Cours - GUENFISSI Hayette - Introduction À L'anthropologie
Cours - GUENFISSI Hayette - Introduction À L'anthropologie
Cours - GUENFISSI Hayette - Introduction À L'anthropologie
Introduction à l’anthropologie
Année universitaire
2015/2016
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Les objectifs de la matière enseignée
Un manque important est à signaler concernant les références bibliographiques qui
traitent cette matière au sein de la bibliothèque de la faculté des sciences humaines et
sociales ainsi que les librairies locales.
Et vu l’intérêt de cette matière fondamentale enseignée à la fois dans les différentes
branches et sur les différents niveaux, on a pris l’initiative de rédiger un polycopié qui
rassemble l’ensemble de nos lectures et l’expérience acquise au fil des 8 années
d’enseignement de l’anthropologie, ainsi cet humble travail constitue une synthèse d’une
importance capitale dont figure trois grands axes qui retracent, l’apparition, l’évolution et
le champs d’investigation de l’anthropologie.
En premier lieu, ce polycopié est un support pédagogique qui a pour ambition de
permettre aux étudiants de reconnaître l’anthropologie parmi toutes les autres disciplines
qui ont l’homme en société comme objet d’étude, et d’acquérir des connaissances
concernant les étapes de l’enquête de terrain et les caractéristiques des différents courants
anthropologiques. Et de dater sa naissance et ses différentes périodes de construction.
Il s'agit donc d'un ensemble de cours qui retracent l’histoire de cette discipline, son
évolution, son objet d’étude et ses méthodes d’investigation, Le premier axe est centré sur
le germinal de la discipline, son objet d’étude et aux définitions multiples qui sèment la
confusion entre l’anthropologie, ethnologie et ethnographie, les différentes branches de
l’anthropologie.
Le deuxième axe est consacré dans son intégralité à l’histoire de l’anthropologie (de la
réflexion anthropologique) à travers les époques et les civilisations, l’axe couvre les
périodes historiques allant de la préhistoire au 20ème siècle, une première partie de cet axe
est centrée sur l’apport des différentes civilisations telle, la civilisation égyptienne, chinoise
grecque et romaine.
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Il est suivi par une seconde partie qui est réservée à l’époque moderne, à savoir le
moyen âge, la Renaissance ainsi que les siècles des lumières. Nous avons mis en exergue la
civilisation occidentale et la civilisation arabo-musulmane.
Quant au troisième axe l’étudiant va trouver des informations indispensables à la
compréhension de cette matière à travers les thèmes étudiés dans le cadre des théories
anthropologiques, tels, les rites et la mythologie.
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Table des matières
Matière Page
1/Introduction 6
Axe I 8
2/ Définition de l’anthropologie et son objet d’étude 8
3/Confusion avec l’ethnographie et l’ethnologie 11
A. Ethnographie 12
B. Ethnologie 13
C. Anthropologie 13
4/Objectifs de l’anthropologie 18
Les 5/ Les branches de l’anthropologie 19
A. Anthropologie sociale 19
B. Anthropologie culturelle 21
An C. Anthropologie physique (biologique) 22
6/ L’enquête de terrain 23
A. A. Le séjour 26
B. B. L’observation participante 30
C. C. Apprentissage de la langue 32
D. D. Le choix des informateurs 33
E. E. Les techniques 34
F. F. Analyse des données 35
7/ Déontologie du travail de terrain 36
Axe II 40
Le germinal de la pensée anthropologique 40
1/L’époque de l’antiquité 40
2/ L’époque moyenâgeuse 45
A.Le Moyen âge européen 46
B. Moyen âge arabo-musulman 49
C. La Renaissance 55
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D. D.Les siècles des lumières 56
Axe III 57
Les théories et thèmes de l’anthropologie 57
Les 1/ Les théories 57
A. Evolutionnisme 57
B. Diffusionnisme 59
C. Culturalisme 61
D. Fonctionnalisme 63
2/ Thèmes 66
A. Mythes 66
B. Les Rites 69
Conclusion 72
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1/ Introduction :
Aujourd’hui, sans l’ombre d’un doute, l’anthropologie est une science connue et reconnue
comme discipline de terrain par excellence, grâce à la rigueur de ses méthodes et
techniques d’investigation, et cela malgré son apparition récente comparée aux autres
sciences humaines et sociales, cependant le germinale de la réflexion anthropologique
remonte à l’antiquité, plusieurs civilisations: telle la civilisation égyptienne, grecque et
chinoise, attestent l’existence d’une pensée pré-anthropologique, certes dispersée et avec
beaucoup de lacunes mais elle constitue un legs important pour les époques avenirs, et le
fil de cette réflexion ne s’est pas interrompu, il s’est renforcé avec l’époque moderne,
d’abord, suite aux exploits réalisés par les explorateurs et missionnaires des deux mondes
à savoir le monde occidental et arabo-musulman, les découvertes effectuées en cette
époque là, ont contraint l’Europe à reconnaitre l’existence de différents peuples ayant
diverses cultures et modes de vie inconnus dans le vieux continent.
Par suite, ce nouveau regard a été complété par l’époque de la Renaissance et les siècles
des lumières, qui ont permis l’émergence du courant humaniste qui s’est confié la harde
tache de reconsidérer l’homme comme être unique. Des lors la pensée philosophique a
changé d’opinion et élargi son regard afin d’assimiler l’idée de la diversité des sociétés et
des cultures malgré l’unité du genre humain. Il est fort de constater qu’en dépit de ses
origines lointaines qui remontent à l’antiquité, l’anthropologie demeure une discipline
jeune, son apparition ne dépasse pas un siècle et demi, cette apparition tardive s’explique
par les obstacles rencontrés au début de la discipline, telle la délimitation de l’objet
d’étude, les méthodes de travail et les théories.
Pendant longtemps, l’anthropologie était considérée la seule science réservée à l’étude des
sociétés dites primitives, de même la sociologie la science qui étudie les sociétés
industrielles (contemporaines) et la science de l’histoire pour l’étude des sociétés qui ont
connu l’écriture.
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Mais les grands changements qui sont apparus après la deuxième guerre mondiale ont
eu raison de la précédente répartition très calibrée des disciplines, en effet, l’anthropologie
voit son objet d’étude disparaitre au fur et à mesure que les sociétés dites primitives se
modernisent, cet état va amener l‘anthropologie à s’interroger et à se remettre en question,
ainsi qu’a changer d’orientation vers de nouveaux objets d’étude souvent empruntés à la
sociologie, tel l’étude des sociétés paysannes et urbaines, ce qui a conduit la
circonscription scientifique a considéré l’anthropologie une science pluridisciplinaire et
holiste.
Avant de donner un aperçu historique sur l’apparition et l’évolution de l’anthropologie, on
commence par définir cette discipline ainsi que son Object d’étude.
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AXE I
2/ Définition de l’anthropologie et son Object d’étude :
Étymologiquement, l’anthropologie désigne la science de l’homme, ce qui signifie la
science qui s’intéresse à l’étude de l’homme sous différentes dimensions, biologique,
culturelle et sociale et civilisationnelle, l’objectif de cette approche holiste selon Claude
Lévi-Strauss est de mettre en exergue ce qu’il nomme les universaux de la pensée
humaine, malgré la diversité des peuples et des cultures. Et les sociétés du passé ou
(disparues) ne sont pas le seul terrain privilégié par l’anthropologie, elle porte aussi un
intérêt particulier aux sociétés dans leur état actuel, ce qui autorise l’anthropologie à se
qualifier comme étant une science générale.
Depuis l’émergence de la réflexion pré-anthropologique à ce jour, l’anthropologie repose
sur le principe de « l’altérité », devenu la base fondatrice de l’anthropologie moderne,
l’usage et la signification de la notion de l’altérité ont évolué à travers les époques, elle a
été utilisée pendant l’antiquité pour désigner les barbares et les sauvages (Hérodote),
ensuite pour parler de la découverte de nouvelles humanités à la Renaissance ( le bon
sauvage), enfin au 19ème siècle pour signifier « l’extérieur -l’autre » qui est la base de tout
travail descriptif.
A ses débuts, l’Object d’étude de prédilection était les sociétés dites « primitives », cette
appellation n’était pas au gout de tout le monde, elle a suscité des débats entre les
anthropologues et autres scientifiques, les débats acharnés ont permis d’abolir ce
qualificatif peu flatteur et de le remplacer par les expressions suivantes « sociétés simples,
sociétés traditionnelles, sociétés de traditions, sociétés exotiques ». Et pour mettre les
choses au claire des anthropologues ont intervenu pour expliquer le choix de l’usage du
mot primitif, Evans Pritchard évoque « Le mot « primitif » tel qu'il est désormais compris
par la littérature anthropologique ne signifie aucunement que ces sociétés aient connu une
existence antérieure à celles d'autres sociétés ou qu'elles leur soient inférieures. Pour
autant que nous le sachions, les sociétés primitives ont connu une histoire au moins aussi
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longue que la nôtre. D'une certaine façon, et bien qu'elles ne jouissent pas d'un degré de
développement équivalent au nôtre, il arrive aussi que dans certains domaines elles
révèlent des développements plus poussés. » (PRITCHARD .E. 1950.P10)
Et pour faciliter l’identification des sociétés simples, un ensemble de caractéristiques a été
mis en place:
-Des sociétés à faible ampleur humaine.
-Des sociétés avec des systèmes économiques simples (autarciques)
-Des sociétés enclavées, ou ont peu de contacts avec le monde extérieur
-Des sociétés sans écritures et anhistoriques (sans histoire)
-Des sociétés claniques, dépourvues de pouvoir central (sans état)
-Des sociétés froides, avec un rythme d’évolution très long, ce qui donne l’impression
d’immuabilité et stagnation.
Evans Pritchard, l’un des pères fondateurs de l’anthropologie sociale, certifie que « les
anthropologues utilisent ce terme « primitif » pour désigner des sociétés qui sont
numériquement restreintes, occupent un territoire peu étendu, ont des contacts sociaux
extérieurs limités et n'ont en comparaison de sociétés plus avancées qu'une technologie et
des structures économiques sommaires et où l'on observe une fonction sociale peu
spécialisée. » (PRITCHARD. E.1950. P10)
L’intérêt porté à l’étude de ce type de sociétés est arbitraire, puisqu’il permet de
comprendre l’organisation première et son évolution dans le temps, à dire que ces sociétés
là, sont l’étape de l’enfance qui va évoluer pour déterminer la personnalité adulte
représentée par les sociétés contemporaines.
A ce sujet, l’anthropologue Mondher KILANI évoque que « le recours à ce terme,
employé généralement entre guillemets dans ce cadre, n’a plus pour finalité de marquer le
caractère originel et imparfait de ces sociétés qui auraient nécessairement précédé la
notre mais désigne une série de caractéristique qui les singulariserait par rapport à toutes
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les autres sociétés de type historique. Le qualificatif de « primitif » renvoie bien toujours à
une qualité intrinsèque de ces sociétés mais ne préjuge plus nécessairement de leur
antériorité dans le cours de l’histoire humaine.» (KILANI .M. 1992. P19)
Après l’instauration de ces nouvelles caractéristiques qui permettent l’identification de ce
que fut l’objet d’étude de l’anthropologie, un autre débat s’est installé concernant
l’expression « sociétés sans histoires –anhistoriques », ce qui a suscité l’intervention de
Claude Lévi-Strauss pour apporter la clarification attendue à propos de l’usage d’une
expression ambigüe, il a procédé à une comparaison simple mais efficace qui a résolu le
problème, en effet Lévi-Strauss a pris soin de comparer les sociétés sans histoire avec un
enfant ayant des souvenirs concernant tous les évènements auxquels il a pris part ou du
moins ceux dont il a été témoin mais il n’a rien écrit, contrairement aux sociétés
historiques comparées elles aussi à un enfant possédant un agenda sur lequel tous les
évènements sont enregistrés, l’anthropologue a rajouté l’idée que les sociétés sans histoire
ont une histoire mais cette histoire n’est pas écrite, elle est préservée par la transmission
verbale.
Pour sa part, Levy Brühl parle de sociétés dites « primitives » comme des sociétés
prélogiques, préscientifiques et irrationnelles. Cet état était celui de toutes les sociétés
humaines au passé lointain.
Quant à Claude Lévi-Strauss, il « a parlé de sociétés « chaudes » et « froides ». Les
premières seraient plus malléables, plus fluides, plus novatrices et inscrites dans une
histoire à rythme rapide. Les secondes seraient figées dans une histoire lente. » (TOLRA
.P-L et WARNIER. J-P.1993.P8) Avec une telle précision la distinction est établie entre l’objet
d’étude de la sociologie et celui de l’anthropologie.
Le premier élément à retenir, est qu’au départ, les sociétés traditionnelles pour ne pas dire
« primitives » où qu’elles se trouvent à l’extérieure en amont ou à l’intérieure de l’Europe
en aval, étaient devenues l’objet d’étude de l’anthropologie, pour la simplicité de tous les
systèmes qui les constituent (social, économique, et politique) d’une part, et la richesse de
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leur culture en terme de symboles, rites et mythes ce qui représente une source de
données inépuisable pour l’analyse. Selon Pritchard « Il existe une autre raison
déterminante d'étudier les sociétés primitives à l'heure actuelle : elles se transforment si
rapidement qu'il faut les étudier maintenant, avant qu'elles ne puissent plus l'être. »
(PRITCHARD.E. 1950. P11)
Apres la seconde guerre mondiale, l’intérêt de l’anthropologie s’est orienté vers les sociétés
contemporaines (complexes), car elles offrent une panoplie de traits culturels nouveaux et
inexplorés. Suivant cette logique, et face à l’émergence de nouveaux sujets, de nouvelles
thématiques de recherche ainsi que de nouveaux contextes, les approches, les méthodes et
la déontologie de l’anthropologie s’est trouvait au centre de discussions approfondies. Et
compte tenu de cet état de chose l’anthropologie n’avait plus le choix, elle s’est adaptée
modifiée, car elle est confrontée à toute une série de transformations sur lesquelles
désormais les anthropologues portent leur attention.
3/Confusion des trois disciplines :
Etant conscients des premières difficultés qui peuvent confronter les étudiants débutants
dans le domaine de l’anthropologie, on a pris l’initiative de clarifier les trois disciplines
souvent confondues et prises les unes pour les autres, en donnant des définitions distinctes
pour chacune d’elle, leurs objectifs ainsi que montrer leur caractère complémentaire.
La première définition qui corrobore la corrélation entre les disciplines en question, celle
évoquée par Paul Topinard « L'anthropologie est la science tout entière de l'homme,
l'ethnologie serait la science des peuples, et l'ethnographie la description de ces mêmes
peuples » (Topinard. P.1876.P199), ainsi l’ethnographie et l’ethnologie seraient deux étapes
certes indispensables mais incluses à l’intérieure de la recherche anthropologique et non
pas deux disciplines autonomes. Toutes les trois sont considérées trois étapes d’une même
recherche, ce qui nous renvoi à l’explication et conception à la fois sociale et culturelle de
l’anthropologie donnée par Lévi-Strauss « quand il a définit comme le troisième moment
de l’étude des sociétés : l’ethnographie décrit d’une façon systématique, l’ethnologie réalise
une première synthèse, l’anthropologie généralise encore et cherche à identifier les
11
fondements communs de toute organisation sociale et culturelle. » (ALPE .Y et
autres .2010.P16)
Se maintenir à une telle définition pour connaitre l’anthropologie est insuffisant, puisqu’il
s’agit d’une explication superficielle, elle ne permet pas aux étudiants d’assimiler chaque
discipline, ses points communs et ses différences. D’où la nécessité de compléter avec
d’autres définitions plus précises.
A. L’ethnographie : est l’étude descriptive et comparative des cultures sur le plan des
similitudes et des différences, ainsi que la comparaison entre les sociétés humaines
actuelles. Elle procède à la classification des peuples et l’étude des modes de vie des
groupes particuliers et limités durant une période précise. Sans doute c’est la raison qui a
fait que « L'ethnographie est associée à l'exploration et au travail descriptif, souvent chez
des tribus non européennes distinctes. » (TREMBLAY. M-A et PRESTON R. J. 1987. P 6)
Ce qui distingue l’ethnographie sont les descriptions détaillées et l’absence d’analyse et
d’interprétation, de ce fait l'ethnographie en sois n’est pas considérée une discipline, elle
est plutôt une branche d’une discipline mère qui est l’ethnologie, un outil technique qui
fournit des descriptions, informations, des documents et des objets qui seront analyser et
généraliser par l’ethnologie et l’anthropologie. Ainsi « l’ethnographie est l’enquête sur le
terrain pour l’établissement de monographie (étude la plus exhaustive possible, d’un
groupe social pris comme une totalité). C’est à partir de ces monographies que
l’ethnologie, qui est une discipline essentiellement comparative, tente d’élaborer des
synthèses. L’ethnographe se veut en quelque sorte le « biographe d’une seule société ». Il
choisit une société de petite dimension. » (DUMONT. J et BARONIAN .J-B. 1972. P 172)
L’ethnographie est le premier moment de l’ethnologie, et que cette dernière ne peut
exister sans la première.
Dans son Manuel d’ethnographie, Marcel Mauss montre les objectifs visés par
l’ethnographie « La science ethnologique a pour fin l'observation des sociétés, pour but la
connaissance des faits sociaux. Elle enregistre ces faits, au besoin elle en établit la
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statistique; et publie des documents qui offrent le maximum de certitude. L'ethnographe
doit avoir le souci d'être exact, complet; il doit avoir le sens des faits et de leurs rapports
entre eux, le sens des proportions et des articulations. L’ethnographie n'est pas une
science historique proprement dite, en ce sens que les faits ne s'y présentent pas dans
l'ordre chronologique. L'ethnologie comprend néanmoins une partie historique, qui
consistera à établir l'histoire du peuplement humain : races nègre, jaune, etc. » (MAUSS.
M. 1926. PP5/6)
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éloignement, de celles qui avoisinent immédiatement l’observateur. » (ALPE .Y et autres.
2010 .p17)
Il faut noter le fait que l’histoire de l’anthropologie en tant que discipline, a traversé deux
périodes distinctes, ce qui a mené à l’émergence de deux types d’anthropologie totalement
différentes : la première se définie comme anthropologie de chambre par extension
anthropologues de bureau (théorique), elle caractérise les premières générations
d’anthropologues, les travaux réalisés par cette dernière sont le résultat des lectures sans
recherche de terrain, donc sans vérification des informations, les sources utilisées par cette
anthropologie, émanent des récits des voyageurs, explorateurs et missionnaires, militaires
et commerçants lors de leurs pérégrinations et missions. Cette anthropologie enregistre
plusieurs lacunes, à cause de la confiance aveugle accordée aux informations copiées et
non pas reportées par les anthropologues eux mêmes, la plupart des écrits sont remplis de
préjugés, la tendance ethnocentrique est omniprésente considérant le continent européen
la référence dans toutes les comparaisons effectuées sur tous les plans, culturel, religieux,
non seulement « leurs ouvrages étaient remplis de jugement de valeur et parfois ils ne
cachaient la répulsion que leur inspiraient les sauvages côtoyés de plus au moins près.
Bien souvent ils mettaient l’accent sur le caractère exotique voir extraordinaire, des us et
coutumes qu’ils avaient pu observer. » (DELIEGE .R. 2006. pp144/145) Parmi les
anthropologues de bureaux nous citons Sir James Frazer et Marcel Mauss.
L’anthropologie théorique a perduré pendant la période allant de la fin du 18ème siècle
jusqu'à la fin du 19ème siècle. Forte heureusement cette anthropologie rattrapée par ses
erreurs a fini par céder face à l’engouement de la nouvelle génération des anthropologues
pour les enquêtes de terrain.
Ainsi, le début du 20ème siècle marque un tournant décisif au sein de l’anthropologie, en
adoptant un changement radical dans ses études et ses méthodes de travail, préférant
cette fois-ci la présence physiques des anthropologues sur les lieux de l’enquête, ce qui
impose une observation directe, et afin de parvenir à l’appréhension des cultures et des
systèmes qui constituent les sociétés simples ainsi que les sociétés complexes un séjour est
nécessaire au sein de la société (objet d’étude), le séjour va garantir d’une manière directe,
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le contact et l’interaction souhaitée entre l’enquêteur et la population de l’enquête. Sans
qu’il y’ai de préjugés, comme conclusion une publication d’un livre ou compte rendu qui
relate les données recueillies par l’enquêteur pendant l’investigation, sans doute c’est cette
nouvelle façon de travailler qui a mis l’anthropologie sur le panthéon des disciplines du
terrain. Il reste à dire que la méthode comparative est la règle phare, elle est de rigueur
dans l’anthropologie, elle-même s’appuie sur deux approches, une approche diachronique
et une approche synchronique. Quelques théories telle le diffusionnisme préfèrent
« L’adoption de la méthode diachronique, qui consiste à étudier une société à deux
moments de son histoire, avec les mêmes méthodes d'enquête et les mêmes techniques
d'analyse; ce système permet de déduire les changements survenus au cours de la période
intermédiaire dans sa structure et son organisation. L'observation directe est complétée
par l'information orale sur la manière dont se sont produits ces changements. La
méthode diachronique diffère cependant beaucoup de la méthode chronologique utilisée
par l'historien et n'est en fait que l'étude comparée d'une même société à deux époques
différentes. » (DELUZE-CHIVA. A. 1965. p605)
Quant à la méthode synchronique, elle est axée sur l’étude des différentes dimensions
d’une même société, très utilisée dans le fonctionnalisme qui s’intéresse à l’étude du
présent des sociétés et le structuralisme, et « Au centre d’une théorie explicative de type
structural, se trouve l’idée d’un ensemble défini essentiellement par les relations existant
entre ses éléments constitutifs. Cette analyse est en général, une analyse de nature
synchronique expliquant le phénomène étudié, non par son histoire, mais par le système
de relations qui le caractérisent à un moment donné. Dans cette perspective une théorie
explicative de type structural consiste, soit à expliquer le phénomène étudié par les
relations qu’il entretient avec les autres éléments d’une même structure, soit à traiter le
phénomène comme une structure s’expliquant par les relations qui s’établissent entre les
éléments qui le constituent. Des analyses de type synchronique, s’attachent surtout à
mettre en lumière les rapports qui relient entre eux des phénomènes se produisant
simultanément. » (LOUBET DEL BAYLE J-L. 2000. p351) A ce sujet Evans Pritchard souligne
l’importance d’une telle rupture épistémologique au sein de l’anthropologie qui va
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désormais révolutionner l’ensemble des sciences sociales, « La recherche toutefois restait
purement livresque et continuait à s'appuyer sur des observations accumulées par d'autres
individus. C'est alors que nous avons atteint le dernier stade du développement, dans
lequel les observations et les conclusions sont établies par une seule et même personne et
où le chercheur se trouve en contact direct avec le sujet de son étude. Autrefois
l'anthropologue, comme l'historien, considérait les documents comme la matière brute de
son étude; aujourd'hui, la matière brute d'une étude, c'est la vie sociale elle-même.»
(PRITCHARD. E. 1950.P53)
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à 1908, constitue la première tentative sérieuse de vérification des théories sociologiques
dans une société primitive; il chercha à décrire la vie sociale d'une population de façon à
en dégager les facteurs essentiels à cette vérification » (PRITCHARD.E.1950. P53)
En somme, après ce bref rappel historique, on peut affirmer qu’au 20ème siècle, il existe
deux grandes conceptions de l’anthropologie dépendantes des deux grandes traditions
académiques:
« La première trouve son origine en France au 19ème siècle : dans un sens restrictif, elle
désigne l’anthropologie physique, qui étudie les aspects physiologiques et morphologiques
des groupes humains, tandis que l’ethnologie étudie les phénomènes culturels et la
sociologie les phénomènes sociaux. Le sens change une première fois avec Marcel Mauss,
qui assigne à l’anthropologie la mission d’analyser les « faits sociaux totaux ». Elle se
distingue alors de la sociologie par ses objets de prédilection (la religion, les mythes, les
systèmes de parenté, les cosmogonies) et son champ d’application (les sociétés
préindustrielles sans histoire écrite, celles que Lucien Lévy-Bruhl appelait les « sociétés
primitives. La deuxième conception, plus ambitieuse est d’origine anglo-saxonne : il s’agit
de rassembler dans une perspective globalisante toutes les disciplines étudiant l’homme.
L’approche américaine privilégie les aspects culturels, tandis qu’en Angleterre ce sont les
aspects sociaux qui dominent. » (ALPE .Y et autres. 2010 .P 16)
4/Les objectifs de l’anthropologie :
A l’instar des autres disciplines, l’anthropologie a ses propres objectifs :
« L'anthropologie est une science jeune. En voici les objectifs majeurs : décrire,
comprendre et expliquer les origines, la diversité et les buts des coutumes, croyances,
langues, institutions et modes de vie de l'humanité, trouver des normes culturelles
générales et fournir un guide pratique à l'humanité. » (TREMBLAY .M-A et PRESTON.R-
J.1987.p7)
-la description détaillée des aspects de la vie humaine et civilisationnelle, par le séjour de
l’enquêteur auprès du groupe ou collectivité étudiée.
-la classification de ces aspects.
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-Déterminer les origines du changement de l’homme, ses causes et ses processus d’une
manière scientifique.
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Cette ligne de conduite était déjà remarquée « Au XIXe siècle, elles mobilisèrent aussi
l'intérêt des anthropologues qui pensaient que ces sociétés fourniraient d'importants
indices quant à l'explication de l'origine des institutions. Plus tard, les anthropologues
s'intéressèrent à elles parce qu'elles offraient l'exemple d'institutions réduites à leur plus
simple expression et qu'il est de règle de commencer toute étude par l'examen du plus
simple pour parvenir à l'examen du plus complexe et pour lequel l'étude du plus simple
constitue un apport positif. » (PRITCHARD.E. 1950. P11) les sociétés traditionnelles sont les
plus simples à étudier, donc plus simples à comprendre, mais l’anthropologie sociale a
connu le même changement d’orientation vécu par l’anthropologie générale après la
deuxième guerre mondiale, elle s’est intéressée à l’étude des sociétés paysannes où qu’elles
se trouvent en particulier la structure sociale telle la parenté, les stratégies matrimoniales,
la structure économique tel le travail, modes de production et de consommation, la vie
religieuse des sociétés aussi fait partie des domaines favoris de l’anthropologie sociale à
savoir les croyances, les rites, cérémonies et les sectes. Sans oublier la structure politique
ayant un rapport avec la répartition des rôles et statuts. Ainsi « La tâche de
l'anthropologie sociale est l’analyse du comportement social, généralement sous ses formes
institutionnalisées telles que la famille, les systèmes de parenté, l'organisation politique, les
modes de procédure légale, les cultes religieux, etc., et les relations existant entre ces
diverses institutions; elle les étudie soit dans les sociétés contemporaines, soit dans les
sociétés historiques pour lesquelles il existe suffisamment d'informations dignes de foi
permettant de procéder à ces études. » (PRITCHARD. E. 1950. P11)
Au début du 20ème siècle, cette expression a été adoptée pour distinguer les sciences
sociales de l’anthropologie physique, qui se limitait à l’étude des évolutions anatomiques
et physiologiques de l’humanité. Pour Claude Lévi-Strauss « l’anthropologie sociale est
née de la découverte que tous les aspects de la vie sociale-économique, technique,
politique, juridique, esthétique, religieux- constituent un ensemble significatif, et qu’il est
impossible de comprendre l’un de ces aspects sans le replacer au milieu des autres… ».
Elle a donc pour but de dégager les propriétés générales de la vie sociale, et elle
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constituerait alors « une science sociale générale », dont toutes les autres (ethnologie,
sociologie, linguistique, etc.) ne seraient que des parties. » (ALPE .Y et autres. 2010 .P18)
L’une des plus anciennes définitions de cette branche, a été donnée par sir James Frazer
qui a démontré la corrélation entre l’anthropologie sociale et la sociologie, en effet
« Frazer avait déjà défini en 1906, l’anthropologie sociale comme cette branche de la
sociologie se préoccupant des peuples primitifs. » (KUPER .A. 2000. P11)
Une telle définition montre non seulement le rapport étroit qui a toujours existé entre
l’anthropologie et la sociologie mais aussi l’influence exercée par les sociologues au sein de
l’anthropologie tel Durkheim.
B.Anthropologie culturelle : « Née aux Etats-Unis avec F. Boas, et concerné par le
relativisme culturel, est une démarche spécifique qui part des techniques, des objets, des
traits de comportement pour aboutir à synthétiser l’activité sociale. Une grande
importance est accordée aux traits culturels et aux phénomènes de transmission de la
culture. » (GAUDIO .A. 2010. P 24)
Deux grandes théories vont dans ce sens là, le culturalisme qui traite l’acculturation et le
relativisme culturel, et le diffusionnisme qui est centré sur le processus de diffusion et les
itinéraires empruntés. L’anthropologie culturelle est une branche des sciences sociales qui
se donne pour but de dégager les caractéristiques générales de la vie culturelle d’une
société. Dans cette optique plusieurs chercheurs l’ont assimilé à l’ethnologie. « Dans une
conception plus ambitieuse, elle s’appuie sur une approche comparative des travaux
ethnologiques, dont elle se propose de généraliser les résultats, pour mettre en évidence les
traits fondamentaux de toute culture humaine. Pour Claude Lévi-Strauss, « que
l’anthropologie se proclame sociale ou culturelle, elle aspire toujours à connaitre l’homme
total, dans un cas à partir de ses productions, dans l’autre à partir de ses représentations. »
(ALPE .Y et autres. 2010 .P 17)
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Toute en étant consciente de l’unité du genre humain, l’anthropologie physique étudie la
diversité des populations humaines actuelles et anciennes. En abordant la variabilité
contemporaine ainsi que la reconstitution de leur histoire évolutive. D’où la nécessité
d’intégrer d’autres disciplines telle la paléoanthropologie (études de restes fossiles et
d’analyse ostéologique, ainsi que des travaux de primatologie) et l’archéologie.
« L’anthropologie physique envisage ces vastes possibilités d’études sous de multiples
perspectives ; l’un se dédie à l’étude de l’origine de l’espèce humaine et à son évolution en
se concentrant soit sur l’examen de fossiles humains, soit sur des comparaisons avec les
primates actuels et spécialement les pongidés actuels. L’autre explore les variations
physiques des populations humaines contemporaines par l’intermédiaire des
compositions corporelles, de la croissance et du développement, des analyses d’ADN ou
de protéines, de susceptibles aux maladies.» (CHARLES. S et REBATO .E . 2003. P 16)
A signaler qu’à moment de l’histoire cette branche d’anthropologie s’est déroutée de son
objectif scientifique, elle est tombée dans la ségrégation raciale, en se focalisant sur des
questions raciales, ce qui a provoqué l’indignation de plusieurs scientifiques, d’ailleurs,
l’anthropologie physique avait procédé à la hiérarchisation des peuples suivant quelques
caractéristiques physiques, telle la couleur de la peau, en classant les noirs au bas de
l’échelle au niveau de l’intelligence, en effet dans la science du 19ème siècle, « l’infériorité
du noir apparaissait inscrite dans sa nature physique. En produisant une hiérarchie
humaine en terme de races, la science a placé les noires juste à proximité de nos ancêtres à
tous, les primates, les identifiant ainsi au degré zéro de l’évolution humaine dont l’homme
blanc représentait l’aboutissement. »(KILANI.M.1992.P229) D’autres anthropologues ont
œuvré pour déterminer les caractéristiques physiques de la délinquance (Lacassagne et
Lombroso).
6/L’enquête de terrain :
Avant d’entamer un travail de terrain l’anthropologue doit procéder à l’élaboration d’une
problématique fondée sur des interrogations, et une hypothèse, accompagnées d’un
23
appareil conceptuel adéquat à l’objectif assigné, deux étapes indispensable pour la
construction d’un objet d’étude, une fois ces deux étapes franchies l’anthropologue aborde
le terrain, « le travail sur le terrain associe étroitement l’expérience existentielle et
l’expérience intellectuelle. Il constitue pour l’anthropologue un cadre dynamique dans
lequel il peut procéder en « situation » à une explicitation constante de ses erreurs,
déformations et préjugés à une résolution des problèmes en relation étroite avec les
pratiques sociales, lieux de production du sens. » (KILANI.M.1992.P48)
Le travail de terrain est d’emblé ce qui distingue l’anthropologie des autres disciplines, et il
lui attribue un statut particulier, alors qu’il n’existe aucun manuel qui retrace toutes les
étapes et méthodes à suivre pour réussir un travail de terrain, les novices de la recherche
en anthropologie s’orientent vers les expériences vécues et racontées par les
anthropologues prédécesseurs du terrain sous forme d’anecdotes et de conseils, toutefois,
on trouve un nombre important d’étapes à respecter pour mener à bien une enquête de
terrain, ainsi que des conseils très utiles afin d’éviter beaucoup de pièges et erreurs aux
débutants. Les travaux de Bronislaw Malinowski et Evans Pritchard constituent une source
inestimable pour ceux qui entament une carrière d’anthropologue, c’est la raison qui nous
a poussés à reprendre l’ensemble des étapes et conseils sous forme de synthèse et de les
mettre à la disposition des étudiants.
De prime à bord, la formation académique (théorique) seule ne permet pas à
l’anthropologue d’être reconnu anthropologue, quelque soit la nature, et la richesse de
cette formation, elle demeure incomplète, tant que l’anthropologue n’a pas fait ses
preuves sur le terrain, car c’est le travail sur le terrain qui ferra de lui un véritable
anthropologue, il va être initié à l’aventure scientifique et humaine, aux obstacles et
dangers qui vont orienter ses décisions et ses actions, « ainsi, comme le note très
justement Georges Condominas Le moment le plus important de notre vie professionnelle
reste le travail de terrain, qui est à la fois notre laboratoire et notre rite de passage : le
travail de terrain transforme chacun de nous en un véritable anthropologue. C’est donc
avec que l’on a, non sans quelque ironie, baptisé le travail de terrain le rite de passage de
24
la profession puisqu’il consacre bien le passage de l’état de novice à celui de l’initié. Car le
travail de terrain combine la recherche scientifique à une expérience humaine hors du
commun. » (DELIEGE.R.2006.pp146/147)
Ce rite initiatique en rapport avec le travail de terrain est nécessaire, car il va mettre la
personnalité de l’enquêteur à rude épreuve, et ceci sur tous les plans, psychologique,
physique et intellectuel, il va devoir confronter ses pré-acquis théoriques à la réalité
observée lors de l’enquête.
Reste à dire, malgré le manque des manuels qui traitent les méthodes et techniques du
travail de terrain, ceci ne veut pas dire que l’enquête se fait d’une manière anarchique et
aléatoire, l’anthropologue est contraint de respecter un ensemble de règles, qui
attesteraient de la valeur de l’enquête et la crédibilité de l’enquêteur, même si par moment
l’enquêteur se trouve dans des situations où il faut improviser et utiliser la ruse pour
obtenir les informations souhaitées, d’ailleurs « au sens de la discipline anthropologique,
la pratique du terrain implique en effet une formation, un savoir faire et bien sûr une
déontologie. Toutefois, on peut également constater, que l’enquête de terrain ne peut pas
s’apprendre dans un manuel. Bien que l’on dise que cette compétence implique un
apprentissage c’est d’avantage au sens où l’apprenti apprend avant tout en faisant, et
nombreux sont les chercheurs à admettre que l’enquête de terrain est aussi une
question d’intuition, de sensibilité, d’adaptation à des situations en fonction de certains
des codes locaux et du contexte dans lequel s’effectue. » (SANTIAGO P- J. 2013. Pp 215/216)
L’anthropologie est redevable à la rupture épistémologique effectuée au niveau des
méthodes d’investigation menée en grande partie par Malinowski, en effet « C’est sans
doute la première fois qu’un chercheur explique la manière dont il avait collecté ses
données ; il avait pour cela observé quelques règles fondamentales; nous en retiendront
trois points :
1) L’ethnologue doit se couper de ses semblables.
2) Il doit s’installer le plus longtemps possible dans un village.
25
3) Il doit tâcher d’être le plus proche possible des indigènes. » (DELIEGE.R.2006.p
148)
Les anthropologues affirment que ces trois principes sont à la base de tout travail de
terrain et il n’y a pas vraiment d’enquête anthropologique s’ils ne sont pas respectés.
Et que dans l’enquête de terrain, le séjour et l’observation participante sont deux étapes
fusionnées et indissociables au point de n’en faire qu’une seule, sont donc l’étape la plus
importante, puisque la suite et la réussite de l’enquête repose principalement sur la
réussite de l’observation participante qui ne peut se faire sans le séjour. Mais afin de
faciliter la tache de compréhension on a opté pour une séparation arbitraire des étapes; à
commencer par le séjour.
A-Le séjour : On peut rallier l’ensemble des anthropologues concernant l’indispensabilité
du séjour dans une enquête de terrain, et les règles d’une telle réalisation, en effet
l’anthropologue doit être prêt à passer beaucoup de temps sur son enquête; il doit rester
en contact étroit et permanent avec les populations sur lesquelles il travaille; afin de
s’imprégner de leur culture et de leur vie sociale. On entend par le séjour, la présence
physique de l’enquêteur sur le lieu de l’enquête pendant une longue période (durée de
l’enquête), étape indispensable pour concrétiser la recherche, c’est « par un séjour
prolongé chez ceux auprès de qui il enquête (et par l’apprentissage de la langue locale si
celle-ci lui est inconnue), l’anthropologue se frotte en chair et en os à la réalité qu’il
entend étudier. Il peut ainsi l’observer, sinon « de l’intérieur » au sens strict, du moins au
plus près de ceux qui la vivent, et en interaction permanente avec eux. On peut
décomposer analytiquement (et donc artificiellement) cette situation de base en deux
types de situations distinctes : celles qui relèvent de l’observation (le chercheur est témoin)
et celles qui relèvent de l’interaction (le chercheur est coacteur). Les situations ordinaires
combinent selon des dosages divers l’une et l’autre composante. » (DE SANDRA .J-P. O.
1995.P4)
Le séjour est une expérience et un rite initiatique instauré par Bronislaw Malinovski en
grande Bretagne, au sein de l’anthropologie sociale, plus tard devient une étape
26
indispensable pour étudier la société de l’homme, tout d’abord il faut mentionner que
Malinowski reconnait le caractère complémentaire entre le travail de l’ethnographe et celui
de l’ethnologue et de l’anthropologue, et il insiste sur le fait qu’une véritable enquête ne
doit en aucun cas s’arrêter au stade des descriptions récoltées par l’ethnographe, le travail
doit être poursuivi et approfondi par un ethnologue, car « c’est l’ethnologue seul qui
pourra, de la multitude des faits, donner une image cohérente de la société étudiée. Pour
mener à bien son enquête, l’ethnologue doit s’intégrer le plus possible au groupe auquel il
s’intéresse. Il doit en parler la langue et en vivre le rythme. Il doit en bref, être un
« observateur participant ». C’est qu’en fait la culture n’est pas un objet d’étude comme
les autres, elle est d’abord vécue. D’où l’importance accordée aux biographies indigènes,
au journal quotidien où l’on consignera jusqu’au moindre détail les faits et gestes du
groupe. » (DUMONT. J et BARONIAN. J-B. 1972. P 184)
Pour Malinowski le travail de terrain est l’occasion de partager la vie quotidienne des
indigènes et d’observer leurs pratiques. D’où la nécessité d’une certaine durée pour se
familiariser avec les indigènes.
L’enquête de terrain n’est pas le fruit d’une improvisation, elle est soumise à une
répartition faite de trois étapes qui sont : la préparation faite de lecture et de recherche sur
le sujet c’est à ce moment qu’il construit ses schémas d’entrevue et ses grilles
d’observation; ensuite, l’entrée proprement dite qui est la phase de l’exploration du terrain
et les premiers contactes, la prise de l’enquêteur pour les premiers repères sur le lieu de
l’enquête. Ici, le chercheur se doit d’être vigilant afin d’identifier les bons informateurs, de
rencontrer les «bonnes personnes», celles qui vous ouvrent le terrain; et enfin vient
l’immersion, la phase où commence le recueille de données. « Cette étape est
généralement la plus longue et l’aboutissement des efforts déployés durant les deux étapes
précédentes. Cette immersion «dans l’objet» sera d’autant plus fructueuse que le chercheur
adhérera au «postulat du sens caché» à savoir que la réalité est toujours plus complexe que
ce qu’on peut en voir de prime abord et que le sens d’un objet se révèle petit à petit au
travers d’un processus d’analyse intensif. » (MARTINEAU .S.pp5/6)
27
La durée d’une enquête de terrain est indéterminée et variable, tout dépend de la
disponibilité de l’enquêteur, de la dimension de la société étudiée, et des sujets visés par
l’étude, néanmoins, un séjour prolongé est préconisé pour traiter tous les aspects et toutes
les dimensions de la société (groupe-collectivité) en question, ainsi « des séjours d'un à
trois ans sont nécessaires à l'étude d'une seule population. Ce laps de temps permet
d'observer, au cours de toutes les saisons, le déroulement de la vie sociale d'une
population qui est destinée à être inventoriée dans ses moindres Détails, toutes les
conclusions devant être soigneusement vérifiées. » (PRITCHARD.E.1950.p56)
Dans ce contexte, l’enquête effectuée par Malinowski lors de son travail sur les habitants
des iles Trobriand en Mélanésie est considérée la plus longue elle s’est prolongée de 1914
à 1918, 5 années étaient nécessaires pour assembler toutes les données sur les différents
systèmes, pratiques et rituels. Sans doute c’est ce qui a permis à Malinowski de nous
« rapporter non seulement le « squelette » d’une société mais aussi sa chair et son sang »,
afin de nous permettre d’imaginer les réalités de la vie quotidienne avec ses passions, ses
excitation, et parfois sa langueur. » (DELIEGE. R.2006.P149)
La présence physique de l’enquêteur sur le terrain avec sa formation académique et ses
lectures sur le thème à traiter ne sont pas un gage de réussite, il faut qu’ils soient
accompagnées d’une certaine souplesse d’esprit, sur ce point, Malinowski dans son
introduction du livre les argonautes du pacifique nous a fourni des conseils précieux, selon
lui « un bon entraînement portant sur la théorie et la connaissance de ses données les
plus récentes ne consiste pas à avoir l'esprit farci « d'idées préconçues ». Si un homme
s'embarque pour une expédition, décidé à prouver certaines hypothèses, et qu'il se montre
incapable de modifier sans cesse ses vues ou de les quitter de bonne grâce sous l'effet des
témoignages, inutile de dire que son travail sera sans aucune valeur.
L’immersion pendant une longue période au sein d’une société, et l’usage de la langue
indigène, finissent par transformer l’enquêteur inexpérimenté au départ à un véritable
anthropologue digne de ce nom, et pour réussir un tel exploit « bien sûr il faut apprendre
à interpréter les silences, les non-dits, les absences, les opacités ainsi que les expressions
28
publiques des émotions et des récurrences dans les gestes et discours. » (SANTIAGO P- J.
2013. P 216)
Une fois ces défis relevés, l’enquêteur peut aspirer à une carrière d’anthropologue, car le
travail de terrain n'est pas seulement une question de proximité physique, il exige
d’autres compétences d’ordre psychologique, qui influent sur les rapports établis entre
l’enquêteur et les indigènes, et par conséquent sur la qualité du rendement, en tant que
demandeur de données l’enquêteur doit noter les premières impressions, et d’éviter
l’expression (déjà vu), ou de se montrer un érudit devant des ignorants s’il veut obtenir
des résultats pertinents.
Le séjour permet l’interaction et l’échange entre l’enquêteur et les indigènes, mais pour
arriver à ce résultat, il faut respecter une bonne ligne de conduite de la part de
l’enquêteur, pour parvenir à une bonne intégration, il faut tout d’abord qu’il soit accepter
par le groupe, et pour y parvenir il faut du temps, il est recommandé au chercheur de
prendre le temps nécessaire pour que le groupe (tribu) s’habitue à la présence de
l’enquêteur, ce dernier doit impérativement doubler d’efforts pour faire oublier sa
présence en tant qu’étranger comme l’indique Malinowski lors de sa propre enquête,
« Peu de temps après m’être installé à Omarakana, je commençai, en quelque sorte, à
prendre part à la vie du village, à me réjouie de l’approche des festivités importantes, à
m’intéresser aux potins et aux développements des intrigues de la vie de ce petit village.
Comme les indigènes me voyaient chaque jour, ils cessèrent d’être intrigués, inquiétés ou
flattés par ma présence ; dès lors, je cessai d’être un élément perturbateur dans la vie
tribale que j’allais étudier. » (DELIEGE.R. 2006.P148)
Pour assurer une telle intégration, l’enquêteur doit se détacher de ses anciennes habitudes
acquises au sein de sa propre société et mettre de coté ses représentations ainsi que sa
propre culture, pour adopter le mode de vie des indigènes, et pour se faire « il lui faudra
établir des liens étroits avec les individus et il pourra ainsi observer, de l'intérieur en
quelque sorte, toutes les activités, tout ce qui se passe dans la vie quotidienne des
individus aussi bien que les événements moins courants comme les cérémonies et les
29
procès, et en participant à la vie de la communauté, il apprendra par l'action comme par
l'oreille et l'œil ce qui se passe autour de lui. » (PRITCHARD.E.1950.P56)
B-L’observation participante : une étape indissociable de celle du séjour, elle est une
partie intégrante, présente sous toutes ses formes dans tous les travaux ethnographiques
effectués au sein du fonctionnalisme britannique, ensuite adoptée par la plupart des
travaux des ethnologues, en effet, le travail de terrain repose principalement sur
l’observation participante menée selon ses propres « canons ».« En quelques mots,
l’observation participante consiste en l’immersion du chercheur dans la société qu’il
entend étudier et pendant une période assez longue, habituellement une à deux
années. »(DELIEGE.R. 2006.P143)
Aussi simple qu’elle parait l’observation participante requiert des règles à respecter pour la
mener à bien, et exige quelques caractéristiques de la part de l’enquêteur aussi, à
commencer par déterminer dans quelle condition doit on travailler avec cette technique,
« en tant que technique de recherche, l’observation participante est donc nécessairement
dirigée vers les ensembles sociaux numériquement réduits et relativement stables. »
(DELIEGE.R.2006.P144)
Ce qui revient à dire que cette technique est privilégiée dans l’étude des sociétés de faible
ampleur humaine dans laquelle l’enquêteur peut se faire accepter s’il parvient à rendre sa
présence la moins dérangeante possible. Dans de telles situations l’observation participante
devient un « outil de cueillette de données où le chercheur devient le témoin des
30
comportements des individus et des pratiques au sein des groupes en séjournant sur les
lieux même où ils se déroulent. Le chercheur est présent sur les lieux même du terrain et
il doit par conséquent s’adapter au milieu observé» (HAMEL. J. 2003. p4), il va même
prendre part à toutes les activités de la vie afin que les individus oublient le fait qu’il est
présent pour les observer, et être attentif pour ne rien rater, cependant « l’observation
participante ne manque pas de susciter dans l’esprit de l’observateur une distance par
rapport à sa propre culture, de prendre la mesure de sa relativité. Cette forme
d’observation rend donc possible une démarche d’objectivation qui donne tout son sens à
l’« objectivation participante » dont parle Pierre Bourdieu (l978)3. En observant
directement une autre culture, l’observateur est contraint de se doter de « critères » et de
modalités pour éviter que ses qualités empiriques ne soient investies par sa propre
culture. » (HAMEL. J. 2003. p4)
31
C-Apprentissage de la langue :
Tous les anthropologues s’accordent à considérer l’apprentissage des langues vernaculaires
des indigènes étudiés, une étape indispensable pour garantir une certaine objectivité et
crédibilité de l’enquête, et à ce sujet « Boas est, avec Malinovski, l’un des premiers
chercheurs de terrain à avoir insisté sur la nécessité pour l’ethnologue de savoir la langue
de la société qu’il étudie ou, à défaut, de transcrire phonétiquement des contes et des
légendes qu’il pourra se faire traduire ensuite. » (DUMONT. J et BARONIAN. J-B. 1972. P185)
Pour sa part, Malinowski, préconise l’usage de la langue des indigènes pour une meilleure
immersion dans leur monde social, culturel et symbolique, et il« prend ses distances vis-à-
vis de la méthode archéologique et sa tendance à privilégier la culture matérielle des
populations étudiées. Dans la perspective malinowskienne, celle-ci devient secondaire. On
ne s’y intéresse qu’en début de l’enquête lorsqu’on maitrise mal la langue. L’enquête
ethnographique passe par la langue et comme telle elle est tournée vers des systèmes de
représentations. Elle n’entend s’arrêter à l’observation des faits et des comportements,
mais vise au contraire, à pénétrer dans les modes de pensée des indigènes. »
(DELIEGE.R.2006.P149)
D-Le choix des informateurs : l’usage des formateurs est l’une des assises de l’enquête
de terrain, et bien évidemment, de la qualité du rapport enquêteurs- informateurs dépend
la richesse et la crédibilité des données recueillies. À cet égard, la nécessité d’établir un
climat de confiance et de compréhension mutuelle s’impose comme une condition
préalable. « L’enquête orale implique le recours à un certain nombre d’informateurs….ils
doivent être membre de la communauté étudiée. Ils doivent s’avérer tout à fait intégrés et
ne pas constituer des éléments marginaux. Un procédé couramment utilisé consiste à avoir
recours, au début de la recherche, aux responsables traditionnels, puis du fait, assez
général, de la répartition du savoir et des spécialistes, il est ensuite nécessaire de s’adresser
aux individus dotés de fonctions spécifiques (économiques, religieuses, médicales…). »
(DUMONT. J et BARONIAN. J-B. 1972. P165)
34
elle demeure aujourd’hui la technique favorite de l’enquête anthropologique, malgré
l’usage d’autres techniques telle le, histoire de vie, étude de cas et le questionnaire.
Au premier abord, la technique parait simple à utiliser, la difficulté se trouve dans
l’absence d’une orientation préalable de son usage, dans la mesure où l’enquête
anthropologique est une aventure scientifique, et dans une aventure on se laisse guider par
les fluctuations du terrain.
Dans une enquête anthropologique, la méthodologie d’ordinaire rigide elle devient flexible
afin de s’adapter au terrain très mouvant, c’est de cette façon que « le choix des
interlocuteurs s’opère ainsi pour une bonne part par « buissonnement » ou «
arborescence»: de chaque entretien naissent de nouvelles pistes, de nouveaux
interlocuteurs possibles, suggérés directement ou indirectement au cours de l’entretien. La
dynamique de l’enquête suscite ainsi son propre cheminement, largement imprévisible au
départ, mais où se reflètent cependant les réseaux « réels » du milieu étudié. L’enquête de
terrain s’adapte donc aux divers circuits sociaux locaux, à leur complexité, à leurs
imbrications, à leurs distorsions. Elle n’a rien de linéaire. » 1 L’important dans ce genre
d’enquête, c’est les données recueillies et non les détours faits et le temps passé à attendre
que les personnes acceptent de répondre.
F-Analyse des données : l’enquêteur procède à la reprise de toutes les données
recueillies sur le terrain sous forme de notes, d’enregistrement en lui associant une
réflexion liée à son orientation méthodologique et théorique. L’analyse sera imprégnée de
la perspective personnelle de l’enquêteur, de son expérience et le courant de pensée auquel
il appartient. Pour plus de crédibilité, lors de la rédaction, l’enquêteur accompagne
l’analyse des données de ses propres commentaires et impressions, ce qui va permettre
l’appréciation de son travail.
1
- DE SANDRA (Jean-Pierre Olivier). Op-Cit, p13
35
7/La déontologie du travail de l’enquêteur :
On a pris soin de résumer l’ensemble des règles à respecter par l’anthropologue afin de
mener son enquête de terrain à bien.
-En premier lieu, il faut reconnaitre que l’un des premiers obstacles majeurs auquel
l’anthropologue doit faire face est celui de la subjectivité, l’homme qui étudie ses
semblables, cet obstacle est inhérent à toutes les sciences sociales et humaines,
contrairement aux autres disciplines, en effet « Ce qui est claire pour les sciences de la
nature est moins clair, mais encore plus vrai, pour les sciences de l’homme. Ici, en effet,
le sujet est à lui-même son propre objet, et la subjectivité est le milieu même de la
connaissance. L’observateur est donc à la fois juge et partie ; le désintéressement devient
difficile. » (TOLRA .P-L et WARNIER .J-P.1993.P2) C’est dans cette même optique et afin
d’évier la subjectivité, Lévi-Strauss affirme que l’anthropologue doit se tenir à l’extérieur
des sociétés qu’il observe, et adopte sur elles un « regard éloigné » comparable à celui
que l’astronome porte sur les planètes » (KECK .F. 2011. P26) , ce qui veut dire se fondre
au sein du groupe étudié sans pour autant oublier son rôle d’enquêteur, ou simplement
de trouver le bon équilibre entre l’immersion et la distanciation. Dans le cas contraire
l’anthropologue risque de mettre son travail en péril s’il se laisse emporter par l’un des
deux sentiments qui son l’empathie ou la xénophobie, qui sont l’une des problématiques
que toutes les sciences ayant l’homme comme objet d’étude rencontrent, car « la vraie
tension qui traverse les méthodes des sciences sociales, toutes disciplines confondues,
c’est celle entre engagement et distanciation. Si l’on est trop engagé dans l’empathie, on
court le risque de devenir le porte-parole des enquêtés, d’abdiquer l’objectif de
connaissance. Si l’on est trop distancié, on court le risque de manquer sa cible, et c’est
un risque pour les analyses textuelles autant que pour les analyses statistiques. Chercher
la bonne distance, c’est se distancié si l’on est, d’avance trop près de ce qu’on étudie, se
rapprocher si l’on en est trop loin. » (TENEDOS .J et WEBER .F. 2006.p 57)
-Par ailleurs, la patience, est une vertu très recommandée chez l’anthropologue encore
novice dans le domaine, s’il souhaite réussir sa carrière professionnelle, selon Evans
36
Pritchard « Il faut beaucoup de patience pour entreprendre et mener à bien ce genre
d'apprentissage et de recherche. » (PRITCHARD.E.1950.p55) l’anthropologue doit se munir
de patience et d’ouverture d’esprit, pour ne pas abandonner l’enquête au premier obstacle
rencontré, et transformer ses erreurs en un moyen d’apprentissage et d’adaptation aux
nouveautés, donc il est impérativement nécessaire de tirer profil de toutes les situations,
même les plus désagréables « il est aussi ordinaire chez les plus familiarisés avec les
pratiques du terrain de dire qu’il faut avoir été confronté à de nombreux malentendus,
parfois à des maladresses, qu’il faut de l’improvisation pour apprendre à maitriser les
codes, pour s’insérer dans les conversations et qu’il faut faire une place à la sensibilité, y
compris pour comprendre la richesse des informations, parfois obtenues d’une façon
entièrement inattendue. » (SANTIAGO P- J. 2013. P216)
- La concentration, le travail de terrain exige de l’enquêteur une complète concentration
pour aboutir à des résultats fructueux, la plupart du temps, ceci au détriment du temps, il
faut prendre le temps nécessaire et ne pas se précipiter au risque de rater d’importantes
données « de même, il faut apprendre à se tromper, à se perdre dans l’espace et à perdre
du temps, parfois même beaucoup de temps, pour comprendre que « le temps perdu » est
un élément nécessaire et utile, même si cela n’est pas évident, notamment pour des
raisons budgétaires.» (SANTIAGO P- J. 2013. P216)
- Capacité d’adaptation : Pour réussir, l’anthropologue doit être doté de plusieurs
caractéristiques, telle la persévérance et le pouvoir de se livrer sans restriction, il doit
posséder une l’intuition qui n'est pas commune à tout le monde. « Beaucoup de gens
savent quoi et comment observer, mais n'en produiront pas moins une étude assez
sommaire; quand il s'agit de trouver un individu apte à produire une étude qui se situera
à un niveau de compréhension plus profond, on lui demande plus que de l'agilité
intellectuelle et de la technique, car ces qualités réduites à elles seules ne peuvent produire
un bon anthropologue. » (PRITCHARD.E.1950.p58)
- L’enquêteur doit être ouvert d’esprit, et mettre de coté les préjugés du départ pour éviter
tous choques de cultures, il ne doit pas non plus être rigide dans ses opinions, il doit être
souple pour s’adapter à tout revirement de situation, car « toute la compétence du
37
chercheur de terrain est de pouvoir observer ce à quoi il n’était pas préparé (alors que l’on
sait combien forte est la propension ordinaire à ne découvrir que ce à quoi l’on s’attend)
et d’être en mesure de produire les données qui l’obligeront à modifier ses propres
hypothèses. » (DE SANDRA .J-P. O. 1995.p4)
- L’une des règles phare à respecter par l’enquêteur est d’être modeste et respectueux vers
le mode de vie et la culture des indigènes, et ceci ne peut se faire sans penser à la manière
de l’indigène pour parvenir à le comprendre. Selon Malinowski « En se mêlant aux
indigènes, l’ethnologue n’est plus un être supérieur,… c’est maintenant le sauvage qui sait
et l’ethnologue n’est plus qu’un « demandeur » (DELIEGE.R.2006.p151).
- Etant donné que le travail de terrain n’a de la valeur, s’il est publié, pour se faire la
maitrise de la langue est requise, il est souhaitable que l’anthropologue « possède le talent
38
littéraire nécessaire pour bien traduire une culture étrangère dans la langue de
l'enquêteur. » (PRITCHARD.E.1950.p58)
- Pour clore les règles de la déontologie, il faut évoquer ce qui détermine la réussite de
l’anthropologue dans son enquête de terrain, selon Evans Pritchard « Si, le jour du départ,
au moment des adieux, il n'existe aucune tristesse chez les indigènes et chez
l'anthropologue, on peut dire qu'il aura échoué. Il est bien évident qu'il ne peut établir de
liens amicaux qu'en devenant l'un des membres de leur société; il faut qu'il vive, pense et
ressente comme eux, car c'est à lui seul que revient le rôle d'effectuer cette transposition
indispensable.» (PRITCHARD.E.1950.p56) l’enquêteur doit montrer sa gratitude aux
personnes qu’ils ont aidé, accueilli et soutenu, il doit aussi les préparer à son départ qui
peut être définitif au temporaire lorsqu’il y’a intention de reprendre l’enquête
ultérieurement.
Bien entendu objectivité la bonne foi exactitude la plénitude dans l’enregistrement et la
description des faits sont des conditions absolument indispensables pour une enquête de
terrain de bonne qualité.
C’est le travail de terrain qui fournit la preuve empirique sur laquelle repose
l’anthropologie moderne, qui considère les différentes cultures égales, car elles ne peuvent
pas être évaluées comme supérieures ou inferieures, comme meilleures ou pires, mais tout
simplement comme différentes les unes des autres.
39
AXE II
40
Ces nains évoqués par les commerçants égyptiens ont préservé leur mode vie intacte,
jusqu’au 19ème siècle où ils ont été redécouverts et filmés par une expédition scientifique
(ethnologique), cette dernière a confirmé que ces tribus décrites jadis n’ont en effet rien
changé ni à leur habitat, ni à leur aspect vestimentaire ou organisation sociale, ils vivent
toujours à l’état de nature.
A.La civilisation grecque :
L’interet porté aux sociétés différentes est aussi ancien que l’est l’existence des sociétés
elles-même, decrir et desserter sur l’homme et les sociétés ne date de la naissance officielle
de l’anthropologie (fin du 18ème siècle), la curiosité pour l’homme et les sociétés
différentes s’est manifestée très tôt chez les penseurs de diverses civilisations de
l’antiquité, et c’est la civilisation grecque qui est la première à avoir porté un intérêt à
l’homme et à l’altérité des autres peuples nommés barbares. Mais sans pour autant que
cette relation à autrui accède au statut d’un savoir à visée objective tel qu’on le remarquera
fin du 19ème siècle.
Malgré l’apport d’autres philosophes, tel Aristote et Strabon au sein de cette civilisation,
le monde occidental est habitué à attribuer à Hérodote la paternité de l’ensemble des
sciences humaines d’une manière générale et de l’ethnologie et histoire en particulier.
42
De ce fait, Il est le premier à parler d’emprunt et d’acculturation entre les libyens et les
grecques, et à mettre en exergue l’altérité, le premier qui privilégie surtout « le témoignage
visuel sur le témoignage auditif et fonde son enquête sur le <<témoin qui a vu et qui, par
conséquent, sait>>.Cet aspect est important à relever car non seulement l'anthropologie
moderne, des siècles plus tard, a fait du témoignage visuel la règle centrale de sa méthode
(la présence physique sur le terrain) » (KILANI.M.1992.P195), ces éléments cités
deviendront plus tard le fondement de l’anthropologie moderne.
Toutefois, il faut signaler, le fait que les anthropologues contemporains sont partagés dans
leurs avis concernant le legs de Hérodote, plusieurs reprochent à Hérodote la particularité
du comparatisme qu’il a employé à son époque, notamment celui pour montrer la
supériorité du peuple grec sur les autres, il a fait de même pour la notion de l’altérité afin
d’attester l’état d’avancement dans lequel se trouve la culture grecque, qualifiant les autres
peuples de « peuples aux seuils de la culture », la distance aussi a son importance chez
Hérodote, car plus on est proche de la cité grecque moins on est barbares. Avec Hérodote
émerge l’ethnocentrisme qui va faire tache aux travaux ethnologiques car « pour
Hérodote, les barbares se définissent essentiellement comme des non-Grecs, et, par la
même, distanciés, deviennent objet d’étude. » (DUMONT. J et BARONIAN. J-B. 1972. P 176)
Dans un ouvrage intitulé le miroir d’Hérodote. Essai sur la représentation de l’autre.
François Hartog est l’un des historiens qui ont critiqué ouvertement les écrits d’Hérodote,
« il montre que pour Hérodote, les barbares ne sont qu’un moyen indirect pour parler et
définir les grecs. Ce qui l’intéresse se sont les grecs et les barbares lui permettent
d’affirmer et de mettre en valeur implicitement la supériorité des valeurs grecques »
(KILANI.M.1992.p196).
43
B. La civilisation romaine : l’apport de cette civilisation est très limité comparé à celui
de la civilisation grecque, ceci s’explique par la différence des visions et des perspectives de
chacune d’elle, la civilisation romaine est basée sur un esprit matériel et empirique, d’où la
négligence des domaines théoriques et abstraits, toute l’importance était accordée à
l’expansion territoriale qui est l’essence même de la fondation de cette civilisation, son
objectif était l’édification d’un empire qui gouvernera sur le monde entier, elle a ainsi
développé les armes l’outil indispensable pour conquérir de nouveaux territoires et
l’architecture telle la construction des ports et villes, comptoirs d’embarcation.
Néanmoins la civilisation romaine partage un point central avec la civilisation grecque, il
s’agit de la tendance ethnocentrique, à l’image des grecques, les romains se voyaient
supérieurs aux autres peuples sur le plan intellectuel, juridique et identitaire.
Malgré les préoccupations purement politiques des romains, une grande majorité des
scientifiques domaines confondus, attestent du fait que « les écrits du poète nommé
Carus Lucretius portent sur des idées sociales importantes, réparties sur six parties, la
dernière partie est consacrée aux idées de l’évolution et développement , le poète a
parlé sur le premier homme, le contrat social, les systèmes de propriété et celui du
gouvernement, il a parlé aussi du fondement de la langue, coutumes et traditions, et les
arts.
Il a pu concevoir l’évolution de l’humanité à travers les âges, l’âge de pierre, l’âge de
bronze, et l’âge de fer ce qui a été confirmé au 19ème siècle par l’archéologie, plusieurs
scientifiques considèrent les idées du poète similaires à celles de Lewis henry Morgan,
érudit de l’anthropologie évolutionniste linéaire au 19ème siècle qui avançait que toutes les
sociétés dans leurs processus d’évolution passeraient impérativement par trois stades : de
la sauvagerie, à la barbarie et enfin à la civilisation, ces passages sont accompagnés de
progrès qui sont des innovations.»( 15ص.2004.)ع اﻟﺸﲈس
44
C .La civilisation chinoise :
Cette civilisation partage avec les deux précédentes la tendance ethnocentrique, mais avec
un degré plus excessif, elle se voyait tellement parfaite, omnipotente, et le dédain de cette
civilisation pour les autres civilisations était si grand au point de construire la muraille de
chine afin de se protéger de tous contacts avec le monde extérieur qui peut conduire au
brassage de sa culture supérieure avec des cultures quelles jugées inférieures.
Ce complexe de supériorité a fait que cette civilisation s’est enclavée et renfermée sur elle-
même pendant des millénaires, pour préserver sa culture gage de son autarcie et de son
harmonie. « Dans leurs écrits, les chinois n’ont accordé aucun intérêt aux cultures
étrangères, et ce malgré la présence de descriptions concernant les coutumes et traditions
de quelques collectivités considérées barbares. »( 16ص.2004.)ع اﻟﺸﲈس
2/L’époque moyenâgeuse :
D’un commun accord, les historiens affirment que, cette période constitue pour le
continent européen une période de régression et repli intellectuel sous la domination de
l’église qui interdisait tout cumul de savoir en détruisant une grande partie du patrimoine
intellectuel légué par les civilisations antérieures, cette période débute avec la chute de
l’empire romain au 4ème siècle et prend fin au 14ème siècle.
Le moyen âge est une période sombre, faite de repli scientifique et intellectuel, et la
primauté du profane et de l’église. Ainsi que la prolifération de l’ignorance, situation
vécue entre deux axes temporels, l’un montre la fin et la détérioration des philosophie
européenne héritage de la civilisation gréco-romaine, et le début de la renaissance
(philosophie des lumières) ce deuxième axe est marqué par la lancée de nouveaux
domaines et l’exploration de nouveaux mondes, et une nouvelle lecture de l’héritage
scientifique accompagnée d’une nouvelle interprétation.
A l’antipode de l’Europe, le monde arabo-musulman s’est imposé sur le plan intellectuel
grâce à la religion qui encourageait la recherche.
45
Pour ne pas dérouter de l’anthropologie, le moyen Age chrétien, n'a rien retenu de
l’héritage gréco-romain concernant l’approche de l'altérité et de la diversité. L'unité de
l'observation directe et de la description se retrouve par contre dans la tradition
géographique et ethnographique arabe du Moyen Age, particulièrement chez l’école el
masalik wa el mamalik . Il est important de signaler l’avènement de la civilisation arabo-
musulmane comme nouvelle source de savoir.
A. Le moyen âge européen :
Période noire pour le continent, marquée par la domination de l’église et de ses
obligations cultuelles, qui étouffait toute réflexion scientifique cartésienne et rationnelle,
qui pourrait menacer l’hégémonie de l’église, la seule recherche qui était autorisée était
celle qui appuyait l’explication donnée par l’église concernant l’univers et la vie de
l’homme.
Malgré l’état chaotique, Le moyen âge chrétien était relativement ouvert aux influences
commerciales et aux expéditions guerrières. Selon kilani la pensée moyenâgeuse
s’articulait autour d’un ensemble de représentations organisées autour des trois figures : le
merveilleux, le magique et le miraculeux. L’imaginaire du moyen âge représente à la fois
un moyen de connaissance de la nature et une définition de l’homme et de ses rapports
avec dieu. C’est à cette période que de nouveaux imaginaires voient le jour tel le monstre
représentant de diable et de l’infidèle (non chrétien- par extension le musulman représenté
par la figure du singe noire à partir du 13ème siècle contrairement au chrétien d’une
blancheur irréprochable, qui est l’aimé de dieu). » (KILANI.M.1992.p198)
Sous l’influence de la théologie chrétienne, les autres civilisations non converties au
christianisme sont devenues les cibles favorites pour tous types d’attaques, plus
particulièrement la civilisation arabo-musulmane en rejetant l’islam, pire il est pris pour
une imposture religieuse, d’où la nécessité de le combattre (les guerres des croisades).
Malgré ce désordre chaotique dans lequel s’est trouvée l’Europe, les philosophes
humanistes ont préparé le terrain discrètement pour l’avènement des lumières.
46
A cette période plusieurs tentatives de description des autres peuples sont apparues, et
nous distinguons clairement deux tendances opposées, la première est représentée par des
descriptions qui sont loin d’être le produit de témoignages directes ou de récits de
voyages elles sont de simples compilations de l’imaginaire des auteurs; tels :
L’évêque Isidore, qui a vécu entre 560-636, prépara une encyclopédie du savoir de son
temps (7ème siècle). En mentionnant les coutumes des autres peuples, d’une manière
superficielle et descriptive, il considérait que la proximité ou l’éloignement de ces peuples
de l’Europe indiquait le degré de leur avancement dans la civilisation, Selon lui, plus la
distance est grande, plus ces peuples sont sauvages, il a décrit ces gens, qui vivent loin du
continent européen comme des gens monstrueux et dépourvus de nez. » .)ف
(42ص.1990.ﺣﺴﲔ
Suivi par le français Batolomacus au 13ème siècle qui a rédigé une encyclopédie similaire
à celle d’Isidore. C’est deux œuvres font partie de la description ethnographique pour les
peuples non européens et qualifiées de discrimination raciale et religieuse, allant jusqu'à
créer la théorie de dégénération culturelle (dégénérescence) qui prétend que quelques
races, particulièrement les peuples non occidentaux punis par dieu à cause de leur péchés
pour leurs rites et croyances mystérieuses et les actes maléfiques, par contre les peuples
chrétiens qui respectent et vénèrent l’église sont les peuples supérieurs et plus avancés. »
(43ص.1990. ﺣﺴﲔ.)ف
Quant à la deuxième tendance objective, elle est représentée par des auteurs non alignés,
tel Marco Polo 1254-1324 qui est l’un des plus jeunes aventuriers que l’Europe a connu.
Ce Jeune vénitien qui a accompagné son père et son oncle dans le très célèbre voyage en
Chine, rapporta, pour la première fois, un récit assez fidèle décrivant les pays et les
peuples du coté où le soleil se lève. C’est le premier européen qui parla de la cour des
empereurs chinois, retirant le bandeau de l’égocentrisme à la grecque. Grace à son récit,
l’Europe découvre la grandeur de la chine sur le plan civilisationnel, car une civilisation
47
qui utilise l’imprimerie et une monnaie de papier, et qui édifie la plus grande muraille que
le monde a connu ne peut être considérée inférieure à la civilisation européenne, et aussi
l’existence d’autres pays limitrophes. Ainsi que la pierre noire « charbon dont on
ignorait encore l’usage en Europe » qui brûle mieux que le bois. Les récits de Marco Polo
vont contribuer à changer la vision jusqu'à là étroite des européens sur les cultures et les
civilisations diverses.
48
L'auteur met un accent particulier sur la contribution des Arabes aux sciences modernes
occidentales, dont ils furent à certains égards les précurseurs. » (MORABIA . A et BERGE .M.
1982. pp 417 /421)
49
dimensions s’interpénètrent à un tel point que l’on a pu dire que la tradition savante arabe
se caractérise par une (conception géographique de l’histoire et une conception historique
de la géographie). » (KILANI.M.1992.p202)
L’apport de cette civilisation à la réflexion pré-anthropologique aussi novateur qu’il était,
Au départ, incontestablement il n’a pas réussi à se débarrasser de l’influence de la
philosophie grecque, qui réunissait tout dans le même ordre des choses (le cosmique,
l’homme) l’héritage de l’indivision des objets et des disciplines a marqué la pensée de la
civilisation arabo-musulmane, de la même façon que la pensée théologique marqua le
moyen âge européen, ainsi « La géographie de tradition arabe s’est voulue dés ses débuts
une science totale. Elle ne séparait pas en effet l’homme de la terre, ni des autres créations
de l’univers. Non seulement elle faisait de l’homme l’objet de son étude, mais elle le
rapportait systématiquement au cadre physique et historique dans lequel il se mouvait. »
(KILANI.M.1992.pp203/204)
En dépit de son caractère général, la géographie arabo-musulmane au départ était une
géographie de voyage à visée administrative, elle accordait une importance capitale à
l’altérité, mais en imposant la civilisation de l’islam comme modèle référent, et dans son
travail elle privilégiait le témoignage visuel nommé le « iyan » qui émane de l’observation
directe.
Cette nouvelle géographie administrative et politique est illustrée dans un ouvrage intitulé
(el massalik wa el mamalik) ( itinéraires et royaumes rédigé par le célèbre ibn
khardadhabah au 9ème siècle. Le titre de cet ouvrage va devenir une école consacrée à la
géographie représentée par son maître incontestable Mohammed Ibn Yûsuf al-Warrâk.
« Dès le 11ème siècle, les descriptions deviennent plus consistantes et plus précises.
L'exemple d'Abû 'Ubayd al-Bakri est remarquable à cet égard : n'ayant jamais quitté
l'Andalousie, sa terre natale, ce personnage a tout de même légué une importante œuvre
de géographie historique du Maghreb occidental.
Sur le plan du contenu, al-masâlik wa-lmamâlik contient une description encyclopédique
intégrant plusieurs champs disciplinaires : l'histoire, la géographie, l'archéologie, l'art,
l'anthropologie, la sociologie, l'économie, la toponymie. » (SIRAJ .A. 2003.p289)
50
De prime à bord, il parait que la méthode et quelques techniques considérées actuellement
comme étant spécifiques au domaine de l’anthropologie, préexistent l’avènement de
l’anthropologie comme l’attestent l’héritage arabo-musulman, en effet, « le genre des
massalik retient pour première règle fondamentale l’observation directe des faits sans
intermédiaires (le concept de iyan) et l’unité de l’espace et du temps, règle qui est celle-là
même de « l’observation participante » et du « présent ethnographique » caractéristiques
de la monographie britannique de terrain ; ensuite sa conception de la totalité, à savoir
que « l’homme n’existe qu’en relation avec le monde », qu’il « est en rapport avec le
tout », autrement dit, qu’il doit être étudié à travers les différents aspects qui le
constituent, est proche de la conception malinowskienne de la culture comme « totalité »
organisée, laquelle doit être étudiée dans l’ensemble des interdépendances des éléments
qui la composent ; de cette centralité de l’homme dans la culture découle la finalité même
des masalik qui est la description totale de la vie des hommes en société. »
(KILANI.M.1992.pp112/213)
Une géographie territoriale illustre dans les écrits de el bayrouni qui a décrit la société de
Linde une œuvre ethnographique remarquable, à commencer par la description de la
structure religieuse et sociale, les aspects culturels avec une comparaison de celles-ci avec
celles trouvées chez les grecs, les arabes et perses, « il a démontré que toute la vie sociale,
culturelle, et tous les comportements des individus et des groupes sont régies par la
religion qui est mode de vie et source des valeurs et croyances. Il démontre que la société
indienne est une société de castes fermées. Ainsi que la langue utilisée en la comparant
avec l’arabe. » (44ص. 1990 . ف.)ﺣﺴﲔ
52
de leurs épouses; aucun d'eux ne se nomme d'après son père ; mais chacun rattache sa
généalogie à son oncle maternel. » (FAVRET-SAADA. J. 1969.pp 120/121)
Un autre personnage qui a marqué le patrimoine arabo-musulman est, Ali banou hocein
el massaoudi, grand voyageur connu pour son ouvrage les prairies d’or et les mines de
joyaux rédigé en l’an 912 encyclopédiste, historien social, doté d’un regard aiguisé, d’une
oreille attentive, ouverture d’esprit, avec une curiosité à connaitre les peuples. Surnommé
« Hérodote des arabes »El massaoudi ne cache pas son appartenance à « l’école de
géographie dite « « irakienne » qui place l’Irak au centre non seulement de la géographie
régionale arabe, mais au centre de la géographie mondiale…..les géographes de l’école
irakienne répercutent cette position centrale au niveau de leur système descriptif. Ils
considèrent par exemple l’Irak comme le nombril de la terre….et de cette position de
centralité, l’Irak tiendrait un climat modéré et agréable, et ses habitants des qualités
d’intelligence et de haute moralité. » (KILANI.M.1992. p207)
Le même discours est prôné par El massaoudi « dans son livre de tourisme, connaissance
géographique, urbanisme, science et observation, mythologie, à la première partie figure
une description de l’humanité, des religions, les traditions et doctrines. A la deuxième il
évoque l’influence du climat et de l’environnement sur le caractère des hommes il évoque
le climat du moyen orient qui donne un teint claire et un corps parfait mais forge un
53
caractère simple et frigide, celui du Maghreb forge un caractère sauvage et un cœur dur,
tandis que l’Irak le nombril et le cœur de la terre avec un climat équatorial il forge un
caractère docile et aimable. » (46ص. 1990 . ف.)ﺣﺴﲔ
Il s’avère que les écrits d’el massaoudi ne font pas l’unanimité au près des historiens qui
vont le succéder tel ibn khaldoun, qui évoque l’impossibilité de vérification des sources
utilisées par el massaoudi particulièrement ce qui se rapporte à l’existence d’une
civilisation du cuivre. Et que les travaux d’el massaoudi avec plusieurs partisans de l’école
irakienne représentent la tendance ethnocentrique, du fait qu’ils considéraient l’Irak la
référence dans toutes les comparaisons.
Ibn fadhlan : célèbre géographe du 10ème siècle, il est le premier musulman qui a visité la
Russie, il a passé 3 années à sillonné les pays limitrophes, lors de sa visite au roi bulgare
pour lui apprendre les préceptes de l’islam et la prière, il a fait une description détaillée
des modes de vie, les cérémonies et les rites funéraires, qu’ils considéraient très étranges,
car ils ne concernaient par la dépouille du défunt, ibn fadhlan a assisté à l’une des
cérémonie mortuaire qu’il décrit avec étonnement, « les funérailles d'un chef viking
auquel semble avoir assisté Ibn Fadlân. La coutume veut que les gens de sa famille
demandent alors à ses filles-esclaves et à ses jeunes garçons esclaves: « Qui d'entre vous
mourra avec lui ? » Aux obsèques auxquelles assiste Ibn Fadlân, une jeune fille se porte
volontaire. Les funérailles sont conduites sur un bateau auquel sera mis le feu. » (IBN
FADLAN .A. 1989. P18)
il relate une autre pratique particulière chez le peuple russe en disant qu’il avait une
drôle de manière de traiter leurs individus malades, souvent livrés a eux-mêmes « Si l'un
d'entre eux est malade, les autres dressent pour lui une tente à côté d'eux; ils l'y placent, y
mettent avec lui un peu de pain et d'eau, et ils ne s'approchent de lui ni ne lui parlent, ils
ne viennent même pas le voir tous les jours, particulièrement si c'est un pauvre ou un
esclave. S'il guérit et se rétablit, il revient vers eux et s'il meurt, alors ils l'incinèrent. Si
c'est un esclave, ils le laissent dans sa situation de sorte que les chiens et les oiseaux de
proie le dévorent. » (IBN FADLAN .A. 1989. P20)
54
C.La Renaissance :
La Renaissance en occident est vécue comme une période de grands bouleversements sur
tous les plans et de rupture aussi. Pour kilani « elle inaugure un nouvel humanisme. Les
vieilles assises intellectuelles et les vieux cadres géographiques se fissurent sous l’effet de
plusieurs facteurs : la découverte de nouveaux mondes et de nouveaux peuples (Amérique,
Asie); la redécouverte, en partie grace aux traductions et aux commentaires des arabes, de
l’héritage intellectuel de l’antiquité classique gréco-romaine; la réforme protestante qui
ouvre une brèche dans la vision théocentrique et monolithique du monde; la révolution
cosmogonique qui bouleverse la représentation de l’univers et situe la terre dans sa juste
position. » (KILANI.M.1992. p222)
La Renaissance est une période de découvertes, découverte de nouveaux mondes
(l’amerique), peuples, modes de vie, et nouvelles cultures, cependant ces découvertes
demeurent prisonnières des anciennes interpétrations occidentales issues de la tradition
biblique. En effet cette tradition n’a fait que renforcer le rejet de l’autre et son
dénigrement comme le souligne T.Todorov concernant la conquete de l’amérique par les
espagnols et « qui a mis en évidence l’incapacité, d’une civilisation conquérante de
percevoir l’autre en tant qu’etre différent et parfois meme en tant que homme tout
court. » (KILANI.M.1992. p224)
Cette perception négative de l’autre alimentée par l’ethnocentrisme qui émane du
sentiment de superiorité, débauche sur deux types de distruction : distruction physique
(génocide) à citer le cas des amerindiens des noirs, et distruction culturelle (ethnocide)
détruire la culture d’origine et la remplacer par la culture du vainqueur à citer le cas du
colonialisme.
Cette perception négative n’a fait qu’agrandir le clivage entre civilisations et leurs cultures
et religions, en mettant la civilisation occidentale christienne au centre comme référence
dans tous les travaux de comparaison, les siècles suivants n’ont pas aboli cette perception ,
on voit d’ailleurs qu’« aux XVIIe et XVIIIe siècle, le comparatisme s’accentue avec la
multiplication des récits de voyages….meme s’il s’y mèle du romanèsque, du fantastique et
du monstrueux, l’information documentaire est synthétisée par les philosophes et les
55
encyclopedistes : montesquieu, voltaire, rousseau, helvitius, diderot, condercet. En 1799 est
fondée une société des « observateurs de l’homme » qui se propose de comparer les
peuples de l’anti quité et les peuples sauvages. » (GAUDIO .A. 2010. P 28 )
56
AXE III
Les théories et thèmes de l’anthropologie
1/Les théories : faute de temps et de normes académiques qui limitent le nombre de
pages que doit contenir le polycopié, on a donc sélectionné quelques théories et deux
thématiques uniquement afin de donner un aperçu sur la richesse de cette discipline.
A. Evolutionnisme :
Parallèlement à ces hommes de terrain qui arpentent la planète en l’inventoriant, les
hommes de cabinet s’essaient à des travaux faits d’observations et d’intuition qui retrace le
chemin parcouru par l’espèce humaine, c’est à partir de ces essais que naquit
l’évolutionnisme comme la première théorie de l’anthropologie, fondée sur les certitudes
nées de la philosophie du 18ème siècle, qui prônait l’idée de l’évolution de l’humanité
vers un progrès irréversible qui se traduit par une complexification et une diversification
des structures sociales, un perfectionnement des systèmes sociaux dans les domaines aussi
bien politique, économique, religieux, etc. Ces certitudes vont s’appuyer d’une part sur
les travaux des philosophes, tel Condorcet dans son célèbre ouvrage le tableau évolutif de
l’esprit humain, dans lequel il évoque le passage des sociétés par les trois stades liés aux
modes de subsistance (chasse, pastoralisme, agriculture) au dépend de l’effectif au sein
des sociétés, d’une autre part sur les naturalistes notamment Charles Darwin (L’origine
des espèces par voie de sélection naturelle) ou de Lamarck (son transformisme) en effet
«Lamarck a nettement reconnu l'existence d'une ligne directrice de l'évolution qu'il
désigne sous le nom de gradation, et à laquelle nous donnons aujourd'hui le nom
d'Évolution progressive; mais il ajoute que cette ligne directrice ne se laisse reconnaître
que dans les « masses principales ». (VANDEL. A.1960.p64)
De la même manière que l’on observe dans le monde naturel une diversification des
espèces et un perfectionnement constant de l’adaptation au milieu, spencer constate dans
le monde humain un passage du simple au complexe et une amélioration des systèmes
sociaux dans les domaines économiques, politiques, parentaux et religieux.
57
Le plus marquant des auteurs évolutionnistes est Morgan qui partage avec Tylor le titre de
fondateur de l’anthropologie culturelle, il schématise l’évolution humaine en trois grandes
phases : sauvagerie, barbarie, civilisation, chacune étant divisée en période: ancienne,
moyenne et récente. Toutes débutent par une invention technologique (l’agriculture à
l’aube de la barbarie, l’industrie et le commerce à l’aube de la civilisation) dont le
développement suit celui des arts de la subsistance.
Outre « L.H.Morgan, Tylor et Frazer sont considérés comme les piliers majeurs de
l’évolutionnisme anthropologique. Tylor, convaincu du développement uniforme des
civilisations, fut le premier à réaliser une élaboration statestique sociale, avec le traitement
quantitatif des données ethnographiques. Il étudie l’ethnologie de la parenté et l’animisme,
religion primitive ayant pour origine les rèves et la mort. Fondé sur la croyance dans le
« doubleé, l’animisme serait le principe de toute religion, en passant par plusieurs phases :
mànisme (culte des àmes des défunts), fétichisme, polythéisme, puis monothéisme. Frazer
aussi étudie les religions, notamment les mythes, le totémisme …et place la science en
dernier, car c’est elle qui corrigerait la religion. » (GAUDIO .A. 2010. P30)
Appliquée aux sociétés humaines, la théorie évolutionnisme a forgé la conviction qu’il
existe une espèce humaine unique mais qui, sur le plan culturel, se développe à un rythme
inégal selon les zones et les populations. « Ces populations, quelle que soit leur spécificité,
sont censées suivre le même chemin et franchir les mêmes étapes et atteindre le même
stade qui est celui de la civilisation (dont la phase la plus achevée est la civilisation
occidentale). Le point de départ de toutes les sociétés humaines étant la primitivité absolue
qui se caractériserait par les traits suivants «promiscuité sexuelle, communisme primitif,
infanticide féminin, gynécocratie, capture de la mariée, polyandrie archaïque» (RIVIERE
.C. 2013. P 32 )
B. Le diffusionnisme :
Est apparut au début du 20ème siècle en Allemagne sous le nom « histoire culturelle »
ensuite aux états- unis, il est constitué d’un faisceau convergent de questionnements, de
58
théories et de méthodes autour de la culture, c’est des excès et les erreurs de
l’évolutionnisme qui sont à l’origine de plusieurs critiques liées au caractère linéaire rigide
des évolutionnistes tel Lewis Henry morgane que naquit le diffusionnisme qui met en
exergue l’homogénéité relative des ensembles culturels et l’existence des aires culturelles,
dont il explique leur diffusion par la transmission des traits culturels d’une région à un
autre. Selon Claude Rivière, c’est « aux diffusionnistes que l’on doit les premières études
scientifiques de la circulation des traits culturels : leurs itinéraires, leur vitesse et leurs
aires de diffusion, les modifications survenues, les obstacles et les conditions favorables à
cette diffusion. » (RIVIERE .C. 2013. P36)
La thèse centrale du diffusionnisme est l’étude de la culture dans tous ses aspects et ses
états, en effet, ile décortique le phénomène culturel, et « il assigne à chaque trait culturel
une origine précise et explique sa présence dans les sociétés les plus diverses par une
succession d’emprunts d’un groupe à un autre. » (DUMONT. J et BARONIAN. J-B. 1972.
P182)
Comme il cherche aussi à comprendre les évolutions culturelles dans toutes leurs
dimensions, ceci signifie quelque soit la nature de cette culture : matérielle ou
immatérielle ; d’où l’intérêt porté aux deux disciplines qui sont l’archéologie et la
linguistique afin d’analyser les résultats issus de « la propagation de traits culturels, aussi
bien spirituels (institutions sociales, mythes ou rites) que matériels (types de céramiques,
techniques agricoles…), de la société où ils sont apparus à des sociétés culturellement
différentes) ». (PPESQUEUX. Y. 2004. P 89)
Dans leurs ecrits Claude Rivière et Mondher Kilani affirment l’idée que le diffusionnisme
d’une part, vise à étudier la distrubition géographique des traits culturels en expliquant
leur présence par une succession d’emprunts d’un groupe à l’autre ou d’une société à une
autre par le biais de migration, de voyage et d’échanges commerciaux. Et d’une autre part
ils évoquent la rareté des processus d’invention et d’un nombre limité de foyers.
59
D’autres relient le diffusionnisme au changement social, ainsi ce dernier « serait donc
plus le fait d’emprunts et d’imitations que d’inventions, bien que ces emprunts puissent
faire l’objet de réinterprétations dans le cadre de la société d’accueil. Et les éléments les
plus simples et les plus répandus sont les plus anciens. Pour l’approche diffusionniste, les
sociétés sont rarement des entités closes sur elles-mêmes.» (ROGER .T. 2003.pp118/119)
60
progressé plus par emprunts que par invention. » (DUMONT. J et BARONIAN. J-B. 1972.
P183)
C. Le culturalisme :
Le culturalisme, voit le jour et prend son essor aux Etats-Unis au sein de l’école
d’anthropologie culturelle, et dont les principaux représentants sont R. Linton, R.
Benedict, M. Mead, F. Boas, et Abraham Kardiner, elle fait de la culture l’élément
explicatif de tous les phénomènes d’éducation, socialisation, et organisation. Il définit la
culture comme système de comportements appris et transmis par l’éducation, l’imitation
et le conditionnement (acculturation) dans un milieu social donné. La particularité du
culturalisme se trouve à la fois dans sa démarche concrète de l’étude de la culture, car « il
considère que l’étude de la culture s’est faite jusqu'alors de façon trop abstraite, et que les
liens existants entre l’individu et sa culture n’ont pas été pris en compte, il va s’attacher à
comprendre comment les êtres humains incorporent et vivent leur culture. » (CUCHE .D.
2010. P38)
61
pratiques habituelles. Des valeurs modales dominantes, qui n’excluent pas des variantes et
des déviances, permettent de particulariser chaque culture. » (DUMONT. J et BARONIAN. J-
B. 1972. P31)
Cette école, doit beaucoup à Ruth Benedict, et Margaret Mead qui sont disciples de Franz
Boas, alors que Ruth Bénédicte (1887-1948) parle du pattern of culture (échantillon de
culture) et met l’accent sur les différences qui séparent les populations, et insiste sur le fait
que les membres sont fortement marqués par leur culture, et « elle rejette toute forme de
déterminisme biologique, pour mettre en avant le principe de déterminisme culturel.
62
Chaque société est une configuration particulière, un assemblage singulier d’éléments
culturels qui peuvent se combiner à l’infini. » (KILANI.M.1992. p108)
Margaret Mead (1901-1978) quant à elle évoque le « caractère naturel » elle écarte l’idée
de la différence des comportements qui viendrait de la différence biologique, la
concernant, les différences entre sexes ne sont pas biologiques mais plutôt culturelles, elle
reconnait la plasticité de la nature humaine. Elle a introduit de nouveaux thèmes tels la
socialisation des enfants, sexualité, la différence entre hommes et femmes. Ses conclusions
sont le résultat d’une enquête de terrain incluant 3sociétés en nouvelle guinée (1930)
ABRAM KARDINER (1891-1981), affirme qu’il y’a une relation causale entre culture et
la personnalité, du fait que les membres d’un groupe baignent dans le même moule
culturel et qui aboutissent à la formation d’une personnalité de base, et Cette personnalité
de base est la « configuration psychologique particulière propre aux membres d’une
société et qui se manifeste par un certain style de vie sur lequel les individus brodent leurs
variantes singulières». Cette sorte de charte, transmise par les institutions qu’il appelle
primaires (famille, éducation, techniques…) parce que liées aux premières expériences
d’élaboration de la personnalité, apparait idéologisée dans un système de projections qu’il
nomme institutions secondaires (religion, folklore…), effets des précédentes. » (RIVIERE
.C. 2013. P41)
De Marcel MAUSS il a apprit la valeur de quelques pratiques issues d’échange, essai sur le
don, pour Mauss la première forme de contrat économique ce n’est pas le troc mais le don
qui est la forme synthétique de l’échange, et le duo échange –don se manifeste à travers
trois obligations : donner, rendre et recevoir. Et que l’échange –don n’est pas une simple
transaction économique, il est un fait social total, qui crée du sens entre les individus et
fonde le lien social. Aussi dans son article « les techniques du corps » Mauss montre que
les manières d’utiliser son corps varient selon l’âge, le sexe et les cultures. Le corps
comme entité biologique est utilisé socialement de différentes manières.
64
fonction, leur rôle dans le système total de la culture, la manière dont ils sont reliés les
uns aux autres à l’intérieur de ce système et celle dont ce système est relié au milieu
physique. » (DUMONT. J et BARONIAN. J-B. 1972. P185)
L’une des critiques faite par Malinovski à l’évolutionnisme c’est d’isoler les faits sociaux de
leur contexte social en le considérant comme des survivances. « Il critique l’atomisation de
la réalité culturelle à laquelle aboutissent quelques recherches du courant diffusionniste
qui se caractérisent par une approche muséographique des faits culturels réduits à des
faits que l’on collectionne et que l’on décrit pour eux-mêmes sans être toujours capable de
comprendre leur place dans le système global. » (CUCHE .D. 2010. P 36 )
Dans leurs travaux, les fonctionnalistes vont se concentrer sur le fonctionnement des
sociétés, ils vont développer l’analogie organiciste (ils considèrent la société et la culture
comme un organisme vivant). Ainsi toute société est un tout intégré au sein duquel
chaque institution remplit une fonction, c'est-à-dire participe à la bonne marche de
l’ensemble, et chaque institution sociale concourt à la continuité de la vie sociale, les
institutions sont interdépendantes tout comme les organes du corps.
Le fonctionnalisme s’intéresse de savoir comment fonctionne une institution, quelle est sa
place, sont rôle. Et non pas son histoire et son évolution.
Pour Malinovski « tous les hommes sont égaux mais divers, et toutes les diversités sont
égales » (KILANI.M.1992. p262 ), il refuse l’idée du sauvage opposé au civilisé, il refuse aussi
la dichotomie entre l’esprit pré-rationnel et la raison, il considère que l’homme quelque
soit son origine, indigène ou occidental est un être de raison. Dans le même ordre d’idées
Malinovski rejette l’expression de « peuple enfant » comme on a prit l’habitude de
penser au 19ème siècle à propos des sociétés dites primitives.
Le travail de Malinovski est empirique, le seul ouvrage théorique qu’il a rédigé s’intitule
« une théorie scientifique de la culture » nommé « théorie des besoins », selon lui, « la
culture est un appareil instrumental destiné à satisfaire les besoins physiologiques qui se
posent à l’homme. L’homme est avant tout, un être animal qui a besoin de manger, de
dormir, de respirer, de procréer. Chaque civilisation doit alors satisfaire ces fonctions
65
corporelles et la culture peut se définir comme un ensemble cohérent de réponses à ces
besoins élémentaires : à chaque besoin élémentaire (basic need), il faut une réponse
culturelle. » (DELIEGE .R. 2006. Pp155/156)
66
Avant tout, il est plus judicieux de parler de l’apport de sir James Frazer, anthropologue
de chambre certes mais sa contribution dans le domaine de la mythologie est aussi
importante que celles de ses contemporains, en effet « C’est le dispositif Frazien, qui
développa et enrichit la « mythologie agraire » et vitalistes de Wilhem Mannhardt,
peuplée de ses célèbres végétationgeister semble et en inspire l’esprit. Selon ce préjugé
tenace, la mythologie entière «croit » autour du mystère que durent représenter, au seuil
de l’histoire de l’humanité, les cycles végétatifs et leur périodicité réglée, saisonnière et
annuelle. D’une façon plus générale encore, c’est la fertilité (humaine, animale, végétale),
avec ses conditions mystérieuses, ses crises inquiétantes et ses effets bénéfiques, qui se
trouverait au cœur des mythes et des rites archaïques. » (DUBUISSON .D. 2008. Pp35/36)
Frazer a ainsi relié les mythes aux rites.
Dans le domaine de l’anthropologie d’une manière générale, et l’anthropologie culturelle
et religieuse en particulier, la description du mythe se fait en s’appuyant sur quatre
critères selon pierre Cazier : « Critère de forme, Critère de contenu, Critère de fonction
et Critère de contexte. » (CAZIER .P. 1994. P20 )
Il est à signaler, que chaque anthropologue choisi quelques critères suivant son orientation
théorique pour étudier le mythe, pour Malinowski c’est la fonction des mythes qui
l’intéresse, Dumézil c’est les critères de forme et de fonction qui sont pris en considération
pour établir l’idiologie tripartie, quant à Lévi-Strauss, c’est le contenu dont figure la
substance du mythe qui est analysée.
Etude du mythe selon Claude Lévi-Strauss et Georges Dumézil (structuralisme) : Avant de
passer à l’analyse des récits mythiques des sociétés sauvages, Lévi-Strauss s’est intéressé à
l’analyse des systèmes totémiques. Quant à Georges Dumézil s’est intéressé à l’étude
comparative des religions, avant de s’orienter vers l’étude des langues anciennes, qui vont le
mener à l’étude des mythes indo-européens à partir d’une étude des différentes castes
sociales de l’inde. Pour Dumézil « Les ressemblances entre les noms de dieux ou de
fonctions sociales ne doivent pas être expliquées par des motifs semblables mais par une
structure commune. Dumézil découvre cette structure dans l’équation « flamen-brahman »
67
qui doit lui permettre de comparer le prêtre romain et le prêtre indien. C’est en repérant
les trois fonctions des flamines que Dumézil conçoit qu’elles correspondent à la structure
des trois castes en inde, autrement dit la répartition entre les fonctions sociales du prêtre,
du roi guerrier et du paysan commerçant.» (KECK .F. 2011. P 297)
Cette idiologie tripartie serait l’héritage commun à toutes les sociétés indo-européennes, et
ceci même si à un moment de l’histoire, celles-ci ont évolué de manières diverses en
empruntant des chemins différents.
Lévi-Strauss a commencé à travailler sur ces récits dés 1950, date à laquelle il prend la
chaire de « religions comparées des peuples sans écriture », ce qui le conduit à publier un
article très remarqué en 1955, intitulé « la structure des mythes », avant de se lancer dans
la vaste tétralogie des mythologiques en 4 volumes : le cru et le cuit (1964), du miel aux
cendres (1966), l’origine des manières de table (1968) et l’homme nu (1971).
« Il définit le mythe comme un récit particulier sur le passé qui sert à justifier une action ou
une institution présente. Il se réfère à des événements qui ont lieu il y a bien longtemps.
Dans le mythe, ce qui compte, ce ne sont pas les mots, mais l’histoire. Le mythe est comme
un récit structuré en épisodes, raconté dans des occasions particulières, souvent sacrées, et
reproduit au travers des récits différents qui en sont faits, sans que sa structure générale se
décompose. » (KECK .F. 2011. P137)
En ce sens, la particularité du mythe est sa résistance aux changements, contrairement à
d’autres modes d’expression linguistique, ainsi le mythe se situe à l’opposé de la poésie.
Car la poésie est sensible au changement de langue, elle perd de son esthétique littéraire
(aura) de sa signification lorsqu’elle est traduit, alors que la valeur du mythe persiste en
dépit des pires traductions.
Dans son analyse Lévi-Strauss insiste sur le fait que les mythes préservent leur ossature
même s’ils subissent des changements au niveau de la langue ou de la forme Ce qui
importe, c’est la substance du mythe, et celle-ci « ne se trouve ni dans le style, ni dans le
mode de narration, ni dans la syntaxe, mais dans l’histoire qui y est raconté » (KECK .F.
68
2011. P 140 ); il reconnait la diversité des versions de mythes dans le monde, pour étudier
les mythes, Lévi-Strauss développe une méthode d’analyse calqué sur la linguistique toute
en respectant la particularité du mythe. Pour Lévi-Strauss Le mythe « est analogue au
langage : arbitraire dans sa forme, il est le moyen de mettre en rapport des structures
d’oppositions, et constitue une matrice d’intelligibilité du monde. C’est pourquoi tous les
mythes de la terre semblent se ressembler même s’ils sont divers, car tous manipulent un
nombre de structures logiques d’oppositions et d’inversions. » (KECK .F. 2011. P140)
B. Les Rites
Les rites sont l’un des thèmes privilégiés de l’anthropologie, elle porte un intérêt très
particulier aux cérémonies et aux rituels qui assignent aux individus, tout au long de leurs
vies des statuts et des rôles différentes. Les rites sont inhérents au monde des croyances
par extension au religieux. La vie est pleine de rituels qui peuvent revêtir un caractère
magique ou religieux tout dépend de l’évènement qui requiert une cérémonie rituelle.
L’une des définitions les plus simples, est que le « Rite, est un ensemble de gestes, de
paroles et d'objets ordonnancé par une autorité qui en détient la signification puisqu'elle
en a formulé le code. Or c'est bien l'impossibilité d'exprimer le sens que suppose la
réponse banale, celle qui invoque la "coutume" ou la "tradition" pour dire les façons
collectives dont on veut désigner l'inexplicable nécessité. » (FABRE .D.2007.p1 )
Selon Durkheim les rites sont les« règles de conduite qui prescrivent comment l’homme
doit se comporter avec les choses sacrées. Le rite est une pratique périodique à caractère
publique assujettie à des règles précises, et dont l’efficacité s’exerce en particulier dans le
monde de l’invisible. » (SANCHEZ .P. 2007. P74) Un rite se caractérise par sa répétition, par
le caractère codifié des conduites, par sa charge symbolique et par l’efficacité attendu de
son accomplissement. » (ALPE .Y et autres. 2010 .P 285
Lévi-Strauss décrit le rite comme une simple répétition mécanique du mythe qui
l’exprime d’une façon affective mais en limite ainsi les possibilités logiques.
Les types de rites : il existe plusieurs types, on cite les plus importants:
69
1- Rite d’institution : pour pierre Bourdieu, instituer c’est consacrer, c’est à dire
sanctionner et sanctifier un état de chose, un ordre établi. Le rite d’institution est donc un
rite qui manifeste et qui légitime une différence comme la circoncision qui institue la
différence entre l’homme et la femme.
2- Rite de passage : terme inventé par Arnold van Gennep pour désigner les rites, sacrés
ou profanes, qui marquent les grandes étapes de l’existence dans les diverses sociétés :
rites liés à la naissance, au passage à l’âge adulte, au mariage, à la mort.
3- Rite magique : pour Henri Hubert et marcel Mauss, concerne le rite qui ne fait pas
partie d’un culte organisé, rite privé, secret, mystérieux et tendant limite vers le rite
prohibé. » La différence avec le rite religieux ne réside pas dans son contenu mais dans les
conditions dans lesquelles le rite est pratiqué.
4- Rite sacré : rite qui concerne le domaine magique ou religieux.
5- Rite profane : rite qui ne concerne pas le domaine magique ou religieux, il existe des
rites d’interaction qui régissent de nombreux aspects de la vie quotidienne, des rites
sportifs, politiques.
6- Rite négatif : pour Durkheim sont ceux qui interdisent aux fidèles d’accomplir certains
actes. Ces interdits (ou tabous) ont pour objet d’opérer une séparation entre différents
domaines du sacré ou entre la sphère du sacré et celle du profane ; les interdits
alimentaires sont des rites négatifs.
7- Rite positif : selon Durkheim, sont ceux qui prescrivent aux fidèles d’accomplir tel ou
tel acte ou cérémonie ; les sacrifices ou les offrandes sont des rites positifs. » (ALPE .Y et
autres. 2010 .P286 )
70
Rivière propose de considérer les rites comme une clef explicative des comportements
individuels et collectifs, qu’il s’agisse de comportements identifiés comme religieux ou
non. Les rites sont toujours à considérer comme ensemble de conduites individuelles et
collectives, relativement codifiées, ayant un support corporel (verbal, gestuel), à caractère
plus au moins répétitif, à forte charge symbolique. » (CHERBLANC. J. 2011.p38)
Quant A. Van Gennep, dans les rites de passage il souligne le fait que ceux-ci sont
représentés et compris comme des passages obligatoires et matérialisés par un ensemble de
pratiques qui marquent le passage d’une frontière ou d’un seuil, en montrant que les rites
ont une fonction sociale même s’ils paraissent individuels. En effet, « c’est lui qui, le
premier, va prendre en compte l’universalité des rites de passage et le champ opératoire de
leur structuration. Chaque passage, chaque franchissement, nécessite, d’une certaine
manière, un « stage », une étape, un entre-deux, des paroles, une initiation. »
(D’ALLONDANS .T-G. 2002 .p11)
L’anthropologie doit beaucoup à Arnold van Gennep, du fait, qu’il figure parmi les
pionniers qui ont orienté leurs travaux vers l’étude des sociétés paysannes françaises, il est
le premier à considérer les rites universels, mais aussi il établi la structure tripartie des
rites qui est reprise plus tard par l’ensemble des chercheurs qui ont travaillé sur le thème
des rites ; ainsi Van Gennep admet que « le rite de passage est constitué d’une trame
séquentielle en trois temps, modèle que chacun doit appliquer et respecter, sous peine de
courir le risque de transgresser un tabou. Le rite de passage est donc constitué de trois
temps : 1) la séparation d’avec le groupe d’origine (la préliminarité) ; 2) le séjour en
marge du groupe social (la liminarité); 3) le retour, l’agrégation dans le groupe social (la
postliminarité), mais avec un nouveau statut.» (CHERBLANC. J. 2011.p35 Il est aussi
conscient de l’obligation à respecter les trois phases « structures » chronologiques
indispensables au rite, pour réussir le passage et l’initiation, néanmoins, « pour Van
Gennep, la notion centrale dans le processus rituel en l'idée de passage, de
marginalisation; c'est cette étape qui constitue le cœur du rituel, car c'est celle qui
71
transforme les choses et les gens. Elle peut parfois s'étaler sur une longue période, parfois
des années, a elle développe souvent une certaine autonomie par rapport aux autres
étapes, car elle se vit comme un état particulier de la nature humaine, une sorte
d'évolution de statut, une maturation certaine. » (DELIEGE.R.2006.p97)
Les différentes étapes du rituel varient en longueur et en importance selon leur nature et
leur visée.
Pour conclure, on est conscients des lacunes que le lecteur peut trouver dans cet humble
travail, en revanche on doit admettre qu’il nous a donné la volonté de persévérer afin de
l’augmenter et de la publier sous forme d’ouvrage qui sera mis à la disposition des
étudiants.
72
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