Cours DAEFLE CNED (2015) Didactique 4

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traduction » reportez-vous au document 5 de votre fascicule de documents et réalisez

l’exercice qui suit.

Exercice 1
Lisez d’abord l’extrait de Claude Germain (document 5, partie A) pour comparer
son contenu avec les principales caractéristiques de la méthode traditionnelle
reformulées en partie B.
A. Identifiez lesquels de ces procédés vous ou vos collègues utilisez en classe.
B. Explicitez les raisons pour lesquelles vous travaillez de cette manière.
C. Consultez les arguments le plus souvent cités, proposés dans le corrigé de cet
exercice.

Comme vous l’avez constaté, l’un des traits principaux de la méthode traditionnelle de
l’enseignement des langues, qui a survécu jusqu’à nos jours, est le recours systématique
à la langue maternelle (LM) de l’apprenant. Or, si la langue maternelle est omniprésente
en classe :
• l’élève ne parvient pas à organiser sa pensée en langue étrangère (LE) ;
• il ne parvient pas à entrer dans le système et la cohérence de cette LE ;
• toute la communication se fait en LM et la LE n’est présente que sous forme de
phrases à répéter ou à transformer, ou sous forme de mots de vocabulaire hors
contexte ;
• cela retarde donc ou empêche même le développement de la compétence de com-
Partie 2 munication en LE ;
Évolution des principes
didactiques de réfé- • les stratégies de recherche et d’hypothèses en contexte sur le sens des mots sont
rence à travers l’histoire rendues impossibles par la traduction.
Nous sommes conscients aussi du fait que la traduction ne transmet pas nécessairement la
même réalité de sens et ne recouvre pas nécessairement la même réalité extralinguistique.
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Par ailleurs, nous savons aujourd’hui qu’il existe des démarches et des techniques qui
permettent de faire comprendre des éléments de la LE ainsi que des règles de son fonc-
tionnement sans presque recourir au langage ou de les faire expliciter par les appre-
nants, directement en LE. Il nous est également possible d’avancer des arguments forts
en faveur de l’emploi de la LE comme moyen de l’apprendre. En effet :
• communiquer en langue étrangère en classe, c’est pouvoir y exprimer sa pensée ;
• c’est aussi entrer dans le système de cette langue et donc mieux se l’approprier ;
• toute la réflexion sur l’apprentissage, si elle se fait en LE, fait gagner du temps
puisqu’elle permet de communiquer en continu dans la classe en LE et d’entrer dans
un processus de pensée dans cette LE ;
• le sens des mots se devine souvent grâce au contexte sans qu’il soit nécessaire de
recourir à la traduction.
De plus, les arguments avancés n’excluent en rien une utilisation raisonnée de la langue
maternelle en classe :
• temporairement avec les vrais débutants mais en donnant rapidement les moyens
de tout dire et faire en LE durant le cours ;
• ponctuellement pour traduire un mot, surtout si ce dernier ne mérite pas une impli-
cation de temps par rapport à l’objectif de l’activité ;
• en pédagogie de l'erreur, si l'erreur est liée à une interférence LM / LE, la compa-
raison explicite entre les deux langues permet la prise de conscience nécessaire à la
remédiation ;

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• en version, comme test de compréhension du sens général, au-delà de la traduction
mot à mot.
Nous espérons que cette rapide réflexion sur l’enseignement traditionnel des langues
vous a donné l’occasion de prendre conscience de son héritage, de la pertinence de ses
procédés ou de l’utilité de les faire évoluer. Faisons à présent le point concernant les
retombées de la méthode directe sur les pratiques contemporaines.

La méthode directe : quelle nouveauté, quelle actualité ?


À la fin du XIXe siècle, les insuffisances de la méthode traditionnelle sont reconnues : le
politique, l’économique, l’idéologique et finalement l’éducatif vont se conjuguer pour
donner naissance à une nouvelle manière de concevoir et de réaliser un cours de langue
que l’on appellera « méthode directe ». Évoquons d’entrée de jeu ses caractéristiques et
ses composantes.
Tout d’abord, la MÉTHODE DIRECTE vise :
• un élève actif qui sera capable d’utiliser les langues étrangères dans sa pratique de
commerçant, d’industriel, de savant ou de lettré « citoyen de la République et agent
économique d’un État laïque, moderne et puissant »1, et qui apprendra à parler en
parlant. Il s’agit donc d’une MÉTHODE active ;
• un élève qui comprendra en devinant par une MÉTHODE directe, intuitive et orale :
– l’élève accède au sens des mots directement, sans passer par la langue maternelle,
en mettant en relation :
- sons et objets ou images (voire tableaux muraux d’illustrations), sons et gestes,
mimiques, Partie 2
- mouvements, déplacements, intonations, Évolution des principes
- sons et intuition mentale des choses abstraites ou éloignées ; didactiques de réfé-
– il accède aux règles de grammaire par des exemples, c’est-à-dire par leur emploi, rence à travers l’histoire
et par des exercices de réemploi ;
– il accède au sens des phrases et des textes par une compréhension globale et non Page 17
par la compréhension des mots isolés ;
– il développe donc, par l’intermédiaire de son enseignant, une capacité d’explica-
tion par le langage, en langue étrangère. La langue s’apprend pour elle-même,
bien sûr, mais aussi par elle-même, d’où des explications par étymologie, les syno-
nymes, les antonymes, les définitions, les paraphrases et surtout par la mise en
contexte, l’utilisation d’exemples et la mise en situation concrète.
• un élève qui parle : la MÉTHODE est orale ; mais, comme le matériel écrit (manuel)
n’en donne pas les moyens, c’est à partir du professeur que se construit l’oral, en
direct avec les élèves.
• un élève qui répond aux interrogations de l’enseignant : elle est donc interrogative.

E7 E6 E5 E4 E3 E2 E1

Professeur

1. Puren (C.), « La méthodologie directe », dans Histoire des méthodologies de l’enseigne-


ment des langues», Paris, CLE International, 1988.

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La MÉTHODE DIRECTE se veut aussi :
• Imitative
L’élève apprend en imitant les sons (le professeur reste sa référence orale). On l’a
senti, cette méthode veut être une méthode la plus naturelle possible, rappelant la
manière dont l’enfant apprend sa langue maternelle.
• Répétitive
L’élève mémorise grâce à des EXERCICES de REEMPLOI permanents et intensifs qui,
même s’ils sont écrits, se font de préférence à l’oral, selon le schéma de la méthode
« interrogative » (voir plus haut).

Concrétisation de la méthode directe dans un manuel de Fle


Nous avons choisi d’observer la mise en œuvre de la méthode directe sur l’exemple du
manuel le plus connu et le plus largement utilisé pour l’enseignement du français. Il
s’agit de Cours de langue et de civilisation françaises, tomes I, II, III, IV de G. Mauger,
appelé couramment par les enseignants « Mauger bleu ». Destiné à un public adolescent
et adulte et publié chez Hachette à partir de 1953, il a connu de nombreux tirages et
a été largement utilisé à partir de son apparition aussi bien en France qu’à l’étranger.
Nous vous invitons à présent à consulter le document 6 qui reproduit un extrait du livre
du maître : vous y découvrirez les conseils donnés au professeur pour l’animation des
premières leçons de français, donc avec des apprenants débutants.

Exercice 2
Partie 2 Observez les propositions d’animation de classe formulées pour le manuel Cours
Évolution des principes de langue et de civilisation françaises (document 6) et retrouvez les techniques
didactiques de réfé- mises en œuvre qui relèvent d’une méthode : active, orale, directe, intuitive, inter-
rence à travers l’histoire rogative, imitative et répétitive.

Page 18 L’extrait du livre du maître que vous venez d’analyser reprend en écho les principes de
fonctionnement de la méthode directe décrits plus haut (cf. le corrigé). Cependant, il
permet aussi de remarquer une certaine monotonie dans l’animation des cours.
Pour poursuivre notre exploration de la mise en œuvre de la méthode directe, nous vous
proposons de consulter le document 7, composé de deux parties : la partie A présente la
table des matières du livre 1 de notre manuel et la partie B, la leçon 35 du livre.

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Exercice 3
Analysez le document 7
A. Observez la table des matières reproduite pour découvrir :
1. Quelle est l’organisation générale du manuel ;
2. Ce qui détermine chaque leçon ;
3. Sur quoi semble se fonder la progression de ce livre de français.
B. Analysez les différentes parties de la leçon 35 et répondez aux questions :
1. Tableau de grammaire : De quel type de grammaire s’agit-il ?
2. Illustrations (page de gauche) : Quelle est la fonction respective de chacune d’elles ?
3. Texte de la leçon :
Qu’est-ce qui y prédomine ?
Que pensez-vous du contenu de civilisation véhiculé par cette leçon ?
4. Conversation : Quel est le but des questions posées dans cette partie ?
5. Exercices :
a) Quel est l’objectif commun des trois premiers exercices ? Sur quelle unité de la langue se
basent-ils ?
b) Observez les différentes consignes et dites en quoi peut résider la difficulté de leur com-
préhension pour un étudiant étranger encore relativement débutant.
6. Apprentissage de la grammaire
C. En conclusion, quels principes régissent ici l’apprentissage de la grammaire ?
Partie 2
Évolution des principes
Après la confrontation de vos observations avec les éléments mentionnés dans le corrigé
didactiques de réfé-
de l’exercice 3, vous commencez sûrement à comprendre certaines difficultés dans le rence à travers l’histoire
processus de mise en place de la méthode directe.

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Limites et obstacles à la bonne mise en œuvre de la méthode directe
L’analyse de leçon que vous venez d’effectuer vous a d’abord permis de voir de près le
matériel à disposition de l’enseignant et des apprenants de l’époque.
Première observation : on travaille ici essentiellement à partir de ce qui est présenté à
l’écrit dans le livre. Les textes des leçons sont très majoritairement descriptifs (y com-
pris aux niveaux plus avancés) avec, parfois, quelques éléments dialogués à l’intérieur.
Les questions présentées dans la partie conversation portent quasiment toutes sur le
texte de la leçon et, même posées à l’oral par l’enseignant en classe, servent à vérifier
la compréhension de ce texte et non à susciter une véritable prise de parole du côté de
l’apprenant. Les exercices proposés ne l’y invitent pas non plus. Il sera donc difficile dans
ces conditions de développer la compétence de communication orale chez l’apprenant –
postulat pourtant formulé d’entrée de jeu par la méthode directe.
Par ailleurs, on imagine facilement la monotonie d’une classe qui ferait, même à l’oral,
les 7 exercices d’application (ou même 4, faisant les 3 autres à la maison) selon le schéma
attendu (P E1, puis E2, puis E3…). On connaît la lenteur de ces déroulements
(même ponctués de quelques remarques du professeur ou des élèves) car il faut beau-
coup de temps pour que chacun, individuellement, transforme sa phrase ou réponde
à la question posée. Ajoutons que, pendant tout ce temps, l’apprenant n’a quasiment
aucune occasion de s’exprimer librement, de donner une opinion ou d’émettre un com-
mentaire personnel. En effet, toute son énergie est concentrée pour « engranger » le
point de grammaire et le lexique, très, trop riche de la leçon2.

2. Rappelons ici que les résultats de la recherche sur le français fondamental, permettant de réduire l’étendue
du vocabulaire à ce qui paraît nécessaire pour tel thème ou situation à un niveau donné, n’ont commencé
à être publiés que dans la deuxième partie des années 50. Ils n’ont donc pu servir qu’à la génération de
manuels à venir. Nous les aborderons dans la séquence suivante.

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En ce qui concerne les enseignants, si le matériel proposé indique si peu comment ani-
mer la classe, on imagine à quel point toute l’animation par une méthode à la fois orale,
directe, active, intuitive, interrogative, imitative et répétitive (car tel était le postulat de
départ) repose sur son savoir-faire. Or, il s’avère que la formation reçue par les profes-
seurs de l’époque fût largement insuffisante.
La méthode directe a manqué aussi d’un appui théorique solide concernant la psycholo-
gie d’apprentissage et la conception de l’objet d’apprentissage (théorie linguistique). Et
enfin, les choix idéologiques et ceux concernant le profil du public, notamment adulte,
voulu « cultivé », voire « littéraire », se sont avérés en décalage avec les réalités du ter-
rain.
À présent, vous êtes prêt(e) à identifier des pratiques d’enseignement laissées en héri-
tage par la méthode directe. Vous pourrez ainsi prendre conscience du volume plus ou
moins grand de cet héritage dans votre propre pratique, de la pertinence des procédés
utilisés ou d’un besoin de les faire évoluer.

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Évolution des principes
didactiques de réfé-
rence à travers l’histoire

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