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Valoriser la recherche par l’expérimentation en entreprise

Cas du modèle de management socio-économique


Henri Savall, Véronique Zardet, Marc Bonnet, Laurent Cappelletti
Dans Revue française de gestion 2019/7 (N° 284), pages 149 à 169
Éditions Lavoisier
ISSN 0338-4551
ISBN 9782746249134
DOI 10.3166/rfg.2019.00373
© Lavoisier | Téléchargé le 21/11/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.171.114.93)

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DOSSIER
HENRI SAVALL
VÉRONIQUE ZARDET
MARC BONNET
iaelyon, université Jean Moulin & ISEOR
LAURENT CAPPELLETTI
Conservatoire national des arts et métiers,
LIRSA & ISEOR

Valoriser la recherche
par l’expérimentation
en entreprise
Cas du modèle de management
socio-économique
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Pour apporter des réponses à la question de la valorisation
managériale des recherches en gestion, l’article explore
l’exemple du modèle de management socio-économique. En
effet, ce modèle expérimenté dans 2 000 organisations depuis
1974 a précisément pour objet, au moyen de la méthode
scientifique dénommée recherche-intervention qualimétrique,
de fabriquer des produits d’intention scientifique socialement
utiles aux entreprises et aux organisations. L’article décrypte les
principes théoriques et épistémologiques de ce modèle, son
processus, la méthode de recherche-intervention employée et
des résultats significatifs de valorisation de la recherche.

DOI: 10.3166/rfg.2019.00373 © 2019 Lavoisier


150 Revue française de gestion – N° 284/2019

D
e quoi la valorisation managériale certain degré de généralisation à d’autres
de la recherche en gestion est-elle cas). C’est cette dialectique entre le contin-
le nom ? Pourquoi devient-elle un gent et le générique qui fonde principale-
enjeu existentiel pour cette recherche elle- ment, à nos yeux, la valeur ajoutée
même ? C’est au fond, ces deux questions scientifique de ce modèle de recherche-
que l’article traite à partir de l’exemple du intervention. Pour l’illustrer, l’article propose
modèle de management socio-économique quelques principaux résultats de valorisation
appliqué dans 2 000 entreprises et organi- managériale du modèle de management
sations depuis 1974 dans 45 pays différents socio-économique. Enfin, l’article révèle ce
(Savall et Zardet, 2015, 2017). Nous qui fait, selon nous, la réussite de la
reprenons la définition de la valorisation valorisation managériale dans une recherche
managériale donnée par Verstraete et en gestion, à savoir son épistémologie
Philippart dans l’appel à contribution à ce intégrée qui permet de positionner sur un
dossier et l’article introductif tant elle nous même continuum les connaissances produi-
apparaît claire et peu contestable : « un tes pour l’enseignement, pour la recherche
produit de la recherche est valorisé, lorsque académique et les organisations.
les publics auxquels il se réfère l’emploient.
Autrement dit, le produit ne sera pas valorisé
I – SOURCES CONCEPTUELLES ET
tant qu’il n’est pas mobilisé pour raisonner et
THÉORIQUES DU MODÈLE
agir ». On comprend donc qu’une recherche
SOCIO-ÉCONOMIQUE
en gestion qui ne serait valorisée qu’acadé-
miquement et n’aurait aucun impact pour son Cette partie permettra aux lecteurs de
public professionnel (les entreprises et les comprendre la genèse du modèle de
organisations), pose gravement la question management socio-économique (en abrégé
de son utilité sociétale et, partant de sa
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MMSE). Celui-ci est né d’une double
viabilité en tant que science. Pour montrer influence : d’un point de vue méthodolo-
comment le modèle de management socio- gique, il se rattache au courant de la
économique valorise les produits de la recherche-action, dont il s’est vite différen-
recherche au plan managérial, l’article cié en construisant une méthode de recher-
positionne, tout d’abord, les soubassements che-intervention résolument transformative.
théoriques de ce modèle, dans un essai D’un point de vue théorique, ses fondements
d’explicitation de ses conceptualisations se trouvent à la fois dans une réfutation des
implicitement normatives (Perroux, 1970). modèles macro-économiques (Savall, 1973,
Puis, l’article décrit le véhicule scientifique 2018) et dans un intérêt pour les courants
du modèle, la recherche-intervention quali- psychosociologiques de gestion des ressour-
métrique, son processus et son protocole, de ces humaines de la seconde moitié du 20e
l’émergence de la demande de l’organisation siècle. En effet, Henri Savall, créateur du
étudiée à l’évaluation des résultats. En modèle de management socio-économique a
particulier, il explique en quoi les résultats eu une formation multidisciplinaire. Ces
relèvent simultanément d’une valorisation soubassements théoriques ainsi que la
managériale contingente (valable à l’échelle conception et la pratique d’une méthode de
du cas étudié) et générique (présentant un recherche-intervention déployée dans les
Valoriser la recherche par l’expérimentation 151

entreprises et les organisations ont débouché Créée dans les années 1970, la recherche-
sur la création progressive d’un modèle de intervention se différencie de la recherche-
management dit socio-économique. action par la détermination des chercheurs
d’accompagner l’entreprise dans un pro-
cessus de transformation délibérée. L’inter-
1. De la recherche-action et l’approche
venant-chercheur est impliqué dans un
sociotechnique à la recherche-
projet organisationnel, sans abandonner
intervention et l’approche socio-
son identité académique, son éthique et
économique
son projet de recherche. Il est immergé dans
L’Europe est connue pour une grande l’organisation, sans volonté de neutralité ni
diversité d’approches qualitatives dans la de soi-disant objectivité (Moisdon, 2010). Il
recherche en management ou en études interagit avec une grande variété d’acteurs,
organisationnelles. La recherche-action est alternant ses positions « géopolitiques »
ainsi reconnue pour avoir réduit la distance (Savall et Zardet, 2004, 2011). Les acteurs
entre chercheurs et praticiens et développé de l’entreprise, savants ordinaires selon
une recherche utile. l’expression avisée de Girin (1989), sont
Les principes de la recherche-action, en interactivité cognitive avec les cher-
d’abord énoncés par Lewin (Lewin, cheurs (Savall et Zardet, 1996). Ils jouent
1946), se basent sur des relations collabo- différents rôles : coproducteurs de connais-
ratives entre chercheurs et acteurs de sances, contributeurs et apporteurs d’infor-
l’entreprise pour résoudre simultanément mation, co-évaluateurs de la recherche et
des problèmes observés et générer de la expérimentateurs des connaissances en tant
connaissance nouvelle (Rapoport, 1970 ; qu’utilisateurs finaux.
Coghlan, 2011). La recherche-action s’est Une très brève histoire du développement
de la recherche-intervention permet de
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ensuite développée, dans les cadres de la
théorie du développement organisationnel comprendre que cette dernière s’est déve-
et de l’approche des systèmes sociotechni- loppée en France, il y a à peine 50 ans, à
ques, notamment par le Tavistock Institute l’initiative d’écoles d’ingénieurs. Elle s’est
en Grande-Bretagne, les travaux sur la développée lentement, avec la création, en
démocratie au travail en Scandinavie et 1967, des équipes du centre de gestion
ceux de Habermas (Reason et Bradbury, scientifique de l’École des mines de Paris
2001). Étroitement liée à l’approche socio- par Claude Riveline (Moisdon, 1984 ;
technique, la recherche-action vise à Hatchuel et Molet, 1986 ; David, 2000) et
conduire des observations en profondeur, du Centre de recherche en gestion de l’École
en proximité des situations de travail polytechnique par Collomb en 1972, puis
(Savall, 1975, 2010). Néanmoins, la notion Michel Berry et Jacques Girin. L’Institut de
d’engagement des chercheurs pour changer socio-économie des entreprises et des
explicitement les pratiques de gestion est organisations (ISEOR) est né à la même
ambiguë. De fait, cette méthode a produit époque, en 1975, avec le double parrainage
des connaissances contextualisées et contin- de l’École supérieure de Commerce de Lyon
gentes, sans objectif de création de connais- (EM Lyon) et de l’université Lumière.
sances génériques reproductibles. Toutefois, ces trois initiatives relevaient
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de projets différents. Le CGS et le CRG car un terrain de recherche fait émerger de


visaient à développer la recherche en multiples problématiques dont chacune peut
management dans les grandes écoles d’in- donner lieu à une publication spécifique.
génieurs. L’ISEOR souhaitait créer une L’obstacle à surmonter est que l’approche
théorie innovante dûment expérimentée, holistique de l’entreprise favorisée par une
intégrant des variables économiques et recherche-intervention longitudinale n’est
sociales pour rechercher, avec les entre- pas aisément compatible avec les usages des
prises, des leviers d’amélioration de leur évaluateurs de revues académiques, dont la
performance socio-économique durable. plupart attendent plutôt des questions de
Les principales convergences méthodologi- recherche pointues. Des enseignants-cher-
ques portent sur l’importance que ces trois cheurs du courant recherche-intervention
équipes accordent à l’observation scienti- participent désormais aux instances d’éva-
fique directe et approfondie des situations de luation de la recherche doctorale et post-
gestion. Ce courant méthodologique s’est doctorale et de recrutement des enseignants-
développé depuis 50 ans, mais il n’a inspiré chercheurs. L’acceptation de cette approche
que 10 % environ des recherches doctorales méthodologique s’accroît dans les instances
en France d’après l’Observatoire des thèses universitaires, davantage, semble-t-il, qu’au
de la Fnege (site www.fnege.org). CNRS.
La recherche-intervention se caractérise par Sous la réduction des financements publics,
une présence intermittente régulière des des incitations sont adressées pour déve-
chercheurs au sein de l’organisation, lopper la recherche contractuelle et les
comportant une stratégie de recherche chaires d’entreprise, ce qui conforte l’intérêt
explicite et une co-construction de connais- institutionnel de la recherche-intervention.
sances innovantes avec les acteurs-expéri- Ainsi un séminaire de formation organisé
mentateurs. Le travail en équipe de par la Fnege depuis trois ans « Recherche-
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chercheurs sur un même terrain de recher- intervention : de la conceptualisation à la
che favorise l’apprentissage et le dévelop- publication » s’est révélé très attractif tant
pement de leurs compétences. Des pour des doctorants que des enseignants-
entreprises pionnières s’engagent dans des chercheurs et a donné lieu à la publication
programmes de recherche-intervention qui aux États-Unis de deux ouvrages, en anglais
se différencient clairement des missions et en français (Buono et al., 2018).
usuelles de cabinets conseil. Une condition
du rapprochement entre praticiens et cher-
2. La valorisation de la recherche en
cheurs est d’identifier ensemble une pro-
sciences de gestion : une dimension qui
blématique managériale originale, à la fois
mérite de se développer
contingente et générique, pour définir des
objectifs et une méthodologie de recherche, Durant les années 1980, différentes mani-
pertinents pour les deux parties (Plane, festations avaient permis de croire à une
2000 ; Jönsson et Lukka, 2005 ; Lukka et renaissance de la recherche en gestion
Vinnari, 2017). (Rapport Percerou, 1982 ; Assises
Il s’est avéré que la publication n’est pas AFCET-CESTA, 1982 ; rapport Moisdon
plus difficile pour un intervenant-chercheur, 1983 ; Journées Fnege-Iséor 1984 à 1986).
Valoriser la recherche par l’expérimentation 153

La question de la valorisation de la une vingtaine d’années, des chercheurs,


recherche n’est donc pas une thématique principalement anglo-saxons, ont souligné
nouvelle. (Savall, 1974, 1979, 1984, le fossé grandissant entre les thématiques
1986a, 986b, 1998 ; Savall et Zardet, traitées par les chercheurs et les besoins
1985). L’expression aujourd’hui répandue avérés des organisations et des entreprises.
d’ingénierie du management fut ainsi Le fossé entre théorie et pratique, mis en
publiée dès la fin des années 1980 (Savall, évidence par Van de Ven et Johnson (2006),
1989). a débouché sur la proposition de la figure de
Toutefois, force est de constater le déficit l’enseignant-chercheur engagé (« Engaged
persistant de crédibilité des sciences socia- Scholarship »). Elle vise à renforcer la
les, économiques et de gestion, alimenté par pertinence des recherches en management
une controverse sur leur nature, supposée et à faire progresser les connaissances.
différente, des sciences de la vie et de la Tushman et O’Reilly (2007) considèrent
nature. Nous n’adhérons pas à cette thèse que les chercheurs en management doivent
d’une différence supposée consubstantielle produire des travaux à la fois rigoureux et
aux sciences humaines et sociales. En effet, pertinents socialement, à l’instar d’autres
le caractère vivant et évolutif de l’objet de disciplines. Or, ce critère de pertinence
recherche, souvent mis en avant dans les implique que les chercheurs traitent de
sciences humaines et sociales, s’observe problématiques ancrées dans les entreprises
aussi dans de nombreuses sciences de la vie et leur environnement (Cappelletti, 2007).
et de la nature. Certes des différences Il y a près d’un siècle et demi, Louis Pasteur
peuvent être mises en évidence. Mais nos avait réfuté la dichotomie entre recherche
options méthodologiques et conceptuelles fondamentale et appliquée et posé les
nous ont conduits à recourir à l’approche fondations de la microbiologie. Les décen-
expérimentale qui s’est imposée en méde- nies qui ont suivi ses travaux lui ont donné
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cine et a permis des progrès considérables. raison. La technologie n’a cessé de se
Elle consiste à observer la situation initiale, développer en intégrant les connaissances
identifier le protocole et les « solutions » scientifiques et la science n’a pas manqué
prescrites, appliquer le traitement aux d’utiliser la technologie pour définir ses
patients, avant d’en évaluer les effets et protocoles d’investigation et faire face aux
de valider ainsi des hypothèses par l’expé- besoins formulés par la société. Stockes
rimentation. Notre objectif fut, dans le (1977) a formalisé dans le cadran de Pasteur
même esprit, de valider par des méthodes cette double tension scientifique entre,
de recherche transformatives et, partant, d’une part, compréhension et pratique et,
longitudinales, des transformations qui d’autre part, recherche fondamentale et
permettent de révéler certaines propriétés appliquée ; tension qu’il invite à remettre
profondes de l’objet étudié, ainsi que leurs en question. L’« evidence-based research »
impacts sur l’entreprise ou l’organisation. issue de la recherche en médecine a aussi été
Nous proposons, et cela fait/fera proba- mobilisée pour impulser ce renouveau
blement débat, de privilégier l’utilité des méthodologique en sciences de gestion,
sciences sociales, comme substitut à la davantage orienté vers la réponse à des
notion fragile de vérité scientifique. Depuis besoins sociétaux (Sackett et al., 1996).
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L’Academy of Management, association II – EXPÉRIMENTATION DU


internationale en sciences du management MODÈLE DE MANAGEMENT
regroupant 22 000 membres, a créé il y a SOCIO-ÉCONOMIQUE
quelques années le groupe Practice Theme
Le modèle de management socio-écono-
Committee, visant à développer l’utilité
mique (MMSE) vise à aider les organisa-
sociétale des recherches (site www.ptc-aom.
tions à améliorer durablement leurs
com).
performances socio-économiques et, simul-
En France, l’initiative du baromètre de la
tanément, à créer des connaissances qui
Fnege (2013) confirme le fossé entre les
vont servir à la construction théorique. Ce
besoins des entreprises et les recherches en
modèle intègre donc une valorisation
sciences de gestion (Dubois et al., 2016). La
managériale et une valorisation scientifique
responsabilité sociale conjointe du cher-
sur un continuum, alors qu’elles sont
cheur et de l’université est ainsi convoquée.
classiquement séparées. Il utilise comme
La Science citoyenne selon Aristote (384-
véhicule scientifique la recherche-interven-
322 av J.-C., voir Bezevengui, 1989) aurait-
tion qualimétrique (RIQ). MMSE et RIQ
elle été négligée ? En effet, l’évaluation des
sont les deux faces d’une même pièce que
impacts de la recherche peut se faire volens
nous qualifions de consultance scientifique.
nolens selon deux approches opposées,
Pour permettre ce continuum du scientifique
l’une relevant d’une sorte de positivisme
au managérial, du fondamental à l’appliqué,
où le chercheur se place à l’extérieur des
le MMSE s’appuie sur des principes de
phénomènes étudiés, l’autre du constructi-
négociation, de déploiement et d’évaluation
visme générique (Savall et Zardet, 1995,
génériques réplicables.
2004 [2011] ; Bonnet, 2014). La première
évalue les impacts en « circuit fermé » : les
chercheurs parlent, en quelque sorte, aux
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1. La négociation fait partie intégrante
chercheurs. La deuxième propose d’évaluer
du processus d’intervention
les impacts en « circuit ouvert » : les
chercheurs s’adressent aux chercheurs ainsi La négociation rigoureuse d’une interven-
qu’aux autres acteurs, utilisateurs potentiels tion contribue à la validité des résultats de la
légitimes des résultats de recherche : diri- recherche, selon un processus rigoureux en
geants, salariés, syndicats, citoyens pro- trois étapes. Un premier rendez-vous
ducteurs et consommateurs. d’écoute des besoins de l’organisation-
Nous suggérons donc de développer, aussi, cliente, un deuxième pour présenter les
les recherches cumulatives qui permettent méthodes et prestations proposées, puis un
de construire un continuum entre recherche troisième pour négocier le budget de la
fondamentale et recherche appliquée, de recherche-intervention. Tant qu’il n’y a pas
passer d’une recherche, au fond, contem- d’accord de l’organisation sur la proposition
plative des phénomènes à une recherche de contenu et de déroulement de la
transformative (Harendt, 1994), où l’expé- recherche-intervention, il est vain de s’en-
rimentation constitue un mode de validation gager dans un débat sur son budget. La
reconnu, à la façon des sciences de la vie et convention d’intervention formalise les
de la nature. éléments-clés discutés lors de la
Valoriser la recherche par l’expérimentation 155

négociation : objectifs de l’organisation, acteurs d’une organisation. Deux modules


méthodes et prestations de l’intervenant- le composent : qualitatif puis quantitatif et
chercheur pour les atteindre, architecture, financier :
planning, annexe financière et échéancier de – Le module qualitatif : les dysfonctionne-
règlement. Le pilotage de la convention ments sont identifiés lors d’entretiens avec
durant l’intervention consiste à respecter les la direction et l’encadrement, ainsi qu’au
moyens et dispositifs énoncés. C’est pour- moins 30 % du personnel des secteurs
quoi son contenu est systématiquement mis diagnostiqués.
à l’ordre du jour des comités de pilotage qui – Le module quantitatif et financier : pour
réunissent l’intervenant et l’organisation calculer les coûts cachés des dysfonction-
étudiée. La convention d’intervention nements, « cachés » car ils ne sont pas, ou
constitue un véritable cahier des charges mal pris en compte par la comptabilité, des
et un guide tout au long de la recherche- entretiens complémentaires sont menés
intervention, qui peut faire l’objet d’amen- auprès de l’encadrement, afin d’évaluer
dements négociés (Buono et al., 2018). les impacts économiques des dysfonction-
nements au moyen de cinq indicateurs :
l’absentéisme, les accidents du travail et les
2. Le déploiement du MMSE dans
maladies professionnelles, la rotation inap-
l’organisation
propriée du personnel, les défauts de qualité
Le déploiement du MMSE se fait selon trois et les écarts de productivité directe (ou sous
axes qui permettent d’organiser le traite- efficacité).
ment des besoins managériaux exprimés par Le diagnostic ainsi réalisé, par une méthode
l’organisation étudiée et sont formalisés d’analyse de contenu supportée par un
dans la convention d’intervention (Savall et logiciel système-expert créé par l’ISEOR,
Zardet, 1987 [2015]). est ensuite présenté aux personnes inter-
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viewées, dans une séance appelée « effet-
miroir », pour valider collectivement les
Les trois axes de déploiement du MMSE
dysfonctionnements et les coûts cachés
L’axe politique vise à stimuler les décisions identifiés. Le diagnostic sert de plateforme
politiques et stratégiques de la direction de de travail au groupe de projet socio-
l’entreprise concernant le management et la économique. Son rôle est d’inventer de
négociation de ses objectifs avec les acteurs. nouvelles pratiques pour réduire les dys-
Un groupe de pilotage se réunit périodi- fonctionnements et convertir les coûts
quement, conduit par la direction de cachés en performances. Une fois mises
l’entreprise. en œuvre, les solutions sont évaluées pour
L’axe processus de résolutions de problè- mesurer la réduction des dysfonctionne-
mes stimule une dynamique de changement ments et le recyclage des coûts cachés en
et se compose de quatre étapes : diagnostic création de valeur ajoutée (cf. ci-après
socio-économique, groupe de projet, mise section III.1).
en œuvre de solutions d’amélioration et L’axe outils correspond à des outils de
évaluation. Le diagnostic se centre sur les management co-construits avec tous les
dysfonctionnements qui perturbent les managers de l’entreprise. Ils sont au nombre
156 Revue française de gestion – N° 284/2019

de six pour instrumenter les six domaines repose sur le principe de « décentralisation
considérés comme cruciaux de la perfor- synchronisée », selon lequel tous les mana-
mance socio-économique et construire une gers utilisent ses outils dans leur périmètre
cohérence managériale : la gestion du d’action (décentralisation), dans un dispo-
temps, la grille de compétences, le tableau sitif d’orchestration par la direction de
de bord de pilotage, le plan d’actions l’entreprise (synchronisation).
stratégiques internes et externes, le plan Ces caractéristiques distinguent le MMSE
d’actions prioritaires et le contrat d’activité d’autres méthodes globales de management
périodiquement négociable. telles que le Lean Management, Six Sygma
ou le Balanced Scorecard (Buono et al.,
2018). De façon très synthétique, le MMSE
Un déploiement conciliant la
comporte des instruments de mesure finan-
performance économique et la
cière structurée d’aide à la décision, tels que
performance sociale
des balances économiques de projets et la
Le MMSE repose sur trois grands mise en place d’un indicateur synthétique
principes : global, la contribution horaire à la valeur
Il est déployé grâce à une recherche- ajoutée sur coûts variables (CHVACV). Il
intervention qualimétrique, collectant des intègre aussi des principes et des outils de
données alternativement qualitatives, quan- management des personnes, de développe-
titatives et financières et fondée sur l’ob- ment professionnel et de valorisation du
servation des pratiques concrètes de potentiel humain. De ce fait, il se situe
management. C’est donc une méthode explicitement à l’interface des disciplines du
réplicable reposant sur des principes d’in- contrôle de gestion, de la gestion des
tention scientifique. ressources humaines, du développement
marketing et commercial, de la gestion de
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Il repose sur l’hypothèse que la performance
durable d’une entreprise dépend à la fois de production et des technologies. Cela en fait
sa performance sociale, c’est-à-dire la un modèle de management stratégique.
satisfaction des salariés et des parties
prenantes et de sa performance économique.
III – ÉVALUATION ET
C’est pourquoi il vise à créer de la valeur en
PUBLICATION DES IMPACTS DE
stimulant le dialogue professionnel et la
LA RECHERCHE SUR LES
coopération entre les acteurs.
PRATIQUES DE GESTION
Il repose sur la théorie des coûts-perfor-
mances cachés qui évalue les conséquences La valeur ajoutée scientifique du modèle de
économiques des dysfonctionnements, les- management socio-économique au regard
quels sont généralement négligés dans les de modèles alternatifs de recherche, réside,
systèmes d’information comptables usuels selon nous, dans la double valorisation
(Savall et al., 2000, 2008). managériale qu’il permet. Une valorisation
La durée moyenne de déploiement du contingente d’une part, en permettant de
MMSE est de six à dix mois dans les répondre à des demandes locales et contex-
entreprises de moins de 100 salariés, et de tuelles d’entreprises et d’organisations. Une
dix à quinze mois au-delà. Son déploiement valorisation générique d’autre part, c’est-à-
Valoriser la recherche par l’expérimentation 157

dire des connaissances relativement stables préserver la comparabilité des observations


dans le temps, par capitalisation des faites, servent à collecter des données
données collectées sur chaque terrain d’intention scientifique permettant d’élabo-
d’observation et l’analyse des régularités rer de nouvelles hypothèses, d’en contester
qu’elles permettent d’identifier. Pour illus- ou bien d’en confirmer de précédentes. Par
trer, des enseignements significatifs tirés de exemple, notre recherche-intervention
la valorisation managériale du management socio-économique menée sur 350 offices
socio-économique sont présentés dans ce de notaires entre 1998 et 2005 a permis de
paragraphe. confirmer l’hypothèse d’un niveau élevé de
coûts cachés liés aux dysfonctionnements
managériaux à l’échelle de professions
1. Le modèle d’évaluation : de la
réglementées. Mais il a également permis
valorisation managériale contingente à
d’élaborer de nouvelles hypothèses portant
une valorisation générique
sur les difficultés de la relation avec les
L’évaluation des résultats managériaux du clients dans ces professions et les moyens de
MMSE se fait de façon intégrée tout au long les atténuer (Cappelletti et Khouatra, 2009).
de son déploiement via les outils, les Le modèle d’évaluation rompt, ainsi, avec le
méthodes et les prestations mises en œuvre. paradigme de neutralité et d’objectivité, car il
Des prises de notes systématiques permet- est mobilisé conjointement par les interve-
tent de conserver ces matériaux nécessaires à nants-chercheurs et les acteurs de l’organisa-
l’évaluation des impacts à l’échelle de tion. Les résultats de l’évaluation sont co-
l’organisation. Ainsi, chaque nouvelle construits et validés, en appliquant les
recherche-intervention dans une organisation principes épistémiques de l’interactivité
donne lieu à l’élaboration ou l’adaptation cognitive et l’intersubjectivité contradictoire
(voir l’explicitation de ces principes en IV).
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d’hypothèses descriptives, explicatives et
prescriptives, valides à l’échelle de l’orga-
nisation étudiée. Il s’agit d’une valorisation
2. Principaux enseignements pour
managériale contingente systématique de la
faire évoluer les pratiques managériales
recherche qui repose, donc, sur une ins-
et la connaissance scientifique en
trumentation gestionnaire et managériale
management
pour faire de l’intervention (voir partie 2).
L’instrumentation gestionnaire mobilisée Depuis 1974, des connaissances contextuel-
dans la recherche-intervention conduit à les et génériques réplicables ont été pro-
rester sur le terrain de la recherche, de la duites par l’expérimentation du MMSE dans
création de connaissances et de l’innova- environ 2 000 entreprises, de 72 secteurs
tion, et non à quitter ces domaines pour d’activité et dans 45 pays (Savall et al.,
rejoindre celui de la consultation non 2015, 2017). Ces principales découvertes
scientifique, ce qui peut dérouter les sont résumées dans l’encadré et ensuite
chercheurs éloignés de cette méthodologie. succinctement explicitées. Certaines rejoi-
En effet, les instruments de la recherche- gnent celles faites par d’autres auteurs (par
intervention, qui restent les mêmes d’un exemple : Crozier, 2003 ; Stiegler, 2015 ;
terrain d’investigation à l’autre pour Graeber, 2018).
158 Revue française de gestion – N° 284/2019

Le niveau très élevé et l’élasticité des interventions relatives à l’implantation du


coûts cachés MMSE ont permis de construire un modèle
opératoire de coûts cachés, aujourd’hui
Toute organisation, quelle que soit sa taille, utilisé au-delà des frontières de l’équipe
son statut, sa mission, sa performance de recherche, tant par des praticiens que des
financière, dispose d’une réserve endogène étudiants de master, de doctorat et des
d’efficience, comprise entre 20 000 et chercheurs confirmés, de différents pays du
70 000 euros de coûts cachés par personne monde, qui nous consultent et nous infor-
et par an, constituée, pour une part, ment régulièrement.
d’excédent de charges et, pour une autre Une approche holistique et longitudinale de
part significative, d’insuffisance de produits l’entreprise a permis de constater qu’une
et de marges (coûts d’opportunité). Une organisation réalise un parcours d’appren-
proportion de 35 à 55 % est convertible en tissage du recyclage de ses coûts cachés au
valeur ajoutée dans un délai de quelques fil du temps. En effet, nous accompagnons
mois (6 à 15). Le problème des coûts cachés certaines entreprises depuis des années,
n’est pas tant celui de leur existence, voire des décennies, dans leur parcours de
puisque les activités humaines en produisent développement et nous avons mesuré que le
spontanément, que celui de leur accumula- niveau de recyclage des coûts cachés s’élève
tion au fil du temps. Or, le fait-même de progressivement au fil du temps. Un
mesurer les coûts cachés et de présenter ces véritable phénomène d’apprentissage est
mesures relève d’une pédagogie renouvelée conduit par l’entreprise, dont les acteurs
des coûts, qui suscite au sein de l’entreprise découvrent par l’expérience qu’ils ont le
une prise de conscience et une énergie pouvoir, la compétence et l’énergie de
humaine pour les maîtriser. Les recherches- réduire des dysfonctionnements et des coûts
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DÉCOUVERTES SCIENTIFIQUES DE L’EXPÉRIMENTATION
DU MODÈLE DE MANAGEMENT SOCIO-ÉCONOMIQUE

1) 4 713 dysfonctionnements génériques (pathologies organisationnelles) ;


2) Montant des coûts cachés engendrés par les dysfonctionnements de management et de
fonctionnement : 20 000 à 70 000 euros par personne et par an ;
3) Taux de conversion des coûts cachés en création de valeur ajoutée : entre 35 % et 55 % par
un processus participatif structuré ;
4) Amélioration durable des performances grâce à l’investissement incorporel en
développement qualitatif (compétences et comportements) du potentiel humain (IIDQPH) ;
5) Très haut niveau de rentabilité de l’IIDQPH : entre 210 % et 4 040 % (taux de retour sur
investissement : entre 2 et 40) ;
6) Toute entreprise ou organisation a les moyens d’autofinancer sa survie et son
développement, en recyclant périodiquement ses coûts cachés.
Valoriser la recherche par l’expérimentation 159

cachés, jusque-là considérés inéluctables règlent les systèmes électroniques ou


(Savall et Zardet, 1987 [2015]). robotiques. Si ces actes ne sont pas faits
Les résultats sur les coûts cachés et les correctement, d’importants coûts cachés
leviers qui ont permis leur conversion en annulent les gains potentiels escomptés de
valeur ajoutée ont aussi rejailli sur la la nouvelle technologie. Le potentiel
connaissance théorique en sciences de humain, tel que nous le définissons, n’est
gestion, en théorie des organisations comme pas le capital humain, concept popularisé à
en management stratégique. partir des travaux de Becker (1964). D’une
part, le collectif humain d’une organisation
n’est pas un stock, ni matériel, ni financier.
Le potentiel humain : seul facteur actif
Il est plastique, notamment en fonction de la
de création de valeur
qualité du management pratiqué. D’autre
Les théories économiques, classique, néo- part, le concept de capital induit la notion de
classique, marxiste ou keynésienne ont en possession contractuelle de celui-ci par une
commun la fonction de production et ses partie prenante, alors que l’être humain au
deux facteurs, le capital et le travail. Selon travail est, par nature, inaliénable et non
ces théories, la création de valeur dans une contrôlable au sens comptable et juridique.
entreprise ou une nation est fonction de ces Les stratégies durables de développement
deux facteurs considérés comme substitua- socio-économique consistent donc à investir
bles. L’industrialisation, la robotisation, dans le potentiel humain souvent insuf-
l’automatisation sont considérées, dans les fisamment valorisé dans les entreprises et
modèles économiques et les choix stratégi- les organisations : en développant les
ques d’entreprise subséquents, comme des compétences professionnelles des acteurs ;
alternatives au travail de l’homme, per- en améliorant l’intérêt et le sens donné au
travail ; en activant la communication,
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mettant d’accroître fortement les rende-
ments économiques. Or, nos travaux de coordination et concertation autrement que
recherche sur les coûts cachés en univers par les technologies d’information et de
industriels (Zardet et Voyant, 2003) ont communication ; en améliorant les condi-
montré : 1) que le niveau des coûts cachés tions matérielles de vie au travail encore
s’accroît au contraire avec l’automatisation souvent déficientes ; en impliquant les
des process de production, 2) que les deux acteurs, managers et personnels dans le
facteurs capital et travail ne se situent pas au déploiement de la stratégie d’entreprise. Et
même plan, car seul le potentiel humain – cela dans toutes sortes d’entreprises et
concept que nous substituons à celui de d’organisations, privées ou publiques, de
travail – est un facteur actif de création de grande, moyenne ou toute petite tailles. Ces
valeur. Il est constitué de trois composants : recherches-interventions prouvent, à l’instar
les compétences, les comportements et d’autres travaux (Detchessehar et Grévin,
l’énergie individuelle et collective. En 2009), que les entreprises et les organisa-
effet, ce sont des êtres humains qui tions ne souffrent pas de l’excès de
installent une technologie, forment les managers, mais au contraire d’un manque
acteurs à leur utilisation, adaptent les de management bienveillant et courageux,
processus organisationnels concrets et qui s’occupe et prend soin des personnes
160 Revue française de gestion – N° 284/2019

pour développer leur potentiel et favoriser a envahi les organisations depuis plus d’un
leur développement personnel et celui de siècle. Ce virus TFW – taylorisme, fayo-
l’entreprise. lisme, weberisme – affecte les organisations
contemporaines et leur fonctionnement, en
se basant sur les principes de forte
Le paradigme de la subordination
spécialisation du travail, de séparation des
questionné
organes de conception et d’exécution, de
Les théories classiques des organisations, et formalisation de normes, de règles et de
singulièrement le taylorisme, sont fondées, processus dans l’ensemble des activités des
selon notre analyse, sur un paradigme sous- organisations. Nos études approfondies ont
jacent, celui de la subordination. La relation montré qu’environ 53 % des coûts cachés
de travail hiérarchique consisterait à ce des organisations sont très étroitement
qu’un supérieur donne des ordres à un associés à ce virus. Puis, les actions
subordonné qui les appliquerait spontané- transformatrices expérimentées ont montré
ment et correctement. qu’une partie significative de ces coûts
Or, l’observation des dysfonctionnements cachés peut être convertie en valeur ajoutée,
dans les organisations et l’écoute de plus de en modifiant les caractéristiques organisa-
110 000 acteurs ont montré un phénomène tionnelles selon un paradigme alternatif :
extrêmement fréquent de « désobéissance celui de la contractualisation des perfor-
organisationnelle », s’exprimant le plus mances avec les acteurs. Il s’agit de
souvent par de l’inertie devant les ordres développer à l’intérieur de l’entreprise des
reçus. Bien que ce phénomène ait été pratiques davantage fondées sur l’écoute,
observé de longue date par les chercheurs l’explication puis la négociation, en lieu et
en psychosociologie et sociologie des place de l’imposition inefficace (Savall
et al., 2015 [2017]). Nos observations
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organisations (Graeber, 2018), les pratiques
organisationnelles et managériales sont récentes montrent que le virus TFW se
restées, peu ou prou, fondées sur la caractérise, si l’on résume, par un excès de
croyance, inconsciente ou non, dans le procédures et une insuffisance de dialogue
principe d’obéissance aux consignes ou aux professionnel régulier et de proximité entre
normes de plus en plus envahissantes. le manager et les membres de son équipe.
Or, la « désobéissance organisationnelle » Cela dans toutes sortes d’organisations :
est à l’origine de nombreux coûts cachés petites, grandes, publiques et privées. Il
notamment en termes de coût d’opportunité, induit, sur la durée, une défiance réciproque
car la non-action ou le retard d’action est entre les managers et leurs équipes source,
source de coûts cachés, tels que des défauts en particulier, de désobéissance organisa-
de qualité de service ou un manque tionnelle à tous les niveaux : non-actions,
d’innovation produit ou marché. Concer- retard d’actions ou défauts de qualité des
nant l’origine de ce dysfonctionnement et de actions chez les salariés ; abstentionnisme
bien d’autres dans le champ du manage- managérial chez les managers. Sur ce
ment, nous sommes arrivés à la conclusion dernier point, nos observations récentes
que les entreprises et les organisations dans montrent, en effet, devant le désarroi que
le monde sont « infectées » par un virus qui provoque le management d’équipe, une
Valoriser la recherche par l’expérimentation 161

réticence croissante à devenir manager dans génériques, mais aussi du processus mana-
les entreprises et les organisations, ou bien à gérial, pour vulgariser les connaissances et
recruter des salariés lorsque l’on est faire évoluer les pratiques d’entreprises.
dirigeant. L’émergence de formations pour On distingue deux types de communication,
cadres « rebelles en management » illustre les premières dites académiques, dans des
ces évolutions, par exemple celles déve- congrès et revues, les secondes dénommées
loppées par des diplômés de l’ESSEC parfois « professionnelles » parce qu’elles
autour de Valérie Rey-Millet (Cappelletti, s’adressent à des acteurs praticiens des
2019). organisations. La publication ne se confond
pas avec la recherche. Celle-ci est un
processus de génération de connaissances,
La valeur ajoutée discriminante des
là où celle-là résulte d’un arrêt sur image qui
investissements immatériels
prend la forme d’un produit qu’il faut
Les managers sont souvent démunis pour apprendre à faire tout en poursuivant la
évaluer la rentabilité des investissements création de nouvelles connaissances. C’est
immatériels tels que la formation, le pourquoi nous distinguons d’une part,
recrutement, ou des actions d’amélioration l’académique qui obéit à des canons, des
de la qualité de vie au travail, c’est-à-dire usages corporatifs et, d’une certaine
pour en mesurer le rapport coût/perfor- manière des rapports de force, issus de
mance. Or la méthode des coûts-performan- l’histoire des théories et concepts dominants
ces cachés permet d’évaluer les gains bien établis et d’autre part, le scientifique
engendrés par un projet incorporel grâce à issu d’une conviction acquise grâce à un
la réduction des dysfonctionnements et des travail scientifique expérimental appro-
coûts cachés qu’il engendre. Cette évalua- fondi. Une publication relève donc d’un
tion peut se faire en amont du projet, de compromis que le chercheur doit faire entre
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façon prévisionnelle comme outil d’aide à la sa recherche « permanente » et les objets
prise de décision opérationnelle ou straté- singuliers qu’il peut en détacher et qui
gique, puis en aval pour en mesurer la peuvent intéresser une revue.
rentabilité effective. Ces évaluations mon-
trent que la rentabilité effective d’un
La publication ne se réduit pas aux
investissement incorporel se situe entre
productions académiques
210 % et 4040 % (Savall et Zardet,
2007 ; Cappelletti, 2007). Publier dans des revues académiques
n’empêche pas d’opter pour des modes
d’expression différents, au moyen d’un
3. La publication des résultats d’une
chapitre d’ouvrage ou d’un livre. Par
recherche-intervention
ailleurs, les articles dans des revues pro-
La communication des résultats d’une fessionnelles ou périodiques généralistes de
recherche-intervention et singulièrement bon niveau comme Le Monde, Le Figaro,
de ses impacts managériaux fait partie Les Échos ou la Harvard Business Review
intégrante du processus scientifique, pour favorisent la diffusion, dans la société civile,
diffuser les résultats contingents et de résultats de la recherche souvent confinés
162 Revue française de gestion – N° 284/2019

à un lectorat extrêmement étroit. Enfin, la managériale pour une entreprise et, poten-
publication par les témoins-mêmes de la tiellement, pour l’ensemble des entreprises.
recherche-intervention s’opère plus aisé- Simultanément ces résultats présentent un
ment en choisissant des colloques ou les caractère scientifique. L’interdépendance
dirigeants viennent eux-mêmes présenter les des chercheurs avec les organisations
impacts perçus par eux de la recherche étudiées est indispensable pour assurer
(Buono et al., 2018). qualité et rigueur de l’observation scienti-
fique. Un continuum entre le chercheur, le
praticien réflexif et le praticien en action
IV – ÉPISTÉMOLOGIE INTÉGRÉE
constitue la base de la recherche-interven-
AU CŒUR DE LA VALORISATION
tion telle que nous la pratiquons. Learning
DE LA RECHERCHE
by doing est un principe clé actionné dans
La proposition faite par le modèle de la recherche-intervention (Berry, 1995 ;
management socio-économique aux cher- Suomala et al., 2014).
cheurs en gestion, pour valoriser d’un point La validation des résultats par une méthode
de vue managérial leurs produits scienti- de recherche-intervention consiste à obser-
fiques, est de faire reposer leur méthodolo- ver les impacts produits par des actions
gie sur une épistémologie intégrée. Celle-ci managériales, et ainsi de valider la connais-
permet de situer sa production, qu’elle soit sance. La nature de ces impacts est
pour l’enseignement, l’académisme ou les multiforme : impacts sur de nouvelles
professionnels, sur un même continuum. La pratiques managériales, sur les performan-
dernière partie de l’article explique en quoi ces durables de l’entreprise, sur les modèles
consiste une telle épistémologie intégrée. cognitifs des acteurs – praticiens en charge
des décisions et de leur mise en œuvre. Ces
impacts sont eux-mêmes multiformes :
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1. L’apprentissage issu d’une pratique
qualitatifs, quantitatifs et financiers, car la
de recherche cumulative et la validation
dichotomie entre l’analyse qualitative et
des résultats
quantitative apparaît, à l’épreuve des faits,
La pratique de recherches-interventions non pertinente. Cette combinaison qualimé-
longitudinales « répliquées » dans environ trique constitue une tentative de synthèse.
2 000 entreprises et organisations depuis 45 La question qui nous est souvent posée est
ans constitue un programme de recherche alors de savoir si, 45 ans après le début de
cumulative. À chaque séquence, sont cette recherche, de nouveaux résultats
introduits des enseignements issus des scientifiques peuvent encore être découverts
séquences précédentes. Plus les hypothèses (Savall et Zardet, 2013a, 2013b). La place
– descriptives, explicatives et prescriptives manque ici pour développer en détail les
– sont observées sur un cas puis sur d’autres nouvelles problématiques et les nouveaux
cas et plus leur degré générique est concepts et résultats de recherche qui ont
important. Ainsi les résultats présentant jalonné ce programme de recherche cumula-
un haut degré générique nourrissent la tive et ont donné lieu à de nombreuses
construction et la consolidation d’une publications dans des congrès internationaux,
théorie, ce qui constitue une valorisation des articles et des ouvrages. Limitons-nous à
Valoriser la recherche par l’expérimentation 163

citer les principaux concepts formalisés au depuis 1959 (réforme Debré) avec celui
gré des années. Dans les années 2000, de praticien hospitalier, pour conduire au
découverte à l’intérieur des entreprises et statut de professeur d’université – praticien
organisations de la problématique grandis- hospitalier (PUPH). Un statut similaire est-il
sante du foisonnement normatif (tétranor- envisageable en management : professeur
malisation), en 2005 structuration du d’université – praticien en management,
concept de potentiel humain, en 2010 responsable d’une équipe de recherches
nouvelle formulation de la théorie socio- d’un établissement autofinancé par les
économique, au début des années 2010 recherches contractuelles et les recher-
concept de capitalisme socialement respon- ches-interventions, comme cela a été sug-
sable et de macro coûts cachés, ainsi que les géré il y a plus de 30 ans par Roland Perez
cinq caractéristiques de l’homme, la typo- (Congrès AFCET-CESTA, 1982), puis
logie des recyclages de coûts cachés en formalisé (Godelier et Pérez, 2012).
2016, le programme actuel sur la connec-
tique humaine collaborative…
3. Trois principes épistémologiques
majeurs
2. Proximité avec la démarche
La recherche-intervention se singularise et
expérimentale de recherche en
se différencie du conseil par sa dimension et
médecine
ses principes épistémologiques, qui en
S’il est vrai que la recherche-intervention en garantissent la validité interne puis la
management est encore aujourd’hui mino- validité externe. Les trois principes épisté-
ritaire en sciences de gestion, elle présente mologiques de la recherche-intervention
des caractéristiques communes avec la qualimétrique s’inscrivent dans une épisté-
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démarche expérimentale de recherche en mologie de constructivisme générique : 1)
médecine (Savall et Fière, 2014) : le l’interactivité cognitive, par laquelle les
traitement des pathologies est partie inté- connaissances concrètes sont élaborées et
grante du processus de recherche, chaque co-construites, entre chercheurs, entre cher-
nouveau cas contribuant à améliorer la cheurs et praticiens, 2) l’intersubjectivité
connaissance sur une maladie. La recherche contradictoire, substitut de l’impossible
dite appliquée conduit à de la recherche neutralité de la recherche, par laquelle les
fondamentale, ou générique, les deux étant subjectivités et différences entre acteurs
complémentaires. Par ailleurs les mêmes sont reconnues, explicitées et utilisées pour
données sont utilisées pour soigner un construire des connaissances génériques
patient et avancer dans la recherche locales, 3) la contingence générique, recon-
médicale, sans dissociation entre l’utilité naissant le caractère spécifique de chaque
sociale de la recherche et les résultats dits cas, ainsi que l’existence d’éléments géné-
scientifiques. Ainsi, dans les hôpitaux riques dans chacun. Le « constructivisme
universitaires, une grande proximité est générique » explicite la filiation d’une
observée entre les enjeux professionnels et épistémologie constructiviste au sens de
scientifiques de la recherche. Le statut de Piaget (1988), tout en recherchant des
professeur d’université a été combiné résultats génériques réplicables. La
164 Revue française de gestion – N° 284/2019

recherche cumulative permet de consolider entreprises ou les organisations publiques et


des résultats génériques par validations privées.
successives.

CONCLUSION
4. Recherche-intervention : une voie
La valorisation managériale de la recherche
féconde pour développer des recherches
en sciences de gestion est une probléma-
contractuelles et autofinancées
tique d’une très grande actualité. Elle pose
La recherche-intervention constitue une la question de l’utilité sociale de la
forme de recherche contractuelle. Selon ce recherche comme critère d’évaluation au
contrat, une entreprise s’attend à recevoir sein de l’univers académique et de la société
des prestations définies par le cahier des dans son ensemble. Or, d’une part, nos
charges méthodologiques, en contrepartie observations montrent que le fossé gran-
d’honoraires. Ces honoraires favorisent une dissant entre les thématiques traitées dans
implication réelle des acteurs de l’entreprise notre discipline et les besoins avérés des
dans le processus de recherche-intervention, entreprises et des organisations est dénoncé
et contribuent au financement d’emplois depuis plus d’une décennie. D’autre part, le
d’intervenants-chercheurs doctorants et terme « recherche » a été progressivement
post-doctorat. Selon des modalités proches détourné de son sens premier, désignant
des conventions CIFRE, la pratique de principalement les articles dans des revues
recherche-intervention permet d’offrir des académiques dites classées.
emplois de doctorants qui peuvent ainsi La recherche-intervention qualimétrique,
préparer leur thèse sans financement public, née de la recherche-action et prolongeant
avec des salaires équivalents à ceux des l’approche sociotechnique, est le soubasse-
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contrats doctoraux distribués avec parcimo- ment méthodologique du modèle de
nie. Ainsi dans notre équipe de recherches, management socio-économique, créé et
depuis 1980, plus de 75 doctorants ont été expérimenté dans 2 000 organisations, dans
impliqués dans des contrats de recherche- une grande variété de secteurs d’activité,
intervention, source d’une rémunération statuts, tailles et pays. Cet article, en réponse
pendant trois ans et de matériaux de à la problématique de « l’ardente » obliga-
recherche de terrain de première main pour tion de valoriser les résultats des recherches
la rédaction de leur thèse. En même temps, en gestion, a donc proposé, en exemple
ils ont accru leur employabilité par la possible, ce modèle. Il en synthétise les
pratique et l’expérience d’une méthodologie caractéristiques méthodologiques et épisté-
de recherche appréciable, tout autant dans mologiques, ainsi que le processus d’expé-
l’enseignement supérieur que dans les rimentation incluant la négociation de la
entreprises et les organisations. En effet, recherche-intervention. Il analyse ensuite le
la recherche-intervention permet d’accroître dispositif et la méthodologie d’évaluation
la diversité des carrières au-delà de la thèse des impacts de la recherche sur les pratiques
de doctorat. Dans notre cas, 60 % des de gestion, mettant en évidence des ensei-
nouveaux docteurs se sont orientés vers gnements importants pour l’évolution des
l’enseignement supérieur et 40 % vers les pratiques managériales et de la connaissance
Valoriser la recherche par l’expérimentation 165

scientifique : le niveau très élevé et l’élasti- ces méthodologies de recherche et des


cité des coûts cachés, la stimulation du résultats subséquents, ainsi que le transfert
développement du potentiel humain comme de ces nouvelles connaissances issues de la
facteur actif de création de valeur et de recherche vers l’enseignement et les prati-
performance socio-économique durable, la ques professionnelles observables. En effet
remise en cause du paradigme de la les étudiants, futurs dirigeants, responsables
subordination issu de l’école classique, la politiques et managers de demain véhiculent
valorisation des investissements incorporels des pratiques fondées sur les enseignements
et leur rentabilité. Ces résultats de recherche qui leur auront été dispensés dans leurs
issus de pratiques d’interaction avec les études. À l’avenir, la crédibilité des
entreprises présentent une double caracté- enseignements peut être remise en cause,
ristique : leur utilité sociale pour les pratiques à l’heure où les technologies favorisent
d’entreprises et la contribution à l’évolution l’autoformation et la formation à distance.
des connaissances scientifiques en sciences En outre, les innovations ne sont plus
de gestion. Ils interrogent des connaissances découvertes uniquement à l’université,
établies depuis plus d’un siècle qui dominent même si on peut le regretter. C’est donc
encore dans l’enseignement supérieur de la bien à une question existentielle pour la
gestion. gestion, en tant que science et objet
Des enjeux majeurs concernent la consoli- d’enseignement, que l’article a cherché à
dation de la reconnaissance académique de apporter des éléments de réponse.

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