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ß INTRODUCTION
Le modèle centre-périphérie-contrepoids élaboré par Reynaud (1981)
semble s’appliquer heureusement à la fois à l’ensemble de l’espace francophone
et à la France en ce qui concerne les variétés régiolectales du français. Lorsqu’on
considère la conurbation lilloise, il est difficile de ne pas être attiré par la
plausibilité de son caractère périphérique par rapport au reste de la France et de
pas reconnaître le rôle central de la métropole au niveau régional. Si l’on remonte
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1 Je remercie Philippe Blanchet d’avoir attiré mon attention sur cette étude.
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conscients de pratiquer un français qui manifeste des écarts par rapport à une
norme qui serait respectée dans d’autres parties de la France et donc entre autres
d’avoir un accent (Tableau 1) alors que le fait de « parler sans accent » et sans
marques régionales tend à être perçue de manière plutôt favorable dans l’espace
francophone (par ex. Garsou, 1991:20).
Tableau 1 - « Avez-vous un accent ? »
(Gueunier et al., 1978 ; Bayard et Jolivet, 1984 ; Singy, 1996)
Tours 6,5%
Lille 57%
Limoges 77%
Saint-Denis-de-la-Réunion 89%
Canton de Vaud (1984) 100%
Canton de Vaud (1996) 83%
Cette conscience d’avoir un accent est d’autant plus remarquable parce que
des études récentes, notamment celle d’Armstrong et Boughton (1998) ont noté
que la métropole du Nord constituait un des rares exemples d’une région de
langue d’oïl où l’on observe encore de ce que Fernand Carton (1981) appelle une
« originalité linguistique », c’est-à-dire que même le parler des locuteurs jeunes
comporterait des caractéristiques régionales qui permettraient à un(e) non-
Nordiste de les situer dans l’ensemble francophone2. En effet, Armstrong et
Boughton (1998) postulent que dans les régions de langue d’oïl, les témoins
ordinaires3 ne parviennent pas à déceler les origines géographiques d’autres
locuteurs au sein de l’espace de langue d’oïl, alors qu’ils inscrivent un taux de
réussite plus qu’honorable lorsqu’il s’agit de situer les mêmes locuteurs dans
l’espace social. Comparant des échantillons de sujets originaires des deux
extrémités est-ouest des régions de langue d’oïl - Nancy (à 305 kilomètres de
Paris ) et Rennes (à 355 kilomètres de la capitale), ces deux enquêteurs notent en
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2 Au sens strictement scientifique, il s’agit d’une hypothèse qui n’a pas été démontrée mais tous
les témoignages cités (et bien d’autres encore) confirment la banalité de l’observation que les
Nordistes ont un accent (régional), alors que les autres études citées pour les régions de langue
d’oïl ne permettraient de constater qu’une différenciation sociale.
3 En fait, lors d’un atelier organisé par l’Association for French Language Studies, le 10 octobre
1998, Boughton a réussi la démonstration auprès d’un auditoire de 25 universitaires spécialistes de
la langue française (enseignants, linguistes et sociolinguistes). Ayant écouté une série de huit
enregistrements, Fernand Carton était le seul à reconnaître leurs origines communes dans la ville
de Nancy et cela grâce à des indices non-linguistiques.
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Rouennais, Thierry Bulot (Bulot, 1998, 1999) constate que dans la perception des
habitants, les variétés sociolectales pratiquées dans la ville sont localisables dans
l’espace : le français rouennais normé étant situé sur la rive droite et au centre
ville, alors que le français rouennais caractéristique (accent normand) est localisé
plutôt sur la rive gauche (Bauvois et Bulot, 1998 : 71). Ces résultats, malgré leur
intérêt certain, ne permettent pas forcément d’infirmer l’hypothèse d’Armstrong et
Boughton, car ils semblent confirmer certaines perceptions influencées par la
mémoire collective, plus qu’ils n’autorisent à affirmer la reconnaissabilité d’un
accent rouennais (ou normand) qui serait utilisé par des locuteurs (relativement?)
jeunes par rapport à ceux des autres régions de langue d’oïl4.
Le caractère supposé périphérique de la métropole lilloise ne pourrait pas
dépendre de son éloignement de Paris (215 kilomètres) bien inférieur à celui de
Nancy et de Rennes, ni de son incorporation relativement tardive dans l’état
français (conséquence de la conquête de 1667, confirmée définitivement par le
traité d’Utrecht en 1713), ni forcément de sa situation frontalière. Car dans une
perspective régionale, Lille occupe depuis très longtemps une place centrale
capitale des Flandres sous l’Ancien Régime et chef-lieu du département du Nord à
partir de 1803 et dominante depuis bien plus longtemps par son poids
démographique, sa puissance industrielle et son rayonnement culturel5. Ceci
n’implique pas non plus que d’autres villes à différents moments de l’histoire
n’aient pas constitué au sein de la conurbation actuelle un contrepoids
démographique et économique important à la capitale régionale, notamment
Roubaix et Tourcoing dans la deuxième moitié du dix-neuvième et les premières
décennies du vingtième siècle.
Il est aussi indéniable que la position dominante de Lille au niveau régional
lui (a) fait subir une influence plus directe de Paris. Dans les trois ans qui ont suivi
la conquête, Lille a été transformé en place forte avec une citadelle et une
présence militaire de quelques milliers de soldats. Toutes les principales voies de
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4 Cette observation semble valable pour les personnes (relativement) jeunes. Il est évident que l’on
entend dans la bouche de personnes âgées des accents qui trahissent leurs origines géographiques
(cf. Carton et al. 1983 où la grande majorité des témoins est née dans la première moitié (et
souvent dans les premières décennies) du vingtième siècle.
5 En fait, le rôle central de Lille est pleinement confirmé au cours de la période de
l’industrialisation (fin du 19e et début du 20e siècles). Pour les époques antérieures, il convient de
signaler le rôle de Douai (centre universitaire du 16e au 19e siècle, chef-lieu de département
(1791-1803)) de Cambrai et de Tournai (centres écclésiastiques plus importants que Lille jusqu’au
20e siècle).
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Tourcoing et Roubaix qui ont pu s’étendre bien plus rapidement que Lille confiné
dans ses fortifications jusqu’en 1858. Le développement parallèle mais
relativement indépendant d’entreprises et de dynasties industrielles a été, compte
tenu de la proximité de Lille et de Roubaix-Tourcoing (12 kilomètres), assez
remarquable (Pouchain, 1998).
Ce n’est qu’au cours des années 1960 que des mesures de planification
régionales proposées par la DATAR6 tentent de mettre de l’ordre dans les résultats
d’une croissance industrielle anarchique. Lille-Roubaix-Tourcoing a été désigné
métropole d’équilibre (Scargill, 1983:37), une OREAM 7 a été créée en 1966 et la
Communauté Urbaine de Lille (CUDL) composée de 87 communes a été créée en
1968 (Figure 1). En proposant le développement d’une métropole d’équilibre, on
misait sur la tertiarisation de l’économie régionale pour compléter la puissance
industrielle du versant nord-est (Roubaix, Tourcoing). La construction d’une ville
nouvelle - Villeneuve d’Ascq à l’est de Lille aurait sans doute eu pour résultat de
confirmer la pré-éminence de la capitale régionale, même si le déclin du textile
n’avait pas obligé les villes de tradition mono-industrielle à rattraper leur retard, qui
leur avait été de fait imposé par ces mesures de planification nationales et régionales,
dans le secteur des services. Ces « faubourgs industriels »(terme utilisé par Sueur,
1971) malgré des succès en matière de création d’emplois ont souffert d’un handicap
indéniable à cause de la vétusté d’une partie de leur parc immobilier et d’une image
de marque formée durant l’ère industrielle. De plus en plus, les gens qui travaillaient
dans les vieilles villes s’installaient dans des communes centrales plus agréables (par
ex. Bondues) ou dans des zones rurales qui prenaient désormais un caractère
résidentiel (par ex. Sailly-Lez-Lannoy).
Les développements en matière de transport ont également servi à promouvoir
Lille, point pivotal pour tous les moyens de transport en commun - trains, tramway,
métro et bus et carrefour européen desservi par des TGV qui permettent d’accéder à
toutes les villes importantes de l’Union Européenne et un réseau (auto)routier qui
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8 Il est peut-être utile de distinguer dans ce contexte « in-migrés » picardophones originaires dans
leur immense majorité des campagnes situées autour de Lille (le plat pays) qui sont venus
s’installer dans la capitale régionale et « immigrés » venus de pays étrangers et parlant donc
d’autres idiomes.
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Pierrard (1972 : 146) pouvait décrire le parler lillois comme un « patois issu du
picard, mais terriblement abâtardi, sans orthographe, pénétré et déformé par
l’argot et le mauvais français », il fait l’éloge du poète lillois Alexandre
Desrousseaux9 qui « eut le mérite de mettre de l’ordre dans ce magma, et, tout en
maintenant une francisation d’ailleurs irréversible, de valoriser les mots picards
échappés au désastre ». Par contre, Vandendriessche (1928 : 198) relatant
l’histoire de Tourcoing, dit que « le patois était la seule langue parlée jusqu’au
début du 19e siècle et l’unique langue parlée dans les relations de la vie courante
jusque vers 1850 ». Évoquant l’œuvre du plus grand poète picardisant
tourquennois, Jules Watteeuw10, Vandendriessche déclare « que la langue dans
laquelle est écrite cette immense œuvre patoisante n’est pas du tout du français
corrompu ou déformé, c’est la vieille langue d’oïl ou langue romane : un des
rameaux du dialecte picard, c’est l’antique langage de nos aïeux ».
C’est dans cette situation linguistiquement bien différenciée que sont arrivés
de nombreux immigrés belges majoritairement néerlandophones attirés par la
relative prospérité que représentait à l’époque un travail d’ouvrier d’usine.
9 Alexandre Desrousseaux (1820-1892), poète picardisant lillois, connu comme l’auteur du P’tit
Quin’quin.
10 Jules Watteeuw (1849-1947) auteur, originaire de Tourcoing, de nombreux ouvrages en picard.
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suffisante, pour qu’il y ait vers la fin du 19e siècle, affrontements entre bandes de
jeunes d’origine ethnique et de quartiers différents, notamment entre les Flamands
de Wazemmes et les Français du quartier populaire le plus ancien intra muros
Saint Sauveur (Vanneufville, 1997) (Figure 2). Tout porte à croire que les
Français dominaient cette culture jeune à la fois par leur prouesse à la bagarre et
encore plus par le prestige de leur culture.
ß LE TÉMOIGNAGE DE LA DIALECTOLOGIE
Si l’on veut se pencher sur la façon dont les parlers vernaculaires étaient
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maîtrisaient des variétés qu’on ne peut pas ne pas qualifier de français même si
elles contiennent des traits caractéristiques du picard.
ß QUE RESTE-T-IL DE CE CONTACT LINGUISTIQUE ?
La proximité de la Flandre néerlandophone et l’afflux important d’immigrés
de langue flamande a créé une situation de contact linguistique, qui n’a pas été
sans conséquences. Toutefois, c’est dans le domaine lexical que le picard et le
français régional reflètent le mieux l’évolution socio-historique déjà décrite - un
nombre limité, mais non négligeable au cours des siècles suivi d’une
recrudescence d’emprunts vers la fin du 19e siècle dont la plupart se sont avérés
éphémères. Alors qu’il est normal pour une population indigène dominante
d’emprunter des items lexicaux à la langue d’une nouvelle minorité plutôt mal
considérée, il en va tout autrement pour des emprunts structuraux. Qui plus est, les
phénomènes qu’on pourrait de manière plausible attribuer à l’influence du
flamand, peuvent s’expliquer autrement. Prenons l’exemple de l’assourdissement
des consonnes finales, par ex. [tu l mç)t] ‘tout le monde’. Or, il est bien connu
qu’en flamand comme dans d’autres langues germaniques, les consonnes finales
sont systématiquement assourdies. On peut assourdir toutes les consonnes
canoniquement sonores en français et dans le picard et dans le français de la
région, alors que ce trait est moins répandu dans d’autres variétés picardes
(Pooley, 1994) et inconnu en français populaire (Frey 1929 ; Bauche, 1946)).
Certes, dans mon étude de 1994, j’ai constaté parmi les sujets nés dans la première
moitié du 20e siècle des différences significatives entre les taux d’usage des
ouvriers textile et ceux qui avaient travaillé dans d’autres secteurs. L’hypothèse
d’une éventuelle influence flamande est séduisante, mais il est pour le moins
difficile de démontrer que celle-ci s’est exercée par l’intermédiaire directe des
immigrés flamands plutôt que par celui des locuteurs de langue romane
notamment les “in-migrés” des campagnes environnantes et les Belges
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13 Charles Deleporte, ancien président des Veillées Patoisantes de Tourcoing et auteur d’une
description du picard de Lys-lez-Lannoy non encore publiée m’a dit que ce trait permettait de
différencier même les variétés du picard, le r uvulaire étant typique des patois ouvriers alors que le
r apical était indicateur d’un patois paysan.
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t-il, à une banlieusation d’au moins certains quartiers du versant nord-est (Sueur,
1971 ; Delebarre et Le Priol 1993 ; Aziz, 1996).
ß ENQUÊTES SOCIOLINGUISTIQUES
La métropole lilloise a été l’objet de deux enquêtes sociolinguistiques d’une
certaine envergure à la fin des années 1970 (Lefebvre, 1991) et en 1983 (Pooley,
1988 ; 1996). Si les deux études sont convergentes par le fait qu’elles sont presque
entièrement consacrées à la population française « de souche »14, elles divergent
de façon importante dans le choix des informateurs. Lefebvre essaie de couvrir
l’ensemble de la population à la fois sur le plan social (5 niveaux d’études) et
géographique (une douzaine des 87 communes de la CUDL représentées). Le
corpus de Pooley enregistré en 1983 est focalisé sur des personnes domiciliées à
Roubaix et de situation sociale modeste (ouvrier ou petit employé). Les résultats
sont largement concordants sur des points importants : le maintien d’un accent
régional malgré la perte de nombreux traits picards, comme ceux relevés par Viez
et Carton (Section 3).
Pour ce qui est des marques du français régional présentées dans le Tableau
6, Lefebvre et Pooley observent tous les deux que [A] et [aR] sont des variantes
laboviennes classiques : elles sont employées plus par les sujets masculins que les
sujets féminins ; des graphiques de variation stylistique maintes fois dessinés
montrent un emploi plus faible en lecture qu’en conversation spontanée ; même
les taux d’usage correspondant au niveau d’études rentrent largement dans les
limites de la normale variationniste.
Dans une deuxième série d’enquêtes, réalisée entre 1995 et 1999, je me suis
penché sur les éventuelles différences de comportement et de perception entre les
Français12 et les personnes issues de l’immigration. Deux types d’investigation ont
été entrepris : premièrement, une étude de la prononciation des adolescents
fréquentant des établissements scolaires situés dans les zones les plus urbanisées
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14 L’emploi des termes désignant les origines ethnoculturelles est extrêmement délicat. Dans une
première version de ce travail, j’ai employé plusieurs fois le terme « Français de souche » sans
penser à ses connotations politiques. Étant donné le caractère problématique d’autres termes
comme « Franco-Français », « Français d’origine », « Gaulois » et « Blancs », je préfère utiliser
« Français » par opposition à «issu d’une immigration récente». Il s’agit en effet de sujets dont la
famille est française de langue et de culture à l’exclusion de toute autre appartenance
ethnolinguistique - sauf pour le picard bien entendu - depuis au moins trois générations. A titre
d’exemple, les descendants des immigrés belges du 19e siècle, dont les patronymes indiquent les
origines lointaines, seraient par ce critère totalement assimilés.
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Au cours des entretiens, deux séries d’épreuves ont été proposées aux
élèves : premièrement, un test de connaissance de la langue picarde ; et
deuxièmement, un test d’identification de variétés. Le première série de 3 tests
(traduction picard-français ; traduction français-picard ; oral (invitation à dire
quelque chose en picard). Les tests confirment, si besoin était, la très faible vitalité
du picard, le score moyen étant de 22,1%. Par contre, compte tenu du niveau des
résultats, la différence entre les scores des Français et ceux des élèves issus de
l’immigration est significative (p<.01,Tableau 9).
Tableau 9 - Connaissance du picard et l’ethnicité
Français (146) Sujets d’origine étrangère (26)
23.8% 11.7%
Si l’on exclut les scores des élèves d’origine étrangère, ce sont ceux qui
résident dans les zones urbaines qui ont les meilleures connaissances du picard.
Les différences signalées dans le tableau 10 sont significatives (p<.01).
Tableau 10 - Connaissance du picard suivant la zone de résidence
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Les résultats suggèrent que les Français ont plutôt tendance à classer une
variété sous la rubrique du patois ou sous celle de mélange, alors que les étrangers
disent percevoir beaucoup plus comme françaises des variétés que les Français
qualifieraient plus facilement de patois. Il se pourrait que dans la majorité des cas,
la culture d’origine (arabe, italienne) encourageait une plus grande tolérance de la
variation linguistique que la tradition française. Dans un petit nombre de cas, les
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1. Est-ce que tu aimes vivre dans le Nord ? (beaucoup ; assez ; pas trop ; pas du tout)
2. Comment trouves-tu les gens de la région ? (très sympathiques ; sympathiques, pas
très sympathiques ; pas sympathiques du tout).
3. Où est-ce que tu aimerais travailler dans des conditions identiques (Nord ; région
parisienne ; ailleurs en France ; à l’étranger).
1. Pour qui est-ce que tu voterais lors des prochaines élections présidentielles ? (1
point si l’on répond Le Pen)
2. Qu’est-ce que tu penses des gens qui votent Le Pen ? (1 point pour une réaction
approbatrice)
Bien que cet indice Le Pen n’ait montré aucune corrélation significative ni
avec l’emploi des variantes régionales ni avec un score relativement élevé) dans
les épreuves de picard (la plupart diront heureusement), il demeure néanmoins
plausible que certains (jeunes) Français veuillent se différencier de ceux qu’ils
perçoivent comme des étrangers. Se pourrait-il que les Français qui nient toute
connaissance de l’arabe, alors que certains de leurs camarades ont intégré
quelques éléments de cette langue dans leur répertoire linguistique, emploient plus
les variantes régionales que leurs camarades qui montrent une attitude plus
positive à l’égard de cette langue de l’immigration. Si c’était le cas, ce serait une
manifestation à la française de phénomènes déjà documentés par des
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