POULOT D Histoire - de - La - Culture - Materielle
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UNE NOUVELLE DE LACULTURE
HISTOIRE ?
MAT?RIELLE
Situation de la discipline
3. Ph. Ari?s et G. Duby ?d. Histoire de la vie priv?e, Paris, 1985-1988, 5 volumes. Encore cette
derni?re entreprise a-t-elle peu fait appel ? la culture mat?rielle en tant que telle : essentiellement
dans la participation d'un arch?ologue, Yvon Th?bert, au premier volume consacr? ? l'Antiquit?. Orest
Ranum consacre n?anmoins des d?veloppements aux objets de l'intimit? dans le volume r?serv? aux
temps modernes. Jean-Pierre Goubert, La conqu?te de l'eau. L'av?nement de la sant? ? l'?ge industriel,
Paris, 1986, p. 173-218, ainsi que plusieurs th?ses de troisi?me cycle, ont ?tudi? production et
consommation de l'eau et invention d'une nouvelle culture, ? la fois mat?rielle et corporelle, de m?me
qu'Alain Corbin dans son uvre d'historien des sens.
4. Comme le montre excellemment Agnew, ? Coming up for air ? dans
Jean-Christophe
J. Brewer et R. Porter, Consumption and the world of goods, Londres, 1993.
5. Annick Pardailh?-Galabrun, La naissance de l'intime, 3 000 foyers parisiens, xvif-xvnf si?cles,
Paris, 1988.
6. Jo?l Cornette, ? La r?volution des objets. Le Paris des inventaires apr?s d?c?s, xvii6
xvnf si?cles ?, Revue d'Histoire Moderne et Contemporaine, XXXVI, 1989, p. 476-486.
7. Laurent Bourquin, ? Les objets de la vie quotidienne dans la premi?re moiti? du xvf si?cle ?
travers cent inventaires apr?s d?c?s parisiens ?, Revue d'Histoire moderne et contemporaine, XXXVI,
1989, p. 465-475.
8. Beno?t Garnot, ? Le au xvnf si?cle : l'exemple de Chartres ?, Revue
logement populaire
d'Histoire moderne et contemporaine, XXXVI, 1989, p. 185-210.
9. On trouvera la description de cette m?thode dans Daniel Roche, Le peuple de Paris, op. cit.,
p. 59-61, et Annick Pardailh?-Galabrun, La naissance de l'intime, op. cit. p. 24-25.
346 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE
retrouver le lien d?cisif qui mobilise ensemble les consommations de tous et celles
des individus replac?s dans le cadre habituel de leur vie familiale11. [Au bilan] la
r?volution vestimentaire aide au passage de la soci?t? des coutumes ? la soci?t? moderne
mais sa rationalit? nouvelle ne doit pas masquer l'existence de jeux tr?s divers dans
l'?tablissement de nouveaux rapports entre besoins, n?cessit?s et possibilit?s. Certains,
les pauvres, n'ont pas gagn? d'espaces de libert?, ils re?oivent l'?cho affaibli du
changement ; d'autres sont indiff?rents et suivent le changement dans un jeu complexe
d'imitation o? peuvent se concilier la sagesse, la piti?, la paresse ; enfin agissent en t?te
les actifs de la comp?tition, ceux qui par go?t, par int?r?t, par passion enseignent aux
autres les fa?ons nouvelles d'exister. Ce qui importe c'est qu'au-del? d'un plancher d?fini
par la n?cessit? les valeurs mim?tiques ne sont pas r?serv?es aux riches, m?me si les
lieux privil?gi?s du codage restent la cour, mais pas elle seule, et la ville, c'est-?-dire les
?lites de la fortune et du pouvoir urbain12.
10. Voir Daniel Roche, ? Inventaires apr?s d?c?s parisiens et culture mat?rielle au xvnf si?cle ?,
Les actes notari?s, source de l'histoire sociale, xvf-XIXe si?cles, Strasbourg, 1979, p. 231-240.
11. Daniel Roche, La culture des apparences. Une histoire du v?tement xvif-xvnf si?cle, Paris,
1989 (p. 478) et Histoire des choses banales, Paris, 1997 (p. 269-270).
12. Daniel Roche, ? La culture des apparences, entre ?conomie et morale, xvif-xviif si?cles ?,
communication dans le Bulletin de la Soci?t? d'histoire moderne, 17e s?rie, 2, 1990, p. 14-17.
13. Voir S.M. Pearce ed. Museum studies in material culture, Londres-New York, Leicester
University Press, 1989, et aussi sur toute cette th?matique S. Stewart :On longing : narratives of the
miniature, the gigantic, the souvenir, the collection, Baltimore, Johns Hopkins Press, 1984, ainsi que,
du c?t? historien, les travaux de H. Medick, dont on attend la traduction fran?aise en cours.
14. Highbrow/Lowbrow : the emergence of cultural hierarchy in America, Cambridge, Mass. 1988,
chapitres 1 et 2.
UNE NOUVELLE HISTOIRE DE LA CULTUREMAT?RIELLE ? 347
cons?quence deux types d'analyses :une mesure de leur diffusion sociale, gr?ce
aux inventaires apr?s d?c?s des propri?taires, et une de leur circulation
approche
et de leur appropriation gr?ce ? l'examen des techniques publicitaires et des
voies de la commercialisation. La ? r?volution de la consommation ?
appara?t
comme le r?sultat de la cr?ation consciente d'une propension ? consommer, sur
le mode de l'?mulation :N. McKendrick reprend ainsi Veblen pour la
expliquer
r?ussite des strat?gies publicitaires de Wedgwood. Accueilli de mani?re contras
t?e, et souvent avec scepticisme, le livre ne parvint pas vraiment ? lancer un
programme de recherches.
C'est pour ranimer l'int?r?t et utiliser plus avant cette perspective que John
Brewer et Roy Porter ont fait para?tre Consumption and the world of goods19.
Cet ?norme ouvrage est le premier d'un ensemble de trois volumes qui a
l'ambition de fournir une
interpr?tation nouvelle
de la modernit? ? travers le
mouvement des consommations de biens et de services. Le second porte sur les
15. N.Thomas, Entangled objects. Exchange, material culture and colonialism in the Pacific,
Cambridge-Londres, Harvard University Press, 1991.
16. On ?voquera seulement, touchant deux p?riodes extr?mes ? Mandeville, Colomb et Diaz
del Castillo dans un cas, Tarzan, Leiris, Conrad, D.H. Lawrence et L?vi-Strauss de l'autre ? deux
d?marches r?centes : S. Greenblatt, Marvelous possessions : the wonder of the new world, Chicago,
University of Chicago Press, 1991, et M. Torgovnick, Gone Primitive, Savage intellects, modern lives,
Chicago, University of Chicago Press, 1990.
17. J.H. Plumb, ? The literature and the arts in the Eighteenth-century ?, dans
public,
M.R. Marrus ed. The emergence of leisure, New York, 1974.
18. Londres, Europa.
19. Londres, Routledge, 1993 ; ?dition ? paperback ? 1994.
348 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE
20. A en croire la publicit? ?ditoriale pour la version ? poche ?, les deux ? locomotives ? du
recueil sont avant tout Simon Schama et Simon Schaffer, les deux stars de la profession dans le
monde anglo-saxon.
21. Voir contra G. Levi : ?Comportements, ressources, proc?s? dans J. Revel dir., Jeux
d'?chelles, Paris, 1996, p. 187-207.
22. Sur cette th?matique voir Patrick Brantlinger, Bread and cireuses. Theories of Mass Culture
as Social Decay, Ithaca et Londres, Cornell University Press, 1983. Le Forum de YAmerican Historical
Review a ?t? r?cemment consacr? ? cette question : ? The folklore of industrial society : popular
culture and its audiences ?, vol. 97, 5, 1992, p. 1369-1430.
UNE NOUVELLE HISTOIRE DE LA CULTUREMAT?RIELLE ? 349
niques ?, celles d'une histoire ?conomique, au premier chef, qui s'est donn?
comme objet privil?gi? la construction de la ? r?volution industrielle ?. Dans ce
cadre, la consommation ne devient objet d'histoire qu'au cours du xrxe si?cle,
voire du xxe, ? l'issue d'une transformation g?n?rale dont elle n'est que l'effet.
Au contraire, plaider l'existence d'une la consommation
r?volution de ant?rieure
? celle de la production engage un r?examen d'ensemble des d?terminations ou
surd?terminations. Et d'abord une critique de l'orthodoxie ?conomique pour qui
la multiplication des producteurs d?termine celle des ventes, selon la ? loi des
d?bouch?s ? de J.-B. des excitants et du
Say. L'exemple (th?, caf?, chocolat)
sucre comme luxes banalis?s, ou celui du textile indien en Europe illustrent
l'existence d'un march? consid?rable de consommation, percolant de haut en
bas dans la soci?t? anglaise, et qui fonde en une
retour ?conomie imp?riale
(John E. Wills : ?European consumption and Asian
production in the seven
teenth and centuries ? ; W. Mintz : ? The roles of
eighteenth Sidney changing
food in the study of consumption ?). Mais c'est peut-?tre l'histoire de la proto
industrialisation qui est la plus directement concern?e par cette nouvelle pro
bl?matique, qui tend ? faire de la commercialisation et de la culture de la
consommation un pr?alable au ? d?collage ?, et surtout ? repenser l'embo?tement
des ?chelles micro et macro-?conomiques, sur le mode d'une nouvelle relation
entre initiatives individuelles et production des richesses.
(p. 117).
Ce qui soul?ve nombre de questions : sur la r?gulation de la production,
mais aussi de la consommation, sur la prise de d?cision, le rapport des sexes,
l'autorit?... Chemin faisant, l'auteur esquisse les figures ult?rieures de l'activit?
trompeurs, qui donnent en effet l'image d'un stock, et non d'un flux). Elle
conclut plut?t ? une croissance de l'accumulation des biens de consommation
au cours du xviif si?cle qui serait due ? la combinaison d'une baisse des prix
de vente et d'une substitution de marchandises moins durables ? des biens qui
l'?taient davantage.
De l? l'id?e d'un anachronisme des termes et des concepts de consommation
23. On peut se reporter ainsi ? Carole Shammas, ? The domestic environment in early modern
England and America ?, Journal of social history, 14, 1980, p. 4-24.
24. Cf. le bilan procur? r?cemment par Ch. Baudelot et R. Establet, Maurice Halbwachs, Soci?t?
et consommation, Paris, 1994.
UNE NOUVELLE HISTOIRE DE LA CULTUREMAT?RIELLE ? 351
tion, elles portent toujours sur le monde urbain, laissant de c?t? les masses
rurales, plus ou moins consid?r?es comme ? l'?cart du mouvement g?n?ral.
Enfin le choix du crit?re consommatoire comme indice d?terminant de la
? r?volution ? de moderne, doit les points
l'?poque pour s'imposer, disqualifier
de vue retenus : au premier chef l'indicateur de l'alphab?tisation
jusque-l?
classiquement employ?, depuis l'article fondateur de Lawrence Stone, pour
mesurer le degr? de modernit? des soci?t?s. De fait, David Cressy devant la
stabilit? de ce dernier de 1720 ? 1760, met en doute sa pertinence dans la
r?volution anglaise du xvnf si?cle (? Literacy in context :meaning and measu
rement in early modern England ?). Sa conclusion est qu'un pays peut conna?tre
une v?ritable r?volution sociale, culturelle et ?conomique sans aucun change
ment de son alphab?tisation, qui ne peut donc ?tre tenue pour indicatrice des
sph?re intime ? Refusant les facilit?s de 1'?effet de r?el ? que procure toute
description, et a fortiori l'illusion du chiffre, les historiens ici convoqu?s font
?tat de leurs doutes, et des impossibilit?s d'une restitution assur?e des emplois
et des usages. Carole Shammas objecte ainsi l'impossibilit? de sonder les
motivations en jeu, donc de r?pondre ? la question des origines
du changement.
Elle n'identifie pas, en particulier, une influence particuli?re de variables telles
que le statut, la profession, l'?ducation, l'accessibilit? du march?... sur les choix
de consommation.
Ces r?ticences ? souscrire au projet ou ces constats d'?chec sont ? la mesure
une ?
de l'ambition, qui dessine v?ritable anthropologie de la consommation
m?me si cette voie demeure
marginale, avec une ?tude isol?e de Roy Porter sur
les m?taphores organiques de l'exc?s de consommation (? Consumption :disease
of the consumer society ? ?). La r?f?rence sociologique domine les divers
emprunts aux sciences sociales : de fait, la r?flexion sur la consommation a
mobilis? toute une partie de la sociologie classique, ? partir de Max Weber. Les
de consommation se sont montr?s surtout fertiles en th?ories
ph?nom?nes
g?n?rales de l'?mulation et du mim?tisme de l'ostentation, de Veblen ? Ren?
Girard, pour ne
pas
?voquer la prolif?ration d'essais sur l'ali?nation due aux
25. M. Douglas et B. Isherwood ed., The world of goods : toward an anthropology of consumption,
New York, Norton, 1979.
352 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE
ses choix, ses ignorances, ses pr?dilections et ses d?dains : disputer d'achats et
d'objets, c'est parler valeurs, morale sociale, et, au bilan, identit?(s). De sorte
que partager une m?me consommation, c'est forger une solidarit? et t?moigner
d'une appartenance.
C'est dans la perspective identique d'une consommation r?v?latrice de
valeurs, mais portant une toute autre d?monstration, que s'inscrit l'ouvrage
r?cent de Colin The romantic ethic and
the spirit of modern consu
Campbell,
merism (Oxford, 1987)26. Sa pertinence pour l'entreprise de r?vision de l'histoire
de la consommation tient ? la remise en cause de Veblen, tout en acceptant
les travaux de N. McKendrick. affirme en effet que la
largement Campbell
r?volution industrielle s'est jou?e sur la demande croissante de produits tels que
? une
les jouets, les boutons, les frivolit?s diverses c'est-?-dire par nouvelle
par son insatisfaction de la vie r?elle et son avidit? d'exp?riences nouvelles, est
au c ur des conduites les typiques de la vie moderne et conditionne
plus
l'existence de certaines de ses institutions centrales comme la mode et l'amour
romantique ?28 (p. 205-206). D?s lors la consommation peut appara?tre comme
une contribution positive ? la cr?ation d'une culture et ? l'?laboration de ses
La r?vision de la dichotomie entre puritanisme et romantisme,
significations.
entre d?pense et ?conomie, entre valeurs d'usage et valeurs symboliques parti
cipe tout ? fait du projet de r??valuer les aspects traditionnellement condamn?s
26. Sur cet aspect on lira Nicolas Herpin, ? Au-del? de la consommation de masse ? Une
discussion critique des sociologues de la post-modernit? ?, L'Ann?e sociologique, 1993, t. 43, p. 295
315. Daniel Miller, ? partir de Hegel, Marx, Simmel et d'autres, veut ainsi construire une critique
de l'?litisme moderniste qui regarde n?gativement la consommation comme une r?ception passive de
la part du consommateur, adapt?e ? la surproduction industrielle de masse. Pour lui, on assiste ?
une relation d'objectification de l'identit? personnelle, la possession d'un objet valant affirmation de
sa diff?rence, voire affirmation d'un projet personnel (Material culture and mass consumption, Oxford,
Basil Blackwell, 1987)
27. On pourra comparer avec une analyse qui ?volue dans un tout autre contexte mais tente
? sentimentales ?, au premier chef quant
?galement de renouveler la question du rapport des r?formes
? l'esclavage, ? l'apparition du capitalisme et des d?buts de l'industrialisation autour de 1750 :
?
Th.L. Haskell, Capitalism and the origins of the humanitarian sensibility ?, American Historical
Review, t. 90, 1985, p. 339-361 (1) et p. 547-566 (2). L'apparition de la compassion et de la ? sympa
thie ? au xviif est envisag?e d'un point de vue davantage philosophique dans N.S. Fiering, ? Irresistible
compassion :an aspect of eighteenth-century sympathy and humanitarianism ?, Journal of the History
of Ideas, 1985-2, p. 195-218.
28. On voit tout ce que la d?monstration emprunte ? Ren? Girard (l'analyse de la v?rit?
romanesque des amours romantiques), comme ? la th?se d'une tyrannie de l'intimit? (Richard
Sennett) ou ? d'autres essais plus g?n?raux tel celui sur le narcissisme contemporain de Ch. Lasch
ou ? La naissance de la famille moderne par E. Shorter.
UNE NOUVELLE HISTOIRE DE LA CULTUREMAT?RIELLE ? 353
besoins, sans entrer forc?ment dans la logique de l'?mulation :caf?, th?, chocolat
et sucre sont recherch?s pour des satisfactions imm?diates. D'ailleurs la d?non
ciation de l'?mulation peut ?tre un effet de la peur sociale des couches
quand il s'agit, par exemple, de s'impressionner soi-m?me et ses
privil?gi?es,
proches, de manifester son estime de soi.
Bref, la prise en compte des modalit?s vari?es, concr?tes, de la signification
de la consommation relativise des inventaires apr?s d?c?s :
subjective l'apport
pour qui cherche ? percer la signification des conduites, les pr?cisions qu'ils
sont autant d'illusions. Amanda Vickery ajoute que ce type de sources
permettent
ne dit rien de la diff?renciation sexuelle des significations d'un m?me objet
(?Women and the world of : a Lancashire consumer and herposses
goods
sions ?). De l? sa pr?f?rence pour une ?tude monographique, conduite ? la
mani?re des ethnologues. Il en r?sulte une vue
plus large de la consommation
29. Loma Weatherill, Consumer Behaviour and Material Culture in Britain, 1660-1760, Londres
New York 1988, p. 26-7.
354 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE
sp?cifique au xviif si?cle. T.H. Breen veut montrer ainsi le lien entre une
?conomie de la consommation anglo-am?ricaine en pleine et
expansion l'appa
rition d'id?ologies politiques :pour lui les significations des choses dans l'Am?
rique du xvi?f si?cle d?pendent d'un sens nouveau des droits individuels bas?s
sur un choix inform? (? The meanings of : the consumer
things interpreting
economy in the eighteenth century ?). Dans un article pr?c?dent, consacr? au
m?me il a soutenu ? les biens de consommation ont permis aux
probl?me, que
colonies une nation ? ? la suite de l'affaire de et du
d'imaginer quand, 1774,
refus des taxes, ? les consommatoires se transform?rent en
exp?riences priv?es
rituels publics ?30. Mais si boycotts, embargos et autres interventions sur la
consommation illustrent sans doute une politisation des marchandises au cours
du xviii6 si?cle, en revanche la marchandisation de la politique anachro
para?t
nique, que manifeste seulement Yamerican way of life de notre si?cle31. Bref, si
un r?ve de comme ou ?
consommation, imaginaire fantasme de pl?nitude le
cas ?
?ch?ant subversif est bien pr?sent ? l'?poque moderne, il s'av?re sans
grande cons?quence sur la pratique Est-ce ? dire que les
politique organis?e.
significations des marchandises sont tellement fluides et contextualis?es que
tout effort pour y reconna?tre les fondements d'une est
responsabilit? politique
vou? au faux-semblant, comme le dit J.Ch. ? C'est toute la question du
Agnew32
sens des consommations et de leurs est alors
justifications qui pos?e.
L'?tude des justifications de la consommation
capitale pour passer est
de la
consid?ration exclusive des contraintes
?conomiques et mat?rielles ? la dimen
?
sion morale de la consommation et par l? ? la notion reposant
d'h?g?monie
sur la (re)connaissance d'une des conduites33. Car pour veut
l?gitimit? qui
comprendre les significations qui nourrissent l'acte de consommer, il est capital
de savoir si les acteurs se tiennent ou non des ? consommateurs ?, s'ils
pour
l?gitiment ou non le principe de suivre la mode, et comment ils construisent
les motifs de leurs conduites34. Or si la r?flexion sur le luxe et la consommation
ostentatoire remonte pr?cis?ment au xviii6 si?cle, elle tient une place tout ? fait
mineure dans les d?bats sur la modernit? ; en particulier, elle n'entra?ne aucune
revendication particuli?re35. Le d?bat sur le luxe, de m?me, est un d?bat
conceptuel, qui ressortit ? la formation d'une pens?e s?cularis?e du progr?s,
sans chercher ? expliquer la dynamique d'un Au
d?veloppement. plus g?n?ral,
trois concepts permettent de rep?rer le champ d'une th?orie de la
sp?cifique
consommation que la modernit? n'a jamais construite. En premier lieu la qu?te
de gratifications imm?diates et tangibles qui rel?ve d'une indulgence coupable
pour ses d?sirs superficiels, et fait de condamnations r?it?r?es, ?
qui l'objet
l'?gal du sexe, au nom des principes. La recherche d'une identit? personnelle
ensuite, dans la pr?sentation de soi et le souci des apparences, tant?t par respect
30. ?Baubles of Britain, the american and consumer revolutions of the eighteenth century ?,
Past and present, n? 119, 1988, p. 73-104, ici p. 103.
31. Une ?tape interm?diaire pourrait ?tre celle de l'Angleterre victorienne :cf. Th. Richards, The
commodity culture of Victorian England, Advertising and spectacle 1851-1914, Stanford, Stanford U.P.
1990, et du m?me auteur The imperial archive. Knowledge and the fantasy of Empire, Londres-New
York, Verso, 1993.
32. Art. cit., p. 33.
33. Cf. notamment le bilan de T.J. Jackson Lears, ?The concept of cultural hegemony :problems
and possibilities ?, American Historical Review, 90, Juin 1985, p. 567-93. Et ceci mis ? part les
ouvrages sur la r?flexion men?e ? propos de la consommation, tel Rosalind H. Williams, Dream
Worlds :mass consumption in late nineteenth-century France, California University Press, 1982
34. Pour la p?riode contemporaine cf. D. Horowitz, The morality of spending : attitudes toward
the consumer society in America, 1875-1940, Baltimore, Johns Hopkins University Press, 1986.
35. J. Appleby, ? Consumption in early modern thought ? dans Brewer et Porter, op. cit.
UNE NOUVELLE HISTOIRE DE LA CULTUREMAT?RIELLE ? 355
des conventions, tant?t par rebellion. Enfin la conqu?te d'une privacy, cet espace
de l'intimit? peu ? peu embelli par des produits nouveaux, un ameublement en
particulier.
Consommations et significations
36. Sur le legs de ce moment et les r?flexions pionni?res d'un Michel de Certeau, on trouve un
?tat et une bibliographie de la question dans Natalie Zemon Davis, ? Toward Mixtures and margins ?,
American Historical Review, d?cembre 1992, p. 1409-1416.
37. Agnew lui-m?me a montr? la voie, avec Worlds apart : the market and the theatre in anglo
american thought, 1550-1570, Londres 1986.
38. Le cas des ? consommations ? de savoirs via les livres ou l'?cole est
particuli?rement
r?v?lateur (John Money, ? in the market-place : the retailing of knowledge in provincial
Teaching
? ; Iaroslav Isaievych, ? The book trade in eastern Europe in
England during the eighteenth century
the seventeenth and early eighteenth century ?), dans Brewer et Porter, op. cit.
39. La bibliographie et la sociologie des textes, pr?face de Roger Chartier, Paris, Cercle de la
Librairie, 1991.
40. Voir le bilan de D. Miller :Acknowledging consumption, a review of new studies, Londres,
1995.
356 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE
41. La fameuse th?se de E.P. Thompson sur le comportement des foules peut-elle conduire ?
?morale ?, c?dant la ? contemporaine ??
l'hypoth?se d'une consommation place ? une consommation
42. Point r?cent dans CA. Gregory, Gifts and commodities, Londres, Academic Press, 1982. Et
A. Weiner, ? Plus pr?cieux que l'or : relations et
?changes entre hommes et femmes dans les soci?t?s
d'Oc?anie ?, Annales E.S.C., 37, 1982, p. 222-245.
43. A. Appadurai ed., The social life of things. Commodities in a cultural perspective, Cambridge,
1986.
UNE NOUVELLE HISTOIRE DE LA CULTUREMAT?RIELLE ? 357
Dominique Poulot,
Universit? Fran?ois Rabelais, Tours.