109691-Article Text-301266-1-10-20141112
109691-Article Text-301266-1-10-20141112
109691-Article Text-301266-1-10-20141112
Résumé
L’intérêt de cet article est de montrer qu’il existe une couche superficielle dans la zone non saturée du sol à
l’intérieur de laquelle les mécanismes de transport du trichloréthylène (TCE) vers l’atmosphère sont
favorables. En prenant en compte dans un modèle de simulation certains paramètres clés du sol déterminés
expérimentalement, on a pu non seulement montrer que les effets hygroscopiques modifient le
comportement du TCE mais aussi et surtout que ces mécanismes de transfert sont plus favorables dans une
couche limite qu’on a appelée couche superficielle. Les résultats montrent clairement que les transferts
sont plus importants dans une couche limite du sol au de-là de laquelle ce transfert s’amenuise. En d’autres
termes, l’atmosphère ambiante influence les mécanismes d’évaporation par l’intermédiaire de la
température et de l’humidité relative lorsque celui-ci se trouve dans la couche dite couche superficielle. En
revanche, cette influence de l’atmosphère ambiante se réduit à mesure que le TCE s’infiltre en profondeur.
Au de-là de 0,8 mètre de profondeur, le milieu ambiant semble jouer un rôle moins important et les
mécanismes d’atténuation naturelles sont d’avantage très faibles favorisant ainsi la persistance du TCE
dans le sol.
Abstract
Determination of a surface layer of soil favorable to the transfer of
Trichloroethylene (TCE) to the atmosphere
The objective of this paper is to show that in unsaturated soil, there is a superficial layer of soil within
which the transport mechanisms of trichloroethylene (TCE) to the atmosphere are favorable. Taking into
account, in a simulation model, soil parameters determined experimentally we have shown that
hygroscopic effects can modify the behavior of TCE in soil. Our results also show that transfer mechanisms
of TCE are more favorable in a boundary layer that can be called surface layer. In other words, the ambient
atmosphere influences mechanisms of evaporation via temperature and relative humidity when the TCE is
in the surface layer of soil.
However, the influence of ambient atmosphere decreases when the TCE seeps deep. After 0.8 meter of
deep, the environment plays a less important role and the natural attenuation mechanisms are very small
favoring the persistence of the TCE in the soil.
Nomenclature
: volume du liquide
: volume d’eau
: masse volumique du liquide
: masse volumique apparente de l’eau
: masse volumique réelle de l’eau
̂ : flux de changement de phase d’eau
: pression d’eau liquide
: intensité du vecteur champ de pesanteur
: perméabilité du sol
: perméabilité à saturation du sol
: teneur en eau
: teneur en eau résiduelle
: teneur en eau de saturation
: paramètre adimensionnel caractéristique du sol
: succion du sol
: pression de la phase gazeuse
: masse volumique apparente du sol
: masse volumique réelle du sol
: masse molaire de l’eau
: constante des gaz parfaits
: pression de vapeur d’eau
: pression de vapeur d’équilibre
: pression de vapeur saturante
: coefficient de changement de phase d’eau
: activité de l’eau
: masse volumique de la vapeur d’eau
: flux de diffusion de la vapeur d’eau
̂ : flux de changement de phase dans la phase gazeuse
: Température
: coefficient de diffusion de la vapeur d’eau dans l’air
: masse volumique du TCE liquide
: flux de diffusion du TCE dans la phase liquide
̂ : flux de changement de phase du TCE en phase liquide
1. Introduction
Dans les sols, les Composés Organiques Volatiles (COV), comme le Trichloréthylène (TCE), se présentent
essentiellement sous deux formes à savoir une forme aqueuse et une forme gazeuse [1-5] et le passage
entre la phase liquide et la phase vapeur est appelé changement de phase. Les travaux antérieurs
consacrés au transfert des composés organiques volatiles et à l’étude de la pollution des sols par les COV
ont, soit concernés la zone saturée du sol, soit ne prennent pas en compte le changement de phase qui,
pourtant joue un rôle important dans les processus de transfert [6, 7]. Dans la partie saturée du sol, le
caractère libre de l’eau rend possible l’application des lois classiques d’équilibre, entre la phase liquide et
la phase gazeuse. Dans les régions arides en revanche, les faibles teneurs en eau se traduisent par des
effets hygroscopiques et l’eau se retrouve partiellement adsorbée sur la phase solide ce qui modifie
fortement ses propriétés mécaniques et thermodynamiques. Or, des études récentes ont montré que les
effets hygroscopiques modifient les lois d’équilibre à l’interface liquide-gaz et les mécanismes de transfert
d’eau [8, 9] et aussi que les phénomènes d’adsorption de la phase gazeuse par les particules solides du sol
sont plus importants pour des teneurs en eau faibles [10-13]. Ainsi, après avoir établi les équations de
transfert relatives à l’eau et au TCE, des paramètres phénoménologiques ont été introduits dans un modèle
numérique que nous avons validé en comparant les résultats expérimentaux obtenus sur l’eau à ceux du
modèle. Ensuite, les résultats de simulation portés sur le TCE nous ont permis de décrire les processus de
transfert lors de l’atténuation naturelle du TCE dans un sol aride.
2. Méthodologie
2-1. Hypothèses de travail et choix des variables
Le système étudié est un sol contenant une phase liquide composé d’eau et de TCE dissout et d’une phase
gazeuse composée d’air, noté a, de vapeur d’eau indicé par v, et de vapeur de TCE indicé par T. On pose les
hypothèses suivantes :
H1 : la phase solide est incompressible et chimiquement inerte,
H2 : la température est uniforme et constante,
H3 : la phase gazeuse se comporte comme un mélange de gaz parfaits,
Compte tenu de ces hypothèses, les variables choisies pour définir l’état du système se réduisent à :
la teneur en eau du sol (kg d’eau/kg de sol sec) ;
la pression partielle de vapeur d’eau (Pa) ;
la concentration ou la masse volumique apparente du TCE en phase liquide (kg de TCE/m 3 d’eau
liquide),
la pression partielle de la vapeur du TCE (Pa).
( ) (4)
où
( ) ( ) (5)
Dans certains milieux professionnels, l’usage a institué l’utilisation de la succion [14] définie par :
(6)
(7)
Les études en adsorption et désorption ont montré qu’en équilibre thermodynamique, il y a une relation
entre la succion [14, 15] et la teneur en eau et on peut écrire :
(8)
( ) (9)
La masse volumique apparente de l’eau, et la teneur en eau, w, du sol sont liées par la relation
suivante :
(10)
On rappelle l’expression du changement de phase proposée par les récentes recherches [16]:
̂ ( ) (11)
où
(12)
La relation proposée par la plupart des auteurs [14,15,17] décrit mieux la courbe des isothermes de
désorption et on peut écrire :
[ ( ( ) )] (13)
( )
⏟ ̂⏟ (14)
(15)
et : ̂ ̂ (16)
(17)
(19)
(20)
̂ ( )
( ) (21)\
(22)
Où
( )
⏟ ̂
⏟ (23)
où :
(24)
et :
̂ ̂ (25)
3. Résultats et discussion
3-1. Validation du modèle
Afin de valider le modèle numérique élaboré dans cet article, une comparaison des résultats du modèle a
été faite avec les résultats expérimentaux obtenus sur l’eau. L’étude expérimentale a été réalisée sur un
sol de Nasso (Burkina Faso) dont les caractéristiques sont données par le tableau suivant :
L’expérience a consisté à fabriquer des colonnes de sol compacté d’une teneur en eau initiale w0 connue
[18]. Ces colonnes, d’une longueur de 30 cm, sont placées dans une enceinte climatique régulée en
température et en humidité relative comme l’indique la Figure 1. On laisse ensuite l’ensemble évoluer
pendant un temps donné et les échantillons sont détruits afin de déterminer les profils de teneur en eau.
Régulation de T et HR
Enceinte climatique
La Figure 2 présente les cinétiques expérimentale (marqueur) et numérique (trait continu) de séchage, à
une humidité relative de 30% imposée dans l’enceinte, c'est-à-dire la teneur en eau moyenne de
l’échantillon en fonction du temps. On observe sur cette figure une bonne corrélation entre les courbes
expérimentale et simulée.
6%
4%
3%
2%
expérience
1% simulation
0%
0 10 20 30 40 50 60
temps, t [ jours]
30
25
Altitude [cm]
20
15
0
0 1 2 3 4 5 6
Sur la Figure 3, nous présentons quelques résultats des profils expérimentaux (en pointillé) et simulés (en
trait continu). On peut noter également sur cette figure que les profils simulés et expérimentaux sont très
voisins mêmes si quelques différences sont perceptibles ; lesquelles peuvent être en partie imputables aux
possibles imperfections du modèle mais également aux erreurs de mesure au cours des différentes étapes
qui précèdent l’opération de mesure c'est-à-dire depuis l’extraction de l’échantillon, sa destruction jusqu’à
la mesure proprement dite.
25
t=4j 15h 6mn 40s
w0=4%
20 w0=5%
w0=6%
Altitude, z [cm]
15
10
0
0 100 200 300 400 500 600
La Figure 6 montre clairement que le temps de simulation croît légèrement lorsque la concentration
initiale du TCE est comprise entre 1000 mg/L et 1 mg/L et croit de façon presqu’exponentielle pour des
concentrations comprises entre 1 mg/L et 0,001 mg/L. Cette augmentation du temps tient au fait que, pour
les faibles concentrations, le coefficient de changement de phase du TCE tend vers zéro de telle sorte que
les pertes par changement de phase sont considérablement réduites. D’autre part, on peut attribuer ce
résultat au fait que, avec le temps, la teneur en liquide du sol diminue et les effets hygroscopiques
deviennent assez importants ce qui se traduit par des résidus de TCE fortement liés aux particules du sol
ralentissant considérablement les mécanismes de changement de phase. Par exemple pour une
concentration initiale de 1000 mg/L, 19 jours suffisent pour ramener la concentration à 10% de sa valeur
initiale alors que ce temps est de 55 jours pour une concentration initiale de 0,001 mg/L.
1000
Concentration intiale du CT0 TCE (mg.L-1)
100
10
0,1
0,01
40% 50% 60% 70% 80% 90% 100%
Figure 5 : Evolution des valeurs maximales de CT en fonction de CT0 pour H=30 cm,
w0=4% et t=5j 18h 53mn 20s
1000
Concentration initiale du TCE,CT0 [mg/l]
100
10 w0=3%
w0=6%
1
0,1
0,01
0,001
0,0001
5 15 25 35 45 55
Temps, t [jours]
Figure 6 : Temps d’exposition pour ramener la concentration maximale à 10% de CT0 pour H=30 cm
3-2-3. Existence d’une couche superficielle favorable au transfert du TCE dans lesol
La Figure 7 et la Figure 8 permettent de suivre la variation de la concentration du TCE dans l’échantillon
en fonction de la hauteur de la colonne de sol. On peut voir avec la Figure 7 que la concentration passe de
1 mg/L à 0,26 mg/L pour une colonne de sol de 30 cm alors que cette concentration serait passée de 1 mg/L
à 0,92 mg/L pour une colonne de 100 cm. Des conclusions analogues peuvent être déduites de la Figure 8.
Ces deux figures (Figure 7 et Figure 8) montrent clairement que les transferts du TCE sont plus
favorables dans les 80 premiers centimètres ce qui se caractérise par une courbe quasiment horizontale. Au
de-là d’une profondeur de 80 cm, les mécanismes sont fortement ralentis et par conséquent les transferts
du sol vers l’atmosphère par atténuation naturelle ne sont pas favorables au TCE ce qui peut entrainer sa
persistance dans le sol à condition qu’il ne soit détruit par un processus de dégradation chimique ou par les
microorganismes du sol. En conclusion, la migration du TCE vers les horizons profonds favorise sa
persistance et sa durée de vie dans les sols à faible teneur en eau car l’environnement biologique des
horizons profonds est différent de celui des horizons de surface, provoquant l’augmentation de la
persistance des produits et donc leur mobilité [21, 22]. Cette conclusion qualitativement évidente est ici
étayée par nos calculs.
3
Hauteur de colonne de sol, H [m]
2,5
2
C.S = Couche Superficielle
1,5
1
0.8
0,5
C.S
0
0 0,2 0,4 0,6 0,8 1
Evolution de la concentration maximale du TCE [mg/l L]
Figure 7 : Valeurs maximales de CT en fonction de H pour un temps de simulation t=5j 18h 53mn 40s et
pour w0=3% et CT0=1 mg/L
1
0.8
0,5 C.S
0
0 200 400 600 800 1000
Figure 8 : Valeurs maximales de CT en fonction de H pour un temps de simulation t=5j 18h 53mn 40s et
pour w0=3% et CT0=1000 mg/L
4. Conclusion
Dans cet article, il a été démontré que les mécanismes de transfert du TCE dans les sols arides par un
processus d’atténuation naturelle sont d’autant plus importants selon que le composé est plus près de la
surface du sol c'est-à-dire dans les horizons compris entre 0 et 0,80 m. La migration du TCE vers les
horizons profonds augmente son temps de séjour dans le sol car les phénomènes d’atténuation naturelle
par évaporation ou par photodégradation ne sont pas prépondérants si bien que les seuls mécanismes
susceptibles d’être à l’origine de la dissipation du TCE sont possiblement la biodégradation, les réactions
chimiques, etc.; phénomènes qui n’ont pas été pris en compte dans cet article. Aussi, les effets
hygroscopiques constituent un facteur limitant des transferts en rendant l’évaporation du composé de plus
en plus difficile. Ainsi, un sol à faible teneur en eau peut favoriser la persistance d’un polluant volatile et
constituer ainsi un facteur aggravant de la pollution. Enfin, les résultats de cet article montrent qu’une
tentative de prédiction du comportement d’un composé organique volatile dans un sol aride en ne prenant
pas en compte les phénomènes de changement de phase et les effets hygroscopiques surestimerait les
transferts en surévaluant le flux du composé à la surface du sol.
Références
[1] - J.-S. LIN and L. M. HILDEMAN, Journal of Hazardous Materials, 40 (1995) 271-295.
[2] - W. BRAIDA and S. K. ONG, Transport in Porous Media 38 (2000) 29-42.
[3] - V.S. IAKOVLEVA and N.K. RYZHAKOVA, Radiation Measurements 36 (2003) 389- 391.
[4] - H. K. KARAPANAGIOTI, P. GAGANIS, V. N. BURGANOS and P. HÔHENER, Environmental Modelling &
Software, 19 (2004) 435-450.
[5] - D. GROLIMUND and M. BORKOVEC, Journal of Contaminant Hydrology 8 (2006) 155-175.
[6] - M. BOND and M. STRUCHTRUP, Physical Review, 70 (2004) 061-605.
[7] - T.S. ZHAO, P. CHENG and C.Y. WANG, Chemical Engineering Science, 55 (2000) 2653-2661.
[8] - A. CHAMMARI, B. NAON, F. CHARBLANC and J.C. BENET, C. R. Mécanique, 331 (2003) 759-765.
[9] - A. L. LOZANO, F. CHERBLANC, B. COUSIN and J.-C. BENET, European Journal of Soil Science 59 (2008)
939-949.
[10] - S. OUOBA, F. CHERBLANC, B. COUSIN and J.C. BENET, Environmental Science & Technology 44 (2010)
5915-5919.
[11] A. BOUZAZA, C. VALLET and A. LAPLANCHE, Chemistry 177 (2006) 212-217.
-
[12] A. BOIVIN, R. CHERRIER and M. SCHIAVON, Chemosphere 61 (2005) 668-676.
-
[13] S. HOEG, H. F. SCHÔLER and J. WARNATZ, Journal of Contaminant Hydrology, 74 (2004) 163-195.
-
[14] M. FREDLUND, D. FREDLUND and G. WILSON,3rd Brazilian Symposium on Unsaturated soils, Rio de
-
Janeiro, Brazil, (1997) 1-12.
[15] - D. G. FREDLUND, ANQUING XING, SHANGYAN HUANG, Canadian Geotechnical Journal, 31 (1994) 521-
532
[16] - J.-C. BENET, A-L. LOZANO, F. CHERBLANC and B. COUSIN, J. Non-Equilib. Thermodyn, 34 (2009) 97-
117.
[17] - D. G. FREDLUND, A. XING and S. HUANG, Canadian Geotechnical Journal, 31 (1994) 521-532
[18] - F. OUEDRAGO, F. CHERBLANC, B. NAON and J.-C. BENET, Journal of Hydrology, 492 (2013) 117-127
[19] - J. A. BUMPUS, T. MING, D. WRIGHT and S. T. AUST, Science, 228 (1985) 1434-1436
[20] - E. BARRIUSO, Analysis, 22 (1994) 13-15
[21] - J. V. POTHULURI, T. B. MOOMANN, D. C. OBENHUBER and R. D. WAUCHOPE, J. Environ. Qual., 19
(1990) 525-530
[22] - M. C. DICTOR, G. SOULAS, K.J LEWIS, F.J LEWIS, K. TAKAGI and J.P.E ANDERSON, In: Proceedings of
the international Symposium on Environmental Aspects of Pesticide Microbiology, J.P.E Anderson,
D.J. Arnold, F.J Lewis, L. Torstensson. Ed., Swedish University of Agricultural Sciences, Uppsala,
(1992) 284-290.