Perspectiva n2
Perspectiva n2
Perspectiva n2
06.2022 / n° 2
Éditions de l’IHEAL, Directrice de la publication : Camille Goirand
2
Lewis Ampidu CLORMÉUS
Lewis A. Clorméus est sociologue. Il
enseigne à l’Université d’État d’Haïti.
Chercheur associé au Centre d’études en
sciences sociales du religieux (CéSor) de
l’École des hautes études en sciences
sociales (EHESS), il est aussi secrétaire de
la Société haïtienne d’histoire, de
géographie et de géologie (SHHGG). Ses
principales publications portent sur les
rapports entre l’État et les religions en
Haïti (XIXe- XXIe siècles) et l’histoire
intellectuelle de ce pays. Il a notamment
publié : Le vodou haïtien. Entre mythes et
constructions savantes (Riveneuve
Éditions, Paris, 2015) ; Duverneau Trouillot
et le vodou. Réflexions d’un intellectuel
haïtien du XIXe siècle (Les Éditions du
Cidihca, Québec, 2016) ; Le vodou, le prêtre
et l’ethnologue. Retour sur la polémique
Joseph Foisset/ Jacques Roumain, Haïti
(1942) (Maisonneuve & Larose/
Hémisphère, Paris, 2020). 3
XIXe
Leta ak relijyon yo
nan peyi d Ayiti pandan
dezyèm mwatye XIXe
syèk la (1860-1900)
4
RESUMEN
La signature du concordat de 1860 scelle une ère nouvelle dans les rapports entre
l’État et les religions en Haïti. Si des dispositions constitutionnelles consacrent la
liberté religieuse, toutes les religions ne sont pas traitées avec les mêmes
considérations par l’État haïtien. Ce dernier renforce les dispositions pénales contre
le vodou et encourage, de manière asymétrique, l’Église catholique et les cultes
protestants. Sur le terrain, inspirée des initiatives républicaines en vue d’instituer la
laïcité en France et condamnée par l’épiscopat catholique, la franc-maçonnerie
alimente un discours anticlérical qui parvient à influencer de nombreux
gouvernements. Alors que les cultes protestants parviennent difficilement à imposer
leur point de vue sur la scène politique, l’Église catholique investit dans l’éducation et
le caritatif et se présente comme l’instrument salutaire de la civilisation du peuple
haïtien.
PALABRAS CLAVES:
ÉTAT,
ÉGLISE CATHOLIQUE,
CULTES PROTESTANTS,
3 VODOU,
FRANC-MAÇONNERIE,
3 CONCORDAT,
HAÏTI.
5
INTRODUCTION
Durant ces cinquante dernières années, de nombreux essais ont abordé les
rapports entre l’État et les religions en Haïti durant le XIXe siècle haïtien (1804-
1900). La majeure partie de ces publications se focalisent sur la situation de
l’Église catholique et mettent en exergue son influence sur la scène politique
nationale [Nérestant, 1994 ; Hurbon, 2004]. D’autres études portent l’attention sur
le vodou et sa répression par l’État et le clergé catholique [Chiarelotto, 1995 ;
Ramsey, 2011 ; Clorméus, 2014c]. Il faut aussi souligner que deux acteurs
importants sont souvent négligés dans ces travaux, le protestantisme et la franc-
maçonnerie. Cette dernière, si elle n’est pas considérée comme une religion,
assure un rôle déterminant dans la définition de la politique de l’État en matière
religieuse.
Toutefois, étudier les rapports entre l’État et les religions en Haïti comporte
de nombreuses difficultés1. Parmi les plus importantes, il faut mentionner l’accès
aux archives des congrégations catholiques et des missions protestantes
exerçant leur ministère durant cette période. Les archives catholiques sont
dispersées particulièrement entre Haïti et la France2, alors que celles concernant
les cultes protestants se retrouvent surtout en Angleterre et aux États-Unis
d’Amérique. Pour le vodou, on ne dispose que d’écrits produits essentiellement
par des journalistes, des voyageurs, des leaders chrétiens et des politiciens qui
peuvent offrir une idée assez éloignée de la réalité [Clorméus, 2015b]. Aucun
adepte n’a laissé de témoignages sur les rituels observés et les croyances
dominantes. Quant aux ressources maçonniques, ce qu’il en reste est
jalousement conservé dans les loges les plus anciennes et chez des
collectionneurs3. En substance, il s’agit essentiellement de diplômes et quelques
rares numéros de revues maçonniques. Grâce à l’exploitation de fonds
documentaires de la Bibliothèque haïtienne des pères du Saint-Esprit (BHPSE), de
la Bibliothèque haïtienne des frères de l’instruction chrétienne (BHFIC) et de ceux
de la Bibliothèque nationale de France (BNF), cet article entend dégager les
grandes lignes de la politique de l’État haïtien en matière religieuse dans
l’intervalle des années 1860-1900.
1
/ La rédaction de cet article n’aurait pas été possible sans le concours financier de la Fondasyon Konesans ak Libète
(Fokal), de la Fondation Maison des Sciences de l’Homme (FMSH) et de l’université Sorbonne Nouvelle qui m’a permis
de réaliser mes recherches documentaires en France. J’ai bénéficié des bons conseils des membres du Centre de
recherche et de documentation sur les Amériques (Creda) et de l’Institut des hautes études de l’Amérique latine
(IHEAL) où j’ai été accueilli entre septembre et novembre 2021 comme chercheur invité.
2
/ Ces archives sont sous-consultées. Les auteurs s’appuient généralement sur des sources secondaires qui ne
reflètent pas toujours la complexité des rapports entre l’État et les Églises. Dans le cadre de cette recherche, j’ai
essentiellement puisé dans les archives spiritaines (Chevilly-Larue), celles de la Société de Saint-Jacques
(Landivisiau) et des Œuvres pontificales missionnaires (Lyon). Ces archives permettent d’évaluer les principales
difficultés du clergé concordataire sur le terrain (rapport avec l’État, la franc-maçonnerie) et ses réalisations concrètes
dans le domaine de l’éducation. Les archives de l’archidiocèse de Port-au-Prince ont subi des pertes inestimables lors
du séisme du 12 janvier 2010. Pour l’instant, elles ne sont pas consultables en raison de la situation d’insécurité qui
prévaut dans la capitale haïtienne.
3
/
Il n’existe pas, à proprement parler, de centre de documentation sur la franc-maçonnerie haïtienne. Pour le
e
XIX siècle, les informations recueillies proviennent principalement de la Bibliothèque haïtienne des frères de
l’instruction chrétienne (Port-au-Prince).
6
En Haïti, le concordat de 1860 inaugure un nouveau moment dans les
relations entre l’État et les religions. En principe, il aménage, sur une base
consensuelle, un rapport privilégié avec l’État. Mais, dans les faits, l’Église
catholique se heurte à des obstacles qui handicapent ses projets. Elle est
contrariée par l’activisme des cultes protestants et les discours anticléricaux de
la franc-maçonnerie locale qui parviennent à influencer certains gouvernements.
Pour ses rivaux, le clergé concordataire – composé essentiellement de prêtres et
de religieux français – tente de s’ériger en État dans l’État [Caplain, 1904, p. 44].
De son côté, d’une part, l’Église catholique insiste sur sa mission civilisatrice4 et
ses privilèges concordataires pour justifier ses positions dans les débats publics.
D’autre part, elle n’hésite pas à entreprendre une campagne antisuperstitieuse
5 pour atténuer l’influence du vodou et du protestantisme dans la population.
4
/ Au XIXe siècle, en Haïti, le terme de civilisation faisait généralement référence à l’occidentalisation des mœurs par la
religion chrétienne, l’éducation ou les arts.
5
/ Sur la période préconcordataire (1804-1860), cf. Le Ruzic [1912] et Cabon [1933]. Sur la situation du clergé
catholique à la veille de l’indépendance, cf. Étienne [2012].
6
/ Comme l’observe le sociologue et jésuite Kawas François [2009, p. 45], on y trouve une série d’engagements et de
garanties consentis par les deux parties signataires : « reconnaissance et protection des droits inhérents à l’Église,
concessions de l’Église à l’État, concession de l’État à l’Église ».
7
/ Il s’agit de celles du 6 février 1861 et du 17 juin 1862.
7
possibilité de recevoir une solide formation à la française sans devoir traverser
l’Atlantique. Le Petit Séminaire Collège Saint-Martial, fondé en 1865, met en place
un petit musée, une bibliothèque, un corps de sapeurs-pompiers et même un
observatoire météorologique [Delisle, 2004]. L’Institution Saint-Louis de
Gonzague, dirigée par les Frères de l’Instruction Chrétienne [Delisle, 2002], et
l’école des Sœurs de Saint-Joseph de Cluny [Delisle, 2005a] se montrent
particulièrement dynamiques et performantes aux yeux de la haute société de la
capitale. Même si certains préfèrent le Lycée National de Port-au-Prince, la
renommée de ces écoles catholiques dépasse largement celle des
établissements scolaires protestants. En 1903, les Frères de l’Instruction
Chrétienne administrent vingt-deux écoles « avec un personnel enseignant de
cent cinquante frères, directeurs et professeurs, et une population scolaire de
cinq mille élèves environ »8. Pour cette même année, le Petit Séminaire Collège
Saint-Martial dirigé par les spiritains à Port-au-Prince compte 318 élèves placés
sous le contrôle de quinze prêtres et six frères de la même congrégation9. On
comprend, dès lors, que l’investissement de l’Église catholique dans l’éducation
est sa principale carte de visite auprès des notables et des autorités étatiques.
Grâce aux subventions publiques, à la discipline et l’excellence de son corps
enseignant et à ses innovations, elle parvient à éclipser les écoles protestantes,
les lycées et autres initiatives privées qui existent dès la première moitié du
e
XIX siècle.
8
/ « Statistiques comparées 1804-1904 », Le Nouvelliste, jeudi 17 novembre 1903, p. 1.
9
/ Ibid. Au moment du premier centenaire de l’État haïtien, les statistiques de l’instruction publique révèlent l’existence
de 80 écoles congréganistes primaires, 278 écoles nationales primaires laïques, 103 écoles nationales rurales,
152 écoles primaires privées urbaines et rurales, 5 lycées, 8 écoles secondaires auxquels s’ajoutent 5 écoles
supérieures et spéciales. « Statistiques comparées 1804-1904 », Le Nouvelliste, lundi 11 janvier 1904, p. 1-2.
10
/ Comme le constate R. Jalliffier [1889, p. 8], « le personnel enseignant est en minorité dans le Conseil d’instruction
publique ».
11
/ « L’archevêque et les évêques sont reconnus membres de droit, le premier de la commission centrale, les derniers
des commissions principales d’instruction publique de leur localité respective. De même, le curé, dans chaque
paroisse, est reconnu membre de droit de la commission locale d’instruction publique dont les attributions sont
exercées par le Conseil Communal » (article 10) [Léger, 1891, p. 74].
8
catholique le contrôle exclusif du système éducatif. Celle-ci est plutôt appelée, à
travers des structures impliquant des compétences locales, à exprimer ses
préoccupations et ses recommandations aux autorités ministérielles sur les
dossiers relatifs à l’instruction publique (méthodes d’enseignement, discipline
scolaire, manuels pédagogiques). Pour s’en convaincre, on peut se référer à la loi
du 7 décembre 1860 qui dispose que :
« dans chaque ville où il y a un lycée siège une Commission principale de
l’Instruction publique. La direction de l’Instruction publique est confiée dans les
autres villes ou bourgs à des Commissions particulières ou aux Conseils
communaux. (…) Le nombre des membres de la Commission centrale est de
seize, et celui des autres Commissions de huit. Ils sont tous nommés par le
Président d’Haïti » [Vincent et Lhérisson, sd., p. 76-77].
Quoi qu’il en soit, avant même 1860, l’État haïtien exprime un intérêt
particulier pour l’enseignement religieux dans ses écoles. L’article 56 de la loi du
28 décembre 1848 exige des directeurs des écoles de s’entendre « avec le curé
de la paroisse pour tout ce qui concerne l’instruction religieuse des élèves »
[Vincent et Lhérisson, sd., p. 175]. Dans un rapport adressé au président d’Haïti
en date du 21 mars 1861, le secrétaire d’État de l’Instruction Publique confie
ceci :
« J’ai donné des ordres pour que l’éducation morale et religieuse ne soit pas
négligée : ainsi, les élèves des écoles de toutes les villes de la République seront
conduits, une fois par semaine, à l’église de leur paroisse où le curé est tenu de
leur faire un sermon approprié à leur âge et à leur intelligence » [Vincent et
Lhérisson, sd., p. 144].
12
/ Au XVIIIe siècle, on relève l’existence de quelques familles protestantes à Saint-Domingue. C’est en 1816 que le
quaker Étienne de Grellet du Mabillier, dit Stephen Grellet, effectue un bref séjour missionnaire en Haïti. L’année
suivante, des missionnaires méthodistes wesleyens anglais inaugurent leur campagne d’évangélisation et fondent la
première église protestante du pays.
9
rapports avec le Saint-Siège. C’est un pas de plus vers une plus large
reconnaissance de la souveraineté nationale. D’autre part, la poignée de
protestants n’est pas en mesure de négocier un rapport privilégié avec les
autorités publiques. Du point de vue du droit, notamment à travers le Code noir
(1685), la colonisation française a renforcé l’hégémonie de la religion catholique
en interdisant l’exercice public de tout autre culte (article 3)13. La Constitution de
1801, promulguée sous les ordres de Toussaint Louverture à Saint-Domingue, va
dans le même sens : « La religion catholique, apostolique et romaine y est la
seule publiquement professée14 » (article 6). Celle de 1806, dans son article 35,
dispose que la religion catholique « étant celle de tous les Haïtiens, est la religion
de l’État. Elle sera spécialement protégée » [Linstant, 1851, p. 174]. Par la suite,
plusieurs des Constitutions haïtiennes consacrent l’officialité ou la préférence
pour la religion catholique. Il est évident que plusieurs gouvernements ont
cherché à renouer contact avec le Saint-Siège. Parvenir à signer un concordat,
comme le souligne le sénateur Saladin Lamour en 1860, c’est aussi un signe que
l’État haïtien entend soutenir « la propagation de la morale universelle, de la
morale chrétienne » [Dubois, 1867, p. 182]15.
Mais l’Église catholique est bien consciente qu’elle n’est pas la seule à
charmer les Haïtiens. Dès lors, une question la préoccupe : qu’adviendrait-il du
concordat du 28 mars 1860 si un protestant accédait à la présidence d’Haïti ?
Dans les notes additionnelles au concordat, l’émissaire de l’État haïtien informe
le secrétaire d’État et plénipotentiaire du Saint-Siège que dans « le cas où l’un des
successeurs du Président actuel d’Haïti ne professerait pas la religion catholique
(…), le présent Concordat sera modifié quant aux droits qui y sont attribués à un
chef catholique et qui ne pourraient être exercés par un chef professant toute
autre religion » [Léger, 1891, p. 65]. Des années plus tard, conscient du
déséquilibre entre les cultes généré par le concordat, le missionnaire wesleyen
Mark Baker Bird exprime le vœu que les leaders protestants soient « soumis,
comme les ministres de la religion catholique, aux mêmes privilèges par le
Gouvernement »16. Cette proposition arrive au moment même où les tensions
entre l’État haïtien et l’Église catholique dégénèrent. On peut l’interpréter comme
un soutien tacite à la politique du gouvernement en matière religieuse.
Vers la fin du XIXe siècle, on retrouve de nombreux protestants parmi les
plus importantes personnalités savantes, littéraires et politiques du pays.
Certains sont à la fois protestants et francs-maçons et occupent de hautes
fonctions dans l’administration publique et dans le pouvoir politique. Les cultes
protestants s’investissent dans l’éducation et dans le domaine caritatif. Ils ne
disposent pas des mêmes moyens que l’Église catholique pour accomplir leurs
œuvres sociales. De leur côté, tout en privilégiant les intérêts de l’Église
catholique, les autorités étatiques accordent des subventions pour les œuvres
protestantes. En 1892, par exemple, le gouvernement alloue une valeur de
13
/ Le Code Noir, ou recueil des règlements rendus jusqu’à présent, Paris, Chez Prault, 1767, p. 31.
14
/ Constitution de la colonie française de Saint-Domingue, Cap-Français, Chez P. Roux, 1801, p. 2.
15
/ Dans un tel contexte, cette « morale chrétienne » est avant tout celle prônée par l’Église catholique dans un
contexte où il s’agit, pour le gouvernement, de conclure un concordat avec le Saint-Siège.
16
/ Le Moniteur, 22e année, no 34, samedi 24 août 1867, p. 1.
10
130 000 piastres aux cultes. Sur ce montant, 20 000 sont destinées aux églises
protestantes d’Haïti17.
Les moindres gestes et discours des gouvernements sur l’évolution des
groupes protestants sont scrutés à la loupe par la hiérarchie catholique. Comme
le constate l’historien Philippe Deslile, celle-ci « ne peut admettre que le
gouvernement haïtien prodigue les mêmes encouragements à tous les cultes.
Ainsi, les évêques ne manquent jamais de s’indigner lorsque les rapports officiels
présentent les réalisations des confessions rivales de manière trop favorable »
[Delisle, 2003, p. 75]18. En 1880, par exemple, l’évêque du Cap-Haïtien se plaint
ouvertement que « sous le précieux prétexte que les cultes sont libres, en Haïti,
on met officiellement sur le même pied l’Église catholique et les diverses
communions protestantes » [Hillion, 1880, p. 11]. En fait, l’évêque déplore toute
publicité pour une œuvre concurrente. En réaction, certains rapports annuels à
l’Assemblée nationale font silence sur les activités des groupes protestants. En
revanche, certains gouvernements assument clairement leur neutralité en
matière religieuse. En 1875, dans son Exposé sur la situation générale de la
République présenté au Corps législatif, le gouvernement haïtien assure de son
devoir de « maintenir toutes les religions dans leurs limites respectives de
manière qu’elles ne puissent se froisser dans leur fonctionnement ni troubler
l’ordre public19 ». En 1897, le ministre Solon Ménos rappelle que « le Département
des Cultes, naturellement astreint à la neutralité religieuse, ne peut qu’applaudir à
toutes les œuvres qui tendent à affirmer et à hâter le définitif avènement de la
civilisation en Haïti20 ».
17
/ Exposé de la situation de la République d’Haïti. Année 1892, Port-au-Prince, Imprimerie Aug. A. Héraux, 1892, p. 98.
18
/ En 1900, un prêtre catholique n’hésite pas à témoigner de l’intensité de l’engagement missionnaire des
protestants. « Si nous n’avions pas les beautés de notre culte, beaucoup d’entre eux [Ndlr : de nos fidèles] se
rendraient aussi facilement au temple protestant qu’à l’Église catholique. Ah ! Ces chers protestants, comme ils
travaillent ! Leurs succès, trop réels, répondent souvent à leurs efforts. (…) Et dire que nous les connaissons à peine,
et que l’on n’a rien fait jusqu’ici pour découvrir leur puissante organisation ! ». Anonyme, Lettre du 31 mai.
Correspondance Séminaire Saint-Jacques avec l’archevêque de Port-au-Prince. Archives de la Société des prêtres de
Saint-Jacques (Landivisiau). Cote : 3K8A(PP)-1.
19
/ Bulletin des lois, no 6, année 1875, Cayes, Imprimerie Nationale, 1876, p. 169.
20
/ Exposé général de la situation de la République d’Haïti. Année 1897, Port-au-Prince, Imprimerie H. Chauvet et Cie,
1897, p. 75.
11
maçonnique peut enfin lier des relations avec des obédiences étrangères. Dans
ces circonstances, la barrière linguistique et le penchant francophile d’une frange
importante des élites favorisent également un rapprochement avec la franc-
maçonnerie française. Par exemple, en 1866, le Journal des initiés aux principes
et à l’œuvre de la franc-maçonnerie universelle relate l’affiliation à la Respectable
Loge Bonaparte de deux notables haïtiens dont un ancien grand maître – en
l’occurrence l’ex-ministre François-Élie Dubois21. Ce dernier est l’un des
principaux artisans de la signature du concordat en 1860.
Durant la première moitié du XIXe siècle, les loges fleurissent partout en
Haïti. Au début des années 1840, l’abolitionniste français Victor Schœlcher [1843,
p. 217] observe qu’« il n’est pas de petite ville qui ne possède sa loge. Les curés
se font recevoir maçons, tout le monde est maçon ». Il aura recensé pas moins
de vingt-trois loges maçonniques dans le pays. Et il note que le Sénat est
« dérisoirement » considéré comme « la vingt-quatrième loge, parce qu’un des
premiers statuts des francs-maçons est de ne point parler politique dans leurs
réunions. C’est là du reste tout ce que nous avons à dire du Sénat
haïtien ! » [Schœlcher, 1843, p. 217] Il estime aussi que la franc-maçonnerie
haïtienne s’apparente à une société d’hommes « qui s’amusent à des simagrées
bonnes pour les enfants, ou qui fraternisent dans de joyeux festins » [Schœlcher,
1843, p. 217]. En tout cas, les initiés sont toujours des notables qui ont fait un
nom dans le commerce, l’administration publique, la politique, l’armée, la presse,
etc. Depuis 1824, l’institution maçonnique est placée sous la protection du chef
de l’État haïtien22, ce dont on ne connaît pas d’autres exemples au début du
e
XIX siècle.
21
/ Journal des initiés aux principes et à l’œuvre de la franc-maçonnerie universelle, 12e année, 4e série, février 1866,
p. 50-51. François-Élie Dubois, alors ministre d’État, était aussi membre d’honneur de la loge des Amis de la Patrie
dont les origines remontent à 1818 [Pinon, 1881, p. 30].
22
/ L’historien Beaubrun Ardouin rapporte un fait intéressant à signaler. En 1821, à l’ouverture des travaux de la
Chambre des communes, le président haïtien Jean-Pierre Boyer prononce son discours de circonstance. Ensuite, celui-
ci reçoit une accolade du président de ladite chambre en guise de félicitations. Ardouin [1860, p. 77] ajoute que « ce
baiser échangé entre les deux présidents tenait aux usages entre francs-maçons. Boyer était le Grand-Protecteur de
l’Ordre maçonnique en Haïti, le président de la Chambre étant presque toujours franc-maçon comme lui, on agissait
ainsi dans le but de rappeler ces relations fraternelles qui étaient propres à entretenir l’harmonie entre les pouvoirs ».
12
définissent comme des catholiques tout en revendiquant leur qualité
maçonnique. Le père Jean-Baptiste Pascal en est conscient. En avril 1863, il
confie ceci :
« J’ai écrit à M. le Curé de Jérémie pour lui indiquer la ligne de conduite que tenait
gr
M du Cosquer, et celle que nous tenons nous-mêmes tous les jours envers les
Maçons. Nous les admettons aux Sacrements, nous les exhortons vivement à
remplir leurs devoirs de bons chrétiens ; nous voudrions les faire tous participer
aux bienfaits de la pratique religieuse. La plupart meurent munis des sacrements
de l’Église. Nous ne croyons pas que cette Société, telle qu’elle existe du moins à
Port-au-Prince, ressemble en rien à toutes les sociétés secrètes frappées dans
d’autres pays par les foudres des Souverains Pontifes et qui ont juré la
23
destruction des trônes et des autels . »
Alors que le P. Pascal souhaite que Rome soit consultée sur la question,
c’est plutôt un esprit de défiance qui anime ses successeurs. D’abord, ils ne
tolèrent pas l’idée que des insignes maçonniques soient introduites à l’occasion
des messes. Ensuite, ils refusent de célébrer la fête du 24 juin dédiée à Saint-
Jean d’Écosse qui est le patron de la franc-maçonnerie haïtienne. Pour eux, ce
serait une promotion implicite des idéaux maçonniques. Mais, de l’avis du
diplomate anglais Spenser St John, lui-même franc-maçon, le clergé catholique a
commis une grave erreur en s’attaquant à la franc-maçonnerie haïtienne.
« Elle [l’Église catholique] n’a pas senti que cette opposition contre une institution
inoffensive, à Haïti, contribuait plus que toute autre cause à atténuer l’influence
des prêtres sur les classes élevées. Tous ceux qui connaissent la franc-
maçonnerie savent qu’elle ne cherche qu’à favoriser les associations amicales,
dans un but d’aide mutuelle et de charité. L’exercice de ses anciens rites,
mystérieux il est vrai, mais innocents et même puérils, n’était pas digne de lui
attirer l’inimitié d’un clergé sérieux. Les Haïtiens sont fort attachés à cette
institution, à cause de la pompe qu’elle déploie dans les funérailles » [St John,
1886, p. 244].
À partir des années 1880, les conflits entre l’Église catholique et le Grand
Orient d’Haïti prennent de l’ampleur [Clorméus, 2014b]. Les deux parties
s’affrontent sur plusieurs terrains : le mariage, l’éducation et même sur
l’interprétation de certaines clauses du concordat. Les autorités maçonniques
estiment que des prêtres étrangers sont une menace pour la souveraineté
nationale car ils s’immiscent dans les affaires politiques. Il faut donc neutraliser
leur pouvoir en envisageant tous les scénarios possibles dont la dénonciation du
concordat. De son côté, l’Église catholique entend conforter sa position
hégémonique et craint que les offensives anticléricales ne mettent en danger ses
projets. En janvier 1885, l’évêque du Cap-Haïtien publie même une lettre
pastorale relative à l’encyclique Humanum genus du pape Léon XIII, traitant de la
franc-maçonnerie. Il reproche notamment aux initiés de faire partie d’une société
réprouvée par l’Église catholique.
« N’est-ce point un mal d’enchaîner votre liberté, par un serment redoutable, et de
vous engager à obéir à des chefs que vous ne connaissez pas, à suivre un mot
d’ordre, sans savoir de qui il émane ? N’est-ce point un mal de donner votre
sympathie et votre appoint à une société dont les chefs mystérieux travaillent,
malgré vous, à une œuvre anti-chrétienne et anti-sociale ? » [Hillion, 1885, p. 498]
23
/ Archives générales spiritaines [Chevilly-Larue]. 5P1.16a4/110563 : Copies dactylographiées de lettres du P.
Pascal.
13
Personne n’incarne mieux le discours anticlérical que l’intellectuel et
diplomate Louis Joseph Janvier. Protestant, il est aussi un franc-maçon bien
connu pour son engagement contre le racisme. Dans les années 1880, il se
trouve en Europe où il assiste à l’intensification du conflit entre l’État et l’Église
catholique en France. Il reproche à celle-ci d’avoir été complice de l’esclavage
des Noirs, et d’être « responsable de l’abjection dans laquelle la race noire a
croupi pendant des siècles » [Janvier, 1886, p. 286]. Le savant médecin estime
aussi que le catholicisme « peut compromettre, détruire l’œuvre de 1804 :
l’indépendance » [Janvier, 1886, p. 286]. Pour lui, la signature du concordat de
1860 a été une erreur de la part des dirigeants haïtiens qui n’ont pas saisi ce que
le protestantisme aurait pu apporter au pays :
« Les patriotes perspicaces, tous les citoyens qui ont l’esprit scientifique ou qui
seulement sont fiers de la dignité nationale peuvent désirer, doivent appeler de
tous leurs vœux l’avènement d’un protestantisme soit national, quant à l’origine
des prêtres, et hiérarchisé, soit à multiples sectes et sans hiérarchie, quelle que
24
soit, dans ce cas, la nationalité des pasteurs » [Janvier, 1886, p. 285-286] .
Cette observation fait penser à celle de Schœlcher. Il est vrai que des
divisions intestines rongent la franc-maçonnerie [Mentor, 2003, p. 30-55]25, mais
il est difficile de vérifier les allusions de Texier concernant l’esprit festif qui
animerait l’institution. Le second regard est celui du journaliste et politicien
français Paul Vibert qui a l’opportunité de séjourner en Haïti en 1894. Pour lui, la
franc-maçonnerie y est « endormie » car « elle ne montre pas assez d’énergie et
pourtant elle a là un beau rôle à jouer : arracher tout un peuple au fanatisme, à
l’ignorance et à la stupidité des prêtres » [Vibert, 1895, p. 273]. Vibert doit peut-
être penser à ce qui se passe en France où les francs-maçons se battent pour
parvenir à la séparation de l’État et des Églises.
24
/ Plus loin, Janvier [1886, p. 286] assure : « Par pur patriotisme, non pas par prosélytisme d’aucune sorte, chacun
doit se répéter que la religion protestante peut devenir un puissant facteur de développement social en Haïti parce
qu’elle est supérieure au point de vue des résultats économiques et peut être nationale ».
25
/ Même l’écrivain haïtien Justin Bouzon en fait la remarque. Lors d’une conférence publique prononcée en 1892, il
attire l’attention sur une association qui « a animé de l’esprit républicain les générations qui nous ont précédés ; qui a
rapproché les citoyens des différentes classes en atténuant leur antagonisme. (…) Cette société, la plus ancienne
parmi nous, dure encore, malgré ses divisions » [Bouzon, 1893, p. 8].
14
l’autre, d’évaluer leur application par les autorités séculières. L’ensemble des cinq
Constitutions haïtiennes de la deuxième moitié du XIXe siècle reconnaissent la
liberté des cultes. Certaines soulignent même que « tous les cultes sont
également libres26 ». En revanche, ils ne bénéficient pas du même niveau de
protection de la part de l’État. La Constitution de 1867 prévoit qu’« ils reçoivent
de l’État une égale protection » (article 25). Celles de 1874 et de 1888 disposent
néanmoins que les prêtres catholiques employés par le gouvernement jouissent
d’une protection spéciale27. Ce dernier point n’est pas une nouveauté dans la
tradition constitutionnelle haïtienne28. C’est à peu près la même formule que l’on
retrouve dans le premier article du concordat de 1860 : « La religion catholique,
apostolique et romaine, qui est la religion de la majorité des Haïtiens, sera
spécialement protégée, ainsi que ses ministres dans la République d’Haïti, et
jouira des droits et attributs qui lui sont propres » [Léger, 1891, p. 60].
Disposition Constitution
Droit au même degré de liberté pour les cultes 14 juin 1867 (article 25) ; 6 août 1874 (article 30) ;
18 décembre 1879 (article 26)
Droit au même niveau de protection pour les cultes 14 juin 1867 (article 25)
Droit des individus de professer leur religion et 14 juin 1867 (article 25) ; 6 août 1874 (article 30) ;
d’exercer librement leur culte 18 décembre 1879 (article 26)
Assujettissement de la liberté des cultes aux lois 14 juin 1867 (article 25) ; 6 août 1874 (article 30) ;
18 décembre 1879 (article 26)
Détermination de l’étendue de la circonscription 14 juin 1867 (article 27) ; 18 décembre 1879 (article
territoriale des paroisses de l’Église catholique par 28) ; 9 octobre 1889 (article 23)
l’État
Capacité légale de l’État à reconnaître d’autres 14 juin 1867 (article 26) ; 6 août 1874 (article 31) ;
cultes et à autoriser l’établissement d’une église ou 18 décembre 1879 (article 27)
d’un temple
Détermination d’un traitement pour les prêtres 14 juin 1867 (article 27) ; 6 août 1874 (article 32) ;
catholiques canoniquement reconnus 16 décembre 1888 (article 17)
Défense de contraindre un individu à concourir aux 14 juin 1867 (article 28) ; 18 décembre 1879 (article
actes et aux cérémonies d’un culte 29)
Protection spéciale pour les ministres de la religion 6 août 1874 (article 32) ; 16 décembre 1888 (article
catholique 17)
26
/ Voir : Constitutions de 1867 (article 25), de 1874 (article 30), de 1879 (article 26) et 1889 (article 22). Celle du 16
décembre 1888 « consacre et garantit la liberté des cultes » (article 16). Contrairement aux autres, cette charte ne
fournit aucun détail sur l’étendue et les conditions d’exercice de cette liberté.
27
/ Voir : Constitutions de 1874 (article 32) et de 1888 (article 17).
28
/ Par exemple, la Constitution de 1816 dispose que « la religion catholique, apostolique et romaine, étant celle de
tous les Haïtiens et celle de l’État, elle sera spécialement protégée ainsi que ses ministres » (article 48).
15
Dans la Constitution de 1867, il est prévu que les ministres
« canoniquement reconnus reçoivent un traitement fixé par la loi » (article 27).
Cette précision sur le statut particulier de ces prêtres souligne clairement que
l’État haïtien n’établit aucun rapport avec ceux de l’époque schismatique29. Ce
sont ceux qui fonctionnent selon les conditions établies par le concordat qui
pourront bénéficier d’un tel privilège. En revanche, les Constitutions de 1874
(article 32) et de 1888 (article 17) évoquent des prêtres « employés par le
gouvernement ». Enfin, de tels avantages ne sont point évoqués dans les
Constitutions de 1879 et de 1889. Cela ne signifie pas, pour autant, que les
prêtres catholiques n’ont plus droit au soutien financier de l’État. Car, de toute
façon, la convention du 6 février 186130 et les articles 2 et 3 de celle du 17 juin
1862 abordent la question de la subvention que l’État doit accorder aux ministres
de l’Église catholique.
Dans les faits, les rapports entre l’État et l’Église catholique ne sont pas
toujours harmonieux. Ils sont aussi marqués par des moments de méfiance et
d’incompréhension. Ainsi, l’accession à la présidence d’Haïti du général Sylvain
Salnave (1867-1869), lui-même franc-maçon comme la plupart de ces
prédécesseurs, fit trembler l’Église catholique.
« En vertu du fameux principe de la séparation de l’Église et de l’État, principe que
les Noirs appliquent à leur manière, on rompit officiellement tout rapport avec le
clergé, on supprima les bourses du séminaire, on expulsa ou l’on jeta en prison un
certain nombre de prêtres ; puis, de sa propre autorité, le président destitua
l’archevêque, dont la tête fut mise à prix, et qui fut forcé de se réfugier à Rome, où
il mourut de chagrin, en 1869 » [Louvet, 1892, p. 107].
Le 15 janvier 1870, suite à une guerre civile, Salnave est fusillé sur les
ruines fumantes du palais présidentiel. Mais la page de l’anticléricalisme est loin
d’être tournée. L’article 192 de la Constitution du 6 août 1874 porte la marque de
l’hostilité des élites dirigeantes vis-à-vis de l’Église catholique :
« Pour bien concilier les intérêts du peuple avec ceux du culte catholique,
apostolique et romain qu’il professe, le concordat laissant à désirer, le
gouvernement est autorisé à en proposer la modification dans le but de créer, le
plus tôt possible, un clergé national. En attendant, au gouvernement seul est
déféré le droit de délimiter la circonscription territoriale des paroisses et évêchés
et de nommer les administrateurs supérieurs de l’Église en Haïti, lesquels, à
l’avenir, doivent être Haïtiens » [République d’Haïti, 1874, p. 27].
29
/ Cette disposition fait essentiellement référence à la situation de l’Église catholique. Sur les conflits avec les
« prêtres interdits » après 1860, voir Hurbon [2004, p. 162-170].
30
/ Voir l’article 4 de cette convention : « Il sera alloué, sur les fonds du trésor public, un traitement annuel de vingt
mille francs à l’archevêché du Port-au-Prince, et un traitement de douze mille francs à chacun des évêchés du Cap-
Haïtien et des Cayes. Une loi, qui sera soumise à l’approbation des chambres par le gouvernement, fixera ces
traitements, ainsi que les autres allocations concernant le culte catholique » [Léger, 1891, p. 70].
16
« la difficulté, d’une part, de traiter avec un État aux fondations précaires et,
d’autre part, de s’occuper d’un clergé provenant de France qui, très souvent, entre
en conflit avec des citoyens ayant violemment rompu avec la mère patrie et qui
sont noirs ou métis » [Sanfilippo, 2014, p. 220].
31
/ L’anticléricalisme en Haïti est très peu étudié. Cf., à ce sujet, Delisle [2003, 2005b] et Clorméus [2013, 2014b,
2015a].
32
/ En novembre 1874, non sans résignation, le curé de Jean-Rabel confie : « Le gouvernement nous a promis dix-huit
à dix-neuf piastres par mois. Je n’ai pas reçu un centime depuis le mois de janvier. J’ai toutes les peines du monde à
me procurer chaque semaine les quelques pièces de monnaie qui me sont nécessaires pour faire le marché du
samedi. Je cherche depuis plus de six mois à économiser cinq piastres pour m’acheter une misérable paire de
souliers, et je n’ai pas encore pu réussir, mais qu’importe. Mes souliers percés et ma soutane à jour ne scandalisent
personne, je suis comme tout le monde ; ou plutôt, je suis ici, mieux que personne, l’enfant de la Providence » [Delisle,
2003, p. 107].
33
/ En 1875, monseigneur Guilloux confie à l’Œuvre de la propagation de la foi que « nous n’avons par ici, mon
vénérable collègue du Cap-Haïtien et moi, un prêtre pour 10 000 catholiques, c’est vraiment effrayant. En moins de 12
ans, j’ai vu mourir plus de 50 prêtres à mes côtés (sic.) ». Copie d’une lettre de Mgr Guilloux, archevêque du Port-au-
Prince, à la Direction de l’œuvre de la propagation de la foi à Paris, 29 janvier 1875, Archives des œuvres pontificales
missionnaires (Lyon). Cote : F.145 : Haïti (1844-1922).
17
1876 18 2 4 97
1877 14 5 2 104
1878 10 5 6 103
1879 6 11 1 97
1880 17 5 6 103
1881 8 6 1 104
1882 18 10 4 108
1883 8 4 12 100
Total 259 88 71 ---
Source : Anonyme [1994, p. 9]34
34
/ Ce tableau est réalisé par le P. Léon Marion.
35
/ Au ministère des Finances, il a exprimé des réserves sur le mode de gestion de ces prédécesseurs ; ce qui a
suscité l’indignation d’Anténor Firmin, son collègue au sein du cabinet ministériel du président Hyppolite. Voir Firmin
[1892], Péan [1977, p. 127] et Price-Mars [1978, p. 249-252].
18
L’ÉPINEUX PROBLÈME DU VODOU
Au regard des lois haïtiennes du XIXe siècle, le vodou n’est pas reconnu comme
une religion. Sous le gouvernement de Toussaint Louverture, des mesures
d’interdiction ont frappé les danses du vodou sous prétexte qu’elles favorisaient
la paresse et l’ivresse chez les cultivateurs36. Influencés par le droit français du
e
XVIII siècle et la théologie catholique, les premiers gouvernements haïtiens y
voient une forme d’idolâtrie à ranger parmi les superstitions locales à combattre
[Clorméus, 2014c].
En 1823, à l’occasion de la commémoration de l’indépendance nationale,
le colonel Théodore Cupidon, aide-de-camp du président haïtien, prononce un
discours à Grand-Goâve qui exhorte ses concitoyens à s’écarter de « cette
superstition que la vraie religion désapprouve37 ». Il leur recommande de « rejeter
entièrement » les croyances et coutumes religieuses de leurs pères pour
embrasser le christianisme. Rien d’étonnant que des dispositions pénales soient
adoptées en vue d’éradiquer de telles pratiques. Les activités des « gens qui font
le métier de macandals38 » sont considérées des contraventions de police de
troisième classe prévues par le Code pénal de 1826 (articles 406-407)39. D’autres
mesures sont prises en 1835 pour renforcer la lutte contre le vodou.
En 1847, le général Faustin Soulouque accède à la présidence d’Haïti. Deux
ans plus tard, il se fait sacrer empereur. Né dans l’esclavage, ce vétéran de la
guerre de l’Indépendance est sans cesse tourné en dérision par les presses
occidentales. En dépit de ses efforts pour parvenir à la conclusion d’un concordat
avec le Saint-Siège, on retient surtout de lui sa sympathie pour le vodou. Les
récits des voyageurs étrangers portent à croire qu’Haïti plonge dans les ténèbres
de la superstition. Rien d’étonnant que le pasteur suisse R. W. Monsell puisse
écrire :
« Haïti ! C’est une mascarade, une odieuse caricature de la civilisation française ;
(…) On y promène la vierge au son du tambour ; et l’autre jour encore, deux
er
énormes serpents, entretenus et honorés au palais de l’empereur Faustin 1 ,
jouaient le rôle de fétiches de la nation ! » [Monsell, 1860, p. 88-89]
36
/ L’historien Thomas Madiou [1989, p. 36] rapporte que Toussaint Louverture « avait par un arrêté du 4 janvier 1800
(14 Nivôse an 8) proscrit les danses du vaudou, les assemblées nocturnes dans les villes, les bourgs et sur les
habitations » [Ardouin, 1853, p. 154]. Sur la pénalisation du vodou en Haïti, voir Ramsey [2011].
37
/ Le Télégraphe, no 6, 9 février 1823, p. 3.
38
/ Makandal est le nom d’un esclavisé réputé pour sa maîtrise des poisons. Au XIXe siècle, le macandal désigne
quelqu’un qui s’est spécialisé dans les techniques d’empoisonnement.
39
/ Code pénal d’Haïti, Port-au-Prince, Imprimerie du Gouvernement, 1826, p.103.
40
/ Le vodou est désormais associé aux meurtres rituels, au cannibalisme et à la sorcellerie [Clorméus, 2015b].
19
prêtres concordataires41. Quelques mois plus tard, le 27 octobre 1864, une loi est
adoptée en vue de modifier le Code pénal. De nouvelles provisions permettent de
réprimer les pratiques superstitieuses :
« Article 405. Tous faiseurs de ouangas, caprelatas, vaudoux, donpèdre,
macandals et autres sortilèges seront punis de trois à six mois
d’emprisonnement et d’une amende de soixante gourdes à cent cinquante par le
tribunal de simple police ; et en cas de récidive, d’un emprisonnement de six mois
à deux ans et d’une amende de trois cents gourdes à mille gourdes, par le tribunal
correctionnel, sans préjudice des peines plus fortes qu’ils encourraient à raison
des délits ou crimes par eux commis pour préparer ou accomplir leurs maléfices.
Toutes danses et autres pratiques quelconques qui seront de nature à entretenir
dans les populations l’esprit de fétichisme et de superstition seront considérées
comme sortilèges et punies des mêmes peines.
Article 406. Les gens qui font métier de dire la bonne aventure ou de deviner, de
pronostiquer, d’expliquer les songes ou de tirer les cartes, seront punis d’un
emprisonnement de deux mois au moins et de six mois au plus et d’une amende
de cent gourdes à cinq cents gourdes.
Tous individus condamnés pour les délits prévus au présent article et en
l’article 405 subiront leur peine dans les prisons maritimes et seront employés
aux travaux de la marine.
Ils seront, en outre, à l’expiration de leur peine, placés sous la surveillance de la
haute police de l’État pendant deux ans, par le seul fait de leur condamnation.
Article 407. Les instruments, ustensiles et costumes servant ou destinés à servir
aux faits prévus aux deux articles précédents, seront de plus saisis et confisqués,
42
pour être brûlés ou détruits » [Pradine, 1883, p. 185-186].
41
/ Selon l’historien Philippe Delisle [2003, p. 35], « les prêtres français qui se rendent en Haïti découvrent que les
conditions du ministère ne sont pas les mêmes que dans leurs diocèses d’origine. Bien qu’appartenant toujours à une
Église concordataire, ils ont le sentiment de devoir se comporter en missionnaires ».
42
/ Selon le juriste et homme politique haïtien J. Saint-Amand [1890, p. 82], de telles dispositions visent surtout « la
moralisation des populations de la campagne. Personne n’ignore combien sont devenues funestes, et mêmes
criminelles, les pratiques superstitieuses, répandues dans ces populations par une certaine classe d’individus qui
abusent de leur ignorance et de leur crédulité. Dans les délits de ce genre, l’action de l’autorité ne peut être que
répressive ; c’est à l’autorité religieuse secondée par l’instruction, à faire disparaître ces croyances et ces pratiques
superstitieuses et à y substituer les saines doctrines et les admirables préceptes du christianisme ».
20
occasion) a été trouvée dans une pièce, ainsi que les croix sur lesquelles les
noms des membres sont tirés au sort – celui qui est tiré au sort devant jurer de
tuer la première personne qu'il rencontre. La police a également trouvé un autel
sur lequel se trouvait une figure de Jésus-Christ, avec deux couteaux plantés
dans son dos, indiquant l'endroit exact où le "Ñáñigo" doit plonger le couteau
dans le corps de sa victime. Les "Ñáñigos" (…) accomplissent des cérémonies qui
43
ressemblent un peu à celles des adeptes du vodou » .
Au cours des années 1890, l’Église catholique invite les notables du pays
à faire un front commun pour déraciner le vodou. Une Ligue contre le Vaudoux
est constituée de personnalités de la haute société haïtienne en 1896. On y
retrouve des hommes d’État, des intellectuels et même des francs-maçons. C’est
la première campagne antisuperstitieuse répertoriée (1896-1900), mais celle-ci
n’aboutit pas aux résultats escomptés en dépit de l’appui du bras séculier de
l’État [Clorméus, 2019]. Le clergé estime que celui-ci n’a pas agi avec fermeté
dans cette croisade antisuperstitieuse. En 1898, monseigneur François-Marie
Kersuzan, évêque du Cap-Haïtien et principal cerveau de cette initiative, reconnaît
que « beaucoup se plaignent de ce que l’Autorité ne fait pas, avec assez de
vigueur, observer la loi contre les fétichistes » [Kersuzan, 1898, p. 19]. Cette
même année, le président haïtien l’informe qu’il « est toujours dans les mêmes
dispositions pour aider Votre Grandeur dans la lutte qu’elle a entreprise contre le
Vaudou » [Kersuzan, 1898, p. 20]. Mais tout ceci était prévisible. C’est alors un
secret de polichinelle que plusieurs chefs d’État et leurs ministres ainsi que des
hauts gradés de l’armée sont des adeptes occasionnels ou fervents du vodou. Ce
détail n’échappe ni à la presse étrangère44 ni aux diplomates accrédités en
Haïti45. En 1893, un citoyen attire l’attention sur la passivité de « l’autorité militaire
qui, placée dans une commune pour faire exécuter la loi et réprimer le
vagabondage, la superstition, les crimes et les délits, laisse tout faire au
détriment de la communauté »46. Dans un climat d’instabilité politique, mettre
rigoureusement en application les dispositions pénales contre la superstition
risque de susciter la colère populaire. D’ailleurs, la première campagne
antisuperstitieuse prend fin quand les armes ont retenti dans le Nord du pays
pour manifester leur mécontentement face aux actions de l’Église catholique.
CONCLUSION
En somme, l’État haïtien n’observe pas la même attitude vis-à-vis du vodou, du
catholicisme, des cultes protestants et de la franc-maçonnerie. Par rapport au
vodou, le législateur sait qu’il y a une ligne rouge à ne pas franchir. Il s’agit de sa
reconnaissance comme religion. Au regard de la loi et de la théologie catholique,
43
/ Voir « Cuba. Arrest of One Hundred and Fifty Members of a Secret Society », The New York Times, 16 mars 1876,
p. 5.
44
/ En 1888, un article du New York Times relate qu’ “allégation est faite et largement acceptée selon laquelle le
Président Salomon est adepte du Vaudou et qu’il entretient un prêtre vaudou à sa residence”, « Events in Hayti », The
New York Times, 28 juillet 1888, p. 8.
45
/ Le diplomate français Léon-Eugène-Aubin Coullard-Descos confie qu’aux alentours de la capitale, particulièrement
à la Petite Plaine, se trouvent des houmforts (temples vodou) réputés. Les papalois (prêtres du vodou) « y comptent
moins sur leur clientèle locale que sur les gens de Port-au-Prince, sceptiques de leur nature et pratiquant sans
régularité, mais ramenés de temps à autre par un retour d’atavisme africain. Je n’ai pas eu la bonne fortune de faire,
au bourg de la Croix-des-Missions, la connaissance de M. Durolien, qui fut le papaloi de confiance du président
Hippolyte » [Aubin, 1910, p. 56].
46
/ J. B., « Père savane », Le Réveil, no 44, 30 septembre 1893, p. 3.
21
le vodou est une superstition, c’est-à-dire un égarement spirituel pouvant
occasionner des préjudices à la société. Cela justifie, en partie, le durcissement
de l’attitude de l’État et de l’Église catholique à l’égard de ses adeptes. Mais, dans
la réalité, les offensives gouvernementales contre le vodou sont menées dans
des circonstances bien précises. Elles sont occasionnées généralement par des
scandales qui choquent l’opinion publique, comme l’affaire Claircine en 1864.
Elles répondent ainsi à un besoin de civilisation exprimé par une frange des élites
urbaines convaincues de la supériorité des valeurs occidentales et du
christianisme et outrées par une littérature dénigrante qui, à leur sens, fait de
tous les Haïtiens des « sauvages » sous l’emprise du vodou. Car, pour leur part,
Haïti est une « France noire » – formule chère à l’historien français Jules
Michelet – notamment aux plans spirituel et intellectuel.
En dépit des tensions répétées avec le clergé concordataire, l’État haïtien
est persuadé de la nécessité de lui accorder un traitement spécial et de favoriser
son ministère. Depuis 1860, l’Église catholique est un acteur important dans le
milieu éducatif et dans la lutte contre la superstition. En même temps, les
gouvernements haïtiens n’ignorent pas les avantages qu’ils peuvent tirer de ses
relations avec le Saint-Siège. À la fin du XIXe siècle, sous le pontificat de Léon XIII
(1878-1903), la diplomatie vaticane est sollicitée pour arbitrer différents conflits
interétatiques. C’est le cas, par exemple, de l’affaire des frontières haïtiano-
dominicaines en 1895 [Delorme, 1895]47. De telles médiations sont « un
indicateur de l’audience de l’autorité du Saint-Siège à laquelle les États ont
recours, confiants dans son impartialité » [D’Onorio, 1997, p. 515]. En 1901, l’État
haïtien figure parmi les vingt et un États à entretenir des relations diplomatiques
avec le Saint-Siège [D’Onorio, 1997, p. 514]48.
Les Constitutions haïtiennes de la deuxième moitié du XIXe siècle
garantissent la liberté religieuse. Certaines prévoient même la possibilité de
reconnaître de nouveaux cultes. Sur cette base, le protestantisme s’est diversifié
et a continué ses activités d’évangélisation dans différents points du pays.
Comparativement à l’Église catholique, il est un acteur moins important dans le
milieu éducatif haïtien. À la fin du siècle, les principales Églises protestantes
reçoivent un financement public pour appuyer leurs œuvres de civilisation. Leur
moindre action est surveillée par le clergé concordataire qui y voit un ennemi
déterminé à saper ses projets. Au mépris des garanties de la Constitution de
1889 en matière de liberté des cultes, la première campagne antisuperstitieuse
n’a pas épargné les protestants car, du point de vue de la hiérarchie catholique,
ceux-ci représentent une menace à leurs intérêts immédiats.
Enfin, si la franc-maçonnerie n’est pas une religion, elle a une influence
importante dans les rapports entre l’État et les religions en Haïti tout au cours du
e
XIX siècle. Après la chute du gouvernement de Geffrard en 1867, elle contribue à
alimenter des discours anticléricaux. Au cours des années 1880, les conflits
entre le Grand Orient d’Haïti et l’Église catholique se multiplient. Bien qu’affaiblie
par les dissensions internes, la franc-maçonnerie haïtienne n’a raté aucune
occasion pour rappeler l’importance de la liberté des cultes et la nécessité de la
neutralité des prêtres étrangers en matière politique.
47
/ Arbitrage du Très Saint-Père le Pape entre la République d’Haïti et la République Dominicaine sur l’interprétation de
l’Article 4 du Traité du 9 novembre 1874 passé entre les deux Républiques. Mémoire de la République d’Haïti (1896),
Paris, Société Anonyme de l’Imprimerie J. Kugelmann. Cf. aussi Ticchi [1998, p.183-202].
48
/ Parmi les autres États, on peut citer la France, l’Argentine, l’Espagne, le Portugal, la Belgique, la Bolivie, le Brésil, la
Colombie, le Costa Rica, l’Équateur, le Honduras, la République Dominicaine, la Russie et le Pérou.
22
En fin de compte, au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, l’État haïtien ne
parvient pas à s’affranchir du pouvoir religieux. Les religions chrétiennes sont
perçues par les élites locales comme des institutions civilisatrices et de
potentiels partenaires pour le développement de l’éducation nationale. De ce fait,
dans la mesure du possible, il est essentiel d’entretenir un climat favorable au
respect de la liberté des cultes. Néanmoins, l’influence politique de l’Église
catholique et son ambition hégémonique ne facilitent pas une coexistence
harmonieuse avec les cultes protestants. Comment préserver l’autorité de l’État
quand la religion privilégiée est desservie par un clergé essentiellement recruté
au sein de l’ancienne métropole ? Comment garantir pleinement la liberté de
conscience et la collaboration avec les groupes religieux minoritaires et la franc-
maçonnerie sans mettre en péril les différents accords signés avec l’Église
catholique ? Ces préoccupations ont rendu nécessaire, à maintes reprises, la
redéfinition de la politique de l’État haïtien en matière religieuse au risque de
froisser les intérêts de l’institution religieuse dominante.
Texte reçu en mars 2022
Références
Sources
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de lettres du P. Pascal.
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