Theorie Macroeconomie

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THEORIE

MACROECONOMIE
INTRODUCTION GENERALE
L’objet de la macroéconomie est la compréhension de l’activité économique dans son
ensemble. Cette tâche est très complexe et semble impossible tellement les économies sont
complexes. C’est pourquoi les économistes ont réduit l’économie nationale à un certain nombre
de catégories économiques à propos desquelles ils posent un certain nombre d’interrogations
fondamentales telles que : (i) quelles sont les causes des fluctuations économiques ? (ii)
pourquoi le chômage ou l’inflation augmentent ? (iii) les politiques économiques sont-elles
efficaces pour résoudre les problèmes ?.... Ces phénomènes peuvent être conjoncturels ou
structurels. Dans ce dernier cas, ils relèvent de la croissance économique, c'est-à-dire de la
longue période. La macroéconomie traite donc des phénomènes conjoncturels de courte
période, avec un stock de capital donné. Les questions principales abordées par cette discipline
gravitent autour du niveau de production, du chômage, de l’inflation ou enfin des équilibres
extérieurs. Et pour tenter de comprendre ces phénomènes, les économistes se donnent une
représentation simplifiée de la réalité, en recourant à la modélisation. Mais cette tâche est loin
d’être aisée, la représentation pertinente de la réalité n’est pas une évidence. Et la même réalité
peut être représentée de plusieurs manières selon l’objectif visé par l’étude et surtout selon les
hypothèses émises sur le système économique et sur son fonctionnement. Les hypothèses sont
fondamentales parce qu’elles fixent le cadre général de l’analyse, et les fondements des
comportements des variables. En sciences économiques, la multiplicité des écoles de pensée
s’explique en grande partie par la multiplicité des hypothèses émises sur le fonctionnement de
la sphère économique de la société. Et c’est pourquoi ce cours s’efforce de proposer
systématiquement deux approches différentes des phénomènes étudiés : une approche classique
(néoclassique) et une approche keynésienne. Le clivage fondamental visé par ce cours se
rapporte à la pertinence de l’intervention publique dans la vie économique. Cette dernière
proposition annonce d’ailleurs l’objet de ce cours : qu’en est-il de l’efficacité des politiques
économique dans la résolution des problèmes des fluctuations de la production, du chômage,
de l’inflation ou des déséquilibres extérieurs ? La réponse à cette interrogation suppose la
construction de modèles économiques qui fera l’objet de la deuxième partie de ce cours. Mais
cette construction suppose que les éléments essentiels qui composent ces modèles soient
explicités et ceci nous préoccupera dans la première partie de ce cours. Ainsi ce cours se
déroulera comme suit :

• PARTIE I : LES FONCTIONS DE COMPORTEMENT ET LES MARCHES


 Le comportement de consommation
 Le comportement d’investissement
 Le marché de la monnaie
 Le marché du travail

• PARTIE II : LES MODELES MACROECONOMIQUES

 Un modèle de plein emploi : le modèle classique

 Un modèle de sous-emploi : le modèle keynésien

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CHAPITRE I : LE CIRCUIT ECONOMIQUE ET LES PRINCIPAUX
AGREGATS DE LA COMPTABILITE NATIONALE
I- LES ACTEURS ECONOMIQUES ET LES MARCHE
A- LES ACTEURS ECONOMIQUES

Il est en général difficile de reconstituer et de dénombrer l’ensemble des décisions de tous les
agents économiques qui opèrent dans une économie donnée. Les macro-économistes procèdent
donc à l’agrégation des agents économiques de même nature dans des collectifs. Dans une
optique très agrégée, il est usuel de distinguer quatre grands agents économiques.

1. Les ménages

L’ensemble des agents privés, détenteurs de moyens de productions, consommateurs et


épargnant sont appelés « Ménages ». Un « Ménage » est donc une unité autonome de
consommation. Sa taille est à priori indéterminée. Un célibataire forme un ménage, tout autant
qu'une très grande famille. Les ménages offrent aux entreprises des facteurs de production
(travail, etc.) en contrepartie d’un revenu qui leur permet de consommer.

2. Les entreprises (ou firmes)

L’ensemble des unités de production combinant des facteurs de production qualifiés


d’« entreprises » ou « firmes ». Les firmes ont pour fonction économique principale la
production de biens et services à but lucratif.

3. Les « administrations publiques »

Elles regroupent l’ensemble des administrations, opérant sur un territoire donné en fonction de
prérogatives de souveraineté nationale et de règles de gestion publique. Elles ont pour fonction
principale la fourniture de services à but non lucratif.

4. Le « reste du monde » ou encore « l’extérieur »

Le « reste du monde est un dernier agent macroéconomique nécessaire pour pouvoir étudier
une économie ouverte sur le reste du monde échangeant avec d’autres économies biens, services
et flux financiers. Le reste du monde regroupe l’ensemble des agents résidents à l’étranger et
ayant des relations avec l’économie nationale.

Cette classification, bien que simplificatrice, n’est pas sans obscurité, et implique quelque
arbitraire. Par exemple, certains agents sont à la fois des ménages et des firmes : il s’agit des

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entrepreneurs individuels. De même, certaines firmes qui sont la propriété de l’État ne se
comporteraient pas comme n’importe quelle autre firme privée : ce sont donc des entreprises
publiques. Aussi, selon les besoins de l’étude macroéconomique on peut recourir à une
« désagrégation » afin de s’intéresser aux banques et aux intermédiaires financiers en les isolant
de l’ensemble des firmes afin de les singulariser et d’étudier leurs rôle et comportements
économiques spécifiques.

B- LES MARCHES

La plupart des décisions prises par les agents passent d’un moment à l’autre par le biais
d’échanges librement contractés et légalement reconnus entre agents. Tout achat de biens ou de
services d’un agent à un autre donne lieu à un versement, immédiat ou différé de «moyens de
paiement », qui dénoue l’échange. Le « marché » est le terme qui désigne l’ensemble des
transactions entre agents portant sur un bien ou une prestation de services donnée.

1. Les principaux marchés

La macroéconomie recourt à la notion de marché qu’elle adapte à ses méthodes


d’analyse, en supposant qu’il existe des marchés associés aux différents biens et services qu’elle
distingue et sur lesquels portent les échanges. On distingue prime abord trois marchés qui sont:
- le marché des biens et services : c’est le lieu où se déterminent la production nationale,
la demande et le niveau des prix ;
- le marché du travail : c’est une composante du marché des facteurs de production qui
permet de déterminer le niveau des salaires, l’emploi et le chômage.
- le marché de la monnaie : c’est une composante du marché des capitaux sur lequel
s’établit le niveau des taux d’intérêt ;
- le marché des changes : il permet l’échange de la monnaie nationale contre l’ensemble
des devises et la détermination du taux de change, c’est-à-dire le nombre d’unités de
monnaies étrangères que l’on peut obtenir pour une unité de monnaie nationale

2. Fonctionnement des marchés

La notion de marché semble pose quelques problèmes à l’analyse économiques, dont


deux principaux porte du point de vue macroéconomique sur :
 le mode de fonctionnement des marchés et des propriétés qui découlent des échanges.
 Le rôle des contreparties dans un échange : dans une économie de marché, une quantité
«réelle» de bien s’échange contre des moyens de paiement fournis immédiatement ou
différés (reconnaissance de dette). En macroéconomie ces moyens de paiement utilisés
sont désignés par le terme «monnaie». Un échange peut donc être monétaire, dans ce
cas le prix unitaire d’un bien ou d’une prestation de services est libellé en unités
monétaire. On parle alors de prix «nominal».

Dans une économie de marché, un même échange sur le marché a, donc, à la fois une
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dimension réelle et une dimension monétaire (ou nominale). Bien que, l’apparence des
échanges est monétaire, des économistes considèrent que c’est la dimension réelle (ex : pouvoir
d’achat) qui importe plus, car la monnaie ne joue qu’un rôle d’intermédiaire et n’a pas d’utilité
en tant que telle.

Un des objectifs de la macroéconomie est d’apprécier les grandeurs réelles qui se


trouvent « derrière » cette apparence. Pour ce faire, elle cherche à répondre à la question du rôle
joué par la monnaie dans une économie de marché.

II- ELEMENTS DE CMPTABILITE NATIONALE


A- Définition et les principaux agrégats des agrégats

1- Définition des agrégats


Un agrégat est un terme qui désigne une grandeur statistique de l’activité économique exercée
sur le territoire par l’ensemble des agents économiques. Ils servent à comparer les formances
d’un pays donné au cours du temps ou bien celles de plusieurs pays à une même époque.

2- Les principaux agrégats :


Ils existent plusieurs agrégats mais dans ce cours, nous présentons trois dans la mesure où ils
sont la résultante des trois grands moments de la vie économique : la production, la répartition
et la dépense. Ces trois principaux agrégats sont : les agrégats de production, les agrégats de
revenu et les agrégats de dépense.

B : PRESENTATION DES PRINCIPAUX AGREGATS

1- Les agrégats de production


Nous présentons le Produit Intérieur Brut (P.I.B) qui est l’agrégat fondamental de la
Comptabilité Nationale (CN). Il y a aussi le Produit National Brut (PNB) encore utilisé dans les
comparaisons internationales.

Le PIB est le principal agrégat macroéconomique de la CN. Nous pouvons le calculer selon les
trois optiques différentes qui correspondent aux trois temps de l’activité économique :

La production crée les revenus (optique des revenus)

Les revenus créent les dépenses (optique de la dépense)

Les dépenses suscitent la production (optique du produit)

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a- Le PIB selon l’optique du produit
Le PIB sous l’angle du produit se calcule de la façon suivante :

PIBproduit = somme de la valeur ajoutée des différentes unités de production + TVA + les droits
de douane sur les produits importés – les subventions de production.

PIBproduit = ∑𝑉𝐴 + TVA +DD - Sb

b- Le PIB selon l’optique du revenu

Selon l’optique du revenu, le PIB est défini par l’égalité suivant :

PIBrevenu = revenu des salariés versés par les unités économiques résidentes sur le territoire +
l’excédent brut d’exploitation pour ces unités + les impôts liés à la production et à l’importation
versée – les subventions d’exploitation reçues.

PIBrevenu = RS + EBE + ILPM -SEreçues

c- Le PIB selon l’optique de la dépense

Dans l’optique de la dépense, le PIB est égal à la consommation finale + formation brute de
capital fixe + variation de stocks + les exportations – les importations

PIBdépense = CF + FBCF + ΔS + X - M

NB : alors que le PIB repose sur la production des unités résidentes 1, que cette production soit
d’origine Ivoirienne ou étrangère, le PNB retient la production imputable aux facteurs de
production fournis par les seuls résidents que ceux-ci soient présents ou non sur le territoire
national. Le PNB mesure la production nationale c'est-à-dire celle qui est réalisée au-dedans ou

1
Se dit d’une personne, d’une entreprise ou d’une organisation, établie durablement dans un pays (plus d’un an), quelle que 5
soit sa nationalité. La comptabilité nationale ainsi que la balance des paiements recensent les activités des résidents, et non
des seuls nationaux. Les nationaux à l’étranger font partie des non-résidents.
en dehors du territoire économique au moyen des facteurs de production fournis par les agents
résidents.

PNB = PIB + revenus du travail et de la propriété reçus du reste du monde – revenus du travail
et de la propriété versé au reste du monde

PNB = PIB + RTPreçu - RTPversé

2- Les agrégats de revenu

Nous retenons ici le Revenu National Brut Disponible (RNDB) qui est la part des richesses
consacrées aux versements des revenus primaires (salaires et autres traitements) des différents
agents économiques. Le revenu national mesure donc le revenu que les agents économiques ont
encaissé à l’occasion de l’effort de production d’où :

Revenu National Net = PNN (salaire + revenu de la propriété) – impôt indirect – subventions.

RNN = PNN – Iind – Sb

RNDB = RNN – Id avec Id = impôt direct

3- Les agrégats de dépense


La Dépense Intérieure Brute (DIB) évalue l’ensemble des achats de produits finals et l’effort
d’investissement des agents économiques.

DIB = consommation finale + formation brute de capital fixe + variation de stock

DIB = CF + FBCF + VS

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C : LES LIMITES DES AGREGATS

Les agrégats que nous venons de présenter émanent de la comptabilité nationale qui sous sa
forme actuelle, présente certaines insuffisances, ce qui ne lui permet pas toujours de remplir sa
fonction d’instrument d’aide à la décision auprès des pouvoirs publics. En effet, se fondant sur
des données d’une précision variable (notamment pour ce qui concerne les revenus), elle rend
parfois la prévision aléatoire, ce qui compromet l’analyse synthétique entre plusieurs valeurs.
Très centrée sur les évaluations marchandes et monétaires, la comptabilité nationale prend
insuffisamment en compte des services collectifs non-marchands (le travail domestique..), mais
aussi des effets externes de l’activité économique (comme les nuisances sur l’environnement).
A cela, on peut ajouter l’ignorance de l’économie souterraine (trafics et autres activités non
déclarées qui échappe à tout contrôle), la difficulté d’apprécier la qualité des produits. Le
système élargi de comptabilité nationale a introduit un progrès en dressant des comptes
satellites, concernant notamment la santé, l’éducation, le logement. Ces comptes doivent
permettre à terme d’orienter les politiques publiques dans un certain nombre de domaines
spécifiques, où l’aspect quantitatif n’est pas seul en compte.

II LE CIRCUIT ECONOMIQUE

La schématisation de l’activité économique à l’aide d’un circuit se fera en trois étapes par ordre
de croissance.

Une économie à deux agents

Les agents considérés sont les entreprises (« firmes ») et les ménages. Deux hypothèses sont
successivement traitées. Dans la première les ménages consomment tout leur revenu. Dans la
second ils constituent une épargne.

a- Les ménages consomment tout leur revenu

Considérons une économie dans laquelle les ménages consomment tout ce qu’ils gagnent et les
entreprises versent sous forme de revenu aux ménages la totalité de la valeur de leur production,
en contrepartie de la force de travail.

Le graphique 1 résume les liaisons et les échanges entre les entreprises et les ménages.

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Offre de travail Revenu ( Y = 1000)
Marché
des
facteurs
MENAGES

ENTREPRISES

Marché des
Biens et services Production
Biens et
services
Dépenses de
consommation
( C = 1000)

Les entreprises produisent et vendent des biens et services (de consommation privée) pour un
montant de 1000. Cette production représente un flux réel de biens et services.

Les ménages achètent ces biens et services grâce aux revenus de 1000 versés par les entreprises
en contrepartie de leur force de travail. Ces achats sont appelés dépenses de consommation ou
demande de consommation. Ils constituent un flux monétaire.

Pour produire des biens et services de consommation d’une valeur de 1000, les entreprises ont
besoins de facteurs de production (travail seulement dans notre cas). Les ménages vendent leur
force de travail en contrepartie d’un revenu de 1000 qui leur permet de consommer pour le
même montant. La vente de la force de travail est un flux réel ; le revenu perçu est un flux
monétaire.

Compte tenu des hypothèses (les ménages consomment tout leur revenu, les entreprises versent
sous forme de salaires la totalité de la valeur de leur production) on a les égalités suivantes :

Revenu = Y = Valeur du travail fourni

= production de biens et services

= Dépenses de consommation : C

On peut donc écrire :

Y=C (1)

Production = Consommation
Revenu = Consommation
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Et par déduction logique : Production = Revenu

Le circuit des échanges peut donc être appréhendé sous deux optiques différentes : celle de la
production et celle du revenu.

- L’optique production ou produit ne prend en considération que les flux réels

Production = Valeur des facteurs2

- L’optique revenu ne prend en considération que les flux monétaire

Revenu = Dépenses de consommation

La consommation, telle qu’elle vient d’être présentée est une consommation finale : elle
concerne des biens et services vendus sur un marché, mais qui ne font pas l’objet d’une revente.
Nous distinguerons plus loin une notion très différente : la consommation intermédiaire.

D’une manière générale, un bien ou services final est un bien ou services vendu sur un marché,
mais non revendu.

b- L’épargne et l’investissement

Supposons maintenant que les ménages ne dépensent pas tout leur revenu. Par définition en
économie, ce qui n’est pas consommé constitue l’épargne :

Epargne = Non-consommation

Mais que font les ménages de cette épargne ?

- Ils peuvent acheter des actions ou obligations émises par les entreprises. Ces dernières
utilisent cette épargne pour acheter des biens d’investissement (terrains, machines,
équipement, etc.)
- Ils peuvent placer cette non-consommation dans des institutions financières. Elle est
ensuite prêtée aux entreprises qui en ont besoins pour investir.

2
Offre de biens et services = offre de facteur 9
Le graphique 2 établit deux propositions (On s’intéresse aux flux monétaires)

Revenu
Marché
(Y=
Offre de travail desfacteur
1000)
s

MENAGES
Épargne
S = 250

Marché
des
Capitaux
ENTREPRISES
Investissement
(I = 250)
Biens et services Marché des Production
Biens et
Consommation services
(C = 750)

- Le revenu des ménages se décomposent en deux emplois : 750 en consommation, 250


en épargne ;
- L’épargne investie directement (actions, obligations) ou indirectement (institutions
financières) sert aux entreprises à acheter des biens d’investissement pour un montant
de 250.

De même que les dépenses de consommation constituaient une demande de la part des ménages,
l’investissement constitue une demande de la part des entreprises. Les biens d’investissement
sont des biens « finals » car ils sont acheté sur un marché mais ne sont pas revendus.

CHAPITRE 2 : LE COMPORTEMENT DE CONSOMMATION


Si nous commençons ce cours de macroéconomie par l’analyse du comportement de
consommation, c’est parce que celle-ci revêt une importance capitale en analyse économique
en général et en macroéconomie en particulier. En effet, la consommation est un acte fondateur
de l’activité économique dans le sens où c’est elle qui permet de satisfaire nos besoins
(individuels et collectifs) et que ces derniers sont à l’origine même de l’activité économique.
Ce sont les besoins qui transforment l’être humain passif en agent économique actif. Par
ailleurs, la consommation est en général la composante principale de la demande globale et à
ce titre elle est au cœur du débat sur l’efficacité des politiques macroéconomiques de relance.

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Et c’est pourquoi son étude est un préalable à toute modélisation des politiques économiques.
Ceci étant dit, nous définissons la consommation comme un acte de destruction d’un bien ou
d’un service. Cette consommation peut être finale ou intermédiaire. La consommation
intermédiaire se rapporte à un bien ou un service qui n’a pas encore achevé son itinéraire dans
le processus productif et qui est appelé à être transformé en un autre bien. Elle correspond donc
à une destruction créatrice. Mais la consommation finale est un acte de simple « destruction »
destiné à satisfaire un besoin humain. Cette consommation peut être publique ou privée. Mais
dans ce chapitre, nous nous intéressons exclusivement à la consommation privée des ménages.
La consommation publique sera considérée comme exogène et intégrée dans les « dépenses
publiques ». Notre objectif est de passer en revue les analyses de la consommation globale des
ménages en vue de trouver les variables explicatives de cette évolution, c'est-à-dire de dégager
ses déterminants. Le déterminant premier qui a été avancé par les économistes est le revenu.
Mais ce concept peut recouvrir diverses réalités : le revenu courant, le revenu relatif ou le revenu
permanent.
• Keynes retient la notion du revenu courant. Mais d’autres auteurs introduisent certains
décalages :
 Duesembery introduit ce décalage au niveau du revenu avec l’hypothèse du revenu
relatif : Ct = aYt + bYt-1
 Brown l’introduit au niveau de la consommation pour tenir compte des habitudes :
Ct = aYt + bCt-1 + C0.
Ces deux dernières propositions rejoignent celle de Keynes dans la mesure où elles se réfèrent
à des facteurs psychologiques.
• A l’opposé de la théorie keynésienne, nous trouvons la théorie du choix inter temporel
proposée par Fisher qui prend en compte le long terme et donc l’évolution de la richesse. Cette
théorie va donner naissance à plusieurs interprétations dont :
 Celle du revenu permanent de Friedman et
 Celle du cycle de vie de Modigliani.
Dans ce cours, nous limiterons nos investigations aux propositions de Keynes, Fisher,
Modigliani et Friedman.

SECTION I - L’HYPOTHESE DU REVENU COURANT : LA


FONCTION DE CONSOMMATION KEYNESIENNE

A) LES FONDEMENTS ET LES CARACTERISTIQUES DE L’HYPOTHESE DU


REVENU COURANT

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Selon Keynes, la consommation des ménages s’explique essentiellement par le revenu
disponible courant (Yd), c'est-à-dire le revenu national brut net d’impôts et des charges sociales
: Yd = Y – T (où Y est le PIB ou le PNB, et T constitue les charges fiscales et parafiscales). Le
point de départ de la théorie keynésienne est une loi dite loi psychologique de Keynes qui
s’énonce comme suit : « la loi psychologique fondamentale sur laquelle nous pouvons nous
appuyer en toute sécurité, à la fois à priori en raison de notre connaissance de la nature
humaine et à posteriori en raison des renseignements détaillés de l’expérience, c’est qu’en
moyenne et la plupart du temps, les hommes tendent à accroître leur consommation à
mesure que le revenu croît, mais non d’une quantité aussi grande que l’accroissement du
revenu ». J.M. Keynes, La Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie (1936).
De cette proposition, nous retenons que, selon Keynes, la consommation est en relation directe,
mais non proportionnelle, avec le niveau du revenu disponible :

(où Ct est la consommation des ménages de la période t).

Par ailleurs, Keynes remarque que même pour un revenu disponible nul, la consommation est
positive. Il existe un seuil minimum de consommation qui correspond au minimum vital et qui
sera appelé consommation incompressible. Cette remarque et la loi psychologique permettent
de formaliser la fonction de consommation keynésienne comme suit : Ct = C0 + cYdt (où C0 est
la consommation incompressible et « c » un paramètre positif inférieur à 1)

De cette relation, nous pouvons tirer un certain nombre de caractéristiques :

• La consommation des ménages comporte deux composantes : une composante autonome (C0)
et une composante induite (cYd).

• La propension marginale à consommer, qui mesure la variation de la consommation des


ménages conséquente à la variation du revenu disponible d’une unité, est constante et comprise
entre zéro et un :

• La propension moyenne à consommer, qui mesure la consommation des ménages par unité de
revenu disponible, est décroissante et supérieure à la propension marginale à consommer :

La PMC décroît de ∞ à c, c'est-à-dire que pour des revenus disponibles très élevés, la PMC tend
vers la PmC. A partir de cette fonction de consommation, nous pouvons déduire celle de
l’épargne. En effet, la partie du revenu disponible qui n’est pas consommée sera épargnée, c'est-
à-dire que la fonction d’épargne est :

St = Ydt – Ct = Ydt – C0 - cYdt = – C0 + (1-c)Ydt = – C0 + sYdt (où St est l’épargne des ménages
et s = 1-c).

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De cette relation, nous pouvons tirer un certain nombre de caractéristiques :

• L’épargne apparaît comme un résidu.

• La propension marginale à épargner, qui mesure la variation de l’épargne des ménages


conséquente à la variation du revenu disponible d’une unité, est constante et comprise entre
zéro et un :

• La propension moyenne à épargner, qui mesure l’épargne des ménages par unité de revenu
disponible, est croissante et inférieure à la propension marginale à épargner :

La PMS croît de -∞ a s, c'est-à-dire que pour des revenus disponibles très élevés, la PMS tend
vers la PmS.

• La somme des propensions marginales à consommer et à épargner est égale à un :


PmC + PmS = c + s = c + (1 – c) = 1

• La somme des propensions moyennes à consommer et à épargner est égale à un :

Représentation graphique

Remarquons qu’au seuil d’épargne, la propension moyenne à consommer est égale à un et la


propension moyenne à épargner est nulle.

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B) LES IMPLICATIONS ET LES LIMITES DE L’HYPOTHESE DU REVENU
COURANT

a) Les implications
• Si nous considérons des ménages à revenus différents, nous observons une PMC de plus en
plus faible et une PMS de plus en plus élevée à mesure que le revenu disponible augmente.

• Pour un pays donné, la PMC doit diminuer au fur et à mesure que le niveau de vie de la
population s’élève.

• La comparaison entre pays doit faire ressortir une PMC plus faible et une PMS plus élevée
pour les pays les plus riches et inversement.

• La consommation est la composante principale de la demande, et de ce fait elle constitue le


moteur de la croissance économique. Par conséquent, la baisse de la PMC ne manquerait pas,
à terme, de mener les économies qui s’enrichissent vers une stagnation séculaire.

b) Les limites La théorie keynésienne de la consommation va être critiquée sur


plusieurs flancs.
• La première critique est d’ordre empirique. Nombreux sont les travaux empiriques qui
remettent en cause l’hypothèse de Keynes. Mais les travaux les plus significatifs sont ceux
menés par Kuznets sur l’économie américaine. Ce dernier livre des résultats contrastés : la thèse
de Keynes n’est confirmée qu’à court terme où on observe effectivement une baisse du taux de
consommation. Mais les tests empiriques relatifs à des séries historiques révèlent, au contraire,
une stabilité du taux de consommation et du taux d’épargne. Par ailleurs, l’histoire concrète n’a
pas confirmé la stagnation séculaire qui devrait survenir si l’hypothèse keynésienne était
suffisamment robuste.

• La fonction de consommation keynésienne ne tient pas compte de la répartition du revenu. En


effet, si nous considérons deux catégories de ménages ayant des fonctions de consommation
différentes : les riches avec une PmC faible, et les pauvres avec une PmC élevée. Et étant donné
que la fonction de consommation globale est une agrégation des fonctions de consommation
des différentes catégories sociales, alors toute variation au niveau de la répartition des revenus
entre riches et pauvres se traduit immanquablement par une modification de la fonction de
consommation et donc de la consommation elle-même.

• L’hypothèse du revenu courant ne peut rendre compte du comportement de consommation


des ménages dont les revenus subissent des variations aléatoires importantes tels que les
exploitants agricoles soumis aux aléas climatiques ou certaines activités soumises à des
variations saisonnières importantes. En effet, ces catégories de ménages procèdent souvent à
un lissage de leurs revenus en épargnant durant les années « grasses » et en désépargnant durant
les années « maigres » comme dans le graphique suivant :

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• La théorie keynésienne donne une explication statique du comportement des ménages dans la
mesure où elle ne rend pas compte de l’arbitrage entre la consommation présente et la
consommation future et donne à l’épargne un statut de simple résidu. Par ailleurs, il n’y a aucun
fondement microéconomique à la formulation macroéconomique du comportement de
consommation.

L’ensemble de ces limites rend nécessaire la reformulation de la théorie de la consommation.


La contribution de Fisher semble l’alternative la plus exhaustive et celle qui a donné naissance
à plusieurs interprétations alternatives.

Section II: LES CHOIX DE CONSOMMATION ET D'EPARGNE INTER-TEMPORELS.

L’objectif de ce chapitre est de passer en revue les analyses de la consommation globale des
ménages en vue de trouver les variables explicatives de cette évolution, c'est-à-dire de dégager
ses déterminants. Pour cela nous allons faire une analyse des théories et modèles relatifs à la
fonction de consommation.
Nous limiterons nos investigations aux propositions de Fisher, Modigliani et Friedman.
A : LA THEORIE DU CHOIX INTERTEMPOREL DE FISHER

Cette approche a été présentée par Irving Fisher en 1930 dans le but de donner un fondement
microéconomique à la fonction de consommation macroéconomique. D’inspiration
néoclassique, cette théorie suppose des agents rationnels qui agissent dans un environnement
de concurrence parfaite. Ces agents raisonnent en terme réel et adoptent un comportement
calculateur de maximisation de la fonction objectif sous contrainte.

Le plan de consommation intertemporel


Pour simplifier notre raisonnement, nous supposons un ménage représentatif:
- dont l’espérance de vie est de deux périodes : le présent (période1) et le futur (période 2),
- qui n’a pas de richesse initiale et qui ne lègue rien à ses héritiers.
Le taux d’intérêt réel (r) est la récompense de la renonciation au présent, c'est-à-dire la
récompense de l’abstinence. Autrement dit, ce ménage obtiendrait (1+r) unités de
consommation au futur s’il accepte de renoncer à une unité de consommation au présent. Ce
ménage peut donc, à chaque période, avoir une consommation inférieure à son revenu courant

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et épargner le reste ou avoir une consommation supérieure à son revenu courant et emprunter
la différence.
Si l’espérance de vie d’un ménage représentatif est de n années, ses revenus disponibles réels
annuels anticipés sont: Y1, Y2, Y3, …,Yn, et ses consommations réelles annuelles sont : C1,
C2, C3, ……,Cn. Son plan de consommation inter temporel est alors celui qui maximise son
utilité sous contrainte de sa richesse.
L’espérance de vie du ménage étant de deux périodes, la richesse d’un ménage (W) est la
somme de ses revenus disponibles réels actualisés soit :
Y2
W  Y1 
1 r
W est la richesse inter temporelle actualisée à la date 1.

1- La fonction d'utilité inter-temporelle.


L’objectif du ménage représentatif est de maximiser sa fonction d’utilité inter temporelle:

U  U C1 ,C 2 
C1 : La consommation de la période 1 et C2 : La consommation de la période 2.
U(∙) : Une fonction d'utilité respectant les propriétés liées aux fonctions d’utilité.
Cette fonction peut être représentée dans un plan, par une courbe d’indifférence intemporelle
qui représente le lieu géométrique de toutes les combinaisons de consommation (C1, C2) qui
donnent le même niveau d’utilité.

2- La contrainte budgétaire inter-temporelle


La contrainte budgétaire du ménage désigne l’égalité entre ses ressources et leur emploi. Il
s’agit, ici, de l’égalité entre la somme de ses revenus disponibles réels actualisés et la somme
de ses consommations annuelles réelles actualisées.
C2 Y
C1   Y1  2  W  C2  1  r W  1  r C1
1 r 1 r

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1/1+r représente le prix relatif de la consommation future en termes de consommation présente.
C’est la fraction de la consommation en période 1 à laquelle le consommateur doit renoncer pour
obtenir une unité en période 2. Selon cette relation la droite de budget inter- temporelle est une
droite de pente -(1+r) dans le repère (C1, C2).

Au point A C1=0: l'agent épargne tout son revenu en première période et consomme
C2=Y1(1+r)+Y2 en période 2.
Au point B, C2=0 : l'agent ne souhaite pas consommer en deuxième période, il va consommer
donc Y1 + Y2/(1+ r) en période 1. La pente de cette droite dépend directement de la valeur du
taux d'intérêt. Cette droite pivote quand r varie et elle se déplace parallèlement à elle-même
quand, pour une valeur donnée de r, le revenu de l'agent varie

Le choix optimal de consommation et d’épargne


Le programme de l’agent est le suivant :
Max U C1 , C 2 

 C2 Y
 s / c C1   Y1  2
 1 r 1 r
1. L’optimum
Le lagrangien de ce programme s'écrit:
 C2 
L  U C1 , C 2     W  C1  
 1 r 

17
Le TMSI représente le taux marginal de substitution inter temporel. Il mesure la quantité de
consommation future que le ménage serait prêt à céder pour avoir une unité supplémentaire de
consommation présente tout en gardant son niveau d’utilité constant. C’est le taux d’échange
subjectif entre la consommation future et la consommation présente.
(1+r) mesure la valeur future d’une unité de consommation présente. C’est le taux d’échange
objectif entre la consommation future et la consommation présente.
L’optimum est donc tel que le taux d’échange objectif est égal au taux d’échange subjectif:

Contrairement à l’hypothèse de Keynes, la consommation des ménages ne dépend pas


uniquement du revenu disponible, elle dépend également du taux d’intérêt. Cet équilibre peut
déboucher sur deux catégories de ménages:
Un ménage créditeur caractérisé par une épargne positive, c'est-à-dire par une consommation
présente inférieure au revenu présent : C1* < Y1 ⇔S > 0.
Un ménage débiteur caractérisé par une épargne négative, c'est-à-dire par une consommation
présente supérieure au revenu présent : C1* > Y1 ⇔S < 0.
Comme le ménage considéré ne lègue rien à ses héritiers, sa richesse doit être épuisée à la fin
de la deuxième période, c'est-à-dire qu’il ne doit avoir à la fin de sa vie ni d’épargne, ni de
dettes.
Nous avons montré ci-dessus que la consommation dépend du revenu disponible et du taux
d’intérêt, mais nous n’avons pas précisé la nature de la relation (croissante ou décroissante).
Pour ce faire, nous devons analyser les conséquences des variations du revenu disponible et du
taux d’intérêt, lesquelles variations se traduisent par un déplacement de l’équilibre.

18
3- Déplacement de l’équilibre
a) Variation des revenus disponibles et déplacement de l’équilibre
Cela se traduit par un déplacement parallèle de la contrainte budgétaire. Il y aura donc
augmentation (diminution simultanée de C1 et C2) ainsi que de l’épargne.

b) variation du taux d’intérêt et déplacement de l’équilibre


Toute variation du taux d’intérêt réel (C1 et C2 restant constants) implique un déplacement non
parallèle de la droite budgétaire et par la même un déplacement de l’équilibre. Ce déplacement
de l’équilibre résulte d’un double effet: un effet substitution et un effet de richesse ou de revenu.

• L’effet richesse résulte du fait que le ménage va se sentir plus riche ou plus pauvre selon le
sens de variation du taux d’intérêt et selon que l’agent soit débiteur ou créditeur: une
augmentation du taux d’intérêt enrichit l’agent créditeur et appauvrit l’agent débiteur et
inversement. Et tout enrichissement (appauvrissement) implique une augmentation (une baisse)
de C1 et de C2.
• L’autre effet de la variation du taux d’intérêt est la modification de la récompense de la
renonciation au présent, c’est à dire du prix de C1en terme de C2. Ceci se traduit par un effet de
substitution qui est le même quel que soit la situation de l’agent: une augmentation du taux
d’intérêt incite à l’épargne et a donc un effet négatif sur la consommation présente et positif sur
la consommation future, et inversement.
• Les effets conjugués (effet global) sont donc relativement complexes sur les consommations
présentes et futures et sur l’épargne. Ils dépendent du sens de variation du taux d’intérêt et de
la situation de l’agent. Toutefois, les tenants de ce modèle font l’hypothèse que lorsque l’effet
revenu et l’effet substitution ne vont pas dans le même sens, c’est ce dernier qui l’emporte de
sorte que, par exemple, si l’effet revenu est positif et l’effet substitution est négatif, l’effet global
sera négatif.
Le tableau suivant récapitule les conséquences des variations du taux d’intérêt réel selon la
situation de l’agent.

19
Conclusion

Si nous supposons que l’effet substitution l’emporte sur l’effet revenu, nous pouvons conclure
que l’approche de Fisher établit une relation croissante entre la consommation présente et la
richesse et décroissante entre la consommation présente et le taux d’intérêt réel.

B – L’HYPOTHESE DU CYCLE DE VIE (MODIGLIANI, 1950)

Dans les années 1950, Franco Modigliani va se référer aux conclusions du modèle de la
consommation de Fisher pour tenter de résoudre l’énigme de la consommation et expliquer la
contradiction entre la théorie keynésienne et les faits observés.
L’idée principale du modèle est que le revenu varie au cours de la vie. La principale raison à
l’origine de ces fluctuations des revenus est l’existence d’une période d’activité où les revenus
sont relativement élevés, et d’une période d’inactivité (la retraite) où les revenus sont
relativement faibles, voir nuls. L’épargne permet au ménage de transférer une partie du revenu
des périodes où celui-ci est élevé vers les périodes où il est faible. L’objectif de ces transferts
de revenus est d’avoir une structure de consommation relativement stable durant toute la vie.
Le rôle de l’épargne, dans ce cas, est de répondre au désir des ménages de ne pas voir leur

20
consommation baisser substantiellement durant la période de retraite. L’épargne permet donc
de lisser la consommation.
Cette incitation à épargner va avoir des implications sur la fonction de consommation.
Soit un ménage qui dispose d’une richesse initiale égale à W0. Ce ménage s’attend à vivre
encore n années dont e années d’activité et (n - e) années de retraite. Il perçoit, durant la période
d’activité, un revenu annuel constant égal à Y. Il ne lègue rien à ses héritiers et pour simplifier
le raisonnement, nous supposons que le taux d’intérêt est nul.
Quel niveau de consommation doit-il avoir pour être en mesure de «lisser» sa consommation
durant toute la durée de vie ?
Les ressources de ce ménages s’élèvent à: W0 + e.Y. Sa consommation annuelle sera donc :
C = W0/n+ e.Y/n
Exemple : Si un ménage s’attend à vivre 50 années durant lesquelles il travaillera 30 ans, alors
n = 50 ; e = 30 et (n-e) = 20 années de retraite. La fonction de consommation devient :
C (W0, Y) = 0,02W0+0,6Y
Ainsi contrairement à la fonction de consommation keynésienne, la consommation est une
fonction positive de la richesse et du revenu.
Si tous les ménages adoptent un comportement similaire, la fonction de consommation agrégée
sera: C = αW + βY
Où: α = propension marginale à consommer de la richesse.
Et β = propension marginale à consommer du revenu.
Représentation graphique et implications

On suppose que la richesse est constante à court terme. Elle ne varie qu’à long terme suite à
l’accumulation de l’épargne.
Au niveau individuel, la richesse augmente, puis baisse. Mais pour l’ensemble des ménages,
c'est-à-dire au niveau macroéconomique, la richesse suit un trend ascendant.

• A court terme αW = αW0 (une constante) et la fonction de consommation est:


C = αW0 + βY. Cette fonction de consommation est similaire à celle de Keynes où αW est la
consommation autonome et βY la consommation induite.
21
PMC = αW/Y+ β, décroissante par rapport au revenu.
• Mais, à long terme, au fur et à mesure que la richesse augmente, la fonction de consommation
va se déplacer vers le haut. L’accroissement du revenu va être compensé par l’accroissement
de la richesse de sorte que la propension moyenne à consommer va rester constante : PMC =
αW0/Y + β.
Et comme W et Y vont augmenter en parallèle, rien ne prédispose la PMC à baisser.
La contribution de Modigliani a établi que la consommation des ménages dépend en partie
du revenu courant, mais elle dépend aussi de la richesse. Cette contribution a permis de
résoudre la contradiction entre la théorie de la consommation et l’histoire concrète.
C : L’HYPOTHESE DU REVENU PERMANENT DE M. FRIEDMAN

Comme Modigliani et d’autres auteurs, Friedman va fonder son hypothèse sur celle de Fisher
et va élaborer un plan de consommation qui dépasse de loin la période courante. Il va avancer
les notions de revenu permanent et de consommation permanente. La théorie du choix inter
temporel montre que la richesse et le taux d’intérêt sont des variables explicatives de la
consommation. Et comme les revenus futurs ne sont pas observables directement mais
anticipés, la richesse elle-même est une notion qui sera, selon l’approche du revenu permanent,
anticipée.

1- La notion de revenu permanent


Le revenu permanent peut être considéré comme le reflet des revenus annuels stables sur une
longue période dont la valeur présente actualisée est égale à la richesse du ménage. Quand un
ménage épargne, il ajoute à sa richesse et accroît donc son revenu permanent. Le revenu
permanent est donc intimement lié au concept de richesse (W).
Si la richesse s’écrit : W= R1+ R2/(1+r) + R3/(1+r)2 +...+ Rn/(1+r)n-1
Y2 Y3 Yn
W  Y1    ..... 
1 r 1  r 2 1  r n1
Le revenu permanent serait donc égal à un revenu constant à long terme tel que :

On obtient l'expression de la somme d'une suite géométrique de premier terme 1 et de raison


1/(1+r) <1. On peut donc écrire :

22
Toutefois, la définition théorique du revenu permanent ne permet pas de l’évaluer car les
revenus futurs et le taux d’intérêt futur sont difficiles à observer. Ainsi, Friedman a proposé
pour surmonter cette difficulté une définition empirique qui se base sur les revenus observés au
présent et durant les périodes passées.
Il suppose que les revenus courants subissent, d’année en année, des chocs temporaires
aléatoires. Autrement dit, le revenu courant est formé par deux composantes : une composante
permanente et une composante transitoire :

Le revenu permanent est la composante du revenu que les ménages s’attendent à conserver à
l’avenir : c’est la partie stable du revenu. Le revenu transitoire est la composante du revenu
dont les agents ne prévoient pas le maintien à l’avenir : c’est la différence, à court terme, entre
le revenu courant et le revenu permanent à long terme. Si le revenu permanent est le revenu
moyen, le revenu transitoire apparaît comme l’écart aléatoire par rapport à cette moyenne. Cet
écart peut être positif ou négatif selon que le revenu courant est supérieur ou inférieur au revenu
permanent.
Soit λ (0 < λ < 1) un coefficient d’ajustement. Tout écart entre le revenu courant Yt et le revenu
P
permanent de la période précédente (Yt 1 ) est ajouté ou retranché à l’évaluation du revenu

permanent dans une proportion égale à λ, c'est-à-dire que si nous considérons que Yt  Yt 1 est
P

le revenu transitoire, alors le revenu permanent sera :

Le revenu permanent est donc la moyenne pondérée des revenus courants des périodes
précédentes. Les coefficients de pondération sont de plus en plus faibles au fur et à mesure que
l’on remonte dans le passé.

2- La fonction de consommation
Les ménages orientent leur consommation permanente en fonction de la partie permanente de
leur revenu et adoptent un autre comportement face à leur revenu transitoire. Lorsque, les
revenus courants augmentent ou baissent temporairement, les ménages ne bouleversent pas
complètement leurs habitudes de consommation.

23
En cas de baisse temporaire, les ménages puisent dans leur épargne accumulée pour financer
leurs dépenses normales de consommation. En cas d’augmentation temporaire, ils consacrent à
l’épargne une proportion plus élevée de leur revenu que d’habitude.
L’intuition qui se dégage de cette théorie est que la consommation courante est une proportion
du revenu disponible courant, mais cette proportion est plus importante pour la partie du revenu
qui est permanente et plus faible pour celle qui est transitoire. Les ménages épargnent une plus
grande proportion de leur revenu transitoire que celle relative à leur revenu permanent. Si leurs
revenus transitoires deviennent négatifs, ils puisent dans leurs épargnes pour maintenir leurs
niveaux de vie. L’une des conséquences de la distinction entre le revenu permanent et le revenu
transitoire est la variation de la PMC et de la PmC à court terme par rapport à leurs valeurs de
long terme au cours du cycle économique. En effet, en période d’expansion économique, les
ménages réalisent des revenus transitoires positifs et importants, ce qui les incite à l’épargne ;
leur richesse va donc augmenter. Ils ont un comportement inverse en cas de récession et de
revenus transitoires négatifs.
Deux forces contraires agissent ainsi sur la PMC :
La première tend à favoriser une baisse du ratio C/ Y à court terme en période d’expansion et
une hausse en période de ralentissement. Cela est dû au fait que la consommation est
relativement stable dans le temps, mais les revenus le sont moins.
Mais ces tendances sont contrecarrées par la tendance des ménages à épargner une forte
proportion des revenus transitoires. La conséquence de ces mécanismes est que la fonction de
consommation n’est stable qu’à long terme. A court terme cette fonction est instable.

P
Si nous désignons par (Ct ) la consommation permanente de long terme, on peut écrire la

fonction de consommation permanente de long terme comme suit: (Ct  kYt ) .


P P

Où k est la propension marginale à consommer le revenu permanent anticipé. Ce coefficient


est, selon Friedman, proche de l’unité, mais il peut varier d’un pays à l’autre et d’une catégorie
de ménages à l’autre. Dans ses études empiriques, l’auteur trouve une valeur égale à 0,88 pour
les Etats-Unis. Et comme :

Nous pouvons déduire la fonction de consommation à court terme des revenus transitoires :

24
Pour (k = 0,9) et (λ = 0,25) : la propension marginale à consommer le revenu permanent est
égale à 0,9 et la propension marginale à consommer le revenu transitoire est égale à 0,225.
Ceci veut dire que l’épargne normale représente 0,1 du revenu permanent et l’épargne spéciale
représente 0,775 du revenu transitoire.
La dernière équation peut être exprimée différemment de manière à établir une relation entre la
P
consommation permanente (Ct ) et le revenu disponible courant (Yt):

Les conclusions de la théorie du revenu permanent de Friedman sont très semblables à celles
de la théorie de la consommation en escalier de Duesenberry qui explique la variabilité de la
PMC à court terme et sa stabilité à long terme par le fait que les ménages deviennent habitués
à un certain niveau de vie et résistent à tout changement brusque de ce dernier.
Par ailleurs, il est également possible d’établir une relation de proximité entre les conclusions
de Friedman et celles de Brown. En effet :

Cette dernière relation ressemble fortement à la relation établie par Brown :

25
Chapitre 3 – L’Investissement

Le long terme est un mauvais guide pour les affaires courantes. À long terme, nous serons tous
morts. Les économistes se fixent une tâche peu utile s’ils peuvent seulement nous dire que, lorsque
l’orage sera passé, l’océan sera plat à nouveau.

John Maynard Keynes

Introduction
1 - Importance de l’investissement

Les dépenses d'investissement sont importantes car elles font partie à la fois de la demande
globale et de l'offre globale. Elles s'ajoutent en effet aux trois autres grandes catégories de
dépenses qui assurent l'écoulement de la production courante de biens et de services (la
consommation, les dépenses de l’Etat et les exportations).

De plus, toute variation autonome des dépenses d'investissement entraîne un effet


multiplicateur qui stimule les dépenses induites de consommation.

Aussi, les dépenses d'investissement sont autant d'additions au stock de capitaux Physiques et,
en ce sens, elles accroissent la capacité de production de l'économie. A ce titre, les dépenses
d'investissement font partie de l'offre globale.

C’est pourquoi, les économistes le considèrent comme étant le moteur de la croissance et de


développement.

2 – Définition

Un investissement représente l’accumulation de capitaux physiques ou de biens durables par


les agents économiques. L’investissement est la variation du stock de capitaux physiques par
unité de temps.

a. La composition de l’investissement
Les dépenses d’investissement dans un pays sont constituées des dépenses des entreprises
consacrées à l’achat d’usines, d’outillages ou d’équipements, etc., des dépenses que les
ménages consacrent à l’achat de biens immobiliers neufs et les dépenses de l’Etat en
équipements collectifs.

La totalité des dépenses d’investissement au cours d’une période constitue l’investissement


brut (IB). Il comporte deux composantes : la formation brute de capital fixe et la variation des
stocks.

L’investissement net (IN) est égal à la différence entre l’investissement brut et


l’investissement de remplacement du capital usagé : il correspond à l’accroissement du
capital.

26
Remarque : le montant de l’investissement de remplacement est difficile à estimer ; c’est
pourquoi on suppose qu’il est proportionnel à la valeur des stocks de la période antérieure.

b. La mesure de l’investissement
Au niveau de la comptabilité nationale, l’investissement est mesuré par la formation brute de
capital fixe (FBCF) qui ne retient que les investissements matériels et en logiciel comme
investissements immatériels. Par ailleurs, les dépenses de formation, de recherche-
développement et d’études de marché sont considérés comme des consommations
intermédiaires ou des salaires. L’effort d’investissement dans un pays ou dans un secteur est
mesuré en calculant le taux d’investissement :

FBCF
Tinv = ∗ 100
PIB
NB : Nous nous intéresserons aux investissements privés des entreprises.

Section I : la fonction de l’investissement


1 - Les raisons d’investissement

Les entreprises investissent parce qu'elles ont besoin du stock de capitaux physiques, nécessaire
pour produire ou fabriquer les biens qu'elles peuvent vendre à profit. Le stock de capitaux
physiques constitue le fondement de la capacité de production d'une entreprise. Chaque firme
doit décider le type et la quantité de capitaux physiques dont elle a besoin pour atteindre un
objectif de production et de vente : C'est la première raison d'investir.

Une entreprise peut aussi investir pour rajeunir et moderniser son stock existant de capitaux
c’est la deuxième raison d’investir. En effet, les capitaux physiques sont des biens de
production qui incorporent de la technologie ou des techniques de production qui peuvent être
plus ou moins à jour. On peut, par exemple, remplacer une machine désuète par une plus
moderne. Le but recherché est d'accroître la production à meilleur coût.

La troisième raison d'investir est de maintenir intact le stock existant de capitaux physiques
en remplaçant le capital usé ou déprécié.

En résumé, donc, trois raisons d'investir motivent une entreprise:

L'accroissement de sa capacité de production par l'accroissement de son stock de


capitaux physiques;
La modernisation du stock existant de capitaux physiques afin d'utiliser la technologie
la plus avancée ou la mieux adaptée à ses besoins;
L'entretien du stock existant de capitaux par le remplacement du capital usé ou
déprécié.

2 - La fonction d’investissement

27
Elle consiste à déterminer les facteurs explicatifs de l’investissement : Les entreprises
investissent parce qu'elles anticipent que ces investissements seront rentables et ajouteront de
la profitabilité.

Plusieurs facteurs entrent en jeu, certains sont objectifs observables et mesurables tel que le
taux d’intérêt, et d’autres le sont moins tel que la confiance dans le milieu des affaires…

Dans le cadre de ce chapitre, on va s’intéresser uniquement aux facteurs les plus objectifs afin
d’expliquer le comportement des entreprises car ils sont plus faciles à évaluer et à maîtriser par
les politiques économiques.

Section II : Les déterminants de l’investissement


1- L’investissement et le taux d’intérêt

L'investissement résulte d’un choix relativement complexe où se mêlent des facteurs objectifs
observables et mesurables, tel que le taux d’intérêt, et des facteurs subjectifs dont l’évaluation
est difficile, telle que la confiance des milieux d’affaire. Alors que, les classiques se limitent
au rôle fondamental du taux d’intérêt, Keynes complète ce facteur par la demande anticipée.

En cherchant la rentabilité financière, l’entreprise compare ce que coûte un projet


d’investissement et ce qu’il rapporte.

Pour se faire, l’investisseur utilise soit la règle de la valeur actuelle nette (VAN) soit la règle de
taux de rendement interne (TRI).

1.1 Le critère de la valeur actuelle nette (VAN) :


Tout investissement doit être financé, soit par des fonds propres, soit par des emprunts. Dans
les deux cas, les intérêts représentent le coût rattaché à l'investissement. Parce que les
entrepreneurs cherchent toujours la rentabilité financière, ils vont comparer ce coût avec le
rendement du projet. Cette rentabilité peut être étudiée par référence au critère de la Valeur
Actuelle Nette.

La valeur actuelle nette est égale à la valeur actuelle des revenus futurs (Rt ) moins les coûts de
l’investissement (I0).

Le critère de la valeur actuelle nette (VAN) est la règle fondamentale en matière de décision
d’investissement, et qui consiste à comparer le coût et les recettes d’un projet d’investissement.

Pour étudier une opportunité d’investissement, un entrepreneur peut se référer aux différentes
données suivantes : la dépense d’investissement (I0) à engager immédiatement pour
l’acquisition de biens d’équipement d’une durée de vie de (n) années ; les recettes futures nettes
(RN) attendues de la vente des produits obtenus grâce à l’investissement considéré sur toute sa
durée de vie, sachant le taux d’intérêt (i) du marché financier.

Soit, RN1, RN2, ..., RNn la liste des recettes nettes attendues ou rendements escomptés, par un
entrepreneur qui envisage d’acheter des biens d’équipement d’une valeur I0. Soit, i le taux
d’intérêt et n la durée de vie utile des équipements. Pour décider de la faisabilité de son projet,

28
l’entrepreneur doit calculer la VAN qui est la différence entre la somme des revenus actualisés
et le coût d’achat des équipements :
n
RN t
VAN   I 0  
RN1 RN RN
VAN = −I0 + + (1+i)22 + ⋯ + (1+i)nn
t 1 1  i 
1+i t

Un projet ne sera considéré comme rentable et ne sera réalisé que si sa VAN est positive.
Lorsque la VAN est négative on dit que le projet n'est pas rentable et ne peut être réalisé.

Exemple :

Supposons qu’un entrepreneur envisage d’acheter une machine aux prix de 100 Million de Frs
CFA.

La durée de vie de cette machine est égale à trois ans. Les revenus estimés à la fin de chaque
année sont égaux à :

R1 = 50 Millions de Frs CFA

R2 = 40 Millions de Frs CFA

R3 = 30 Millions de Frs CFA

Travail à Faire :

1. Déterminer la valeur actuelle nette si le taux d’intérêt est égal à 15 %

2. Si le taux d’intérêt baisse à 8 %, calculer la nouvelle VAN. Concluez.

1.2 Le critère du Taux de rendement interne (TRI)

A partir du calcul de la VAN, Keynes propose le concept alternatif d’Efficacité Marginale du


Capital (EMC) ou Taux de Rendement Interne de l’investissement (TRI). Le TRI est le taux
d’actualisation (θ) qui annule la VAN. Le TRI (θ) d’un projet s’obtient en posant :

RN1 RN2 RNn


−I0 + + 2
+⋯+ =0
1 + θ (1 + θ) (1 + θ)n

La décision d'investir est prise en comparant ce taux de rendement au taux d'intérêt auquel
l'entrepreneur peut emprunter.

 L'investissement est entrepris si i < θ


 L'investissement est rejeté si i > θ
 L'entrepreneur est indifférent si i = θ
Cette règle du TRI revient donc à dire qu'un investissement est décidé tant que son taux de
rendement interne est supérieur au coût d'emprunt des capitaux: r ≥ i. Ainsi, plus le taux
d’intérêt est faible, plus le montant des investissements est élevé du fait qu’il y aura de plus en

29
plus de projets rentables. L’investissement est donc une fonction décroissante du taux d’intérêt
:

I = I(i) tel que I′ (i) < 0

L’investissement privée est une fonction décroissante du taux d’intérêt nominal i. Keynes
suppose qu’en courte période que les prix sont constants c'est-à-dire que le taux d’inflation
anticipée est nul, le taux d’intérêt nominal est donc égal taux d’intérêt réel. Par ailleurs, à des
niveaux très faibles du taux d’intérêt, l’investissement ne dépend plus du taux d’intérêt, c'est-
à-dire que la sensibilité de l’investissement au taux d’intérêt sera nulle.

Si nous revenons à l’exemple numérique précédent, il s’agit de déterminer le taux r tel

que :

50 M / ( 1+r ) + 40M / ( 1+r )2 + 30 M / ( 1+r )3 = 100 M

r = 10,8 %

La décision d’investissement est prise en comparant le taux de rendement au taux d’intérêt par
exemple :

Si le taux d’intérêt > 10.8 % L’investissement est rejeté

Si le taux d’intérêt < 10,8% L’investissement est accepté

Cette règle du TRI revient à dire qu’un investissement n’est accepté que si son taux de
rendement est supérieur au coût d’emprunt des capitaux r > i.

2. Le rôle de la demande anticipée: la théorie de l’accélérateur

Fait l’hypothèse que la production des entreprises répond à la demande. Lorsque qu’elles
anticipent une demande future plus élevé les entreprises sont tentées d'augmenter leur
production. Plus la production sera élevé, plus le capital nécessaire pour la produire est
important, et alors plus il faudra investir.

Les hypothèses du modèle

30
Pour qu’une variation de la demande se traduise par un accroissement des capacités de
production il faut que les trois conditions ci-dessous soient vérifiées :

H1 : Les capacités de production sont pleinement utilisées. Il n’y a pas de capitaux oisifs.

H2 : On suppose que la production s’ajuste immédiatement à la demande de sorte que la


production remplace la demande dans la fonction d’investissement.

H3 : On suppose une fonction de production à coefficients fixes et des rendements d’échelle


constants.

Formulation de l’accélérateur simple

Lorsque la production s’adapte immédiatement à la demande anticipée (Ya = Y), le principe de


l’accélérateur suppose que l’investissement net d’une période est proportionnel à la variation
de la production de la même période, c'est-à-dire que :

K t = αYt ⇒ Int = ΔK t = αΔYt

Dans cette expression α désigne le coefficient d’accélération, qui est égal au coefficient de
capital (Coefficient de capital : rapport entre la valeur du capital utilisé dans la production et
la valeur de la production: α = v = K / Y). Si on pose que Yt-1 est une constante, on peut déduire
que l’investissement net est une fonction croissante du niveau de production :

Int = f(Y) tel que I′ nt (Y) > 0

L’investissement est positivement lié aux variations de la demande anticipée. L’investissement


nouveau nécessaire pour répondre à l’accroissement de la demande est appelé investissement
induit. L’investissement brut sera donc égal à l’investissement induit plus l’investissement de
remplacement. L’accélérateur ne fonctionne que dans le cas où la demande est croissante. Dans
le cas où la demande baisse, l’investissement net sera nul et il y aura constitution de capitaux
oisifs. En cas d’une reprise de la demande, les capitaux oisifs doivent être utilisés avant de
procéder à de nouveaux investissements. De l’analyse qui précède on peut définir
l’investissement global comme une fonction négative du taux d’intérêt et une fonction positive
de la demande anticipé ou du revenu global.

I = I(i, Y) tel que I′ (i) < 0 𝑒𝑡I′ (Y) > 0

Dans la suite de ce cours on va supposer que l’investissement est une fonction linéaire telle que:

I = I0 − hi tel que I0 > 0 𝑒𝑡 ℎ > 0

I0 est l’investissement autonome des entreprises et h est un paramètre positif.

3. Les dépenses publiques

Les dépenses publiques constituent la troisième composante de la demande de biens et services.


Les pouvoirs publics centraux ou locaux construisent des routes, des écoles, achètent les
fournitures nécessaires à leurs administrations et rémunèrent leurs fonctionnaires, leurs

31
policiers, leurs pompiers, etc. Toutes ces transactions constituent les dépenses publiques en
biens et services.

Outre leurs achats de biens et services, les pouvoirs publics procèdent à des transferts vers les
ménages, dans le cadre de leurs systèmes de sécurité sociale. Puisque les transferts n’utilisent
pas directement les biens et services produits par l’économie, ils ne sont donc pas inclus dans
les dépenses publiques (G). Toutefois, les transferts affectent indirectement la demande de biens
et services. Les transferts sont la réciproque des impôts : les transferts accroissent le revenu
disponible des ménages alors que les impôts le réduisent. Ainsi, toute hausse de transfert financé
par hausse des impôts laisse le revenu disponible inchangé.

Dans la suite de notre analyse, la variable T représente les impôts diminués des transferts, dans
ce cas le revenu disponible (Y-T) incorpore l’impact négatif des impôts et l’impact positif des
transferts.

Le budget de l’Etat est déterminé par les impôts diminués des transferts (T) et les dépenses
publiques (G):

 Si G = T on dit que le budget de l’Etat est équilibré


 Si G > T on dit que l’Etat encourt un déficit budgétaire qu’il couvre en émettant des
obligations d’Etat
 Si G < T on dit que l’Etat réalise un excédent budgétaire qu’il peut utiliser pour
rembourser l’encours de sa dette et la réduire.
Nous supposons pour l’instant que les dépenses publiques et les impôts diminués des transferts
sont des variables exogènes, ce qui revient à écrire : G = G ̅ et T = T
̅

4- Les exportations nettes

En économie fermée, tous les biens et services produits par une économie sont vendus sur le
territoire national. Mais, en économie ouverte, la production se vend aussi bien sur le territoire
national que sur le territoire étranger. Un quatrième composant de la demande globale de biens
et services vient donc s’ajouté aux trois première : il s’agit des exportations nettes (X-M).

Les exportations nettes sont composées des acquisitions par le reste du monde de biens et
services produits sur le territoire national (dépenses d’exportations) et les acquisitions de biens
et services étrangers sur le territoire national (d’importations). Les importations faisant partie
des dépenses sur le territoire national (C+I+G), mais non de la production effectuée sur le
territoire national on les soustrait. Les exportations nettes sont égales aux exportations
diminuées des importations.

Chapitre 4 : LE MARCHE DU TRAVAIL


Le travail n’est pas un concept économique comme les autres parce qu’il est
porté par des hommes et des femmes et qu’on ne peut pas l’analyser de
32
manière mécanique. Les néo-classiques ont cependant voulu modéliser ce
marché du travail en fondant leur analyse sur les hypothèses de concurrence
pure et parfaite l’assimilant ainsi aux autres marchés (biens et services, finance,
monnaie...).
Mais la relation salariale est beaucoup plus complexe. Les hypothèses de
concurrence pure et parfaite sont loin d’y être la règle, et surtout, la relation
salariale a été institutionnalisée. Le fonctionnement du marché du travail est
encadré par des lois, les salaires sont fonction des relations professionnelles
entre partenaires sociaux et d’interventions de l’Etat.
Nous verrons d’abord l’analyse néo-classique du marché du travail, puis nous
démontrerons les limites de cette approche et l’institutionnalisation de la relation
salariale.
I - Le marché du travail et son fonctionnement:

1 - Lieu de rencontre de l'offre et de la demande de travail.

Le marché du travail est le lieu de rencontre de l’offre et de la demande du travail (un des
facteurs de production) et le lieu où se fixe le montant de la rémunération du travail (c'est-à-
dire son prix).

Si l’on parle du marché du travail en général, il en existe en réalité de nombreux selon le lieu,
le type de qualification, etc.
Comme sur le marché des biens et services, ou encore le marché des capitaux, Le marché de
travail est régit par la loi de l'offre et de la demande. Le point de rencontre entre l'offre et la
demande doit permettre en principe de représenter un équilibre et dégager le prix du travail,
c'est à dire le salaire.

2 - les notions liées au marché du travail.


L'analyse du marché du travail nécessite la compréhension et donc la distinction entre la notion
de travail et d'emploi.
En effet, deux notions s'entrecroisent: la notion d'emploi et la notion de travail.
On dit que les salariés sont des demandeurs d'emploi, alors que les entreprises sont des offreurs
d'emploi.
Si nous parlons de travail, alors les choses s'inversent puisque ce sont les travailleurs qui
deviennent offreurs de travail et les entreprises demandeurs de travail.
Le Schéma suivant illustre cette distinction:

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Acteurs Travail Emploi

Entreprises Demandent du travail Offrent de l'emploi

Salariés offrent du travail Demandent de l'emploi

3 - Fonctionnement du marché du travail


Le marché du travail est censé fonctionner comme les autres marchés. Le prix d'équilibre se
fixe normalement grâce à la rencontre de la courbe de l'offre et de la demande de travail. En
réalité le marché du travail a un fonctionnement spécifique car le niveau des salaires ne reflète
pas la réalité de l'offre et de la demande sur le marché du travail. Ainsi les salaires ne baissent
pas parce que la courbe de demande de travail est supérieure à l'offre. On dit à ce propos que le
salaire est rigide à la baisse. Certains théoriciens économiques y voient une cause du chômage.

En effet, le salaire d'équilibre reste une notion théorique.

Pour les économistes néoclassiques, si le marché du travail fonctionne librement (sans


intervention de l’Etat ou des syndicats), il permet l’équilibre entre l’offre (provenant des
travailleurs) et la demande (provenant des employeurs). Plus concrètement, si les salaires réels
peuvent baisser en cas d’excès d’offre de travail (de la part des travailleurs), les employeurs
augmenteront leur demande, les offreurs baisseront la leur et le chômage disparaîtra.

Le signal envoyé par cette baisse pousserait les employeurs à faire augmenter la demande de
travail et les offreurs qui le pourraient (ex: jeunes) retarderaient leur entrée sur le marché du
travail, faisant, ainsi, diminuer l’offre. Ce qui rétablirait l’équilibre et ferait disparaitre ce
chômage frictionnel.
Donc, pour ces néo-classiques, si le chômage persiste, il ne peut s’agir que de chômage
volontaire venant du fait que certains travailleurs refuseraient de travailler pour un salaire plus
faible, préférant ainsi l’inactivité.
Le travailleur va arbitrer entre le loisir et le travail en fonction du taux de salaire. Donc: L'offre
de travail des travailleurs est une fonction croissante des salaires réels. Plus les salaires
augmentent, p l u s l a population est prête à offrir son travail. Et inversement...
En Côte d’Ivoire comme en France la flexibilité des salaires en fonction de l'offre et de la
demande est théorique car les salaires sont réglementés : Il y a un salaire en deçà duquel on ne
peut pas descendre. C'est le SMIC : salaire minimum interprofessionnel de croissance.

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Le principe fondamental concernant la fixation du salaire c'est évidemment la liberté de
négociation, mais pour éviter l'inégalité dans le rapport de force entre employeurs et salariés on
a réglementé la fixation du salaire minimum.

Le niveau du salaire est fonction de plusieurs paramètres :

- Le niveau de qualification qui est lui-même en fonction du niveau d'étude et du diplôme


(classés par niveau).

- L'expérience détermine le niveau de salaire, il est souvent en fonction de l'ancienneté.


Selon les pays l'un ou l'autre des déterminants l'emporte : en Allemagne et en Angleterre c'est
l'expérience et en France c'est le diplôme.
Un autre déterminant est la capacité individuelle ou collective de négociation. Les qualifications
et le pouvoir des syndicats dans certains secteurs expliquent des variations de salaire d'un
secteur d'activité à l'autre. Certains ouvriers sont mieux payés que certains employés du
commerce et des services.

Des économistes keynésiens vont jusqu’à remettre en cause l’existence d’un marché du travail.
En effet, les variations du salaire à la baisse se traduisent par une baisse de la demande donc de
la production et finalement de l’embauche. Il n’existe pas de mécanisme régulateur du marché
du travail donc pas de marché du travail au sens plein du terme.

Il n’existe pas d’indicateur du marché du travail mais seulement des indicateurs de sa situation.
Ainsi, le taux de chômage (nombre de chômeurs/ nombre d’actifs) mesure le déséquilibre
existant entre offre et demande de travail. Un autre indicateur complémentaire est la durée du
chômage donnée en mois ou en années ; cet indicateur est très important car un taux de chômage
élevé mais avec une durée faible est sans doute moins problématique individuellement que à
l’inverse. Avec des frontières peu nettes entre emploi et chômage, l’importance des emplois
précaires est un indicateur là aussi complémentaire avec les précédents sur la situation du
marché du travail.

Pour les keynésiens, il n'y a pas de marché du travail car il y a une asymétrie de pouvoir entre
les offreurs et les demandeurs.
Ce sont ces derniers qui déterminent les salaires et non le marché. Donc le salaire n’est pas un
«prix de marché».
De plus le salaire étant un revenu pour les salariés (et pas seulement un coût), toute baisse de
salaire est nuisible à l'économie car la demande baissera et le chômage augmentera.
Quant au chômage, c’est un chômage involontaire. Il est dû à des anticipations pessimistes des
entrepreneurs (faiblesse de la demande,) qui provoquent une baisse de la production globale.

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Même si le salaire baissait de manière significative, les entrepreneurs n'embaucheront pas s’ils
n’anticipent pas une augmentation de la demande. Ce n'est donc pas la rigidité des salaires à la
baisse qui est responsable du chômage comme l'affirment les néo-libéraux mais au contraire le
fait qu'ils n'augmentent pas assez et donc que la consommation n'est pas assez forte pour que
les entrepreneurs modifient leurs prévisions. Il peut y avoir, alors, équilibre de sous-emploi.

II - Caractéristiques et évolution du marché du travail

1 - L'offre du travail est composée par la population active


Dans la réalité, il existe, en fait, plusieurs marchés du travail car il n’y a pas «homogénéité»
des offreurs ni des demandeurs de travail.
Il y a une segmentation du marché du travail entre:
➡ le marché primaire où le salaire peut être supérieur à celui du marché (présence syndicale,
salaire à l’ancienneté.)
➡ le marché secondaire, celui de la précarité ou l’offreur n’a pas de possibilité de discuter son
salaire.
On parle aussi de dualité du marché du travail.
Le marché primaire était la règle durant les 30 glorieuses. Depuis, le marché secondaire s’est
développé, et il s’intensifie actuellement avec la crise. La plupart des nouvelles embauches se
font sur le marché secondaire.
La population active est composée de toutes les personnes en âge de travailler qui occupent une
activité rémunérée ou qui sont à la recherche d'une activité rémunérée:

Population active = population qui travaille + chômeurs

Taux d'activité = nombre d'actifs sur population totale

Taux de chômage = Nombre de chômeurs sur population active

Taux d'activité féminine = femmes actives sur population totale

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2 - Les déterminants de l'offre du travail
Les déterminants individuels:

Ce qui détermine un individu à offrir sa force de travail, c'est le fait de pouvoir occuper un
travail avec une rémunération lui permettant de faire face à ses besoins socio-économiques. En
effet la décision de rentrer ou non sur le marché du travail est fonction de l'attractivité de la
rémunération. L'individu étant considéré comme un agent économique rationnel, va arbitrer
entre le travail et les loisirs. Pour opter pour le travail, il faut que la satisfaction apportée par le
travail soit au moins équivalente ou supérieur à la satisfaction apportée par les loisirs.

A côté des déterminants individuels de l'offre du travail on trouve des déterminants collectifs
tels que la démographie ou le solde migratoire.

- La démographie : en France on assiste à un accroissement naturel de la population en âge de


travailler, ainsi l'offre du travail est de plus en plus importante.

- Le solde migratoire : c'est un autre déterminant, il a contribué à l'accroissement de la


population active jusqu'en 1975. Depuis son influence s'est réduite.

3 - Les évolutions du marché du travail


Le marché du travail connaît des évolutions récentes assez marquées.

Alors que la norme pendant les 30 glorieuses était le travail à temps complet et souvent dans le
cadre d'un CDI. Aujourd'hui le marché est segmenté selon les types de contrat et selon la durée
du travail. Aujourd'hui à côté du CDI on assiste au développement rapide des contrats précaires
: CDD et contrats d'intérim.

On assiste également au développement du travail à temps partiel. Cette situation du marché de


l'emploi témoigne d'une situation de crise. Cette situation est appréciée plus ou moins car elle
permet une flexibilité du marché du travail permettant aux entreprises de gérer plus facilement
leurs effectifs et leurs coûts salariaux.

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Chapitre 5 : Rôle de la monnaie et financement de l’économie
La monnaie occupe une place prépondérante dans nos économies. Elle est en effet au cœur de
tous les mécanismes économiques, dans la mesure où les opérations d’achat et de vente
s’effectuent presque exclusivement en monnaie (le troc a pratiquement disparu dans nos
économies…). La monnaie est donc un sujet important pour l’analyse économique. Plusieurs
questions émergent immédiatement. A quoi sert la monnaie ? Qui est garant de la valeur de la
monnaie ? La quantité de monnaie en circulation a-t-elle des effets sur l’économie réelle ? Si
oui, ces effets sont-ils durables ? Nous allons voir que ces questions font l’objet d’un débat déjà
ancien entre économistes. Le rôle de la monnaie dans l’économie est bien loin de faire l’objet
d’un consensus entre économistes. C’est au contraire une ligne de fracture importante entre
économistes keynésiens et classiques. Nous allons donc, dans ce chapitre nous interroger sur
l’identité des agents qui créent de la monnaie et la manière dont le processus de création
monétaire fonctionne. Nous verrons ainsi le rôle du système bancaire dans ce processus puis
examinerons le processus de financement de l’économie. Les deux phénomènes sont en effet
intimement liés. Lorsque les banques commerciales accordent des crédits à des particuliers ou
des entreprises, elles augmentent la quantité de monnaie en circulation puisqu’elles accordent
des liquidités immédiates contre une promesse de remboursements futurs. Le système de
financement par le crédit peut donc s’avérer inflationniste s’il n’est pas contrôlé par une
autorité. Le système bancaire est ainsi hiérarchisé. Au-dessus des banques commerciales dont
l’un des objectifs est d’accorder des crédits et donc financer l’activité, se trouve la banque
centrale qui va être le garant de la valeur de la monnaie et lutter contre le phénomène d’inflation.
Ainsi, nous verrons les modalités d’intervention de la banque centrale et la façon dont elle peut
réguler la quantité de monnaie en circulation. L’octroi de crédit n’est cependant pas l’unique
moyen de financer l’économie. Les entreprises peuvent aller directement à la rencontre des
offreurs de capitaux sur les marchés financiers sans passer par l’intermédiaire des banques. Il
conviendra donc d’étudier le fonctionnement des marchés financiers et d’appréhender certaines
pratiques sur ceux-ci qui peuvent s’avérer dangereuses pour le système financier global et donc
également pour l’économie réelle.

I- Définition de la monnaie
Les définitions de la monnaie sont nombreuses. Elle peut être aussi considérée comme «
l’ensemble des moyens de paiement dont disposent les agents économiques pour régler leurs
transactions » ou comme « le bien d’échange généralement accepté par une communauté de

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paiement ». La première définition a le défaut de limiter l’utilisation de la monnaie à son rôle
dans les transactions, la seconde fait apparaître la notion de communauté de paiement (espace
géographique ou zone monétaire comme l’UEMOA) mais précise peu le rôle spécifique de la
monnaie. En fait, la monnaie se définit au regard des trois grandes fonctions qu’elle remplit
dans l’économie : (i) la fonction d’intermédiaires des échanges, (ii) la fonction d’unité de
compte et (iii) la fonction de réserve de valeur.

1- La fonction d’intermédiaire des échanges de la monnaie

Les transactions se sont multipliées dans l’économie à mesure que la division du travail s’est
développée. Les pratiques de troc se sont alors montrées insuffisantes et l’utilité d’un instrument
qui pouvait servir d’intermédiaire entre les échanges est apparue. L’économie de troc requiert
en effet que les besoins des agents se correspondent exactement, c'est-à-dire qu’il existe une
double coïncidence des besoins, ce qui est rare ou nécessite des coûts de recherche (et donc une
perte de temps) importants. Par ailleurs pour qu’un troc entre deux marchandises se réalise, il
convient que les besoins des deux protagonistes se correspondent quantitativement, et cela en
intégrant les valeurs respectives. L’indivisibilité de certains biens peut donc aboutir à ce que ne
se réalisent pas certains échanges. Pour toutes ces raisons, le développement de l’économie a
nécessité la mise en place de monnaies.

2- La fonction d’unité de compte

En l’absence de monnaie dans une économie, la valeur d’un bien quelconque échangé dans
cette économie doit s’exprimer en fonction de la valeur de tous les autres biens susceptibles de
faire l’objet d’un échange avec lui. La valeur d’un bien est donc relative dans une économie
sans monnaie. L’introduction de la monnaie permet d’exprimer la valeur absolue de chaque
bien dans une seule unité et il en résulte une grande simplification du système de prix (dans une
économie à n biens sans monnaie, il existe n(n-1)/2 prix relatifs alors que le nombre de prix
relatifs dans une économie à n biens comprenant la monnaie est n-1).

3- La fonction de réserve de valeur

La monnaie est un actif particulier du patrimoine des agents. La monnaie détenue par un agent
représente en effet le pouvoir d’achat dont il dispose. La monnaie a donc l’avantage de
permettre le stockage dans le temps du pouvoir d’achat. Elle constitue un lien entre le présent
et le futur puisqu’elle conserve au pouvoir d’achat toute sa valeur, si on fait, en première
approximation, l’hypothèse qu’il n’existe pas d’inflation. Si les deux premières fonctions de la

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monnaie (intermédiaires des échanges et unité de compte) ont fait l’objet d’une reconnaissance
de la part de l’ensemble des économistes, les économistes classiques ont souvent négligé le rôle
de réserve de valeur de la monnaie.

Une fois admis le rôle essentiel de la monnaie dans l’économie et déterminé ses principales
fonctions, nous allons pouvoir nous interroger sur plusieurs points concernant la monnaie. En
fonction de leurs besoins économiques, les agents vont demander plus ou moins de monnaie
pour réaliser leurs transactions. Nous allons donc examiner les ressorts de la demande de
monnaie et les conséquences de la quantité de monnaie en circulation sur l’économie réelle
(c'est-à-dire le monde de la production et de la consommation de biens et services). Les
économistes ne sont pas unanimes sur ce point et les conclusions généralement admises sur
celui-ci ont évolué au cours des périodes

II- La demande d’encaisses monétaires


Les auteurs classiques et les auteurs néo-classiques croient en la neutralité de la monnaie, et
donc postulent l’existence d’une déconnection entre les phénomènes réels et monétaires. L’une
des grandes nouveautés de l’analyse keynésienne fût de remettre en cause cette dichotomie
entre sphère réelle et sphère monétaire en décrivant plus précisément les motifs de demande
d’encaisses monétaires de la part des agents et en introduisant des arguments expliquant
l’instabilité de la demande de monnaie. Friedman, chef de file des monétaristes, poursuivant la
logique des classiques aboutit à des conclusions en opposition avec celles de Keynes. L’aspect
dichotomique ou non des sphères monétaires et réelles conditionnent en effet l’efficacité et
donc l’utilisation de la politique monétaire à des fins de relance ou de réglage de la conjoncture.

1- La monnaie est neutre pour les auteurs « classiques »

Pour les économistes classiques la monnaie ne remplit que les fonctions d’intermédiaires des
échanges et d’unité de compte (la monnaie n’est qu’un « voile » permettant d’exprimer des prix
absolus puisque les biens s’échangent contre des biens sur la base de leur valeur travail, voir
les des courants de pensée). La fonction de réserve de valeur n’est pas reconnue. Cette
conclusion est à l’origine de la « loi des débouchés de J.-B. Say ». « L’offre crée sa propre
demande » uniquement si la monnaie n’est pas désirée pour elle-même et ne peut être conservée
(la thésaurisation monétaire ne doit pas exister). Dans ce cas, l’ensemble des revenus issus de
la production d’un bien quelconque est distribué sous forme de salaires ou de dividendes et sert
soit à la consommation d’autres biens soit à l’épargne (qui donne lieu à des investissements et
à l’achat de biens d’équipement). Sans fuite dans ce système, tout revenu distribué est

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automatiquement consommé ou investi. Il en résulte que toute production trouve toujours en
face d’elle une demande équivalente. Il n’y a jamais de crise de surproduction. La neutralité de
la monnaie chez les auteurs classiques trouve son aboutissement dans l’expression de l’équation
quantitative de la monnaie : M×V = P ×T

Avec M la masse monétaire en circulation, V la vitesse de circulation de la monnaie (combien


de fois une même unité monétaire est utilisée dans l’intervalle de temps considéré), P le niveau
général des prix et T le volume de transactions. D’après cette relation, une augmentation de la
quantité de monnaie en circulation aboutit à une hausse du niveau général des prix équivalente,
pour peu qu’on considère le volume de transactions inchangé et la vitesse de circulation de la
monnaie constante (ce qui est le cas à long terme (travaux de M. Friedman) mais pas à court
terme).

2- La monnaie est « active » pour Keynes

Rompant avec l’analyse classique, qui ne considérait que deux des trois fonctions de la monnaie
(intermédiaire des échanges, unité de compte, mais pas la fonction réserve de valeur), Keynes
réintroduit un motif de demande de monnaie qui traduit la préférence pour la liquidité des
agents. Le niveau élevé des taux d’intérêts peut expliquer le renoncement des agents à la
détention de monnaie. Le raisonnement de Keynes s’appuie sur l’arbitrage que les agents
effectuent entre détention de liquidités et détention d’actifs de type obligataire (titres à revenus
fixe).

Pour Keynes, les agents ont une préférence pour la liquidité. Ils peuvent désirer la monnaie pour
elle-même, et pas simplement pour la possibilité qu’elle offre de réaliser des transactions.
Keynes va insister sur les conséquences de la fonction de réserve de valeur de la monnaie. Pour
Keynes, il existe trois motifs de détention d’encaisses monétaires : (i) le motif de transaction,
(ii) le motif de précaution et (iii) le motif de spéculation. Les agents désirent des encaisses
monétaires pour réaliser leurs achats. La demande de monnaie pour motif de transaction sera
donc croissante avec le niveau de production de l’économie. Les agents peuvent également
vouloir détenir des encaisses pour faire face à des risques. Cette demande est plus ou moins
forte selon le revenu et la possibilité de recours au crédit des agents. Si le motif de transaction
est proche du rôle traditionnel de la monnaie comme intermédiaire des échanges, le motif de
précaution s’éloigne déjà un peu de la perception traditionnelle du rôle de la monnaie par les
classiques. Mais le véritable apport de Keynes est l’introduction d’une demande de monnaie
pour motif de spéculation. Pour Keynes, les agents qui ont une préférence pour la liquidité

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peuvent accepter de renoncer à la détention de monnaie pour réaliser des placements dans des
titres à revenus fixes (titres sans risque de type placement obligataire). Le volume de la demande
d’encaisses pour motif de spéculation va donc dépendre directement du taux d’intérêt qui
rémunère ces titres (le taux d’intérêt est le prix du renoncement à la liquidité). La valeur des
titres à revenus fixes de type obligataire évolue inversement avec la valeur du taux d’intérêt.
Les agents achètent donc des titres lorsque les taux d’intérêt sont élevés (la valeur des titres est
faible) avec pour but de les céder lorsque les taux baisseront (hausse de la valeur et donc gain
en plus-value). La demande d’encaisses monétaires dépend donc en partie du niveau des taux
d’intérêt. La demande de monnaie pour motif de spéculation tend à s’accroître quand les taux
d’intérêt sont à la baisse et à faiblir quand les taux d’intérêt sont à la hausse. Les conséquences
de la mise en exergue d’une demande de monnaie pour motif de spéculation par Keynes sont
importantes. La notion de monnaie oisive (thésaurisation) apparaît. Lorsque les taux d’intérêt
sont élevés, les agents détiennent de la monnaie dont ils ne font aucune utilité, car ils attendent
la baisse des taux d’intérêt pour investir dans des titres à revenus fixes. La monnaie remplit
donc bien une fonction de réserve de valeur et la loi des débouchés n’est plus valide. L’analyse
keynésienne remet donc en cause la dichotomie sphère réelle / sphère monétaire au cœur de
l’analyse classique. Comme par ailleurs, la demande de monnaie des agents dépend en partie
du niveau des taux d’intérêts (qui sont relativement volatiles), la demande de monnaie est
instable. En face, l’offre de monnaie de la part de la Banque centrale se doit de prendre en
compte cet état de fait et s’ajuster au mieux. Cette conclusion a donc des conséquences
importantes en matière de préconisation de politique monétaire puisqu’elle justifie les
politiques monétaires actives et discrétionnaires.

III-Le processus de financement de l’économie


Les agents, qu’ils soient consommateurs ou entrepreneurs, doivent se procurer des ressources
pour financer leur activité économique, la consommation ou l’investissement. Lorsque ces
agents ne disposent pas d’une épargne suffisante pour leur activité, ils doivent avoir recours au
crédit bancaire.
Si les agents sont des entreprises, ils peuvent également avoir recours aux marchés financiers
pour trouver les ressources nécessaires à leur activité.
Nous avons vu que l’économie est la science qui étudie la rareté. L’étude du mode de
financement d’une économie participe à cette entreprise car les ressources sont bien souvent en
quantités insuffisantes pour satisfaire l’ensemble des besoins de tous les agents (l’épargne
disponible peut être insuffisante au niveau macroéconomique).

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Le financement par le crédit est un premier mode de financement. Les ressources empruntées
favorisent la croissance (augmentation de la demande lorsque les ressources empruntées sont
utilisées à des fins de consommation, amélioration des capacités de production lorsque les
ressources empruntées sont utilisées à des fins d’investissement). La croissance des revenus va
permettre le remboursement des crédits souscrits par les agents. Le système de financement de
l’économie par le crédit fonctionne donc lorsque la croissance est régulière. En cas de
ralentissement de la croissance, les revenus ne sont plus suffisants pour rembourser les dettes
contractées. Les agents doivent s’endetter de nouveau pour rembourser leurs dettes. Ce cercle
vicieux mène au surendettement. A l’écueil du surendettement, s’ajoute un autre risque majeur
d’un système de financement de l’économie principalement basé sur le crédit bancaire. La
création monétaire qui découle des crédits octroyés par les banques a des conséquences
inflationnistes.
Le financement par le marché des capitaux n’induit pas ce dysfonctionnement. Puisque les
offreurs et les demandeurs de capitaux se rencontrent directement sur un marché, l’épargne
disponible finance les investissements sans risque inflationniste. Cependant, le financement par
les marchés financiers peut également présenter un dysfonctionnement majeur. La présence
d’une épargne suffisante ne garantit pas que les entreprises investissent. Les ressources
disponibles peuvent se diriger vers les marchés financiers sans finalité d’investissement
productif. L’afflux d’épargne, et la demande de capitaux qui l’accompagne, rendent encore plus
attractifs les placements boursiers puisqu’ils font grimper le cours des titres. De ce phénomène
cumulatif peut émerger une bulle spéculative, c'est à dire une progression des marchés
financiers sans lien avec l’économie réelle (déconnection sphère réelle / sphère financière).

Ces deux formes de financement engendrent deux types d’économie : (i) l’économie
d’endettement et (ii) l’économie de marchés financiers.
Dans une économie d’endettement, il est fait largement appel au crédit bancaire. Dans une
économie de marchés financiers, les agents dégagent des capacités de financement suffisantes.
La rencontre entre l’épargne et les besoins de financement s’effectue directement sur le marché
financier.
Dans une économie d’endettement, le financement passe principalement par les banques qui
servent d’intermédiaires entre les agents. Il y a intermédiation bancaire. Accorder un crédit
nécessite en effet d’avoir des garanties quant à la capacité de remboursement de l’emprunteur.
Les épargnants ne disposent pas des informations suffisantes pour avoir cette garantie car il
existe une asymétrie d’information (puisque l’emprunteur a une idée assez précise de sa
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capacité de remboursement alors que le prêteur est soit totalement ignorant soit n’a qu’une idée
imprécise de celle-ci). L’intermédiation bancaire présente l’avantage de résoudre ce problème
d’asymétrie d’information puisque les banques exigent des emprunteurs qu’ils fournissent des
éléments d’appréciation sur les projets à financer et sur leur capacité à rembourser.
Dans une économie de marchés financiers, la rencontre entre l’épargne et les besoins de
financement s’effectue directement sur le marché financier. Il y a désintermédiation.
Le financement d’une économie n’est bien sûr jamais réalisé exclusivement par l’un ou l’autre
des systèmes.
On constate cependant pour tel ou tel pays une prépondérance du financement par l’endettement
alors que pour d’autres, le passage par les marchés est privilégié.
Le taux d’intermédiation représente la part prise par les institutions financières résidentes
(établissements de crédit, OPCVM, sociétés d’assurance) dans l’enveloppe globale des
financements accordés aux agents résidents non financiers. Lorsqu’on ne tient compte que des
crédits distribués par ces institutions, on parle d’un taux d’intermédiation au sens étroit. Lorsque
les placements de ces institutions en titres émis par les agents non financiers (actions,
obligations, titres de créances négociables) sont également pris en compte, il s’agit d’un taux
d’intermédiation au sens large. Le taux d’intermédiation au sens étroit est donc un indicateur,
égal au total des crédits auprès des établissements de crédits sur l’ensemble des financements
au bénéfice des agents non financiers qui permet de déterminer le degré d’intermédiation et
donc la prépondérance ou non de l’économie d’endettement.

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BIBLOGRAPHIE

Abraham-Frois Gilbert (1992), Economie politique. 5è édition, Economica.

Béraud Alain (1999), Introduction à l’analyse économique. 4è édition, Economica.

Durnbusch Rudiger et Fischer Stanley (1988), Macroeconomics. 2nd Edition Mc Graw

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Ott J. David, Ott F. Attiat et Yoo H. Jang (1975), Macroeconomic Theory. Economics

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Samuelson A. Paul et Nordhaus (2000), Economie. Economica, 6è édition.

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