Exemple de Corrigé Argumentation MARIVAUX LF C 2024

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Exemple de corrigé de l’argumentation autour de Les Fausses Confidences

(travail excellent d’une élève)

1. Dubois est le meneur du jeu et un vrai stratège.


Tout au long de la pièce, Dubois est le maître du jeu. Ancien valet de Dorante, il est
engagé par ce dernier pour exécuter les fausses confidences. Il est rusé, malin, maître
de la manipulation et de la tromperie. Il joue un rôle clé dans le développement de
l’intrigue : dès l’Acte I, il pousse Dorante à se faire engager comme intendant
d’Araminte pour pouvoir la séduire et il lui conseille de ne pas révéler qu’ils se
connaissent. A la fin de l’acte I, dans la scène 14, Dubois se livre à la première fausse
confidence de la pièce en révélant à Araminte que Dorante est épris d’elle. Cette
confidence n’est pas fausse puisque Dorante aime réellement Araminte mais elle l’est
sur le rapport d’énonciation. Le valet prend le masque de l’hypocrisie pour servir
Dorante et manipuler la jeune femme. Avec cette première fausse confidence, Dubois
devient le maître des sentiments d’Araminte qui devient malgré elle complice du
stratagème de son propre valet. Dubois va conserver son rôle de meneurdu jeu et de
stratège tout au long de l’acte II où plusieurs rebondissements viennent complexifier
l’intrigue : la demande en mariage, le portrait. Mais c’est au dernier acte qu’il
triomphe avec la fameuse lettre de Dorante.
Dubois joue donc bien un rôle clé dans le développement de l’intrigue qu’il mène
d’une main de maître, soit en étant seul maître du jeu soit en demandant à des
auxiliaires naïfs d’agir à sa place. Ainsi tel un marionnettiste, il tire les ficelles de tous
les personnages pour les faire agir comme il l’entend et rester le maître du jeu , c’est
ainsi qu’il s’exprime dans la scène 2 de l’Acte I: « je vous conduis »,parole de chef de
guerre.

2. Le stratagème théâtral est un élément comique.


Le terme stratagème qui vient du grec se rapporte d’abord au lexique guerrier
puisqu’il signifie « ruse de guerre », puis le sens du nom s’élargit pour désigner une
ruse permettant à une personne de parvenir à ses fins. Le stratagème théâtral se réfère
chez Marivaux à tous les mensonges, toutes les manipulations et les dissimulations
effectués par la majorité des personnages. Les Fausses Confidences sont avant tout
une comédie traditionnelle du XVIII ème siècle qui met en scène différents types de
comique le plus souvent grâce à la présence de ces stratagèmes.
Le principal stratagème que sont les fausses confidences de Dubois fait naître dès les
premières scènes un comique de situation qui multiplie les mensonges et les
quiproquos. Par exemple Araminte pense être la complice de Dubois et se méprend
sur le statut social de Dorante. Ce dernier se retrouve promis à Marton alors qu’il n’a
qu’un seul but, conquérir Araminte et la servante pense qu’il l’aime réellement. Ainsi,
le lecteur ou le spectateur occupe une position privilégiée par rapport aux personnages
et au fil des tromperies et quiproquos il devient complice de l’auteur.
Les stratagèmes permettent également de mettre en exergue le comique de caractère et
le comique de gestes de certains personnages. A ce titre, Madame Argante est un
personnage caricatural, exigeante et autoritaire qui ne réfléchit que par l’argent et
l’anoblissement de sa fille. Tout au long de la scène 10 de l’acte I, elle dévoile son
caractère en annonçant à Marton et Dorante qu’elle prépare le mariage entre le Comte
et Araminte afin d’éviter un procès au sujet d’un terrain. Elle demande d’ailleurs à
Dorante de l’aider à mettre en place son stratagème en mentant à sa fille. Son
stratagème est donc un élément comique qui souligne son ridicule et sa cupidité. Les
didascalies la concernant renforcent cet aspect comique : « femme brusque et vaine ;
vivement ». En lisant cette scène, on imagine aisément ses gestes et ses mimiques
portant à sourire. Marivaux crée avec Madame Argante une sorte de pendant
féminin de Monsieur Jourdain dans Le Bourgeois gentilhomme de Molière.

3. Le stratagème théâtral permet à Marivaux de dénoncer les travers de la


société.
Au XVIII siècle, la société est encore une société d’ordres et Marivaux, en mettant en
scène plusieurs stratagèmes théâtraux, dresse une satire d’une société obnubilée par
l’argent, le rang social et les conventions.
Araminte est le premier personnage de la pièce pris au piège par son rôle et son rang
social. Elle appartient en effet à la grande bourgeoisie et sa mère souhaite tirer profit
de cette fortune pour la marier au Comte. Jeune veuve fortune, elle ne peut épouser un
« intendant ». Mme Argante d’ailleurs déplore ,dans la scène 10 de l’Acte I, que sa
fille ne s’intéresse pas assez à cela : « le rang de comtesse ne la touche pas assez ; elle
ne sent pas le désagrément qu’il n’y a de n’être qu’une bourgeoise ». Aussi, jusqu’à
l’avant dernière scène, la jeune femme va s’attacher à dissimuler la vérité de ses
sentiments envers Dorante pour « sauver les apparences » et répondre aux attendus et
aux préjugés de son temps et de sa mère.
En revanche, les personnages plus âgés comme Mme Argante ou Monsieur Remy eux
ne dissimulent pas leur attirance pour l’argent et le rang social. Dès la scène 3 de
l’acte I, Monsieur Remy veut marier Dorante à Marton parce qu’elle est avant tout
l’héritière d’ « une vieille parente asthmatique ». Puis à la scène 2 du second acte, il
veut le retirer des services d’Araminte pour le marier à une veuve de 35 ans parce
qu’elle « a quinze mille livres de rente ». En ce qui concerne Madame Argante, ses
intentions sont clairement dévoilées à la scène 10 de l’acte I : elle veut marier sa fille
au Comte pour qu’elle accède à la noblesse. Une grande partie de la scène est
d’ailleurs construite sur un jeu d’opposition entre le champ lexical de la noblesse et
celui de la bourgeoisie. Ainsi les mots « « intendant », « homme »,« ma fille », «
bourgeoise », « réflexion roturière » s’opposent aux mots « monsieur le Comte », «
madame la Comtesse », « grande distinction », « rang de Comtesse ».

4. Les confidences permettent à l’être de se dévoiler.


La confidence est une parole non calculée qui exprime la vérité du cœur, or, le titre
même de la pièce de Marivaux nous annonce que la parole fausse va contaminer
l’ensemble de la pièce et n’est pas propre à une scène centrale.
Ceci étant, tout au long de cette même pièce les apartés peuvent être perçus comme de
vraies confidences sur le plan de la double énonciation. Nous prendrons en exemple
les apartés d’Araminte car ils sont les plus nombreux et ils nous permettent de suivre
l’évolution de ses sentiments à l’égard de Dorante. Ils nous dévoilent la sincérité de la
jeune femme en soulignant sa sensibilité : « je n’oserais presque le regarder »( I,14)
ou encore « Il a des expressions d’une tendresse »(II,15)
Il faudra néanmoins attendre l’avant dernière scène pour que les jeunes amoureux se
dévoilent et prononcent enfin des confidences vraies et directes. Ainsi, Araminte et
Dorante tombent leur masque en devenant sincères et honnêtes. Dorante prononce des
paroles vraies pour dire sa vérité sur le stratagème de Dubois. La jeune femme
retrouve elle son innocence dans des répliques qui avouent son amour et accordent le
pardon à Dorante : « Ce trait de sincérité me charme, me paraît incroyable, et vous
êtes le plus honnête homme du monde ».
Ces confidences tardives révèlent la sincérité et l’amour des deux personnages
principaux qui assument leur choix même si la parole de Dorante interroge tout de
même.
Mais dans cette même pièce, il se trouve un personnage qui dispose d’une parole vraie
tout au long de l’intrigue. Il s’agit du valet Arlequin, personnage traditionnel de la
Comedia dell’arte. Arlequin représente en effet une forme particulière de confidence,
sa parole qui refuse l’hypocrisie, les doubles sens ou le cynisme, est une parole
sincère et directe. Comme le souligne, par exemple, la scène 8 du premier acte, le
valet éprouve une profonde affection et de l’attachement pour sa maitresse : « Je ne
sais pas pourquoi Madame me donne mon congé : je n’ai pas mérité ce traitement ; je
l’ai toujours servie à faire plaisir ». C’est aussi un être honnête qui ne veut pas profiter
de son argent sans avoir à la servir : « Il faut que vous ayez mon service, puisque
j’aurai vos gages, autrement je friponnerais Madame. » De plus le valet restera
toujours fidèle à ses maitres, qu’il se nomme Araminte ou Dorante : « je soutiens les
intérêts de mon maître » II, 10. Arlequin est un être sensible, sincère et honnête qui se
dévoile au travers par ses confidences simples et son cœur vrai.

5. La parole est à la fois trompeuse et révélatrice de la vérité intérieure.


Le titre même de la pièce de Marivaux souligne l’ambiguïté, la dissimulation et le
mensonge. Les fausses Confidences ont pour socle un secret de polichinelle vite
divulgué par Dubois : l’amour de Dorante pour Araminte. Après la première fausse
confidence de Dubois à Araminte, peu ou prou tous les personnages vont s’adonner
aux confidences fausses et donc adopter une parole trompeuse et manipulatrice. A
cela vient s’ajoute une parole soumise aux contraintes et aux conventions sociales.
Marivaux a en effet à cœur de souligner dans son œuvre les problèmes de
communication liés à la conscience de son époque.
Mais ces jeux du langage propre à l’auteur sont aussi paradoxaux car ils peuvent
révéler chez certains personnages leur vérité intérieure. C’est le cas pour Araminte
dont la parole évolue au cours de la pièce. Ses paroles mondaines et codifiées par les
bienséances laissent peu à peu place à une parole sincère et simple : « Venez,
Monsieur ; je suis obligée à Monsieur Remy d’avoir songé à moi. Puisqu’il me donne
son neveu, je ne doute pas que ce ne soi un présent qu’il me fasse » I, 7 / « Après tout,
puisque vous m’aimez véritablement, ce que vous avez fait pour gagner mon cœur
n’est point blâmable : il est permis à un amant de chercher les moyens de plaire, et on
doit lui pardonner lorsqu’il a réussi. » III, 12. Ainsi le langage fait progresser le
personnage et révèle sa profondeur. Lorsque le langage est mis en scène de la sorte,
qu’il est le point de rencontre entre le mensonge et la vérité amoureuse, nous
comprenons alors le terme marivaudage.

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