Cours de Technique de Comminucation Medical
Cours de Technique de Comminucation Medical
Cours de Technique de Comminucation Medical
COMMINUCATION MEDICAL
Bases de la communication
La communication est omniprésente. Nous communiquons en
permanence les uns avec les autres et avons, de ce fait, l’impression
d’avoir des connaissances suffisantes dans ce domaine. Néanmoins,
l’écart entre l’expérience quotidienne et le savoir est particulièrement
important quand il s’agit de communication.
On distingue trois différentes formes de communication:
– La communication en face à face, verbale ou non verbale, entre des
interlocuteurs en coprésence: elle peut être interprétée de différentes
manières et permet des réponses immédiates.
– La communication écrite et la communication médiée par ordinateur
ou téléphone sans coprésence des protagonistes: elle transcende les
limites temporelles et territoriales (courrier, téléphone, e-mails,
facebook, etc.). Une réponse est possible, mais une grande partie de
l’information non verbale est perdue.
– La communication médiatique et publique (radio, télévision): en
principe, elle n’offre aucune possibilité de réponse et est adressée à
un public anonyme.
L’entretien entre le médecin et son patient relève typiquement de la
communication en face à face, à l’instar des discussions quotidiennes,
des échanges pratiques et d’idées ou des échanges conflictuels entre
deux personnes, mais également des échanges sur le lieu de travail, des
discussions ou désaccords au sein d’un groupe ou des séquences de
questions-réponses.
La communication en face à face dépend des conditions et des facteurs
d’influence suivants:
– Les conditions personnelles comme le tempérament, l’intérêt, la
motivation, la compétence en situations de communication, les
capacités physiques de communication, les peurs et les attitudes, les
états d’esprit, etc.;
– Les particularités de la situation telles que la qualité de la relation,
la base commune entre les interlocuteurs, l’objet même de la
communication et son but, mais aussi les conditions liées au cadre et
à la présence de tiers;
– Les conditions liées au contexte telles que la stimulation ou le
soutien par l’entourage ou les valeurs et normes de la société.
La communication devient interaction dès que l’on interprète ce que
l’on a entendu, vu ou écrit et qu’une réponse est possible, comme c’est
par exemple le cas dans un entretien entre un médecin et son patient. «
Je ne comprends ce que j’ai dit que lorsqu’on m’a répondu », déclarait
Norbert Wiener (1894 – 1964), mathématicien et père fondateur de la
cybernétique. L’interaction ou la communication entre individus ne
peut être considérée comme un transfert unilatéral, mécanique et stable
d’informations, car nous sélectionnons les informations issues de notre
environnement selon des critères et des valeurs qui nous sont propres et
les assimilons activement avant et pendant que nous y réagissons. La
communication entre individus est donc un échange actif – qu’elle soit
verbale ou non verbale.
La communication harmonieuse
Dans certaines situations de communication, il arrive qu’une personne
se sente mal à l’aise ou incomprise tout en sachant qu’elle a été
comprise; pareilles situations ne peuvent être qualifiées de
communication réussie. Une telle dissension peut survenir lorsque l’on
« fonctionne » dans une situation, mais que les sentiments sont simulés.
1.4. Communication non verbale et paraverbale
Une patiente arrive très en retard à son rendez-vous et justifie son retard
en recourant à une explication perçue comme boiteuse par le médecin
qui contient sa colère. Verbalement, il banalise la situation et lui assure
que son retard ne pose pas problème, mais en même temps, sa mimique
ainsi que sa gestuelle reflètent clairement sa contrariété. Pendant tout le
temps de la consultation, la communication est tendue et les
interlocuteurs se sentent mal à l’aise.
Les éléments non verbaux, tels que la gestuelle, la mimique, le regard,
la posture, etc., mais également les phénomènes paraverbaux, tels que
le registre vocal, le rythme ou le volume, révèlent l’état émotionnel et
l’attitude face à autrui, ils soutiennent et illustrent le discours.
De nombreuses expressions non verbales sont accessoires et ne
constituent pas des éléments communicationnels indépendants, même
si elles peuvent parfois être intentionnelles et remplir un rôle qui leur
est propre dans la communication. A l’inverse du langage parlé, les
signes non verbaux dépendent tout particulièrement de l’interprétation
subjective de l’interlocuteur. C’est pourquoi, la formulation
d’hypothèses quant à l’interprétation de signes, tels que, par exemple,
le regard de l’interlocuteur, requiert une extrême prudence.
En résumé:
– Plus la communication verbale est limitée, plus une place importante
est accordée à la communication non verbale.
– Lorsque l’expression non verbale ne correspond pas à l’expression
verbale, c’est-à-dire lorsque la mimique ou le registre vocal ne
transmettent pas la même chose que les mots, ces deux niveaux de
communication sont en décalage.
– Les interprétations sont variables ainsi, un individu n’est pas
déterminé et ne se laisse pas définir de manière fiable par sa
communication non verbale.
Pause.
3.2. Anamnèse
La description qui suit concerne les situations dans lesquelles au moins
15 minutes sont consacrées au recueil de l’anamnèse. Dans les autres
situations ou en présence d’un tableau clinique aigu, le médecin peut se
limiter aux questions des rubriques « Souffrance actuelle » et «
Anamnèse spécifique » et à des questions des rubriques « Auto-
anamnèse » ou « Anamnèse par système » dans la mesure où elles sont
susceptibles d’influencer le diagnostic ou le traitement d’urgence (par
exemple allergies, intolérances, médication actuelle).
Souffrances actuelles
Pourquoi le patient se rend-il chez le médecin/à l’hôpital? Lorsque le
problème n’est pas immédiatement visible (comme par exemple une
plaie saignante):
Anamnèse spécifique
Les indications dans ce paragraphe répondent aux questions suivantes:
– Le patient a-t-il déjà contracté une maladie similaire? Comment a-t-
elle été traitée?
– Si le patient fournit des indications spécifiques à une maladie, poser
des questions ciblées.
– Employer des techniques d’entretien permettant aux patients de
fournir des informations précises (questions ciblées, questions
fermées).
Auto-anamnèse / anamnèse personnelle
– Cette patiente a-t-elle déjà été malade? A-t-elle subi une intervention
chirurgicale? Comment a-t-elle vécu les différentes phases de sa vie
(enfance, adolescence, grossesses, accouchements etc.)?
– En fonction de son intérêt et du temps dont il dispose, le médecin
peut laisser un espace à la patiente ou continuer à mener l’entretien
et guider la patiente avec des questions ciblées et fermées.
Anamnèse familiale
– Y a-t-il des tableaux cliniques similaires dans la famille?
– Y a-t-il dans la famille des prédispositions héréditaires à certaines
maladies (par exemple hypertension, dépression, diabète de type II,
maladies tumorales)?
– Dans cette phase, il est important de structurer; le patient doit savoir
pourquoi le médecin s’intéresse à son histoire familiale et jusqu’où
il souhaite être informé
– Une majorité de questions ciblées et fermées
Anamnèse sociale
– Dans quelles conditions sociales ce patient vit-il?
– Comment gère-t-il sa maladie au quotidien?
– En l’absence d’indications spécifiques, par exemple sur des maladies
professionnelles, (comme des allergies de contact, des troubles du
sommeil lié au travail en équipes), il s’agit d’ouvrir un espace au
patient en centrant la communication sur lui; dans le cas contraire,
poser des questions ciblées.
– A la fin de l’anamnèse complète, il importe de résumer et d’informer
le patient des hypothèses de travail et des prochaines étapes du
diagnostic et du traitement.
Traitement
Les personnes dépendantes à l’alcool devraient être soignées dans une
institution spécialisée. A l’évidence, le médecin joue un rôle clé
lorsqu’il s’agit d’aborder la problématique et de proposer un traitement.
Il existe en Suisse une vaste offre de consultation (tant hospitalière
qu’ambulatoire). Lorsqu’un médecin parvient à traiter lui-même un
patient ou à le motiver à chercher un organisme d’aide, il est déjà arrivé
à un résultat notable. Il s’agit ici du groupe de consommateurs –
statistiquement beaucoup plus important – qui n’est pas encore
dépendant, mais dont la consommation est problématique (environ 1
million de personnes en Suisse). Ce sont parfois les proches qui
cherchent en premier le dialogue avec le médecin.
Le médecin de famille doit savoir – et indiquer au patient – que les
chances de réussite d’un traitement en clinique spécialisée sont
nettement plus élevées qu’on ne le pense communément. C’est
notamment le cas pour les patients dont l’emploi et le réseau social ont
été préservés. Une étude de l’Institut de médecine sociale et préventive
de l’Université de Zurich, de la Clinique Forel et de l’Office
d’exécution des peines du canton de Zurich montre un taux de réussite
de plus de 50 %. Le médecin se doit de soutenir et d’encourager le
patient à emprunter cette voie difficile mais prometteuse. L’implication
de la famille ou d’amis peut être d’une grande aide.
Déroulement
Après avoir vérifié que les symptômes n’ont pas une autre origine, la
problématique est abordée. Le médecin doit consacrer suffisamment de
temps à cet entretien. Le patient doit avoir la possibilité de s’expliquer
et le médecin celle de demander des précisions et de proposer une
marche à suivre.
Le diagnostic et l’évaluation du degré d’alcoolisme sont établis de deux
façons, car l’exploration elle-même constitue déjà une première
intervention thérapeutique.
Le médecin peut engager la conversation comme suit: « Vous m’avez
fourni des informations importantes concernant votre comportement en
matière de santé et d’activité physique, vos habitudes de consommation
d’alcool et de tabac; ça ne va pas de soi et je vous en remercie!
J’aimerais en parler brièvement avec vous. Êtes-vous d’accord? »
La consultation au cabinet médical requiert des compétences
communicationnelles en intervention brève et en entretien
motivationnel (« motivational interviewing ») (voir Rollnick et al.). Ces
approches thérapeutiques permettent au médecin de discuter avec le
patient de son comportement à risque, d’initier un changement de
comportement et de compléter les informations données. Les
interventions brèves sont effectuées de manière ciblée. Le patient
décide luimême quels changements de comportement il vise, tandis que
le professionnel définit avec précision à quel stade de changement («
Stages of Change ») se trouve le patient, en vue d’établir la stratégie
thérapeutique et d’éviter des interventions inutiles, pour lesquelles le
patient n’est pas encore prêt.
Si un patient fait comprendre clairement qu’il préfère refuser (pour le
moment) l’offre du médecin, sa décision doit être respectée. L’impact
de cette intervention sera d’autant plus important si le patient sait qu’il
pourra reprendre contact avec le médecin ultérieurement. Un autre
principe fondamental consiste à ne pas considérer les rechutes comme
des échecs – ni par le médecin ni par le patient. Il importe de
comprendre ces rechutes comme faisant partie du processus de
changement et de s’en servir comme nouveau départ avec les
adaptations qui s’imposent.
Il vaut parfois la peine de convoquer le patient aux heures marginales.
Le temps de consultation peut alors être mieux exploité. Il s’agit
d’éviter les consultations infructueuses, au cours desquelles le médecin
pose des questions dégradantes ou donne des conseils humiliants.
Il s’agit souvent de montrer clairement que le problème a été identifié
par le médecin et le patient, que le problème a été nommé clairement et
explicitement et que le médecin est prêt à l’aborder avec sérieux.
La «harm reduction approach» – en remplacement d’un traitement
exclusivement orienté vers l’abstinence – fait actuellement l’objet de
discussions et a la faveur des patients qui semblent davantage enclins à
contrôler leur consommation qu’à choisir une abstinence totale. Le
médecin de famille dispose ainsi d’autres possibilités thérapeutiques
pour parvenir à limiter les dommages. Des nouveaux modulateurs des
récepteurs opioïdes qui diminuent l’envie de consommer de l’alcool
sont susceptibles de soutenir cette approche. Dans certains cas, la
consommation d’alcool contrôlée peut aussi représenter une étape
intermédiaire vers l’abstinence. On manque malheureusement d’études
sur le sujet.
L’approche présentée ici créera un environnement thérapeutique
favorable qui permettra au patient d’assumer la responsabilité de sa
santé. Le médecin se doit d’intervenir avec tous les moyens de soutien
possibles lorsque le patient souhaite changer de comportement. Mais,
même en cas de résistance, le patient doit être respecté et son attitude
doit être acceptée. Le médecin créera ainsi, dans son cabinet médical,
un cadre qui permettra au patient d’aborder les conflits et les difficultés.
Ce respect mutuel entre le médecin et le patient pourra – même dans un
domaine aussi sensible que celui du traitement des addictions –
favoriser une ouverture au dialogue satisfaisante et prometteuse ainsi
qu’un changement de comportement.
3.7. Entretien avec les proches d’enfants malades
Comparés aux autres entretiens médicaux, les entretiens avec les
parents d’enfants malades présentent certaines particularités. En règle
générale, plusieurs personnes participent à ces entretiens: le médecin,
d’autres professionnels de la santé, les parents et l’enfant. Le médecin
doit être flexible et capable de s’adapter aux différentes personnes
présentes dont les souhaits, les attentes et les compétences
communicationnelles sont souvent divergents. Il doit, en outre,
s’efforcer d’intégrer l’enfant à la discussion. Pour ce faire, le médecin
doit parvenir à établir une relation avec l’enfant et à adapter l’entretien
à ses compétences communicationnelles. La collaboration est complexe
et délicate du fait que les parents des patients mineurs – et non le
patient lui-même – sont à la fois interlocuteurs et décisionnaires pour
les questions qui concernent les mesures médicales. Également le fait
que les proches prennent (ou soient obligés de prendre) à la place de
leurs enfants des décisions que le médecin n’approuve pas forcément
(par exemple refus d’une mesure médicale nécessaire), peut créer des
situations difficiles pouvant, dans le pire des cas, soulever des
interrogations concernant les mesures de protection de l’enfant.
C’est pourquoi, dans l’intérêt d’une bonne collaboration, il importe
d’élaborer avec la famille un concept de la maladie qui soit équilibré et
acceptable pour chacun et de l’informer en permanence des mesures
thérapeutiques. Le patient est à la fois l’enfant malade et sa famille. La
maladie d’un enfant se répercute toujours sur l’ensemble de la famille
et influence la relation de couple et de parents, mais également celle
avec les frères et sœurs en bonne santé. Le ressenti des frères et sœurs
est toutefois souvent insuffisamment pris en compte. Le médecin
devrait donc toujours s’enquérir de l’influence de la maladie sur la
famille et de la manière dont la fratrie vit la maladie.
Plusieurs points doivent être clarifiés au préalable avec la famille:
l’enfant et les proches doivent-ils participer d’entrée à l’entretien? Les
proches doivent-ils, au préalable, parler seuls à seuls avec l’enfant de sa
maladie? ou est-ce le médecin qui doit d’abord parler seul à l’enfant?
Dans une étude concernant les parents d’enfants atteints de leucémie
lymphoblastique, la majorité des parents a souhaité s’entretenir avec le
médecin sans la présence de l’enfant, pour pouvoir mieux se concentrer
et décider seuls des informations à transmettre à leur enfant.
Lorsque l’enfant grandit, la question de son autonomie devient centrale.
Dès douze ans, les adolescents sont capables de discernement et ont un
droit de décision pour ce qui concerne leurs affaires personnelles. Ils
doivent donc pouvoir participer aux décisions. Se pose alors la question
de savoir dans quelle mesure les parents sont autorisés à participer aux
décisions concernant les mesures médicales appliquées à leurs enfants.
La relation parents-médecin-patient devient plus complexe et, par
conséquent, plus délicate, car les décisions prises par l’adolescent
peuvent être sources de litiges. Également l’application concrète du
secret médical devient primordiale: quelles informations sur leur enfant
faut-il fournir aux proches?
Informations ajoutées
– Compléments et précisions – Explications, questions
Inversion de rôles
– Propos non traduits (la traduction n’est toutefois pas nécessaire si le
patient a compris)
– Changement de perspective: passage du tu ➞ vous,
métacommunication (demandez à Madame B., si elle…), passage à
la troisième personne, discours indirect, actif ➞ passif
Le catalogue suivant décrit les comportements des interprètes et des
professionnels de la santé qui permettent de mener aussi correctement
que possible un entretien traduit centré sur le patient.
Professionnel de la santé
Avant l’entretien
1. Expliquer les termes techniques qui seront utilisés
(Par exemple manchette à pression artérielle)
2. Informer l’interprète au sujet
a. Du contenu, de l’objectif et de la durée de l’entretien
b. De la nécessité d’une traduction fidèle, sans interprétation, ni
compléments d’information ou explications
c. De l’utilisation du « Je » pour la traduction.
d. De la possibilité de poser des questions s’il ne comprend pas
quelque chose.
Au cours de l’entretien
1. Présenter l’interprète et le patient par leurs noms.
2. Informer le patient que l’interprète est tenu au secret médical.
3. Expliquer au patient que l’interprète traduira TOUT ce qui est dit
lors de l’entretien.
4. Garder le contact visuel avec le patient.
5. S’adresser toujours directement au patient et ne pas parler à la
troisième personne.
6. Parler clairement, avec des phrases entières et ne pas utiliser
inutilement des termes techniques.
7. Interroger le patient si la traduction semble dénuée de sens et/ou si
elle n’a aucun rapport avec la question posée.
8. Demandez au patient de récapituler ce qu’il a compris.
Après l’entretien
1. Vérifier auprès de l’interprète que l’entretien a été satisfaisant et
compréhensible pour le patient.
2. Demander à l’interprète un feedback concernant la manière de
diriger l’entretien.
Interprète
Avant l’entretien
1. Penser à emporter un lexique technique de la langue en question.
2. Avoir un bloc et un stylo à portée de main.
3. Éviter les discussions privées avec le patient avant l’entretien.
4. Informer le professionnel de la santé si le patient est une
connaissance.
5. Clarifier les termes techniques qui seront utilisés.
6. Annoncer que la personne qui parle sera interrompue en cas
d’intervention trop longue ou trop compliquée.
7. Annoncer que vous poserez des questions si vous ne connaissez pas
un des termes employés.
Au cours de l’entretien
1. Traduire exactement et entièrement, ne rien omettre et ne rien
changer (par exemple: gardez-le « tu » et le « vous »).
2. Toujours traduire à la première personne; par exemple
« J’ai subi une opération il y a un an ».
3. Traduire les transitions et les remarques entre parenthèses (par
exemple « Je me demande si … », « j’ai l’impression que … »).
4. Si les propos du professionnel de la santé ne sont pas clairs,
redemander avant de les traduire.
5. Si les propos du patient ne sont pas clairs, demander de répéter et
traduire sa réponse.
6. Préparer des aide-mémoires, en particulier pour les noms, les
chiffres et l’ordre des informations données.
7. Traduire les propos des patients même quand ils semblent inadaptés,
illogiques, gênants ou déplacés.
8. Informer le professionnel de la santé en cas de possible malentendu,
ne pas chercher à le résoudre soi-même.
9. Veiller à ce que le professionnel et le patient restent en contact
visuel (par l’attitude et la position).
Après l’entretien
1. Informer le professionnel de la santé si, par moment, l’entretien a
pu paraitre inadéquat ou problématique.
2. Demander un feedback concernant votre prestation.
Médiation interculturelle
En conclusion, la question suivante se pose: serait-il pertinent que les
interprètes soient également un lien entre les cultures?
On pourrait avancer que la traduction interculturelle a surtout du sens
lorsque les cultures entre lesquelles les informations doivent circuler
sont clairement définies. Le problème réside dans la définition des
cultures, autrement dit, s’il existe bien une culture kurde, kosovare ou
anatolienne et comment celle-ci est définie. Cela concerne – compte
tenu des différences individuelles – surtout les personnes qui vivent
dans ces régions. Les patients, pour lesquels un service de traduction
est demandé en Suisse, ne présentent pas une identité culturelle stable:
dans les cas les plus simples, ils se trouvent dans un nomansland entre
deux cultures et en fait, probablement en terrae incognitae bien
distinctes. Le fait qu’un interprète parle la langue d’un patient ne
signifie pas forcément qu’il connaît son identité culturelle. Comme tout
professionnel, l’interprète doit à chaque fois repositionner
soigneusement l’identité culturelle du patient.
3.10. Entretien concernant les directives anticipées et la
réanimation
L’aspiration et le droit à l’autodétermination ainsi que la diversité des
moyens d’action en fin de vie amènent de plus en plus de personnes à
vouloir décider elles-mêmes, à un stade précoce, des mesures médicales
auxquelles elles entendent consentir ou non. Qu’elles soient malades ou
en bonne santé, elles rédigent des directives anticipées (DA). Les
patients hospitalisés veulent, eux aussi, avoir la possibilité de décider
eux-mêmes s’ils veulent ou non être réanimés en cas d’arrêt cardio-
circulatoire.
Il est du devoir des médecins et des soignants d’évaluer la capacité de
discernement du patient, ses valeurs et ses préférences thérapeutiques.
Pour ce faire, des compétences professionnelles et
communicationnelles sont nécessaires.
Les valeurs personnelles et les volontés d’un patient sont consignées
dans les DA pour le cas où il ne serait plus en mesure de s’exprimer et
donc de décider. Le patient doit réfléchir aux questions liées à
l’éventualité d’une maladie grave et de la mort avec ses proches, les
médecins et les soignants. Les DA soulèvent par définition des
réflexions sur des questions difficiles.
Les DA pré-rédigées et signées par des personnes n’ayant bénéficié
d’aucun soutien de la part de médecins ou de soignants et n’ayant pas
fait l’objet d’une réflexion approfondie avec les proches, ne présentent
aucune utilité. Elles ne permettent pas de réduire l’écart entre la volonté
seulement présumée du patient et sa volonté réelle. Toutefois,
nombreux sont les médecins qui craignent d’aborder la question de la
mort avec leur patient, qu’il s’agisse de discuter des DA ou de clarifier
les démarches à entreprendre en cas d’arrêt cardio-circulatoire.
Plusieurs études montrent que cette réserve n’est pas justifiée.
Déroulement de l’entretien
Il convient de clarifier d’entrée la motivation du patient à rédiger des
DA ou à discuter de la réanimation. A-t-il été informé d’une maladie
grave? Une personne de son entourage est-elle décédée suite à une
longue maladie? L’approche suivante est recommandée:
– Relever la capacité de discernement du patient,
– Établir une anamnèse des valeurs,
– Définir clairement le déroulement en situations concrètes,
– Déterminer une ou plusieurs personnes habilitées à prendre les
décisions concernant le maintien en vie ou l’arrêt thérapeutique à la
place du patient, si celui-ci n’est plus capable de s’exprimer ou de
discernement.
Selon l’état du patient, certains aspects auront plus d’importance que
d’autres. Chez les personnes en bonne santé, la définition des valeurs
personnelles sera primordiale. Lorsqu’une maladie grave laissant
présager une incapacité de discernement (par exemple démence) est
diagnostiquée chez un patient, il importe de discuter de la manière de
procéder en rapport avec sa maladie.
Un entretien avec un patient hospitalisé, concernant la réanimation, se
déroule de manière similaire. Après une entrée en matière, l’entretien
porte sur l’échelle des valeurs du patient et la réanimation est ensuite
discutée en se basant sur des questions tout à fait concrètes.
Capacité de discernement
Pour rédiger des DA, le patient doit être capable de discernement en ce
qui concerne certains actes (conformément à l’art. 16 du Code Civil: «
Toute personne qui n’est pas privée de la faculté d’agir
raisonnablement à cause de son jeune âge, de déficience mentale, de
troubles psychiques, d’ivresse ou d’autres causes semblables, est
capable de discernement au sens de la présente loi. »). Un exemple de
cas simple peut être présenté au patient en vue d’évaluer sa capacité de
discernement. Il devrait être capable de le comprendre et de le résumer.
Il devrait également être en mesure d’exprimer ses préférences
thérapeutiques par rapport à la situation concrète, d’évaluer les
différentes alternatives possibles et de déduire les conséquences de ses
choix à court et à long terme.
Concrètement le médecin peut procéder comme suit:
« Imaginez que vous ayez subi une attaque cérébrale et que, suite à
cette attaque, vous ne puissiez plus bouger ni votre bras droit ni votre
jambe droite. Vous ne pouvez plus ni parler ni déglutir, mais vous
percevez parfaitement les paroles de vos semblables. En raison de
votre incapacité à déglutir, on vous demande si vous acceptez la pose
d’une sonde gastrique à travers la paroi abdominale, afin de garantir
un apport nutritionnel suffisant.
Pouvez-vous résumer l’exemple que je viens de citer?
Accepteriez-vous une telle mesure?
Y a-t-il, selon vous, des options alternatives?
A votre avis, que pourrait-il vous arriver si vous n’acceptiez pas cette
mesure? »
Les compétences cognitives du patient peuvent également être évaluées
à l’aide du Mini-Mental State Test. Selon l’auteur, un total entre 16 et
25 points 30 points est nécessaire pour rédiger des DA.
Anamnèse des valeurs
Il arrive sans doute que des DA puissent être élaborées en une seule
séance. Toutefois, la plupart du temps, plusieurs séances sont
nécessaires, car il s’agit de cerner les valeurs du patient, d’établir les
objectifs thérapeutiques, de désigner les représentants et de se
positionner par rapport à des situations thérapeutiques spécifiques (voir
3.3.).
Le premier entretien doit permettre d’introduire des thèmes tels que la
maladie grave et la fin de vie. Le patient fait part de sa situation de vie
actuelle (santé, contacts sociaux, projets d’avenir), de ses réflexions et
préoccupations liées à la maladie et à la mort, de ses angoisses à ce
sujet et nomme les personnes susceptibles d’être ses représentants
thérapeutiques. Dans ce contexte, le médecin peut aussi remettre au
patient de la documentation concernant les directives anticipées.
Une question d’introduction pourrait être formulée de la manière
suivante:
« Avez-vous déjà pensé à votre vieillissement et à votre mort? Si oui,
pourquoi et dans quel contexte? Souhaitez-vous m’en parler un peu? »
Le deuxième entretien se déroule généralement en présence du
représentant thérapeutique (en vue d’une procuration). Une anamnèse
des valeurs est établie et documentée et les thèmes de l’arrêt
thérapeutique et du maintien en vie sont discutés sur la base d’exemples
de cas. Un projet de DA est ensuite élaboré.
Il est essentiel que les médecins, les soignants et les représentants
thérapeutiques aient mené une réflexion approfondie sur les principales
questions relatives à la vie et à la mort, afin de pouvoir dissocier
clairement leurs propres valeurs et préférences thérapeutiques de celles
du patient.
Ce n’est que lors d’une troisième rencontre que les DA sont
définitivement rédigées, dupliquées et signées.
Plus les valeurs auront été définies individuellement, plus la qualité des
DA sera élevée. Une anamnèse des valeurs peut être établie en
demandant au patient de décrire ses valeurs avec simplicité et
honnêteté.
« Pouvez-vous me dire quelles sont, pour vous, les principales valeurs
et ce qui vous paraît particulièrement important en fin de vie? »
Vu les difficultés rencontrées par la plupart des personnes pour définir
ces valeurs, le médecin peut s’appuyer sur une liste de questions. Il peut
également se servir de cartes que le patient doit évaluer (jeu de cartes
Go-Wish) en mettant en évidence les éléments qu’il considère comme
importants.
On peut imaginer la manière de procéder suivante:
« Supposons que votre survie est limitée à quelques semaines ou
quelques mois. Parmi les valeurs suivantes, lesquelles revêtent pour
vous une importance majeure et lesquelles une moindre importance?
Pouvoir vivre le plus longtemps possible sans douleurs.
Ne pas souffrir d’insuffisance respiratoire.
Rester conscient jusqu’à la fin.
Conserver ma dignité.
Pouvoir exprimer mes préférences thérapeutiques jusqu’à la fin.
Pouvoir régler certaines choses dans ma
proches.
Préférences thérapeutiques
En fonction de la situation, le médecin discutera des exemples de cas
concrets avec le patient. Le patient doit décider si, dans les situations
présentées, il choisit plutôt le maintien en vie ou l’interruption
thérapeutique. Des instruments validés permettent de relever les
préférences du patient.
Représentants thérapeutiques
Les représentants thérapeutiques choisis doivent connaître les valeurs
du patient. Lors de l’entretien avec l’auteur des DA et ses proches, il
importe de veiller à ce que les médecins et les soignants soient libérés
du secret médical envers les représentants thérapeutiques.
Depuis l’entrée en vigueur du nouveau droit de protection de l’adulte,
début 2013, cette exigence a été renforcée, entre autres parce que le
nouveau droit prescrit que le patient incapable de prendre des décisions
médicales soit représenté (automatiquement) par ses proches, même si
ceux-ci n’y sont pas suffisamment préparés.
3.11. Entretien concernant les erreurs médicales 1
La gestion des erreurs médicales constitue une tâche difficile tant pour
les patients et leurs proches que pour les professionnels de la santé
concernés. En plus des conséquences directes d’une erreur - par
exemple un dommage physique - l’information portant sur l’erreur peut
représenter un stress supplémentaire. De nombreux patients et proches
concernés rapportent qu’une information inadéquate suite à une erreur
médicale a suscité chez eux de profondes inquiétudes et blessures ainsi
que de vives réactions émotionnelles, qui auraient pu être évitées,
même apaisées, avec une approche attentive et sensible.
Une grande majorité de personnes comprennent que des erreurs peuvent
être commises, même dans la prise en charge médicale. Les patients,
indépendamment de leur âge, de leur sexe ou de leur niveau de
formation, privilégient incontestablement une communication
transparente au sujet des erreurs. Lorsque les professionnels de la santé
impliqués n’informent pas ouvertement les patients, il n’est pas rare
que ceux-ci tentent de trouver des explications auprès de tierces
Suivi ultérieur
Un grand nombre d’informations importantes pour le patient ne seront
disponibles qu’à un moment ultérieur. Ainsi, les causes des erreurs et
leurs conséquences au sein de l’institution, telles que, par exemple, des
modifications des procédures, ne pourront, en principe, être établies
qu’après une analyse détaillée. Les patients et leurs proches doivent
être informés ultérieurement et de manière proactive de ces résultats.
Dans tous les cas, il faut proposer aux patients concernés une rencontre
de suivi à laquelle ils pourront se préparer.
3.12. Discussion entre les groupes professionnels
Dans le quotidien clinique, les connaissances médicales et celles
relatives à un patient sont réparties entre les différentes personnes au
sein des équipes interdisciplinaires; même si cette réalité constitue une
évidence, ce n’est qu’une fois réunies que ces connaissances deviennent
utiles aux personnes concernées. Toutefois, une observation moins
évidente contraste avec ce constat: dans le dernier numéro de Cochrane
Review traitant de la communication interdisciplinaire, il a été vérifié si
des interventions destinées à améliorer la communication entre les
groupes professionnels (en règle générale entre médecins et soignants)
se répercutent sur la qualité des soins. 7 études sur 15 font ressortir une
amélioration des indicateurs de qualité (par exemple nombre d’erreurs
médicales dans un service d’urgences, qualité de traitement des patients
diabétiques, etc.), 4 études ont révélé des résultats mixtes et 4 autres
études n’ont montré aucun effet.
En Suisse, le traitement stationnaire des patients offre la meilleure
opportunité d’une collaboration interdisciplinaire; à l’hôpital, le
moment de la visite des malades est l’occasion pour les soignants et les
médecins de parler ensemble au patient et d’apporter leurs
connaissances spécifiques. Pour ce faire, il est important que les
soignants sentent que leur apport est indispensable à l’évaluation de
l’état du patient: ils doivent être expressément invités à apporter leurs
connaissances techniques. Plus la relation est fondée sur la confiance, le
respect mutuel et le partage des responsabilités pour le bien du patient,
plus la collaboration sera efficace.
Pourquoi est-il alors difficile d’instaurer une culture de dialogue qui
soutient efficacement la collaboration entre les différents groupes
professionnels?
Obstacles
La socialisation et les expériences professionnelles des soignants et des
médecins sont divergentes et constituent toujours des obstacles; leurs
racines historiques sont profondes: au milieu du 19e siècle, la médecine
s’est imposée comme discipline scientifique dans les universités et les
hôpitaux, où les soignants travaillaient comme assistants et employés
de maison. Les relations entre ces deux groupes professionnels restent
empreintes de cette réalité historique et se révèlent au quotidien dans
des différences hiérarchiques évidentes qui entravent la collaboration
entre les soignants et les médecins. Mais depuis, la profession de
soignant a acquis une grande autonomie ainsi qu’une expertise, qui ont
permis de développer des filières d’études universitaires dans les pays
anglo-américains dès le milieu du siècle dernier. En principe, les
conditions devraient alors être réunies pour permettre à ces deux
groupes professionnels de se rencontrer sur un pied d’égalité dans le
quotidien clinique et d’apporter leur expertise respective lors des
rapports et des visites aux malades.
Facteurs encourageants
Compte tenu des difficultés liées à l’évolution historique de ces
professions, la collaboration entre les médecins et les soignants doit
être explicitement encouragée par l’introduction de standards
concernant le déroulement des visites, les discussions conjointes de cas
et les formations prégraduées, postgraduées et continues communes.
Tous les efforts déployés doivent être soutenus par la direction qui est à
même d’instaurer une culture de collaboration adéquate et efficace, par
exemple en définissant clairement les rôles et les responsabilités.
La collaboration entre les groupes professionnels sera, à l’avenir, le
garant du succès des institutions du système de santé – les patients
sentent si leurs médecins et soignants travaillent à l’unisson. Cette
évolution est rendue d’autant plus nécessaire par le nombre croissant de
patients polymorbides et de malades chroniques et âgés devant être pris
en charge par le système de santé.
Le travail de Forsey et al. (Psycho-Oncology 2013) illustre bien la
répartition des tâches dans la prise en charge de patients gravement
malades ou de leurs proches: dans la prise en charge de parents
d’enfants atteints de leucémie, on constate que, dans les entretiens, les
soignants et les médecins poursuivent des objectifs différents. Les
médecins soutiennent les parents en prenant soin de leur enfant avec
compétence et non en cherchant à identifier et à discuter de leurs
angoisses. Les soignants, en revanche, apportent leurs connaissances en
psychologie et essaient de soutenir les parents en abordant
explicitement leurs peurs et leurs inquiétudes. Les médecins et
soignants de cette étude connaissent cette répartition des tâches et
reconnaissent la compétence de l’autre groupe. Les deux groupes sont
perçus comme soutien émotionnel par les parents. Toutefois, pareil
modèle ne peut fonctionner que si les deux groupes partagent la même
conception et se respectent mutuellement.
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