient leur droit de connaître leurs origines totalement nié, aucun mécanisme
n’étant prévu pour répondre à cet égard aux exigences de la Cour européenne des droits de
l’homme.
Par ailleurs, le droit du patient de décider de sa fin de vie se traduit désormais dans deux lois du
16 mars 2009, l’une sur les soins palliatifs, l’autre sur l’euthanasie et l’assistance au suicide. Le
droit à la mort a ainsi fait son apparition au Luxembourg parmi les droits de la personnalité.
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Bibliographie
FIEVEE A. et SANTER P., « La protection des données dans un monde globalisé » : Droit bancaire et
financier au Luxembourg, ALJB/Larcier, vol. 3, 2014, p. 1695 – PIERRAT M., « Soins et respect de la
personne en fin de vie » : Travaux de l’Association Henri Capitant, Journées suisses de 2009, t. LIX,
Bruxelles, Bruylant et Paris, LB2V, 2012, p. 809-830, également publié dans les Annales de droit
luxembourgeois, 2009, p. 189 – PUTZ J.-L., Le droit d’auteur : regards sur le droit luxembourgeois,
Bruxelles, Promoculture-Larcier, 2013 – SANTER P. et HOSS T., « La loi du 2 août 2002 sur la
protection des personnes à l’égard du traitement des données à caractère personnel : une
nouvelle donnée pour la place financière » : Droit bancaire et financier au Luxembourg, ALJB/Larcier,
vol. 1, 2004, p. 369 – STEICHEN A., Précis de droit des sociétés, 4e éd., Luxembourg, Éditions Saint
Paul, 2014 – TURK F., « Le statut juridique du corps humain au Luxembourg » : Travaux de
l’Association Henri Capitant, Journées suisses de 2009, t. LIX, Bruxelles, Bruylant et Paris, LB2V,
2012, p. 189-208 – VOGEL G., Le droit de la presse, Bruxelles, Promoculture-Larcier, 2012 ; Le
nouveau droit de la presse, Luxembourg, Promoculture, 2004 – WINANDY J.-P., Manuel de droit des
sociétés, Bertrange, Legitech, 2011.
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