COURS Litt D'idée

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Première

L'histoire de la littérature d’idées du XVIe siècle Français


au XVIIIe siècle

I
Le XVIe siècle : le développement des idées humanistes
L'invention de l'imprimerie en 1450, dont l'usage se développe rapidement au XVe siècle, contribue à une
diffusion plus large et plus rapide des productions écrites et des textes antiques. Cela favorise
progressivement l'essor d'idées nouvelles. Les nombreux échanges entre les intellectuels d'Europe
favorisent l'émergence d'un courant de pensée à l'échelle européenne : l'humanisme. Rabelais et Montaigne
en sont deux importants représentants français.

DÉFINITION Humaniste
Du latin humanitas, le mot « humaniste » désigne au départ celui qui a fait ses « humanités », c'est-à-dire celui
qui a appris le grec et le latin et étudié les textes de l'Antiquité. Plus largement, un humaniste est celui qui a foi
en l'homme et cherche les moyens de lui permettre de se perfectionner, sur le plan moral notamment.
Pour les humanistes, l'homme est au centre du monde. L'humaniste considère l'homme comme un être
perfectible, doué de raison, capable de trouver sa juste place dans un monde en pleine mutation.
Le savoir et la raison sont essentiels : l'humaniste est curieux de tout (sciences naturelles, droit, histoire,
littérature, etc.). Ses connaissances lui permettent d'exercer son esprit critique. Ce savoir tend à être
encyclopédique. L'humaniste est un lecteur rigoureux et passionné.
L'éducation est primordiale : l'humaniste combat l'ignorance. En développant ses qualités intellectuelles et
morales, l'homme peut connaître le bonheur d'une existence libre. L'humaniste cherche donc à être clair et
compréhensible : des dictionnaires, des répertoires, des index se multiplient pour permettre à chaque lecteur
de lire efficacement. Il propose également une nouvelle pédagogie moins répétitive que celle qui était
pratiquée jusqu'alors.

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Première
L'histoire de la littérature d’idées du XVIe siècle Français
au XVIIIe siècle

EXEMPLE
Le roman Gargantua (1534) de Rabelais met en scène un géant, Gargantua, fils du roi Grandgousier. Les
épisodes de son éducation et de sa destinée sont l'occasion pour Rabelais de proposer une réflexion
humaniste sur la société de son temps : l'éducation, la guerre, la religion font partie des thématiques
centrales de ce roman.

La réflexion politique doit être développée : l'humaniste condamne toute forme de fanatisme. Il dénonce
l'autoritarisme des souverains et l'usage judiciaire de la torture. Il proscrit également les guerres de conquête
et invite les princes à la sagesse afin de maintenir les peuples dans la paix. Leurs interrogations sur le
fonctionnement de la société les poussent à imaginer un modèle idéal et utopique.
La pensée religieuse doit être repensée : l'humaniste invite à vivre la foi chrétienne de façon plus personnelle.
Il est souvent proche de l'évangélisme : il se moque des superstitions, du culte abusif des saints, des rites sans
signification. L'humaniste veut accéder au texte de l'Évangile et célébrer personnellement le Créateur de
l'Univers.

EXEMPLE
L'œuvre de Montaigne, intitulée Essais (1580-1595), constitue une somme de la sagesse humaniste.
L'auteur y développe, dans trois volumes successifs, ses réflexions personnelles sur une multitude de
sujets : l'éducation, l'altérité, la place de l'homme dans le monde, sa relation aux animaux, le rapport à la
vérité, la question de la mort, etc.

II
Le XVIIe siècle : le siècle des moralistes
Au XVIIe siècle, la pensée classique nourrit la réflexion des philosophes. La notion de vérité et la place de
l'homme dans l'Univers sont centrales dans la réflexion. Afin d'éduquer tout en divertissant, de nombreux
écrivains moralistes adoptent le précepte « plaire et instruire ». Les formes argumentaires brèves sont
privilégiées. L'idéal de « l'honnête homme » est défendu.

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Première
L'histoire de la littérature d’idées du XVIe siècle Français
au XVIIIe siècle

Au XVIIe siècle, la littérature d'idées aborde des sujets philosophiques et religieux qui font débat :

la question de la grâce divine, qui oppose les jansénistes aux jésuites ;


les preuves de l'existence de Dieu ;
la nature de l'âme humaine ;
la question de la vérité du monde ;
la place de l'homme.

EXEMPLE
Blaise Pascal, célèbre mathématicien, décide de se retirer de la vie mondaine pour mener une vie ascétique,
consacrée à la religion et à l'écriture. Il se rapproche alors du jansénisme. À partir de 1657, il entreprend la
rédaction d'une vaste « apologie de la religion chrétienne » qui l'occupe les dernières années de sa vie. À sa
mort, l'œuvre est composée de fragments épars que ses proches publient sous le titre Pensées en 1670,
après les avoir classés. À la fois philosophique et littéraire, le livre se présente comme une réflexion sur
l'homme, à la fois grand et misérable. Pascal se penche sur sa capacité à accéder au bonheur et les motifs
qui doivent le conduire à faire le « pari » de l'existence de Dieu.

Les récentes découvertes scientifiques, en particulier la théorie de l'héliocentrisme, ont pour conséquence
une remise en question des thèses héritées de l'Antiquité et un questionnement sur la stabilité des
connaissances et la notion de vérité. Les penseurs de l'époque classique s'interrogent donc sur la question du
vrai, comme par exemple Descartes, qui formule l'hypothèse que le monde puisse être une illusion des sens
dans ses Méditations métaphysiques (1641). Sa démarche très rationnelle l'amène néanmoins à dégager une
vérité incontestable, celle du cogito (« Je pense donc je suis ») à partir de laquelle il échafaude son système
philosophique.
Ces découvertes amènent par ailleurs les scientifiques et philosophes à s'interroger la place de l'homme dans
le monde, comme en témoignent par exemple les Entretiens sur la pluralité des mondes (1686) de Fontenelle,
œuvre dans laquelle l'auteur vulgarise les connaissances scientifiques de l'époque et montre combien celles-ci
ont renouvelé la conception que les hommes ont de leur place dans le monde : non plus au centre, mais en
périphérie.
Parallèlement se développe le courant de pensée du libertinage, qui remet en question l'existence de Dieu et la
religion, et revendique une totale liberté de pensée.

EXEMPLE
Cyrano de Bergerac se rattache au courant libertin. Son œuvre principale, Histoire comique des États et
empires de la Lune (1657), se présente comme un récit de voyage fictif sur la Lune. Les péripéties du
personnage sont burlesques mais donnent lieu à de nombreux passages philosophiques sur l'existence de
Dieu, la nature de l'Univers ou encore l'immortalité de l'âme. L'auteur défend ses positions relevant du
libertinage de pensée.

Le précepte classique est « plaire et instruire », formule empruntée au poète latin Horace. Il s'agit de plaire au
public et de le divertir pour emporter son adhésion. Les moralistes vont reprendre cette formule et l'appliquer
dans diverses formes littéraires : l'apologue, les maximes et les caractères.
L'apologue, en tant qu'argumentation indirecte, répond parfaitement à cette double exigence : divertissement
et instruction. C'est pourquoi la fable et le conte connaissent un véritable renouveau et rencontrent la faveur
du public. Ils sont lus et commentés dans les salons littéraires. Les moralistes classiques empruntent souvent
ces récits divertissants à la tradition orale ou à des sources antiques et les réécrivent de manière personnelle,
en s'adaptant au goût du public aristocratique du XVIIe siècle, à l'exigence de sobriété, de naturel et surtout à
la morale classique.

EXEMPLE
La Fontaine publie plusieurs livres de Fables de 1668 à 1674. Il s'inspire principalement du poète latin
Ésope, mais également du poète grec Phèdre. Ces fables prennent la forme de récits divertissants, mettant
généralement en scène des animaux. Elles ont une visée moralisatrice, mais également une portée
politique et même philosophique.

Les écrivains peuvent également utiliser la littérature pour critiquer la société dans laquelle ils évoluent.

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L'histoire de la littérature d’idées du XVIe siècle Français
au XVIIIe siècle

EXEMPLE
Madame d'Aulnoy a écrit de nombreux contes comme « L'Oiseau bleu » ou « La Chatte blanche ». Ses
histoires plaisantes sont principalement destinées aux jeunes filles. Toutefois, l'auteur y critique le mariage
arrangé : ses héroïnes remettent souvent en cause les mariages que leur entourage arrange pour des
raisons financières ou familiales. Dans ses contes, les jeunes femmes sont souvent enfermées, à l'image de
l'héroïne de « L'Oiseau bleu », captive dans une tour. Madame d'Aulnoy remet en cause la place des femmes
dans la société et semble favorable à une meilleure éducation pour les femmes, qui leur permettrait d'être
préparée à l'entrée dans le monde.

Afin de corriger les travers des hommes, les auteurs érigent un modèle, l'idéal de l'honnête homme :

Il doit faire preuve de tempérance et s'affranchir de l'emprise des passions.


Il est aimable en société, cultivé et éloquent.
Il sait agir avec mesure et générosité.

La satire permet de tourner en ridicule les travers et les ridicules des hommes. Les moralistes privilégient
également les formes argumentatives brèves : maximes, pensées, caractères, portraits, etc. Celles-ci
permettent à la pensée de s'exprimer avec efficacité et concision :

les formules frappent l'esprit du lecteur ;


le ton est souvent ironique ou satirique ;
la concision répond à l'exigence classique de sobriété et de retenue.

EXEMPLE
La Bruyère publie Les Caractères en 1688. Cette œuvre s'inspire des Caractères du poète grec
Théophraste. Elle est constituée d'une série de textes courts, pour la plupart des portraits, inspirés par
l'observation que La Bruyère a pu faire de la société de cour. Il y tourne en dérision la vanité des courtisans,
leurs vices et leurs travers. La plume est acérée, l'humour mordant et la critique touchent au vif pour mieux
corriger les mœurs.

« On ne doit parler, on ne doit écrire que pour l'instruction. »

Jean de La Bruyère
préface des Caractères - 1688

EXEMPLE
La Rochefoucauld publie un recueil de Maximes en 1664. Cette œuvre est composée de courtes formules,
appelées « maximes », très à la mode dans les salons littéraires. On y trouve une morale stricte, influencée
par le jansénisme. La Rochefoucauld brosse un tableau assez sévère de l'homme en société et dénonce la
vanité humaine en montrant que l'amour-propre guide toutes les actions de l'homme, y compris celles qui
semblent les plus désintéressées.

III
Le XVIIIe siècle : le siècle des Lumières
Le XVIIIe siècle est connu comme le « siècle des Lumières » : des idées nouvelles se répandent, diffusées et
promues par des philosophes tels que Montesquieu, Voltaire, Diderot ou encore Rousseau. La France et
l'Europe sortent progressivement de l'obscurantisme religieux grâce aux « lumières » de la raison. De
nombreux ouvrages critiques et polémiques sont publiés anonymement ou à l'étranger pour éviter la
censure. Certains auteurs sont contraints à l'exil pour échapper à la prison.

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L'histoire de la littérature d’idées du XVIe siècle Français
au XVIIIe siècle

A L'Encyclopédie et la diffusion des connaissances


Les auteurs des Lumières veulent diffuser les connaissances, convaincus que le progrès et l'éducation
permettront d'établir une société où l'homme vivra plus heureux et plus libre. Avec l'Encyclopédie, c'est ce
que Diderot et les autres philosophes qui le rejoignent dans cette entreprise souhaitent réaliser.
L'Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences et des arts (1751-1772) est une œuvre somme, supposée
réunir toutes les connaissances techniques, scientifiques de l'époque et rendre compte des idées des
Lumières. Le projet est conçu par Diderot et de nombreux scientifiques, philosophes, économistes,
techniciens y collaborent. C'est aussi une œuvre de combat politique et idéologique, ce qui explique qu'elle ait
été interdite : la bourgeoisie se bat au nom de la science et de la raison contre un pouvoir politique lié à l'Église
catholique.

EXEMPLE
L'Encyclopédie comporte des articles illustrant les idées des Lumières sur :

l'esclavage (article « Traite des nègres » de Jaucourt) ;


la guerre (article « Paix » de Damilaville) ;
la politique (articles « Autorité politique » de Diderot, et « Peuple » de Jaucourt) ;
l'économie (article « Économie » de Rousseau).

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B Le détour par la fiction


Pour échapper à la censure et à la prison, les penseurs des Lumières utilisent souvent le détour par la
fiction. En effet, le récit fictif, d'apparence divertissante, permet à l'auteur de divulguer implicitement ses
idées sur de nombreux sujets sans craindre d'être condamné.
En outre, l'utilisation de ce détour correspond parfaitement à la vocation des Lumières, qui consiste à amener
le lecteur à réfléchir par lui-même. Or, le récit oblige le lecteur à dégager lui-même le sens implicite.
Le roman est une forme d'argumentation indirecte qui est utilisée par les écrivains.

EXEMPLE
Première œuvre littéraire de Montesquieu, publiée anonymement à Amsterdam pour éviter la censure, les
Lettres persanes sont un roman épistolaire composé de 161 lettres écrites par des Persans. En donnant la
parole à des étrangers venus en France, Montesquieu invite le lecteur à adopter un « regard éloigné » sur la
société française. Les Persans s'étonnent, tantôt amusés, tantôt scandalisés, en observant les mœurs
françaises, le fonctionnement politique, le rôle de la religion. Ainsi l'auteur peut-il développer une critique
implicite et souvent ironique de la société, de la monarchie absolue, de l'Église, en utilisant un détour
romanesque suffisamment efficace pour ne pas craindre la censure.

Le conte philosophique est une autre forme d'argumentation indirecte particulièrement utilisée par Voltaire.

EXEMPLE
Candide ou l'Optimisme (1759) de Voltaire est un conte philosophique, prenant la forme d'un conte plaisant,
inspiré des contes de fées et des contes orientaux. Il permet à l'auteur d'utiliser sa verve ironique pour
critiquer la société (guerre, fanatisme religieux, esclavage) et développer des idées philosophiques
(réflexion sur l'existence du mal et le bonheur). En effet, dans ce récit, le jeune Candide parcourt le monde,
allant de mésaventures en mésaventures, ce qui l'amène progressivement à remettre en cause l'optimisme
que lui a inculqué son maître Pangloss. À la fois réflexion philosophique sur l'optimisme et dénonciation des
maux de la société, cette œuvre majeure est à l'image des nombreux autres contes philosophiques de
Voltaire.

C La dénonciation des inégalités et des injustices


Les penseurs des Lumières dénoncent toutes les formes d'injustices et d'inégalités. Ils combattent les
privilèges, l'esclavage, la colonisation, la peine de mort ou encore le fanatisme.
Annonçant la Révolution française de 1789, les penseurs des Lumières refusent le modèle monarchique de
droit divin qu'ils aspirent à remplacer par un gouvernement éclairé de nature constitutionnelle comme en
Angleterre. Ils remettent en question les privilèges aristocratiques et les inégalités sociales.

EXEMPLE
Les essais de Rousseau (Discours sur l'origine de l'inégalité parmi les hommes en 1755 et Du contrat social
en 1762) témoignent d'une réflexion philosophique et politique sur l'inégalité sociale. Rousseau s'interroge
sur l'origine de l'inégalité et émet l'hypothèse que celle-ci n'est pas naturelle et qu'elle a été instituée par la
vie en société. Il propose un nouveau « contrat social », plus égalitaire, qui annonce dans une certaine
mesure le système démocratique.

Les penseurs des Lumières combattent également l'obscurantisme et le fanatisme religieux. Ils dénoncent
tous les faux savoirs et toutes les intolérances, en particulier dans le domaine religieux. La conception d'un
dieu omnipotent et rédempteur est remplacée par l'image déiste d'un créateur.

EXEMPLE
Toute sa vie, Voltaire aura combattu ce qu'il appelle « l'Infâme », c'est-à-dire le fanatisme religieux. Tout en
étant déiste, il dénonce fermement toutes les formes de superstition et surtout toutes les manifestations
de l'intolérance religieuse. Il s'est impliqué dans l'affaire Calas contre la condamnation injuste dont a été
victime Calas. Ce protestant a été accusé à tort d'avoir tué son fils pour l'empêcher de se convertir au
catholicisme. Voltaire se passionne pour cette affaire et écrit le Traité sur la tolérance en 1763, dans lequel
il prend la défense de Calas et adresse une « Prière à Dieu » pour plus de tolérance et de fraternité entre les
hommes.

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