9782908816631
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D E M E U R E S
D ' A Z U R
N I C E
D i d i e r GAYRAUD
Avertissement de l'éditeur :
M a l g r é d e s r e c h e r c h e s m i n u t i e u s e s , t a n t c h e z les
c a r t o p h i l e s q u e d a n s les collections privées, il n ' a p a s
t o u j o u r s été p o s s i b l e de r e t r o u v e r , p o u r c h a c u n e d e s
d e m e u r e s p r é s e n t é e s d a n s cet ouvrage, d e s d o c u m e n t s
d ' é p o q u e d ' u n e qualité parfaite. C e r t a i n e s r e p r o d u c t i o n s
p e u v e n t s e m b l e r d ' u n e netteté moyenne, m a i s leur p r é s e n c e
d a n s cet ouvrage est i n d i s p e n s a b l e p o u r l e u r v a l e u r
d o c u m e n t a i r e exceptionnelle.
P a r ailleurs, n o u s avons volontairement écarté les photo-
g r a p h i e s c o n t e m p o r a i n e s , d ' u n e p a r t p o u r g a r d e r à cet
ouvrage son caractère a u t h e n t i q u e m e n t historique, et d'autre
p a r t afin de préserver l'intimité de ces propriétés et de leurs
h a b i t a n t s a c t u e l s . Il p a r a î t i n u t i l e de p r é c i s e r q u e les
a d r e s s e s s o n t indiquées u n i q u e m e n t à titre d o c u m e n t a i r e ;
mis à p a r t quelques édifices publics, ces d e m e u r e s n e se
visitent pas.
En couverture :
Le port d e Nice et la Baie d e s A n g e s , vus d e p u i s le b a l c o n d ' u n e belle villa niçoise.
Cliché J e a n - L o u i s MARTINETTI, p h o t o g r a p h e rue d e la Préfecture, Nice.
En vignette, la villa M a s s é n a a u d é b u t du siècle.
P h o t o Editions GILLETTA - Nice
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PREFACE
Voici un livre magnifique qui nous propose de découvrir des maisons d'exception représentatives
de la riche créativité de leurs hôtes aux destinées incomparables. Elles apparaissent au milieu du
19ème siècle dans une région dont les frontières sont mal délimitées. Sous l'Ancien Régime, cette
partie de Provence s'appellait une marche : sans doute une des plus pauvres ! Que s'était-il passé
pour qu'elle devienne aujourd'hui une des plus prospères ? Un bref retour dans le passé nous
éclaire et les faits sont troublants...
Au 16ème siècle, lorsque le jeune Charles VI et Catherine de Médicisfont «le tour de France»,
nous suivons avec intérêt le cortège royal. Après sa visite à Marseille, il s'arrête à Brignoles et
fait demi-tour pour aller à Saint Gilles en passant par Salon de Provence où la Reine mère
est reçue par Nostradamus. Toulon, Draguignan, Fréjus, Castellane et Grasse ne valent pas le
temps d'une visite royale ! Les montagnes arides, les cols les plus inaccessibles des Alpes, les
landes à moutons entrecoupées de gorges profondes et la côte, habités par des populations vivant
en autarcie, détournent l'intérêt du Roi dont l'un des apanages est pourtant le marquisat de Saluzzo.
Plus tard, Vauban fortifie Glandèves -devenu Entrevaux- dont l'intérêt stratégique est évident
contre les piémontais ! Pour les mêmes raisons, Antibes et le «port Vauban» auront une vocation
militaire jusqu'au 19ème siècle. Et Nice, mal à l'aise entre Gênes et Marseille, semble périr
d'ennui. Le comté bascule du côté français à la Révolution et à la Restauration se fait de nouveau
piémontais. Finalement il se rallie à l'Empire en 1860.
Par ailleurs, si les diverses campagnes d'Italie des Rois de France et des Empereurs favorisent
de nombreux passages, personne, de François Ier au Premier Consul, ne songe à devenir un
estivant et encore moins un résident de la Côte.
La plupart des familles régionales embrassent la carrière des armes. C'est une preuve de
simplicité sinon de pauvreté. Elles servent dans la Royale ou dans les armées de l'Indépendance
Américaine, de la Révolution et de l'Empire. Suffren, de Grasse, Villeneuve, Sabran, Masséna et
Mougins Roquefort sont aux avant-postes des victoires et des défaites : à Yorktown, aux Pyramides,
à la Moskova et aux Indes. Certains, au service des arts et des lettres, ne peuvent résister à
l'attrait de Versailles et de Paris. On pense à Fragonard, à Mirabeau, à Sade et tant d'autres...
Jusqu'en 1834, ce futur département de la République, aujourd'hui au sommet du tourisme
européen, n 'est pas un lieu de résidence et de villégiature.
Et puis, un jour de 1835, Lord Brougham arrive à Cannes. Le «High chancellor» d'Angleterre
et ses amis éblouis achètent des terrains sur la Côte. C'est le début d'un véritable miracle : celui
de la construction de résidences de plus en plus belles, sans que cela semble s'arrêter, même à
l'heure où ce livre vient d'être mis sous presse. A partir de 1850, Nice et son littoral sont envahis
par des bâtisseurs de maisons étonnantes dans lesquelles tous les grands de ce monde se précipitent
quelques mois par an. C'est à l'image d'une myriade d'étoiles tombées du ciel que l'on voit s'ériger
des villas vénitiennes, palladiennes ou florentines, des châteaux gothiques «early victorian»,
hispano-mauresques ou anglo-italiens. Tous les styles et toutes les époques sont représentés.
Saluons les anglais qui ont su choisir les plus beaux sites ! Admirons les grands ducs russes qui
apportèrent leur créativité et leur charme slave ! Applaudissons les américains avec le chic Scott
Fitzgerald des années vingt et le glamour hollywoodien des années cinquante ! Etonnons-nous
des villas contemporaines des acteurs et artistes du cinéma et du «show business» ! Sourions
devant ces palais arabes, financés par les «pétrodollars», qui fleurissent et foisonnent en frisant
le sublime et parfois le grotesque ! Remercions enfin, sans détour, ces bâtisseurs privés et
passionnés qui ontfait la gloire et le renom de cette côte devenue azuréenne pour le monde entier.
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Didier Gayraud pensait à l'un d'eux lorsqu'il m'offrit de préfacer son livre. En effet, mon aïeul,
le comte Aldebert de Chambrun, avait organisé, à la demande de l'Empereur, le rattachement du
comté de Nice à l'Empire. Fondateur du Musée Social et de la Mutualité Sociale Agricole, il acheta
en 1876 au comte de Pierlas, ce qui allait devenir le château et le parc de Chambrun à Nice. Il
avait assuré la réussite des Cristalleries de Baccarat grâce notamment à un séjour à Saint
Petersbourg, à l'ambassade de France où la petite histoire anecdotique suivante s'est déroulée !
«Au cours d'un grand dîner à l'ambassade, il aurait bu dans une coupe de cristal, à la santé du
Tzar, et, à la manière russe, il l'aurait lancée p a r dessus l'épaule gauche comme s'il s'agissait d'un
gobelet d'étain ou d'argent. Moment de stupeur ! Le son du cristal brisé en éclats et la gracieuse
désinvolture du geste devant le tzaréwitch éblouirent les convives ! Adopté aussitôt comme un
geste d'élégance, dans les grandes familles, des trains entier de Baccarat s'acheminèrent
régulièrement en Russie jusqu'en 1915».
Aujourd'hui, parmi les derniers témoins de cette époque, il reste le «Temple d'Amour» du parc
Chambrun, bien connu des niçois.
Avec un siècle d'écart, et précisément en 1976, j'avais repris le château de Garibondy à Canne s-
Le Cannet : touchante coïncidence qui me vaut l'honneur d'écrire cette préface ! Pour ma part, il
fallait remettre en état une maison et un parc anglais qui avaient souffert d'être délaissés. Je
n'étais pas vraiment un bâtisseur mais un restaurateur. Mais bâtir ou restaurer font partie de la
même veine : celle de l'effort constant pour maintenir la nef de ces grandes maisons ajourées que
la lumière traverse au milieu de leurs jardins d'exception. Ne pas s'y soumettre aboutit très
rapidement «à la mise à mort» p a r la pelle mécanique du promoteur «destructeur» ou p a r le
morcellement de la copropriété. Combien d'entre elles ont disparu ? Hélas, beaucoup plus qu'il ne
faudrait l'avouer.
En cette fin de siècle, que va-t-il nous rester alors que nous bâtissons de plus en plus de maisons
loties sur le vide sanitaire avec les parpaings de rigueur, dans un «style provençal» qui n'a jamais
existé en Provence ? La nuit sans étoiles ? Pas tout à fait ! Pour notre bonheur, il existe encore
quelques unes de ces maisons et, heureusement, ce livre a le mérite de nous les faire admirer à côté
de celles qui ne sont plus. Les maisons survivantes, parfois intactes, subissent le siège de la modernité
un peu à la façon du village d'Astérix dans une Gaule conquise p a r Rome. Ces demeures sont
fières comme si elles étaient conscientes de leur utilité. Elles font vivre en effet de nombreux corps
de métiers et des artisans : les menuisiers, les ébénistes et les charpentiers, les peintres décorateurs
et les tapissiers, les maçons et les carreleurs, bref tout un ensemble de façonniers qui ne doivent
pas disparaître au nom de la standardisation.
Il faut rendre hommage à l'auteur de ce livre d'avoir eu la patience de rechercher dans les
archives et dans la mémoire de ceux qui ont la connaissance, des documents et des détails parfois
anecdotiques.
«Je suis un ver de terre amoureux d'une étoile» s'exclame Ruy Blas à genoux devant la belle
reine d'Espagne ! Ne le sommes-nous pas aussi, quelque part en nous-même, en regardant certaines
de ces demeures ? Ce livre nous permet d'en prendre conscience.
Avant de conclure, alors que je viens de quitter Garibondy après un cycle de vingt ans de
restauration, je souhaite remercier tous les amis qui m'ont aidé dans le cheminement de l'entretien
d'une grande maison sur la Côte. Je pense aussi à ceux qui sont partis : à Antony Norman du
Château de la Garoupe qui m'a si bien conseillé dans le jardin, à François, comte de Blanchetti de
Châteauneuf à Gairaut, à Raymond Bourgis de «Vieilles Maisons Françaises».
Avec tous les futurs et nombreux admirateurs de cette oeuvre, j'adresse mes félicitations et
remerciements à Didier Gayraud. Ce livre est une anthologie du patrimoine de la Côte d'Azur,
notre patrimoine. Il était indispensable !
INTRODUCTION
En 1860, le rattachement du Comté de Nice à la France fit plantant palmiers, cyprès et pins maritimes, aménageant selon
sortir toute une région de sa léthargie économique et culturelle. le goût de leurs commanditaires jardins anglais, espagnols ou
Plusieurs facteurs y contribuèrent. D'une part, l'arrivée du à la française. A leur suite, une escouade de jardiniers était
chemin de fer qui atteignit Nice dès 1864, d'autre part la chargée d'entretenir les topiaires, les massifs de fleurs ou encore
construction de nouvelles voies de communications terrestres les quelques végétaux exotiques amenés à grands frais du bout
qui favorisèrent dans de larges mesures le déplacement des du monde et acclimatés sur place.
personnes et la circulation des marchandises. Le style de prédilection choisi par les architectes de la Belle
Faussement réputé pour guérir les maladies pulmonaires, Epoque pour bâtir les grandes villas bourgeoises de Nice fut le
le climat azuréen incita quelques français mais surtout de riches style composite ou éclectique, c'est-à-dire combinant par un
étrangers, à venir s'installer sur nos côtes pour tenter de mélange savamment dosé et ordonnancé par l'artiste, les grands
recouvrer la santé. Malgré l'inefficacité curative de leurs styles architecturaux, principalement le néoclassique, le
séjours, aristocrates anglais, russes, allemands, austro-hongrois gothique et le Renaissance. L'influence italienne restait
ou polonais, séduits par la beauté du site et les conditions cependant très présente avec des constructions palladiennes,
atmosphériques particulièrement favorables, prirent néanmoins florentines ou vénitiennes. A cette pluralité stylistique, vinrent
l'habitude d'y passer l'hiver. encore s'ajouter des pastiches de châteaux médiévaux de style
troubadour (château de la Tour des Baumettes, château de
Parmi ces étrangers, un certain nombre décidèrent de résider
Crémat), quelques curiosités d'inspiration mauresques
dans les quelques grands hôtels de la ville encore très rares à la
fin du XIXème siècle, d'autres, en revanche, choisirent de se (Ibrahim, Baie des Anges), ou plus nettement orientales,
comprenant des références indiennes ou chinoises très
fixer de façon plus définitive en se faisant édifier une villa
marquées (château du Mont Boron, villa Indochinoise).
dont le prix de revient était relativement peu élevé compte tenu
d'une main-d'oeuvre transalpine bon marché et d'un coût Un fois terminées, ces bâtisses étaient traditionnellement
encore très bas des terrains à bâtir. dotées d'une dénomination qui, à la fin du siècle dernier du
moins, trahissait un cruel manque d'imagination de la part de
C'est ainsi qu'à Nice, plusieurs milliers de villas, allant de
leurs propriétaires qui les baptisaient généralement de leur
la demeure bourgeoise au château d'une quarantaine de pièces,
patronyme (Masséna, Cabasse, Raffaëlli) ou du prénom d'un
s'élevèrent à une cadence impressionnante, essentiellement à
membre de la famille (Marie-Claude, Marthe). Parfois elles
partir de 1875-1880, avec une apogée entre 1910 et 1913. Du
recevaient le nom d ' u n saint p r o t e c t e u r (St.Antoine,
reste, la multiplication des architectes dans la cité est
St.Christophe) ou encore plus simplement d'un végétal local
significative. Issus de la région ou venus de l'extérieur pour
(les Palmiers, les Violettes, Réséda). Rares en tout cas furent les
s'y établir, leur nombre ne fit que croître dès la fin du XIXème
siècle. On en recensait en effet 16 en 1866, 51 en 1883, 91 en propriétaires qui tentèrent de personnaliser véritablement leur
demeure en lui attribuant une appellation originale comportant
1900 et 126 en 1910. Outre le fait que ce mouvement de
construction bénéficiait à ces véritables artistes dont la clientèle par exemple une référence historique ou mythologique précise
(Torre di Cimella, Minerve), ou bien relative à une oeuvre
fortunée leur offrait l'opportunité d'exprimer librement leur
littéraire ou musicale (le Lys rouge, l'Africaine).
talent et leur imagination sans réelles contraintes financières,
il permettait à une multitude d'entrepreneurs et de corps de Les grandes résidences aristocratiques constituaient aussi
métier liés au bâtiment, de prospérer rapidement. le lieu idéal de réunion du «gotha» azuréen. Dans leurs salons
luxueux se déroulaient soirées mondaines, tableaux vivants ou
Située face à la mer et peu éloignée du centre, la Promenade
bals masqués en période de carnaval. Il y avait d'ailleurs à
des Anglais fut tout d'abord le lieu privilégié d'implantation
cette époque de l'année pléthore de réceptions et il convenait,
des premières villas de Nice, mais l'exiguïté des terrains
afin de ménager toutes les susceptibilités, de choisir avec soin
resserrés entre le bord de mer et la rue de France, fit que bientôt,
ceux que l'on honorait de sa visite.
les hivernants désireux d'aménager de grands parcs autour de
leurs résidences, portèrent leur choix vers l'ouest dans les Dès 1900, de nombreux hivernants firent photographier leur
quartiers de Fabron et des Baumettes, puis vers l'est au Lazaret villa et en tirèrent des cartes postales. Parfois, les propriétaires
et sur les pentes du Mont Boron où de vastes espaces à bâtir figuraient sur le cliché, seuls ou entourés de leur domesticité
admirablement situés étaient disponibles. A compter de 1884, ou bien encore posaient fièrement devant leur automobile en
l'ouverture du boulevard de Cimiez et de rues adjacentes compagnie de leur chauffeur en livrée. Lors d'échanges
entraîna une véritable flambée de la construction dans ce secteur épistolaires, ces rectangles de carton devenaient alors un moyen
et par répercussion sur les quartiers périphériques de St.Maurice élégant de lancer des invitations tout en renseignant habilement
et St.Barthélémy, jusqu'alors seulement occupés par des le correspondant sur son rang et sa fortune.
propriétés rurales de grandeur variable.
Aujourd'hui aussi précieux qu'indispensables à l'étude
Selon leur importance et leur lieu d'implantation, les villas architecturale, historique et sociologique d'une cité comme
de villégiature étaient entourées de parcs dont la superficie Nice, ces documents offrent l'incomparable intérêt de présenter
variait d'un millier de mètres carrés à plusieurs hectares. Les les grandes demeures niçoises dans l'état où elles se trouvaient
plus grands architectes-paysagistes parmi lesquels Edouard au moment de leur splendeur et, par le fait, de restituer un peu
André et Octave Godard, y créèrent de grandioses réalisations, de leur âme.
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Villa M a s s é n a
NICE
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MASSENA
(35, Promenade des Anglais)
LA VICTORINE
(16, avenue Edouard Grinda)
Parallèlement à sa villa de la Promenade des Anglais, Victor Au bout de quelques années d'exploitation, Sandberg ne
Masséna avait demandé à Aaron Messiah de lui édifier un put malheureusement faire face aux frais qu'il avait engagés
pavillon de campagne dans le quartier de Carras. Entouré d'un et vendit ses installations au producteur-réalisateur américain
terrain de 7 hectares aménagé en exploitation horticole, il fut Rex Ingram qui y tourna plusieurs dizaines de films et habita
baptisé La Victorine en référence au prénom de son propriétaire. épisodiquement la villa.
Complanté d'une grande diversité d'arbres et de fleurs, le
Par la suite, les studios changèrent maintes fois de mains.
domaine permettait à Victor Masséna de prélever à sa guise
Des téléfilms et films publicitaires s'y tournent encore
toutes sortes de végétaux qu'il replantait ensuite dans le parc
aujourd'hui mais les réalisateurs préférant désormais tourner
de la villa Masséna, dessiné à l'origine par Edouard André, et
en décor naturel, l'avenir des studios reste bien incertain. Quoi
de faire accessoirement le commerce des plantes.
qu'il en soit, les grandioses projets d'investissement et de
Vendu peu de temps après la villa Masséna, le pavillon de restructuration annoncés dans les années 1980 visant à faire
Carras fut acquis vers 1920 par le producteur de cinéma Serge des Studios de la Victorine le «Hollywood français» semblent
Sandberg. Il y entreprit la construction de vastes hangars et pour l'heure assez peu réalistes.
créa les célèbres studios cinématographiques de la Victorine.
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FURTADO HEINE
(61, Promenade des Anglais)
Bâtie vers 1787 pour le compte de Lady Penelope NICE Villa F u r t a d o - H e i n e (1895)
DE ORESTIS
Bâtie au XVIIIème siècle par une vieille famille niçoise, orthodoxe de la rue Longchamp, édifiée essentiellement grâce
les De Orestis, dont l'un des membres, Jean-François, fut maire aux dons de la colonie russe de Nice. Malheureusement, en ce
de Nice de 1808 à 1812, la villa De Orestis est surtout connue jour du 12 janvier 1860 (1er janvier du calendrier orthodoxe),
pour avoir abrité à plusieurs reprises une partie de la famille son état de santé ne lui permit pas de se rendre à la cérémonie
impériale russe. qui ne comptait pas moins de 40 invités. Le lendemain
cependant, l'impératrice donna dans les salons de sa villa une
Ainsi, en janvier 1857, la demeure fut louée par le grand-
grande réception qui réunit plus de 150 personnes. D'autres
duc Michel qui, après avoir débarqué à Villefranche se rendit
fêtes se déroulèrent pendant son séjour car, malgré sa santé
chez sa mère l'impératrice douairière Alexandra Féodorovna
précaire, elle aimait organiser des soirées musicales au cours
veuve du tzar Nicolas 1er. Celle-ci séjournait à Nice depuis
desquelles la Garde Nationale ou bien encore des orchestres
trois mois dans une autre grande maison de la Promenade des
locaux donnaient des concerts dans le salon Louis XV ou dans
Anglais, la villa Avigdor, propriété du banquier attitré de la
le parc illuminé de la propriété. Le j o u r de la fête de
colonie russe de Nice : Abraham Avigdor. Rappelons qu'à cette
l'impératrice, la frégate Olaff quitta son mouillage de
époque, la villa De Orestis appartenait à la comtesse du même
Villefranche et vint s'installer dans la Baie des Anges. Là, face
nom, née Tihatcheff, et que le choix du lieu de villégiature du
à la demeure impériale, l'équipage du navire tira plusieurs
grand-duc Michel n'était certainement pas dû au hasard.
dizaines de coups de canon pour saluer la souveraine qui dans
En octobre 1858, peu de temps après la création d'une base la soirée, donna un grand dîner clôturé par un gigantesque feu
maritime russe dans les locaux de l ' a n c i e n bagne de d'artifice.
Villefranche, c'est la grande duchesse Catherine (fille de la
grande duchesse Hélène), et son mari le duc de Mecklembourg- En mai 1860, Alexandra Féodorovna termina son long séjour
Strelitz, qui s'installèrent pour plusieurs mois dans la demeure niçois de sept mois. Après avoir effectué divers dons au bénéfice
où ils reçurent la visite du grand-duc Constantin, de son épouse de l'hôpital Sainte Croix ainsi qu'au bureau de bienfaisance
et de leur fils Nicolas. de la ville, elle quitta Nice pour Villefranche où elle embarqua
à destination de Marseille. De là, l'impératrice se rendit en
Un an plus tard, l'impératrice douairière de Russie choisit
train à Lyon pour y rencontrer Napoléon III puis regagna enfin
à son tour la villa De Orestis pour y effectuer son deuxième
Saint Petersbourg où elle s'éteignit six mois plus tard.
séjour niçois. Arrivée à Villefranche où elle débarqua de la
frégate Svetlana, elle fut accueillie par une foule de personnages Par la suite, la villa De Orestis fut mise en vente et acquise
officiels et de curieux qui avaient cessé le travail pour venir par un proche d'Alexandra Féodorovna, le prince roumain
assister à l'événement. Du port, l'impératrice se rendit Demetrius Stirbey, hospodar de Valachie. Baptisée depuis
directement à sa résidence niçoise pour s'y reposer des fatigues cette époque Stirbey, la villa passa ensuite aux mains de son
du voyage, tandis que son imposante suite de 57 personnes fils qui y accueillit en 1879 la reine Isabel d'Espagne. Peu
était logée dans divers hôtels et appartements du quartier de la avant 1900, le parc fut morcelé en trois parcelles acquises
Croix de Marbre. Très malade, Alexandra Féodorovna s'était respectivement par le baron de Lenval, le banquier Landau et
rendue à Nice d'une part dans l'espoir de guérir de ses maux, le docteur Grinda. La bâtisse fut, quant à elle, détruite quelques
d'autre part pour assister à la consécration de la nouvelle église années plus tard.
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LIONS
Demeure d'un riche négociant niçois, vraisemblablement l'occasion de faire des rencontres galantes car malgré son âge
édifiée au début du XIXème siècle, la villa Lions, baptisée du avancé, le roi avait la réputation de courir après tout ce qui
nom de son propriétaire, comportait à l'origine trois bâtisses portait jupon sur la Promenade des Anglais. Au début du mois
différentes. Deux pavillons identiques de style Empire, placés de février 1868 pourtant, le souverain fut brusquement frappé
de chaque côté de l'entrée donnant sur le chemin du bord de d'une maladie d'origine artérielle et rendit l'âme en quelques
mer (future Promenade des Anglais) et la villa principale située jours.
en retrait, avec accès par la rue de France.
Sa suite dut s'affairer sans interruption pendant vingt-quatre
Comme le faisaient bon nombre de grands propriétaires de heures pour contacter en toute hâte ses enfants restés au pays
l'époque, Alexandre Lions louait sa demeure à des étrangers ainsi que tous les personnages officiels désireux de lui rendre
pendant la saison hivernale . La villa Lions abrita entre autres, un dernier hommage. Dans la villa Lions, le grand salon fut
les comte et comtesse d'Aglié qui y donnèrent à plusieurs transformé en chapelle ardente et le corps de l'ancien souverain
reprises des représentations de théâtre amateur, puis la disposé sur un catafalque recouvert de satin blanc. Parmi les
grande-duchesse Stéphanie de Bade en 1857 et le prince de visiteurs qui firent le voyage pour se recueillir devant sa
Salm-Dick. Agrandie et surélevée vers 1860, la bâtisse reste dépouille, on nota la présence de ses deux fils, Luitpold et
célèbre pour avoir accueilli Louis 1er de Bavière, bien des Adalbert, du duc de Schlewig-Holstein, du duc de Parme, du
années après qu'il eut abdiqué par suite du scandale causé par prince de Schônberg-Lippe ainsi que de plusieurs représentants
son avide et omniprésente maîtresse : Lola Montes. Depuis de la municipalité niçoise. Hasard du destin, l'année suivante,
1862, le souverain avait pris l'habitude de venir passer chaque c'est Fouad Pacha, ministre de l'empire Ottoman, qui presque
année l'hiver à Nice. Il résida d'abord à l'Hotel des Anglais, à jour pour jour, s'éteignit à son tour en ce même lieu.
l'Hôtel de la Méditerranée, puis décida ensuite de louer la villa
Plus tard, l'un des pavillons Empire fut surélevé et
Lions. Toujours soucieux de discrétion, il voyageait sous les
transformé en l'hôtel de Saint-Petersbourg puis, la villa
noms d'emprunt de comte de Wendesfeld, comte Spessart ou
principale subit le même type d'aménagement et devint l'hôtel
comte Augusta. Seuls le préfet et le ministre étaient
officiellement au courant de son arrivée. Louis 1er de Bavière de Petrograd. Seul, le pavillon ouest conserva pendant un
certain temps son aspect initial.
était un grand amateur de fêtes et de vie mondaine. Membre
fondateur du premier casino de Nice, il participa toujours avec Aujourd'hui, les villas et hôtels ont depuis longtemps
enthousiasme aux banquets donnés par la Préfecture et aux disparu et l'on chercherait vainement la moindre trace de ce
fêtes du Carnaval. Il est vrai que celles-ci lui donnaient que furent les villas Lions.
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MERCEDES
(27, avenue Cernuschi)
CHATEAU DE CHAMBRUN
(27, Vieux Chemin de G a i r a u t )
En 1876, le comte Aldebert de Chambrun acquit du comte personne peut venir consulter la bibliothèque du musée social
Eugène Caïs de Pierlas, peintre et historien réputé, un domaine même un anarchiste du moment qu'il laisse sa bombe au
de onze hectares essentiellement planté de cultures maraîchères, vestiaire». Toujours en place aujourd'hui, il accueille
sur lequel se trouvait un château édifié au début du XIXème chercheurs et étudiants en sociologie.
siècle. Le nouveau propriétaire pensa un moment le démonter
Dans sa propriété niçoise, Aldebert de Chambrun s'appliqua
pierre par pierre pour le reconstruire quelques mètres plus à
à transformer le jardin en un magnifique parc d'agrément. Il
l'ouest afin de bénéficier d'une vue plus agréable sur la ville
fit aménager une cascade et un bassin, puis planta des palmiers,
et la mer mais le projet se révéla d'une telle ampleur qu'il fut
cyprès, cèdres du Liban, magnolias et pins maritimes. Désireux
très vite abandonné.
de posséder un lieu qui lui permettrait de recevoir un orchestre
Membre du très confidentiel Corps C o n s u l t a t i f de et d'écouter des concerts en plein air, le comte fit édifier en
Napoléon III qui réunissait une dizaine de conseillers privés, 1885 un temple de l'amour sur un promontoire naturel auquel
le comte de Chambrun découvrit Nice lorsque l'empereur le on accédait par un escalier en pierre froide de 72 marches.
chargea de préparer le référendum du rattachement du comté C'est l'architecte Philippe Randon, également responsable de
de Nice à la France en 1860. Ancien préfet du Jura, membre l'aménagement du parc, qui conçut cette véritable oeuvre d'art
du Corps législatif en 1871 puis sénateur de la Lozère en 1879, inspirée à la fois du temple de Sybille de Tivoli à Rome et du
le comte de Chambrun bien que monarchiste convaincu était monument chorégraphique de Lysicrate à Athènes. Parfois
très attaché à l'amélioration des conditions de vie de la classe dénommée Temple de Diane ou Temple de la Vesta, elle
ouvrière. Fondateur de la chaire de sociologie à la Sorbonne, il nécessita 220 mètres cube de marbre de Carrare, 7,5 tonnes de
créa à Paris avec ses propres deniers le Musée Social, déclaré fer et 2 tonnes de cuivre. D'une hauteur totale de 18 mètres et
d'utilité publique en 1894 qui abritait notamment une d'un coût évalué à près de 700 000 francs, elle fut réalisée par
imposante bibliothèque contenant tous les textes de loi destinés l'entreprise chargée quelques années plus tôt de fabriquer la
à informer les travailleurs sur leurs droits. Le musée se voulait Statue de la Liberté de New-York. Son inauguration après cinq
ouvert à toutes les classes de la société ainsi qu'à tous les partis ans de travaux donna lieu à une gigantesque réception qui
politiques. Le comte aimait à rappeler son adage : «Toute regroupa autour de l'orchestre du casino municipal près de 200
VAL FLEURI
(17, avenue Jean-Sébastien Barès)
MINERVE
(24, rue du Soleil)
INDOCHINOISE
(98, avenue Saint Lambert)
ARSON
(face au 43, avenue Stephen Liégard)
DE CESSOLE
(25, avenue de Sévigné)
CONCLUSION
La Première Guerre mondiale sonna le glas de ce qu'il fut massive de rapatriés d'Afrique du Nord, ainsi que par la demande
convenu d'appeler la «Belle Epoque». La plupart des grands sans cesse croissante de résidences secondaires, entraîna le
propriétaires russes sortirent ruinés de la révolution bolchevique lotissement d'autres grandes propriétés (Les Palmiers, Orangini,
et se retrouvèrent dans l'obligation de vendre leurs domaines. Château d'Azur, Abbaye de Roseland) et la destruction de
Hormis quelques rares exceptions (Abbaye de Roseland, domaines de même importance (Vigier, Tour Sarrasine,
Château Sainte Anne, Château d'Azur), les villas des années Prediletta, Château de la Colline de la Paix, Château Miramar).
1920 furent conçues dans des proportions plus modestes, plus Si quelques demeures purent être sauvées en étant rachetées
mesurées qu'auparavant. Cette période de l'entre-deux guerres par le département ou la commune comme la villa des Arènes
marqua du reste le début d'un phénomène de morcellement édifiée en 1685 par le comte Jean-Jérôme de Gubernatis,
des grands domaines (Château du Mont Boron, Château acquise par la suite par le comte Garin de Coconato et
Bornala, Château de la Tour des Baumettes, Château de aujourd'hui Musée Matisse, il n'en reste pas moins vrai qu'une
Chambrun). partie non négligeable du patrimoine historique de Nice a
Après la Seconde Guerre mondiale et essentiellement à partir définitivement disparu. Heureusement, une politique de
du milieu des années 1950 jusqu'à la fin des années 1980, on protection des villas et châteaux a depuis peu été mise en place
assista à une aggravation du processus entamé trois décennies afin de préserver les quelques grandes demeures niçoises
plus tôt. Le besoin urgent de logements, créé par l'arrivée restantes de la démolition.
PROMENADE NICOISE
Barbusse (rue Henri) Flirey (avenue de) corniche André de Joly et le boulevard
Baumettes (avenue des) Gairaut (route de) Maurice Maeterlinck)
Bounin (rue Paul) George V (avenue) Montecroce (avenue)
Caffarelli (rue) Germaine (avenue) Mont Fleury (avenue du)
Cambrai (rue de) Gilly (rue Jules) Parc Chambrun
Cap de Croix (avenue) Henriot (avenue Emile) Parc impérial (boulevard)
Capitaine Scott (avenue du) Lanterne (avenue de la) Primerose (avenue)
Cavendish (avenue) Léopold II (avenue) Prince de Galles (boulevard)
Cernuschi (avenue) Liserb (avenue du Parc) Sainte Thérèse (avenue)
Château de la Tour (Avenue) Lympia (avenue) Theuriet (avenue André)
Cimiez (boulevard de) Martin (avenue Aimé) Torre di Cimella (rue)
Cronstadt (rue de) Michel de Cimiez (avenue) Urbain Bosio (avenue)
Dalmas (rue Edouard) Mirasol (avenue) Valentiny (avenue)
Edouard VII (boulevard) Mont Boron (boulevard du) (entre la Valrose (avenue)
REMERCIEMENTS
Bibliothèque nationale.
Archives d é p a r t e m e n t a l e s :
Mademoiselle Rosine Cleyet-Michaux.
Archives m u n i c i p a l e s :
M e s d a m e s Mireille Massot et Sylvie De Galléani,
Monsieur J e a n - L o u i s Michel.
Musée M a s s é n a :
Monsieur Paul-Louis M a l a u s s é n a .
Editions Gilletta.
Editions Charles Massin.
A divers titres :
Alain et Martine Guerra,
Daniel et Gérard-Pierre Soyez,
J o s é Ugonis,
Yann Duvivier,
J o s e p h Nègre,
Georges J e s s u l a ,
Michel Griselin,
M a d a m e la comtesse de Blanchetti,
Robert F o n t a n a ,
Marcel C a m b o u r n a c .