Empreinte Texte Episode 2
Empreinte Texte Episode 2
Empreinte Texte Episode 2
Peu à peu une inquiétante étrangeté plane sur cette famille. Les
manifestations du passé sont-elles néfastes ? Portent-elles un message ? Les
visions et apparitions sont-elles réelles ou nos protagonistes ont-ils perdu la
tête ? Des secrets enfouis vont être révélés.
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Les Personnages
La fille :
LISA Jeune bachelière en spécialité cinéma. Passionnée de cinéma, va
développer ses expériences de tournage dans le décor incroyable de sa nouvelle
résidence.
Curieuse et altruiste, elle va mener une enquête mémorielle à partir des lettres
laissées par son grand-père Léo. Va se révéler être le moteur de la découverte et
de la une mise en lumière du secret de famille.
Révélation finale : Va découvrir qu’elle est la petite fille d’une enfant juive
cachée.
La mère :
SUZANNE Artiste Musicienne. Sujette à la dépression depuis toujours
(traumatisme transgénérationnel).
Est internée en hôpital psychiatrique suite à une nouvelle crise lors de la visite
du château de Sallmard.
Sa mère Bella est morte en la mettant au monde à l’âge de 43 ans. Fille unique
elle n’a connu que son père Léo, un imprimeur, plongé dans une grande tristesse
à la mort de sa femme. Son père Léo laisse après sa mort de nombreuses lettres
au sujet de sa mystérieuse femme Bella.
Fantôme de la grand-mère :
BELLA
Narratrice / guide des spectateurs – Fantôme de la mère de Suzanne. Enfant
juive dont les parents avaient été déportés, cachée pendant la guerre au château
de ses 4 à 7 ans avec son grand frère Abel, 14 ans mort dans le maquis du
Vercors.
Après la guerre elle est adoptée par un couple de paysans catholiques qui ne lui
révéleront que trop tardivement sa véritable identité.
Artiste peintre reconnue, elle se marie à un imprimeur Léo et meurt en mettant
au monde son unique enfant : Suzanne.
Le père :
PIERRE-LOUIS Se dit dentiste, mais est en fait prothésiste dentaire. Souffre
d’une honte sociale. A rencontré sa femme lors d’un récital, est tombé fou
amoureux de cette femme et sa beauté énigmatique.
2
A coupé les ponts avec sa famille (aristocrate), n’ayant pas réussi les études de
dentiste sa famille lui a coupé les vivres.
Relation complexe avec ses enfants, qui ne suivent pas le parcours qu’il souhaite
pour eux. En conflit avec sa fille mais proche de son fils. Malgré l’amour qu’il
porte à femme ne sait plus comment se comporter face à son mal-être.
Son masque social, ses angoisses de l’irrationnel et son désir de tout maitriser
finiront par se retourner contre lui. Lorsque son fils se détournera de lui, son
monde s’effritera peu à peu.
Le fils :
BASILE En internat au lycée horticole, en paysagisme.
A déjà un passif d’exclusion de plusieurs établissements. Bénéficie d’un
favoritisme masculin de la part de son père. Besoin de reconnaissance. Adule
son père, se laisse manipuler par lui. Egocentrique et très sûr de lui son rapport
avec sa grande sœur ? s’avère conflictuel.
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EPISODE 1 L’AUTOMNE
Un nouveau départ
PIERRE-LOUIS Le père après avoir fait interner sa femme et inscrit son fils
dans un internat à proximité, s’installe avec sa fille au château.
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Sc 1 A et B le parvis :
Bella en costume des années 80 (année de sa mort elle a 43 ans)
BELLA
Bonjour à tous, merci d’avoir fait le voyage jusqu’ici. Je suis heureuse de vous
faire découvrir ce lieu empli d’histoires, histoires auxquelles je ne suis pas
totalement étrangère ; je me trouve, par la force des évènements « attachée » à
cette demeure. Quelques recommandations, lors de nos déambulations, rester
dans la mesure du possible groupé et discret, ne vous appuyer pas aux meubles,
ne tenter pas non plus de les déplacer, ou de subtiliser quel qu’objet que ce soit !
Je vous demanderai également de ne pas interférer avec les évènements présents.
Ne claquez pas les portes, ne faites pas grincer les volets, le parquet craque,
merci de rester silencieux, les nouveaux propriétaires apprécieront la quiétude
des lieux…les voici qui arrivent.
Une voiture arrive et se gare. Les fenêtres sont fermées mais à l’intérieur une
engueulade bat son plein. La tension est palpable entre le père et la fille.
PIERRE-LOUIS
C’est comme ça ! Et tu n’as pas à te mêler de ce qui ne te concerne pas.
LISA
Tu sais toujours mieux ce qui est bon pour les autres. C’est ma mère donc oui ça
me concerne.
PIERRE-LOUIS
Ce n’est pas à toi de décider, Lisa. La discussion est close.
LISA
Arrête de me traiter comme une enfant !
PIERRE-LOUIS
Ça suffit maintenant, j’ai la tête qui va exploser.
LISA
Quoi ? regarde-nous ! ça ressemble à ça une famille ? réalisant qu’ils sont
arrivés au château Ho la vache, mais c’est immense, je pensais pas que c’était si
grand ! Il n’a pas l’air si ancien, par contre le crépi c’est super moche. Se
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retournant vers son père Ca t’arrange qu’elle soit pas là, c’est pas toi qui gère le
problème.
PIERRE-LOUIS
Qu’est-ce que tu dis ? c’est quoi ton problème ? parce que tu as des problèmes ?
…attends… je ne suis pas certain qu’on ait du réseau dans cette cambrousse.
LISA
Quoi ? tu crois qu’on ne capte pas ici ?
Elle s’éloigne en panique avec son portable à la recherche de réseau
Il y a l’électricité au moins là-dedans ? ça, ça serait un vrai problème !
PIERRE-LOUIS
Préoccupations basses et matérielles ! tu n’es qu’une gamine, tu as tout à
apprendre ! Et tu n’as pas de problèmes. Respire l’air de la campagne.
PIERRE-LOUIS
Mais vous êtes encore là, vous ! Vous n’étiez pas censé avoir quitter les lieux ?
L’HOMME
Je me suis dit qu’il fallait faire ça bien Pierre-Louis, vous expliquer deux trois
choses sur la maison, elle est spéciale, il faut connaitre/
LISA
Vous savez s’il y a un endroit où on capte m’sieur ?
L’HOMME :
Non. Faut connaitre ses secrets, comment elle fonctionne sinon vous allez avoir
quelques petits problèmes, la tuyauterie, les chaudières…
Lisa s’éloigne
PIERRE-LOUIS
Si vous y tenez, expliquez-moi, ne perdons pas de temps, ma fille et moi
aimerions nous installer, nous laver. Le voyage a été éprouvant.
PIERRE-LOUIS
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Lisa, viens prendre ta valise et sortir ton bazar ! Qu’est-ce que c’est que ça ? ne
compte pas sur moi pour porter tes, ou est ce qu’elle est passé ? dès qu’il s’agit
de faire un effort…
L’HOMME
Ha jeunesse jeunesse !
PIERRE-LOUIS
Quand on n’a rien à dire, c’est bien le genre de chose qu’on dit « jeunesse
jeunesse » Silence. On arrive de Paris, ça fait plus de 6 heures, j’ai l’impression
d’être son chauffeur, le nez dans son téléphone et d’un coup je me fais agresser à
propos de sa … merde c’est quoi ces putains de vieux cartons !
L’HOMME
Vous savez c’est une vieille dame !
PIERRE-LOUIS
Comment ? Qui ?
L’HOMME
La maison.
PIERRE-LOUIS
Ah oui, je sais que c’est une vieille bâtisse, c’est ce qui a plu à ma femme, faut
croire.
L’HOMME
Et elle n’est pas venue avec vous votre femme ?
PIERRE-LOUIS
Non
L’HOMME
Comment va-t-elle ? La dernière fois elle n’avait pas l’air dans son assiette la
petite dame, toute chamboulée.
PIERRE-LOUIS
Oui
L’HOMME
Comment va-t-elle ?
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PIERRE-LOUIS
Arrêtez avec vos questions.
L’HOMME
Bon. Paraitrait qu’au 16ème, c’était une résidence de chasse d’Henri IV, mais à
cette époque l’entrée principale n’était pas celle-là, elle se trouvait a priori de ce
côté-ci sur cette aile, alors que les ailes ont été rajoutées au 17 ème , drôle
d’incohérence n’est-ce pas ?
PIERRE-LOUIS:
Par où entrons-nous aujourd’hui ?
L’HOMME
Plutôt par le côté ; je dois bien avouer qu’il persiste des imprécisions quant à son
histoire ! l’acquisition du château de Peyrins par Soffrey de Collignon, l’un des
rédacteurs de l’Edit de Nantes, mais également …de poèmes érotiques, vous
m’en direz des nouvelles, date de Mars 1606. Et à cette même époque, le futur
roi Henri IV lui fait également dont des « Pierre et attraits » du vieux château de
Peyrins alors en ruine, celui qui se trouve sur la colline du village, là-bas et c’est
avec les pierres du vieux château que celui-ci est agrandit, c’est assez alambiqué
n’est-ce pas !
L’HOMME
Attendez-moi quelques secondes je vais vous ouvrir par l’intérieur, ça sera plus
commode pour vos bagages.
Lisa réapparait
PIERRE-LOUIS
Te revoilà. Va prendre tes affaires, il va nous ouvrir.
LISA
C’est qui ce mec ? il est chelou, il va parfaitement avec le décor ! elle cadre
avec ses doigts comme pour un repérage de tournage.
PIERRE-LOUIS
Le dernier proprio. C’est à lui qu’on a acheté, c’était l’intendant des proprio
d’encore avant, ils lui ont légué la maison.
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LISA
Étonnant un domestique propriétaire d’un château. Derrière, il y a du réseau on
capte un peu ; on dirait une autre maison de l’autre côté, genre cottage, une
maison double face. C’est chez nous. Un décor de film.
PIERRE-LOUIS
C’est la réalité, dire que j’ai cédé au caprice de ta mère.
LISA
Respire un coup, hein l’air de la campagne !
PIERRE-LOUIS
Oui merci, ça ira, entrons.
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Sc 2 A et B Grand escalier :
LISA entrant dans le château
Waouh ! c’est qui tous ces gens ?
L’HOMME
Soffrey de Calignon, les familles de Chabrière et de Sallmard, les anciens
propriétaires et leurs descendants jusqu’à l’arrivée de Mme Chesneau en 1936.
LISA
Certains ont des drôles de têtes.
PIERRE-LOUIS
Consanguinité !
LISA
Elle, son regard part complétement en vrille.
L’HOMME
Ma préférée, Isabeau de Vaugelet, elle va me manquer.
PIERRE-LOUIS
J’aime pas du tout ces horreurs.
L’HOMME
Vous allez vous habituer à eux.
LISA
Le château est-il hanté ?
PIERRE-LOUIS
Enfin Lisa ! il n’y a absolument rien à craindre ! Où se trouvent les chambres ?
On ne va pas faire une visite commentée. Des vieilleries ça se saurait s’il restait
quelque chose de valeur dans cette baraque.
LISA
Moi ça m’intéresse l’histoire de ma nouvelle maison.
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PIERRE-LOUIS
S’il te plait Lisa on ne va pas recommencer.
LISA
N’empêche, j’ai une sensation étrange, comme si on m’observait. Un temps. Ces
tableaux ont traversé tant d’époques !
PIERRE-LOUIS
N’importe quoi ! des vieilles croutes.
L’HOMME
Ces tableaux mieux vaut rester polis avec eux, conseil d’ami !
L’HOMME
De l’autre côté.
PIERRE-LOUIS
Et ça ? c’est sur le point de s’écrouler ?
L’HOMME
Non là ça va j’ai consolidé la fissure principale, mais sinon faudrait faire appel
au monument de France pour la restauration de la voûte, ils financeront 20% des
travaux, je n’avais pas de quoi…mais vous/
PIERRE-LOUIS
On verra plus tard.
LISA
Mais papa vous ne l’avez pas visité avec maman avant de l’acheter ce Château ?
Je ne comprends pas.
L’HOMME
C’est que votre maman elle l’a voulu dès qu’elle l’a vu et puis/
PIERRE-LOUIS en off
Je vous attends.
LISA
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Et puis ?
L’HOMME
Venez voir la bibliothèque c’est une belle pièce.
LISA en Off
Waou c’est …massif !
L’HOMME
Et oui les meubles étaient fabriqués sur mesure, là c’est du citronnier.
PIERRE-LOUIS
Faut reconnaitre que cette pièce a du cachet, du caractère, bien qu’elle soit tout
de même quelque peu sinistre.
LISA
Regarde tous ces livres ! Des collections anciennes d’Encyclopeadia Universalis
et les recueils de poèmes de Soffrey de callignon!
Musique
BELLA
Lorsque je suis arrivée ici, petite fille, ces tableaux m’intriguaient,
m’effrayaient. Pour exorciser ma peur, les apprivoisés, je leur parlais, mon
imagination me jouait des tours, ils me répondaient.
Poursuivons. Suivez-moi.
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Bibliothèque :
Quand le public entre dans la bibliothèque les comédiens sont figés. Lisa a
déposé son carton sur la table. Elle est sur un escabeau le nez dans la
bibliothèque. Le père affiche une moue d’insatisfaction. Bella au centre guide
les groupes A dans la chambre Germaine et B dans la chambre Trésor.
Sc 3 A Chambre Germaine
L’HOMME
Voici la plus belle chambre de la maison. La chambre Germaine. Impossible de
vous dire précisément de quand date ces boiseries et cette alcôve de style Louis
XV.
PIERRE-LOUIS
Hum hum, chambre Germaine…
L’HOMME
Oui c’était la chambre de Mme Chesneau, la dame qui a acheté le château à la
famille de Sallmard, qui en a fait une maison pour enfants !
PIERRE-LOUIS
Ah oui ? non.
L’HOMME
Mme Germaine Chesneau a caché des enfants juifs pendant la guerre.
PIERRE-LOUIS
Ah !
L’HOMME
C’était sa chambre, elle a servi de salle de classe pour les enfants durant la
guerre, l’une de ses filles est née ici/
PIERRE-LOUIS
Dans ce lit ? Cette Mme Chesneau a accouché ici ? Et elle y est morte aussi ?
L’HOMME
Dans ce lit ? non, pas à ma connaissance.
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PIERRE-LOUIS
C’est trop... Il n’y a pas une chambre plus moderne ?
L’HOMME
Ah, dans ce cas-là venez voir la chambre princesse.
Sc 4 A Chambre princesse
Pierre Louis a fait le tour de la chambre, reste pensif .
L’HOMME
Cependant si vous voulez voir les autres chambres/
PIERRE-LOUIS
Non c’est bon je vais m’installer ici. Il faut bien que je me pose quelque part !
PIERRE-LOUIS
Merde qu’est-ce que tu fous là ?
LISA
C’est un passage secret, comme dans les vieux châteaux !
PIERRE-LOUIS
C’est un vieux château. Arrête de me filmer !
PIERRE-LOUIS
Finalement on capte ici !
Il va dans la salle de bain
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Durant le coup de fil L’homme fouille dans les affaires de Pierre louis
L’HOMME
Le boulot ? Vous exercez dans ?
PIERRE-LOUIS
Le dentaire.
L’HOMME
Dentiste, bah dis donc.
PIERRE-LOUIS
Vous avez coupé l’eau ça ne coule pratiquement pas ?
L’HOMME
Non mais ça fait partie des choses que je dois vous expliquer. Le cheminement
de l’eau dans cette maison, tout un poème ; Imaginez un peu l’ancien système :
l’eau était pompée vers une bâche tout en haut au grenier avant d’être
redistribuée vers le bas afin qu’il y ait de la pression/
PIERRE-LOUIS
Là y’a pas de pression.
L’HOMME
Oui alors faudrait voir la vanne en bas.
PIERRE-LOUIS
Bon je pose ça et allons-y ! Personne ne se met en mouvement Je vous suis, je ne
sais pas où on va, donc je vous suis !
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Sc 3 B Chambre trésor
Lisa est accompagnée du fantôme de Bella
LISA
Elle a sorti une caméra, elle filme .
Bon voyons voir ce qu’on a là, pas mal soulevant des draps blancs recouvrant
le mobilier, bien conservé. Elle s’allonge sur le lit avec le livre de Soffrey. Elle
lit un poème.
Attends j’ai l’impression qu’il y a un passage secret au fond d’une armoire. Elle
ouvre la porte secrète effraye son père.
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PIERRE-LOUIS
Merde qu’est-ce que tu fous là ?
LISA
C’est un passage secret, comme dans les vieux châteaux !
PIERRE-LOUIS
C’est un vieux château ! Arrête de me filmer.
Sc 4 B Chambre Germaine
Quand le public entre Lisa bidouille un vieux gramophone qui est posé sur une
table au centre de la pièce, elle réussit à activer la machine qui laisse
s’échapper une musique grésillante, elle filme la chambre. Bella est là et Lisa
ressent sa présence. Soudain le frère surgit d’un placard. Lisa s’effondre de
peur.
LISA
Merde ! t’es con, tu m’as fait flipper, qu’est-ce que tu fous là ?
BASILE
T’es blanche comme un linge, t’as vu un fantôme !
LISA
T’es pas censé être là. Et oui tu m’as vraiment fait peur. Comment t’es venu ?
Il se marre
Ça me fait pas rire.
BASILE
C’était trop tentant !
LISA
Pourquoi t’es pas à l’internat ?
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BASILE
J’ai fait du stop, le lycée horticole est à seulement 15 km d’ici. Je voulais
partager le privilège de découvrir la nouvelle maison. C’est mieux que l’internat.
LISA
T’es là depuis quand ? Tu peux pas débarquer, sans autorisation.
BASILE
Je vous ai suivi, un vrai labyrinthe ce château temps Ça va j’ suis pas en maison
de redressement, commence pas à me faire la morale avec tes grands airs !
LISA
Tu nous as espionné ?
Il sort de la chambre
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SC 5 A et B Bibliothèque
Les deux groupes de spectateurs se rejoignent.
Lisa suit Basile quand le père sort de la chambre princesse, Basile se cache
rapidement sous la table, Lisa s’assoit.
PIERRE-LOUIS
Tu en fait une tête ! qu’est- ce qu’il y a ?
LISA
Rien. Toi aussi tu en fais une tête. Qu’est -ce qu’il y a ?
PIERRE-LOUIS
Rien. Un temps. Tu as trouvé une chambre c’est bon ?
LISA
Ça devrait le faire, c’est pas ça qui manque ! sourit faussement
PIERRE-LOUIS
Alors ranges tes affaires et commence pas à t’éparpiller. On se retrouve en bas
faut que je voie avec Monsieur cette histoire de pression.
Vous foutez de moi, t’es là depuis quand ? J’en ai pour un instant. Toi viens
avec moi. Le père et le fils sortent de la bibliothèque pour s’expliquer.
LISA ET LA LETTRE
Lisa a un carton contenant les affaires de son grand-père, vieux carnets, des
lettres, des photos, divers documents, des objets.
Lisa rapproche son carton l’ouvre cherche quelque chose dedans.
LISA
Vous êtes qui ?
L’HOMME
Qui je suis ?
LISA
Oui
L’HOMME
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Je suis, j’étais l’intendant de la maison.
LISA
Comme dans une pièce de Tchékhov
L’HOMME
Pardon ?
LISA
C’est du théâtre, un auteur russe qui raconte la vie, joie et drame de petites gens
et de leur maison.
L’HOMME déclamant
« Être ou ne pas être, telle est la question » La vie est un théâtre ! un temps Et
vous ?
LISA
Quoi moi ?
L’HOMME
Vous faite quoi ?
LISA
Du cinéma. J’ai eu mon bac.
L’HOMME
Félicitation. Et ça c’est quoi ?
LISA
Des affaires qui appartenaient à mon grand-père maternel Léo.
L’HOMME
Vous êtes de ce genre !
LISA
Quoi ? Ah ca ! quand on a déménagé de Paris mes parents allaient tout jeter de
toute façon. Mon grand-père est mort juste avant le covid, ca a dévasté maman.
Il a beaucoup écrit sur ma grand-mère que je n’ai pas connue, je crois que
personne ne la connaissait vraiment, alors je garde ses vieilles lettres, ses carnets
dans ce carton, des reliques, ça pourrait m’inspirer. J’aime les vieilleries, les
histoires.
L’HOMME
20
Alors, vous avez bien de la chance de vous trouver ici, des histoires il y en a
plein.
LISA
Dites m’en une.
L’HOMME
Ba tiens vous parlez de théâtre ici pendant la guerre Germaine Chesneau qui
cachait des enfants juifs dans son home d’enfant, hé bien elle faisait en sorte
qu’ils suivent l’école, c’est Nicolas Bernard, le petit fils de Tristan Bernard qui
leur donnait les cours de français. Vous connaissez Tristan Bernard ? il a écrit
du théâtre, il est célèbre ! C’est véridique ma grand-mère travaillait là à cette
époque.
LISA
Combien de pièces dans ce château ?
L’HOMME
24, peut-être plus, voici les clefs, je vous les confie, il y a des étiquettes pour les
plus utiles, certaines ne servent plus depuis longtemps, mais je les garde, des
reliques !
PIERRE-LOUIS
Vous me montrez ces tuyauteries ?
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Sc 6 B Cuisine
L’HOMME Une pince à la main
Pour la pression, il s’agit de desserrer délicatement à ce niveau et de jauger, un
peu plus, un peu moins faut voir.
PIERRE-LOUIS
Vous vous fichez de moi ?
PIERRE-LOUIS
Vous croyez que j’ai une gueule à me balader avec ma tenaille à chaque fois que
je vais prendre une douche ?
L’HOMME
Une pince. Je ne sais pas… à vous de voir. Un conseil à l’inverse resserrer
complétement quand vous vous absenter, des fuites peuvent survenir à tout
moment et à n’importe quel endroit sans que l’on s’en rende compte tout de
suite. À vous de voir !
PIERRE-LOUIS
Je n’apprécie pas du tout le ton sur lequel vous me parlez ! et tout ce que vous
sous entendez.
L’HOMME
Quel ton ? je sous-entends moi ?
PIERRE-LOUIS
Ne vous foutez pas de ma gueule ! « À vous de voir » ne vous délectez pas trop
de nous avoir refourgué votre baraque pourrie. Si ça n’avait tenu qu’a moi je ne
l’aurais pas achetée.
L’HOMME
Si ça n’avait tenu qu’a moi je ne l’aurais pas vendue !
PIERRE-LOUIS
Je l’ai acheté par amour pour ma femme.
L’HOMME
Votre femme l’a acheté.
22
PIERRE-LOUIS
Écoutez-moi bien ! Si j’apprends que vous avez parlé à qui que ce soit dans le
village ou aux alentours des circonstances de l’acquisition de cette maison, vous
aurez affaire à moi et à mes avocats !
PIERRE-LOUIS
Quelle merveille cette cuisine ! j’adore cuisiner enfin un bon point.
L’HOMME
Tant mieux c’est la seule pièce que vous pourrez chauffer convenablement
l’Hiver !
PIERRE-LOUIS
Comment ça y’a pas de chauffage ?
L’HOMME
Je vais vous montrer une dernière chose : la chaufferie, le reste vous le
découvrirez par vous-même.
PIERRE-LOUIS
Non, c’est bon j’ai eu mon lot de surprises, je vais appeler mes enfants c’est leur
tour ! La plomberie c’est pas mon truc. Basile, Lisa !
Un temps
BASILE
Oui papa ?
PIERRE-LOUIS
Tu veux voir avec Monsieur comment fonctionne la chaufferie ?
BASILE
Lisa peut voir ça non ? ce n’est pas une tâche réservée aux garçons. Vous la
trouverez dans le grand salon celui avec la cheminée.
PIERRE-LOUIS
Tu devrais te choisir une chambre. Je vais me prendre une douche.
BASILE
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Hé papa c’est incroyable comme endroit ; pourquoi ne pas m’avoir dit que
c’était un château !?
PIERRE-LOUIS
Pour te faire la surprise ! Tu aimes ?
BASILE
Oui, ça m’étonne de toi, il est un peu dans son jus quand même.
PIERRE-LOUIS
Oui mais vois le potentiel ! il faut avoir de l’ambition ! voir les choses en
grand !
BASILE
Et nous sommes « chatelains » !
PIERRE-LOUIS
Et oui nous sommes « chatelains » !
BASILE
Il y a largement la place, finalement je pourrais habiter avec vous, le lycée n’est
pas si loin. Tu connais ma passion pour la seconde guerre mondiale, j’aimerais
en savoir plus sur cette histoire de résistance et d’enfants cachés.
PIERRE-LOUIS
Tu pourras toujours te renseigner.
BASILE
Maman ça lui ferait plaisir aussi qu’on habite tous ensemble comme avant, non ?
Je me suis quand même calmé.
PIERRE-LOUIS
On en rediscutera. Allez fiston, c’est un nouveau départ, toujours aller de
l’avant ! Je suis fier de toi.
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SC 6 A Grand salon
Lisa et son frère. Elle se balade en filmant la pièce, lui est assis dans un
fauteuil. Long silence.
BASILE
Il manque plus que le tic-tac d’une vieille horloge. C’est vrai que ça serait
parfait pour tourner un film. Si tu as besoin d’un comédien ! Je serai toi, je
tournerai un film d’époque ou non d’horreur ! En fait les deux ! Silence Je suis
séropositif. Tu as décidé de m’ignorer ?
LISA
Le lycée horticole c’est ton truc ?
BASILE
Surprenant n’est-ce pas ? J’élargis mon champ de connaissances. M’occuper des
plantes, ça me donne un côté romantique. Et à l’internat je fais ce que je veux.
LISA
Tant mieux. En espérant que cette fois tu ne te fasses pas virer du lycée trop tôt !
au pire entre le parc et le jardin t’auras de quoi tailler ici.
BASILE
Dis, tu pourrais faire un effort avec papa ! apparemment t’as été extrêmement
désagréable pendant tout le trajet. Vous allez être en tête a tête pendant un
certain temps alors maitrise toi un peu !
LISA
Pardon ? Tu ne sais même pas de quoi tu parles, qu’est-ce qu’il est allé te
raconter !
BASILE
Juste un conseil, ne le prend pas comme ça ! regarde tu t’énerves, calme-toi !
LISA
Je le prends comme je veux, pas besoin de tes conseils. Tu viens de fuguer !
BASILE
Ca va t’inquiète pas pour moi, j’assume ! Je te demande juste de faire un effort
avec papa. Bon comment se profile cette année sabbatique ? Tu vas l’occuper à
ton passe-temps ? créer un chef d’œuvre ?
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Voix du père :
Basile, Lisa !
BASILE
Tu ne viens pas ?
Basile rejoint son père dans la cuisine
L’HOMME
La salle des machines ça vous intéresse ? Les Messieurs ont jeté l’éponge. Deux
vieilles chaudières au fioul, faut savoir qu’il y en a une grosse qui chauffe toute
la partie avant du château sur les trois étages puis une petite qui chauffe
l’arrière. Elles sont assez capricieuses et vous n’avez pas le choix soit vous
chauffez les trois étages, soit rien. À vous de voir. Si vous ne chauffez pas
l’arrière du château, les canalisations du grenier risquent de péter en cas de gel.
LISA
Ha.
L’HOMME
Donc là vous vérifiez le niveau de fioul avant de lancer la chaudière en appuyant
quelque seconde ici. Normalement ça part. Pour régler la température c’est ici,
c’est assez approximatif mais l’aiguille bouge quand même, si elle ne bouge pas
faut donner des petits coups de marteaux ici et ça débloque.
LISA
Des coups de marteau !?
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SC 7 A et B LE PREMIER REPAS
Les deux groupes de spectateurs se rejoignent dans le réfectoire.
BELLA
La visite avec l’ancien intendant ne s’est pas éternisée, le père l’a congédié et la
famille s’est retrouvée seule. Ils se sont retrouvés dans le réfectoire à l’heure du
soupé.
Ils mangent, les bruits des couverts résonnent. Lisa regarde son assiette et
triture sa nourriture. Le père guète son fils puis sa fille.
PIERRE-LOUIS
Basile tu es bien installé ?
BASILE
Je suis dans une chambre avec une porte blindée au fond, j’aimerais bien savoir
ce qu’il y a derrière, elle est fermée à clef. Il t’a laissé des clefs le mec ?
PIERRE-LOUIS
J’ai celle des portes d’entrées c’est tout. On regardera ça. Silence. Je suis content
que tu nous aies rejoints Basile pour cette première soirée.
LISA
Tu es content qu’il fugue, qu’il déconne à nouveau ? Nous avoir laissé seul à
Paris pendant 9 mois dans l’appartement de Papy n’était peut-être pas l’idée du
siècle. Combien de fois il a séché les cours, combien de fêtes dans
l’appartement, hein ? Et finir par se faire virer du Lycée.
PIERRE-LOUIS
Ne fais pas ta rabat-joie ! On était à Lyon avec ta mère pour trouver une maison,
qu’on a trouvé. Je trouve que ton frère a gagné en autonomie grâce à cette
expérience et là, il a fait preuve d’esprit d’initiative.
LISA Dépité
Ok
BASILE
Vois-tu j’avais envie de retrouver la famille, pour moi ça compte.
PIERRE-LOUIS
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Braver les règles parfois ça ne fait pas de mal.
LISA
On parle d’une fugue là ; pas d’un acte héroïque !
Son téléphone sonne, elle s’écarte de la table.
LISA
Oui on est bien arrivé ce matin avec papa. Enfin bien, façon de parler !
exactement comme d’habitude ! tu avais raison elle est incroyable cette maison
et moi aussi elle me fait beaucoup d’effets, je ressens quelque chose. Papa ? Mal
comme tu peux l’imaginer.
PIERRE-LOUIS
C’est ta mère au téléphone ? met le son, tu sais bien que le temps est limité !
LISA
Attends une seconde je vais passer en visio sur mes écrans.
SUZANNE
Bonjour, mais… Basile qu’est -ce que tu fais là ?
BASILE
Je…
PÈRE
J’ai finalement décidé qu’il pouvait nous rejoindre le premier Week-end pour
découvrir la maison.
BASILE
Maman n’es-tu pas censé te recentrer sur tes chakras ?
SUZANNE
Cette première semaine dans ton nouveau lycée s’est bien passé ?!
BASILE
Mais oui maman t’inquiète. J’ai déjà commencé à manier le sécateur ! Et les
différentes essences d’arbres n’ont plus de secret pour moi !
PIERRE-LOUIS
28
Et toi ton séjour bien être ?
SUZANNE
Je suis bien entourée, de personnes…intéressantes. Avec un sourire forcé Je
travaille sur moi ! Basile promet-moi que tu ne recommenceras pas comme à
Paris !
BASILE
Ne t’inquiète pas, je gère.
On entend une voix qui appelle la mère pour une séance de parole collective.
BASILE
Quand est-ce que t’en as fini avec ta secte ? Il faut absolument que tu vois ce
lieu c’est incroyable, tu vas adorer Maman !
SUZANNE
Je ne sais pas encore, je vous tiendrais au courant, je voulais vous dire que/
PIERRE-LOUIS
Non ce n’est pas vrai !
Il se lève paniqué, fait tomber quelque chose.
LISA
Ça va ça doit être un plomb qui a sauté, il t’a montré le disjoncteur le
Monsieur ?
PIERRE-LOUIS
Non, Le Monsieur, ne m’a pas montré le disjoncteur, il ne m’a rien montré !
LISA
Dis plutôt que tu n’as pas voulu qu’il te montre, il était plein de ressources et tu
l’as viré.
PIERRE-LOUIS
Lisa ne recommence pas, Merde ! j’aimerais qu’on trouve une source de
lumière.
BASILE
29
Papa, mon portable s’est éteint, c’est bizarre !
PIERRE-LOUIS
Comment ça, merde le mien aussi, pourquoi ?
LISA
Deux machos qui chient dessus parce qu’ils ont peur dans le noir, j’hallucine !
BASILE et PIERRE-LOUIS
On n’a pas peur.
LISA
Ouais, c’est ça ! Mon téléphone aussi s’est éteint.
LISA
Parce que tu penses que ton père te respecte, en te mentant ? Maman n’est pas
en stage de développement personnel à faire du yoga, elle est à l’hôpital
psychiatrique !
BASILE
N’importe quoi ! ce n’est pas vrai papa ?
PIERRE-LOUIS
Si, mais c’est ta mère, c’est Suzanne qui a voulu te le cacher, pour t’épargner.
On pourrait remettre le courant les enfants ?
LISA
Basile c’est faux, c’est faux il fait toujours comme ça l’arrange.
30
Bella découvre un écran de cinéma
- L’Homme : Bonjour,
- Pierre-Louis : Bonjour, nous venons pour la maison, enfin le château
- L’Homme : l’agent immobilier m’a prévenu
- Pierre-Louis : Oui il n’a pas pu venir aujourd’hui, mais ma femme voulait
absolument voir ce bien qui si j’ai bien compris va être mis aux enchères
sous peu.
- L’Homme : Tout à fait, la situation est particulière depuis que je suis seul…
et je suis contraint de vendre
- Pierre-Louis : Je vous le dis tout de suite, je ne pense pas que ca va
correspondre à ce qu’on recherche, c’est un peu grand pour quatre
personnes !
- Suzanne : Non
- Pierre-Louis : Non quoi ? c’est trop grand on est d’accord, non ?
- Suzanne : Non
- L’Homme : Madame veut peut- être visiter ?
- Suzanne : Non/ J’achète
- L’Homme : Attendez, des fois elle parle comme ca !
- Suzanne : Monsieur préparez-vous à venir signer chez le notaire aujourd’hui
même, j’achète !
Pierre-Louis l’emmène à l’écart pour essayer de la raisonner
- Pierre-Louis : Suzanne t’es pas sérieuse, tu vois bien que c’est un château, on
ne va pas acheter un château ? Soit raisonnable
Soudain Suzanne est prise de vivent douleurs au bas ventre
- Suzanne : Ha
- Pierre-Louis : Qu’est qu’il y a chérie ?
La douleur de Suzanne s’intensifie, elle s’appuie d’abord contre la voiture et se
met à souffler fort comme pour calmer des contractions.
31
- L’Homme : Heu ça n’a pas l’air d’aller.
- Pierre-Louis : s’il vous plait ça va je gère
Suzanne s’écroule au sol, un temps, la douleur semble être passer, elle se
balance assise les genoux repliés dans ses mains, elle fredonne une berceuse
Yiddish.
- Pierre-Louis : On va y aller Suzanne, d’accord ?
- Suzanne : reprenant ses esprits : Non, ça va.
- Pierre-Louis : Comment ça ça va », on aurait dit que tu allais crever, non ça
ne va pas, tu fais une rechute.
- Suzanne : Je ne sais pas ce qui vient de se passer mais je te dis que ça va.
- L’Homme : Madame ?
- Suzanne : je vous achète le château, je le veux. J’ai encore la force d’aller
signer un compromis.
- L’Homme : Très bien retrouvons- nous chez Monsieur Croze demain à la
première heure.
- Pierre-Louis : C’est un peu précipité non !?
- Suzanne : J’ai besoin de cette maison, je l’achète.
FIN
32
EPISODE 2 L’HIVER
Une inquiétante étrangeté
PARC
INSTALLATION : le campement
Dans le parc, une reconstitution de campement de résistant. Le Fils, Basile en
tenue de résistant a dormi dehors dans des couvertures, mange dans une
gamelle, relève un piège. Il prépare son rôle pour le film de sa sœur avec la
technique de l’Actor Studio, il vit son rôle pour pouvoir l’interpréter.
Sa sœur fait des test vidéo.
Le fantôme de Bella accueille également le public qui arrive sur le chemin.
REFECTOIRE
PROJECTION : Précédemment
Bande annonce résumant l’épisode précédent « L’Automne » :
Bella accueil le public, elle arrive de l’extérieur. Elle fait le lien entre acteurs
/spectateurs, Mort/Vivant. Elle porte « le manuel des personnes récemment
décédées ».
BELLA
Bonjour à tous, j’étais avec les deux jeunes dans la forêt, je ne me lasse pas de
les observer, il faut avouer qu’un monde nous sépare. Elle prend le temps
d’observer les spectateurs Heureuse de retrouver ceux qui sont déjà passé par ici
et bienvenu aux nouveaux. Vous avez atterri dans ce Château, le château de
Sallmard, votre arrivée ici génère surement des doutes, des questionnements,
dites-vous que les tracas du quotidien sont en ce moment derrière vous, ce qui
devrait directement être associé une cessation du stress. Il fait froid, dites-vous
que c’est une des conditions a se retrouver dans la situation dans laquelle nous
trouvons tous, dites-vous aussi qu’il est possible de trouver toutes sortes de
charmes extraordinaire a l’expérience inhabituel d’aujourd’hui qui n’a pas été
expérimenté auparavant. Je vais m’arrêter là avant de vous embrouiller l’esprit
33
et de tomber dans la confusion. Je propose une rétrospection sous forme de
panorama. Et ensuite laissez-vous guider.
Vidéo :« Mais papa vous ne l’avez pas visité avec maman la maison avant de
l’acheter ? » « Basile mais qu’est que tu fais là ? » « Ça ce sont les lettres de
mon grand-père Léo … » « Lisa ça suffit on va pas recommencer ! » « Maman
elle serait contente qu’on habite tous ensemble comme avant » « Maman elle
est en hôpital psychiatrique ! il ment, il ment ». « Suzanne on ne va pas acheter
un château, sois raisonnable ».
PIERRE-LOUIS
En off Laisse-moi porter ton carton.
SUZANNE
Non je te dis que ça va. On passe pas par l’escalier ?
PIERRE-LOUIS
Non, j’aime pas passer par là.
SUZANNE
Je me souviens d’eux.
PIERRE-LOUIS
De quoi tu parles ? Il fait trop froid dans cet escalier et ces tableaux me glacent
le sang. Viens, on va se réchauffer à la cuisine !
PIERRE-LOUIS En off
Tu ne viens pas ? j’ai allumé un feu dans la cuisine avant de partir pour qu’il
fasse bien chaud.
Il revient Suzanne ça va ?
SUZANNE
Oui parfaitement.
34
Elle a posé son carton sur la table au centre de la pièce, ses mains sont toujours
posées sur le carton, elle reste comme ça immobile, comme si elle écoutait.
PIERRE-LOUIS
Tu ne viens pas au chaud ?
SUZANNE
Je n’ai pas froid.
PIERRE-LOUIS
Bon. Il repart en cuisine et revient avec un bouquet de fleur (pas de saison).
Je voulais que tu saches que je suis heureux que tu sois là et je m’en veux de
tout, la manière dont les choses se sont passées ; je ne savais plus quoi faire,
c’était peut-être la solution de facilité, pour moi. Tu m’as manqué.
Il la serre dans ses bras
SUZANNE
Je ne t’en veux pas. Des roses en hiver. Je suis contente d’être revenue.
PIERRE-LOUIS
Le séjour t’a fait du bien, tu es très belle Suzanne. Ce n’était pas une si mauvaise
idée cette maison de repos. Un temps Qu’est-ce que tu as dans ce carton ?
SUZANNE
Mes toiles.
PIERRE-LOUIS
Tu peins ? De l’art thérapie ? j’ai entendu dire qu’il préconisait cette pratique
pour divers troubles psychiques !
SUZANNE
Pierre-Louis, je n’ai pas de pathologie spécifique. J’ai un traitement léger, et un
état d’âme mélancolique, voilà tout. C’est la pièce idéale pour exposer mes
peintures.
LISA
Maman ! Trop contente que tu sois enfin là.
BASILE
Salut, Maman. Ça va ?
35
SUZANNE
Bonjour mon grand. Vous allez bien ?
BASILE
C’était pas trop difficile l’hôpital psy.
PIERRE-LOUIS
Maison de repos.
LISA
On était en plein repérages pour mon projet de film dont je t’ai parlé.
BASILE
Et elle s’est incliné face à mon talent inné !
SUZANNE
Tu joues un résistant ?
PIERRE-LOUIS
Il passe sa vie dans le parc !
LISA
Depuis que papa lui a acheté toute la panoplie, costume, tente, accessoires
d’époque, il vit dehors.
BASILE
Avoue que ça t’arrange bien pour ton film !
LISA
En attendant moi j’économise toujours pour du matériel.
SUZANNE
Tu dors dans le parc Basile ?
BASILE
T’inquiète maman. Question température, dedans dehors, c’est la même chose.
PIERRE-LOUIS
J’ai essayé de le raisonner, rien à faire.
LISA
Si seulement la chaudière fonctionnait correctement !
36
PIERRE-LOUIS
Ça va Lisa !
LISA
Il s’est cru à Hollywood !
BASILE
Tu m’as quand même choisi pour jouer dans ton film ! donc…
SUZANNE
Que c’est bon de vous entendre !
PIERRE-LOUIS
Vous voulez pas aller dans la cuisine ? On y est bien, il fait chaud…
SUZANNE
Non, c’est moi qui les ai peints !
LISA
Ha bon, ils ressemblent beaucoup à ceux de ta mère non ?
SUZANNE
Je sais pas.
LISA
Tu vois les tableaux de fleurs que grand-père Léo avait dans sa chambre ? c’était
bien ceux de ta mère Bella ?
SUZANNE
Lisa tu me pose de ces questions ! Des tableaux de fleurs ça reste des natures
mortes.
BASILE
Des roses en hiver ! c’est toi papa ? ça craint, tu sais d’où elles viennent au
moins ? faut arrêter de faire ça !
37
SUZANNE
C’était pour me faire plaisir Basile.
PIERRE-LOUIS
Bon moi je vais en cuisine ! Qui m’aime me suive !
Le père sort vers la cuisine
BASILE
Je vais relever les pièges ! Lisa on se retrouve pour…tu sais !
LISA
Si seulement j’avais su ce qui s’était passé, j’aurais tout fait pour l’empêcher de
t’enfermer. Tu m’as dit que la maison t’avait chamboulée, papa n’a pas voulu
me raconter ce qu’il s’est réellement passé, dis-moi.
SUZANNE
Y’a rien à dire Lisa cette maison m’a fait de l’effet, j’ai su que je devais y être,
maintenant j’y suis. Je crois que ton père a juste été dépassé par la situation, et la
rapidité de ma décision.
LISA
La décision d’acheter le château ? Suzanne acquiesce Et c’est tout ? Maman
qu’est-ce que tu as fait pour que papa t’envoies en HP ?
SUZANNE
Une sorte de crise. Je sais pas comment expliquer ce qui s’est passé, sans passer
pour une folle.
LISA
Essaye !
SUZANNE
Je n’arrive même pas à me l’expliquer à moi-même ! Je crois que j’ai perdu le
control. C’est la maison qui...silence.
LISA
La maison qui quoi ? Silence qui t’a fait un signe ? La maison t’a parlé ? Tu as
entendu des voix ? en mode « Je vois des gens qui sont mort ».
SUZANNE
J’en sais rien Lisa.
LISA
38
On pourrait se parler vraiment, arrêter d’esquiver. Moi aussi maman, je sens des
choses ici.
SUZANNE
Hum hum Elle essaye de placer ses tableaux
LISA
J’ai décidé d’enquêter sur la maison.
Un silence
SUZANNE
Quand je suis arrivée, elle m’a…hypnotisée, puis j’ai eu mal, tous mes muscles
se sont crispés… comme quand j’accouchais de toi et ton frère. Ça venait du
plus profond de moi.
LISA
Des contractions ?
SUZANNE
Oui c’est ça, et puis d’un coup s’est passé et j’ai su qu’il fallait que j’achète le
château.
LISA
Ok…et papa à paniqué, logique ! Un temps elles se regardent.
SUZANNE
Je vais me reposer au petit salon, on se voit pour manger.
LISA
Je retourne à mon enquête !
SUZANNE
Tu devrais jeter un coup d’œil dans le bureau en bas de la grosse armoire.
LISA
Quoi ?
La mère est déjà partie
LISA
Elle est partie s’installer au petit salon.
39
PIERRE-LOUIS
Ha bon mais pourquoi ? tu lui as fait faire le tour ?
LISA
Non.
PIERRE-LOUIS
Tu entends ?
LISA
Non
PIERRE-LOUIS
Un léger sifflement, non ? Ce doit être la chaudière, faut que je retourne voir ça.
Interscène
BELLA
La famille est enfin réunie, ça me réchauffe le cœur rire! La maison reprend vie.
Elle est faite pour qu’il y ait du mouvement, de l’agitation, de l’effervescence,
chacun peut s’affairer dans son coin, telle une ruche. Dans les souvenirs
d’enfance qui me reviennent c’est ce sentiment d’émulation qui domine, il se
passe toujours quelque chose quelque part ; on peut être dans une même maison
mais ne pas vivre la même histoire.
Le public placé par petit groupe dans 4 pièces en enfilade dans le château
guidé par Bella. 50 spec : 4 groupes : 10 +10+15+15
Père/Mère/Fille/ Fils/ Bella .Donner à voir l’effervescence.
40
Un moment de solitude simultané, pour chaque personnage chacun avec un
groupe de spectateur.
Bureau
Lisa cherche dans le bureau, s’assoit. Un temps. A la sensation qu’il y a du
monde autour d’elle.
Jamais l’impression d’être seule dans cette maison ! Continue à chercher dans
une armoire et trouve un registre, le feuillette. Elle est assise au bureau comme
Germaine dans la vidéo.
LISA
Incroyable les registres entrée/sortie des enfants cachés ! évidemment dans le
bureau de Germaine Chesneau pourquoi je n’y ai pas pensé plus tôt !
Bella déplace des objets. Elle ressort les fusils de basile pour les placer en
évidence sur le lit. Elle place au mur un tableau de Suzanne. Elle place la caisse
à outil au pied du lit.
Petit salon
Suzanne ouvre une petite porte secrète, un son en sort, elle donne sur un petit
lavabo avec miroir, elle s’observe puis se recoiffe ; Bella est derrière elle.
Elle découvre qu’un bouton de son manteau s’est défait. Bella lui indique une
autre porte secrète pour trouver le nécessaire a couture ! « Oh ba ça alors ! »
Elle finit par sortir sa flute traversière qui va se mêler au son de la maison.
Billard
Pierre-Louis Fait les cent pas à côté de la porte de la chaufferie. Un bruit
strident provient de l’intérieur de la salle des machines ? pas sûr que ça
provienne de là, Pierre-Louis se bouche et se débouche les oreilles aves ses
mains. Il marmonne quelque chose qu’on ne comprend pas.
Puis entre dans la pièce où se trouve la chaudière, déplace du bazar, fulmine.
PIERRE-LOUIS
Et voilà l’aiguille pression est de nouveau sur le zéro ! Merde ! Je ne comprends
pas comment fonctionne cette foutue machine. Il inspire puis expire comme un
41
exercice de relaxation Les outils ? criant Basile ! Basile apporte moi la boite à
outils s’il te plait !
LISA
Fort Il relève ses pièges…
Elle lit les noms d’enfants inscrit sur le registre
PIERRE-LOUIS
Je vais me débrouiller !
Il traverse toutes les petites pièces en enfilades, passe le bureau va dans l’entrée
et revient. Je ne retrouve rien dans cette baraque ! Lisa j’avais laissé les outils
dans l’entrée, tu les as bougés ?
LISA
Non j’ai rien touché.
PIERRE-LOUIS
Fort J’aimerais que les outils restent à leur place d’outils. Pierre Louis repart
vers la chaufferie en passant par la petite salle à Manger ou il tombe sur la
caisse à outils. Qu’est-ce qu’ils font là ! Très bien, super, merci pour la blague.
il voit dépasser, sous un drap, un fusil. Qu’est-ce que c’est que ça ! Basile ? Il va
m’entendre ! se ravise, prend sur lui, inspire, expire bruyamment On verra plus
tard. Il retourne à la chaufferie avec la caisse à outils, marque un court arrêt au
petit salon. Tout va bien ma chérie ?
SUZANNE
S’arrêtant de jouer de la flute pour lui répondre J’ai retrouvé la cachette à
couture.
PIERRE-LOUIS
Ha, tant mieux ! Moi je ne retrouve strictement rien… pourquoi tu dis
« retrouver » ? Mais elle a repris sa flute. Une fois de retour dans la chaufferie
il continuera à pester contre Basile et l’arme qu’il a trouvé.
BASILE
Lisa t’es ou ? je t’attends ! Il entre dans le bureau, il porte une branche de pin
qui fera office de sapin.
LISA
Super la discrétion ! Maman est juste à coté …
BASILE
42
T’inquiète si on passe vite elle se rendra compte de rien. Pas envie de faire le
tour, c’est ton idée !
LISA
Les décorations ?
BELLA
Dans le placard du haut.
BASILE et LISA
Tu nous parles ?
Ils trouvent des décos dans le placard du haut, trainent la branche jusqu’au
Billard.
Une fois que les enfants ont dépassé le petit salon ou Suzanne joue de la flute,
Bella va guider Suzanne en sens inverse vers le couloir.
LISA
Ici c’est bien !
PIERRE-LOUIS
Qu’est-ce que vous faites ?
LISA
Bah on prépare le sapin.
BASILE
La branche… pour fêter Noël avec Maman !
PIERRE-LOUIS
En Février ? N’importe quoi, c’est ridicule, bon, je capitule Il pose ses outils
Suzanne, je suis désolée mais il va falloir bien te couvrir parce que cette
chaudière de merde ne chauffera pas ce soir ! ou est-ce qu’elle est passée ?
Suzanne, Suzanne…Il retraverse les pièces en enfilades répétant pour lui-même
« Pour fêter Noël avec Maman ! »
43
Le public se déplace par le petit escalier vers Monseigneur.
Lisa pose les registres qu’elle a trouvés sur un grand bureau ou se trouve
aussi tous les indices qu’elle a récoltés : vieilles photos, vieilles bobines vidéo
d’archives, son carton avec les lettres et carnet de son grand-père…
Dans la pièce il y a aussi un autre bureau avec tout son matériel vidéo,
caméra, écran, vidéo projecteur.
C’est son Quartier général avec canapé…
Le temps que les spectateurs prennent place, elle lit les prénoms des enfants
du registre.
LISA
Reprenons chronologiquement : La mort de Papi Léo/ L’état de maman qui se
dégrade/ Papa et Maman nous laissent seul à Paris dans l’appartement de papy le
temps de trouver une maison dans le sud/ Pour un nouveau départ/ Ils trouvent le
château / Maman fait une crise/ Papa décide de l’interner/ Nous emménageons
papa et moi/ Basile est à l’internat à 3 kilomètres d’ici/ Papa déteste la maison/
j’ai la sensation que la maison veut /
PIERRE-LOUIS entrant
Suzanne est passée par là ?
LISA
Elle jouait de la flute en bas. Basile traverse la pièce avec un livre
Vous vous êtes donnez le mot ? c’est mon espace !
BASILE
T’as choisi une pièce traversante, on la traverse ! Au fait t’as regardé ce qu’on a
filmé tout à l’heure ? On y croit ?
LISA
Pas encore. Qu’est-ce qui t’a pris ? de base, t’avais pas de texte et là tu
m’improvise tout un monologue « Je suis Abel, j’ai 14 ans je veux combattre
l’ennemi qui m’a arraché mes parents, à moi et ma pauvre petite sœur, je suis
prêt à en découdre avec ces salauds de Nazis … » c’était quoi ça, c’est ton truc à
l’Actor Studio ?
44
BASILE
Bah…
LISA
Bah… c’était canon j’adore mais tu l’as sorti d’où cette histoire ?
BASILE
Ça m’est venu comme ça, le génie de l’improvisation ! Mon inspiration me
dictait les paroles !
Il se pose sur un canapé et regarde son livre sur les empreintes Bella est à
proximité
LISA
Ne te la pète pas trop quand même ! Un temps Heu, tu vas rester là ?
BASILE
J’ai trouvé des empreintes autour de mon campement, je me demande de quoi,
j’avais repéré ce livre dans la bibli… toutes les empreintes : « Marque en creux
ou en relief laissée par un corps qu'on presse sur une surface. Marque profonde,
durable. »
LISA
Les empreintes ! Mouais, bon alors moi j’ai trouvé les registres entrée/sortie des
enfants juifs, ils ont commencé à arriver en 42, cette Mme Chesneau les cachait
parmi les autres enfants qu’elle accueillait dans la maison. Le château a été
occupé par les Allemands en 44 ; Les enfants changeaient de noms à leur
arrivée, les Allemands sont repartis …
Une vidéo se déclenche toute seul c’est une interview de Germaine Chesneau.
Ils la regardent un temps.
LISA
Basile c’est toi qui a lancé la vidéo ?
BASILE
J’ai un livre dans les mains !
LISA
Ok…
BASILE
Qu’est ce qui s’est passé ?
45
LISA
Je viens de numériser une VHS mais j’avais pas encore écouté le contenu. Elle
farfouille dans les câbles Bon ça a dû se déclencher …tout seul.
BASILE
A mon avis le château est construit sur une zone énergétique avec un taux
vibratoire élevé ! Ca peut détraquer les ondes, je te le dis ! toutes les fois où la
lumière saute et que nos tel se déconnectent sans raison c’est surement le
magnétisme ! Rappelle-toi le premier repas qu’on a passé ici comme il avait
flippé Papa ! il rit
Suzanne entre par la porte de la chambre accolée. Bella est assise sur un
canapé dans la pièce et se redresse quand Suzanne entre la faisant sursauter,
Basile : Ça va Maman, j’t’ai fait peur ? t’es pale.
SUZANNE
C’est ici que tu « mènes l’enquête » ! quelles trouvailles ?
LISA
Un registre des enfants Juifs que Mme Chesneau cachait, avec leurs faux noms
et les dates d’entrées et de sorties. J’essaye d’avoir un maximum d’infos sur ce
qui s’est passé dans ce château. Des vidéos aussi, VHS et des vieilles bobines.
En fait j’écris mon film en m’inspirant de l’histoire de cette maison, là pour
l’instant ma ligne narrative n’est pas claire, je suis un peu perdue sur ce que je
veux vraiment raconter, c’est comme s’il me manquait des pièces du puzzle.
BASILE
Je lui dis qu’il faut absolument qu’il y ait des Zombies dans son film !
SUZANNE
D’accord. Montrant un carton sur lr bureau. Et ca c’est quoi ?
LISA
Des babioles de Papy Léo.
Suzanne s’apprête à sortir par les petits escaliers. Les enfants se regardent, se
font un signe stop.
BASILE
Maman pas par-là ! On t’a préparé/
LISA
46
On préfèrerait que tu traverses pas le grand salon.
Suzanne fait demi-tour et en passant près du bureau de Lisa, elle fait tomber le
carton de Papy léo. Bella ramasse les affaires mais laisse au sol un carnet. Un
moment de suspend. Elle va pour sortir.
SUZANNE
Rassurez-vous, tout va bien, là, je me sens bien.
BASILE
Tu crois qu’elle est défoncée aux médocs maman ?
LISA
Elle a toujours été comme ça, un peu dans les vapes.
BASILE
Elle a dû se sentir seule, moi qui la croyais en stage bien-être, quel con !
LISA
Basile, tu pouvais pas deviner, j’aurais dû te le dire plus tôt.
BASILE
Je ne parle pas de moi !
Il sort
LISA
Lisa ramasse le carnet resté au sol et lit.
Bella mon amour de toujours, tu dors d’un sommeil fiévreux, agité, tu parles
dans ton sommeil. Paroles qui ne cessent d’ajouter du mystère au mystère. Tu
me resteras à tout jamais voilée. Étrangère à toi-même ! tes cauchemars
reviennent : clac clac, les bottes. Tu penses aux Allemands dans les rues pavées,
à la guerre de notre enfance. Toi qui pourtant n’a connu que la vie à la ferme, tes
chats, les vaches, la messe venant rythmer ton quotidien d’enfant unique
protégée des tourments. Cette phrase que tu me répètes en te réveillant m’obsède
: « Je rêve que je n’ai pas le droit de rêver et cependant je rêve. »
47
Scène 4 : Un faux repas de Noël
Ils fêtent Noël à retardement.
PIERRE-LOUIS
Qui est là ? y’a quelqu’un ? Elle est vraiment nul votre blague. Les enfants, vous
le savez que je n’aime pas être dans le noir ! Lisa ? Basile, je sais que tu m’en
veux de t’avoir caché la vérité pour maman, mais là ça devient puérile ! Allez ça
suffit, on est tous réunis, oublions le passé veux-tu ? vous allez gâcher la soirée.
Basile, Lisa allez c’est bon j’ai pas du tout envie de rire.
SUZANNE
Tout va bien Pierre-Louis ?
PIERRE-LOUIS
Oui je, j’ai cru, un courant d’air. Waou, Suzanne, tu es magnifique. Tout va très
bien maintenant que tu es là, je suis ému de te retrouver plus belle que jamais.
Les plombs ont encore sauté ! il va dans la chaufferie Tiens la chaudière s’est
allumée !
SUZANNE
Vraiment ? une soirée de Noël !
PIERRE-LOUIS
Les enfants voulaient te faire une surprise, c’est raté.
SUZANNE
Viens cachons-nous, c’est nous qui allons les surprendre.
PIERRE-LOUIS
Suzanne, c’est pas la peine, ils vont pas se formaliser, ils sont grands, on va pas
se cacher comme des gamins !
SUZANNE
Ne fais pas ton rabat-joie. Par ici.
En off
48
PIERRE-LOUIS
Attends Suzanne qu’est-ce que tu fais ?
SUZANNE
A ton avis ?
PIERRE-LOUIS
Là ? maintenant ? les enfants vont surement arriver d’une minute à l’autre !
SUZANNE
Pierre Louis, ils ne vont pas se formaliser, ils sont grands !
PIERRE-LOUIS
Oh et puis merde t’as raison. On entend des bruits de lit et d’objets qui tombent.
On entend également des bruits de pas dans la pièce du dessus.
BASILE
Au micro Oui. Test test « à toi belle et grande maison qui a traversé les
siècles… »
SUZANNE
Alors ? qu’est-ce que vous manigancez ?
LISA
Ok dans la petite chapelle !
PIERRE-LOUIS
C’est Suzanne qui voulait visiter...la petite chapelle...
BASILE
C’est bon papa sérieux tais-toi.
SUZANNE
C’est une excellente idée de fêter un non-Noël !
49
PIERRE-LOUIS
On est heureux que cela te rende heureuse.
LISA
Pardon ?
BASILE
Ha ! « Excellente idée » hein papa !
PIERRE-LOUIS
Jamais dit le contraire.
LISA
Quoi ?
PIERRE-LOUIS
Lisa, qu’est-ce que tu cherches ?
BASILE
Lisa laisse.
LISA
Mais non. Je comprends pas pourquoi il fait ça à chaque fois, retourner la
situation à son avantage. C’est pas une tare de reconnaitre ses faiblesses,
merde… il prétend vouloir « nous éduquer » !
PIERRE-LOUIS
Mais elle a un grain, c’est pas possible !
PIERRE-LOUIS
Suzanne ce n’est pas ce que je voulais dire ! Personne n’est fou/
SUZANNE
S’il vous plait tous les deux… c’est Noël !
Basile lance la musique d’un karaoké chanson de Noël « It’s the most wonderful
time of the year » Andy William
Basile commence à chanter, rejoins par sa mère et sa sœur qui esquisse avec
son père quelques pas de danse puis toute la famille chante en cœur ( petite
50
chorégraphie) . Ils prennent la pose, se servent de la table comme d’une
estrade. Bella est assise dans l’un des fauteuil près de la cheminée et assiste
avec joie à la scène de transe. A la dernière note chacun a une coupe à la main
et Basile tient le micro.
It's the most wonderful time of the year /C'est le moment le plus merveilleux de l'année
With the kids jingle belling /Avec les enfants et leurs grelots qui sonnent
And everyone telling you "be of good cheer"/Et tout le monde te dit "sois de bonne humeur"
It's the most wonderful time of the year /C'est le moment le plus merveilleux de l'année
It's the hap-happiest season of all / C'est la saison la plus heureuse de toutes
With those holiday greetings / Avec ces vœux de vacances
And gay happy meetings when friends come to call / Et les réunions heureuse et gaie quand
les amis appellent
It's the hap-happiest season of all /C'est la saison la plus heureuse de toutes
There'll be parties for hosting /Il y aura des fêtes à héberger
Marshmallows for toasting / Guimauves a griller
And caroling out in the snow / Et chanter dans la neige
There'll be scary ghost stories /Il y aura des histoires de fantômes effrayantes
And tales of the glories / Et les contes des gloires
Of Christmases long, long ago / Des Noëls depuis longtemps, il y a longtemps
It's the most wonderful time of the year / C'est le moment le plus merveilleux de l'année
There'll be much mistletoeing / Il y aura beaucoup de gui
And hearts will be glowing when loved ones are near / Et les cœurs brilleront quand les
proches seront proches
It's the most wonderful time of the year / C'est le moment le plus merveilleux de l'année
There'll be parties for hosting / Il y aura des fêtes à héberger
Marshmallows for toasting / Guimauves pour la grillade
And caroling out in the snow / Et chanter dans la neige
There'll be scary ghost stories / Il y aura des histoires de fantômes effrayantes
And tales of the glories / Et les contes des gloires
Of Christmases long, long ago /Des Noëls depuis longtemps, il y a longtemps
It's the most wonderful time of the year /C'est le moment le plus merveilleux de l'année
There'll be much mistletoeing /Il y aura beaucoup de gui de Noël
And hearts will be glowing when loved ones are near / Et les coeurs brilleront quand les
proches seront proches
It's the most wonderful time / C'est le moment le plus merveilleux
Yes the most wonderful time /Oui le moment le plus merveilleux
Oh the most wonderful time of the year / Oh le moment le plus merveilleux de l'année.
PIERRE-LOUIS
Nos coupes sont vides, ha, ha !
SUZANNE.
J’ai une faim de loup, si on mangeait ?
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PIERRE-LOUIS.
Installez-vous, je vais arranger ça. Je ne sais pas vous, mais ce petit air de Noël
m’a mis en joie. Il sort chercher à manger.
Rires
BASILE Tu sais bien qu’elle ne l’a pas connue ! Maman tu penses que je
pourrais quitter l’internat pour venir habiter avec vous ?
BASILE Gratin/
Silence chacun dans ses pensées/ Suzanne saisi le mouchoir brodé que Bella
avait déposé sur la table.
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BASILE
J’ai trouvé des empreintes de loup dans le parc, un temps j’avais repéré les
lièvres, les renards et les chevreuils mais je ne pensais pas que les loups du
Vercors viendraient si bas.
LISA
N’importe quoi ! c’est surement un chien ! y’a pas de loup ici, Papa ? Maman ?
BASILE
D’après mes recherches, ce sont bien des empreintes de loup.
BASILE
Et concernant l’internat ? je ne suis pas si sûr de poursuivre dans l’horticulture !
SUZANNE J’ai pensé qu’il y avait des enfants que nous devions garder, tout
simplement.
SUZANNE Des adultes aussi nous ont rejoint ; ils nous ont beaucoup aidés à
l’entretien de ces enfants.
SUZANNE On a vécu comme on a toujours vécu dans cette maison, comme une
grande famille.
PIERRE-LOUIS Heu oui, on va s’attacher à vivre comme une famille, hein les
enfants ?
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SUZANNE Les enfants se sont intégrés petit à petit, tous ne sont pas arrivés en
même temps.
BASILE Maman ça va ?
SUZANNE Mais oui, pourquoi vous me regardez tous avec des yeux de merlan
frit ? Pierre-Louis je ne me sent absolument pas en danger, et ne t’inquiète pas,
les somnifères je les prends en fin de repas, sinon je m’endors au milieu de la
soirée ! elle rit j’aime beaucoup ce gratin de « raviole », rassure-toi c’est
délicieux !
LISA Mais t’étais là maman ? tu as entendu la vidéo tout à l’heure ? Basile c’est
les paroles de Germaine Chesneau. A Pierre-Louis On a trouvé une cassette
vidéo avec une interview de Germaine et maman vient de dire exactement/
PIERRE-LOUIS On pourrait tenir des propos cohérent s’il vous plait ? Lisa
arrête avec cette Germaine, ça tourne à l’obsession ! Trinquons à l’avenir,
arrêtons de ressasser les vieilles histoires, place aux vivant ! Et Lisa, je voulais
te remercier d’avoir réparer la chaudière.
LISA Il faudra te faire à l’idée que cette maison est pleine de fantômes !
SUZANNE Les fantômes ne sont pas des absents mais des invisibles.
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Ils déballent leurs cadeaux : Un pull de Noel pour chacun
PIERRE-LOUIS Son pull est bien trop grand Vous avez fait exprès pour que
j’ai l’aire ridicule ?
Ils rient tous de bon cœur en se moquant de Pierre Louis. Un Polaroïd pour Lisa.
Un couteau pour Basile. Un châle pour Suzanne.
PIERRE-LOUIS Peu importe, on avait dit non pour les armes, je t’ai payé tout
l’équipement, c’est comme ça que tu me remercie ?
SUZANNE Lisa merci pour cette soirée… je n’ai pas prévu de cadeau pour
vous…Je sais que tout ne se passe pas comme tu l’aurais voulu, depuis la mort
de papy…j’ai pas voulu vous laisser tout seul ton frère et toi à Paris… je n’ai
pas ta force de caractère, je me laisse porter…tiens, j’ai ceci pour toi, je te
l’aurais donnée un jour ou l’autre, elle retire une bague de son doigt et la lui
tend c’était à ma mère, Bella, c’est ton grand-père qui me l’a donné. Cette
bague/
LISA. Maman ?
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LISA Maman, il se passe certaines choses que je n’explique pas, je sens que / je
dois suivre une piste / cette maison elle veut quelque chose/ et ça nous concerne.
LISA Venez tous prêt du sapin, je vais prendre une photo ! Bazille refuse de
s’approcher Aller vient ! plutôt maman au centre, échangez de place, Basile à
coté de maman, Papa reste debout, détend toi, on dirait que tu sais pas quoi faire
de tes mains !
PIERRE-LOUIS depuis l’étage Y’a rien, y’a rien, y’a rien ! Tout est en place !
PIERRE-LOUIS Vous avez tous entendu, comme moi ? Quelqu’un a déplacé les
meubles ! Pourquoi tout est à sa place ? où est le gramophone ? Où EST LE
GRAMOPHONE !
BASILE Quoi ?
A l’étage
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SUZANNE Calme toi, y’a pas de gramophone ! Pierre Louis ça va aller !
FIN
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Lisa pour pousser son enquête sur la mémoire de la famille décide de
rencontrer quelqu’un de proche de la famille de sa mère des arrières
grands parents paysans./ou quelqu’un du village qui a bien connu l’histoire
du château…
EPISODE 3 : LE PRINTEMPS
Est-ce qu’il s’est passé quelque chose avec Bazile dans la fôret. Il a subi une
attaque de loup ? L’âme du loup et la sienne se sont mêlée ? Il devient mystique.
Père et fils Le père entre les deux statues regarde le jardin puis le château. Il
s’adosse à l’une des statues repense à la crise de Suzanne. Le fils arrive du
jardin fait sursauter son père.
Qu’est-ce que tu fais ?
Je pense.
A quoi tu penses ?
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Je pense qu’il faudrait bétonner la terrasse et une allée dans le jardin.
T’es fou ! c’est un sol vivant que tu as là et une faune à préserver !
C’est le botaniste en herbe raté qui parle ?
Ok je me casse c’est bon !
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Le père : Dans la cuisine, se questionne sur la réhabilitation de la maison.
Commence à vriller, il est provoqué par Bella, qui déplace ses ustensile de
cuisine, ça le terrorise, la maison le hante.
Décide d’exposer ses empreintes de dents à côté des tableaux de Suzanne.
Le Fils : dans le grenier avec l’ancien intendant qui se cache, qui connait très
bien la maison lui indique où trouver les documents qui intéresseront sa sœur
Lisa. Il parle avec quelqu’un au grenier, qu’est-ce qu’il manigance ? l’interroge
Lisa. Communique-il avec un fantôme ?
Scène 3 : Un repas
Public séparé entre cuisine et réfectoire.
Communication toujours tendue, mais les enfants sont déterminés à livrer les
éléments pertinents de leurs recherches concernant le passé de la maison et celui
de la mère, mais les adultes ne sont visiblement pas prêts à entendre. Il y a un
mur qui sépare les adultes et les enfants.
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« Pendant des années je n’ai pas pleuré, jamais »
FIN
EPISODE 4 : L’ÉTÉ
Dans cet épisode on assiste au dénouement de l’enquête mémorielle. La
lumière vat être faite sur les origines Juive de Suzanne son lien avec ce
château.
Dans la salle ou la mère exposait ses toiles s’est ajoutée une exposition
d’empreintes dentaires du père.
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Scène 1 : Retour du marché
Le père dans la cuisine prépare une recette traditionnelle juive qu’il ne connait
pas, il est guidé par le fantôme de Bella.
Seul le père reste hébété par cette invitée fantomatique et ses révélations.
FIN
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