4 - Lineaire 4 - Feydeau - Scene 2 - On Purge Bebe

Télécharger au format docx, pdf ou txt
Télécharger au format docx, pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 1

Séquence « Spectacle et comédie » (Le théâtre du XVIIè au XXIè siècle) Texte

extrait de FEYDEAU, On purge bébé, Scène 2. Linéaire 4

Scène 2 – FOLLAVOINE, JULIE

FOLLAVOINE. (…) Chouilloux, cʼest le président de la commission d’examen, chargée par


l’Etat d’adopter le modèle qui sera imposé comme type à l’adjudicataire. Comprends-tu
maintenant l’intérêt qu’il y a à se le ménager ? J’ai le brevet de la porcelaine incassable,
n’est-ce pas ? Que par l’influence de Chouilloux la commission adopte la porcelaine
incassable ; ça y est ! l’affaire est dans le sac et ma fortune est faite !
JULIE ,reste un instant songeuse, hochant la tête, puis. Oui !… et ça te mènera à quoi, ça ?
FOLLAVOINE, avec emballement. À quoi ? Mais si je réussis, c’est le pactole ! Je deviens
du jour au lendemain le fournisseur exclusif de l’armée française.
JULIE. Le fournisseur des pots de chambre de l’armée française ?
FOLLAVOINE, avec orgueil. De tous les pots de chambre de l’armée française !
JULIE, fronçant le sourcil. Et… on le saura ?
FOLLAVOINE, de même. Mais naturellement qu’on le saura !
JULIE. Oh ! non… Oh ! non, non, non, non, non, non !… je ne veux pas être la femme d’un
monsieur qui vend des pots de chambre.
FOLLAVOINE. Hein !… Mais en voilà des idées ! Mais songe que c’est la fortune !
JULIE. Ça m’est égal ! c’est dégoûtant ! Elle gagne l’extrême droite.
FOLLAVOINE. Mais, nom d’un chien ! qu’est-ce que je fais donc d’autre, aujourd’hui ? J’en
vends des vases de nuit ! j’en vends tous les jours !… pas sur ce pied-là ; mais j’en vends !
JULIE, revenant devant la table. Oh ! « tu en vends, tu en vends »… comme tu vends
d’autres choses ; tu es fabricant de porcelaine, c’est tout naturel que tu vendes les articles
qui relèvent de ton industrie ; c’est normal, c’est bien ! mais te spécialiser ! devenir le
monsieur qui vend exclusivement des pots de chambre ! Ah ! non, non ! même pour le
compte de l’Etat, non !
FOLLAVOINE, déconcerté et affolé. Mais tu es folle ! mais réfléchis !
JULIE, adossée à la table et les bras croisés. Oh ! c’est tout réfléchi ! Tu es bien aimable ;
mais je n’ai pas envie de marcher dans la vie, auréolée d’un vase de nuit ! je n’ai pas envie
d’entendre dire, chaque fois que j’entrerai dans un salon. « Qui est donc cette dame ? C’est
Madame Follavoine, la femme du marchand de pots de chambre ! » Ah ! non ! non !

Vous aimerez peut-être aussi