2008 ASSIELOt
2008 ASSIELOt
2008 ASSIELOt
Contact : ddoc-theses-contact@univ-lorraine.fr
LIENS
THESE
Présentée en vue de l’obtention du titre de
DOCTEUR DE L’INPL
JURY
M. Miguel ALFARO, Professeur associé Président
M. Simon RICHIR, Professeur Rapporteur
M. Didier GOURC, Maître de Conférences – HDR Rapporteur
M. Henri SAMIER, Professeur Examinateur
M. Steeve AUGOULA, Directeur de l'innovation de Glaizer Group Examinateur
Mme Martine GAUTIER, Maître de Conférences Examinateur
M Yves-Alain BEKRO, Professeur associé Membre invité
M. Vincent BOLY, Professeur Directeur de thèse
Mme Laure MOREL-GUIMARAES, Professeur Co-directeur de thèse
-1-
L’institut National Polytechnique de Lorraine
n’entend donner ni approbation ni improbation
aux opinions émises dans cette thèse. Ces opinions
devant être considérées comme propres à l’auteur.
« L’innovation est une chose merveilleuse. C’est une force au pouvoir d’attraction pragmatique
et esthétique : elle déchaîne notre créativité, ouvre nos esprits vers des possibilités inexplorées,
tout en accélérant simultanément la croissance économique et en permettant des avancées dans
des domaines aussi importants que la médecine, l’agriculture et l’éducation. Pour les
organisations industrielles – principaux moteurs de l’innovation dans le monde occidental –
l’innovation offre à la fois des opportunités exceptionnelles et des défis importants. Elle est un
moyen puissant de différentiation, permettant aux entreprises de pénétrer de nouveaux marchés
et d’augmenter leurs profits, mais c’est également une course concurrentielle qui nécessite
vitesse, adresse et précision. L’entreprise ne doit pas seulement être innovante ; pour réussir,
elle doit innover mieux que ses concurrentes. »
Gestion de l’innovation technologique, Melissa Schilling ; [Traduit et adapté de l’anglais par] François
Thérin, Paris : Maxima-Laurent de Mesnil Editeur, cop. 2006, France.
REMERCIEMENTS
Je débute ces remerciements par préciser que cette thèse est le fruit de travaux de recherche
menés au sein de l’Equipe de Recherche sur les Processus Innovatifs (ERPI).
J’adresse des remerciements particuliers au Professeur Vincent BOLY pour m’avoir accueilli
dans cette équipe et de m’avoir donné l’opportunité de mener à bien ces travaux de recherche.
Mes remerciements vont aussi à l’endroit de Laure MOREL-GUIMARAES, professeur à
l’INPL pour avoir accepté de co-diriger ma thèse, ainsi que pour les orientations, les multiples
questionnements et le suivi qu’elle m’a accordé.
Je tiens aussi à remercier le gouvernement ivoirien pour son financement, sans lequel ces
travaux n’auraient jamais été possibles.
Je tiens à exprimer ma profonde gratitude à mes proches, mes amis, mes parents pour leur
soutien, leur patience et leur encouragement sans faille pendant toutes ces années d’études en
France.
Enfin, mes tendres remerciements à mon épouse qui a admis cette longue séparation et pour
qui mon amour grandit de jour en jour.
-3-
RESUME
L’innovation représente un processus vital pour les entreprises en vue d’assurer leur
développement. Diverses actions et stratégies nouvelles sont mises en œuvre par les
entreprises pour faire face aux exigences de marchés et accroître leurs performances. Une
bonne connaissance du processus d’innovation et de l’organisation de l’entreprise est
nécessaire pour permettre aux managers de les gérer efficacement et les adapter aux défis et
changements dans leur environnement. D’où la nécessité pour les entreprises de disposer
d’outils et de méthodes pour mesurer en continu leurs activités d’innovation.
L’objectif de notre recherche est de proposer un cadre de mesure des capacités à innover des
entreprises basé sur un ensemble de quinze pratiques d’innovation, chacune des pratiques
étant subdivisée en plusieurs critères qui sont des phénomènes directement observables en
entreprise. L’approche méthodologique s’appuie sur les méthodes d’agrégation multicritères
et utilise la notion statistique de la valeur-test pour proposer une typologie des entreprises en
quatre classes d’entreprises innovantes (proactive, préactive, réactive et passive). Une étude
expérimentale a été menée sur un panel de vingt entreprises industrielles françaises.
ABSTRACT
Innovation represents a vital process for companies to insure their development. Several
actions and new strategies are implemented by companies to increase their performances and
so face market requirements. A good knowledge of both the innovation process and the
company organization is necessary to allow the top management to manage them effectively
and to adapt them to the challenges and the changes in their environment. Consequently, it is
important for the companies to have tools and methods to measure continuously their
innovation activities.
-5-
Table des matières
INTRODUCTION.................................................................................................................... 13
Introduction générale............................................................................................................ 14
PARTIE 1 : ETAT DE L’ART ET PROBLEMATIQUE DE LA RECHECHE .................... 18
Introduction de la partie 1 .................................................................................................... 19
1. Chapitre 1 – Quelques enjeux de l’innovation au plan mondial ...................................... 20
2. Chapitre 2 – L’innovation technologique......................................................................... 26
2.1. Définitions de l’innovation................................................................................... 26
2.2. Les typologies d’innovations existantes............................................................... 29
2.3. Le processus d’innovation et ses spécificités ....................................................... 34
2.4. Les différents niveaux opérationnels d’intervention de l’innovation................... 42
2.5. Conclusion du chapitre......................................................................................... 46
3. Chapitre 3 – Les approches et critères d’évaluation de l’innovation ............................... 48
3.1. Evaluation ou mesure ........................................................................................... 48
3.2. Techniques de collecte et de traitement des données ........................................... 52
3.2.1. Les techniques de collecte de données ............................................................... 52
3.2.2. Les techniques de traitement de données ........................................................... 53
3.3. Les approches d’évaluation en innovation ........................................................... 55
3.3.1. Evaluation des inputs ......................................................................................... 59
3.3.2. Evaluation des activités...................................................................................... 61
3.3.3. Evaluation des outputs ....................................................................................... 70
3.3.4. Evaluation transverse ......................................................................................... 77
3.3.5. Conclusion du chapitre....................................................................................... 81
4. Chapitre 4 – Problématique de recherche ........................................................................ 82
PARTIE 2 : DEMARCHE METHODOLOGIQUE ET OUTIL D’AIDE A L’AUTO-
EVALUATION........................................................................................................................ 84
Introduction de la partie 2 .................................................................................................... 85
5. Chapitre 5 – Contribution théorique et méthodologique.................................................. 88
5.1. Définition du modèle : pratiques d’innovation .................................................... 88
5.1.1. Les activités de R&D ......................................................................................... 90
5.1.2. La gestion de la relation client (CRM)............................................................... 91
5.1.3. Conclusion du paragraphe .................................................................................. 95
5.2. Collecte des données : définition des critères à évaluer....................................... 95
5.3. Notre proposition méthodologique....................................................................... 98
5.3.1. Prise en compte de travaux précédents .............................................................. 99
5.3.2. Principes de notre méthodologie ...................................................................... 103
5.3.2.1. Notre contribution initiale : fixation des bornes des classes d’entreprises
pour le démarrage de l’évaluation 2 ....................................................................... 104
5.3.2.2. Autre contribution : une démarche d’évaluation itérative......................... 105
5.3.2.3. Détermination des pratiques-clés et des profils de préférences : utilisation
du concept statistique de la valeur-test................................................................... 109
5.3.2.4. Autre contribution : Sélection des entreprises par classe grâce à l’approche
de Pareto ................................................................................................................. 112
5.3.2.5. Description détaillée de l’ensemble de la démarche d’évaluation proposée
................................................................................................................................ 113
5.3.3. Conclusion du paragraphe ................................................................................ 115
5.4. Conclusion du chapitre....................................................................................... 116
6. Chapitre 6 – Contribution industrielle : Application de la démarche ............................ 118
6.1. Description de l’outil INNOEVALUATOR et fonctionnalités.......................... 118
6.2. Conclusion du chapitre....................................................................................... 125
Conclusion de la partie 2 .................................................................................................... 127
PARTIE 3 : EXPERIMENTATION ET ANALYSE DES RESULTATS ........................... 128
Introduction de la partie 3 .................................................................................................. 129
7. Chapitre 7 - Expérimentation ......................................................................................... 130
7.1. Objectifs expérimentaux .................................................................................... 130
7.2. Cadre d’expérimentation .................................................................................... 131
7.3. Constitution du panel expérimental.................................................................... 131
8. Chapitre 8 - Traitement et analyses des résultats ........................................................... 133
8.1. Evaluation 1 et interprétation des résultats ........................................................ 133
8.2. Déploiement de notre méthode : Evaluation 2 ................................................... 139
8.2.1. Classification initiale........................................................................................ 140
8.2.2. Constitution progressive des classes d’entreprises........................................... 141
8.2.3. Evolution des indices d’innovation potentielle (IIP) des entreprises ............... 145
8.2.4. Profils de préférences des classes d’entreprises ............................................... 146
8.2.5. Comparaison d’entreprises ............................................................................... 148
8.3. Classification des systèmes innovants................................................................ 152
8.3.1. Système innovant de la classe passive ............................................................. 154
-7-
8.3.2. Système innovant de la classe réactive ............................................................ 155
8.3.3. Système innovant de la classe préactive .......................................................... 156
8.3.4. Système innovant de la classe proactive .......................................................... 157
8.3.5. Conclusion du paragraphe ................................................................................ 158
8.4. Caractérisation des classes d’entreprises par la logique floue ........................... 158
Conclusion de la partie 3 .................................................................................................... 160
CONCLUSION ET PERSPECTIVES ................................................................................... 162
Conclusion et perspectives ................................................................................................. 163
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES ............................................................................... 166
Références .......................................................................................................................... 167
ANNEXES ............................................................................................................................. 176
Annexe 1 : GRILLE D’OBSERVATION.......................................................................... 177
Annexe 2 : CALCUL DES VALEURS-TESTS ET POIDS.............................................. 193
Liste des figures
Figure 1 : Index d’innovation moyens SII 2007, source (PRO INNO Europe, 2008) ............. 21
Figure 2 : Ecart d’innovation de l’UE par rapport aux Etats Unis et au Japon, source (PRO
INNO Europe, 2008) ................................................................................................................ 22
Figure 3 : Typologie des innovations de produits, source (Veryzer, 1998) ............................. 30
Figure 4 : Typologie des innovations proposées par Geroski et Markides, source (Prax et al.,
2005)......................................................................................................................................... 31
Figure 5 : Courbes en S de la technologie et/ou du marketing, source (Foster, 1986) ............ 37
Figure 6 : Modélisation dynamique de la création de valeur par une organisation dans son
environnement, source (Portnoff et Joyeux, 2006) .................................................................. 38
Figure 7: Les cinq différents niveaux d’étude du processus d’innovation, source (Boly et
Morel, 2006)............................................................................................................................. 45
Figure 8 : Vision systémique de l’évaluation de l’innovation en entreprise, source : notre
recherche .................................................................................................................................. 58
Figure 9 : Cadre conceptuel d’évaluation de la capacité d’innovation des entreprises, source
(Romijn et Albaladejo, 2002)................................................................................................... 63
Figure 10 : Système input-output d’évaluation de la compétitivité, source (Guan et al., 2006)
.................................................................................................................................................. 66
Figure 11 : Structure hiérarchique des TICs pour l’évaluation d’une entreprise, source (Wang
et al., 2008)............................................................................................................................... 68
Figure 12, Modèle synthétique des conditions de succès d’un projet d’innovation, source
(Millier, 2005) .......................................................................................................................... 76
Figure 13 : Diagrammes de Venn avec différents degrés de chevauchement, source
(Hagedoorn et Cloodt, 2003).................................................................................................... 79
Figure 14 : Schématisation de nos contributions, source : notre recherche ............................. 87
Figure 15 : Structure hiérarchique des pratiques de l’innovation et des critères observables
associés pour l’évaluation de la capacité à innover des entreprises, source : notre recherche. 97
Figure 16 : Démarche globale de l’évaluation des entreprises, source : notre recherche ...... 106
Figure 17 : Process global de traitement, source : notre recherche........................................ 107
Figure 18 : Process de constitution des classes d’entreprises, source : notre recherche ........ 108
Figure 19 : Exemple d’application de la méthode ABC, source : notre recherche ................ 113
Figure 20 : Page d’accueil et cadre des choix offerts à l’utilisateur, source : notre recherche
................................................................................................................................................ 120
-9-
Figure 21 : Comparaison des entreprises E1 et E14 en fonction de leur degré de
développement des pratiques d’innovation, source : notre recherche.................................... 122
Figure 22 : Ecarts des degrés de développement des pratiques entre deux entreprises, source :
notre recherche ....................................................................................................................... 123
Figure 23 : Niveaux d’évaluation de l’innovation, source (Diedrichs et al., 2006) ............... 126
Figure 24 : Structure hiérarchique descendante des recommandations à préconiser aux
entreprises, source : notre recherche ...................................................................................... 148
Figure 25 : Calcul des valeurs d’appartenance de l’IIP pour chaque classe d’entreprises
(proactive, préactive, réactive et passive), source : notre recherche ...................................... 159
Liste des tableaux
Tableau 1 : Typologie de l’innovation, source (Garcia et Calantone, 2002) ........................... 32
Tableau 2 : Typologie des modes d’évaluation des performances de l’innovation selon les
indicateurs utilisés, source (Romon, 2006) .............................................................................. 57
Tableau 3 : Nombre de critères observables et de critères qualitatifs de la grille d’observation,
source : notre recherche............................................................................................................ 98
Tableau 4 : Limites des indices d’innovation potentielle (IIP) pour chaque classe
d’entreprises, source : notre recherche ................................................................................... 105
Tableau 5 : Exemple de détermination des pratiques-clés et des poids des pratiques (profil de
préférences) de deux classes, source : notre recherche .......................................................... 111
Tableau 6 : Table servant à visualiser les informations d’une entreprise dans la base de
données, source : notre recherche .......................................................................................... 121
Tableau 7 : Résultats généraux de l’évaluation pour chaque entreprise, source : notre
recherche ................................................................................................................................ 124
Tableau 8 : Profils de préférences des classes d’entreprises (proactive, préactive, réactive,
passive), source : notre recherche .......................................................................................... 124
Tableau 9 : Résumé de l’information obtenue après l’application de la grille d’observation,
source : notre recherche.......................................................................................................... 134
Tableau 10 : Degré de développement des pratiques pour le panel d’entreprises (Evaluation
1), source : notre recherche .................................................................................................... 134
Tableau 11 : Classification initiale des entreprises participantes, source : notre recherche .. 140
Tableau 12 : Constitution successive des classes d’entreprises, source : notre recherche..... 142
Tableau 13 : Evolution de l’IIP des entreprises entre les classifications, source : notre
recherche ................................................................................................................................ 145
Tableau 14 : Profils de préférences des classes d’entreprises et les valeurs-tests
correspondantes, source : notre recherche.............................................................................. 146
Tableau 15 : Comparaison des degrés de développement des entreprises E10 et E13 suivant
les profils de préférences de la classe préactive (A) et de la classe réactive (B), source : notre
recherche ................................................................................................................................ 149
Tableau 16 : Indices d’innovation potentielle (IIP) des entreprises dans les différentes classes
d’entreprises, source : notre recherche ................................................................................... 151
Tableau 17 : Degrés de développement de l’entreprise E18 et poids correspondants dans les
classes proactive et préactive, source : notre recherche ......................................................... 151
- 11 -
Tableau 18 : Valeurs maximales et minimales des pratiques par classe d’entreprises, source :
notre recherche ....................................................................................................................... 152
Tableau 19 : Système innovant de la classe passive, source : notre recherche ...................... 154
Tableau 20 : Système innovant de la classe réactive, source : notre recherche ..................... 155
Tableau 21 : Système innovant de la classe préactive, source : notre recherche ................... 156
Tableau 22 : Système innovant de la classe proactive, source : notre recherche................... 157
Tableau 23 : Description floue des classes d’entreprises (proactive, préactive, réactive et
passive) en fonction des IIP, source : notre recherche ........................................................... 158
INTRODUCTION
- 13 -
Evaluation des processus d’innovation
Introduction générale
De plus en plus, une entreprise pour assurer sa survie dans un environnement en perpétuel
mouvement, doit chercher continuellement à proposer de nouveaux produits, procédés et
services. Elle doit constamment faire face aux changements de son environnement en adaptant
ses processus et son organisation interne aux évolutions externes, aux contraintes ou
opportunités sociales, politiques, environnementales, technologiques et économiques
(Rakotondranaivo, 2006).
C’est tout naturellement que (De Ramecourt et Pons, 2001) affirment : « qui innove
aujourd’hui vivra demain ». Le processus de mondialisation influe sur l’innovation de
plusieurs manières : il accroît la concurrence internationale et il permet de voir le monde
comme un marché large, un flux de biens, de services et de savoirs par delà les frontières et
les interactions internationales (OCDE1, 2005). La capacité à introduire de nouveaux produits
et adopter de nouveaux procédés en premier et dans un temps plus court est devenu un
impératif de compétitivité (Sen et Egelhoff, 2000). De plus, une rapide transformation des
idées de l’entreprise en innovations est aussi une source importante de performance.
« L’entreprise dans les pays industriellement développés comme la France, n’innove ni pour
suivre une mode, ni par goût de l’aventure car l’innovation est toujours risquée, mais parce
que c’est le moyen qui lui paraît le plus efficace pour maintenir sa compétitivité face à une
concurrence devenue mondiale » (Ferney-Walch et Romon, 2006).
L’innovation peut concerner tous les secteurs d’activité de l’entreprise et ne pas se limiter
seulement à la recherche. Nombre de recherches menées dans différents champs disciplinaires
depuis plus d’une vingtaine d’années ont conduit à montrer que l’innovation n’est pas ou
rarement un processus linéaire de R&D alimenté mécaniquement par une recherche
scientifique autonome (Ait-El-Hadj et Brette, 2006). L’activité d’innovation sollicite
quasiment l’ensemble des fonctions de l’entreprise : le service de production, le département
des études et de la recherche, la cellule de marketing et de commercialisation, les opérateurs
1
OCDE : Organisation de Coopération et de Développement Economiques.
Introduction
Les processus innovatifs apparaissent dans les systèmes industriels et non marchands sous la
forme d’actions de pilotage de l’innovation technologique, de pratiques de gestion des
connaissances (knowledge management) et d’opérations visant des changements
organisationnels (Hatchuel et Weil, 2002). Dans ce contexte, les entreprises mettent en œuvre
divers processus et stratégies pour faire face aux nouveaux enjeux de développement. Pour
faire progresser leur processus d’innovation, les entreprises doivent être en mesure de savoir à
tout moment en interne, si les actions menées sont justifiées et si elles disposent des moyens
et ressources suffisantes. C’est donc pour elles une nécessité de pouvoir évaluer leurs actions
de management de même que leur capacité à innover.
Une mesure de la capacité à innover pourrait fournir une base utile aux managers des
entreprises en vue de contrôler et d’évaluer leurs processus d’innovation, de diagnostiquer
leurs limites et d’en prescrire des remèdes (Cebon et Newton, 1999). Ce constat justifie notre
sujet d’étude. Notre cadre de mesure cherche à aller plus loin en permettant aux entreprises de
connaître leur position, leurs forces et faiblesses par rapport à d’autres entreprises
concurrentes.
La mesure du processus d'innovation a été de tout temps une activité critique et un souci
majeur tant pour les praticiens que pour les chercheurs. De telle sorte que la littérature est
caractérisée par une diversité d'approches, de prescriptions et de pratiques qui est parfois
confuse et même contradictoire (Adams et al., 2006). Notre recherche est une contribution
aux travaux internationaux visant à élaborer les principes fondamentaux d’une métrologie de
l’innovation et à apporter des solutions aux besoins en évaluation des industriels. Elle s’inscrit
dans la lignée des travaux réalisés depuis quelques années au sein du laboratoire de recherche
ERPI2, laboratoire pluridisciplinaire de Génie Industriel spécialisé dans l’étude des processus
d’innovation, par (Boly et al., 2000 ; Boly, 2004 ; Corona Armenta, 2005 ; Boly et Morel,
2006 ; Morel, 2007).
Notre travail de thèse est tout d’abord théorique dans la mesure où nous allons réfléchir à la
notion d’évaluation appliquée au processus d’innovation. Il est aussi méthodologique car nous
essaierons de définir une nouvelle approche d’évaluation des entreprises et de proposer une
typologie des entreprises en fonction de leur capacité à innover. Il sera enfin d’ordre
opérationnel puisque nous souhaitons développer un outil permettant d’automatiser cette
évaluation.
2
ERPI: Equipe de Recherche sur les Processus Innovatifs.
- 15 -
Evaluation des processus d’innovation
L’objectif méthodologique de nos travaux de recherche est de mettre au point une démarche
d’évaluation de la capacité à innover. Nous proposons d’utiliser une méthode multicritères
d’aide à la décision (MCDA) combinée à la méthode statistique de la valeur-test pour définir
un indice d’innovation potentielle (IIP) des entreprises et proposer une typologie des
entreprises. Cette typologie des entreprises s’inspire de la classification en quatre classes
d’entreprises (proactive, préactive, réactive et passive) proposée par (Godet, 1997) et adaptée
au contexte de l’innovation par (Corona Armenta, 2005) et (Morel, 2007). Ces classes
d’entreprises définissent l’attitude des entreprises face à l’avenir. Ainsi, en fonction des
caractéristiques des classes d’entreprises, des recommandations appropriées pourront être
proposées aux managers d’entreprises afin d’améliorer leur performance en termes de
capacité à innover. Toute entreprise rangée dans l’une des classes d’entreprises pourra décider
soit de consolider sa position et ses acquis dans sa classe actuelle, soit faire évoluer son
processus d’innovation vers un système plus performant (classe supérieure).
Dans la suite de ce document, nous allons détailler la structure de notre manuscrit que nous
avons construit autour de trois grandes parties.
La première partie présente un état de l’art des différents éléments, méthodes ou approches
proposés dans la littérature pour traiter notre problématique de recherche.
Dans le premier chapitre, nous exposerons quelques enjeux de l’innovation au plan mondial
et son caractère vital pour l’économie moderne des pays.
Dans le second chapitre, nous aborderons la notion d’innovation et plus particulièrement
l’innovation technologique. Nous passerons en revue quelques définitions de l’innovation
ainsi que les typologies de l’innovation exposées dans la littérature. Bien que le terme
d’innovation soit largement vulgarisé, il reste une notion assez difficile à appréhender tant il
est multi-facettes. Nous montrerons également que l’innovation est appréhendée sous forme
de processus puis nous exposerons quelques-unes de ses spécificités, ce qui nous permettra de
définir les règles spécifiques à utiliser pour son évaluation. Ensuite nous clarifierons les
différents niveaux opérationnels d’intervention de l’innovation et nous montrerons qu’à
Introduction
Enfin, nous conclurons de façon générale nos travaux et présenterons des perspectives de
recherches ultérieures.
- 17 -
PARTIE 1 :
Introduction de la partie 1
Les innovations touchent tous les secteurs d’activités et y prennent de plus en plus
d’importance. D’après (Le Masson et al., 2006), « quel que soit le cadre d’analyse retenu,
libéral ou non, solidaire ou non, mondialiste ou non, lui seul permet de concilier approches
sociales et économiques de la croissance ; lui seul permet de lier augmentation du niveau
d’éducation des agents, création de valeur, création d’emploi et pouvoir d’achat accru. Enfin,
l’innovation semble la seule manière de réconcilier, au moins transitoirement, salariés,
managers, consommateurs et actionnaires ! ».
Nous sommes cependant amenés à nous interroger sur les formes et dimensions que peut
prendre l’innovation, son importance pour les personnes, les organisations et les nations, ses
implications, ses aboutissements et bien d’autres utilisations encore. C’est pourquoi la
réalisation d’un état de l’art est nécessaire afin notamment de définir quelques notions
relatives à l’innovation technologique.
Cette première partie de notre travail se structure en plusieurs chapitres. D’abord nous allons
présenter quelques enjeux de l’innovation dans le monde. Le chapitre suivant permettra
d’insister sur l’innovation technologique et ses facettes. Le troisième chapitre sera dédié aux
approches utilisées pour évaluer l’innovation. Finalement, toutes ces notions nous permettront
de formuler notre problématique générale, ainsi que les hypothèses qui en découlent dans un
chapitre 4. Nous soulignons que la problématique sera construite progressivement après
chaque chapitre jusqu’à obtention de la problématique finale.
- 19 -
Evaluation des processus d’innovation
L’innovation n’est pas une mode mais une activité essentielle pour la survie à long-terme des
organisations (Cobbenhagen, 2000). Cependant il existe de très grandes disparités entre les
capacités d’innovation des pays du monde. Nous avons d’un côté les pays du Nord ou pays
industrialisés (Suède, japon, Allemagne, France, Usa, etc.), d’un autre côté les pays émergents
ou pays à économie intermédiaire (Chine, Inde, Brésil, etc.) et enfin les pays en voie de
développement (pays d’Afrique, d’Amérique du sud, etc.).
L’EIS est un outil développé dans le but de fournir une évaluation comparative de la
performance de l’innovation des pays membres de l’Union Européenne (UE). L’EIS 2007
inclut 27 indicateurs d’innovation et des analyses de tendance des 27 pays de l’UE ainsi que
de la Croatie, la Turquie, l’Islande, la Norvège, la Suisse, le Japon, les Etats Unis, l’Australie,
le Canada et Israël. Ces indicateurs ont été regroupés sous 5 grandes dimensions : moteurs de
l’innovation, création de connaissances, innovation & entrepreneuriat, applications et
propriété intellectuelle.
L’analyse des indices d’innovation sommaires (SII4) a permis de repartir les pays dans quatre
groupes5 suivant leur niveau de performance global sur une période de 5 ans :
• Les leaders d’innovation : Suède, Suisse, Finlande, Israël, Danemark, Japon,
Allemagne, le Royaume-Uni et les Etats Unis. Ces pays ont des indices SII largement
au-dessus de la moyenne européenne et de la plupart des autres pays. La Suède a le SII
le plus élevé de tous les pays,
• Le Luxembourg, l’Islande, L’Irlande, l’Autriche, les Pays-Bas, la France, la Belgique
et le Canada sont les grands innovateurs. Ces pays ont des indices SII en dessous de
ceux des leaders en innovation mais supérieurs ou égaux à la moyenne de l’Europe des
27,
• L’Estonie, l’Australie, la Norvège, la République Tchèque, la Slovénie, l’Italie,
Chypre et l’Espagne sont les innovateurs modérés avec des indices SII en dessous de
la moyenne de l’Europe des 27,
• Malte, la Lituanie, la Hongrie, la Grèce, le Portugal, la Slovaquie, la Pologne, la
Croatie, la Bulgarie, la Lettonie et la Roumanie sont les pays émergeants. Bien que
leurs indices SII soient significativement inférieurs à la moyenne de l’Europe des 27,
3
European Innovation scoreboard 2007 : Comparative analysis of innovation performance, PRO INNO Europe
paper N° 6, February 2008.
4
SII (Summary Innovation Index) donne un aperçu rapide de la performance globale de l’innovation nationale,
basé sur un ensemble de 25 indicateurs d’innovation.
5
Ces groupes de pays sont déterminés en utilisant des techniques de classification hiérarchique et des scores SII
sur 5 ans entre 2003 et 2007.
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
Les indices d’innovation sommaires SII des différents pays de l’étude sont représentés sur la
figure 1 ci-dessous.
Figure 1 : Index d’innovation moyens SII 2007, source (PRO INNO Europe, 2008)
La France, avec un indice SII de 0.47, a un niveau de performance global très proche de la
moyenne des pays de l’UE (0.45). C’est aussi le cas sur l’ensemble des indicateurs. Elle est à
la traîne loin derrière les autres grands pays les plus industrialisés du monde que sont les Etats
Unis (0.55), le Royaume-Uni (0.57), l’Allemagne (0.59) et le Japon (0.60) qui sont tous dans
la première catégorie. La Suède est la nation ayant le plus haut niveau de performance avec
un indice SII de 0.73.
Les niveaux de performance de la France sont faibles en ce qui concerne les dépenses de
R&D publique et privée (France : 0.79% et 1.32% du PIB ; Finlande : 0.99% et 2.46% du
PIB ; Suède : 0.92% et 2.92% du PIB), les PME innovantes en interne (France : 19.7% ;
Allemagne : 32% ; Irlande : 37.3%), les PME innovantes coopérant avec d’autres entreprises
(France : 11.5% ; Danemark : 20.8% ; Suède : 20%), le nombre de dessins ou modèles
communautaires par million d’habitants (France : 98.6 ; Allemagne : 202.7 ; Danemark :
240.5) ou encore le nombre de brevets EPO (Office Européen de Brevets) par million
d’habitants (France : 149.1 ; Finlande : 305.6 ; Allemagne : 311.7).
Ces conclusions rejoignent ceux de Jean-Louis Beffa6, président de Saint-Gobain, dans son
rapport rédigé à la demande du président de la république française Jacques Chirac et rendu
6
Tiré du livre de (Prax et al., 2005), pp 12-13. Ce rapport est accessible à l’adresse : http://www.rapport-
jeanlouisbeffa.com.
- 21 -
Evaluation des processus d’innovation
Sur un plan plus global, la situation de l’UE n’est pas non plus reluisante. Malgré les grandes
initiatives prises au niveau de l’UE, l’Europe dans son ensemble a un niveau de performance
largement au-dessous de ses deux grands concurrents que sont les Etats Unis et le Japon, bien
que l’écart se réduise globalement d’années en années (voir figure 2). Sur 15 indicateurs pour
lesquels des données comparables sont disponibles pour les Etats Unis et l’UE, les Etats Unis
sont en avance sur 11 indicateurs. Le Japon de son côté est en avance sur 12 des 14
indicateurs comparables avec ceux de l’UE. Nous pouvons nous rendre parfaitement compte
des grands efforts que doivent faire les 27 pays de l’Union Européenne pour combler leur
retard et se hisser au niveau de leurs concurrents. De plus, l’UE est en retard sur les Etats Unis
et le Japon sur les investissements consacrés à la recherche ainsi que les performances
techniques et scientifiques qui en résultent.
Figure 2 : Ecart d’innovation de l’UE par rapport aux Etats Unis et au Japon, source (PRO
INNO Europe, 2008)
Pour combler son retard, le conseil de l’Europe, réuni à Barcelone en 2002, s’est fixé
l’objectif de faire passer les investissements globaux de la recherche dans l’union de 1.9% du
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
PIB à 3% à l’horizon 2010 et de faire passer la proportion des investissements privés dans la
recherche de 55% à 2/3. Ces objectifs doivent passer notamment par :
• Une reforme en profondeur de la recherche publique des pays membres et de leurs
systèmes d’innovation,
• La facilitation des partenariats entre le privé et le public,
• La mise en place d’un environnement de régulation favorable.
C’est le cas du projet PRO INNO7 initié par l’UE et qui a pour but d’encourager la
coopération transnationale entre les agences et programmes d’innovation par : la création de
plateformes d’apprentissage d’innovation, par le soutien à la création de réseaux d’innovation
et par le soutien d’initiatives d’innovation transnationales spécifiques et des partenariats entre
le privé et le public.
C’est également le cas de l’initiative Europe INNOVA qui est une famille de projets
d’innovation par secteur d’activité. Elle réunit des analyses et des expériences pratiques en
vue d’évaluer les activités d’innovation par secteur d’activité. Elle inclut des réseaux de
clusters industriels et d’acteurs de financement de l’innovation par secteur d’activité, des
comités d’innovation composés d’experts, d’universitaires et de décideurs pour valider les
conclusions de projets et dresser des recommandations.
Pour renforcer la dynamique des régions, elle a mis sur pied les initiatives de régions de
connaissances (Regions of Knowledge) qui supportent l’apprentissage et la coopération
mutuelles transnationales entre les clusters conduisant la recherche, en rassemblant les
autorités régionales et les agences de développement, les organisations publiques de
recherche, l’industrie et autres actionnaires pertinents sont mises en place.
L’ensemble des pays de l’union a fait d’énormes efforts pour atteindre les objectifs fixés,
cependant ces efforts ne devraient pas dépasser la barre de 2.6% en 2010 car l’intensité de la
recherche évolue moins vite que le résultat escompté.
La modernisation du modèle économique s’impose comme une évidence pour l’UE mais
également pour les autres grandes nations industrialisées dont les Etats Unis et le Japon. A ce
propos, (Ferney-Walch et Romon, 2006) déclarent « La façon la plus efficace, pour les
entreprises des pays industriellement développés, comme la France, de s’adapter à une
économie mondiale de plus en plus intégrée, est de miser sur l’innovation en valorisant leur
capacité technologique : les innovations de produits pour stimuler la demande en lançant sur
le marché des produits nouveaux et les innovations de procédés pour améliorer les processus
de production existants. C’est en même temps la façon la plus juste de donner aux pays sous-
développés leur chance d’accéder à un meilleur niveau de vie, en les laissant nous
concurrencer sur les activités reposant sur des technologies de base ».
7
Commission of European Communities, More Research and Innovation - Investing for Growth and
Employment : A Common Approach, 12/10/2005, Brussels.
- 23 -
Evaluation des processus d’innovation
Les pays en voie de développement (pays sous-développés ou pays du sud) ne sont pas en
reste. Ils sont majoritairement à la traîne dans pratiquement tous les domaines par rapport aux
pays industrialisés et ont plus que jamais besoin d’innover pour se moderniser. Beaucoup de
pays du sud ont une réalité et un tissu économique à construire entièrement tellement ceux-ci
sont archaïques et rudimentaires. Ces pays sont donc moins armés pour faire face aux
nouveaux défis de développement par rapport aux pays développés et industrialisés.
Le fossé entre les deux mondes est aujourd’hui assez grand, ce qui influe sur les priorités et
les politiques de développement. (Thorne, 2008), en parlant du développement durable,
déclare : « actuellement dans les pays sous-développés, le développement durable est assimilé
au développement à cause des besoins économiques et sociaux. Dans les pays industrialisés,
le développement durable est assimilé à la protection de l’environnement. »
Les pays du sud sont moins les instigateurs des innovations. Dans la plupart des cas, ils
procèdent par transfert d’innovations. Cependant bien que la plupart des innovations
proviennent des pays du Nord (industrialisés), il existe des activités d’innovation
substantielles dans beaucoup de pays du sud, mesurées à partir des applications de brevets
(Chen et Puttitanun, 2005).
Depuis quelques années certains pays comme la Chine, l’Inde ou le Brésil et bien d’autres
commencent à émerger à grands pas et à menacer la position de l’union européenne. Ces pays
commencent à constituer aujourd’hui des tissus industriels capables de rivaliser avec les
meilleures entreprises occidentales. Le bureau d’Etat des Statistiques (BES) à Beijing8 a
annoncé le jeudi 26 juin 2008 que « le produit intérieur brut (PIB) de la Chine s'est établi à 24
660 milliards de yuans (3 430 milliards de dollars) en 2007, en progression de 11,4 % sur un
an » et cette dynamique n’est pas prête de s’arrêter.
Les pays du sud ont souvent un niveau de développement spectaculaire, du fait d’un contexte
économique plus favorable et à la faveur d’une saturation dans les pays du Nord. En effet, on
assiste depuis quelques années au transfert des activités manufacturières de l’Occident vers
les pays à faible coût de main d’œuvre du fait de la mondialisation et ce phénomène continue
de s’accentuer. Il faut aussi relever que « la mondialisation a des conséquences bien plus
profondes que la seule délocalisation d’ateliers de manufacture. Elle plonge les entreprises
dans une nouvelle arène où la compétition ne se joue plus seulement au niveau des
performances des produits, mais aussi sur l’efficacité globale de leur Innovation » (Maurer,
2006).
Aujourd’hui encore beaucoup de pays du sud ne bénéficient pas assez ou presque pas de la
protection des DPI. Selon (Helpman, 1993), cela est dû en partie aux effets des accords
commerciaux défavorables et de la diminution du taux d’innovations des pays du Nord dans
8
http://www.chine-informations.com/actualite/chine-le-pib-en-croissance-de-en_8555.html
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
le temps. Or les questions de DPI en matière d’échanges commerciaux ont toujours été l’un
des éléments clé dans les négociations de l’OMC9 et le fait d’augmenter les DPI est une des
conditions pour les pays en voie de développement d’y accéder (Maskus, 2000). La tendance
tend à s’inverser dans tous les domaines, ce qui contribue à augmenter le niveau de
compétition mondiale et aussi à renforcer le nombre d’innovations produites et donc à la
croissance économique. D’autant plus qu’une croissance économique rapide peut à coup sûr
être utilisée pour réduire la pauvreté (Cook et Uchida, 2008).
En conclusion l’innovation technologique est importante pour tous les pays du monde, qu’ils
soient industrialisés ou en voie de développement. Son renforcement contribue à rehausser le
niveau de compétition entre états, mais aussi entre les organisations (entreprises, collectivités
locales, etc.) qui les composent. Mais, que savons-nous réellement de l’innovation ?
9
OMC : Organisation Mondiale du Commerce
- 25 -
Evaluation des processus d’innovation
L’innovation est de plus en plus présente dans tous les domaines d’activités. Elle est reconnue
aujourd’hui dans tous les discours (grand public, médias, dirigeants politiques, etc.) comme
étant une source importante de progrès scientifique et technique et d’accroissement des
connaissances, savoirs et savoir-faire et de succès commercial.
Il parait important de bien la définir pour comprendre toutes ses particularités et aussi de
savoir pourquoi elle est devenue si importante à tous les niveaux. Précisons que notre étude se
focalisera particulièrement sur l’innovation technologique à l’échelle de l’entreprise.
L’innovation est tout de même une notion assez difficile à appréhender tant elle est multi-
facettes et polymorphique. Par conséquent, le constat est qu’il existe dans la littérature
scientifique une grande abondance de définitions en ce qui concerne le concept d’innovation,
de même qu'un grand nombre de typologies ou de degrés d’innovations sont proposés.
(Garcia et Calantone, 2002) dans leur revue de la littérature, relèvent que « le processus
d’innovation a été identifié pour des innovations radicales, incrémentales, vraiment nouvelles,
discontinues et imitatives, aussi bien que pour des innovations architecturales, modulaires,
améliorantes et évolutionnaires ». Ce qui résulte en une ambiguïté et un manque de cohérence
dans l’étiquetage et l’identification des innovations et a abouti à des catégorisations non
conformes, car utilisant les mêmes noms pour des types d’innovations différents ou encore
classifiant la même innovation sous différentes typologies. Ainsi une innovation qu’un
chercheur nomme « réellement nouvelle » est considérée comme étant ‘radicale’ ou
‘discontinue’ par un autre. Les auteurs soulignent aussi qu’il n’existe pas de délimitation
cohérente entre ‘haut’, ‘modéré’ ou ‘bas’ degré d’innovativité et si ces degrés d’innovativité
sont liés aux catégories d’innovations ‘radicales’, ‘réellement nouvelles’ et ‘incrémentales’ ou
à toute autre typologie. Cela peut s’expliquer par le fait que les concepts utilisés dans l’étude
du phénomène d’innovation ne sont pas toujours définis de manière précise (Eris et
Saatcioglu, 2006).
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
Les définitions de l’innovation varient en fonction du contexte dans lequel il est utilisé. Ainsi
(Bayerre, 1980) propose de considérer trois contextes dans lesquels le terme innovation est
utilisé :
1. Le processus global de création,
2. L’adoption d’une nouveauté par une société,
3. La nouveauté elle-même.
A chacune de ces approches convient une définition de l’innovation puisqu’elles se situent sur
des plans différents. La première évoque la création de l’innovation, la seconde son utilisation
et la dernière l’innovation en tant que le résultat d’une maturation sans que l’on se préoccupe
de sa mise en œuvre.
L’innovation, dans son sens commun, concerne les nouvelles techniques, les nouveaux
produits, les nouveaux services ou encore les nouveaux procédés. Elle est définie par
l’économiste (Schumpeter, 1934) comme étant l’introduction sur le marché d’un nouveau
produit et d’une nouvelle méthode de production, la conquête d’un nouveau marché,
l’utilisation de nouvelles matières premières ou la mise en place d’une nouvelle forme
d’organisation.
Cette définition a été reprise par l’OCDE dans le manuel d’Oslo : « L’innovation peut être
vue comme la mise en œuvre d’un produit (bien ou service), d’un procédé nouveau ou
sensiblement amélioré, d’une nouvelle méthode de commercialisation ou d’une nouvelle
méthode organisationnelle dans les pratiques de l’entreprise, l’organisation du lieu de travail
ou les relations extérieures » (OCDE, 2007). Les cinq aspects de l’innovation proposés par
Schumpeter sont concentrés dans la définition de l’OCDE sous les quatre notions : nouveau
produit, nouveau procédé, nouvelle organisation ou innovation de commercialisation. Sous cet
angle, une firme sera considérée innovante si elle a mis en œuvre au moins une innovation
pendant une période donnée. Selon l’OCDE, « le critère minimum pour qu'un changement
apporté aux produits ou aux fonctions d’une firme soit considéré comme une innovation est
qu’il doit être "nouveau pour la firme" (ou entraîner une nette amélioration) ». Cette notion
englobe les produits, les procédés et les méthodes que les firmes sont les premières à mettre
en point et ceux qu’elles ont importés d’autres firmes ou organisations. La notion de
nouveauté se décline sous trois formes : nouveauté pour l’entreprise, nouveauté pour le
marché et nouveauté pour le monde entier.
- 27 -
Evaluation des processus d’innovation
Dans notre étude, nous nous limiterons aux innovations technologiques (bien que
l’innovation puisse être organisationnelle, commerciale…). En effet, ce sont actuellement ces
innovations qui font l’objet de nombreuses mesures (C.E.S. Lorraine, 2004).
De plus en plus, la technologie prend une part importante dans les activités d’innovation et
par conséquent dans le résultat de l’innovation. La technologie joue un rôle double dans le
processus d’innovation technologique ; elle est aussi bien le résultat du processus
d’innovation que son principal input (Nieto, 2004). Pour (Eris et Saatcioglu, 2006), « les
concepts de changement, de compétition et de stratégie ont eu davantage d’importance au
cours des années 1980 et l’innovation technologique est devenue le plus important moteur de
la société depuis les années 1980. Pourtant l’innovation technologique n’est pas un nouveau
phénomène qui a subitement émergé dans le cadre de l’ère spatial ».
La technologie est définie dans le Petit Larousse Illustré 2004 comme l’« étude des outils, des
machines, des techniques utilisés dans l’industrie » ou l’ « ensemble de savoirs et pratiques,
fondé sur des principes scientifiques, dans un domaine technique » ou encore une « (souvent
abusif) technique ». (Burgelman et al., 2004) la définissent comme « des connaissances
théoriques et pratiques, des compétences et des artéfacts qui peuvent être utilisés pour
développer des produits et services, aussi bien que leurs systèmes de production et de
distribution. La technologie peut être incorporée dans des personnes, des matériaux, des
processus cognitifs et physiques, des plantes, des équipements et des outils ».
Pour (Khalil, 2000), « la technologie peut être définie comme les connaissances, les produits,
les procédés, les outils, les méthodes et les systèmes employés dans la création de biens ou
dans la fourniture de services. En terme simple, la technologie est la manière dont nous
faisons les choses. Ce sont les moyens par lesquels nous réalisons nos objectifs ».
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
Dans la définition de la technologie proposée dans le Petit Larousse Illustré, les termes de
technique et de technologie sont souvent confondus et c’est aussi le cas dans la littérature sur
le management de l’innovation. (Aït-El-Hadj, 2002) apporte des éclairages sur les différences
entre ces deux termes. Pour l’auteur, le terme technique renferme les notions de savoirs, de
systèmes et de processus destinés à la transformation de la nature. La technologie par contre
se définit comme « l’ensemble des savoirs et des modes de connaissance concernant la
Technique ou un domaine spécifique de celle-ci » ou « la construction des lois concernant
l’ensemble de l’activité technique ». La technologie peut-être ainsi perçue comme
« l’organisation du monde des artefacts techniques qui possède ses lois de composition et de
mouvement propres ».
Au cours des dernières années, le management de l’innovation technologique est devenu l’un
des domaines d’étude les plus attractifs et prometteurs dans le domaine du management et
critique pour les entreprises en vue d’atteindre et de maintenir leur avantage concurrentiel
(Eris et Saatcioglu, 2006). Nous pouvons définir une innovation technologique comme une
innovation basée sur une nouvelle technologie ou une innovation facilitée par l’utilisation
d’une nouvelle technologie ou encore une innovation à laquelle nous avons apporté des
améliorations technologiques.
On peut se rendre compte que la notion de nouveauté est une caractéristique majeure de
l’innovation et de son processus. L’innovation permet de générer de la valeur basée sur la
nouveauté (nouveau savoir, nouvelle technologie, nouveau procédé de fabrication, etc.).
Cependant cette nouveauté dépend de la perception de l’entité qui reçoit l’innovation (Ferney-
Walch et Romon, 2006). En effet, une innovation qui peut être perçue par un utilisateur
(individu, entreprise, etc.) comme ayant un très haut degré de nouveauté, peut l’être moins
pour une autre entité.
Cela nous emmène à nous pencher sur les degrés de nouveauté en innovation technologique
définis dans la littérature. Différentes approches sont utilisées dans les tentatives de
propositions de typologies.
- 29 -
Evaluation des processus d’innovation
L’innovation incrémentale porte essentiellement sur une amélioration des produits (procédés
ou processus existants). Cette amélioration peut concerner la technologie utilisée pour
concevoir le produit ; elle peut aussi toucher quelques aspects des produits tels que la forme,
la couleur ou encore l’esthétique.
L’innovation radicale peut se définir comme la création et la mise sur le marché de produits,
procédés ou processus nouveaux, différents de ceux de la gamme existante. Ce type
d’innovation repose essentiellement sur une nouvelle invention.
(Veryzer, 1998) a proposé deux dimensions pour délimiter les différents degrés d’innovations
de produits (voir figure 3) :
• La dimension « capacité technologique » qui réfère au degré de développement des
capacités technologiques dans le produit au-delà des frontières existantes,
• La dimension « capacité produit » qui réfère aux avantages du produit perçus par le
client ou l’utilisateur.
En analysant les produits suivant ces deux dimensions (produit, technologique) et en faisant
varier leur degré d’intensité (niveau identique ou amélioré pour la dimension produit, niveau
identique ou évolué pour la dimension technologique), l’auteur obtient quatre types
d’innovations :
• Les innovations continues : ce sont les produits qui utilisent les technologies existantes
et produisent les mêmes bénéfices que les produits existants,
• Les innovations commercialement discontinues : ce sont les produits qui sont perçus
par les clients comme réellement nouveau, peu importe l’utilisation de nouvelles
technologies,
• Les innovations technologiquement discontinues : ce sont les produits caractérisés par
un changement considérable dans la technologie utilisée et ayant peu évolué par
rapport aux produits existants du point de vue du client,
• Les innovations technologiquement et commercialement discontinues : ce sont les
produits utilisant une technologie significativement nouvelle et qui sont fortement
appréciés par le client.
Capacité produit
Identique Amélioré
Commercialement
Identique Continu discontinu
Capacité
technologique
Technologiquement
Technologiquement et commercialement
Évolué discontinu discontinu
Geroski et Markides10, dans leur ouvrage Fast second, ont proposé une typologie qui respecte
la même logique que l’approche de Veryzer et s’appuie sur l’impact de l’innovation sur deux
dimensions :
• Les compétences et les actifs des firmes établies,
• Les habitudes et les comportements des consommateurs.
Innovation Innovation
Majeur
Impact de majeure radicale
l’innovation sur les
habitudes et les
comportements des
consommateurs Innovation Innovation
Mineur incrémentale stratégique
Renforce Détruit
Figure 4 : Typologie des innovations proposées par Geroski et Markides, source (Prax et al.,
2005)
L’analyse de l’innovation sur ces deux dimensions donne quatre types d’innovations :
• L’innovation incrémentale : elle s’appuie sur les compétences et les actifs des acteurs
déjà existants et son impact sur les habitudes des consommateurs est faible,
• L’innovation majeure : elle a un impact fort sur les habitudes des consommateurs, sans
remettre en cause les compétences des acteurs établies,
• Les innovations stratégiques : elles remettent en cause, voire détruisent les
compétences et les actifs accumulés pendant de longues années, avec un impact sur les
habitudes des consommateurs limité,
• L’innovation radicale : elle met en danger les compétences et les actifs des firmes
établies et déclenche un impact majeur sur les habitudes des consommateurs.
10
Tiré du livre de (Prax et al., 2005), pp 49-50.
- 31 -
Evaluation des processus d’innovation
• La perspective macro versus micro : dans une perspective macro, les caractéristiques
de l’innovation, son impact et son degré d’innovativité sont nouveaux et ressentis par
le monde, l’industrie ou encore le marché. Dans une perspective micro, l’innovation
doit être vue comme étant nouveau pour l’entreprise ou pour ses clients,
• La discontinuité marketing versus technologique : dans une perspective marketing,
une innovation peut nécessiter de nouveaux marchés pour évoluer et/ou de nouvelles
aptitudes marketing pour l’entreprise. D’un autre côté, elle peut nécessiter un
changement de paradigme dans le domaine des sciences et de la technologie utilisée
dans la fabrication du produit, de nouvelles ressources R&D et/ou de nouveaux
process de production pour l’entreprise.
En se basant sur ce schéma d’analyse, Garcia et Calantone proposent une classification des
innovations basée sur des combinaisons d’éléments de ces deux dimensions :
• Les innovations radicales : ce sont les innovations dont l’introduction résulte en une
discontinuité aux niveaux macro et micro, ainsi que technologie et marketing. Pour
(Develan, 2006), une entreprise au 21e siècle, doit impérativement lancer une
innovation de rupture à peu près tous les 5 à 10 ans sous peine de déclin ou de
disparition,
• Les innovations vraiment nouvelles : elles produisent au niveau macro une
discontinuité soit marketing, soit technologique mais pas les deux simultanément (si
une innovation provoque des discontinuités dans les deux directions, elle sera
classifiée comme une innovation radicale et si aucune discontinuité n’apparaît au
niveau macro, elle sera classifiée incrémentale) et au niveau micro toute combinaison
de discontinuité marketing et/ou technologique,
• Les innovations incrémentales : ce sont les innovations qui produisent seulement des
discontinuités au niveau micro en affectant le marketing et/ou la technologie.
Ainsi les produits extrêmement innovants seront classés comme des innovations radicales, les
produits moyennement innovants comme des innovations réellement nouvelles et les produits
faiblement innovants comme des innovations incrémentales. Il est à noter que les autres
typologies ne sont que des variantes de ces trois types d’innovations que nous venons de
présenter. Les différentes combinaisons réalisables sont représentées dans le Tableau 1 ci-
dessous :
Une étude plus récente réalisée par (Cheng et Shiu, 2008) propose une typologie en 3
catégories. En plus des deux innovations traditionnelles que sont les innovations radicales et
incrémentales, ces auteurs identifient les ré-innovations qui sont renommées pour leur
potentiel à créer un avantage compétitif tout en réduisant les coûts et les temps de réalisation.
Les produits ré-innovés sont créés à partir de produits précédents qui ont été ou sont
commercialement réussis ; leur création nécessite de nouvelles plateformes, de nouveaux
composants ou de nouvelles configurations avec des percées technologiques par rapport aux
produits ou procédés de fabrication précédents.
Pour les auteurs, les innovations ré-innovés sont un type d’innovation à part entière. Par
conséquent, elles sont différentes des innovations radicales et incrémentales.
Les différences entre ré-innovations et innovations incrémentales portent sur deux aspects :
• Les produits incrémentaux sont améliorés en utilisant des technologies incrémentales
alors que les produits ré-innovés peuvent utiliser des technologies de rupture,
• Les produits incrémentaux doivent être basés sur les plateformes existantes tandis que
les produits ré-innovés sont soit (la plupart) basés sur de nouvelles plateformes soit
(occasionnellement) sur une plateforme existante.
Les produits radicaux et ré-innovés se distinguent également sur deux aspects :
• Les produits radicaux sont fortement incertains à réaliser et impossible à prédire à
l’avance, tandis que les produits ré-innovés sont plus certains à réaliser,
- 33 -
Evaluation des processus d’innovation
• Les produits radicaux mettent un temps considérable à être réalisés, ce qui n’est pas le
cas des produits ré-innovés qui prennent un temps plus court du fait que l’entreprise
est plus familiarisée avec les process de développement de ces produits.
En conclusion de cette partie, nous pouvons nous rendre compte à travers cette revue de la
littérature de l’existence d’une grande diversité de typologies pour définir les degrés
d’innovation. Cette diversité de typologies rend difficile la proposition d’une typologie
heuristique fédératrice de toutes les typologies proposées et participe à la complexité dans la
compréhension de l’innovation. Une harmonisation des typologies pourrait permettre de
mieux faire avancer la recherche dans le domaine du développement de nouveaux produits et
éviter les multitudes de recherches différentes sur les mêmes champs d’investigation.
Selon (Le Masson et al., 2006), l’innovation se prête tout particulièrement à la notion de
processus, car elle mobilise de nombreuses fonctions et métiers au sein des organisations,
parfois sur plusieurs projets en parallèle. Seule une vision consolidée sous forme de processus
peut répondre à une telle gestion des risques liés à l’innovation.
Un processus peut être défini de façon large comme un ensemble d’activités corrélées ou
interactives qui transforme des éléments d’entrée en éléments de sortie. Ainsi toute activité
gérée de manière à permettre la transformation d'éléments d'entrée en éléments de sortie en y
apportant une valeur ajoutée, peut être considérée comme un processus (David, 2004).
De nombreux auteurs s’accordent pour dire que l’innovation est un processus itératif et
évolutif. C’est le cas de (Utterback et Abernathy, 1975) qui définissent le caractère itératif du
processus d’innovation en développement de nouveaux produits par le fait que « les produits
seront développés dans le temps selon une manière prédictible avec une insistance initiale sur
les performances du produit, puis une insistance sur la variété de produits et enfin une
insistance sur la standardisation et les coûts du produit. ». L'innovation peut être aussi perçue
comme un processus interactif entre plusieurs individus et départements dans l'entreprise mais
aussi s’étendre à l’interaction à des partenaires de coopération externes (Koschatzky, 2001).
C’est un processus itératif qui met en jeu les relations de la firme avec les agents de son
environnement.
L’OCDE, dans son étude sur les innovations technologiques en 1991, a définit l’innovation
comme étant « un processus itératif initié par la perception de l’opportunité dans un nouveau
marché et/ou un nouveau service pour une invention technologique et qui mène à des tâches
de développement, de production et de marketing, entraînant un succès commercial de cette
invention » (OCDE, 1991). Cette dernière définition met l’accent sur deux points essentiels :
• Le processus d’innovation comprend le développement technologique d’une invention
combinée à sa mise sur le marché jusqu’à son arrivée à l’utilisateur final, en passant
par l’adoption et la diffusion,
• Le processus d’innovation est itératif par nature et sous-tend une première introduction
de l’innovation et le développement ultérieur d’améliorations.
Cette définition de l’OCDE fait une distinction entre l’invention et l’innovation. L’invention
représente l’une des phases amont du processus d’innovation et sa mise sur le marché sous la
forme d’un produit réussi en fera une innovation.
Outre les caractères évolutif et itératif de l’innovation, certains auteurs insistent sur la valeur
cognitive de l’innovation. Pour (Bienaymé, 1994), c’est un processus dans lequel les
innovateurs changent leur manière de penser, de concevoir et fabriquer de nouveaux produits.
(Boly, 2004) abonde dans ce sens en affirmant que l’innovation est un mécanisme par lequel
les concepteurs se créent de nouvelles représentations de l’objet ; c’est aussi un processus de
multiplication des modes de raisonnement et de pensée des acteurs. Par conséquent
l’innovation induit une rupture de paradigmes. En effet, innover c’est penser différemment,
- 35 -
Evaluation des processus d’innovation
L’innovation reste avant tout un processus intentionnel d’acteurs qui visent à faire évoluer
leurs pratiques ou à répondre à des besoins latents. Cette thèse est appuyée par (Bary, 2002)
pour qui l’innovation est « un processus intentionnel de changement par l’introduction d’une
nouveauté relative à un contexte et ressentie comme telle par les sujets, qui consiste en
l’agencement original d’éléments préexistants. C’est un agir social finalisé. Social car c’est
une action collective qui implique la communication/collaboration entre les acteurs. Finalisé
au double sens où a) il est sous-tendu par des valeurs d’amélioration et de progrès ; et b) il est
orienté vers l’action et la mise en œuvre opérationnelle des idées ayant présidé à son
démarrage ».
La création se manifeste de plusieurs façons sur les marchés et dans l’entreprise (nouveaux
procédés de production, nouveaux savoirs, etc.). Elle est parallèlement et nécessairement
destructrice, dans ce qu’elle implique de renoncements à des méthodes, à des organisations, à
des champs technologiques (Dubuisson et Kabla, 1999).
Performance
technique
Discontinuités
Limites
d’évolution
Taux de progrès Saturation
maximum produit
Progression lente :
manque de connaissances Effort en
Recherche /
Marketing
Le processus d’innovation peut être décrit comme la réussite de la construction d’un système
d’interactions, que l’on peut qualifier d’écosystème (Portnoff et Joyeux, 2006). C’est un
système d’acteurs en interactions multiples créant de la valeur pour chacun des membres et
pour son environnement (voir figure 6 ci dessous). Cette création étant positive ou négative
selon les cas et correspondant toujours à une valeur perçue, peut être étendue à l’analyse de la
capacité d’une organisation à vivre et se développer. Selon les auteurs, « le porteur de l’idée
innovante doit établir des relations positives avec des apporteurs de compétences
complémentaires, avec des conseillers, des financiers, des acteurs capables de l’aider à
développer, finaliser, réaliser son idée, la faire connaître, toucher des clients potentiels, les
convaincre. Lorsque l’innovation est sur le marché, sa résistance aux ripostes des concurrents
dépendra largement de l’écosystème que l’on aura su constituer autour d’elle ».
- 37 -
Evaluation des processus d’innovation
Vision Capital
Valeur d’intelligence
Capital
Volonté collective
des relationnel
dirigeants
Capital
organisationnel Capital financier
Règles écrites et capital matériel,
tacites infrastructures
Figure 6 : Modélisation dynamique de la création de valeur par une organisation dans son
environnement, source (Portnoff et Joyeux, 2006)
L’innovation peut être aussi caractérisée de processus de création de valeur (Morel, 1998).
Pour (Taravel, 2004) « L’innovation est étroitement liée à l’augmentation de la valeur de
produits industriels et de service. Or, cette valeur est caractéristique du temps. Plus elle fait
progresser la part immatérielle du produit, plus elle croit ». C’est cette spécificité de
l’innovation qui la différencie de l’invention selon (Garcia et Calantone, 2002).
(Boly, 2004) appuie cette thèse en affirmant que la valeur d’une innovation est la résultante de
huit composantes :
• Financière : marge générée,
• Stratégique : avantage vis-à-vis des concurrents,
• Intellectuelle : connaissances nouvelles, savoirs et savoir-faire nouveaux,
• Commerciale : parts de marché,
• Fonctionnelle : avantages techniques, service supplémentaire,
• Liée au degré de nouveauté : produit beaucoup plus innovant aux yeux du client,
• Liée à la notoriété : renforcement de l’image de l’entreprise,
• Hédoniste : plaisir et motivation des acteurs du processus d’innovation.
L’innovation est aussi qualifiée de processus permanent et dynamique dans lequel les
innovateurs font évoluer sans cesse leurs produits et procédés, leurs modes de raisonnement et
de représentation et collectent de nouveaux savoirs qui viennent alimenter le processus
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
(Morel, 1998). Ce processus est nécessairement récursif car les processus passés ou en cours
viennent sans cesse enrichir les projets futurs de l’entreprise.
L’innovation rime avant tout avec incertitude. L’incertitude dans les processus d’innovation
est due à plusieurs facteurs dont les performances techniques des outils et méthodes à notre
disposition et de l’attitude du marché. Un projet d’innovation est un projet dont par nature on
ne peut à l’avance prévoir avec exactitude la forme, les résultats et les effets. C’est un projet
avec une réalité à construire et dont la trajectoire voulue et espérée au départ peut être
modifiée en cours de route.
Pour (Boly, 2004), l’incertitude réside dans l’impossibilité de décrire avec précision des
événements qui ne se sont pas encore produits et aussi dans l’imprécision de notre maîtrise
des faits et à notre compréhension des phénomènes qui sont générés. Cela peut être dû aux
moyens techniques, humains et financiers insuffisants ou devenus trop importants à supporter,
à la défection ou la perte de personnels scientifiques qualifiés, à l’infaisabilité technique des
solutions envisagées, à la découverte de nouvelles données ou de nouvelles technologies qui
peuvent poussent l’entreprise à adopter une autre stratégie, aux coûts de développement
devenus trop importants pouvant contraindre les décideurs à adopter de nouvelles solutions
pour réduire les coûts ou à mobiliser des ressources supplémentaires, aux retards dans les
délais prévisionnels, etc.
L’incertitude du processus d’innovation est d’autant plus grande que son degré d’innovation
est élevé. Cela rejoint l’affirmation de (Ferney-Walch et Romon, 2006) pour qui « plus
l’innovation est radicale, plus l’incertitude est grande, tant sur la faisabilité technique et donc
sur le coût de développement, que sur la faisabilité économique et donc sur la marge
commerciale ou le gain de productivité attendu du projet ».
Tout au long d’un processus d’innovation, les acteurs sont confrontés à plusieurs
interrogations sur les aboutissements du processus. Les questions que l’on peut se poser sont
de cet ordre : le marché va t-il accepter les produits conçus ? Les efforts de recherche vont-ils
aboutir à de nouvelles idées ? Les prototypes obtenus sont-ils réalisables avec les moyens de
production actuels ?
L’incertitude peut conduire au doute et au manque de confiance et donc amener les firmes à
hésiter à mettre en œuvre des changements importants même si elles sont confrontées à une
conjoncture instable accroissant les pressions pour le lancement de nouveaux produits, la
recherche de nouveaux marchés et l’introduction de technologies, de pratiques et de méthodes
d’organisation nouvelles dans leurs processus de production (OCDE, 2005). Cependant selon
(Midler, 1998), le plus grand risque serait de ne pas en prendre ».
- 39 -
Evaluation des processus d’innovation
L’innovation est source de risques multiples, de son financement jusqu’à son exploitation
rentable. Les résultats (les profits réalisés ou la perte subie) ne peuvent être connus à l’avance.
De ce fait, le processus d’innovation est un processus hasardeux pour celui qui la finance, car
lui non plus n’a pas la certitude de gagner plus ou même de récupérer ses avances (Laperche,
2003). Le processus d’innovation peut déboucher sur de nouvelles pistes auxquelles personne
n’avait pensé avant son lancement et qui peuvent influer sur les plans initiaux. Le projet initial
peut ainsi déboucher sur plusieurs autres projets dans le temps.
Il est certain que le processus d’innovation est incertain et comporte un risque évident, ce qui
pousse de nombreuses organisations à décider de ne pas innover, même si les bénéfices
promis semblent attrayants. Cependant, à moins que les organisations soient prêtes à
renouveler leurs produits et processus sur une base continue, leurs chances de survie sont
sérieusement mises en danger (Tidd et al., 2006). Même si elle garde son caractère incertain et
risqué, l’innovation est partout omniprésente. Son management nécessite vision et créativité et
pas seulement rigueur et contrôle (Romon, 2006). Même si elle peut surgir par hasard,
l’innovation, en tant que processus développé par l’entreprise, se pense, s’organise et se gère.
La question de la prise de risque dans les entreprises doit désormais se poser en termes de
moyens de réduction du risque encouru mais aussi de la récompense de cette prise de risque.
L’innovation est aussi un processus complexe à piloter. Cette assertion est appuyée par Giget
pour qui « La réussite du processus d’innovation est un phénomène complexe et difficile, qui
fait appel au meilleur des compétences et des ressources de l’entreprise » (Giget, 1994).
(Galanakis, 2006) relève que plusieurs théories ont été développées pour permettre aux
managers de piloter l’innovation dans leur entreprise. Ces théories provenant de différentes
perspectives basées sur le management, l’économie ou les sciences sociales, rendent le
processus d’innovation complexe. Cette complexité pousse souvent les managers à prendre
des décisions dont les résultats finaux s’avèrent être contradictoires avec leurs objectifs
originaux.
Cette perspective avait déjà été développée par (Khalil, 2000) qui a définit le processus
d'innovation technologique comme étant un « ensemble complexe d'activités qui transforme
les idées et la connaissance scientifique en une réalité physique et des applications du monde
réel. C'est un processus qui convertit la connaissance en produits et services utiles qui auront
un impact socio-économique. Il requiert l’intégration d’inventions et de technologies
existantes pour conduire les innovations sur le marché ». Selon l’auteur, le processus
d’innovation technologique comporte huit phases. Certaines activités à l’intérieur de ces
phases peuvent se chevaucher. Ces phases sont :
• La recherche fondamentale : c’est la recherche en vue d’augmenter notre
compréhension des lois de la nature. C’est le processus de génération de connaissances
sur une longue période de temps,
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
11
AFNOR : Association Française de NORmalisation
- 41 -
Evaluation des processus d’innovation
En conclusion de cette partie, nous constatons que bon nombre d’auteurs considèrent
l’innovation sous la forme d’un processus qui est qualifié de complexe, incertain et risqué.
Tous ces attributs font de l’innovation un sujet spécifique à traiter, à maîtriser et à aborder tant
par les chercheurs que par les industriels. Cet état de l’art nous apparaît indispensable car, des
spécificités des processus d’innovation, doit émergé une spécificité des démarches
d’évaluation. De plus, la littérature abonde d’objets (ou entités) sur lesquels porte l’étude de
l’innovation et elle semble imprécise à qualifier les niveaux d’intervention qui s’offrent aux
décideurs dans le pilotage du processus d’innovation. L’objectif de notre étude étant
d’évaluer ou mesurer les processus d’innovation, il est important de clarifier les contours
de l’entité à évaluer, ce que nous tenterons de faire dans le chapitre suivant.
Pour s’en assurer, certains auteurs comme (Schumpeter, 1934) insistent sur les notions de
nouveau produit et/ou nouveau procédé comme étant l’objet de l’innovation. En effet, selon
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
cet auteur, l’innovation peut être vue comme l’introduction d’un nouveau produit,
introduction d’une nouvelle méthode de production, ouverture d’un nouveau marché,
conquête d’une nouvelle source de matière première ou de produit semi-fini et la mise en
place d’une nouvelle forme d’organisation. D’autres chercheurs se focalisent plutôt sur le
projet d’innovation (Millier, 2005 ; Mazzarol et Reboud, 2006). Nous notons également que
des auteurs insistent sur la valeur cognitive de l’innovation. C’est le cas de (Bienaymé, 1994)
pour qui l’innovation est un processus dans lequel les innovateurs changent leur manière de
penser, de concevoir et fabriquer de nouveaux produits.
D’autres auteurs comme (Dert, 1997) par contre insistent sur la dimension relationnelle de
l’innovation. Pour cet auteur, l’innovation consiste à l’introduction réussie de l’invention dans
la pratique sociale. Cette réussite n’est pas seulement technique, mais également économique,
industrielle, commerciale, sociale et culturelle. Nous pouvons nous rendre compte, à partir de
ces exemples, des différents angles d’attaque de la notion d’innovation et de son processus.
L’objet de l’innovation diffère d’un auteur à un autre suivant la vision qu’il a de l’innovation
et de l’objectif qu’il veut atteindre.
Les processus d’innovation étant très particuliers comme nous l’avons vu au chapitre
précédent, son pilotage s’avère être un peu particulier. Même si ça fait encore débat, il y aurait
une différence entre la maîtrise de la qualité et le pilotage de l’innovation. Du coup le pilotage
va être décrit sous forme de niveaux opérationnels. Et aussi face à la diversité de points de
vue recensés dans la littérature, il nous est apparu avant tout important de bien préciser les
différents niveaux d’intervention de l’innovation pour clarifier les objectifs d’action des
décideurs de l’entreprise et leur permettre de mieux définir leur politique d’innovation. Pour
notre étude, nous avons décidé de reprendre la logique par niveau opérationnel du
management de l’innovation proposée par (Boly et Morel, 2006). Ces niveaux d’intervention
constitueront des niveaux d’action pour les décideurs, nécessitant pour chacun d’eux des
prises de décisions particulières et spécifiques. Cela suppose que les démarches d’évaluation
varieront suivant le niveau d’action considéré.
- 43 -
Evaluation des processus d’innovation
5. Les individus et les groupes d’acteurs : il s’agit de l’ensemble des acteurs qui a à
charge à la fois de gérer le processus d’innovation et de le faire évoluer et aussi de
gérer l’ensemble des projets que l’entreprise a dans son portefeuille. Chaque individu
aura un apport personnel sur l’évolution du processus d’innovation, mais aussi devra
être disposé à participer à des actions de groupes (travail en équipe). Les individus, en
travaillant ensembles, s’échangent des connaissances techniques, des savoirs et savoir-
faire et donc apprennent les uns des autres pour acquérir de nouvelles compétences.
Chaque individu doit s’impliquer entièrement dans le processus d’innovation et
s’adapter aux nouvelles règles et méthodes de travail. Les principales actions de
management à ce niveau comprennent le développement et le renforcement des
compétences des individus par l’apprentissage, la formation et la coopération avec
d’autres entreprises et l’optimisation du rendement de leurs activités.
Figure 7: Les cinq différents niveaux d’étude du processus d’innovation, source (Boly et
Morel, 2006)
- 45 -
Evaluation des processus d’innovation
Nous adopterons une définition de l’innovation technologique en tant que processus (c’est à
dire une succession d’activités qui utilisent un certain nombre de ressources d’entrée et les
transforme en résultats qui peuvent être des produits, des processus et de nouvelles méthodes
d’organisations notamment).
En termes de positionnement pour notre étude, nous avons décidé de travailler sur le niveau
« Entreprise ». Nous nous intéressons essentiellement aux activités qu’une entreprise peut
mettre en œuvre en interne (dans ses unités de production, de marketing, de recherche, …)
comme en externe (autres entreprises, des laboratoires de recherche, des universités, …). Puis
nous essaierons de déterminer les conditions de réussite de ces activités, ainsi que les actions
à mener pour améliorer les performances de l’entreprise. En d’autres termes, notre étude
portera sur le processus global d’innovation et sur les actions à mettre en place pour le
développer et le faire évoluer et cela dans les meilleures conditions possibles.
Le choix du niveau d’intervention Entreprise comme objet d’étude repose sur différents
arguments. L’entreprise constitue le lieu de prédilection de l’innovation technologique. De
plus, les niveaux Produit, Projet et Individus étant des sous-niveaux de l’entreprise sur
lesquels intervient le processus d’innovation, il nous est apparu pertinent de réfléchir d’abord
à un niveau plus global qui est celui de l’entreprise. A terme, l’objectif sera de développer les
mêmes recherches sur ces sous échelles d’analyse. En effet, une bonne mesure au niveau
Entreprise nécessite une bonne mesure de tous ses composants et donc des niveaux Produit,
Projet et Individus. Notons qu’une étude au niveau de l’Entreprise fait intervenir des éléments
du niveau Environnement, en particulier les activités de l’entreprise avec des acteurs externes
qui interagissent avec elle en réseaux (entreprises concurrentes, fournisseurs, centres de
recherche, etc.).
Après avoir identifié clairement l’objet (ou niveau d’intervention) de notre étude –
l’entreprise – et ses caractéristiques à mesurer – le processus d’innovation –, l’étape
suivante sera de proposer une approche permettant l’évaluation de ce dernier. La littérature
concernant l’évaluation au niveau Entreprise est fournie. Cependant les approches portant sur
les activités effectivement mises en œuvre au sein de l’entreprise ainsi que sur ses aptitudes
(ou capacités) à innover sont peu nombreuses. Elles commencent à intéresser de plus en plus
de chercheurs depuis quelques années comme nous le verrons dans le chapitre suivant. Nous
notons aussi que les études concernant la mesure des niveaux Environnement, Produit et
Projet sont nombreuses.
Dans le cas du niveau Environnement, nous pouvons citer entre autres les travaux de
CORDIS12 au niveau européen ou encore le système Bak de l’université de Lausanne
permettant un benchmarking des collectivités régionales ou nationales. C’est aussi le cas des
12
CORDIS : Service communautaire d'information sur la recherche et le développement
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
enquêtes communautaires sur l’innovation réalisées dans la plupart des pays de l’OCDE et
dont les conclusions permettent de faire évoluer le manuel d’Oslo. En France c’est le SESSI13
qui réalise chaque année ces enquêtes.
Concernant le niveau Produit, nous pouvons nous référer à toutes les démarches développées
en conception de produits pour suivre les spécifications et les performances des produits
nouveaux en cours de développement et aux travaux portant sur les conditions de succès et
d’échec du développement de produits (Barbiroli, 1996 ; Griffin et Page, 1996).
Le niveau Projet fait aussi l’objet de nombreuses études, surtout dans le domaine de la
certification. Nous pouvons nous référer entre autres aux travaux de (Millier, 2005) et de
(Mazzarol et al,. 2006) portant sur les conditions de succès et d’échec d’un projet
d’innovation.
Quant au niveau Individus, c’est un champ encore inexploré. Les études sont quasiment
inexistantes.
13
SESSI : Service des Études et des Statistiques Industrielles
- 47 -
Evaluation des processus d’innovation
Face à une concurrence acharnée dans un paysage économique mouvant, l’entreprise doit être
bien préparée aux changements dans son environnement afin de s’adapter, anticiper et créer
des ruptures pour être en mesure de renouveler ses avantages concurrentiels (Morin et Seurat,
1989). La mesure ou l’évaluation du processus d’innovation revêt donc une importance
capitale pour les innovateurs car elle leur permet de mieux comprendre les phénomènes liés à
l’innovation, leur impact réel sur les individus et les organisations qui ont à charge de la
piloter, mais aussi de s’assurer que les actions et les démarches adoptées sont justifiées.
Puisqu’il y a une nécessité de travailler sur la métrologie et l’innovation, il convient de faire
un premier état de l’art des principes fondateurs. Plusieurs éléments seront à préciser.
Dans ce chapitre, il sera question de présenter les aspects de notre contribution théorique à
l’élaboration des principes d’une métrologie des processus d’innovation. Tout d’abord, nous
ferons un exposé sur les notions d’évaluation et de mesure, largement utilisées dans la
littérature sur l’innovation, puis nous montrerons les différences qui existent entre ces termes.
Nous présenterons ensuite les techniques de collecte et de traitement de données utilisées dans
le domaine du génie industriel, puis nous retiendrons celles qui paraissent les mieux adaptées
à notre étude en expliquant nos choix. Nous ferons également une revue des approches et
critères utilisés dans la littérature pour mesurer ou évaluer le processus d’innovation, que nous
replacerons suivant une progression par flux (inputs, activités et outputs), puis nous
exposerons leurs limites. Finalement, nous présenterons les différents choix retenus pour notre
étude et nous les motiverons.
La métrologie est la science de la mesure. « C’est la mère de toute relation d’ordre, de toute
comparaison ou classement, de toute relation économique et, de ce fait, elle a été de tout
temps l’acteur et le moteur du progrès et des sciences » (Engrand, 1976).
Depuis quelques années, les besoins métrologiques ont fortement évolué et se sont intensifiés
dans beaucoup de secteurs. La métrologie touche davantage de secteurs tels que la santé,
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
La métrologie est de plus devenue un élément capital dans la reconnaissance des compétences
des entreprises et des laboratoires. Elle est surtout indispensable dans les échanges
commerciaux nationaux ou internationaux. La maîtrise du processus de mesure est devenue
un véritable enjeu économique, commercial et réglementaire. C’est un outil de qualité
indispensable à la prise de décision : déclaration de conformité ou de non-conformité d’un
produit manufacturé, diagnostic à la suite d’une analyse médicale, respect ou non de la
législation en matière de sécurité et d’environnement.
Les exemples montrant l’importance de la mesure dans notre vie quotidienne sont nombreux.
La mesure représente donc une donnée essentielle pour toute activité humaine en général et
pour l’économie en particulier. Parallèlement, l’essor des nouvelles technologies et le progrès
des connaissances scientifiques rendent nécessaires une évolution permanente des mesures et
des instruments avec lesquelles celles-ci sont effectuées.
Mesurer consiste à comparer une grandeur physique inconnue avec une grandeur de même
nature prise comme référence. C’est exprimer le résultat de la comparaison à l’aide d’une
valeur numérique associée à une unité qui rappelle la nature de la référence et assortie d'une
incertitude qui dépend à la fois des qualités de l'expérience effectuée et de la connaissance
que l'on a de la référence et de ses conditions d'utilisation (Himbert, 1998). La caractéristique
majeure de la mesure est la répétabilité. En d’autres termes une opération de mesure peut être
reproduite plusieurs fois et doit donner la même valeur voir sensiblement la même valeur. La
mesure s’appuie le plus souvent sur des étalons qui sont des unités de mesure de base à partir
desquelles la mesure de tout objet sera trouvée (multiple de la valeur de cet étalon). C’est le
cas du kilogramme en physique, utilisé pour la mesure des masses. Outre la répétabilité, la
qualité d’une mesure dépend d’autres critères fondamentaux tels que l’uniformité, l’exactitude
(repérage des incertitudes) et la stabilité dans le temps.
Cependant des différences peuvent être observées dans les mesures d’une même grandeur.
C’est ce qu’on qualifie d’incertitude de mesure due généralement au processus de mesure lui-
même, aux conditions dans lesquelles la mesure est réalisée (différence de pression, présence
ou absence de vent, différence de température, erreur humaine, etc.), à la qualité et à la
précision des instruments de mesure (les instruments de mesure doivent pour cela être
régulièrement inspectés et étalonnés). Ainsi à toute mesure, il est important d’associer un
intervalle de confiance ou un domaine d’incertitude. D’énormes progrès sont faits de jour en
jour dans le domaine de la métrologie pour minimiser les imprécisions et erreurs de mesure
- 49 -
Evaluation des processus d’innovation
qui peuvent être souvent préjudiciables, notamment dans certains secteurs d’activité tels que
la médecine ou l’industrie pharmaceutique. Pour cela davantage d’outils plus performants
pour la mesure de haute précision font leur apparition et le rôle du métrologue devient de plus
en plus important dans tous les domaines d’activité. C’est dans ce sens que Jean-Michel POU,
PDG de la société Delta Mu Conseil déclarait14 : « en s’intéressant aux incertitudes de
mesure, à la maîtrise des capacités et à la notion de risque, le métrologue devient un élément
clé de l’amélioration des process industriels. Au-delà même des gains de productivité qu’il
pourra apporter par cette approche (en aidant à exprimer le juste besoin et à le maîtriser), il
participera à la démarche vitale dans laquelle chacun doit s’inscrire : le développement
durable ».
L’évaluation vient en soutien à toutes les autres professions et en retour, elle est soutenue par
un grand nombre d’entre elles ; aucune profession ne peut exceller sans évaluation
(Stufflebeam et Shinkfield, 2007). L’évaluation est donc omniprésente et sert à améliorer tous
les aspects de la société. Elle touche tous les domaines de la connaissance, de la production et
des services ; elle a des implications importantes dans le maintien et l’amélioration des
services et dans la protection des citoyens dans tous les domaines de la société. De plus, elle
couvre une large gamme d’entités : les programmes scolaires, les librairies, les musées, les
hôpitaux, la physique, la justice, les services de télécommunication, les politiques
environnementales, la prévention de maladies, la défense nationale, etc.
L’évaluation en général est destinée à porter un jugement sur un objet qui peut être des
individus, des projets, des services, des produits, des équipements, des concepts, etc. Elle
permet aussi d’attribuer une valeur à cet objet en fonction de critères déterminés (De Peretti et
al, 1998). Selon (Stufflebeam et Shinkfield, 2007), la notion de valeur étant le terme central
de l’évaluation, elle implique essentiellement de porter un jugement de valeur. Par conséquent
l’évaluation n’est pas exempte de toute valeur. Elle doit être fondée sur un ensemble complet
de principes directeurs et devra déterminer la position ou l’état de l’évaluande15 par rapport à
ces valeurs. Pour ces mêmes raisons, (Audisio, 1990) affirme que l'évaluation a pour objectif
de repérer et mesurer la déviance par rapport à une norme de référence. Cela consiste
également selon (Jacot, 1991) à assigner une valeur, bonne ou mauvaise, meilleure ou pire, à
une entité ou à un événement.
L’évaluation peut être vue comme un processus permettant de donner des certifications sur
des sujets tels que la validité, l’efficacité, l’objectivité des prix, la sureté, l’efficience, la
facilité d’utilisation et la probité d’un objet. Elle fournit à la société des preuves et des
justifications sur le mérite, la valeur, les améliorations à faire, les accréditations, la
certification et si nécessaire une base pour l’arrêt ou l’abandon dans le développement d’un
objet (Stufflebeam et Shinkfield, 2007). Les étapes techniques concernant la recherche en
évaluation sont : la collecte, l’organisation, l’analyse et la synthèse de l’information.
(Stufflebeam et Shinkfield, 2007) résument leur vision de l’évaluation ainsi : « c’est un
processus systématique de description, de recueil, de compte-rendu et d’utilisation de
l’information descriptive et de jugement sur les notions de valeur, de qualité, de probité, de
faisabilité, de sureté, de portée et/ou de valeur résiduelle d’un objet ».
14
Tiré de la Revue : Contrôles – Essais – Mesures, Octobre 2007, p.58.
15
L’évaluande représente l’objet de l’évaluation.
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
L’évaluation peut aussi être considérée comme une pratique scientifique de mesure pour tout
ce qui n’est pas mesurable directement pour diverses raisons : soit parce qu’une mesure
directe de l’objet ne peut être obtenue faute d’instruments adaptés ou manquants (il s’agit de
l’évaluation au sens métrologique du terme), soit parce que l’objet d’étude n’est à priori pas
« mesurable » et qu’il faille au préalable fixer un référentiel de mesure relativement et
conjointement à l’objet d’étude (Ribau, 2000). Si l’objet de la science est la description et
l’explication des phénomènes qui nous entourent, l’objet de l’évaluation est davantage
l’action ou plutôt le jugement pour la décision et l’action.
En synthèse de cette section, nous pouvons dire qu’en métrologie, le caractère de neutralité ou
d’objectivité de la mesure ne peut pas (ou très peu) être remis en cause. Ce qui n’est pas le cas
de l’évaluation qui dépend quant à elle des critères de mesure de l’opérateur. De plus,
l’évaluation ne s’appuie que sur des ensembles de grandeurs non composables (c’est-à-dire
qu’il n’est pas possible d’égaler entre elles des quantités de celle-ci en utilisant une opération
mathématique telle que la somme, la différence, le produit vectoriel, …) et les notions de
métrologie qu’elle s’approprie sont celles applicables aux grandeurs non composables. Pour
ces raisons, (Ribau, 2000) affirme que la métrologie une science nécessaire à l’évaluation,
puisque tout classement ou comparaison utilise cette science.
De plus, l’évaluation se distingue fondamentalement de la mesure par le fait qu’elle repose sur
un jugement de valeur, donc contient une grande part de subjectivité. De plus, l’évaluation n’a
d’utilité que dans l’action ; elle est indissociable de l’action, n’a de sens que par rapport à la
décision prise et a trait à l’objet particulier dont on souhaite connaître la valeur (Beauvois,
1990).
Dans notre étude, nous manipulerons principalement des données qui sont susceptibles de
varier selon les objectifs de l’opérateur. Ainsi, si un praticien intervient sur le processus
d’innovation, ses objectifs seront établis en tenant compte de ses capacités de financement. De
ce fait, les évolutions attendues du processus devront être circonscrites à ces moyens
financiers mobilisables. L’évaluation sera donc dépendante des ressources financières
allouées.
De plus, nous aurons à faire face à des problèmes de « non mesurabilité » de certains
indicateurs. Par exemple, nous avons vu dans le second chapitre que le degré de nouveauté
n’était pas une variable associée à une mesure rigoureuse.
Enfin, notre recherche se place dans une logique générale d’ingénierie. Le but est d’élaborer
un corpus de connaissances permettant une meilleure compréhension des phénomènes
d’innovation, mais aussi de créer des méthodes pour le pilotage de ces processus. L’action est
donc interreliée à la réflexion.
Notre contribution se situe donc dans le domaine de l’évaluation plus que de la mesure.
- 51 -
Evaluation des processus d’innovation
L’observation est une méthode par laquelle le chercheur cherche à obtenir des informations
sur un phénomène, un objet, une personne par constatation de certaines propriétés. C’est une
démarche d’élaboration d’un savoir, au service de finalités multiples, qui s’insère dans un
projet global de l’homme pour décrire, comprendre son environnement et les évènements qui
s’y déroulent (Blanchet et al., 2001). C'est une procédure empirique de récolte de données
basée sur ce qui est perçu par les sens du chercheur. Les données ainsi obtenues seront
synthétisées pour être ensuite analysées. Cette méthode est sujette à une très grande part de
subjectivité. Sa validité dépend de plusieurs facteurs dont les conditions d’expérimentation, le
fait que la situation d’observation puisse être aménagée, corrigée pour répondre à certaines
attentes du chercheur et de l’étude menée et l’influence que peut apporter le chercheur aux
résultats obtenus. La bonne définition du protocole d’expérimentation est nécessaire pour
garantir la validité (scientifique) des résultats.
L’enquête est une méthode qui permet d’avoir une connaissance empirique et systématique de
la réalité, à partir de données quantitatives (De Singly, 1992). Par cette approche, l’enquêteur
demande l’avis des acteurs de l’innovation.
Il existe deux méthodes d’enquêtes :
1. L’entretien : c’est un échange verbal entre deux individus. Le premier (l’enquêteur)
essaie d’obtenir du second (l’enquêté) des informations en lui posant des questions et
ce dernier lui répond. L’entretien est un procédé d’investigation scientifique, utilisant
un processus de communication verbal, pour recueillir des informations, en relation
avec le but fixé (Grawitz, 1984). C’est un processus complexe car dépendant de
l’interaction entre les participants (enquêteur et enquêté), des liens de communication,
de la nature des informations à recueillir. Un cadre expérimental doit être défini au
préalable entre les participants pour situer les enjeux et les objectifs du dialogue,
2. Le questionnaire : c’est un document manuscrit ou imprimé, établit par l’enquêteur
pour interroger un interlocuteur. Il regroupe les questions que l’enquêteur souhaite
poser à son interlocuteur et concerne les problèmes pour lesquels il attend des
réponses.
Nous avons opté dans notre étude pour la technique de l’observation. L’évaluation des
attributs du processus d’innovation se fera via des phénomènes observables en entreprise. La
collecte d’informations s’est donc déroulée suivant un protocole d’observation très rigoureux.
Une liste de phénomènes a été établie grâce à la littérature. L’observateur devant indiquer si
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
oui ou non il constate les phénomènes de la liste au sein de l’entreprise évaluée. Notons que
dans la partie expérimentale, l’observation a été confiée dans certains cas à des responsables
de projets formés à l’innovation. L’analyse étant systématiquement à notre charge.
Dans notre étude, il sera plus question de valoriser des données qui sont liées à l’objectif de
l’opérateur de l’évaluation selon des critères. La technique la plus appropriée dans ce cas
semble être l’Analyse Multicritères d’Aide à la Décision (MCDA). Elle a pour objet de
prendre en compte un système de préférences lié à un point de vue donné. Plusieurs
alternatives se présentant à l’opérateur, le MCDA aide le décideur à faire un choix selon ses
préférences. En effet, lorsque l’on a fait intervenir plusieurs points de vue, la procédure
d’agrégation multicritère (PAMC) a pour but de bâtir un système de préférences global
prenant en compte tous les points de vue (Martel et al, 2002).
D’une façon générale, les méthodes MCDA se divisent en deux grandes catégories :
• Les méthodes d’agrégation totale : elles sont caractérisées par la « théorie multi-
attribut ou du critère unique de synthèse » qui évacue toute incomparabilité,
• Les méthodes d’agrégation partielle : elles s’appuient sur la relation de
« surclassement » qui accepte l’incomparabilité.
- 53 -
Evaluation des processus d’innovation
Les méthodes d’agrégation totale sont des méthodes qui recherchent une fonction d’utilité
dans laquelle il soit possible de mesurer l’utilité totale des actions potentielles. Elles
établissent une fonction-critère pour arriver à une agrégation finale monocritère (Schärlig,
1985). En d’autres termes, les méthodes d’agrégation totale ont une approche qui consiste à
agréger différents points de vue en une fonction unique, appelée fonction d’utilité (Jolly et al.,
2008). Dans cette catégorie de méthodes, nous pouvons citer les opérateurs « minimum »
(resp. « maximum ») correspondant à des opérateurs conjonctifs (resp. disjonctifs) qui
combinent les notes par un « et » (resp. « ou ») logique ou encore les opérateurs « somme
pondérée », « minimum et maximum pondérés » qui sont des compromis entre le « et » et le
« ou ». Ces opérateurs sont dits « compensatoires car une mauvaise note pour un critère est
compensée par une bonne note dans un autre critère (Jolly-Desodt et al., 2008). Nous pouvons
aussi citer dans cette catégorie les opérateurs OWA (Ordered Weighted Averaging) qui
peuvent prendre en compte des quantificateurs linguistiques pour proposer un ensemble de
meilleurs compromis au décideur.
Les méthodes d’agrégation partielle attribuent une note (ou score) à chaque alternative
indépendamment des autres alternatives. Une technique est dite compensatoire si une
mauvaise valeur d’un critère peut être compensée par une bonne valeur d’un autre critère
(principe des vases communicants). Les méthodes d’agrégation partielle ont pour objectif de
comparer des actions ou alternatives afin de construire et d’exploiter une relation de
surclassement qui représente les préférences du décideur à partir de l’information dont il
dispose (Jolly et al., 2008). Plusieurs méthodes font partir de cette catégorie. Nous pouvons
citer les méthodes ELECTRE qui consistent à comparer les actions possibles deux à deux
selon les critères retenus, affectés d’un poids et d’un ou de plusieurs seuils (indifférence, véto,
préférence, etc.). Nous pouvons également citer des approches telles que PROMETHEE, les
Rough Sets ou encore les bilans de flux.
Dans notre étude, nous essaierons d’identifier un score qui doit représenter la capacité (ou le
potentiel) d’innovation de l’entreprise et permette de la comparer et de la classer par rapport à
un échantillon. Dans ce cas, les techniques d’agrégation totale nous semblent être les plus
adaptées à notre objectif. De plus, nous pensons qu’une entreprise donnée peut d’un côté
avoir des scores médiocres dans certaines pratiques et de l’autre avoir de très bons scores dans
d’autres pratiques. Et comme un bon score dans une pratique donnée doit être en mesure de
combler un déficit pour une autre pratique, une technique satisfaisante pour le traitement des
données dans notre étude devra donc être de la catégorie des techniques MDCA de type
compensatoire. Finalement la technique que nous avons retenue est une somme pondérée ou
moyenne arithmétique pondérée. La détermination des poids à accorder à nos critères sera
exposée dans la partie 3 de ce manuscrit et le chapitre traitant de notre contribution
méthodologique.
Dans la section suivante, nous allons présenter les modes d’évaluation des processus
d’innovation proposés dans la littérature. Notre étude ne se veut pas exhaustive et nous ne
reprendrons que quelques approches empruntées à des chercheurs des différentes disciplines
qui ont abordé le sujet. Nous pourrons nous rendre compte de leur multitude. Cette multitude
d’approches, ajoutées à l’ensemble des définitions et des typologies sur l’innovation, ne
permettent pas de disposer d’une approche unique et fédératrice de toutes les
approches existantes. Toutes ces raisons contribuent à la complexité de l’étude du processus
d’innovation.
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
L’innovation étant définie comme un processus, sa mesure tend souvent vers une série
d’études séparées. Chacune de ces études se focalise sur des aspects particuliers du processus
d’innovation, la plupart du temps en réponse aux besoins tant des entreprises que des
chercheurs pour comprendre l’efficacité de leurs actions en matière d’innovation (Kim et Oh,
2002). Certaines études se consacrent exclusivement à la mesure des inputs et/ou des outputs
de l’innovation, tout en ignorant le processus permettant de transformer les inputs en outputs
(Cordero, 1990, Adams et al., 2006). L’existence d’une multitude d’approches est aussi due
au fait que l’innovation est appliquée sur plusieurs niveaux d’intervention (voir § 2.4) :
l’environnement socio-politique ou le territoire, l’entreprise, le projet, le produit et l’individu
ou le collectif d’individus. A chaque niveau correspond un mode d’action privilégié pour les
acteurs du processus d’innovation, donc un mode de mesure spécifique. De plus, le passage
d’un niveau à l’autre nécessite des changements dans les pratiques.
- 55 -
Evaluation des processus d’innovation
(Romon, 2006) a réalisé un inventaire des différents modes d’évaluation des performances de
l’innovation et a distingué trois modes d’évaluation appliqués par les entreprises. Ces modes
d’évaluation sont fonction du type d’indicateur choisi (quantitatif : indicateurs de rentabilité
dans le business plan ou qualitatif : capacité à innover) et du périmètre d’évaluation retenu
(entreprise, entité de l’entreprise ou portefeuille de projets d’innovation) :
1. Evaluation quantitative des capacités d’innovation d’une entreprise (une entité, un
portefeuille de projets). Les indicateurs de performance quantitatifs utilisés sont :
• Les parts de marchés gagnées imputables aux produits innovants ou à fort
contenu technologique,
• Le nombre de brevets déposés, valorisés à l’extérieur,
• Les gains de productivité obtenus imputables à un nouveau procédé de
production,
• Les dépenses de R&D ramenées au chiffre d’affaire (CA) dégagé par des
produits nouveaux des x dernières années ou derniers mois,
• La mesure d’une satisfaction client, fondée sur le nombre de produits livrés
dans de brefs délais, le taux de retour en exploitation, etc.
2. Evaluation de la performance des activités d’exploitation futures résultant des projets
d’innovation. Ce mode d’évaluation est fréquemment utilisé par les entreprises qui
font appel aux progiciels de gestion intégrée ou PGI. Il est fondé sur des indicateurs de
type financier (business plan, valeur nette actualisée). Son objectif est d’évaluer la
rentabilité des activités d’exploitation des produits et procédés nouveaux qui
résulteront du projet d’innovation que l’entreprise envisage de lancer.
3. Estimation qualitative des gains procurés par les projets d’innovation. Dans ce mode,
on définit ce qu’attend le commanditaire du projet d’innovation potentiel en termes
qualitatifs : impact commercial, capacité d’enrichissement du patrimoine
technologique de l’entreprise, effet d’image sur l’ensemble des activités de
l’entreprise, etc. Une valeur est donnée au projet sur chaque critère et les décisions
sont prises sur la base d’une évaluation multicritère, sans agrégation, ni pondération.
L’ensemble des informations relatives aux trois modes d’évaluation développés est résumé
dans le Tableau 2 ci-dessous.
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
Tableau 2 : Typologie des modes d’évaluation des performances de l’innovation selon les
indicateurs utilisés, source (Romon, 2006)
Des études menées sur le terrain montrent un manque de fiabilité des mesures de performance
de l’innovation, malgré les multiples moyens qui sont mis en œuvre pour simuler, évaluer et
faire des analogies notamment (Ferney-Walch et Romon, 2006). Ces difficultés sont dues à
plusieurs facteurs comme :
1. Le caractère subjectif du processus d’évaluation des performances de l’innovation (ce
qui est performant pour les uns ne l’est pas forcément pour les autres),
2. Le caractère évolutif et peu prédictible de l’innovation (un projet d’innovation est un
processus non récurrent, incertain, avec une réalité à construire). Plus une innovation
est radicale, plus l’incertitude est grande, tant sur la faisabilité technique et donc sur le
coût de développement, que sur la faisabilité économique et donc sur la marge
commerciale ou le gain de productivité attendu du projet,
3. Le fait que l’innovation soit une activité qui se définit par référence à une autre,
l’activité d’exploitation de l’entreprise,
4. L’inadaptation des outils d’évaluation comptable aux besoins du management de
l’innovation.
Pour notre étude, nous avons procédé par une analyse systémique des critères proposés dans
la littérature. En effet, les travaux effectués en métrologie de l’innovation (innovation metric)
peuvent être étudiés selon une vision du processus en termes de flux (entrées / activités /
sorties). Nous avons donc replacé les approches d’évaluation des auteurs en respectant cette
vision (Assiélou et al., 2006) à savoir :
Les ressources mobilisées pour le processus d’innovation (inputs),
Les pratiques ou activités réellement mises en œuvre (activités),
Les résultats du processus d’innovation (outcomes).
- 57 -
Evaluation des processus d’innovation
EVALUATION DE L’INNOVATION
Champ d’investigation
de l’ERPI
Notons que les trois modes d’évaluation du processus d’innovation (inputs, activités,
outcomes) peuvent être appliquées à chacun des niveaux d’intervention que nous avons défini
au § 2.4, à savoir les niveaux Environnement, Entreprise, Projet, Produit et Individus. A
chacun de ces niveaux d’intervention de l’innovation correspondent des enjeux
temporellement spécifiques et différents. L’approche métrique qui sera adoptée pour la
mesure de l’innovation à un niveau donné dépendra des objectifs à atteindre par le chercheur.
De ce fait, il est probable que les approches métriques varient selon le niveau.
Notre recensement dans la littérature montre que la majeure partie des approches d’évaluation
du processus d’innovation porte sur les inputs et les outcomes et sont généralement d’ordre
financier, économique et managérial (Huang et al., 2004). Or dans un monde en mouvement
marqué par des changements technologiques rapides, l’utilisation des paramètres financiers
s’appuyant sur l’information comptable est insuffisante et ne donne pas une base solide pour
mesurer l’innovation (Cañibano et al., 2000).
Plusieurs approches de mesure portant sur chacun des niveaux d’intervention de l’innovation
sont recensées dans la littérature. Notre étude se focalisera essentiellement sur le niveau
Entreprise. Rappelons à nouveau que plusieurs études ont été menées pour évaluer le
processus d’innovation sur les niveaux Environnement, Projet et Produit. Concernant le
niveau individus, les études sont quasiment inexistantes.
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
Dans la suite de la section, nous allons présenter la synthèse de nos travaux de recherche
bibliographique sur les approches et critères utilisés pour évaluer l’innovation. Nous
distinguons quatre types d’évaluation qui sont :
1. L’évaluation des inputs,
2. L’évaluation des activités,
3. L’évaluation des outputs,
4. L’évaluation transverse des trois éléments précédents.
Ces indicateurs représentent les efforts consentis par les entreprises en matière de recherche,
ainsi que les compétences en innovation qui affectent leurs performances. Les efforts R&D ne
reflètent pas seulement les inputs actuels de l’entreprise mais aussi les succès précédents qui
sont une part intégrale des aptitudes que l’entreprise développe en créant une stratégie R&D
avec un ensemble stable de projets à long-terme. Les inputs de R&D d’une entreprise font
partie de routines plus larges que les entreprises suivent dans leurs efforts d’innovation, où les
dépenses précédentes de R&D affectent les inputs R&D ultérieurs (Hagedoorn et Cloodt,
2003). De plus, les efforts R&D nous renseignent sur les ressources allouées au processus
d’innovation par les entreprises et les états des activités visant à accroître le stock de
connaissances en matière de S&T16 (Guellec, 2003).
Cependant les efforts R&D ne disent rien sur les résultats (output) de ces activités, ni sur les
activités d’innovation n’ayant pas de contenu S&T explicite (Guellec, 2003). La R&D
n’englobe pas non plus tous les efforts faits par les entreprises dans le domaine de
l’innovation car d’autres sources de progrès techniques tel l’apprentissage par la pratique,
échappent à cette définition étroite de R&D (OCDE, 2005).
Dans ce même ordre d’idées, (Chastenet et Boucherand, 2007) du département Ernst &
Young ont réalisé une étude pour analyser l’influence de la taille des entreprises (ou capital
humain) sur la création de valeur et donc sur la performance des entreprises. Cette étude a
porté sur un échantillon de 510 entreprises françaises cotées en bourse sur la période 2003-
2006 et représentatives des petites, moyennes et grandes entreprises. L’étude est basée sur la
comparaison d’indicateurs de création de valeur immatérielle (poids relatif accordé par le
marché aux actifs incorporels dans les capitaux à long terme mobilisés par les entreprises, …).
Le taux d’actifs incorporels sur les capitaux à long terme mobilisés par les entreprises apparaît
d’autant plus élevé que la taille de celles-ci est importante. En 2006, ce taux s’établit à 76%
pour les grandes entreprises, contre 74 à 68% pour les petites et moyennes entreprises.
Contrairement aux hypothèses qui font état d’une plus grande capacité de mobilisation des
ressources par les grands groupes, le taux d’incorporels des entreprises moyennes apparaît
16
Sciences et Technologies
- 59 -
Evaluation des processus d’innovation
aussi très important. Les résultats de cette étude mettent en évidence un effet de taille dans la
création de valeur immatérielle, sans toutefois être prédominant.
L’étude montre également que les entreprises moyennes sont davantage positionnées sur des
niches et plus particulièrement sur des niches technologiques pour près de 30% d’entre elles,
par opposition aux grands groupes d’entreprises (10%). D’un autre point de vue, le coefficient
de capital humain (mesuré par le ratio effectif/actifs incorporels) dans les entreprises
moyennes (26%) apparaît très largement supérieur à celui des plus grands groupes (4%). Cela
montre que les entreprises moyennes s’appuient sur davantage de ressources humaines pour
créer de la valeur immatérielle que les grands groupes.
Pour les grands groupes comme pour les entreprises moyennes, l’analyse de la création de
valeur par les sociétés nécessite non seulement le suivi d’indicateurs financiers traditionnels
fondés sur la rentabilité et la croissance mais aussi celui d’indicateurs de mesure du capital
immatériel (capital humain), source de différenciation et d’avantages concurrentiels pour les
entreprises.
Si nous supposons que l’innovation est un processus de création de valeur, l’input « capital
humain » est une variable importante. Bien que la croissance économique soit fondée de plus
en plus sur la connaissance et tirée par l'innovation, c'est essentiellement un processus qui
nécessite l'emploi d'une forte main-d’œuvre hautement qualifié (Arocena et Sutz, 2003). Et le
développement d’un meilleur capital humain permet à l’entreprise d’attendre des
performances supérieures. Cependant malgré le nombre élevé de chercheurs qui ont travaillé
sur ce domaine d’étude, les approches ou indicateurs de mesures sont très peu nombreux. Les
indicateurs utilisés sont plutôt classiques et concernent les inputs R&D (dépenses et effectifs).
Certaines études récentes proposent d’évaluer les machines et les équipements industriels
dans le cas d’entreprises industrielles.
C’est le cas de (Barthet, 2007) qui propose une approche multicritère pour appréhender à la
fois les aspects transactionnels, stratégiques et économiques dans l’évaluation des machines et
des équipements industriels.
Les approches retenues dans ce cadre sont :
• L’approche par les coûts de reconstitution : elle consiste à déterminer le coût de
remplacement ou de reproduction des machines et équipements industriels, ajusté de
certains paramètres reflétant aussi bien l’environnement financier et économique de
l’entreprise que la gestion des actifs de production (maintenance, politique de
renouvellement),
• L’approche par la valeur du marché : elle permet de mesurer la valeur d’un actif sur la
base du prix que les autres acteurs du marché ont payé pour le même actif ou pour un
actif considéré comme similaire,
• L’approche par les revenus : elle permet de déterminer les revenus que pourrait tirer
un investisseur éventuel de l’acquisition d’un actif, sur la base des flux de trésorerie
futurs générés par cet actif tout au long de sa durée de vie.
L’auteur insiste également sur le fait que ces approches ne sont pas forcément toutes
applicables, car des conditions particulières doivent être remplies pour leur application.
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
En synthèse de cette partie, nous notons que les dépenses de R&D et le capital humain
constituent les principaux indicateurs importants pour la mesure des performances des inputs
du processus d’innovation. Ils représentent l’importance accordée à la recherche comme
source importante d’innovation et aussi les moyens qui y sont affectés. Plusieurs études
affirment que l’intensité de R&D a un impact très positif sur la performance technologique et
sur le taux de création de nouveaux produits et de nouvelles technologies (Parthasarthy et
Hammond, 2002). En d’autres termes, les niveaux d’inputs R&D affectent positivement le
nombre de technologies et de produits générés dans l’entreprise. Dans cet état d’esprit,
(Simonen et McCann, 2008) affirment que les niveaux de dépenses R&D et le stock d’inputs
en capital humain font partie des facteurs clés qui influencent le plus l’innovation. C’est aussi
le cas de (Moreno et al., 2005) qui, de leur côté, attribuent l’agglomération des activités
d’innovation à la concentration des investissements R&D et du capital humain des entreprises.
Cependant les inputs ne nous disent rien sur le processus qui les utilise et les transforme, ni
sur les outputs qui représentent le résultat du processus d’innovation. En effet, bien que
l’apport en inputs soit toujours important pour le succès du processus d’innovation, la manière
dont les entreprises développent de nouveaux produits semble différencier fortement les
vainqueurs des perdants (Iansiti et West, 1997).
Des chercheurs se sont penchés sur l’évaluation des capacités d’innovation technologique
(TICs) nécessaires à une bonne conduite des activités d’innovation des entreprises. Plusieurs
modèles ont été utilisés pour auditer les TICs des entreprises. Le renforcement des TICs et
leur amélioration peut être bénéfique pour les entreprises et les aider à rehausser leur
compétitivité. (Freeman, 1994) abonde dans ce sens en affirmant que dans le long terme, c’est
la capacité d’innovation technologique qui forme une source majeure de l’avantage
compétitif. (Jonker et al., 2006) ont montré dans leur étude qu’il existait une corrélation
positive significative entre les TICs et les performances économiques des entreprises.
Plusieurs chercheurs ont tenté d’identifier les TICs nécessaires pour le renforcement des
compétences de l’entreprise. En ce sens, (Adler et Shenbar, 1990) identifient quatre capacités
d’innovation majeures que doit avoir une entreprise.
Ces capacités sont :
1. La capacité à développer de nouveaux produits qui satisfont aux besoins du marché,
2. La capacité à produire de nouveaux produits en utilisant les procédés technologiques
appropriés,
3. La capacité à satisfaire les besoins futurs en développant et en mettant sur le marché
de nouveaux produits et procédés technologiques,
- 61 -
Evaluation des processus d’innovation
Beaucoup plus récemment, (Burgelman et al., 2004) ont défini les TICs d’une entreprise
comme un ensemble complet de caractéristiques d’une organisation qui facilitent et
supportent ses stratégies d’innovation technologique. Ils ont identifié 5 TICs :
• Disponibilité et allocation des ressources,
• Capacité à comprendre les stratégies d’innovation des concurrents et l’évolution de
l’industrie,
• Capacité à comprendre les développements technologiques,
• Contexte structurel et culturel,
• Capacité de management stratégique.
En se basant sur les différentes définitions des capacités d’innovation technologique (TICs),
plusieurs auteurs ont proposé des approches pour les évaluer.
C’est le cas de (Chiesa et al., 1998) qui ont développé un cadre pour l’audit de l’innovation
technique comprenant plusieurs éléments significatifs, tels que l’innovation de produits, le
développement de produits, l’innovation de procédé, l’acquisition technologique, le
leadership et le financement. Cet audit s’appuie aussi sur d’autres capacités d’innovation de
l’entreprise telles que la planification stratégique, l’organisation et l’apprentissage.
Ce modèle identifie un ensemble de 4 processus dit « processus de base », supporté par un
autre ensemble de 3 processus dit « processus support » permettant de délimiter l’innovation
technologique.
Ces processus sont définis comme suit :
1. Les Processus de Base
• Identification des concepts des nouveaux produits et génération des concepts,
Enrichissement du concept, par des activités de R&D, le transfert vers la fabrication et l’étude
de son usage,
• La mise en production,
• Acquisition des compétences nouvelles par le personnel
2. Les Processus Supports
• Mise en œuvre des ressources humaines et financières,
• Utilisation effective et appropriée d’outils et de méthodologies,
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
Quelques années plus tard, (Romijn et Albaladejo, 2002) ont proposé un nouveau cadre pour
évaluer la capacité d’innovation de petites entreprises d’électronique et de logiciel du sud-est
anglais. Ce cadre est basé sur un ensemble de facteurs qui sont des inputs internes et externes
à l’entreprise et dont l’accumulation permet de déterminer la capacité d’innovation de
l’entreprise (voir figure 9).
Capacité d’innovation
Ces auteurs ont de plus utilisé trois mesures de l’innovation produit pour déterminer la
capacité d’innovation des entreprises :
• Une variable binaire simple (1) qui indique si l’entreprise a réalisé au moins une
innovation majeure lors des 3 dernières années précédant l’étude ou non,
• Le nombre de brevets obtenus (2),
• Un index d’innovation de produit (3) qui est censé répondre aux limites des deux
premiers indicateurs. Il est basé sur des informations qualitatives étendues sur
l’importance et la portée des résultats innovants générés pour chaque entreprise
pendant les 3 années qui précèdent l’étude. Ces informations sont utilisées pour
attribuer une note aux innovations de l’entreprise en fonction du degré d’innovativité
- 63 -
Evaluation des processus d’innovation
contenu dans ces innovations sur une échelle allant de 5 (le plus innovant) à 1 (moins
innovant), en utilisant une classification à deux dimensions : (a) le degré de nouveauté
contenu dans les innovations et (b) le degré de mobilisation de l’expertise scientifique
spécialisée ou de l’expertise technologique avancée.
Les résultats de l’analyse des corrélations ont montré que les indicateurs (1) et (2) sont
faiblement liés. Par contre l’indicateur (3) est fortement lié aux deux premiers. Ce qui suggère
que l’indicateur (3) combine dans une grande mesure l’information capturée par les deux
autres indicateurs plus quelques informations additionnelles.
Cependant la compréhension de la mesure capturée par l’indicateur (3) est obtenue au prix
d’une forte subjectivité. La mesure reflète inévitablement les perceptions des personnes
interviewées. La combinaison des trois mesures fournit un meilleur résultat que celui qui
aurait été obtenu par les deux mesures conventionnelles représentées par les indicateurs (1) et
(2) prises séparément. Un travail supplémentaire doit être fait pour réduire leur subjectivité.
De plus, avant de généraliser ces résultats, ils devront être vérifiés dans des secteurs
d’activités autres que l’électronique et le logiciel.
(Yam et al., 2004) ont également proposé un cadre pour auditer les TICs des entreprises. Ce
cadre est basé sur un ensemble de sept TICs et il permet d’examiner la pertinence et
l’importance de ces TICs en vue de construire et de renforcer la compétitivité des entreprises.
L’amélioration des TICs peut avoir des retombées positives pour une entreprise et conduire
par la même occasion à une amélioration de sa compétitivité.
De manière similaire à l’approche de (Chiesa et al., 1998), le cadre proposé par (Yam et al.,
2004) inclut deux modèles d’évaluation : un audit de la capacité et un audit des performances.
1. L’audit de la capacité est basé sur un ensemble de sept TICs, subdivisés chacun en un
certain nombre de critères d’audit. Les sept TICs sont :
• Capacité d’apprentissage : c’est la capacité d’une entreprise à identifier, assimiler et
exploiter des connaissances internes ou en provenance de son environnement externe,
• Capacité de R&D : elle se réfère à la capacité d’une entreprise à intégrer des aspects
tels que la stratégie R&D, l’implémentation de projets, le management du portefeuille
de projets et les dépenses en R&D,
• Capacité de gestion des ressources : capacité d’une entreprise à acquérir et à allouer
de manière appropriée le capital, l’expertise et les technologies dans le processus
d’innovation,
• Capacité de production : capacité d’une entreprise à transformer les résultats de la
R&D en produits qui répondent aux besoins du marché, aux exigences de design et à
l’économie de production,
• Capacité marketing : capacité d’une entreprise à faire connaître ses produits et à les
vendre sur la base de la compréhension des besoins des consommateurs, de son
environnement, de l’acceptation de l’innovation et des coûts et bénéfices,
• Capacité organisationnelle : capacité d’une entreprise à avoir une culture de
l’organisation, à adopter de bonnes pratiques de management,
• Capacité de planification stratégique : capacité d’une entreprise à identifier ses forces
et faiblesses internes ainsi que les opportunités et menaces dans son environnement
externe et à formuler des plans conformément à sa vision et à ses missions.
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
S’appuyant sur les résultats des travaux de (Burgelman et al., 2004) et de (Chiesa et al., 1998),
(Guan et al., 2006) proposent un nouveau cadre d’audit des TICs permettant d’évaluer les
performances de l’innovation et le degré de compétitivité des entreprises. Les TICs
représentent un ensemble d’actifs (ou ressources) spéciaux de l’entreprise qui incluent la
technologie, le produit, le procédé, les connaissances, les expériences et l’organisation. Ce
cadre est basé sur sept capacités d’innovation technologiques et sept critères de compétitivité.
Les TICs sont :
• La capacité d’apprentissage,
• La capacité de R&D,
• La capacité de gestion des ressources,
• La capacité de production,
• La capacité de marketing,
• La capacité organisationnelle,
• La capacité de planification stratégique.
Les critères de compétitivité sont :
• La part de marché,
• Le taux de croissance des ventes,
- 65 -
Evaluation des processus d’innovation
Cette approche a été appliquée à 182 entreprises pékinoises jugées innovantes par le BSTC18
en 2000. Les résultats montrent que seulement 16 % de ces entreprises ont une utilisation
optimale de leurs capacités, c’est-à-dire qu’elles opèrent sur la frontière d’efficacité. Ce qui
signifie que ces entreprises ont une efficacité CRS19 égale à 1. La majeure partie des
entreprises doit donc améliorer son niveau de compétitivité. Cette étude révèle qu’il existe
une relation interne forte entre capacité d’innovation technologique et compétitivité. Et cette
relation sous-jacente fait que les scores CRS sont proches de 1. Des incohérences ont été
relevées dans plusieurs entreprises entre la capacité d’innovation organisationnelle et leur
compétitivité. Une contribution à l’échelle décroissante DRS a été trouvée pour près de 70%
des entreprises inefficaces et une contribution à l’échelle croissante a été trouvée pour les
30% d’entreprises inefficaces restantes. Le process d’harmonisation interne dans ces
entreprises est considérablement inefficace. L’inefficacité de la compétitivité des entreprises
est due en grande partie à une gestion inefficace de leurs différentes capacités d’innovation.
17
DEA : Analyse d’Enveloppement de Données
18
BSTC : Beijing Science and Technology Committee, est une importante organisation gouvernementale
chargée de définir les règles, l’allocation des ressources et la planification pour le développement de la science et
de la technologie à Beijing.
19
Return to Scale : décrit ce qui se passe lorsque l’échelle de production change. C’est une propriété technique
de production qui examine les changements dans les outputs relatifs à un changement proportionnel dans tous les
inputs (multiplication des outputs par une constante n). Quand les outputs croissent par le même taux de
changement proportionnel, alors ils ont une contribution à l’échelle constante CRS. Si les outputs croissent
moins par le changement proportionnel, alors ils ont une contribution à l’échelle décroissante DRS (Decreasing
Return to Scale). Dans le cas contraire, ils ont une contribution à l’échelle croissante IRS (Increasing Return to
Scale). L’approche VRS (Variable Return to Scale) se produit lorsqu’on obtient sur les différentes sections de la
frontière efficace, des phases CRS, DRS et IRS.
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
(Koc et Ceylan, 2007) ont aussi mené une étude pour étudier les facteurs qui influencent la
capacité d’innovation des entreprises. Ils se sont basés sur 3 moteurs principaux (ou groupes
principaux de variables) de la capacité d’innovation. Les variables correspondant à chaque
moteur principal ont été identifiées dans la littérature appropriée :
• La génération d’idées (10 variables),
• L’environnement technologique interne (18 variables),
• L’exploitation/acquisition de technologie (6 variables).
Les auteurs ont appliqué successivement la technique d’analyse en composante principale
puis l’analyse de régression pour analyser les données collectées auprès de 119 grandes
entreprises industrielles turques et ont ainsi déterminé les facteurs les plus importants. Les
résultats de cette étude révèlent que les facteurs déterminants de la capacité d’innovation des
entreprises sont :
• La stratégie de technologie,
• La qualité des idées,
• La génération d’idées,
• L’acquisition et l’exploitation de la technologie
• Le travail en équipe,
• L’organisation de l’apprentissage,
• La participation au management,
• La délégation.
De plus, les entreprises les plus innovantes considèrent les 4 premiers facteurs comme ceux
qui contribuent le plus significativement à la capacité d’innovation. Ces quatre facteurs
fournissent les informations utiles à la direction des entreprises pour mieux supporter leurs
activités d’innovation.
(Koc et Ceylan, 2007) préviennent que des précautions doivent cependant être observées dans
toute tentative de généralisation de ces résultats. Les données varient énormément en fonction
du secteur d’activité et même entre des entreprises à l’intérieur d’un même secteur d’activité
et aussi suivant la fonction de la personne interrogée dans l’entreprise. Des différences
peuvent donc être observées si l’étude est appliquée à des échantillons homogènes
d’entreprises appartenant au même secteur d’activité (automobile, chimie …). De plus, cette
étude exclut les petites et moyennes entreprises. Enfin il serait utile de vérifier les résultats
dans d’autres pays (la Turquie pouvant être considérée comme un pays en voie de
développement).
(Wang et al., 2008) abondent dans ce sens en proposant aussi un nouveau cadre analytique
multicritères pour évaluer les TICs d’un ensemble d’entreprises Hi-Tech. Ce cadre est basé
- 67 -
Evaluation des processus d’innovation
sur un ensemble de cinq facteurs clés. Ces facteurs sont chacun subdivisés en plusieurs
critères qualitatifs et quantitatifs (voir figure 11). Ces facteurs sont les suivants :
1. Les capacités de R&D,
2. Les capacités de décisions en innovation,
3. Les capacités de marketing,
4. Les capacités de production,
5. Les capacités financières.
n2 io n
1
lu at io lua
t
Éva Éva
Objectif Facteurs Critè res
Pourcentage des chercheurs sur l’ensemble des emp loyés
Part de marché
Figure 11 : Structure hiérarchique des TICs pour l’évaluation d’une entreprise, source
(Wang et al., 2008)
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
Vu que les TICs d’une entreprise sont typiquement subjectives et imprécises, ce qui augmente
la complexité du processus d’évaluation et que les TICs d’une entreprise mettent en
interaction plusieurs sources de capacités et de critères dont un grand nombre est interactif et
interdépendant, l’utilisation d’une approche multicritères traditionnelle ne convient pas car
une telle approche part de l’hypothèse que les attributs sont dépendants ; ce qui n’est pas
vérifié pour un grand nombre d’applications. Pour pallier ces problèmes et manques, (Wang et
al., 2008) proposent d’utiliser une approche basée sur des mesures floues et une fonction non
additive (intégrale de Choquet ou intégrale floue non-additive) pour agréger les résultats. En
effet, en utilisant une mesure floue et une intégrale floue non-additive, la subjectivité,
l’incertitude et l’interactivité des données (ex : problèmes liés au jugement subjectif de
l’expert) peuvent être combinées avec des nombres flous triangulaires et ainsi les éliminer.
Le processus d’évaluation des TICs que proposent les auteurs se fait sur deux
niveaux hiérarchiques (voir figure 11) : niveau des critères (Evaluation 1) puis le niveau des
facteurs (Evaluation 2).
1. La première étape consiste à faire une agrégation au niveau des critères de chaque facteur
pour obtenir le score pour ce facteur qui sera un nombre réel positif compris entre 0 et 1.
Plusieurs étapes sont nécessaires :
• Utilisation de mesures floues pour transformer les données attribuées aux critères
qualitatifs en nombres quantitatifs. Utilisation de nombres flous triangulaires pour
transformer les variables linguistiques des critères (exemple : Très haut, Haut, Moyen,
Bas, Très bas) en nombres flous, puis utilisation d’une méthode de defuzzification
pour obtenir un nombre quantitatif,
• Transformations des nombres quantitatifs des critères en nombres indépendants de
toute unité de mesure (normalisation) et donc comparables entre eux. En effet, les
différents nombres peuvent être exprimés dans des unités non comparables. C’est le
cas par exemple de deux critères du facteur « Capacité de R&D », à savoir le critère
« Nombre de brevets » qui est exprimé en entier positif et le critère « Intensité de la
R&D » qui est exprimé en pourcentage,
• Transformation des poids attribués par des experts aux différents critères en utilisant
également des mesures floues,
• Agrégation des données sur chaque ensemble de critères pour en obtenir une note
(nombre réel compris entre 0 et 1) pour chaque facteur. Cette opération est réalisée en
utilisant une intégrale de Choquet.
2. Dans un second temps, une nouvelle agrégation sera faite au niveau des facteurs pour
obtenir le score final de l’entreprise (nombre réel compris entre 0 et 1) et représentant la
performance globale de ses capacités d’innovation technologique :
• Transformation des poids attribués par des experts aux facteurs en utilisant des
mesures floues,
• Agrégation des notes des facteurs pour avoir le score final de l’entreprise (nombre réel
compris entre 0 et 1) en utilisant également une intégrale de Choquet.
Cette approche permet d’obtenir, à la fin du processus d’évaluation, les scores pour un
ensemble d’entreprises. Ces scores représentent les performances de des entreprises et
permettent de les comparer. Ainsi, pour deux entreprises A et B telles que scoreA > scoreB,
nous pouvons conclure que l’entreprise A est plus performante que l’entreprise B. Le grand
avantage de cette méthode est qu’elle est interactive et peut convenir aussi bien pour des
critères indépendants que dépendants.
- 69 -
Evaluation des processus d’innovation
Cependant cette approche propose une évaluation statique et non dynamique des entreprises.
De plus, les critères utilisés dans cette étude ont seulement été vérifiés pour des entreprises
Hi-Tech. Certains critères comme le pourcentage d’exportation (du facteur capacité
marketing) par exemple ne peuvent pas être valables pour tous les contextes et dans tous les
secteurs d’activité.
En synthèse de ce paragraphe, nous remarquons que de plus en plus d’études portent sur
l’évaluation des capacités d’innovation des entreprises. La capacité à innover est considérée
par beaucoup d’auteurs comme faisant partie des facteurs les plus importants et ayant un
impact positif considérable sur les performances des entreprises.
Cependant, dans l’ensemble des méthodes, les activités évaluées ne sont pas identiques selon
le secteur industriel étudié. Le mode d’évaluation n’est donc pas générique et de ce fait ni le
praticien ni le chercheur ne disposent d’un vrai référentiel. La collecte des données posent
également problème puisque l’on se base en général sur des opinions émises lors d’interviews
rapides (moins d’une demi-journée). De plus, la réalité de la mise en œuvre des activités est
subjective, en particulier du fait de la différence d’appréciation entre l’évaluateur et le
répondant concernant certaines activités. Par exemple, il n’est pas évident d’avoir la même
acceptation du mot R&D. De ce fait, le lien entre activités et outputs n’est pas fiable.
Dans ce domaine nous constatons que des manques existent encore dans la littérature.
Ce mode d’évaluation concerne aussi bien le niveau Entreprise que le niveau Environnement.
Le comptage de brevets traduit les résultats de l’activité d’invention en montrant que l’effort
de recherche a abouti à cette dernière et rentre dans la dimension technologique de
l’innovation.
Cependant ce critère donne une évaluation réductrice de la notion d’innovation. En effet,
• Le brevet ne couvre qu’une partie de toute la trajectoire menant de la R&D à
l’innovation,
• Il ne tient pas compte des efforts faits par l’entreprise dans les autres secteurs
d’activité tels que la production, le marketing, le développement qui constituent
aujourd’hui des champs privilégiés de recherche sur l’innovation,
• Il ne rend pas totalement compte du degré d’innovation d’une entreprise car ne sont
brevetés que les résultats d’une invention technologique mais pas ceux de
l’innovation,
• Toutes les inventions ne sont pas brevetées, ni brevetables. De plus, de nombreux
brevets ne seront jamais traduits en produit ou mis en application. Par contre,
certaines innovations sont protégées par une multiplicité de brevets,
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
• Les brevets ayant une valeur technologique ou économique nulle sont nombreux. Un
grand nombre de brevets par contre a une valeur très importante,
• Une même importance est accordée à tous les brevets ; aucune distinction n’est faite
entre les brevets ayant une très grande importance et ceux d’importance moyenne ou
faible,
• Les comportements de brevetage varient suivant le secteur d’activité, le pays, la taille
des entreprises (grandes ou petites).
Malgré ces limites, le comptage de brevets est généralement accepté comme l’un des
indicateurs les plus appropriés, permettant aux chercheurs de comparer la performance
inventive ou performance d’innovation des entreprises en termes de nouvelles technologies,
de nouveaux produits et de nouveaux produits (Griliches, 1990).
Une autre possibilité pour mesurer la performance des résultats de l’innovation est le
comptage des citations de brevets. De plus en plus de chercheurs, particulièrement dans le
domaine de l’économie, utilisent les citations de brevets comme un indicateur de la
performance inventive des entreprises (Hagedoorn et Cloodt, 2003).
En comparaison avec le comptage des brevets qui génère une mesure purement quantitative,
les citations de brevets fournissent une mesure de la qualité des brevets. Le nombre de
citations pour un brevet particulier dans des brevets futurs indique son importance
technologique ou son impact.
Cependant (Hagedoorn et Cloodt, 2003) précisent que les spécialistes de brevets sont toutefois
sceptiques sur le comptage des citations de brevets. Pour qu’une analyse des citations de
brevets soit réellement valable et performante, il serait indispensable d’avoir un minimum de
connaissances sur les rapports de recherche qui accompagnent ces brevets.
Pour les raisons évoquées ci-dessus, (Guellec, 2003) affirme que le brevet n’offre qu’une
mesure imparfaite d’output. (Crepon et al., 2000) proposent de compléter l’information
fournie par la mesure des brevets par la part des ventes réalisées en produits de moins de
cinq ans ou taux de renouvellement des produits. Cette nouvelle mesure pondère les
innovations par les ventes de chaque produit et prend en compte aussi bien les innovations
réelles que les améliorations et les imitations. Ces informations peuvent aussi être complétées
par d’autres mesures telles que les statistiques sur les publications scientifiques
(bibliométrie), les articles parus dans les revues professionnelles et techniques et la
balance des paiements technologiques.
(Jensen et Webster, 2004) ont fait l’inventaire d’autres approches utilisées dans la littérature
pour évaluer les outputs du processus d’innovation.
La première de ces approches utilisée comme mesure des outputs du processus d’innovation
est le décompte des innovations recensées dans les journaux commerciaux. Cette méthode
- 71 -
Evaluation des processus d’innovation
a été largement utilisée dans des pays comme la Hollande, l’Irlande et l’Autriche
(Kleinknecht et Bain, 1993 ; Brouwer et Kleinknecht, 1996).
Le décompte des innovations recensées dans les journaux commerciaux a plusieurs
avantages :
• Il ne nécessite pas de conformité entre entreprises,
• Les informations sont très faciles à collecter,
• Une série chronologique peut être obtenue puisque des dossiers d’historiques sont
toujours disponibles,
• Il n’est pas soumis aux mêmes biais techniques et économiques que ceux liés à la
décision de breveter,
• Les prix pour figurer dans un journal sont négligeables et les articles ne sont pas
limités aux innovations brevetables.
Cependant cette mesure a des limites :
• Il est improbable que cette mesure puisse faire la distinction entre vraies inventions,
produits imités et par conséquent des leaders de marché,
• Elle constitue une mauvaise source d’informations sur les innovations de procédés,
• Elle représente généralement l’étape finale du processus d’innovation.
(Jensen et Webster, 2004) présentent en plus deux approches plus qualitatives pour mesurer
les outputs de l’innovation.
La seconde approche concerne les enquêtes auprès de managers qui exigent de ces derniers
de quantifier ou d’évaluer les résultats des activités d’innovation de leur entreprise pendant
une période de temps donnée, telles que le nombre de nouveaux produits ou encore
l’importance de l’introduction de nouveaux procédés et technologies.
Les avantages des enquêtes auprès de managers sont que :
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
• Cette mesure est comparable pour des entreprises opérant sur différents marchés et
domaines technologiques,
• Cette mesure peut potentiellement expliquer les facteurs d’hétérogénéité et d’unicité à
travers des études d’enquêtes appropriées.
Les inconvénients sont que :
• Des problèmes peuvent survenir à cause du grand nombre de personnes différentes
impliquées dans les évaluations ainsi que des difficultés liées à des comparaisons
inter-personnelles,
• Cette mesure peut être très coûteuse à mettre en place et avoir aussi de faibles taux de
réponses.
Hormis les approches présentées plus haut, plusieurs sources utilisent la déclaration de
nouveaux produits (ou nombre de nouveaux produits introduits sur le marché pendant
une période de temps donnée), recensée dans de nombreuses sources et bases de données,
comme un indicateur de la performance en innovation des entreprises (Hagedoorn et Cloodt,
2003 ; Jensen et Webster, 2004).
L’avantage majeur de cette approche est que les données à collecter sont faciles à trouver.
Cependant l’un des problèmes majeurs du nombre de produits déclarés est que ces
déclarations sont basées sur des communiqués de presse des départements marketing des
entreprises et que peu ou aucune sélection n’est faite par les gestionnaires de bases de données
eux-mêmes. Seules les entreprises décident si leur produit est nouveau ou pas. Ce qui peut
être source de subjectivité.
Contrairement aux approches précédentes, (Tomola, 2002) propose d’évaluer non pas le
résultat brut du processus d’innovation (produit ou procédé nouveau) de l’entreprise, mais les
effets imaginés ou réels de l’innovation sur son environnement, tout au long de son cycle
de vie à l’aide de quatre types d’indicateurs.
Ces indicateurs sont :
• Les modifications sur le produit du projet d’innovation,
• Les modifications sur le processus spécifique au produit,
• Les indicateurs génériques, valables pour toute entreprise,
• Les indicateurs spécifiques propres au secteur.
Cette méthode de type ingénierique s’apparente aux méthodes utilisées en sûreté de
fonctionnement (arbres des causes et des défaillances). Elle s’inspire des principes de
l’analyse de risques de types AMDEC20 :
• Identification des événements initiaux,
• Identification des conséquences,
• Estimation et évaluation des effets de l’innovation.
20
L’AMDEC (Analyse des Modes de Défaillance, de leurs Effets et de leur Criticité) est un outil de Sûreté de
Fonctionnement et de gestion de la qualité.
- 73 -
Evaluation des processus d’innovation
Cependant ce genre de méthode présente des limites. L'AMDEC est essentiellement une
démarche déductive et exhaustive qui consiste à définir au niveau d'un système les effets des
défaillances des éléments de ce système (les défaillances des éléments doivent être connues).
De plus, cette méthode ne résout pas le problème de la fiabilité des indicateurs utilisés. Les
liens entre l’innovation et ses effets sur son environnement restent subjectifs.
En plus des approches traditionnelles de mesure des outputs que sont les mesures en termes de
brevets (comptage et citations de brevets) et le nombre de nouveaux produits et certaines
autres approches exposées plus haut, de nombreuses autres approches ont été recensées dans
la littérature. Ces approches participent à la mesure des outputs des entreprises, mais elles
s’intéressent essentiellement à ses sous-niveaux que sont les niveaux Produit et Projet.
Concernant le niveau Produit (produit, procédé, technologie, …), nous pouvons citer les
approches permettant d’évaluer les conditions de succès et d’échec du développement de
produits (Barbiroli, 1996 ; Griffin et Page, 1996).
(Barbiroli, 1996) a proposé une méthode utilisant des indicateurs spécifiques pour mesurer les
aspects d’efficacité technique et économique des procédés de production et des technologies
adoptées et par conséquent de succès du processus d’innovation.
Les aspects d’efficacité mesurés sont :
• L’efficacité du cycle de matériels
• L’efficacité du cycle d’énergie
• L’efficacité environnementale globale de l’activité.
• L’efficacité environnementale du produit final
• L’efficacité environnementale du cycle d’énergie
• L’efficacité de la qualité absolue du produit
• L’efficacité de la qualité constante du produit
• L’efficacité de la production statique des équipements
• L’efficacité de la production dynamique des équipements
• L’efficacité de la variabilité du mélange de produits
• L’efficacité du volume de produit
• L’efficacité des entrées
Les aspects d’efficacité contribuent à donner aussi bien une orientation marketing que socio-
économique et contribuent à mesurer avec précision, les divers phénomènes associés aux
activités de production aussi bien au niveau technique qu’au niveau économique. Ces mesures
d’efficacité s’avèrent importantes pour permettre à l’entreprise de poursuivre ses actions, les
modifier ou tout simplement les interrompre.
Cependant la validité des résultats fournis par cette méthode dépend fortement de l’exactitude
des données à manipuler.
Dans le même ordre d’idées, (Griffin et Page, 1996) ont proposé une série de 18 indicateurs
pour mesurer le succès et l'échec dans le développement du « produit nouveau », appelé Projet
PDMA. Ces indicateurs à mesurer prennent en compte l’équilibre financier, l’amélioration
technique et la satisfaction du client.
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
Beaucoup d’approches de mesure des outputs concernent les projets développés et pilotés par
les entreprises et portent sur leurs conditions de succès et d’échec (Millier, 2005 ; Mazzarol et
Reboud, 2006).
Par exemple, (Millier, 2005) a proposé un modèle synthétique des conditions de succès d’un
projet d’innovation. Les facteurs déterminant le succès ou l’échec des projets d’innovation ont
été identifiés suivant trois dimensions : technique, commercial et interne. L’auteur identifie
douze critères de réussite du produit, qui se repartissent par grappes de quatre sur chacune des
trois dimensions du modèle (voir figure 12 ci-dessous).
Ce modèle a été décliné en outil de management de l’innovation pour évaluer dans l’absolu un
projet dans son environnement ou comparativement à d’autres projets actuels ou prospectifs.
Cela se fait en attribuant une note comprise entre 1 et 5 à chaque critère. L’auteur tempère
toutefois cette méthode en notant que ce n’est pas forcément le projet qui a les notes les plus
élevées pour chaque critère qui sera le meilleur. Un projet peut réussir sans pourtant réunir
- 75 -
Evaluation des processus d’innovation
toutes les conditions de succès car des faiblesses sur certaines conditions peuvent être
compensées par d’autres conditions plus fortes. Cet outil ne peut pas servir à évaluer plus
globalement la capacité d’une entreprise à innover, mais il est complémentaire.
Figure 12, Modèle synthétique des conditions de succès d’un projet d’innovation, source
(Millier, 2005)
En conclusion de cette partie, nous remarquons que de nombreuses recherches ont été
menées pour mesurer les outputs du processus d’innovation. Ces approches touchent plusieurs
niveaux opérationnels d’intervention de l’innovation et sont basées sur un grand nombre
d’indicateurs jugés nécessaires par les auteurs pour circonscrire l’ensemble des outputs.
Cependant, la grande limite des ces approches est qu’elles s’intéressent exclusivement aux
outputs du processus d’innovation, sans trop se soucier des ressources qui sont intervenues
dans sa réalisation, ni sur les activités qui ont permis sa transformation. De ce fait, il est
difficile, en phase d’analyse, de corréler l’évolution des résultats avec les caractéristiques du
processus qui les génèrent.
Face aux insuffisances des approches orientées « outputs » du processus d’innovation et celles
basées également exclusivement sur les « inputs » et les « activités », certaines études ont été
développées pour combler ces manques en utilisant des indicateurs couvrant plusieurs phases
du processus d’innovation (inputs, activités et outputs).
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
C’est le cas de (Chiou et al., 1999) qui proposent une approche pour mesurer la
productivité de la technologie dans le développement du produit. Cette approche, nommée
TOPMM (Technology Oriented Productivity Measurement Model) permet d’estimer
simultanément l’efficacité et l’efficience du processus de développement de technologies
nouvelles, en analysant les relations qui existent entre les critères d’entrée et les critères de
sortie du modèle.
Les entrées mesurables du modèle sont :
• Les dépenses en développement,
• Les dépenses en main d’œuvre,
• Les dépenses en matériel,
• Les dépenses de capital,
• Les dépenses en énergie,
• Les dépenses en ordinateurs,
• Les dépenses en robotique,
• Les autres formes de dépenses en technologie,
• Les dépenses en formation,
• Les autres dépenses administratives.
Les sorties mesurables sont :
• R&D : idées nouvelles, modèles et prototypes partiellement complétés ou finalisés,
comptages de publications et de citations, nombre de brevets et d’innovations, nombre
de rapports expérimentaux,
• Génie : nombre de brevets d’innovations technologiques, paramètres des performances
techniques, modèles et prototypes partiellement achevés ou finalisés, plans et
graphiques partiellement achevés ou finalisés,
• Fabrication : produits intermédiaires, produits finalisés, autres résultats associées à des
unités produites,
• Marketing : rapports d’études de marché, chiffre d’affaire,
• Finances : nombre d’analyses financières ou de rapports d’évaluation,
• Gestion des ressources humaines : nombre de cours de formation professionnelle,
d’employés et d’heures de travail.
L’approche examine les technologies-clés, elle estime les valeurs relatives qui sont
importantes pour les divisions de l’entreprise concernées et en calcule la productivité.
Cependant les calculs du TOPMM sont assez complexes. Pour les auteurs, il serait pratique de
l’implémenter avec le système d’information de l’entreprise.
De leur côté, (Hagedoorn et Cloodt, 2003) proposent une mesure de la performance des
entreprises basée sur une approche multi-indicateurs. Les indicateurs pris en compte sont les
- 77 -
Evaluation des processus d’innovation
inputs de R&D, le comptage des brevets, les citations de brevets et le comptage de produits
nouveaux. Cette approche a été proposée pour pallier les problèmes et les limites relevés dans
l’utilisation séparée de ces indicateurs.
L’avantage d’une telle approche selon les auteurs est qu’au lieu de supposer la validité d’un
indicateur unique, probablement choisi pour des raisons de convenance et prouver qu’il a plus
d’intérêts que les autres, une analyse par indicateurs multiples permet de mesurer la
performance d’innovation à travers une mesure plus complexe, plus informative et composite.
En plus de cela, une mesure composite peut être analysée en détail, c’est-à-dire en termes
d’indicateurs pris séparément et ainsi permettre de déterminer la contribution de chaque
indicateur particulier à la performance d’innovation globale.
(Hagedoorn et Cloodt, 2003) utilisent les diagrammes de Venn pour identifier dans quels cas
il serait souhaitable d’utiliser des indicateurs simples ou plutôt des indicateurs multiples (voir
figure 13). Les diagrammes de Venn illustrent les interactions possibles qui existent entre les
indicateurs de performance d’innovation retenus (R&D, les brevets, etc.). Le degré de
chevauchement entre les différents indicateurs particuliers détermine l’utilité de considérer
des indicateurs simples ou plutôt des indicateurs multiples. En effet, l’intersection dans le
diagramme de Venn sera d’autant plus large que l’entreprise (ou l’industrie) est caractérisée
par de fortes intensités des indicateurs particuliers. Dans le cas ou le chevauchement est plus
ou moins total, la mesure de la performance d’innovation peut se limiter à un seul indicateur
(voir figure 13, partie A). Dans le cas où le chevauchement est plus ou moins faible, une étude
séparée de chaque indicateur doit être faite (voir figure 13, partie B). Dans les autres cas avec
des degrés de chevauchement variés entre les indicateurs, l’utilisation d’indicateurs multiples
devra être envisagée car elle fournira un bien meilleur résultat de performance d’innovation.
Les résultats de l’étude sur un panel de 1200 entreprises de 4 secteurs industriels de haute
technologie (aviation et défense, ordinateurs et machines de bureau, industrie pharmaceutique
et électronique et communications) montrent qu’il n’existe pas de disparité systématique
majeure entre les indicateurs (inputs R&D, comptage et citations de brevets, déclaration de
nouveaux produits). Aucune disparité systématique n’a été trouvée ni pour le panel dans son
ensemble, ni pour les secteurs pris individuellement, ni même quand on tient compte de la
distribution internationale des entreprises. Une approche multi-indicateurs est donc appropriée
dans ce cas avec toutefois quelques différences dans son utilisation suivant l’industrie
considérée.
Cependant cette méthode n’a pas été testée sur d’autres industries que ces secteurs de haute
technologie pour vérifier la validité de ces indicateurs ; ce qui constitue une limite de ce
travail. Selon l’auteur il est évident qu’on aurait plutôt besoin d’un ensemble d’indicateurs
différent pour mesurer la performance en innovation des entreprises de secteurs non-
industriels (industries de services par exemple). De plus, il serait utile de vérifier si aucune
information additionnelle n’est nécessaire pour avoir une meilleure mesure des performances
en innovation.
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
- 79 -
Evaluation des processus d’innovation
entreprises (avec un champ plus large que les brevets), sur les activités innovantes autres que
la R&D (particulièrement importantes dans les services), sur les comportements des
entreprises innovantes et sur les mécanismes de l’innovation (les sources d’informations
mobilisées, la coopération entre les acteurs privés et/ou publics).
En France, c’est le Service des Études et des Statistiques Industrielles (SESSI) qui réalisent
chaque année l’enquête communautaire sur l’innovation. Cette enquête vise à fournir des
informations quantitatives sur la fréquence de l’innovation dans les entreprises (fréquence en
nombre d’entreprises et parts de chiffres d’affaires résultant de l’innovation) et sur des aspects
particuliers du processus d’innovation (part des dépenses d’innovation, sources d’information
et formes de collaboration, facteurs freinant l’innovation, degré de réalisation des objectifs
liés à l’innovation).
(Guellec, 2003) présente quelques résultats issus d’enquêtes innovation dans différents pays :
• Beaucoup d’entreprises innovent : petites entreprises, entreprises de services, ...
• Les entreprises innovantes ont en général de meilleures performances que les autres en
termes de productivité, de profitabilité, de création d’emploi,
• L’innovation est un facteur essentiel de réallocation des emplois entre les secteurs
industriels,
• Les clients et fournisseurs sont une source d’information majeure pour les entreprises
innovantes,
• La coopération avec les universités et laboratoires publics de recherche compte
beaucoup pour les entreprises les plus innovantes,
• Le brevet est une source d’information importante pour les entreprises les plus
innovantes.
Malgré les informations importantes issues de ces enquêtes en relation avec la mesure de
l’innovation, cette méthode comporte quelques insuffisances :
• Un problème de définitions : les définitions commencent à intégrer seulement les
innovations non technologiques (les innovations en matière de commercialisation et
les innovations organisationnelles),
• Un problème de subjectivité : les informations actuellement collectées sont
essentiellement qualitatives et peuvent être parfois difficiles à interpréter,
• Un problème de compréhension : de nombreuses questions sont faiblement comprises
par les entreprises, par conséquent la fiabilité des réponses est faible,
• Un problème de comparabilité internationale : comparabilité imparfaite des résultats
entre les différents pays.
On note aussi que la majeure partie des études réalisées par beaucoup d’organisations et de
chercheurs est basée sur la mesure des inputs et des outputs de l’innovation en termes de
dépenses, de vitesse de mise sur le marché et de nombre de nouveaux produits et ont
cependant ignoré de mesurer les processus intermédiaires de mise en œuvre de l’innovation au
sein de l’entreprise. L’approche d’évaluation qui est retenue pour une étude donnée dépend
généralement de l’objectif visé par l’évaluateur. Dans la littérature concernant le management
de l’innovation, ce sont des mesures de certains aspects de l’innovation qui sont proposées.
Elles répondent aux besoins spécifiques aussi bien des entreprises que des chercheurs de
comprendre l’efficacité de leurs actions d’innovation (Kim et Oh, 2002).
Pendant longtemps, très peu d’études ont porté sur la mesure des activités d’innovation.
(Adams et al., 2006) ont fait ce constat lors de leur revue de la littérature sur les approches de
mesure de l’innovation : « on observe aussi une absence de mesures exclusivement destinées
aux activités d’innovation ».
Il nous est donc apparu que des contributions sont encore possibles dans le domaine de
l’évaluation des activités. En particulier, il nous est apparu qu’un travail reposant davantage
sur des observations constituerait une contribution notoire. C’est sur ce point que nous avons
spécialisé notre travail.
- 81 -
Evaluation des processus d’innovation
Dans les chapitres précédents, nous avons présenté différentes notions relative à l’innovation
technologique. Pour réussir leur processus d’innovation, plusieurs actions sont mises en
œuvre par les acteurs qui en ont la charge. Le souci pour eux est de pouvoir connaître à
chaque instant si les actions qu’ils développent vont porter leurs fruits et si elles permettent
également d’améliorer les performances de leur organisation (entreprise dans notre cas). Dans
le chapitre précédent, nous avons exposé les différents modes d’évaluation du processus
d’innovation en les replaçant selon une vision par flux : inputs, activités, outputs. Dans notre
étude, il sera beaucoup plus question de juger de la nature et de la pertinence des opérations et
des activités de pilotage de l’innovation plutôt que d’évaluer le rendement des opérations
(moyens mis en œuvre versus résultats).
Le but de notre étude est donc de contribuer à une standardisation d’une métrologie de
l’innovation au niveau « entreprise » avec comme enjeu de proposer un cadre d’évaluation
des activités effectivement mises en œuvre au niveau de l’Entreprise. Une mesure de la
capacité à innover pourrait fournir une base utile aux managers des entreprises en vue de
contrôler et d’évaluer leurs processus d’innovation, de diagnostiquer leurs limites et d’en
prescrire des remèdes (Cebon et Newton, 1999). Le cadre d’évaluation de ce niveau
d’intervention – Entreprise – devra être évolutif pour prendre en compte les nouvelles
pratiques émergentes dans le domaine du pilotage de l’innovation et exclure celles qui sont
devenues obsolètes. Le but n’est pas de suggérer une approche normative du management de
l’innovation : il ne s’agit pas d’affirmer que hors des pratiques proposées l’innovation n’est
pas garantie. L’objectif est que le mode d’évaluation soit générique pour que les décisions de
pilotage soient plus aisément adaptées au contexte. Améliorer le processus d’innovation
nécessite une approche contextuelle.
Nous pouvons définir notre problématique de recherche comme suit : Comment réaliser
l’évaluation d’un processus complexe sur la base de ses activités, sachant que ce
processus évolue régulièrement afin de poursuivre sa finalité de recherche de
nouveauté ?
L’évaluation dans notre cas doit donner un sens à l’action, c’est-à-dire permettre de prendre
des mesures pour améliorer le processus d’innovation. C’est la raison pour laquelle il nous a
semblé important de réfléchir en termes de capacité à innover. Pour nous, il ne s’agira pas
d’affirmer qu’une entreprise est innovante et qu’une autre ne l’est pas, mais plutôt de se
placer dans une logique de progrès. Les questions que nous pouvons nous poser sont de cet
ordre :
• Quel est le potentiel actuel de l’entreprise en matière d’innovation ?
• Quelles sont les actions à mettre en place pour faire évoluer son processus
d’innovation ?
Dans ce cas, la mesure est perçue comme un outil d’aide à la décision, ce qui tend à la placer
plutôt dans le champ de l’évaluation.
Notre étude s’appuie sur une base de connaissances en quinze « Best Practices » ou
pratiques fondamentales de pilotage de l’innovation (Boly, 2004 ; Assiélou et al., 2008),
dont la réalisation devra situer les entreprises sur leur maîtrise de l’innovation. De plus, nous
avons décidé de nous baser sur des faits avérés en entreprise, observables directement pour
Partie 1 : Etat de l’art et problématique de recherche
Pour traiter les données des entreprises, nous utiliserons une méthode multicritères d’aide à la
décision (MCDA) combinée à la méthode statistique de la valeur-test pour définir un indice
d’innovation potentielle (IIP) des entreprises et proposer une typologie des entreprises. Notre
approche permettra de différentier des entreprises au sein de panels dont la taille peut évoluer
à tout moment, grâce à leur appartenance aux classes d’entreprises et aussi en fonction de leur
IIP. Nous chercherons à proposer des algorithmes pour lesquels les pondérations pourront
évoluer en fonction du contexte étudié. La capacité à innover est une capacité potentielle ou
une aptitude à innover. Elle dépend du contexte (secteur d’activité, type d’activité,
localisation géographique, etc.). Elle n’a pas de rapport direct avec les résultats du processus
d’innovation : nombre de brevets, chiffre d’affaire, etc.
Grâce à cette évaluation des activités qui se veut générique, il sera possible à termes de mieux
décrire les relations Output/Input ou encore Output/Activités/Input sans pouvoir
nécessairement réaliser de véritables bilans. Mais surtout ce travail devrait aider à comprendre
le lien Entreprise/Environnement. Il sera possible de mieux comprendre quelles pratiques
dans des contextes particuliers et sur un intervalle de temps donné ont plus d’impact que
d’autres.
- 83 -
PARTIE 2 :
DEMARCHE METHODOLOGIQUE ET
OUTIL D’AIDE A L’AUTO-
EVALUATION
Partie 2 : Démarche méthodologique et outil d’aide à l’auto-évaluation
Introduction de la partie 2
Dans la deuxième partie de ce manuscrit, nous allons présenter nos contributions théorique et
méthodologique qui ont aboutit au développement d’un outil d’aide à l’auto-évaluation des
entreprises (notre contribution opérationnelle). Nos travaux s’intègrent dans la lignée de
travaux réalisés depuis quelques années au sein du laboratoire.
2. En second lieu, nous nous sommes penchés sur le mode de collecte des données. Nous
avons décidé d’utiliser une grille d’observation. Elle s’appuie sur une liste réalisée au
sein du laboratoire pour collecter les données d’entreprises en vue de leur évaluation.
La grille d’observation a été élaborée en tenant compte des deux nouvelles pratiques
d’innovation que nous avons ajoutées à la liste des pratiques existantes ainsi que les
critères (phénomènes ou faits) directement observables qui leur sont associés. Les
précisions sur cette partie seront faites au paragraphe 5.2,
3. Des travaux précédents réalisés au sein du laboratoire ont permis de proposer une
première approche d’évaluation de la capacité à innover des entreprises (Corona
Armenta, 2005). Ces travaux utilisent une méthode d’analyse multicritères d’aide à la
décision MDCA (une moyenne arithmétique pondérée) pour définir un indice
d’innovation potentielle (IIP) servant à comparer les entreprises. Cet indice permet de
proposer une typologie des entreprises en quatre classes d’entreprises (proactive,
préactive, réactive et passive) sur le modèle de la typologie proposée par (Godet,
1997), en réalisant une étude comparative de l’approche par l’IIP avec deux autres
méthodes MCDA (Electre 1 et AHP21). Notre proposition reprend l’idée d’un IIP et
d’une classification en quatre classes d’entreprises. Après avoir identifié les limites
des travaux précédents, nous proposons une approche d’évaluation utilisant le principe
de l’IIP pour agréger les données des entreprises et obtenir leur IIP, combinée à la
technique statistique de la valeur-test pour déterminer les profils de préférences des
classes d’entreprises et donc affecter les entreprises à ces classes. Les travaux
précédents utilisaient un système de pondération des pratiques d’innovation (ou profil
de préférences) donné par des experts en innovation suivant leur estimation de la
21
AHP : Analytic Hierarchy Process
- 85 -
Evaluation des processus d’innovation
4. Enfin une autre contribution de nos travaux a été de proposer un outil logiciel d’auto-
évaluation permettant d’automatiser les traitements de données. Cet outil permet à tout
praticien qui l’utilise de faire rapidement un audit des performances du processus
d’innovation de son entreprise, de la comparer à d’autres entreprises, d’identifier ses
forces et faiblesses et d’avoir des recommandations sur les actions à mettre à place
pour améliorer sa capacité à innover. Un tel outil est utile pour présenter les résultats
d’une évaluation (IIP, comparaisons d’entreprises, etc.) et peut permettre une
meilleure interaction entre les différents intervenants dans un processus d’innovation.
La description des fonctionnalités de l’outil sera faite au chapitre 6.
Les détails de notre cheminement et de nos contributions par rapport aux travaux précédents
sont représentés sur la Figure 14 suivante :
Partie 2 : Démarche méthodologique et outil d’aide à l’auto-évaluation
RECHERCHES NOTRE
PRECEDENTES CONTRIBUTION
Cette deuxième partie du manuscrit contient 2 chapitres. Le chapitre 5 permettra de traiter les
deux premiers niveaux (voir Figure 14) relatifs à la seconde partie de notre contribution
théorique, ainsi que le niveau 3 qui porte sur notre contribution méthodologique. Le chapitre 6
sera consacré à notre contribution pratique, c’est-à-dire à la description de l’outil logiciel.
- 87 -
Evaluation des processus d’innovation
Par la suite, des travaux de recherche menés au sein du laboratoire se sont basés sur ces 13
pratiques pour proposer une méthodologie d’évaluation de la capacité à innover des
entreprises (Corona Armenta, 2005 ; Morel, 2007). Ces pratiques sont acceptées dans le
laboratoire comme référant en matière de pilotage du processus d’innovation en entreprise.
Pour notre travail de recherche, nous avons également décidé de nous baser sur ces 13
pratiques. Ces pratiques ou facteurs, caractéristiques du niveau « entreprise », sont définies
comme suit :
• P1 - Conception : les acteurs de l’innovation œuvrent à l'évolution des projets et donc
de la technologie par des travaux de conception,
• P2 – Suivi de projets : un suivi de chaque projet innovant est fondamental,
• P3 – Supervision stratégique : une supervision globale des projets innovants (budget,
délai...) doit être menée en intégrant la dimension stratégique impulsée par la
Direction,
• P4 – Gestion de portefeuille de projets : au sein du portefeuille de projets, la
Direction assure la gestion de la cohérence entre les différentes initiatives,
• P5 – Contrôle/rétroaction sur le processus : un contrôle et une rétroaction de la
Direction et des responsables de projet sur le processus d’innovation est nécessaire
pour faire évoluer les pratiques des acteurs,
Partie 2 : Démarche méthodologique et outil d’aide à l’auto-évaluation
Suite à notre étude bibliographique, nous avons identifié deux nouvelles pratiques que nous
avons jugées importantes d’ajouter à l’ensemble des pratiques existantes en vue de mieux
cerner les activités d’innovation en entreprise (Assiélou et al., 2008).
Ces deux nouvelles pratiques d’innovation sont :
• P14 – Les activités de R&D : les acteurs de l’innovation participent à des activités de
R&D pour faire évoluer la technologie et les pratiques de l’entreprise,
• P15 – La gestion de la relation client : L’intégration des connaissances du client et
de sa perception des produits de l’entreprise permet de générer des concepts et des
produits mieux adaptés
Une place importante est accordée à ces deux pratiques dans la littérature et dans de
nombreux discours d’industriels en ce qui concerne leur rôle prépondérant dans la réussite du
pilotage d’un processus d’innovation. Ces raisons nous ont poussés à les ajouter à notre
ensemble de pratiques d’innovation. Cela dans un souci d’être plus exhaustif et plus proches
de la réalité des entreprises industrielles engagées dans l’innovation. La méthodologie que
nous proposons n’a de sens véritable que si elle a un caractère évolutif, c’est-à-dire qu’elle
permet l’intégration de nouvelles pratiques émergentes dans le domaine du pilotage de
l’innovation ou de retirer celles qui sont devenues obsolètes.
Dans les paragraphes suivants, nous allons montrer l’importance de ces deux pratiques pour le
pilotage de l’innovation.
- 89 -
Evaluation des processus d’innovation
La R&D renferme toutes les activités visant à étendre le champ des connaissances
(technologies, savoirs, savoir-faire) des organisations et dont l’application doit permettre de
créer des produits, procédés et services nouveaux ou améliorés (Parisi et al., 2006). Son rôle
dans le changement de la trajectoire de l’économie des entreprises est indéniablement
important, de même que son rôle dans le processus de changement technologique. Tout
changement majeur dans les technologies existantes ne peut se produire que si des efforts
explicites conséquents sont faits à travers la recherche et le développement, même si les
résultats de tels efforts peuvent parfois être incertains (Sagar et Van Der Zwaan, 2006).
La recherche peut alors être intégralement menée en interne dans les entreprises ou être faite
avec l’aide de partenaires extérieures. Dans le cas des coopérations et partenariats de
recherche, la R&D porte en général sur de nouveaux produits et processus et plus rarement
sur les autres dimensions de la technologie. Une tendance récente est l’augmentation de la
coopération en R&D avec les clients, les fournisseurs, les concurrents, les universités et les
organisations publiques de recherche (Segarra-Blasco et Arauzo-Carod, 2008). Une bonne
manière pour les entreprises de rehausser leurs activités de R&D est d’encourager les accords
de coopération avec d’autres entreprises privées et/ou organisations publiques de recherche.
Les entreprises sont de plus en plus contraintes de conjuguer leurs forces internes avec les
principales compétences de partenaires pour rehausser ou soutenir leurs capacités à fournir
des produits et services supérieurs (Mohr et Spekmann, 1994). En effet, une part significative
d'innovations ne survient pas d’un seul individu ou d’une seule organisation, mais plutôt des
efforts conjugués de multiples individus ou organisations (Schilling, 2005). Les raisons qui
motivent ce choix sont multiples, entre autre, le souci des entreprises de partager les coûts et
les risques liés aux activités de R&D et à la diffusion de l’information. La coopération en
R&D peut également permettre à l’entreprise de bénéficier des savoirs, savoir-faire,
compétences et ressources (humaines, techniques, matérielles, etc.) d’autres organisations qui
manquent en son sein et dont le développement en interne aurait coûté beaucoup trop cher. La
Partie 2 : Démarche méthodologique et outil d’aide à l’auto-évaluation
coopération en R&D est aussi utile pour réduire les temps de conception de nouvelles
technologies et le développement de nouveaux produits, d’autant que le cycle de vie des
produits et des technologies se réduit considérablement. Le recours à un partenaire extérieur
peut se faire soit dans le cadre d’activités de recherche et de développement communes, soit
par sous-traitance de certaines activités ne représentant pas le cœur de métier ou le savoir-
faire majeur de l’entreprise. Dans certains secteurs d’activité, on assiste à une externalisation
forte de la recherche. C’est le cas dans le secteur pharmaceutique où on estime que la part de
R&D sous-traitée est passée de 4% en 1996 à 30% en 2006.
Il a été montré que pour être efficace en termes de production d’idées et de concepts
industriels, la recherche doit être :
• Intégrée au bon fonctionnement global de l’entreprise,
• Gérée en prenant en compte les connaissances-clés du personnel,
• Orientée vers le long-terme,
• Spécialisée,
• Autonome : elle doit être une entité à part entière et ne pas être dispersée dans
l’entreprise,
• Financée à hauteur des ambitions de l’entreprise : il s’agit de donner à l’entreprise les
ressources (humaines, financières, matérielles, etc.) nécessaires,
• Encouragée par la direction et faire partie de la stratégie de l’entreprise : les activités
de R&D doivent faire partie des missions clairement confiées à des cadres.
D’autres facteurs jouent tout autant un rôle important dans le processus d’innovation et
viennent en appui de la R&D. La R&D intervient généralement dans les premières phases du
développement technique et du processus d’innovation. L’apprentissage par exemple est un
phénomène qui intervient à partir de la première utilisation de la nouvelle technologie et cela
jusqu’au stade de maturation (Sagar et Van Der Zwaan, 2006). C’est aussi un critère de succès
fondamental puisque l’appropriation des innovations dépend de la compréhension et de la
maîtrise par l’entreprise des connaissances, du savoir-faire et de la culture des individus.
Nous venons de montrer quelques contributions des activités de R&D dans la réussite du
pilotage d’un processus d’innovation. Ces activités viennent en soutien des autres pratiques
d’innovation, ce qui nous a poussé à l’intégrer dans notre modèle.
22
CRM : Customer Relationship Management, traduction anglaise de Gestion de la Relation Client
- 91 -
Evaluation des processus d’innovation
Le CRM porte sur l’interaction de l’entreprise avec le client et sur l’apprentissage de ses
besoins et préférences en vue de lui fournir des produits et services beaucoup plus appropriés
dans le futur. C’est une approche développée pour construire et maintenir une relation
positive avec le client et augmenter sa fidélité et sa loyauté. En effet, « une fois établi que
fidéliser un client passe par l’établissement d’interactions nombreuses et d’un dialogue basé
sur une connaissance de ses besoins, la gestion de la relation client devient essentielle »
(Moisand, 2002). La faculté qu’ont les entreprises à comprendre avec précision les besoins de
leurs clients et à leur proposer des produits et services avec une forte valeur ajoutée est
reconnue comme un facteur déterminant de réussite ou d’échec. C’est ainsi que les efforts de
CRM s’orientent vers une meilleure connaissance du client et de ses besoins en procédant à
une profonde analyse de son comportement. Toutes les interactions avec le client sont
importantes et il appartient à l’entreprise de les canaliser et les coordonner pour plus
d’efficacité. (Moisand, 2002) parle de front-office de l’entreprise qui fait peser sur elle et ses
partenaires une exigence forte conduisant à la refonte de leurs processus voire de leur culture.
Le CRM utilise les technologies et les procédés marketing pour faciliter les interactions avec
le client (Bose, 2002). Il utilise les technologies de l’information et de la communication
(TIC) pour réunir les données qui seront analysées et qui fourniront par la suite les
informations requises pour créer une interaction plus personnelle avec le client (Pan et Lee,
2003). Pour (Moisand, 2002), « le CRM s’appuie sur trois piliers, les processus internes, le
système d’information et la technologie ». Plusieurs systèmes CRM existent. Ils ont pour but
de permettre aux entreprises de mieux gérer les interactions avec le client, d’avoir une
meilleure vision de ses besoins, de son comportement et de ses préférences et d’avoir une
meilleure communication avec lui. Les systèmes CRM sont généralement utilisés par le
personnel de ligne de front qui est toujours en contact avec le client, à savoir le centre d’appel,
le service ventes et le service marketing. Les systèmes CRM sont au cœur des actions à mettre
en œuvre pour réussir les projets de CRM : bases de données, datawarehouse23, etc. La bonne
gestion de ces ressources est primordiale pour réussir son CRM. Un exemple palpable
concerne l’étude réalisée par le Henley Centre qui révèle que pour une entreprise moyenne
typique aux Etats-Unis, un mauvais service client peut conduire à une perte de chiffre
23
Datawarehouse : Entrepôt de données
Partie 2 : Démarche méthodologique et outil d’aide à l’auto-évaluation
d’affaires de l’ordre de trois milliards d’euros sur cinq ans et une perte de résultats de l’ordre
de 455 millions (Moisand, 2002).
Pour mieux connaître leurs clients, les entreprises organisent régulièrement des études de
satisfaction client afin d’identifier les services et les prestations les mieux perçus ou non par le
client. Cette manne d’informations ainsi que les données issues des services commercial,
marketing et ventes, constituent des facteurs importants d’amélioration de la qualité des
services. Les sources de mécontentement des clients devront faire l’objet d’une réflexion
approfondie de la part de l’entreprise et les conclusions devront constituer un véritable
tremplin pour l’innovation. Le client peut être un perturbateur quand il déclenche des idées
nouvelles à partir de l’expression de ses besoins et que ses idées ne vont pas nécessairement
dans le même sens que ce qui était prévu par l’entreprise (De Ramecourt et Pons, 2001).
Cependant ces idées, même contradictoires avec la vision de l’entreprise, peuvent constituer
de nouvelles opportunités pour l’entreprise et leur réalisation peut constituer un avantage
concurrentiel.
De plus en plus, le client est considéré par les entreprises comme étant leur meilleure source
d’idées pour le développement de nouveaux produits (De Ramecourt et Pons, 2001 ;
Krawtchenko, 2004). Autrefois il ne représentait que le point final du processus d’innovation
et le destinataire des offres de produits et services de l’entreprise. Il n’avait pas vraiment son
mot à dire. Aujourd’hui les choses ont évolué. Le client est devenu le point de départ, l’input
de la production et des services. Il veut être écouté, voir ses exigences et besoins pris en
compte et surtout avoir son mot à dire sur l’offre qui lui sera destinée. En d’autres mots, le
client quitte son statut « d’acquéreur d’offre » pour endosser désormais celui « d’acteur » de
l’offre qui lui est proposée. Cette implication plus forte du client dans le processus de
conception de l’offre donne de nouvelles opportunités aux entreprises car le client est
détenteur de connaissances.
Les besoins du client représentent une source inépuisable d’innovations et cette mine d’idées
est à ciel ouvert (De Ramecourt et Pons, 2001). Et (Krawtchenko, 2004) de s’interroger :
« Le client apparaissant de plus en plus comme acteur de l’offre qu’il veut se voir proposer et
détenteur de connaissances, son intégration au processus de conception de l’offre ne serait-
elle pas opportune en termes d’amélioration de l’acceptabilité de l’offre de l’entreprise par
son marché ? ». Pour beaucoup d’entreprises, un très grand nombre d’innovations provient de
l’écoute de leurs clients et leur volonté d’apporter des solutions à leurs désirs. Pour
l’entreprise SODHEXO ALLIANCE, deux innovations sur trois naissent de l’écoute de leurs
clients et de l’attention sans cesse renouvelée à leur égard (De Ramecourt et Pons, 2001).
Les entreprises commencent de plus en plus à intégrer de façon effective le client très tôt dans
leur processus d’innovation, déjà dès les phases amonts : recherche d’idées et processus de
conception notamment, mais aussi dans toutes les autres phases du processus. L’enjeu pour
l’entreprise sera d’exploiter les connaissances détenues par le client pour valoriser le
processus de conception des produits et services. L’intégration des connaissances du client
dans la recherche de solutions à ses propres besoins et de sa perception des produits et
services de l’entreprise, participe à la conception et au développement de produits et concepts
qui seront plus conformes et mieux adaptés à ses attentes.
Il faut aussi souligner que les sujets de mécontentement et de rupture de relation avec le client
peuvent être de plusieurs sortes : non respect des délais de livraison, défaut de qualité de la
prestation proposée, compétitivité des prix face à la concurrence, qualité et délais du suivi
- 93 -
Evaluation des processus d’innovation
L’entreprise doit développer certaines compétences pour aboutir au succès de son CRM.
(King et Burgess, 2008) ont identifié 9 facteurs critiques de succès du CRM. Ces facteurs
portent sur le contexte, les supports et l’organisation de projet :
1. Contexte : capacité de management des connaissances, empressement à partager les
données, empressement à changer de procédés, facilité technologique,
2. Supports : soutien du top management,
3. Organisation de projet : communication de la stratégie CRM, capacité de changement
de culture, capacité de changement de procédé et capacité d’intégration de systèmes.
La réussite du CRM peut permettre aux entreprises d’augmenter leur compétitivité et leur
performance. (Chen et Chen, 2004) ont identifié les bénéfices tangibles et intangibles qui
peuvent résulter d’un CRM :
1. Bénéfices tangibles :
• Croissance des revenus et de la rentabilité,
• Délais de livraison plus rapide,
• Réduction des coûts internes,
• Plus grande productivité des employés,
• Plus fort taux de rétention du client,
• Protection des investissements marketing avec des recettes maximisées.
2. Bénéfices intangibles :
• Satisfaction client accrue,
• Bouche-à-oreille plus efficace,
• Amélioration du service au client,
• Processus commerciaux rationalisés,
• Gestion des contacts plus étroite,
• Augmentation de la segmentation du client,
• Ciblage et profilage fins des clients,
• Meilleure compréhension des besoins du client.
Le CRM est devenu un mot en vogue ces derniers temps et comme toutes les nouvelles
initiatives, il est inefficace quand il est très peu compris, très mal appliqué et incorrectement
mesuré et géré » (Coltman, 2007). Bien que le CRM soit considéré comme un moyen
important qui permet aux entreprises d’améliorer leurs performances et de maintenir une
bonne relation avec leurs clients, force est de constater qu’une très grande partie des
implémentations CRM est vouée à l’échec, soit environ 70% d’échec (Mendoza et al., 2008 ;
Kim et Kim, 2008). La plupart des utilisateurs imputent ces échecs à la sous-estimation des
coûts induits entre 40 et 70% (King et Burgess, 2008). D’énormes efforts sont faits de plus en
Partie 2 : Démarche méthodologique et outil d’aide à l’auto-évaluation
plus pour proposer des systèmes techniques mieux adaptés au mode de fonctionnement et à
l’organisation des entreprises.
Le succès des innovations développées par les entreprises dépend de leur acceptation sur le
marché par le client. Alors la gestion des interactions des entreprises avec le client devient
essentielle. La gestion de la relation client (CRM) intervient donc à toutes les étapes du
processus d’innovation (de l’idée à la commercialisation du produit), ce qui en fait une
pratique importante que les entreprises doivent savoir piloter. C’est pour toutes ces raisons
que nous avons décidé de l’ajouter à notre modèle.
Il nous faut insister sur la nature évolutive de la capacité à innover des entreprises dans le
temps. En effet, de la même manière que le processus d’innovation et son pilotage évoluent et
s’adaptent aux nouvelles exigences du marché, les pratiques de l’innovation sont amenées à
évoluer dans le temps. C’est le cas des 13 pratiques de l’innovation proposées en 2004, qui
sont passées à 15 dans nos travaux. Cependant, treize, quinze, voire plus ou moins, le nombre
de pratiques n’a évidemment pas d’importance majeure. L’intérêt se situe dans l’exhaustivité
de la classification proposée par rapport à la réalité.
Les 15 pratiques d’innovation peuvent être considérées comme des méta-critères qu’il nous
est impossible d’évaluer directement. Il nous a fallu les subdiviser en plusieurs sous-
caractéristiques ou critères mesurables. Pour réduire les risques de subjectivité liés aux
critères à évaluer et éviter les problèmes de compréhension et d’interprétation de données,
nous avons décidé de travailler sur des attributs (phénomènes ou faits) directement
observables et irréfutables en entreprise. Cela revient à définir des critères dont nous
pourrons vérifier l’existence ou l’absence, la réalisation ou non en entreprise. Ainsi pour un
fait similaire dans des entreprises différentes, la même réponse devra être obtenue. Nous
avons décidé d’éviter les critères trop qualitatifs qui peuvent d’une part être interprétés
différemment par plusieurs personnes et d’autre part qui peuvent avoir des réponses
dépendant fortement de l’appréciation de l’observateur. A ce jour notre grille d’observation
compte 196 phénomènes observables, avec une moyenne de 13 phénomènes observables par
pratique d’innovation. Le résultat de ce travail préliminaire est consigné dans l’annexe 1.
- 95 -
Evaluation des processus d’innovation
A titre d’exemple, nous avons pour la pratique P13 « Collecte d’idées permanente », des
phénomènes observables tels que « existence d’un responsable de la collecte des idées
nouvelles ou propositions », « existence de groupes de créativité », « existence d’un système
de collecte des propositions du personnel » ou encore « existence d’une base de données avec
toutes les idées d’innovation ». Si nous nous intéressons par exemple au premier critère cité, à
savoir « existence d’un responsable de la collecte des idées nouvelles ou propositions », nous
chercherons à savoir si l’entreprise a officiellement mandaté un responsable chargé de cette
tâche. La réponse à ce critère sera OUI ou NON. Le même raisonnement sera utilisé pour tous
les autres critères quelque soit la pratique considérée. Il faut toutefois souligner que la
définition de tels critères nous conduit à connaître seulement leur réalisation effective en
entreprise ou non, mais ne fixe pas leur intensité de développement.
La seconde étape a été de définir les modalités d’exercices possibles liés à ces phénomènes
observables. Les réponses aux critères étant OUI ou NON, chaque critère s’est vu attribuer
une note de un ou zéro selon qu’il est observé ou pas en entreprise. Nous obtenons alors des
critères quantitatifs à réponses binaires pour tous nos critères.
Les valeurs des réponses données aux critères observables seront interprétées comme suit :
• Quand la réponse est « OUI », la valeur est du critère est « 1 »,
• Quand la réponse est « non » ou confuse, la valeur du critère est « 0 »,
• Quand aucune réponse n’est obtenue, la valeur du critère est « 0 ».
Comme nous l’avons souligné pour les pratiques de l’innovation, les phénomènes observables
rassemblés dans cette grille d’observation sont également amenés à évoluer. Certains critères
deviendront dans le futur obsolètes tandis et de nouveaux viendront enrichir la grille
d’évaluation. De plus, toute modification dans les pratiques (l’ajout ou la suppression d’une
ou plusieurs pratiques ou même la combinaison de plusieurs pratiques pour en constituer une
plus large) aura à coup sûr un impact sur les critères à formuler. Cette grille d’observation
constitue cependant une source d’informations intéressante pour les praticiens puisqu’elle leur
fournit un « benchmarking » de leurs pratiques actuelles.
Nous avons aussi inclus dans notre grille d’observation un certain nombre de critères
qualitatifs. Ces critères nous permettent de recueillir quelques informations supplémentaires
sur le processus innovant des entreprises. Ces informations ne sont pas utilisées directement
dans l’évaluation, mais pourraient plus tard être utilisées pour délivrer certaines
recommandations aux entreprises pour faire évoluer leur processus d’innovation. C’est le cas
par exemple lorsqu’on demande à une entreprise si elle a recours à un prestataire extérieur
pour des activités relatives à une pratique donnée. Dans ce cas, nous lui demandons la nature
de ce soutien (entreprise privée, structure gouvernementale, université, centre technique ou
tout autre partenaire). Cette information peut être intéressante pour l’audit d’une entreprise
dans le cas où les faiblesses dans sa capacité d’innovation portent sur ce point spécifique. Les
recommandations à proposer à cette entreprise pourraient être de revoir quelques aspects de la
coopération liés à la pratique d’innovation en question ou plutôt de repenser entièrement la
nature de cette coopération par exemple.
De plus, pour établir un lien entre la capacité à innover et les données économiques concrètes
des entreprises, des informations complémentaires sur les inputs et les résultats du processus
d’innovation sont aussi demandées : pourcentage du chiffre d’affaire réalisé avec des produits
Partie 2 : Démarche méthodologique et outil d’aide à l’auto-évaluation
de moins de quatre ans, nombre de brevets déposés lors des quatre dernières années ou encore
part des dépenses en R&D dans le chiffre d’affaire.
on 2 on 1
Évaluati Évaluati
Objectif Facteurs Critères (attributs directement observables)
…
L’entreprise dispose d’un service recherche en interne
Existence d’une procédure de suivi des résultats de la recherche
14. Activités de R&D
Participation des clients aux activités de recherche
…
Présence d’un responsable ou un service chargé du CRM
Organisation de tests de produits avec les clients
15. Gestion de la relation client
Existence d’un service marketing clairement identifié
- 97 -
Evaluation des processus d’innovation
Nombre de Nombre de
Pratiques de l'innovation critères critères
observables qualitatifs
1 Conception interne 18 4
2 Gestion de projets 19 2
3 Stratégie integrée favorisant l'innovation 16 2
4 Gestion du portefeuille de projets 9 3
5 Organisation des tâc hes liées à l'innovation 13 0
6 Amélioration continue du processus d'innovation 9 1
7 Allocation des compétences 12 0
8 Encouragements à l'innovation 8 0
9 Mémorisation des savoir-faire 9 2
10 Intelligence économique 18 2
11 Fonctionnement en réseaux 11 1
12 Apprentissage collectif 9 1
13 Production des idées et concepts 11 2
14 Activités de R&D 17 1
15 Gestion de le rélation client 17 2
TOTAL 196 23
Après avoir défini les pratiques d’innovation et la liste des critères adaptés à chacune d’elles,
l’étape suivante va consister à déterminer la méthode pour réaliser l’évaluation. Le paragraphe
suivant sera consacré à notre contribution méthodologique.
Nous allons dans un premier temps présenter certains travaux réalisés au sein du laboratoire
sur lesquels nous nous appuyons pour notre proposition méthodologique. Après avoir exposé
leurs limites, nous proposerons notre méthode d’évaluation proprement dite.
Partie 2 : Démarche méthodologique et outil d’aide à l’auto-évaluation
Sachant que la valorisation des données recueillies est liée à l’objectif de l’opérateur de
l’évaluation sur la base de critères précis d’évaluation, la technique qui semblait la plus
appropriée était l’Analyse Multicritère d’Aide à la Décision (MCDA). En effet, les méthodes
MCDA ont pour objet de prendre en compte un système de préférences lié à un point de vue
donné.
Le processus d’évaluation des capacités à innover des entreprises se fait sur deux
niveaux hiérarchiques (voir Figure 15 ci-dessus). Le premier niveau concerne les critères de
chaque pratique d’innovation et permet d’obtenir le score (ou degré de développement) des
pratiques (Evaluation 1). Le second niveau porte sur les pratiques de l’innovation et permet
d’obtenir l’IIP des entreprises (Evaluation 2).
Avec :
qij : valeur accordée selon l’existence ou non du critère j associé à la pratique i de
l’entreprise E, qij ∈ {0, 1},
wij : poids du critère j en fonction du nombre total de critères relatifs à la pratique i,
mi : nombre de critères associés à la pratique i,
pi : degré de développement de la pratique i, pi ∈ [0, 1].
2. Evaluation 2 : elle permet d’obtenir l’IIP des entreprises. Pour une entreprise E
donnée, l’IIP est défini comme suit :
n n
IIP ( E ) = ∑ w . p ( E)
i i avec ∑w = 1 i [2]
i =1 i =1
Dans lequel :
IIP : indice d’innovation potentielle d’une entreprise E, IIP(E) ∈ [0 ; 1],
n : nombre total de pratiques d’innovation, n = 13 dans cette étude,
pi : degré de développement de la pratique i, pi ∈ [0 ; 1],
wi : poids accordé en fonction de l’importance de la pratique i ; ces poids ont été
attribués par des experts en innovation.
Cette méthode permet d’obtenir au final un score compris entre 0 et 1 et représentant l’indice
d’innovation potentielle (IIP). Une typologie des entreprises a été proposée en fonction des
valeurs d’IIP. Cette typologie des entreprises a été définie sur la base de la typologie proposée
- 99 -
Evaluation des processus d’innovation
par (Godet, 1997). Ce dernier a identifié quatre types d’entreprises correspondant à des
attitudes et stratégies adoptées par les entreprises pour faire face à l’avenir. Dans le cadre
strict de l’expérimentation, il a été constaté que des groupes d’entreprises pouvaient être
caractérisés par leur niveau d’IIP. Les résultats obtenus ont été confirmés par l’utilisation de
deux autres méthodes MCDA que sont Electre 1 et AHP.
Ces classes d’entreprises se définissent comme suit (de la plus innovante à la moins
innovante) :
• La classe proactive : ce sont les entreprises les plus dynamiques. Elles provoquent le
changement avec une vision à long terme. Elles adoptent un scénario anticipatif et une
stratégie volontariste. Cette catégorie s’est vue affecter un IIP minimum de 0.60.
• La classe préactive : ce sont les entreprises qui ne provoquent pas les changements
mais les anticipent par le développement d’un système de veille élaboré. Elles sont
également dynamiques et offensives mais avec une vision stratégique sur le moyen
terme. Les IIP sont supérieurs à 0.42 et inférieurs à 0.60.
• La classe réactive : ce sont les entreprises qui sont dans l’attente du changement et qui
ne réagissent que suite à une action extérieure. Elles n’ont pas de scénario clair et
adoptent une stratégie adaptative et défensive. Les IIP se situent entre les bornes des
0.31 et 0.39.
• La classe passive : ce sont les entreprises qui adoptent une attitude défensive face aux
changements dans leur environnement. Elles sont en situation de survivance. L’IIP de
ces entreprises est inférieur à 0.29.
L’IIP demeure l’élément discriminant qui permet de comparer les entreprises. Une entreprise
A sera considérée plus performante en termes de capacité à innover qu’une entreprise B si
IIPA > IIPB. Comme les intervalles de valeurs d’IIP des classes sont disjoints, une entreprise
affectée à une classe donnée est considérée meilleure que toute entreprise d’une classe
inférieure.
Cependant, il a été relevé des zones d’incertitude au niveau des frontières entre les classes et
principalement sur les bornes préactive/réactive et réactive/passive respectivement sur les
valeurs d’IIP situés sur les intervalles [0.39, 0.42] et [0.29, 0.31].
• La classe passive : les entreprises vont principalement allouer leurs ressources sur la
conception de nouveaux produits, l’évolution de la technologie afin de maintenir leurs
produits actuels (P1).
Ces travaux précédents ont permis de poser les bases d’une évaluation des capacités à innover
des entreprises. La mesure de l’innovation au travers de l’IIP permet d’obtenir une
hiérarchisation des entreprises en fonction de leur IIP et une typologie du système innovant
des entreprises (catégories proactive, préactive, réactive et passive). L’obtention de l’IIP a
permis d’effectuer un diagnostic du système innovant des entreprises.
2. Une autre limite des propositions précédentes est que le profil de préférences (proposé
par des experts) utilisé pour calculer l’IIP des entreprises et par la même occasion pour
- 101 -
Evaluation des processus d’innovation
les repartir dans les classes d’entreprises est statique et n’offre aucune flexibilité quant
à une évolution possible du nombre de pratiques de l’innovation. Toute modification,
même légère, du nombre de pratiques (l’ajout ou la suppression d’une ou plusieurs
pratiques ou même la combinaison de plusieurs pratiques pour en constituer une plus
large) aura une incidence considérable sur le profil de préférences et aussi sur la
typologie proposée. De plus, si nous supposons que les évaluateurs décident de limiter
l’évaluation des entreprises du panel à un nombre limité de pratiques pour différentes
raisons : soit pour voir l’influence d’un nombre restreint de pratiques données sur la
capacité à innover des entreprises, soit parce qu’une ou plusieurs pratique(s) ne
s’applique(nt) pas vraiment aux entreprises du panel d’étude (c’est le cas de PME ne
travaillant pas en réseaux par exemple ; l’évaluateur peut décider de ne pas prendre en
compte la pratique Gestion des réseaux dans l’évaluation). Dans ces cas, faut-il
réajuster les poids des pratiques restantes proportionnellement à leur ancienne
contribution au calcul de la capacité à innover ou faut-il les réévaluer complètement ?
Ce manque de flexibilité représente un frein à toute tentative d’amélioration de la
méthodologie proposée.
3. On note aussi que la première typologie n’a pas de caractère générique. En effet,
aucune règle d’appartenance aux classes d’entreprises n’a été proposée. La répartition
des entreprises dans les classes d’entreprises a été faite à partir des similarités de
groupes d’entreprises qui se dégageaient après une comparaison des résultats de l’IIP
avec ceux obtenus avec les méthodes Electre 1 et AHP. Les profils des classes
d’entreprises ont été déterminés à posteriori en fonction du comportement des
entreprises appartenant à chaque classe.
Dans la seconde typologie, l’approche basée sur la logique floue permet de résoudre
les problèmes qui peuvent se poser sur la frontière entre deux classes consécutives.
Cette approche permet de prendre en compte les intervalles de valeurs d’IIP non
couverts entre deux classes consécutives et de conclure sur la classe dans laquelle une
entreprise donnée sera affectée. Cependant ces règles d’appartenance sont fortement
liées aux données des entreprises du panel d’étude et ne permettent pas également une
réelle évolution de la typologie.
Les typologies restent donc fortement liées aux données des entreprises du panel et
aucunement aux spécificités des différentes classes d’entreprises. Ainsi une évolution
du panel d’entreprises rendrait à coup sûr la typologie proposée caduque. Cela
constitue une autre limite de l’indice proposé.
Après avoir identifié les limites des travaux précédents, nous proposons d’apporter des
améliorations à l’indice d’innovation potentielle (IIP). Nous reprendrons dans notre
proposition méthodologique le principe de classification des entreprises en quatre classes
d’entreprises (proactive, préactive, réactive et passive) adopté précédemment.
Pour notre proposition, nous allons essayer de tirer profit des avancées des travaux précédents
que nous avons présentés plus haut. Nous partirons de la classification de Ramon Corona que
nous utiliserons comme le point de départ de notre démarche. Nous allons ensuite affiner cette
classification de manière progressive jusqu’à atteindre une classification finale des entreprises
qui tient compte de la spécificité de chaque classe d’entreprises. Avec l’évolution de notre
base de connaissances (nombre de pratiques et de critères) et compte tenu des limites de la
méthodologie précédente que nous avons identifiées plus haut, un travail préliminaire
s’impose pour étendre les bornes des classes d’entreprises à tout l’intervalle [0, 1] des IIP
Partie 2 : Démarche méthodologique et outil d’aide à l’auto-évaluation
La méthode que nous proposerons permettra de calculer de manière automatique les profils de
préférences (ou systèmes de pondération) des classes d’entreprises et de déterminer leurs
pratiques-clés (pratiques caractéristiques de chaque classe d’entreprises). Nous utiliserons
pour cela la méthode statistique de la valeur-test qui permet d’identifier les variables qui
caractérisent le mieux un groupe d’individus donné. Notre méthode permettra aussi de repartir
les entreprises de manière automatique et reproductible dans les différentes classes
d’entreprises, ce qui lui conférera un caractère générique. De plus, l’indice d’innovation
potentielle (IIP) que nous proposerons, tiendra compte du profil des classes d’entreprises afin
de mieux identifier la capacité à innover des entreprises et de mieux les repartir dans les
classes.
Notre typologie ne devra pas être figée et devra prendre en compte les évolutions dans la
réalisation des pratiques. Des modifications significatives dans la réalisation des pratiques des
entreprises de chaque classe d’entreprises feront évoluer le profil de la classe. Une entreprise
qui ne fait pas évoluer son processus d’innovation peut voir les autres entreprises lui ravir sa
place et se voir rétrograder de position dans sa classe voire basculer dans une classe
inférieure. De plus, la position des entreprises dans les classes d’entreprises sera vraie à un
instant donné et pourra évoluer dans le temps. Les résultats de l’évaluation nous renseignent
sur l’état actuel des performances en innovation des entreprises sur leur marché (dans le panel
d’entreprise). Ainsi une entreprise considérée très innovante (proactive par exemple) dans un
panel à un instant donné, peut à un autre instant perdre sa position dominante dans sa classe
ou tout simplement rétrograder de classe pour se retrouver dans une classe moins bonne. Cela
peut se produire si elle ne fait pas évoluer assez rapidement son processus d’innovation et que
dans le même temps elle fait face à un plus grand nombre d’entreprises ayant un meilleur
développement des pratiques de l’innovation (soit parce que plusieurs entreprises du panel
auraient amélioré leurs performances, soit parce que d’autres entreprises émergentes sont
arrivées sur le marché et ont remplacé des anciennes).
La méthode d’évaluation que nous proposons permettra de dire à un instant donné si une
entreprise est innovante ou pas, ainsi que sa position par rapport aux autres entreprises d’un
panel d’étude. Elle permettra aussi de connaître les actions qu’une entreprise devra mettre en
place pour rehausser son niveau de performance en innovation. Une entreprise pourra décider
de renforcer sa position dans sa classe actuelle (logique d’optimisation de ses performances)
ou plutôt chercher à passer un pallier pour basculer dans une classe supérieure (recherche de
saut technologique notamment).
- 103 -
Evaluation des processus d’innovation
5.3.2.1. Notre contribution initiale : fixation des bornes des classes d’entreprises pour le
démarrage de l’évaluation 2
Pour notre proposition de méthode d’évaluation, nous avons décidé de tirer profit des
avancées des travaux précédents. Ainsi nous utiliserons comme point de départ de notre
démarche, la classification obtenue à partir de l’IIP (Corona, 2007). Nous utiliserons donc
pour l’agrégation des données la même fonction d’utilité que celle précédemment utilisée
pour l’IIP. Cependant nous avons été confrontés à quelques obstacles qu’il a fallu
surmonter avant de pouvoir réutiliser la méthode précédente : (1) profil de préférences devenu
obsolète du fait de l’évolution du nombre de pratiques et de sous-pratiques de l’innovation,
(2) extension des bornes des classes d’entreprises à tout l’intervalle [0, 1] des IIP possibles.
Pour ces raisons, Il nous a fallu procéder avant tout à un travail préliminaire :
1. Dans Les travaux précédents, les poids des pratiques pour le calcul de l’IIP avaient été
proposés par des experts en innovation en fonction de la part de valeur ajoutée qu’ils
attribuaient à chacune des 13 pratiques d’innovation dans le développement de la capacité
à innover des entreprises. Après avoir fait évoluer notre grille d’évaluation et y ajoutant
les deux nouvelles pratiques (les activités de R&D et la gestion de la relation client), le
système de pondération précédent est donc devenu caduc.
Pour ne pas avoir à porter de jugement de valeur, nous avons pour notre étude décidé
d’accorder la même importance à l’ensemble des 15 pratiques, c'est-à-dire le même poids
pour le calcul de l’indice d’innovation potentielle (IIP) des entreprises. Concrètement,
après avoir calculé les degrés de développement des sous-pratiques puis des pratiques lors
de l’Evaluation 1, nous calculons l’IIP de chaque entreprise. Nous obtenons un premier
classement des entreprises par ordre croissant d’IIP. Avant de corriger l’IIP et d’affecter
les poids, nous partons donc d’un premier classement sans pondération. Sur cette étape
initiale, les quatre classes seront séparées les unes des autres par des seuils définis ci-
après. Cette option nous permet d’avoir le niveau moyen de performance au sens des
capacités à innover des entreprises. L’IIP des entreprises revient désormais à calculer la
moyenne absolue (moyenne arithmétique) des phénomènes mis œuvre dans l’entreprise
par rapport à l’ensemble des phénomènes observés.
2. La seconde difficulté s’est située au niveau des conditions qu’une entreprise doit remplir
pour appartenir à l’une des quatre classes d’entreprises. Nous avons vu précédemment
qu’il existait des zones d’incertitude sur les frontières entre certaines classes d’entreprises
(préactive/réactive, réactive/passive). Aucune règle n’a été proposée pour classer une
entreprise dont l’IIP est situé sur les intervalles [0.39, 0.42] et [0.29, 0.31]. Les conditions
de répartition des entreprises dans les classes d’entreprises étaient les suivantes :
• Proactive si l’IIP est compris entre 1 et 0.60,
• Préactive si l’IIP est compris entre 0.60 et 0.42,
• Réactive si l’IIP est compris entre 0.39 et 0.31,
• Passive si l’IIP est compris entre 0.29 et 0.
Pour fixer les autres bornes (limites préactive/réactive et réactive/passive), nous avons
aussi tenu compte de la réalité industrielle constatée dans un premier temps au sein du
laboratoire. Il apparaissait que les panels d’entreprises étudiés attestaient de deux valeurs
Partie 2 : Démarche méthodologique et outil d’aide à l’auto-évaluation
critiques (0.41 et 0.29). Nous avons donc retenu ces 2 valeurs sur la base de l’empirisme.
Ceci nous a paru plus judicieux que des bornes fixées selon un critère de continuité, par
exemple si nous avions coupé le segment [0.6, 0] en trois intervalles égaux.
Les valeurs des frontières retenues sont représentées dans le Tableau 4 suivant :
Tableau 4 : Limites des indices d’innovation potentielle (IIP) pour chaque classe
d’entreprises, source : notre recherche
Notons que le système de définition des classes ci-dessus n’est utilisé qu’au démarrage du
processus d’évaluation. Il sert de base de travail avant la mise en œuvre d’un système
d’évaluation et de classification plus élaboré (utilisation des valeurs-test et des seuils de
Pareto). La prise en compte de ces évolutions dans la méthodologie précédente nous permet
d’obtenir la classification initiale des entreprises d’un échantillon d’étude.
Il faut préciser que la qualité de cette première classification n’aura pas de réelle incidence sur
notre démarche et donc sur le résultat final. Les effets éventuels seront atténués voire
supprimés par une répétition de notre process de constitution des classes qui nous permettra
de tendre progressivement vers des classes d’entreprises stables (plus aucun changement dans
les membres des classes, dans les valeurs d’IIP et dans le classement des entreprises). En
effet, une entreprise n’étant pas au départ dans sa bonne classe, subira des changements de
positions successifs au fur et à mesure de la répétition de notre process de constitution des
classes jusqu’à retrouver sa bonne classe, sa bonne position dans cette classe et aussi son IIP
final.
La typologie qui est proposée comprend quatre classes d’entreprises qui ont des visions de
développement différentes. Les quatre classes d’entreprises étant différentes, elles
développent les pratiques d’innovation différemment. Ce qui implique des profils de
préférences différents pour chaque classe et donc l’adoption d’une une stratégie particulière
par les entreprises de chaque classe. Nous proposons de nous baser sur le comportement
spécifique des entreprises à l’intérieur de chaque classe d’entreprises pour définir les profils
de préférences des classes. Les comportements des classes seront déterminés à l’aide de la
méthode statistique de la valeur-test. Ces profils de préférences vont ensuite permettre
- 105 -
Evaluation des processus d’innovation
d’identifier les entreprises qui ne répondent pas aux critères de la classe dans laquelle elles ont
été rangées dans la classification initiale pour les affecter à la classe dont le profil leur
correspond le mieux. De même, nous allons mieux classer les entreprises dont le profil est à
cheval sur deux classes (frontière entre deux classes consécutives). Cette réaffectation des
entreprises dans leur meilleure classe se fera de manière progressive à travers un process de
constitution des classes qu’on devra itérer plusieurs fois jusqu’à obtention de la classification
finale. A chaque itération du process, un certain nombre d’entreprises retrouveront leurs
vraies classes. L’équilibre sera atteint lorsqu’il n’y aura plus aucun changement dans les
classes, en d’autres termes lorsque les classifications obtenues à deux itérations successives (t
= k et t = k+1) sont en tous points égales (Ck = Ck+1). Nous obtenons donc la classification
finale (CF) ainsi que les profils de préférences finaux pour chaque classe. A chaque itération
k, les profils de préférences (le poids de chaque pratique) sont calculés en fonction de la
classification précédente (le profil d’une classe donnée dans la classification Ck est calculé
en fonction des données des entreprises contenues dans cette classe dans la classification
précédente Ck-1. Comme exemple, le profil de la classe proactive dans la classification C1 est
calculé en fonction des entreprises de la classe proactive de la classification C0). Ainsi si deux
classifications successives sont égales (Ck = Ck+1), les profils qu’on obtiendrait à partir de des
2 classifications seraient égaux et par conséquent les classifications concernées seront égales
(Ck+1 = Ck+2).
En d’autres mots, l’équilibre sera atteint dans les classifications successives lorsque, à partir
d’une itération k, toutes les classifications suivantes sont égales à la classification Ck. Ce qui
équivaut à :
Dans lequel :
k, n : étapes d’itération du process de constitution des classes, 0 < k < n,
Ck , Cn : classifications de rang k et n.
Le mode de constitution de nos classes est proche de la logique des algorithmes génétiques,
chaque nouvelle génération obtenue étant meilleure que la génération précédente.
La démarche que nous proposons part de la classification initiale (C0) des entreprises d’un
panel. Elle permet, à l’aide d’un process global de traitement des données des entreprises,
d’obtenir la classification finale (CF) des entreprises qui tient compte de la spécificité des
différentes classes. Notre démarche globale peut être schématisée comme suit :
Process global
de traitement
Classification initiale Classification finale
( C0 ) ( CF )
Le process global de traitement des données reçoit en entrée la classification initiale (C0) et
fournit en sortie la classification finale (CF) des entreprises qui participent à l’évaluation. Les
différentes opérations de ce process peuvent être représentées comme suit :
Itération k
Non
Ck-1 Ck
Le process global de traitement est un process itératif dont le point de départ est la
classification initiale C0. Il est constitué d’un process de constitution des classes qui reçoit, à
chaque itération k, la classification précédente (Ck-1) et fournit la classification de l’étape (Ck).
A ce stade, la décision d’arrêter les itérations est prise en fonction du résultat de la
comparaison entre les deux classifications (Ck-1 et Ck) :
• Si Ck-1 = Ck, alors nous obtenons la classification finale CF et CF = Ck = Ck-1,
• Si Ck-1 ≠ Ck, alors nous procédons à une nouvelle itération du process de constitution
des classes en remplaçant la classification Ck-1 par la classification Ck. Il faut noter
qu’après chaque itération, la nouvelle classification Ck améliore la classification
précédente Ck-1.
Pour chaque itération k, le process de constitution des classes s’effectue en quatre étapes.
Chaque étape permettra de recalculer les entreprises d’une classe d’entreprises, en
commençant par la meilleure classe de la typologie (Etape 1 : la classe proactive) et en
terminant par la moins performante des classes (Etape 4 : la classe passive).
Les différentes étapes d’un process de constitution des classes peuvent être représentées
comme suit :
te s
te s
an ise
an se
an se
st ri
st ri
s
s
st r
1er jeu de poids 2ème jeu de poids 3ème jeu de poids 4ème jeu de poids
re trep
re trep
re trep
(w11, w21… w151) (w12, w22… w152) (w13, w23… w153) (w14, w24… w154)
En
En
En
- 107 -
Evaluation des processus d’innovation
Il faut aussi préciser qu’à chaque étape d’une itération du process de constitution des classes,
il faudra absolument utiliser le système de pondération de la meilleure des classes pas encore
traitées. Les entreprises d’une classe supérieure ont de fortes chances de satisfaire aux
exigences d’une classe moins performante, ce qui n’est pas forcément le cas du contraire. De
plus, les entreprises d’une meilleure classe auront des IIP généralement plus forts que les
entreprises d’une classe moins performante. Choisir aléatoirement à chaque étape un système
de pondération quelconque peut entraîner l’affectation d’entreprises d’une classe supérieure
dans une classe inférieure. Ce qui peut influer sur la qualité de la classification ou la fausser
tout simplement.
A ce stade, il nous reste à définir dans un premier temps la méthode de détermination des
profils de préférences des classes d’entreprises qui serviront au calcul des indices
d’innovation potentielle (IIP) des entreprises à chaque étape du process de constitution des
classes. Cette partie sera présentée dans le paragraphe suivant. Ensuite nous présenterons la
méthode d’extraction des entreprises à chaque étape. C’est ce que nous avons qualifié d’
« entreprises les mieux classées » qui vont être extraites à chaque fois de l’échantillon pour
constituer la classe courante. Et enfin nous finirons par une description détaillée de
l’ensemble de la démarche d’évaluation proposée.
Nous proposons de définir les pratiques-clé des classes d’entreprises en nous aidant du
concept statistique de la « valeur-test ». La valeur-test participe à l’approche exploratoire et
descriptive des grands tableaux numériques (Morineau, 1984). Elle permet de définir les
variables qui caractérisent au mieux un groupe d’individus, en donnant l’ordre d’importance
de toutes les variables. Une variable est considérée sans intérêt pour un groupe si elle semble
avoir des valeurs prises au hasard parmi celles de tous les individus. Le calcul de la
probabilité d’occurrence de cette hypothèse statistique permet de dégager la liste des variables
caractéristiques. La valeur-test permet d’apprécier si un écart à la moyenne générale est petit
(donc attribuable au hasard) ou grand (et attribuable au facteur). La loi de probabilité de cette
hypothèse correspond à la variable aléatoire suivante :
2
X −X n − nk s ( X )
Pour une classe k, tk ( X ) = k avec 2
s (X ) =
k [4]
sk ( X ) n − 1 nk
Dans lequel :
tk ( X ) : valeur-test de la variable X dans le groupe k,
Xk : moyenne de la variable X dans la groupe k,
X : moyenne générale de la variable X,
sk (X ) : variance de la variable X dans le groupe k,
s (X ) : variance générale de la variable X,
n : nombre total d’individus,
nk : nombre d’individus dans le groupe k.
- 109 -
Evaluation des processus d’innovation
A partir des résultats du calcul des valeurs-tests de l’ensemble des pratiques pour une classe
d’entreprises donnée, nous déduisons les pratiques les plus utilisées, c’est-à-dire celles qui ont
une importance significative et celles qui sont moins développées voire négligées. Les
pratiques X significatives pour un groupe k sont celles qui satisfassent à la condition
suivante tk ( X ) > 2. Par opposition, les pratiques négligées obéissent à la condition tk ( X ) < -2.
Ces pratiques-clés serviront de repère aux entreprises de chaque classe pour identifier leurs
points forts et points faibles et les pratiques à améliorer (pratiques pour lesquelles l’entreprise
n’est pas assez bonne ou celles qui l’handicapent sérieusement). Une variable est d’autant
plus importante (respectivement moins significative) pour une classe que sa valeur-test est
très élevée (respectivement très faible). En d’autres termes, la valeur-test d’une variable
représente son importance dans la classe.
Nous proposons de définir les poids des pratiques de chaque classe proportionnellement aux
valeurs-tests des pratiques, tout en admettant que leur somme doit être égale à 100. Une
transformation préalable sera faite pour les classes dans lesquelles il existe des valeurs-tests
négatives. Dans ces cas de configuration, nous nous ramenons à des valeurs positives en
ajoutant à toutes les valeurs-tests, la valeur absolue de la plus petite valeur-test. La pratique la
plus négligée d’une classe d’entreprises aura donc dans ce cas un poids de zéro. Ce qui n’est
pas trop gênant puisque la contribution d’une pratique beaucoup négligée à l’accroissement
des performances en innovation des entreprises d’une classe sera très faible.
La définition des poids des pratiques d’une classe d’entreprises respecte l’importance qui est
accordée à chaque pratique par l’ensemble des entreprises de la classe. Ainsi la pratique la
plus importante de la classe aura le poids le plus fort, de même la pratique la moins
développée par les entreprises aura le poids le plus faible. Nous obtenons ainsi une hiérarchie
des pratiques. C’est aussi l’ordre des pratiques (non strict) à améliorer qui sera proposé aux
entreprises lors d’un audit sur leur performance en termes de capacité à innover.
Il peut arriver que la classification initiale comporte une ou plusieurs classes d’entreprises ne
contenant aucune entreprise. Il est donc impossible de calculer les valeurs-tests des pratiques
de l’innovation. En effet, ce calcul nécessite au moins un individu dans une classe. Dans ce
cas, le profil de préférences « identité » (poids identiques pour toutes les pratiques) sera utilisé
pour le calcul des IIP à l’étape (ou aux étapes) du process de constitution des classes
concernée(s). De plus, à chaque itération du process de constitution des classes, si la
classification précédente comporte des classes d’entreprises vides, alors le profil de
préférences « identité » sera utilisé pour le calcul des IIP aux étapes du process de constitution
des classes correspondantes. Cette éventualité peut se produire à des itérations k>1 si le
nombre n d’entreprises total à traiter est très bas (n<5). Lorsque le nombre d’entreprises
devient assez grand, le problème ne se pose plus. Seule la première itération peut encore être
concernée par des classes vides dans la classification initiale.
Partie 2 : Démarche méthodologique et outil d’aide à l’auto-évaluation
Nous résumons nos propos à l’aide de l’exemple ci-dessous (Figure A). Dans cet exemple,
nous avons le calcul des valeurs-tests et les poids correspondants pour 2 classes d’entreprises
Classe 1 et Classe 2. Ce sont les deux cas de figure qu’on peut rencontrer lors de la
détermination des profils de préférences des classes : (1) toutes les valeurs-tests sont
positives, (2) une ou plusieurs valeurs-tests sont négatives.
• Classe 1 : dans cette classe, les valeurs-tests de toutes les pratiques d’innovation sont
supérieures à 0. Les pratiques P2, P3, P4, P6, P7, P8, P12, P13 et P14 représentent les
pratiques les plus utilisées et caractéristiques de la classe. Leurs valeur-tests sont
supérieures à 2. Ensuite la part représentée par la valeur-test de chaque pratique par
rapport à la somme des valeurs-tests de toutes les pratiques est déterminée (en
pourcentage). Finalement ces parts est converties en valeurs réelles représentant le
poids de chaque pratique.
• Classe 2 : dans cette classe en revanche, certaines valeurs-tests de pratiques sont
négatives. Les pratiques caractéristiques de cette classe sont d’un côté la pratique P11
fortement développée (avec une valeur-test de 2.3) et de l’autre la pratique P12
beaucoup négligée (avec une valeur-test de -2.1). Comme la classe possède des
valeurs-test négatives, une transformation préalable est réalisée pour obtenir des
valeurs-tests positives pour toutes les pratiques. Cette transformation consiste à
ajouter à toutes les valeurs-tests de la classe, la valeur absolue de la plus petite valeur-
test. Pour la classe, ce sera la valeur 2.1. Les nouvelles valeurs obtenues sont inscrites
dans la colonne « Valeur-test ajustée ». Ensuite, les contributions puis les poids de
chaque pratique seront déterminés comme précédemment.
CLASSE 1 CLASSE 2
Valeur-
Valeur- Valeur-
Pratiques de l'innovation En % Poids test En % Poids
test test
ajustée
1 Conception interne 1,2 3,6% 3,6 0,8 2,9 10,6% 10,6
2 Gestion de projets 2,8 8,4% 8,4 -1,5 0,5 1,9% 1,9
3 Stratégie intégrée favorisant l'innovation 2,8 8,3% 8,3 -1,7 0,3 1,2% 1,2
4 Gestion du portefeuille de projets 2,1 6,3% 6,3 0,2 2,3 8,3% 8,3
5 Organisation des tâches liées à l'innovation 1,9 5,7% 5,7 0,4 2,5 9,2% 9,2
6 Amélioration continue du processus d'innovation 3,5 10,5% 10,5 0,0 2,1 7,6% 7,6
7 Allocation des compétences 2,7 7,9% 7,9 -1,2 0,9 3,2% 3,2
8 Encouragements à l'innovation 2,5 7,4% 7,4 -1,1 1,0 3,6% 3,6
9 Mémorisation des savoir-faire 1,8 5,3% 5,3 -0,3 1,8 6,5% 6,5
10 Intelligence économique 1,5 4,3% 4,3 -0,1 2,0 7,1% 7,1
11 Fonctionnement en réseaux 1,4 4,1% 4,1 2,3 4,4 15,8% 15,8
12 Apprentissage collectif 3,0 8,9% 8,9 -2,1 0,0 0,0% 0,0
13 Production des idées et concepts 2,4 7,2% 7,2 0,2 2,3 8,3% 8,3
14 Activités de R&D 1,6 4,9% 4,9 0,8 2,9 10,4% 10,4
15 Gestion de la relation client 2,4 7,3% 7,3 -0,4 1,7 6,2% 6,2
Tableau 5 : Exemple de détermination des pratiques-clés et des poids des pratiques (profil de
préférences) de deux classes, source : notre recherche
Ajoutons aussi que notre méthode d’évaluation qui utilise les valeurs-tests pour la
détermination des pondérations des pratiques d’innovation, favorise la prise en compte de
nouvelles pratiques émergentes dans le domaine du pilotage de l’innovation ou plutôt
l’exclusion de pratiques devenues obsolètes. En effet, tout ajout ou toute exclusion de
pratiques d’innovation dans la base de connaissances entraînera juste un réajustement des
poids des pratiques sachant que la somme des poids doit être égale à 100. L’importance des
- 111 -
Evaluation des processus d’innovation
pratiques sera toujours donnée par leurs valeurs-tests et leurs poids seront également calculés
en fonction de leur contribution à la somme totale des valeurs-tests. L’évolution du nombre de
phénomènes observables d’une pratique n’aura pas non plus d’incidence sur le calcul du degré
de développement de la pratique puisqu’il s’agit de calculer une moyenne arithmétique.
5.3.2.4. Autre contribution : Sélection des entreprises par classe grâce à l’approche de
Pareto
Pour extraire les entreprises qui seront retenues pour constituer la nouvelle classe de l’étape,
nous avons décidé de nous inspirer de la méthode ABC, elle même inspirée de la méthode de
Pareto.
Le diagramme de Pareto est un outil efficace de prise de décision qui représente un moyen
simple pour classer les phénomènes par ordre croissant d’importance (Baglin, 2001). Il
permet de mettre en évidence les individus les plus marquants d’une population donnée en
fonction d’un critère. La méthode de Pareto part du principe que 20% des individus d’une
population possèdent 80% des richesses. De nombreux phénomènes obéissent à la loi des
20/80, c’est-à-dire que 20% des causes produisent 80% des effets. Il suffira donc de travailler
sur ces 20% pour influencer fortement le phénomène.
95%
80%
Partie 2 : Démarche méthodologique et outil d’aide à l’auto-évaluation
Nous proposons de définir une méthode de sélection des entreprises qui s’inspire de la
méthode ABC. La classe A représente la classe la plus marquante et c’est celle-là qui est
conservée. Cependant dans notre méthode, l’ensemble des entreprises sélectionnées se fera
sur la base des 50% des IIP cumulés des entreprises par rapport à la somme totale des IIP de
l’ensemble des entreprises de l’étape (au lieu des 80% préconisés).
L’application du critère de 80% des IIP cumulés au calcul des IIP entrainait la sélection d’une
grande majorité d’entreprises à chaque étape ; même des entreprises qui ont des IIP assez
faibles sont parfois retenues. Cela est dû au fait que les écarts entre les IIP des moins bonnes
entreprises qui respectent les conditions de la classe et les meilleures parmi les entreprises
restantes ne sont pas assez significatifs. Comme en plus la méthode ABC préconise que les
80% des IIP cumulés doivent concerner environ 20% de la population totale, nous combinons
cette condition à la première pour ajuster notre critère de sélection. Nous aboutissons au final
à un seuil de sélection des entreprises fixé à 50% des IIP cumulés.
Les différentes étapes de l’évaluation des entreprises d’un panel peuvent être finalement
détaillées comme suit :
Classification initiale C0 :
• Calculer les IIP des entreprises (en utilisant le même poids pour toutes les pratiques)
du panel puis les classer par ordre décroissant des IIP (ce classement donne
directement le rang de chaque entreprise dans le panel).
• Répartir les entreprises dans les quatre classes (proactive, préactive, réactive, passive)
en utilisant les intervalles d’IIP [1, 0.61], [0.61, 0.41], [0.41, 0.29] et [0.29, 0] pour
classer les entreprises respectivement dans les classes proactive, préactive, réactive et
passive.
Itération 1 - Classification C1 :
• Définir les profils de préférences de chaque classe d’entreprises (PROACTIF,
PREACTIF, REACTIF, PASSIF) à utiliser pour le calcul des IIP. Le profil d’une
classe donnée est calculé en fonction des entreprises de cette classe dans la
classification C0.
- 113 -
Evaluation des processus d’innovation
• Faire un ajustement des valeurs-tests s’il existe au moins une pratique avec
une valeur-test négative, en ajoutant à toutes les valeurs-tests la valeur
absolue de la plus petite valeur-test de toutes les pratiques.
• Déterminer la part représentée par la valeur-test de chaque pratique par
rapport à la somme des valeurs-tests de toutes les pratiques en pourcentage.
• Déterminer les poids des pratiques en convertissant ces parts en valeurs
quantitatives (somme totale égale à 100).
Etape 1 :
• Calculer les IIP des toutes entreprises du panel en utilisant le profil de
préférences PROACTIF puis les classer par ordre décroissant des IIP.
• Sélection des entreprises de la classe nouvelle proactive en utilisant le seuil
d’appartenance de 50% des IIP cumulés.
Etape 2 :
• Calculer les IIP des entreprises restantes (non sélectionnées à l’étape 1) du
panel en utilisant le profil de préférences PREACTIF puis les classer par
ordre décroissant des IIP.
• Sélection des entreprises de la classe nouvelle préactive en utilisant le seuil
d’appartenance de 50% des IIP cumulés.
Etape 3 :
• Calculer les IIP des entreprises restantes (non sélectionnées aux étapes 1 et
2) du panel en utilisant le profil de préférences REACTIF puis les classer
par ordre décroissant des IIP.
• Sélection des entreprises de la classe nouvelle réactive en utilisant le seuil
d’appartenance de 50% des IIP cumulés.
Etape 4 :
• Calculer les IIP des entreprises restantes (non sélectionnées aux étapes 1, 2
et 3) du panel en utilisant le profil de préférences PASSIF puis les classer
par ordre décroissant des IIP. Toutes ces entreprises constituent la nouvelle
classe passive.
• Prise de décision
Si classification C1 = Classification C0
Alors classification finale CF atteinte et CF = C1,
Sinon itération 2 – classification C2.
• Prise de décision n
Si classification Ck = classification Ck-1
Alors classification finale CF atteinte et CF = Ck,
Sinon itération k+1 – Classification Ck+1.
Notre méthode part d’une classification initiale C0 des entreprises (classification à priori basée
sur des études précédentes). A partir de cette classification, nous utilisons la technique
statistique de la valeur-test pour déterminer les pratiques-clés des classes d’entreprises ainsi
que leurs profils de préférences. Les profils de préférences des classes permettent de calculer
l’IIP des entreprises en relation avec les caractéristiques de chaque classe. La répétition du
processus de constitution des classes (Figure 18) permet de faire migrer progressivement
chaque entreprise vers sa bonne classe, celle dont l’entreprise respecte au mieux le profil.
L’ensemble des pratiques-clés permettent de faire les recommandations aux entreprises. Les
pratiques les plus importantes ( tk ( X ) > 2) sont celles que les entreprises d’une classe donnée
doivent développer ou améliorer en priorité pour augmenter leur capacité à innover. La
valeur-ajoutée de ces pratiques dans l’accroissement de la capacité à innover est élevée. Par
contre, les pratiques les plus négligées ( tk ( X ) < -2) représentent des pratiques pour lesquelles
une grande dépense en ressources n’affecte pas vraiment la capacité à innover. Elles sont
aussi peu ou pas développées par les entreprises de la classe. Les autres pratiques (-2 <
tk ( X ) < 2) ne constituent pas vraiment des pratiques spécifiques pour la classe, mais leur
ordre de grandeur montrent leur tendance de développement. Plus la valeur-test d’une
pratique tend vers 2 (respectivement -2), plus (respectivement moins) elles ont de
l’importance dans l’accroissement de la capacité à innover. Plus elle tend vers 0, alors cette
pratique peut être considérée comme basique pour les entreprises et dont le développement ne
demande pas de connaissances particulières.
- 115 -
Evaluation des processus d’innovation
De plus, les poids des pratiques, représentant l’importance des valeurs-tests, donnent
l’importance des pratiques d’innovation pour chaque classe d’entreprises sur une base de 100.
Ces valeurs de poids peuvent nous aider à mettre en évidence un effet de synergie entre les
pratiques de l’innovation de chaque classe. Ainsi pour trois pratiques A, B et C telles que
POIDSA = POIDSB + POIDSC, nous pourrons dire que l’accroissement d’une unité du degré
de développement de la pratique A équivaut à l’accroissement simultané des degrés de
développement des pratiques B et C d’une unité. Ces informations peuvent permettre à une
entreprise de mieux repartir ses ressources par exemples.
Dans un second temps, nous avons identifié les critères relatifs à ces 15 pratiques
d’innovation à évaluer. Nous avons insisté sur la notion de phénomènes ou faits observables
en entreprise. Les critères sont basés sur des faits avérés dont l’observateur devra vérifier dans
l’entreprise la présence ou l’absence. Les activités des entreprises seront donc évaluées après
observation. Notre grille d’observation contient à ce jour 196 critères observables.
Nous avons défini la structure hiérarchique de l’évaluation des capacités à innover des
entreprises. L’obtention de l’IIP se fait sur la base des pratiques d’innovation. Chaque
pratique a été subdivisée en autant de critères observables en entreprise que nécessaire.
L’évaluation se fait sur deux niveaux :
1. Evaluation 1 : agrégation au niveau des critères de chaque pratique pour obtenir son
score ou degré de développement,
2. Evaluation 2 : agrégation au niveau des pratiques d’innovation pour obtenir l’indice
d’innovation (IIP) des entreprises.
Enfin nous avons présenté dans la dernière partie de ce chapitre notre méthodologie
d’évaluation. La méthode que nous proposons permet de définir quatre classes d’entreprises
en fonction de leur spécificité (importance que leurs membres accordent aux pratiques
d’innovation) et donc d’avoir une meilleure affectation des entreprises dans leur classe. Nous
n’utilisons plus un seul profil de préférences pour classer les entreprises mais plutôt quatre
Partie 2 : Démarche méthodologique et outil d’aide à l’auto-évaluation
correspondant chacun à une classe. Les poids des pratiques ne sont plus attribués par des
experts en innovation, mais calculés en fonction de l’importance des pratiques d’innovation
pour chaque classe. Les poids seront donc recalculés chaque fois que les données de
l’environnement des entreprises auront évolué. Nous reviendrons sur notre méthode
d’évaluation dans la partie 3 pour la tester sur un panel d’entreprises.
Les différentes étapes de notre méthode d’évaluation ont été automatisées dans un outil
logiciel d’aide à l’auto-évaluation des entreprises. Les détails et fonctionnalités du logiciel
seront exposés dans le chapitre suivant.
- 117 -
Evaluation des processus d’innovation
L’outil logiciel INNOEVALUATOR est destiné aussi bien aux industriels qu’aux personnes
issues du de la recherche. Son rôle est de permettre à tout praticien de faire un auto-diagnostic
de son entreprise, c’est-à-dire de se comparer à d’autres entreprises pour connaître ses points
forts et ses points faibles par rapport à la concurrence et d’identifier les actions à mettre en
place pour améliorer son processus d’innovation. Il faut préciser que l’évaluation d’une
entreprise ne se fait pas de manière isolée mais toujours en rapport avec d’autres entreprises.
Les recommandations qui seront formulées à une entreprise se feront aussi en rapport à
d’autres entreprises. C’est donc un outil concret à la disposition des chercheurs dans le but
d’évaluer les propositions qu’ils seraient emmenés à formuler en vue d’améliorer le
management de l’innovation en entreprise.
Nous avons développé l’outil INNOEVALUATOR en adoptant une architecture qui respecte
le modèle MVC (Modèle – Vue – Contrôleur). Le MVC impose la division d’une application
(ou programme) en trois couches distinctes. Ainsi nous distinguerons :
1. Le modèle : il contient l’ensemble des données manipulées par l’application (ou le
programme) et il assure leur gestion et leur intégrité. Le modèle peut être modifié sur
ordre du contrôleur. Il ne gère pas la présentation des résultats à l’utilisateur.
24
Java 2 Enterprise Edition (J2EE) est le standard du marché pour le développement d'applications Java
professionnelles exécutables sur serveurs d'entreprise. Cette norme a été proposée par la société SUN.
25
Enterprise JavaBeans (EJB) est une architecture de composants logiciels côté serveur pour la plateforme de
développement J2EE.
Partie 2 : Démarche méthodologique et outil d’aide à l’auto-évaluation
2. La vue : elle présente les données à l'utilisateur à travers des interfaces graphiques.
C’est aussi elle qui reçoit les requêtes de l’utilisateur et les transmet au contrôleur. Elle
ne traite par contre pas les requêtes ni ne modifie les données, elle sert uniquement à
afficher les données et permettre à l'utilisateur d'agir sur ces données.. La vue se met à
jour dès qu'elle reçoit un ordre de notification du contrôleur du modèle.
3. Le contrôleur : il reçoit les requêtes de l’utilisateur via une vue, les interprète et
transmet les ordres (actions à effectuer) aux modèles et aux vues concernées. Le
contrôleur gère donc les événements et assure la synchronisation de la vue et du
modèle.
Pour résumer, lorsqu’un utilisateur formule une requête, elle est interprétée par le contrôleur
qui l’interprète et détermine les portions du modèle et de la vue qui doivent être appelées. Le
modèle gère les interactions avec les données, applique les règles métier, puis renvoie les
données. Le contrôleur sélectionne la vue concernée et lui renseigne les données. Enfin, la vue
se charge d’afficher les données à l’utilisateur.
L’avantage d’adopter ce modèle pour la programmation d’applications est la clarté de
l'architecture qu'il impose à savoir la séparation entre les données, les traitements et la
présentation. Cela simplifie également la tâche du développeur en cas de maintenance ou une
d’amélioration de son application.
Les 2 premières interfaces graphiques (pages d’accueil et cadre de choix sont représentées sur
la figure ci-dessous) :
- 119 -
Evaluation des processus d’innovation
Figure 20 : Page d’accueil et cadre des choix offerts à l’utilisateur, source : notre recherche
Partie 2 : Démarche méthodologique et outil d’aide à l’auto-évaluation
Après avoir cliqué sur le bouton Démarrez dans la page d’accueil, nous accédons à la fenêtre
Cadre2 qui permet à l’utilisateur de choisir l’action qu’il souhaite effectuer. Les
fonctionnalités majeures de l’outil INNOEVALUATOR sont :
Tableau 6 : Table servant à visualiser les informations d’une entreprise dans la base de
données, source : notre recherche
- 121 -
Evaluation des processus d’innovation
Figure 22 : Ecarts des degrés de développement des pratiques entre deux entreprises,
source : notre recherche
- 123 -
Evaluation des processus d’innovation
l’évaluation (IIP, rang et classe) pour les 20 entreprises qui interviendront dans la
partie 3.
A la fin d’une évaluation, l’utilisateur pourra clairement visionner sa capacité à innover. Une
comparaison des performances de son entreprise à celles d’autres entreprises concurrentes
(dès le départ, l’utilisateur a la possibilité de choisir dans la base de données l’ensemble des
entreprises avec lesquelles il veut se comparer) lui permettra d’évaluer ses points forts et ses
points faibles en termes de capacité à innover. De plus, la répartition des entreprises évaluées
dans les classes d’entreprises (proactive, préactive, réactive, passive) permet rapidement à
l’entreprise de connaître les concurrentes qui ont des profils semblables au sien (entreprises
appartenant à la même classe) et les autres qui ont des stratégies différentes (entreprises des
autres classes). De plus, nous proposons dans notre méthode d’évaluation une définition de
chacune des quatre classes d’entreprises avec des objectifs à court terme à atteindre
(entreprise modèle de Base) et des objectifs à long terme (entreprise modèle Cible) pour avoir
une progression dans son évolution. Ainsi l’entreprise aura la possibilité, soit d’améliorer sa
capacité à innover dans sa classe de manière incrémentale, c’est-à-dire de faire évoluer son
processus d’innovation actuel vers un processus meilleur (entreprises de Base et Cible de sa
classe), soit de le faire évoluer de manière radicale en remettant tout son processus
d’innovation (entreprises de Base et Cible des classes supérieures). Nous reviendrons sur ce
point dans notre étude expérimentale (partie 3).
Il faut aussi souligner que plusieurs outils existent pour évaluer la capacité à innover des
entreprises. La plupart du temps, ce sont des outils d’auto-évaluation, rapide d’utilisation et
pas très fins.
L’un des plus importants aujourd’hui et qui prend de l’ampleur est le réseau IMP3rove qui est
une initiative du réseau Europe Innova, créé pour piloter l’innovation européenne. Ce projet
est conçu pour aider les PME à maîtriser l’innovation par l’utilisation d’un instrument d’auto-
évaluation. Cet outil d’auto-évaluation est accessible via le site internet http://www.improve-
innovation.eu/ à tout chef d’entreprise. Celui-ci accède à un questionnaire (après s’être
préalablement inscrit) mis au point par l’institut de recherche allemand Fraunhofer-
Gesellschaft à partir d'une méthodologie développée par le cabinet américain AT Kearney et
baptisée « House of Innovation » (voir figure ci-dessous). Les dimensions analysées dans le
questionnaire portent sur :
• La stratégie d’innovation,
• L’organisation et la culture pour l’innovation,
• Le cycle de vie de l’innovation,
- 125 -
Evaluation des processus d’innovation
Une fois le questionnaire rempli et l’évaluation terminée, le chef d’entreprise peut demander
un rapport comportant une analyse écrite des points forts et des points faibles de son
entreprise, en termes d'innovation. Les performances de l'entreprise sont comparées à celles
de structures équivalentes dans son domaine, par rapport aux champions de la croissance et à
la moyenne. Après son évaluation, l’entreprise peut éventuellement choisir un cabinet conseil
avec lequel elle peut bénéficier d'un premier entretien.
Les premiers résultats montrent que des études plus approfondies doivent être menées pour
mieux connaître le lien entre innovation et performances financières. De plus, on ne sait pas
encore comment les enseignements tirés d'IMP3rove seront disséminés à travers l'Europe.
L’outil IMP3rove propose une évaluation de la capacité à innover des entreprises par rapport à
d’autres entreprises. C’est également une évaluation en comparaison à d’autres entreprises
que nous proposons. Cependant IMP3rove ne propose pas la possibilité aux entreprises de se
comparer à d’autres entreprises, ce qui est le contraire pour notre outil. De plus,
INNOEVALUATOR permet une évaluation rapide de la capacité à innover des entreprises,
une visualisation et une interprétation rapide des résultats des entreprises à travers les
Partie 2 : Démarche méthodologique et outil d’aide à l’auto-évaluation
interfaces graphiques. Il permet aussi une meilleure interaction avec l’utilisateur et est facile
d’utilisation. La présentation des résultats à travers des outils visuels facilite les discussions et
la prise de décision entre acteurs de l’entreprise qui ont à charge de piloter le processus
d’innovation.
Conclusion de la partie 2
Pour mieux expliquer notre méthodologie et vérifier la validité de nos propositions, nous
l’avons appliqué sur un exemple concret d’entreprises industrielles (PME) de la région
lorraine. Ce sera le sujet de la partie 3 dans laquelle nous présenterons en détail les étapes de
notre expérimentation et discuterons les résultats obtenus.
- 127 -
PARTIE 3 :
Introduction de la partie 3
Nous avons succinctement présenté dans la première partie le cadre de notre travail de thèse
ainsi que la problématique de recherche qui consiste à évaluer les activités du processus
d’innovation au niveau des entreprises.
Nous avons souhaité confronter nos propositions à la réalité des entreprises. Dans la suite de
ce chapitre, nous présentons une application de notre méthode d’évaluation sur un exemple
concret d’entreprises industrielles (des PME) de la région lorraine.
Dans un premier temps, nous allons exposer le cadre et les objectifs expérimentaux à
atteindre. Ensuite nous discuterons les résultats obtenus.
- 129 -
Evaluation des processus d’innovation
7. Chapitre 7 - Expérimentation
Le chapitre 7 a pour but de définir les contours de notre étude expérimentale. Nous aurons à
définir dans un premier temps les objectifs visés par cette étude. Ensuite, nous présenterons
les conditions de sélection des entreprises à évaluer. Enfin, nous présenterons la constitution
de notre panel expérimental.
Dans un second temps, l’objectif expérimental était également de tester la valorisation des
informations. Les résultats de la démarche devraient permettre la production de préconisations
personnalisées pour chaque entreprise du panel. Il s’agissait d’expérimenter l’efficience de
l’évaluation. Parmi les questions initiales, citons :
• La démarche permet-elle de diagnostiquer les limites des entreprises et de leur
prescrire des remèdes ?
• Permet-elle aux entreprises d’identifier les actions à mettre en place pour rehausser
leur capacité à innover dans leur classe d’entreprises ?
• Quelles sont également les actions concrètes à mettre en place pour pouvoir changer
de classe d’entreprise ?
Partie 3 : Expérimentation et analyse des résultats
Dans ce modèle, la capacité d’innovation d’une entreprise est conditionnée par des facteurs
qui se distribuent selon trois niveaux :
• Le premier niveau fait référence aux facteurs internes à l’entreprise innovante :
globalement, il s’agit des ressources qu’elle consacre à la R&D, à l’acquisition de
technologies, au personnel scientifique et technique, à la commercialisation et à
l’exportation de ses produits. La capacité à innover de l’entreprise est en partie liée à
l’importance relative qu’elle accorde à ces facteurs,
• Le second niveau renvoie à l’environnement immédiat de l’entreprise : c’est
auprès des acteurs évoluant dans cet environnement que l’entreprise trouve les
ressources supplémentaires susceptibles d’appuyer sa capacité à innover. Les
principaux acteurs sont les centres de recherche universitaires, les sociétés de
financement, les entreprises concurrentes, les organismes et les laboratoires de
recherche gouvernementaux. Ces institutions offrent des services ou produisent des
connaissances qui peuvent contribuer à alimenter le processus d’innovation dans
l’entreprise,
• Le troisième niveau du modèle est celui de l’environnement global : il comprend
les conditions générales d’ordre économique, social, politique et culturel qui
définissent le climat d’ensemble et les « règles du jeu » favorables ou non à
l’innovation dans l’entreprise. Il s’agit d’éléments qui sont déterminés par des
décisions gouvernementales ou en sont fortement influencés: cadre législatif et
réglementaire, système d’éducation, fiscalité, taux de change, qualité de la base de
recherche scientifique, mesures et programmes gouvernementaux, culture scientifique
et technique notamment.
De plus, nous avons décidé de nous limiter aux petites et moyennes entreprises (PME) pour
avoir des données comparables et aussi l’influence de la taille des entreprises sur les résultats
de l’étude.
Après avoir défini le cadre d’expérimentation, nous avons contacté par téléphone et par
courrier un ensemble d’entreprises industrielles (des PME) de la région Lorraine. Nous avons
choisi la proximité géographique pour des raisons de facilité d’accès à l’information sur les
entreprises (par le biais de la chambre du commerce et d’industrie de Meurthe et Moselle) et
aussi pour des raisons de déplacement. Nous avons finalement pu effectuer personnellement
l’observation des activités du processus d’innovation dans quatre entreprises. Il faut
cependant souligner les difficultés rencontrées dans notre démarche de collecte
d’informations auprès des entreprises. Ces dernières restent pour la plupart réservées quant à
- 131 -
Evaluation des processus d’innovation
Il faut aussi souligner que les problèmes rencontrés dans notre démarche de collecte
d’informations étaient aussi dus au nombre de critères à observer (196 critères observables et
23 critères qualitatifs). Le nombre assez élevé de critères a été d’un effet négatif, car plusieurs
responsables contactés s’en sont plaint. Nous avons essuyé des refus juste parce que notre
estimation du temps nécessaire à la collecte des informations a été jugée trop importante pour
certaines entreprises. Notre objectif dans la conception de la grille d’observation a été d’être
le plus exhaustif possible sur la définition des critères à évaluer pour prendre en compte tout
le processus d’innovation.
Partie 3 : Expérimentation et analyse des résultats
Les informations recueillies auprès des vingt entreprises ont été prétraitées pour en extraire les
informations utiles à notre étude. Le prétraitement des données a concerné pour chaque
entreprise les questions pour lesquelles les réponses étaient floues (soit parce que l’entreprise
a coché les deux réponses OUI et NON, soit parce qu’elle a marqué la mention « je ne sais
pas ») et les questions pour lesquelles aucune réponse n’a été donnée.
Dans la définition des modalités d’exercice des critères de notre étude, nous avons décidé
d’accorder une note de zéro à tout critère pour lequel soit une réponse imprécise est fournie
(réponse OUI et NON à la fois ou la mention « je ne sais pas »), soit aucune réponse n’est
donnée. Nous avons toutefois confronté, dans les cas où cela était possible, les réponses
imprécises (ou défauts de réponses) aux critères de chaque pratique avec les réponses à
d’autres critères de la même pratique qui sont sensiblement proches ou complémentaires. A
partir de ces confrontations, nous avons souvent réussi à attribuer une note plus adaptée à ces
critères. Dans les cas où aucune similitude n’a pu être établie, la note de zéro initialement
prévue à cet effet est maintenue. Il faut toutefois noter que ces réponses imprécises ou défauts
de réponses sont très peu nombreuses et ne concernent qu’une minorité d’entreprises retenues.
Alors ces ajustements n’ont pas de réelle incidence sur le résultat final de ces entreprises. Les
six entreprises pour lesquelles la grille d’observation comportait trop de critères sans réponses
valables ont tout simplement été retirées du panel d’étude.
Après ce premier travail, nous avons pu passer à la première étape de notre méthodologie
d’évaluation, c’est-à-dire à l’agrégation des critères pour obtenir le degré de développement
des pratiques ou Evaluation 1. Rappelons que notre méthodologie d’évaluation se fait en
deux phases. La seconde phase appelée Evaluation 2 portera sur les degrés de développement
des pratiques de l’innovation et permettra d’obtenir l’IIP des entreprises et la classification
des entreprises dans les quatre classes (proactive, préactive, réactive et passive).
- 133 -
Evaluation des processus d’innovation
L’application de l’équation [1] aux valeurs du Tableau 9 nous permet d’obtenir les degrés de
développement de chacune des pratiques d’innovation pour l’ensemble des 20 entreprises du
panel (voir § 5.3.1). Cela revient à diviser les valeurs des colonnes de ce tableau par les
valeurs de la colonne Valeur max. Nous obtenons ainsi les degrés de développement des
pratiques d’innovation pour les entreprises du panel. Ces données brutes, synthétisées dans le
Tableau 10, serviront par la suite à calculer les IIP des entreprises et à dégager une
classification de ces entreprises (Evaluation 2).
- 135 -
Evaluation des processus d’innovation
89% des critères, suivies des entreprises E2, E3, E7, E11 et E16 avec 78% des critères.
Cependant les entreprises E8 et E9 ne réalisent aucune tâche liée à cette pratique.
Nous remarquons que 50% des entreprises (soit un total de 10) réalisent plus de 2/3 des
critères de la pratique. De plus, de nombreuses entreprises ont les mêmes niveaux de
performances pour cette pratique. En plus des trois entreprises qui réalisent 89% des critères,
nous avons cinq entreprises qui réalisent 78% des critères et cinq autres qui en réalisent 44%.
- 137 -
Evaluation des processus d’innovation
E12 qui n’en font que 18%. D’un autre côté, l’entreprise E13 a la meilleure performance sur
cette pratique avec 82% des critères réalisés suivie de l’entreprise E20 avec 73%.
La moyenne générale de la pratique est la plus faible de l’ensemble des 15 pratiques, soit
31%. Cela s’explique par des niveaux de performance très faibles pour la grande majorité des
entreprises. En effet, 16 entreprises ont des niveaux de performance qui n’excèdent pas 45%.
Cette aussi la seule pratique pour laquelle l’entreprise E3 ne réalise pas plus de 50% des
critères et de très loin puisqu’elle ne réalise aucun critère (0%). E3 qui a pratiquement les
meilleures performances dans toutes les pratiques se retrouve handicapée sur cette pratique.
En conclusion de cette partie, nous remarquons que les entreprises du panel réalisent les
pratiques de l’innovation de manière assez variée. Les degrés de développement des pratiques
couvrent pour un grand nombre de pratiques tout l’intervalle des valeurs possibles, c’est-à-
dire l’intervalle [0, 1]. L’entreprise E3 reste l’entreprise la plus performante sur le plus grand
nombre de pratiques d’innovation : huit pratiques au total dont quatre pour lesquelles elle
réalise entièrement tous les critères. Cependant elle fait partie du grand nombre d’entreprises
qui ne réalisent aucun critère de la pratique 11 « Fonctionnement en réseaux ».
Nous notons que seulement quatre entreprises du panel réalisent l’ensemble des 15 pratiques
d’innovation. Il s’agit des entreprises E1, E4, E14 et E20. Sept entreprises (E2, E3, E5, E10,
E13, E17 et E19) réalisent 14 pratiques sur les 15. Par contre les entreprises E8 et E9 ne
réalisent pas six pratiques ou encore l’entreprise 15 n’en réalise pas quatre au total.
De toutes les pratiques d’innovation, seules deux pratiques « Gestion de la relation client » et
« Production des idées et concepts » sont réalisées (au moins un critère de la pratique est
réalisé) par l’ensemble des 20 entreprises du panel. Par contre les pratiques les moins réalisées
sont « Intelligence économique » et « Fonctionnement en réseaux ». Cela s’explique sans
doute par le fait que les entreprises du panel sont de petites PME qui travaillent plus en
autarcie. De plus, seules quatre pratiques ont des niveaux moyens de développement
supérieurs à 50% : « Gestion du portefeuille de projets », « Organisation des tâches liées à
l’innovation », « Allocation des compétences », « Encouragement à l’innovation »,
« Activités de R&D » et « Gestion de la relation client ».
Après avoir effectué l’Evaluation 1, nous pouvons maintenant déployer les différentes étapes
de l’Evaluation 2 de notre méthodologie d’évaluation pour obtenir le score final des
entreprises et aussi la classification des entreprises.
- 139 -
Evaluation des processus d’innovation
finale des entreprises. Le process de constitution progressive des classifications prend appui
sur la classification initiale qui en constitue le point de départ.
CLASSIFICATION INITIALE ( C0 )
Entreprises E3 E14 E20 E19 E17 E18 E2 E1 E5 E13 E11 E10 E6 E4 E15 E16 E7 E12 E8 E9
Indices 0,78 0,72 0,69 0,57 0,56 0,56 0,54 0,54 0,49 0,46 0,46 0,42 0,41 0,32 0,30 0,29 0,27 0,23 0,20 0,15
Rangs 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20
Classes PROACTIVE PREACTIVE REACTIVE PASSIVE
• Classe proactive : Trois entreprises sont classées dans la classe proactive. C’est la
classe la moins fournie en entreprises de cette classification. Elles ont un IIP assez
élevé et supérieur à 0.68. L’écart entre l’entreprise E3 et l’entreprise E14 est de 6
points (6%), par contre l’écart entre les entreprises E14 et E20 n’est que de 3 points
(3%). L’écart entre ces entreprises et les autres est assez marquant, plus de 11 points
(11%), puisque l’entreprise E19 qui suit dans le classement a un IIP de 0.571. Cela
s’explique par les performances des entreprises de la classe au niveau des pratiques.
A titre d’exemple, l’entreprise E3 arrive en première position en termes de niveaux de
performance dans huit pratiques avec des niveaux assez élevés. Les entreprises E14 et
E20 figurent parmi les quatre entreprises du panel qui réalisent toutes les pratiques
d’innovation. De plus, l’entreprise E14 se retrouve en première position dans six
pratiques d’innovation et à la seconde position dans trois pratiques. Quant à
l’entreprise E20, elle se retrouve en première position dans trois pratiques et à la
seconde position dans trois pratiques.
• Classe préactive : le plus grand nombre d’entreprises est rangé dans la classe
préactive, soit neuf au total. Nous pouvons nous apercevoir que les IIP des entreprises
de cette classe se situent autour de la moyenne (valeur 0.50) et que les écarts sont
généralement faibles. Les trois premières entreprises de cette classe ont quasiment le
même IIP (écart de 1 point) avec un IIP de 0.57 pour E19 et de 0.56 pour E17 et E18.
L’écart est seulement de 3 points entre les cinq meilleures entreprises de la classe (de
E19 à E1) ou encore de 15 points entre toutes les entreprises de la classe. Les
positions de ces entreprises s’expliquent par leurs niveaux de performance sur les
pratiques acceptables. L’entreprise E17 a des performances maximales dans deux
pratiques et c’est aussi le cas pour les entreprises E18, E13 et E10 dans une pratique.
- 141 -
Evaluation des processus d’innovation
CLASSIFICATION INITIALE ( C0 )
Entreprises E3 E14 E20 E19 E17 E18 E2 E1 E5 E13 E11 E10 E6 E4 E15 E16 E7 E12 E8 E9
Indices 0,78 0,72 0,69 0,57 0,56 0,56 0,54 0,54 0,49 0,46 0,46 0,42 0,41 0,32 0,30 0,29 0,27 0,23 0,20 0,15
Rangs 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20
Classes PROACTIVE PREACTIVE REACTIVE PASSIVE
CLASSIFICATION 1 ( C1 )
Entreprises E3 E14 E20 E17 E18 E19 E2 E1 E5 E10 E13 E11 E15 E6 E16 E4 E8 E7 E12 E9
Indices 0,82 0,79 0,73 0,58 0,58 0,57 0,61 0,56 0,54 0,45 0,51 0,47 0,43 0,37 0,31 0,30 0,28 0,25 0,23 0,17
Rangs 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20
Classes PROACTIVE PREACTIVE REACTIVE PASSIVE
CLASSIFICATION 2 ( C2 )
Entreprises E3 E14 E20 E18 E17 E19 E2 E1 E5 E10 E13 E11 E15 E6 E16 E4 E7 E12 E8 E9
Indices 0,84 0,76 0,72 0,61 0,61 0,61 0,63 0,59 0,55 0,47 0,55 0,53 0,40 0,42 0,38 0,31 0,31 0,23 0,21 0,18
Rangs 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20
Classes PROACTIVE PREACTIVE REACTIVE PASSIVE
CLASSIFICATION FINALE ( C3 )
Entreprises E3 E14 E20 E18 E17 E19 E2 E1 E5 E10 E13 E11 E15 E6 E16 E4 E7 E12 E8 E9
Indices 0,84 0,76 0,72 0,61 0,61 0,61 0,63 0,59 0,55 0,47 0,55 0,53 0,40 0,42 0,38 0,31 0,31 0,23 0,21 0,18
Rangs 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20
Classes PROACTIVE PREACTIVE REACTIVE PASSIVE
La méthode permet d’obtenir au final une classification des entreprises qui prend en
compte les spécificités des classes d’entreprises. Pour notre panel d’étude, la classification
finale est obtenue après deux itérations du process de constitution des classes, c’est-à-dire à la
classification C2. Pendant le passage à la classification C3, plus aucune modification n’est
observée ni dans les constitutions des classes, ni dans les IIP des entreprises. Les entreprises
sont classées de la plus performante (E3) à la moins performante (E9).
Nous pouvons nous rendre compte, dans le récapitulatif des différentes classifications (de C0 à
C2 ou C3), de l’évolution d’une part des positions et des IIP des entreprises et d’autre part de
l’évolution des classes d’entreprises. Nous remarquons que les tailles des classes d’entreprises
changent considérablement du passage de C0 à C1 et restent stables durant les autres itérations.
Les entreprises qui constitueront chacune des quatre classes d’entreprises finales sont
obtenues dès la première itération. Ensuite seules les positions et les IIP des entreprises à
l’intérieur de chaque classe évoluent.
Dans toutes les classifications (de C0 à C2), seules 6 entreprises conservent leurs positions. Ce
sont tout d’abord les trois meilleures entreprises des différents classements, à savoir E3, E14
et E20. Elles sont respectivement aux 1ère, 2e et 3e places et demeurent toujours dans la classe
proactive. Nous avons ensuite les entreprises E1 et E5, respectivement aux 8e et 9e rangs.
Elles restent toujours membres de la classe préactive. Enfin l’entreprise E9 demeure la moins
performante en termes de capacité à innover du panel. Elle reste toujours confinée dans la
classe passive.
Partie 3 : Expérimentation et analyse des résultats
Nous constatons que sur l’ensemble des 20 entreprises, 12 d’entre elles restent au final dans la
même classe que dans la classification initiale (C0). Il s’agit des entreprises E3, E14 et E20
dans la classe proactive, E1, E2, E5 et E10 dans la classe préactive, E15 dans la classe
réactive et E7, E8 et E9 dans la classe passive. Les autres entreprises du panel changent au
moins une fois de classe.
Si nous regardons de près l’évolution de chaque classe d’innovation de C0 à C2, nous pouvons
dire :
• Classe proactive : dans la classification initiale, la classe proactive ne contenait que les
entreprises E3, E14 et E20. Après la première itération, les entreprises E17, E18 et
E19 viennent s’associer à ces trois premières pour constituer la nouvelle classe
proactive dans la classification C1. Ces trois dernières entreprises ont des IIP assez
faibles dans la nouvelle classification par rapport aux trois premières, ce qui était déjà
le cas dans la classification C0. Notons au passage que l’IIP de chacune des cinq
premières entreprises de la nouvelle classe proactive a été amélioré. L’amélioration de
l’IIP est beaucoup plus nette pour les trois premières entreprises de la classe qui
conservent leur rang. L’IIP d’E3 passe de 0.78 à 0.82, celui d’E14 passe de 0.72 à 0.79
et celui d’E20 passe de 0.69 à 0.73. L’amélioration reste très légère pour les deux
entreprises suivantes, de 0.564 à 0.577 pour E17 et de 0.562 à 0.576 pour E18. Ces
entreprises, qui sont des transfuges de la classe préactive, gagnent chacune une place
dans le nouveau classement. Elles passent respectivement des positions 5 et 6 aux
positions 4 et 5. Les deux places gagnées par E17 et E18 sont perdues par E19 qui
passe de la 6e à la 4e du classement. Son IIP reste par contre constant à 0.57.
A l’itération suivante (classification C2), la nouvelle classe proactive contient les
mêmes entreprises que dans la classification C1. Les positions des entreprises restent
inchangées sauf pour les entreprises E17 et E18 qui échangent leurs places (E17 passe
de la 4e à 5e place et E18 passe de la 5e à la 4e place). En ce qui concerne les IIP,
l’entreprise E3 voit son IIP encore amélioré (de 0.82 à 0.84). C’est aussi le cas des
trois dernières entreprises de la classe pour lesquelles les IIP font un réel bond en
avant (E18 : de 0.576 à 0.613 ; E17 : de 0.577 à 0.612 ; E19 : de 0.569 à 0.611) et se
retrouvent pratiquement à égalité. Au contraire, les IIP des entreprises E14 et E20 sont
revus à la baisse et passent respectivement de 0.79 et 0.73 à 0.76 et 0.72.
- 143 -
Evaluation des processus d’innovation
C1 - C2 0,03 0,02 0,03 0,02 0,01 0,05 0,06 -0,06 0,01 0,01 0,06 0,00 0,04 -0,04 -0,02 0,07 0,04 0,04 0,04 -0,01
C0 - C2 0,05 0,09 0,06 -0,01 0,05 0,02 0,04 0,02 0,02 0,05 0,08 0,00 0,08 0,03 0,10 0,08 0,05 0,05 0,04 0,03
Tableau 13 : Evolution de l’IIP des entreprises entre les classifications, source : notre
recherche
L’analyse de la progression de l’IIP des entreprises lors du passage d’une classification à une
autre montre :
• C0 C1 : entre ces deux classifications, nous remarquons que seules trois entreprises
ont leur IIP qui baisse. Il s’agit des entreprises E4, E6 et E7 dont les baisses
respectives sont de 3, 3 et 2 points (3%, 3% et 2%). Les IIP des entreprises E12 et E19
restent constants. Toutes les autres entreprises ont des IIP en progression. L’entreprise
qui a la plus forte progression est E15 avec 13 points, suivie de l’entreprise E8 avec 8
points. Trois entreprises ont des progressions très faibles. Ce sont les entreprises E11,
E17 et E18 qui ont une progression d’à peine 1 point (1%).
• C1 C2 : le passage de la classification C1 à la classification finale C2 montre que
quatre entreprises ont des IIP en baisse. Il s’agit des entreprises E8, E14, E15 et E20.
La plus forte baisse est observée pour l’entreprise E8 avec 6 points ; celle de
l’entreprise E20 est négligeable, à peine de 1 point. L’entreprise E12 a une fois de plus
un IIP constant. Encore 10 entreprises ont des IIP en progression avec la plus forte
progression pour l’entreprise E16 (7 points) et la progression la plus faible est pour les
entreprises E5, E9 et E10 avec 1 point.
• C0 C2 : sur l’ensemble du process d’évaluation, 18 entreprises sur les 20 au total ont
des IIP améliorés à l’arrivée. L’entreprise E12 bien entendu conserve le même niveau
de performance puisque son index est resté stable. Seule l’entreprise E4 observe une
baisse légère d’1 point sur l’ensemble des itérations, ce qui est négligeable. Nous
pouvons donc dire qu’à la fin du process de calcul, les IIP de l’ensemble des
entreprises sont améliorés ou restent constants. L’amélioration moyenne de l’IIP par
entreprise est de l’ordre de 4 points. L’amélioration la plus significative est observée
pour l’entreprise E15 avec une augmentation de plus de 10 points, suivie de
l’entreprise E2 avec 9 points, puis des entreprises E13 et E16 avec 8 points chacune.
Sur l’ensemble des entreprises du panel, nous avons 11 entreprises qui ont des IIP améliorés
après chaque itération. Il s’agit des entreprises E1, E2, E3, E5, E9, E10, E11, E13, E16, E17
et E18. L’entreprise E12, comme nous l’avons souligné plus haut, a un IIP qui demeure
constant. Quant aux huit autres entreprises restantes (E4, E6, E7, E8, E14, E15, E19 et E20),
- 145 -
Evaluation des processus d’innovation
leur IIP est, soit en baisse lors du passage de C0 à C1 et en progression de C1 à C2, soit il est en
progression lors du passage de C0 à C1 et en baisse de C1 à C2 mais jamais en baisse sur les
deux itérations. Parmi ces entreprises, seule E4 a un IIP en baisse sur l’ensemble du process,
cette baisse pouvant être qualifiée de négligeable (-1 point).
Ceci confirme bien le fait qu’à chaque itération, la classification obtenue soit meilleure
que la précédente. Nous avons une amélioration des IIP de la grande majorité des entreprises
du fait qu’elles migrent progressivement vers leur bonne classe et aussi que les profils de
préférences des classes se renforcent.
de -0.3)26, nous pouvons dire que toutes les autres pratiques sont largement
développées, avec un accent beaucoup plus important sur les pratiques P2 « Gestion de
projets », P3 « Stratégie intégrée favorisant l'innovation », P4 « Gestion du portefeuille
de projets », P6 « Amélioration continue du processus d'innovation », P7 « Allocation
des compétences », P8 « Encouragements à l'innovation », P12 « Apprentissage
collectif », P13 « Production des idées et concepts » et P15 « Gestion de la relation
client » qui ont des valeurs-tests supérieures à 2 (valeurs surlignées en jaune dans le
Tableau 14). Il n’y a pas de pratique négligée dans cette classe d’entreprises, la
pratique P11 pouvant être qualifiée d’indifférente.
• Classe préactive : aucune pratique dans cette classe n’est véritablement négligée ni
même privilégiée. La pratique P10 « Intelligence économique » par contre est celle
que les entreprises de cette classe développent le plus avec un IIP de 1.7. Nous
pouvons donc la considérer comme la pratique caractéristique de la classe. Nous
remarquons que les degrés de développement des pratiques de cette classe sont
généralement au-dessus de la moyenne. Seules quatre pratiques sur les quinze ont des
valeurs-test inférieures à 0.
• Classe réactive : il existe deux pratiques caractéristiques dans cette classe. Nous avons
d’un côté la pratique P11 « Fonctionnement en réseaux » qui est fortement développée
par les entreprises de cette classe et de l’autre côté la pratique P12 « Apprentissage
collectif » qui est fortement négligée. De plus, les pratiques P2 « Gestion de projets »
et surtout P3 « Stratégie intégrée favorisant l'innovation » avec des valeurs-tests
respectives de -1.5 et -1.7, peuvent être classées parmi les pratiques négligées.
Globalement les degrés de développement des pratiques oscillent autour des moyennes
générales avec une tendance plutôt négative.
• Classe passive : dans cette classe, quasiment toutes les pratiques sont négligées. C’est
l’opposé des entreprises de la classe proactive. Les pratiques les plus importantes pour
la classe proactive se retrouvent presque systématiquement négligées dans cette classe.
Nous avons onze pratiques beaucoup négligées avec des valeurs-tests inférieures à -2
(valeurs surlignées en gris dans le Tableau 14). Il faut aussi noter que toutes les
valeurs-tests sont négatives. Ce qui veut dire que le niveau global de développement
des pratiques pour les entreprises de classe passive est très inférieur à la moyenne du
panel.
Les valeurs-test des pratiques d’une classe d’entreprises permettent d’identifier deux
catégories de pratiques-clés :
• Les pratiques fortement développées : ce sont les pratiques sur lesquels les entreprises
de la classe devront mettre l’accent en priorité pour augmenter leur potentiel en
innovation.
• Les pratiques négligées : ce sont les pratiques faiblement développées par les
entreprises de la classe et dont une forte réalisation n’a pas une grande incidence sur la
capacité à innover des entreprises de la classe.
Plus encore, les poids représentent la part de contribution de chaque pratique à la performance
globale en termes de capacité à innover des entreprises de chaque classe. Ainsi pour accroître
sa capacité d’innovation, une entreprise devra développer en priorité les pratiques de plus fort
26
La valeur-test d’une pratique est égale à 0 dans une classe si la moyenne de développement de cette pratique
dans la classe est égale à la moyenne générale de développement de la pratique dans tout le panel, voir l’équation
[4] au § 5.3.2.3.
- 147 -
Evaluation des processus d’innovation
poids. Le tableau des profils est donc important dans une optique d’audit des performances
des entreprises. Il permet rapidement de connaître les points forts et faibles d’une entreprise
dans sa classe et de préconiser les recommandations adaptées pour un meilleur pilotage de
son processus d’innovation. Les pratiques à améliorer seront identifiées en se basant sur
l’importance des pratiques d’innovation pour la classe (classement en fonction de leurs poids),
les degrés de développement des pratiques de l’entreprise et les valeurs cibles à atteindre pour
chaque pratique. Nous reviendrons sur les valeurs cibles dans notre proposition de
classification des systèmes innovants (voir § 8.3).
Les recommandations suivent le sens inverse de celui du process d’évaluation (voir § 5.2). Le
process d’évaluation part du niveau hiérarchique 2 pour obtenir le degré de développement
des pratiques (niveau hiérarchique 1), puis du niveau 1 pour obtenir l’IIP de l’entreprise et sa
classe d’entreprises (niveau hiérarchique 0).
Actions 1 Actions 2
Objectif Facteurs Critères observables
( Niveau 0 ) ( Niveau 1 ) ( Niveau 2 )
Nous avons montré dans le § 8.2.3 que chaque nouvelle classification est meilleure que la
précédente. Cela est dû au fait qu’à chaque itération, les profils de préférences utilisés pour le
calcul de l’IIP des entreprises tient mieux compte des spécificités de classes.
Cependant, notre méthode ne permet pas d’obtenir un indicateur (l’IIP) qui permette de
comparer directement deux entreprises de deux classes différentes.
A titre d’exemple, intéressons-nous de près aux entreprises E10 et E13. Dans la classification
initiale (voir Tableau 12), nous remarquons que l’entreprise E13 est plus performante que
l’entreprise E10. Cela est dû au fait que l’entreprise E13 réalise plus phénomènes observables,
soit 93, que l’entreprise E10, soit 87 (voir Tableau 9) et que l’IIP représente la moyenne des
phénomènes observés par rapport à l’ensemble des phénomènes.
A la dernière itération, l’entreprise E10 est affectée dans la classe préactive et devient
meilleure que l’entreprise E13 affectée à la classe réactive. En effet, l’entreprise E10 répond
Partie 3 : Expérimentation et analyse des résultats
mieux aux conditions de la classe préactive. La figure suivante montre les degrés de
développement des pratiques pour les deux entreprises suivant l’ordre d’importance des
pratiques pour la classe préactive.
Poids Classement
PRATIQUES DE L'INNOVATION E10 E13
PREACTIF poids
Intelligence économique 12,7 1 0,83 0,00
Apprentissage collectif 10,5 2 0,33 0,11
Allocation des compétences 10,3 3 0,58 0,58
Gestion de projets 10,0 4 0,74 0,47
Encouragements à l'innovation 9,3 5 0,38 0,13
Mémorisation des savoir-faire 9,2 6 0,22 0,22
Organisation des tâches liées à l'innovation 7,7 7 0,54 0,54
Production des idées et concepts 6,5 8 0,36 0,45
Stratégie intégrée favorisant l'innovation 6,3 9 0,25 0,50
Gestion de la relation client 5,5 10 0,29 0,47
Gestion du portefeuille de projets 4,8 11 0,44 0,67
Amélioration continue du processus d'innovatio 3,5 12 0,44 0,56
Fonctionnement en réseaux 3,5 13 0,00 0,82
Activités de R&D 0,2 14 0,71 0,88
Conception interne 0,0 15 0,17 0,56
(A)
Poids Classement
PRATIQUES DE L'INNOVATION E10 E13
REACTIF poids
Fonctionnement en réseaux 15,8 1 0,00 0,82
Conception interne 10,6 2 0,17 0,56
Activités de R&D 10,4 3 0,71 0,88
Organisation des tâches liées à l'innovation 9,2 4 0,54 0,54
Gestion du portefeuille de projets 8,3 5 0,44 0,67
Production des idées et concepts 8,3 6 0,36 0,45
Amélioration continue du processus d'innovatio 7,6 7 0,44 0,56
Intelligence économique 7,1 8 0,83 0,00
Mémorisation des savoir-faire 6,5 9 0,22 0,22
Gestion de la relation client 6,2 10 0,29 0,47
Encouragements à l'innovation 3,6 11 0,38 0,13
Allocation des compétences 3,2 12 0,58 0,58
Gestion de projets 1,9 13 0,74 0,47
Stratégie intégrée favorisant l'innovation 1,2 14 0,25 0,50
Apprentissage collectif 0,0 15 0,33 0,11
(B)
Tableau 15 : Comparaison des degrés de développement des entreprises E10 et E13 suivant
les profils de préférences de la classe préactive (A) et de la classe réactive (B), source : notre
recherche
L’entreprise E10 a des valeurs supérieures ou égales à l’entreprise E13 (égalité pour les
pratiques classées en 3e, 6e et 7e positions) dans les 8 plus importantes pratiques de la classe
préactive (Tableau 15, partie A), soit sur une part de 76,2% du poids total. L’entreprise E13 a
- 149 -
Evaluation des processus d’innovation
ses meilleurs scores sur les pratiques à faible impact sur la performance globale. L’IIP de
l’entreprise E10 est de 0.47 dans cette classe contre 0.36 pour l’entreprise E13.
Par contre, dans la classe réactive, l’entreprise E13 a des valeurs supérieures ou égales à
l’entreprise E10 (égalité pour la pratique classée en 4e) dans les 7 plus importantes pratiques
de la classe réactive (Tableau 15, partie B), soit sur une part de 70,3% du poids total. Dans
cette classe, l’entreprise E13 a un IIP de 0.55 contre 0.38 pour l’entreprise E10.
Chacune des deux entreprises satisfait mieux aux conditions de sa classe. Elles mettent plus
en œuvre les pratiques fondamentales de leur classe respective, ce qui a pour conséquence
d’améliorer fortement leur IIP dans leur classe. L’entreprise E10 respecte mieux les
conditions d’une classe supérieure (préactive) dans notre typologie. Elle est considérée
meilleure que l’entreprise E13 qui est plutôt affectée à une classe inférieure (réactive).
Cet exemple montre que l’IIP ne permet pas de comparer directement deux entreprises
appartenant à deux classes différentes. Notre méthode d’évaluation introduit une notion de
référentiel pour chaque classe. Deux entreprises appartenant au même référentiel (donc
classe) sont directement comparables par l’IIP. Mais ce dernier ne permet pas la comparaison
entre deux entreprises appartenant à deux référentiels différents (cas des entreprises E10 et
E13).
Dans notre approche, C’est donc le critère d’appartenance aux classes d’entreprises
(proactive, préactive, réactive et passive) qui est le critère le plus discriminant de la
comparaison. Une entreprise appartenant à une classe sera considérée meilleure dans le
classement global du panel d’entreprises que toute entreprise d’une classe inférieure. L’ordre
d’importance des classes étant la suivante : proactive préactive réactive passive,
toute entreprise de la classe proactive est meilleure en termes d’IIP que toute entreprise des
trois autres classes, une entreprise de la classe préactive est meilleure que toute entreprise des
classes réactives et passive et enfin une entreprise de la classe réactive est meilleure que toute
entreprise de la classe passive. Si les entreprises appartiennent à la même classe, l’IIP suffit
pour les comparer.
Il faut rappeler que dans la plupart des cas, l’IIP peut permettre à lui seul de comparer deux
entreprises. Le problème que nous soulevons dans le cas des entreprises E10 et E13 se produit
généralement sur les frontières de deux classes successives (proactive/préactive,
préactive/réactive, réactive/passive). Il existe des zones (floues) dans lesquelles les entreprises
répondent souvent aux conditions de deux classes successives. Nous pouvons dire, dans le cas
des entreprises E10 et E13, que l’entreprise E10 est une entreprise préactive à tendance
réactive et que l’entreprise E13 est une entreprise réactive à tendance préactive.
Le tableau ci-dessous donne un récapitulatif des IIP des 20 entreprises du panel calculés avec
les profils de préférences finaux de chaque classe d’entreprises (PROACTIF, PREACTIF,
REACTIF et PASSIF). La classification (bornes des classes et rang des entreprises) retenue
dans ce tableau est celle de la classification finale.
Partie 3 : Expérimentation et analyse des résultats
Tableau 16 : Indices d’innovation potentielle (IIP) des entreprises dans les différentes classes
d’entreprises, source : notre recherche
Nous pouvons nous rendre compte de l’importance des classes d’entreprises dans la
comparaison de deux entreprises. Globalement l’IIP d’une entreprise est plus fort dans sa
classe. Dans le Tableau 16, nous remarquons que les IIP des entreprises de la classe proactive
sont plus forts s’ils sont calculés avec le profil de préférences de la classe proactive
(PROACTIF), sauf pour l’entreprise E18. C’est le cas pour toutes les entreprises des classes
préactive et réactive. Pour la classe passive, cette condition n’est pas vérifiée pour trois
entreprises car cette classe n’a pas de véritable profil.
L’exception de l’entreprise E18 à la règle du plus fort IIP dans la classe de l’entreprise
(généralement pour les classes proactive, préactive, réactive) est dû à son profil un peu
atypique. Dans la logique de classement, elle aurait plutôt due être affectée dans la classe
préactive. La figure ci-dessous fait une comparaison du profil de l’entreprise E18 suivant les
profils de préférences des classes proactive et préactive (les pratiques sont classées de la plus
développée, avec une valeur de 0.889 à la moins développée, avec une valeur de 0.00).
Classement
Poids Poids
PRATIQUES DE L'INNOVATION E18 valeurs des
PROACTIF PREACTIF
pratiques
Amélioration continue du processus d'innovatio 0,889 1 10,5 3,51
Encouragements à l'innovation 0,875 2 7,6 9,30
Intelligence économique 0,722 3 4,8 12,68
Gestion de la relation client 0,706 4 7,5 5,49
Organisation des tâches liées à l'innovation 0,692 5 6,0 7,68
Gestion du portefeuille de projets 0,667 6 6,6 4,83
Allocation des compétences 0,667 6 8,2 10,26
Gestion de projets 0,632 8 8,6 10,05
Stratégie intégrée favorisant l'innovation 0,563 9 8,5 6,27
Mémorisation des savoir-faire 0,556 10 5,7 9,20
Apprentissage collectif 0,556 10 9,1 10,54
Production des idées et concepts 0,545 12 7,4 6,47
Fonctionnement en réseaux 0,364 13 0,0 3,49
Conception interne 0,000 14 4,1 0,00
Activités de R&D 0,000 14 5,3 0,24
- 151 -
Evaluation des processus d’innovation
Dans l’ordre d’importance du degré de développement des pratiques, les meilleurs poids sont
repartis alternativement sur les deux profils. La balance est favorable à la classe préactive
parce que l’entreprise E18 ne développe pas du tout deux pratiques ayant des poids
relativement élevés (« Conception interne » et « Activités de R&D » pour une contribution de
9,4%) alors que ces pratiques sont négligées dans la classe préactive (0.24%). C’est la raison
pour laquelle son IIP est de 0.61 dans la classe proactive et de 0.65 dans la classe préactive.
En conclusion de cette partie, nous pouvons dire que l’élément discriminant dans la
comparaison des entreprises est l’appartenance aux classes d’entreprises. Si cette
condition ne permet pas de conclure, ce qui veut dire que les entreprises appartiennent à la
même classe d’entreprises, l’IIP sera utilisé dans un second temps pour les discriminer. L’IIP
constitue donc un élément discriminant à l’intérieur de chaque classe d’entreprises.
Les entreprises de chaque classe d’entreprises réalisent les pratiques d’innovation de façons
diverses. Nous pouvons nous en apercevoir dans le Tableau 18 ci-dessous qui synthétise les
amplitudes dans la réalisation des pratiques d’innovation des entreprises dans chaque classe.
Ce tableau présente pour chaque classe d’entreprises, les valeurs maximales (colonne Max) et
les valeurs minimales (colonne Min) des degrés de développement des pratiques d’innovation
de l’ensemble des entreprises affectées à la classe. La dernière ligne du tableau représente les
IIP obtenus avec les valeurs de chaque colonne en utilisant le profil de préférences de chaque
classe.
Tableau 18 : Valeurs maximales et minimales des pratiques par classe d’entreprises, source :
notre recherche
Partie 3 : Expérimentation et analyse des résultats
Les données consignées dans ce tableau vont servir à déterminer les caractéristiques des
classes d’entreprises pour le panel étudié. Dans notre proposition de typologie, nous
définirons pour toutes les classes les éléments suivants :
• Une entreprise modèle Cible : c’est le niveau maximum vers lequel les entreprises de
la classe devront tendre pour maximiser leur niveau de performance général dans leur
classe,
• Une entreprise modèle de Base : c’est le niveau minimum requis par les entreprises de
la classe pour être toujours plus performantes que les entreprises des classes
inférieures,
• Le profil de préférences : ce sont les poids des pratiques d’innovation de la classe
attribués en fonction de leur importance pour la classe (leur contribution au potentiel
d’innovation global). Le profil de préférences d’une classe est celle obtenue pendant la
classification finale de notre process global de traitement des données.
Lorsque les entreprises d’une classe (sauf la classe proactive) auraient atteint les valeurs de
l’entreprise Cible ou en seraient très proches, il ne serait plus utile de chercher à améliorer
leur performance dans leur classe. En effet, ces entreprises seraient dans un état de saturation
en ce qui concerne leur performance dans la classe. L’étape suivante serait, si elles le
souhaitent (cela peut dépendre de la stratégie de l’entreprise, de ses ressources et de sa
volonté d’adopter un profil radical par rapport à l’existant), de changer de classe et basculer
dans la classe immédiatement supérieure. Dans ce cas elles pourraient à nouveau améliorer
leur performance de manière significative. L’entreprise Cible de la classe proactive est
l’entreprise idéale, celle qui réalise tous les critères observables et a donc un IIP égal à 1.
- 153 -
Evaluation des processus d’innovation
Les entreprises de cette classe ont des niveaux de développement des pratiques d’innovation
généralement très faibles. Leur objectif majeur est d’accroître leurs performances pour tendre
vers la classe supérieure, c’est-à-dire la classe réactive.
Nous définissons donc uniquement une entreprise modèle Cible pour cette classe. Les valeurs
de cette entreprise modèle sont les même que dans la colonne Max de la classe passive du
Tableau 18. L’IIP maximal possible pour cette classe est donc de 0.56. Ce niveau de
performance peut permettre aux entreprises de la classe passive de basculer dans la classe
supérieure car il leur permet d’être plus performantes que les moins bonnes entreprises de la
classe passive.
En résumé, les entreprises de la classe passive sont les entreprises les moins performantes du
panel. Elles doivent rechercher à atteindre les degrés de développement des pratiques de
l’entreprise Cible en développant en priorité les pratiques de plus fort poids dans le profil de
préférences de la classe.
Partie 3 : Expérimentation et analyse des résultats
Les données de l’entreprise modèle de Base sont obtenues en considérant pour chaque
pratique, le maximum entre le degré de développement de l’entreprise Cible de la classe
passive (voir Tableau 20) et degré de développement minimum de la pratique pour appartenir
à la classe réactive. Nous obtenons un IIP de 0.56.
Les données de l’entreprise modèle Cible sont obtenues en considérant pour chaque pratique,
le maximum entre le degré de développement de l’entreprise de Base et le degré de
développement maximum recensé dans la classe, contenu dans la colonne Max de la classe
réactive du Tableau 18. L’IIP de cette entreprise est de 0.72.
En résumé, les entreprises de cette classe devront dans un premier temps doivent chercher à
réaliser les niveaux de performance de l’entreprise modèle de Base être meilleures en termes
de capacité à innover que toutes les entreprises de la classe passive. Ensuite, elles devront
rechercher les niveaux de l’entreprise modèle Cible pour basculer dans la classe préactive.
- 155 -
Evaluation des processus d’innovation
Les données de l’entreprise modèle de Base sont obtenues en considérant pour chaque
pratique, le maximum entre le degré de développement de l’entreprise Cible de la classe
réactive (voir Tableau 20) et degré de développement minimum de la pratique pour appartenir
à la classe réactive. Nous obtenons donc un IIP de 0.64.
Les données de l’entreprise modèle Cible sont obtenues en considérant pour chaque pratique,
le maximum entre le degré de développement de l’entreprise modèle de Base de la classe et le
maximum recensé dans la classe, contenu dans la colonne Max de la classe réactive du
Tableau 18. L’IIP maximum de la classe est de 0.79.
En résumé, les entreprises de cette classe devront chercher à réaliser les niveaux de
performance de l’entreprise modèle de Base puis tendre vers l’entreprise modèle Cible.
Partie 3 : Expérimentation et analyse des résultats
C’est la classe des entreprises les plus performantes du panel. L’IIP minimum des entreprises
de cette classe doit être égal à 0.61, de même que les degrés de développement minimums des
pratiques pour les entreprises doivent être ceux de la colonne Min de la classe proactive du
Tableau 18.
L’entreprise modèle de Base représente plutôt le niveau minimum à atteindre par une
entreprise quelconque pour être toujours plus performantes que toutes les entreprises du panel.
Ses données sont constituées des maximums entre les valeurs de l’entreprise Cible de la classe
préactive (voir Tableau 22) et cette fois-ci les valeurs correspondantes dans la colonne Max
de la classe proactive du Tableau 18. L’IIP est de cette entreprise est de 0.93.
L’entreprise modèle Cible représente l’entreprise idéale, c’est-à-dire celle qui satisfait à tous
les critères de toutes les pratiques d’innovation et donc ayant un IIP de 1.
En résumé, les entreprises de la classe proactive doivent avoir des IIP supérieurs à 0.61. Le
respect des conditions de l’entreprise de Base leur permettra d’être plus performantes en
termes de capacité à innover que toutes les autres entreprises du panel, niveau qu’elles
pourront encore améliorer.
- 157 -
Evaluation des processus d’innovation
Pour chacune des classes proactive, préactive et réactive, la valeur Min correspond à l’IIP de
l’entreprise qui satisfait aux valeurs minimales de la classe (IIP de la colonne Min de chaque
classe dans le Tableau 18). Nous obtenons les valeurs 0.39, 0.35 et 0.27 respectivement pour
les classes proactive, préactive et réactive. Elle est égale à 0 pour la classe passive (plus petite
valeur d’IIP possible).
La valeur Max pour chacune des quatre classes correspond à l’IIP de leur entreprise modèle
Cible (voir les systèmes innovants ci-dessus).
Partie 3 : Expérimentation et analyse des résultats
La valeur Nmin pour chacune des quatre classes correspond à l’IIP à respecter pour appartenir
à chaque classe (voir les systèmes innovants ci-dessus).
Les valeurs Nmax des classes préactive et réactive sont définies par les IIP de leur entreprise
modèle de Base (voir les systèmes innovants correspondants). La valeur Nmax est égale à 1
pour la classe proactive. Quant à la classe passive, c’est la valeur à partir de laquelle les
entreprises commencent à remplir les conditions de la classe réactive, donc la valeur 0.40.
La Figure 25 présente les fonctions d’appartenance correspondant aux valeurs du tableau ci-
dessus pour toutes les classes d’entreprises :
1,20
1,00
Valeur d'appartenance
0,80
Passive
Réactive
0,60
Préactive
Proactive
0,40
0,20
0,00
0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1
Valeur d'utilité de l'indice d'innovation
Figure 25 : Calcul des valeurs d’appartenance de l’IIP pour chaque classe d’entreprises
(proactive, préactive, réactive et passive), source : notre recherche
Nous remarquons que l’IIP permet de classifier les entreprises répondant aux conditions
suivantes :
• Segment de 0 à 0.39 : classe passive,
• Segment de 0.40 à 0.47 : classe réactive,
• Segment de 0.56 à 0.61 : classe préactive,
• Segment de 0.79 à 1 : classe proactive.
Pour les autres segments, avons un chevauchement des noyaux des fonctions d’appartenance.
Si les noyaux sont disjoints entre les classes passive et réactive (une entreprise dont l’IIP est
égal à 0.40 est considérée comme membre de la classe réactive), ce n’est pas le cas entre les
- 159 -
Evaluation des processus d’innovation
classes préactive et proactive et surtout entre les classes réactive et préactive. Une partie des
noyaux est confondue pour les classes réactive et préactive sur le segment d’IIP allant de 0.47
à 0.56, de même que pour les classes préactive et proactive sur le segment de 0.61 à 0.64. Les
entreprises dont les IIP sont compris dans ces segments sont censées appartenir aux classes
concernées. Nous pouvons nous rendre compte une fois de plus sur cette figure que l’IIP n’est
pas un élément discriminant entre les différentes classes d’entreprises.
C’était le cas dans notre exemple d’application pour l’entreprise E18 qui a été affectée à la
classe proactive et dont le profil correspondait plus à la classe préactive (voir § 8.2.5). Dans le
Tableau 16, l’IIP de l’entreprise E18 était de 0.61 dans la classe proactive et de 0.65 dans la
classe préactive. Ces valeurs d’IIP sont incluses dans le segment des noyaux des deux classes
d’entreprises qui coïncide. L’utilisation de notre première condition discriminante de
classification qui est l’appartenance aux classes d’entreprises, en d’autres termes la classe
dont le profil correspond au mieux à l’entreprise à classifier, permet de conclure dans ces cas
de figure. La classe d’une entreprise donnée, lorsqu’elle satisfait aux profils de deux classes
consécutives, est celle dans laquelle l’IIP de l’entreprise est le plus fort. Dans notre exemple,
l’entreprise E18 aurait dû être affectée à la classe préactive.
Le chevauchement des noyaux de certaines classes d’entreprises s’explique sans doute par le
fait que la majeure partie des pratiques d’innovation n’est pas assez discriminante entre les
classes. Cela est vérifié surtout pour les classes préactive et réactive. Sur les 15 pratiques,
nous notons que les degrés de développement maximaux de 6 pratiques sont supérieurs dans
la classe réactive par rapport à la classe préactive contre 8 dans le sens inverse et une égalité
(voir Tableau 18). Pour certaines pratiques, les valeurs obtenues pour les entreprises de la
classe réactive sont nettement supérieures à celles des entreprises de la classe préactive : P13
de 0.47 à 0.88 pour la réactive et 0.17 à 0.71 pour la préactive ou encore de 0.46 à 0.82 pour
la réactive et de 0 à 0.64 pour la réactive. Toutes ces raisons expliquent sans doute un segment
de chevauchement assez grand pour ces deux classes, plus de la moitié de chaque noyau. Pour
les classes proactive et préactive, nous notons que la classe préactive n’a aucune pratique dont
le degré de développement maximum est supérieur à celle de la classe proactive, avec
toutefois une égalité pour la pratique P10 « Intelligence économique ». Le chevauchement des
noyaux entre ces deux classes est donc assez faible. Entre les réactive et passive, seules trois
pratiques de la classe passive ont des degrés de développement supérieurs à celles de la classe
réactive, avec une moyenne plutôt faible pour la classe passive. Pour ces classes, aucun
problème ne se pose.
Le chevauchement des noyaux des classes peut être aussi dû à la faiblesse des données en
notre possession. En effet, notre panel d’entreprises ne contient que 20 entreprises, ce qui peut
avoir une incidence sur la classification.
Conclusion de la partie 3
Cette partie nous a permis de vérifier la validité de notre démarche méthodologique sur un
panel d’entreprises. Notre méthode a permis de montrer les points suivants :
• L’évaluation des activités des entreprises contribue à définir une typologie des
entreprises en quatre classes (proactive, préactive, réactive, passive) et à proposer les
caractéristiques de ces classes. Pour chaque classe d’entreprises, nous définissons les
Partie 3 : Expérimentation et analyse des résultats
conditions à respecter pour être membre de la classe, ainsi que les objectifs que les
entreprises doivent atteindre à court terme (entreprise modèle de Base) et à long terme
(entreprise modèle Cible) pour améliorer leurs performances. Ainsi l’entreprise aura la
possibilité soit d’améliorer sa capacité à innover dans sa classe de manière
incrémentale, c’est-à-dire faire évoluer son processus d’innovation actuel vers un
processus meilleur (entreprise modèle de Base puis entreprise modèle Cible de sa
classe), soit de le faire évoluer de manière radicale en remettant tout son processus
d’innovation en cause et en adoptant un autre plus performant (entreprise modèle de
Base puis entreprise Cible des classes supérieures).
Notons que le même type d’analyse peut être fait sur une sous-partie du panel complet
et en considérant un contexte socio-économique particulier. On peut donc étudier les
entreprises modèle de Base et Cible en fonction de certains critères de
l’environnement. Donc notre système peut donc aider tout chercheur qui s’intéresse à
l’adaptation des pratiques d’innovation en fonction de l’environnement extérieur.
Nous pourrions ainsi objectiver la contextualisation des priorités à donner en matière
de pilotage du processus d’innovation.
Cependant, notre méthode d’évaluation conduit à définir des classes d’entreprises dont les
ensembles de valeurs possibles de l’IIP pour ces classes ne sont pas disjoints. En effet, pour
chaque classe, les IIP des entreprises membres sont calculés en utilisant le profil de
préférences de la classe. Il arrive donc, pour des entreprises situées aux frontières de deux
classes consécutives (proactive/préactive, préactive/réactive, réactive/passive) que nous ayons
des IIP beaucoup plus élevés pour les entreprises de la classe inférieure. Cela s’explique par le
fait que l’IIP dépend du contexte de chaque classe. Dans le contexte d’une classe, les
entreprises membres ont des IIP supérieurs à ceux des entreprises de toutes les classes
inférieures.
- 161 -
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
Conclusion et perspectives
Conclusion et perspectives
Notre recherche s’intègre dans la lignée des travaux qui se font dans le domaine de
l’évaluation des activités des entreprises ou capacités d’innovation technologiques CIT
(Chiesa et al., 1998 ; Yam et al., 2004 ; Guan et al., 2006 ; Koc et al., 2007 ; Wang et al.,
2008). En effet, de plus en plus de chercheurs s’intéressent aux conditions de réussite du
pilotage des processus d’innovation dans les entreprises. Ces études proposent des cadres
d’évaluation de la capacité à innover des entreprises. Elles s’appuient sur un ensemble de
capacités d’innovation technologiques et cherchent à montrer leur importance dans
l’accroissement des performances et de la compétitivité des entreprises. Après avoir relevé
des manques dans ces approches grâce à notre étude bibliographique, notre recherche va plus
loin en proposant une analyse plus fine. Nous avons décrit les concepts de
« capacités d’innovation technologiques » par des pratiques de pilotage de l’innovation. Notre
contribution porte clairement sur l’explicitation, la caractérisation de variables encore mal
définies dans la littérature. La majeure partie des études (Yam et al., 2004 ; Guan et al., 2006 ;
Wang et al., 2008) utilisent des modèles de cinq ou sept capacités d’innovation
technologiques qui ont quasiment toutes leur équivalent dans notre base de connaissances en
15 pratiques d’innovation. Ce sont :
• Les capacités d’apprentissage (pratique P9 – Apprentissage collectif),
• Les capacités de R&D (P14 – Les activités de R&D ),
• Les capacités de gestion des ressources (P7 – Allocation de compétences, P4 -
gestion de portefeuille de projets),
• Les capacités de production (ici nous optons davantage pour la matérialisation des
objets innovants : P1 – Conception interne),
• Les capacités de marketing (P15 – La gestion de la relation client),
• Les capacités organisationnelles (P6 – Création d’une organisation ad hoc),
• Les capacités de planification stratégique (P5 – Contrôle/rétroaction sur le
processus).
De plus, ces études basent leur collecte de données majoritairement sur des questionnaires
comportant des critères mesurés sur une échelle de Likert à sept niveaux allant de (1) très
insatisfait à (7) très satisfait. Ces mesures sont très (voire trop) sensibles aux opinions des
personnes interviewées. Nous avons opté pour une observation directe du processus
d’innovation en définissant des critères qui sont des phénomènes observables, indépendants
de toute appréciation.
- 163 -
Evaluation des processus d’innovation
Nous proposons une méthode d’évaluation qui permet de calculer un indice d’innovation pour
chaque entreprise d’un panel et aussi de les répartir dans quatre classes d’entreprises
(proactive, préactive, réactive, passive). Nous utilisons la technique statistique de la valeur-
test pour identifier les profils de préférences de chaque classe d’entreprises. Ces profils de
classes nous permettent de mieux caractériser les entreprises et donc de mieux analyser leurs
processus d’innovation. Nous arrivons à déterminer les particularités de chaque entreprise, ce
qui permet d’élaborer des scénarios d’évolution de leur potentiel ou capacité à innover. Ces
recommandations peuvent être de deux sortes :
• Une logique d’optimisation des performances : il s’agit d’une entreprise qui veut
apporter des changements mineurs à son processus d’innovation sans le remettre en
cause entièrement. Les recommandations mettront en évidence les actions à mettre en
place en vue de renforcer sa position dans sa classe actuelle.
• Une logique de saut technologique : cela concerne les entreprises qui veulent apporter
des changements radicaux dans leur stratégie d’innovation. Les recommandations
devront à permettre de passer un pallier afin d’accéder au profil d’une classe
supérieure.
Nous pouvons donc conclure sur l’efficacité et sur la pertinence de notre méthode
d’évaluation qui permet :
• D’analyser finement le processus d’innovation des entreprises,
• De les classifier dans quatre classes d’entreprises en fonction de leur capacité à
innover et à établir un ordre entre elles,
• De déterminer les forces et limites des entreprises en vue de favoriser leur dynamique
d’innovation.
Notre méthode d’évaluation a été ensuite automatisée dans un outil logiciel nommé
INNOEVALUATOR. Sur un plan industriel, il permet à tout praticien d’évaluer les
performances de son entreprise au regard d’un panel d’entreprises et d’identifier assez
rapidement sa position en termes de systèmes d’innovation. Il permet aussi, grâce aux
systèmes de pondérations, d’avoir des recommandations sur les pratiques à améliorer pour
augmenter la capacité à innover de l’entreprise. C’est un support efficace pour l’aide à la
décision dans le cadre du management de l’innovation. En effet, il permet à tout praticien de
faire un auto-diagnostic de son entreprise. De plus, il lui permet de déterminer rapidement la
position de son entreprise par rapport à un panel d’entreprises donné et d’identifier les actions
à mettre en place pour améliorer sa capacité à innover. Le praticien peut également procéder à
des comparaisons de son entreprise avec des entreprises particulières pour évaluer ses
performances par rapport à ces dernières.
Notre méthode d’évaluation permet une étude approfondie de la capacité à innover des
entreprises. De ce fait, notre grille d’observation contient un ensemble de 196 critères qui
demande du temps pour procéder à l’observation. C’est une raison pour laquelle notre collecte
de données auprès des entreprises fut assez difficile à réaliser. Nous pensons qu’il serait utile
de procéder à une première étude simplifiée de la capacité à innover des entreprises avant de
passer à notre étude proprement dite. Une première tentative a été réalisée par d’autres
chercheurs du laboratoire. Ils proposent une méthode d’auto-diagnostic de la capacité à
innover basée sur une agrégation de nos 15 pratiques en six (Morel et al., 2007). Cette
approche permet aux entreprises d’évaluer en moins de 10 minutes leur appartenance à la
Conclusion et perspectives
typologie que nous utilisons (proactive, préactive, réactive, passive). Elle résulte d’une
simplification de notre grille d’observation de 196 critères observables à 30 méta-critères.
Une telle approche initiale permet de rendre plus acceptable une étude plus approfondie
comme celle que nous avons proposée.
Notre expérimentation a porté sur un panel d’entreprises qui mériterait d’être étendu. Il serait
nécessaire d’investiguer davantage d’entreprises, de filières voir de pays différents afin de
consolider l’approche et de vérifier d’éventuelles disparités culturelles. Ce sont des axes de
développement futurs. Les résultats de notre recherche sont en ce moment appliqués dans une
étude comparative avec l’Argentine. Lorsque le modèle aura été davantage validé
expérimentalement, il serait aussi intéressant d’étudier le lien « activités / Résultats » du
processus d’innovation. La question étant de faire émerger des phénomènes invariants entre
des évolutions des pratiques dans une entreprise et les résultats obtenus, ceci en fonction de
variables environnementales.
Enfin au niveau opérationnel, le logiciel doit être amélioré (ergonomie) afin de permettre une
plus large diffusion. Peut-être une solution sur internet est-elle souhaitable ? Une telle
approche permettrait de gérer plus facilement les flux d’informations en facilitant notamment
la gestion des bases de données et leur accessibilité.
- 165 -
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- 175 -
ANNEXES
Annexes
1. Conception interne
o P1 : les acteurs de l’innovation participent à des projets faisant évoluer la
technologie : ceci par des travaux de conception,
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Evaluation des processus d’innovation
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2. Gestion de projets
o P2 : un suivi de chaque projet innovant est fondamental,
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Evaluation des processus d’innovation
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- 181 -
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Evaluation des processus d’innovation
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8. Encouragements à l’innovation
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direction et les responsables de projets,
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Evaluation des processus d’innovation
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Evaluation des processus d’innovation
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Evaluation des processus d’innovation
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Evaluation des processus d’innovation
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Annexes
CLASSE PROACTIVE
Valeur-
Valeur-
Pratiques de l'innovation test En % Poids
test
ajustée
1 Conception interne 1,2 1,5 4,1% 4,1
2 Gestion de projets 2,8 3,1 8,6% 8,6
3 Stratégie intégrée favorisant l'innovation 2,8 3,1 8,5% 8,5
4 Gestion du portefeuille de projets 2,1 2,4 6,6% 6,6
5 Organisation des tâches liées à l'innovation 1,9 2,2 6,0% 6,0
6 Amélioration continue du processus d'innovation 3,5 3,8 10,5% 10,5
7 Allocation des compétences 2,7 2,9 8,2% 8,2
8 Encouragements à l'innovation 2,5 2,8 7,6% 7,6
9 Mémorisation des savoir-faire 1,8 2,1 5,7% 5,7
10 Intelligence économique 1,5 1,7 4,8% 4,8
11 Fonctionnement en réseaux -0,3 0,0 0,0% 0,0
12 Apprentissage collectif 3,0 3,3 9,1% 9,1
13 Production des idées et concepts 2,4 2,7 7,4% 7,4
14 Activités de R&D 1,6 1,9 5,3% 5,3
15 Gestion de la relation client 2,4 2,7 7,5% 7,5
Valeurs-test et poids pour la classe proactive dans la classification finale (Source : Notre
recherche)
CLASSE PREACTIVE
Valeur-
Valeur-
Pratiques de l'innovation test En % Poids
test
ajustée
1 Conception interne -1,1 0,0 0,0% 0,0
2 Gestion de projets 1,1 2,2 10,0% 10,0
3 Stratégie intégrée favorisant l'innovation 0,3 1,4 6,3% 6,3
4 Gestion du portefeuille de projets 0,0 1,1 4,8% 4,8
5 Organisation des tâches liées à l'innovation 0,6 1,7 7,7% 7,7
6 Amélioration continue du processus d'innovation -0,3 0,8 3,5% 3,5
7 Allocation des compétences 1,2 2,3 10,3% 10,3
8 Encouragements à l'innovation 1,0 2,1 9,3% 9,3
9 Mémorisation des savoir-faire 0,9 2,1 9,2% 9,2
10 Intelligence économique 1,7 2,8 12,7% 12,7
11 Fonctionnement en réseaux -0,3 0,8 3,5% 3,5
12 Apprentissage collectif 1,2 2,4 10,5% 10,5
13 Production des idées et concepts 0,3 1,4 6,5% 6,5
14 Activités de R&D -1,1 0,1 0,2% 0,2
15 Gestion de la relation client 0,1 1,2 5,5% 5,5
Valeurs-test et poids pour la classe préactive dans la classification finale (Source : Notre
recherche)
- 193 -
Evaluation des processus d’innovation
CLASSE REACTIVE
Valeur-
Valeur-
Pratiques de l'innovation test En % Poids
test
ajustée
1 Conception interne 0,8 2,9 10,6% 10,6
2 Gestion de projets -1,5 0,5 1,9% 1,9
3 Stratégie intégrée favorisant l'innovation -1,7 0,3 1,2% 1,2
4 Gestion du portefeuille de projets 0,2 2,3 8,3% 8,3
5 Organisation des tâches liées à l'innovation 0,4 2,5 9,2% 9,2
6 Amélioration continue du processus d'innovation 0,0 2,1 7,6% 7,6
7 Allocation des compétences -1,2 0,9 3,2% 3,2
8 Encouragements à l'innovation -1,1 1,0 3,6% 3,6
9 Mémorisation des savoir-faire -0,3 1,8 6,5% 6,5
10 Intelligence économique -0,1 2,0 7,1% 7,1
11 Fonctionnement en réseaux 2,3 4,4 15,8% 15,8
12 Apprentissage collectif -2,1 0,0 0,0% 0,0
13 Production des idées et concepts 0,2 2,3 8,3% 8,3
14 Activités de R&D 0,8 2,9 10,4% 10,4
15 Gestion de la relation client -0,4 1,7 6,2% 6,2
Valeurs-test et poids pour la classe réactive dans la classification finale (Source : Notre
recherche)
CLASSE PASSIVE
Valeur-
Valeur-
Pratiques de l'innovation test En % Poids
test
ajustée
1 Conception interne -0,8 2,3 16,0% 16,0
2 Gestion de projets -2,5 0,6 4,4% 4,4
3 Stratégie intégrée favorisant l'innovation -1,6 1,5 10,7% 10,7
4 Gestion du portefeuille de projets -2,1 1,0 6,8% 6,8
5 Organisation des tâches liées à l'innovation -2,7 0,5 3,3% 3,3
6 Amélioration continue du processus d'innovation -3,1 0,0 0,0% 0,0
7 Allocation des compétences -2,6 0,5 3,3% 3,3
8 Encouragements à l'innovation -2,4 0,7 5,2% 5,2
9 Mémorisation des savoir-faire -2,3 0,8 5,9% 5,9
10 Intelligence économique -2,7 0,4 2,6% 2,6
11 Fonctionnement en réseaux -1,1 2,0 13,9% 13,9
12 Apprentissage collectif -2,4 0,8 5,4% 5,4
13 Production des idées et concepts -2,7 0,4 2,7% 2,7
14 Activités de R&D -1,3 1,8 12,9% 12,9
15 Gestion de la relation client -2,1 1,0 6,8% 6,8
Valeurs-test et poids pour les classes passive dans la classification finale (Source : Notre
recherche)