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INTRODUCTION GÉNÉRALE
1 Objectif du rapport
Il est donc impératif, puisque la Terre forme avant tout un système dynamique,
de mieux appréhender à l’avenir la circulation des divers éléments chimiques la
constituant, circulation qui se fait – en permanence, sous différentes formes et à
des vitesses variables – entre plusieurs enveloppes de la surface de la planète
(atmosphère, biosphère et lithosphère) et entre les différents grands réservoirs
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que sont les terres émergées, les océans et les zones englacées. . . Naturelle-
ment, l’idéal serait de pouvoir maîtriser les cycles des divers éléments à toutes
les échelles de temps et d’espace, ce qui n’est pas encore réalisable dans l’état
actuel des choses. Cela ne dispense pas cependant, pour pouvoir avancer dans
la connaissance, de s’intéresser aux différentes étapes des circuits que l’on peut
déjà caractériser, de préciser le suivi – même partiel – de certains éléments qui
jouent un rôle fondamental dans la vie aussi bien de la planète que de l’huma-
nité, et enfin, de voir comment ces derniers sont susceptibles de s’intégrer dans
une optique générale qui est celle des cycles biogéochimiques. C’est d’ailleurs
dans ce cadre que les questions seront examinées au cours de ce rapport, le
terme « cycles biogéochimiques » étant pris dans son sens le plus large, à savoir
la connaissance de la redistribution des éléments chimiques telle que celle-ci
se fait, soit dans les écosystèmes naturels, soit lorsque ces derniers y ont été
introduits, comme dans les milieux anthropisés.
Ceci étant dit, il s’avère nécessaire de commencer par préciser les caractéris-
tiques de la géochimie et de la biogéochimie.
2 Géochimie et biogéochimie
La géochimie, qui a introduit au XIXe siècle la chimie dans l’étude des phé-
nomènes globaux mis en œuvre au cours de l’histoire de la Terre, est la science
qui traite de la répartition des éléments chimiques dans la géosphère (minéraux
et roches) (V-M Goldschmidt, 1958). Elle consiste essentiellement en l’applica-
tion des lois de la chimie minérale aux processus géologiques, qui séparent ou
rassemblent les différents éléments chimiques constituant la planète.
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Figure 1
Fonctionnement schématique d’un système végétal à la surface du globe.
1 m2 de céréales nécessite pour son développement :
– 660 g d’oxygène, 630 g de carbone, 90 g d’hydrogène ;
– 20 g d’azote (N), 8 g de phosphore (P2 O5 ), 25 g de potassium (K2 O), 8 g de calcium (CaO), 6 g de
soufre (SO3 ), 4 g de magnésium (MgO) ;
– des oligo-éléments : 0,15 g de fer, 0,05 g de manganèse, 0,05 g de zinc, 0,01 g de cuivre, 0,006 g de
bore, 0,001 g de molybdène.
D’après Les données de la Fertilisation – Publications UNIFA.
Tout ceci, qui reposait au départ sur la seule chimie « pneumatique », a été
conforté par la suite au cours du XIXe siècle par les observations et réflexions de
divers savants parmi lesquels on se doit de citer A. de Humbolt, JB. Dumas et JB.
Boussingault, J. von Liebig, C. Bernard, L. Pasteur. . . Mais c’est W. Vernadsky
qui, influencé par les idées de son maître BB. Dokouchaev, fondateur de la
science des sols (pédologie), a été amené, dans les années 1920, à mettre en
cohérence les différents savoirs en concevant l’existence d’une enveloppe au-
tonome qu’il a identifiée à la biosphère ; celle-ci étant formée par l’ensemble
des organismes vivants ainsi que par les divers milieux de la surface de la Terre
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qui leur sert d’environnement1 . Dès 1924, en effet, dans le cours sur la géochi-
mie, qu’il a dispensé à la Sorbonne, Vernadsky a proposé une extension de la
géochimie aux êtres vivants, celle-ci devant dorénavant s’appuyer aussi sur la
géochimie organique et la biochimie. De ce fait, il a fait appel aux biologistes
pour que les phénomènes vitaux soient rattachés à la géochimie, le sol, en tant
que maillon d’entrée de la chaîne alimentaire, servant de lieu privilégié pour
assurer les échanges d’atomes entre le monde vivant et le monde inerte.
L’appel a été plus ou moins entendu ; il l’a été en tout cas ultérieurement par
un certain nombre de biologistes, notamment par GE. Hutchinson (1948) et EP.
Odum (1953) qui, conscients de l’unité profonde existant entre les êtres vivants
(biocénose) et leur environnement (biotope), ont introduit dans ce genre de pro-
blèmes la démarche de l’écologie fonctionnelle. À partir de là, ces auteurs se
sont intéressés à ce qui constitue désormais la « biogéochimie » et ont été les
premiers à proposer la notion de « cycles biogéochimiques » (appelés par eux
cycles inorganiques-organiques) et à l’appliquer à plusieurs éléments, tels le car-
bone, le phosphore, le strontium (thèse d’Odum en 1950). . . La biogéochimie
est donc bien aujourd’hui la géochimie de la biosphère, avec son principal ap-
pendice dans les zones terrestres mises en culture qui correspond à l’agrochimie
(Mariotti, 1997 et Pellerin et al., 2006).
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– elle s’intéresse plus spécialement aux éléments chimiques qui sont en rela-
tion directe avec la vie et ce, qu’ils soient majeurs ou en traces (Pédro,
1970) et par ailleurs qu’ils soient indispensables (éléments plastiques
d’ordre constitutionnel et oligo-éléments à activité métabolique) ou bien
toxiques ;
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Biogéochimie
Géochimie Biochimie
Chimie
Figure 2
Place de la biogéochimie.
Dans le cas qui nous préoccupe ici, cela à un sens si l’on envisage le fonction-
nement global du système Terre, donc si l’on s’intéresse au bilan, aux transferts
et aux stocks d’éléments à toutes les échelles de temps et d’espace ; c’est ce que
l’on désigne alors par le terme cycle global. En réalité, dès lors que l’on prend
en compte de petites échelles de temps et des espaces territoriaux plus restreints,
les cycles étudiés sont toujours partiellement ouverts en sorte qu’on ne boucle
pratiquement jamais. Il est clair en effet que certains éléments peuvent être sous-
traits, car stockés à long terme, et échapper de la sorte pendant fort longtemps
au cycle complet les caractérisant. Aussi, ce qu’on étudie souvent, ce sont des
parties de cycle de nature et de durée variées (sous-cycle ; paracycle ; phase. . .),
plus ou moins autonomes qui, à certains moments de l’évolution, peuvent être
reliées entre elles au sein du système géochimique général.
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Dans ce cas, la notion de recyclage prend tout son sens (turn-over), celui-
ci pouvant se faire – de manière continue ou discontinue – à des vitesses très
variées suivant les milieux, mais qui correspondent généralement à des pas de
temps relativement courts, donc se situant à l’échelle humaine. Et c’est dans ce
cadre qu’il semble nécessaire de se pencher brièvement sur le problème des
relations entre cycles biogéochimiques et anthropisation.
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– à contribuer à la salinisation des sols dans les régions arides sous l’in-
fluence d’une irrigation régulière des cultures ;
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Figure 3
Schéma du cycle de l’azote en agriculture (source : La Lettre de l’Unifa N◦ 9).
cycle interne, soit parce qu’il est entraîné avec les eaux de drainage, soit quand
il est rejeté dans l’atmosphère.
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apports dans le temps, ce qui peut être résumé dans la formule « la bonne
dose au bon moment » ;
ments sert de complément à la ration herbagère ou fourragère ; ou encore mieux pour les élevages
hors-sol (porcs, volailles) ; l’épandage des effluents d’élevage entraînant des rejets azotés, phos-
phorés, . . . qui peuvent conduire à l’individualisation, dans l’espace rural, de « zones d’excédents
structurels » (Zes) (cf. chapitre 6.1).
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les eaux et les arbres. Les résultats d’ensemble de ce travail seront analysés dans
le chapitre 5 (5.1) ; mais on peut déjà indiquer que si, dans certaines situations,
les apports atmosphériques sont effectivement acides, donc à influence néga-
tive, dans d’autres, ils peuvent avoir un rôle positif, en assurant par exemple les
besoins en calcium d’arbres se développant sur les sols totalement décalcifiés.
4 Cadre du rapport
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Ceci étant acquis, il est clair que c’est la zone la plus externe, et en particulier
la couverture meuble de surface qui constitue l’élément de base de la biosphère
terrestre ; en effet, soumise à l’influence de la lumière solaire et caractérisée par
des conditions de faibles températures (moyenne 15 ◦ C) et pressions (autour de
1 bar), elle permet la production de matière vivante à partir des éléments tels
le carbone, l’hydrogène, l’oxygène, l’azote, le phosphore. . . en assurant dans
le même temps le contact avec les matériaux minéraux sous-jacents et mettant
en jeu notamment le silicium, l’aluminium, le fer, le calcium, le magnésium, le
potassium...
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À ce point, il est bon d’ajouter maintenant que deux de ces trois systèmes ont
été jusqu’ici assez convenablement investis. Il s’agit de ceux qui sont susceptibles
d’évoluer sous la seule dépendance des processus physiques, hydrodynamiques
et minéralogiques ; ce qui a permis d’envisager une perception quantitative des
phénomènes, d’appréhender d’entrée de jeu les processus à grande échelle
(grâce aux données satellitaires) sans avoir à aborder le détail, d’appliquer
3 Parmi les différentes enveloppes et réservoirs de la zone externe de la planète, on peut no-
ter qu’il existe des relations deux à deux entre compartiments ; ainsi les enveloppes fluides (très
changeantes et à évolution rapide) : océans et atmosphère sont plus spécialement liées ; comme le
sont, par ailleurs, les enveloppes solides : terres émergées et lithosphère (souvent hétérogènes et à
évolution lente).
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Par voie de conséquence, le rapport portera avant tout sur le « système éco-
logique », dont il s’agit maintenant de préciser le rôle dans la compréhension
des fonctionnements biogéochimiques de la surface du globe.
– d’une part, les organes foliaires du couvert aérien (phyllosphère) très liés
aux flux en eau et en carbone (CO2 ) ;
Entre ces deux interfaces, il ne faut pas oublier d’indiquer qu’une redistribu-
tion générale des éléments chimiques est aussi assurée par voie interne entre
tous les organes de la plante (cycle biochimique).
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Restent donc les deux autres phases, à savoir d’une part les êtres vivants,
d’autre part les matières organiques résiduelles, où l’évolution est avant tout de
nature biochimique. Or, dans ce domaine, le manque de données est aujour-
d’hui tout à fait manifeste ; et c’est ce qui a conduit dans ce rapport à mettre
un accent particulier d’un côté sur l’étude des micro-organismes et invertébrés
telluriques qui, en tant qu’agent des biotransformations, sont la clé des recy-
clages biogéochimiques, et d’un autre sur la caractérisation au sein du sol des
matières organiques qui sont à la base des interactions organominérales (com-
plexe argilo-humique) et en même temps de la libération d’éléments minéraux
biodisponibles, permettant d’assurer régulièrement une nutrition équilibrée des
végétaux.
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