Cours GEE-1

Télécharger au format pdf ou txt
Télécharger au format pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 72

Ministère de l’Enseignement Supérieur REPUBLIQUE DE COTE D’IVOIRE

Direction de l’Enseignement Technique Union – Discipline - Travail


Supérieur Privé

COURS
D’ENVIRONNEMENT
Filière : GENIE ENERGETIQUE ET
ENVIRONNEMENT (1ère Année)

Dr SIKA A.E

Ph.D in Ecology
I- ENERGIE ET ENVIRONNEMENT
La production énergétique nécessaire à l’homme est toujours source de nuisances pour
l’environnement, que soit parce que l’énergie est produite à partir de combustibles fossiles,
parce qu’on exploite l’énergie nucléaire ou parce qu’on investit dans des énergies
renouvelables.
L’énergie primaire (énergie chimique des pétroles, énergie nucléaire, solaire etc.) est
transformée en énergies secondaires, chaleur et courant qui subissent encore quelques
transformations et atteignent le consommateur.

1- Sources d’énergie primaire :


L’extraction de la houille dans les mines de fond et du lignite en surface pèse sur
l’environnement : endommagement des flancs de montagne après affaissement du sous-
sol (houille) ; stocks de produits extraits 30-40% de la masse extraite pour la houille,
modification du paysage par des terrils (houille, lignite) ; pollution au SO2 par des
incendies dans les mines (houille) ; abaissement du niveau des eaux souterraines
(houille, lignite), donc endommagement de la végétation , eaux usées salines (13 m3
d’eau d’extraction par tonne de lignite, eau de lessivage pour l’extraction de la houille)
poussières et bruit.
Des forages pétroliers profonds remontent jusqu’à 50% d’eau salée en surface, sa
viscosité très élevée permet au pétrole de pénétrer uniquement les couches supérieures
du sol, mais il pollue l’eau en particulier lors de son extraction sous-marine ou lors de
son transport en haute mer.
Le gaz naturel est une source d’énergie relativement propre, car il peut nettoyer après
son extraction (en particulier de toute trace de soufre).

2- Transformation de l’énergie :
La plus grande nuisance lors de l’exploitation des sources d’énergie fossiles est créée
lors de la transformation de l’énergie chimique en énergie thermique, pour la propulsion
des turbines des centrales, des moteurs d’engins ou pour chauffer. On a d’abord tenté
de réduire la concentration des émissions sur les lieux de combustion des installations
techniques d’envergure, en augmentant la taille des cheminées, mais on a juste déplacé
les problèmes d’émissions plus loin, là où les forêts et les lacs sont endommagés par
des produits polluants (pluies acides) gazeux lessivés.
Une transformation de l’énergie sans chaleur résiduelle est impossible : pour 1Kwh
d’électricité produite, 1,2-2 Kwh sont libérés sous forme d’énergie inutilisée.
La déperdition de chaleur se fait vers l’atmosphère pour le refroidissement à sec et vers
les eaux pour les refroidissements humides.

3- Transport de l’énergie :
Les transports d’énergie se font par des Pipe-lines, des véhicules ou des conduites
électriques. Les risques potentiels liés aux pipe-lines sous-marins ou des zones de grand
froid sont élevés en raison des risques de corrosion et de rupture.
Le transport par véhicule est une source de pollution encore plus grande.
On peut classer par risque croissant : transport maritime, transport ferroviaire et fluvial,
transport routier.
Les traces des conduites électriques à l’air libre découpent le paysage en couloirs allant
jusqu’à 200 m de large pour des raisons de sécurité, isolant les biotopes et diminuant
leur valeur récréative.

1
4- Consommation d’énergie :
La consommation d’énergie par l’industrie, la circulation, les ménages et les petits
consommateurs par exemple les entreprises artisanales, représentent un problème en soi
dans les zones de concentration urbaine.
Les émissions sont spécifiques de chaque branche industrielle (par exemple des
cyanures pour les hauts-fourneaux, du fluor pour les usines d’aluminium), et des
différentes possibilités de production d’énergie des ménages.
Les modifications d’exploitation ne modifient en réalité que des problèmes d’émission.
Les moyens de transport utilisant des carburants, polluent l’environnement par le bruit,
les émissions de Co, Pb, SO2, NOx et hydrocarbures, et cette pollution tend à augmenter.
Les risques liés à la production d’énergie sont réglementés par des décrets, par une
réglementation de la protection des rayonnements une réglementation technique de l’air
, une réglementation des risques d’incendies majeurs, et par une incitation à
l’équipement des véhicules avec un pot catalytique. Les valeurs maximales sont
toujours le fruit d’un compromis politique entre la partie productrice d’émissions et
celle qui n’en produit pas.

5- La comparaison des risques :


La comparaison des risques entre les différentes manières de production d’énergie se
fonde sur des valeurs expérimentales et des calculs prévisionnels ; à ce jour on s’est
intéressé surtout à la comparaison charbon/énergie nucléaire ou énergies
fossiles/renouvelables.

II- POLLUTION :
Le terme pollution recouvre des acceptions fort diverses et qualifie une multitude d’actions qui
dégradent d’une façon ou d’une autre le milieu naturel.
Polluer : signifie étymologiquement profaner, souiller, salir, dégrader.
Ces termes ne prêtent pas à équivoque et nous paraissent tout adéquats que, les longues définitions
données par les experts. Parmi ces dernières, nous retiendrons celle qui a été rédigée en 1965 par le
comité Scientifique Officiel de la Maison-Blanche pour la Protection de l’Environnement : « La
Pollution est une modification défavorable du milieu naturel qui apparaît e totalité ou en partie
comme le sous-produit de l’action humaine, au travers d’effets directs ou indirects altérant les
modalités de répartition des flux d’énergie, des niveaux de radiation, de la constitution
physicochimique du milieu naturel et de l’abondance des espèces vivantes….. ».
Ces modifications peuvent affecter l’homme directement ou au travers des ressources en produits
agricoles, en eau et autres produits biologiques. Elles peuvent aussi l’affecter en altérant les objectifs
physiques qu’il détient, les possibilités récréatives du milieu ou encore en enlaidissant la nature.
D’autres définitions, plus restrictives, limitent l’usage du terme de pollution au rejet de produits
chimiques ou radioactifs dans l’environnement et désignent sous le vocable général de nuisance les
autres altérations du milieu ambiant provoquées par l’Homme (On parlera alors, par exemple, de
nuisance sonore ou de nuisance esthétique…).

2
En matière de pollution nucléaire, l’accident de Tchernobyl, survenu le 26 avril 1986, donne aussi un
exemple spectaculaire des dimensions cataclysmiques que peuvent prendre les pollutions bien que, en
l’occurrence, une proportion relativement faible de la quantité totale de radioactivité contenue dans le
cœur de ce réacteur.
Malgré les crises pétrolières de 1973 et de 1979 (Amoco Cadiz en 1978, Tanio en 1984 ou plus près en
1999 de l’Erika), ainsi que la récession économique qui suivit dans la première moitié des années 1980,
la consommation globale d’énergie a continué à croître. La diminution de l’usage du pétrole a été
compensée par l’augmentation de celui du charbon, du gaz naturel et aussi par le développement de
l’électronucléaire.
En 1993, la consommation mondiale d’énergie a dépassé 12 milliards de tonnes d’équivalent charbon.
Sur ce total, le pétrole a représenté plus de 4,5 milliards de tonnes, le charbon 3,1 milliards de tonnes,
le gaz naturel 2,5 milliards de tonnes, le reste étant assuré par l’hydroélectricité et le nucléaire.
Cette consommation d’énergie fossile a rejeté quelque 6,19 milliards de tonnes d’équivalent carbone
sous forme de CO2 dans l’atmosphère, contribuant ainsi de façon significative à l’augmentation de l’effet
de serre.
L’extraction et la combustion des produits pétroliers s’accompagnent d’innombrables pollutions :
marées noires provenant des fuites de puits off shore ou accidents de transport qui contaminent l’océan
mondial, raffinage qui pollue les eaux continentales, de même que les vidanges « sauvages » et autres
usages dispersifs des hydrocarbures. Enfin leur combustion libère dans l’atmosphère divers polluants
gazeux (gaz carbonique, oxyde de carbone, de soufre, d’azote, hydrocarbures imbrûlés, dérivés du
plomb utilisés comme additifs dans les essences, etc…). En définitive la boulimie énergétique propre
aux pays industrialisés s’accompagne d’une contamination sans cesse accrue de l’air, des eaux
continentales, de l’océan et même des sols par les innombrables substances polluantes produites par les
combustions.
D’autres inquiétudes résultent du développement de l’énergie nucléaire.
Aux appréhensions justifiées suscitées par les essais dans l’atmosphère de bombes H et autres engins
dits de « dissuasion », et par la multiplication de ces armements qui seraient susceptibles de provoquer
un cataclysme écologique, est venue s’ajouter la crainte d’une pollution insidieuse et généralisée
provoquée par les rejets d’effluents dilués radioactifs dans l’air et les eaux.
En sus de la pollution chimique et autres nuisances engendrées par la production de l’énergie, on ne
saurait omettre l’une d’entre elles, particulièrement importante, la pollution thermique des eaux, qui est
de nature physique.
Comme le rendement thermodynamique des combustions excède rarement 40%, quelque 60% de
l’énergie potentielle est perdue dans l’environnement sous forme de basses calories inutilisables lorsque
l’homme « brûle » du charbon, du pétrole ou de l’uranium 235.
Le refroidissement d’une centrale électrique de 1000 mégawatts électriques nécessite de la sorte le débit
d’un fleuve entier comme la Seine à son étiage !
La pollution thermique des eaux fluviales ou littorales qui en résulte se traduit par un réchauffement
dont les conséquences sont catastrophiques pour les êtres vivants dulçaquicoles et marins.
Les pollutions ont des causes diverses. On peut cependant dégager deux grandes lignes :
• la pollution de l’atmosphère est essentiellement due aux rejets des usines industrielles, des
incinérateurs, des moteurs à combustion interne (pollution automobile) ; parmi ses manifestations

3
visibles figurent le smog et les pluies acides (dont le pH ≤ 7 contenant de l’acide carbonique, sulfurique
et nitrique liées aux émanations de CO2, SO2, et NO2 ).
• la pollution de l’eau, des rivières, des lacs et des mers, a plutôt pour origine les rejets domestiques et
municipaux (eaux usées), les déchets nucléaires et les rejets industriels (traitement des déchets) ainsi
que le déversement dans les milieux aquatiques d’hydrocarbures de diverses origines (pollution par les
hydrocarbures).

III- LES POLLUANTS DE L’ATMOSPHERE


A la pollution des rues et des ornières par des détritus de toutes sortes qui était le lot de nos cités dans
les temps reculés, fait place aujourd’hui à une pollution atmosphérique tout aussi désagréable et nuisible.
Personne ne se souvient des inconvénients qui pouvaient résulter de l’abandon des ordures sur les
trottoirs ou dans les caniveaux, mais personne ne veut songer sérieusement qu’en allumant son feu, en
mettant en route le moteur de sa voiture, en brûlant les végétaux en excès dans son jardin, on commet
une action malfaisante risquant de nuire à la santé de son prochain.
- Qu’est-ce qu’un polluant ?
C’est une substance qui se trouve dans l’atmosphère à une concentration supérieure à sa
concentration supérieure à sa concentration habituelle, celle-ci étant d’ailleurs le plus souvent
nulle, exception pouvant être faite pour le gaz carbonique, les oxydes d’azote, l’ozone et
l’ammoniac qui sont des constituants normaux de l’atmosphère non polluée.

1- La pollution atmosphérique :
On parle de pollution atmosphérique lorsqu’une ou plusieurs substances ou des mélanges
de substances polluantes sont présents dans l’atmosphère dans des quantités ou sur une
période telles qu’ils sont dangereux pour les Hommes, les animaux, les plantes ou les biens
qu’elles contribuent à leur mise en péril ou nuisent à l’activité et au bien-être des personnes-
(OMS).

- L’effet de serre :
L’effet de serre est dû à l’augmentation de la concentration des gaz dans l’atmosphère. Cette
concentration est active sur le plan radiatif (gaz carbonique, méthane, protoxyde d’azote,
CFC, …) et peut aboutir à un changement climatique important sous forme de
réchauffement de plusieurs degrés de la planète Terre. Ce réchauffement progressif de la
basse atmosphère par un filtrage sélectif du rayonnement infra-rouge émis a été popularisé
sous le nom évocateur d’effet de Serre.

- Les gaz à effet de Serre


Proportions relatives des différents gaz à effet de serre résultant des activités humaines et
responsables du réchauffement de la planète.
°Eau stratosphérique H2O
°Gaz carbonique CO2
°Méthane CH4 est 20 fois plus puissant que le CO2
°Ozone troposphérique O3
°Chlorofluorocarbone les CFC sont 1000 fois plus puissants que le CO2
°Le protoxyde d’azote N2O est 2 fois plus puissant que le CO2

- Le processus de digestion des ruminants libère dans l’atmosphère de grandes quantités de


méthane (200g de CH4 par bovin et par jour).

4
- Le début de la période industrielle marque l’accroissement spectaculaire de la concentration
en gaz carbonique de l’atmosphère.

IV- ENERGIE ET ENVIRONNEMENT :


Int : Energie, capacité d’un système à produire un travail. L’énergie est l’un des quatre
concepts prédéfinis de la physique avec la matière, l’espace et le temps.

1-Principe de la conservation de l’énergie :


L’énergie se manifeste sous différentes formes et peut passer d’une forme à une autre, ou
se décomposer en plusieurs formes, mais l’énergie totale d’un système isolé demeure
constante. En particulier, l’énergie totale de l’univers est constante, elle ne fait que se
transformer ou se propager. Mis en évidence par les physiciens du début du XIXe siècle, ce
principe de la conservation de l’énergie constitue l’une des bases de la physique et résulte
de l’homogénéité de l’univers.

2- Niveaux d’Energie et stabilité :


L’ensemble des phénomènes physiques sont gérés par des considérations énergétiques :
l’évolution spontanée d’un système physique se fera toujours de l’état de plus haute énergie
vers un état de plus faible énergie. En effet, pour accéder à un état de plus haute énergie, il
faut qu’une énergie supplémentaire soit fournie au système, ce qui ne peut se faire sans
l’intervention du milieu extérieur. A l’inverse, le système peut spontanément libérer de
l’énergie (par exemple en rayonnant) sans aucune aide extérieure, et se retrouver ainsi dans
un état d’énergie plus faible. L’état le plus stable d’un système physique est donc l’état de
plus basse énergie, appelé état fondamental du système. Tous les autres états (d’énergies
supérieures) sont appelés états excités. Ces états sont pour la plupart instables ; toutefois il
existe des états dits métastables, dont l’énergie est supérieure à celle du niveau fondamental.
Lorsqu’un système se trouve dans un état métastable, autrement dit un minimum
énergétique relatif, il lui faut passer par des états intermédiaires d’énergies supérieures pour
atteindre son état fondamental. Ce processus ne peut avoir lieu sans qu’une certaine énergie
lui soit préalablement fournie : il est bloqué dans son état métastable. On dit que le système
doit franchir une barrière de potentiel pour atteindre son niveau fondamental.
3- Formes d’énergie :
L’énergie existe sous de multiples formes, notamment mécanique (mécanique), thermique
(thermodynamique), chimique (réaction chimique), électrique (électricité), rayonnante
(rayonnement) et nucléaire (nucléaire, énergie).

a) Energie mécanique :
L’énergie mécanique d’un corps se répartit entre son énergie cinétique, lorsqu’il est en
mouvement, et son énergie potentielle, que lui vaut à tout moment sa position dans un
champ de force. Dans de tels systèmes mécaniques, les variations d’énergie cinétique
et d’énergie potentielle s’équilibrent, de façon que leur somme reste toujours la même.
Dans un pendule en mouvement dans un champ de gravité, par exemple, une énergie
cinétique maximale est atteinte au creux du balancement, mais elle est compensée par
une énergie potentielle minimale puisque le balancier se trouve à sa position la plus
basse. De même, en bout de course du balancier, l’énergie cinétique est nulle (car la
vitesse est nulle) alors que l’énergie potentielle est maximale car le pendule est au plus
haut. Entre ces deux points extrêmes, l’énergie du balancier passe par une combinaison
sans cesse changeante d’énergie cinétique et d’énergie potentielle, mais leur somme
(l’énergie mécanique du système) reste constante.

5
b) Energie chimique :
La matière peut également renfermer de l’énergie chimique, libérée lors de réaction
exothermiques. Un morceau de magnésium, par exemple, relâche son énergie chimique
potentielle sous forme de chaleur et de lumière lors de sa combustion dans l’oxygène.
Certaines réactions peuvent être réalisées pour obtenir de l’énergie cinétique. Ainsi,
dans une arme à feu, l’énergie chimique potentielle de la poudre à canon est transformée
en chaleur et en bruit, mais surtout en énergie cinétique du projectile. Ce principe est
également à la base du moteur à réaction et du moteur de fusée. L’énergie chimique
n’est rien d’autre que l’énergie de liaison entre les atomes dans les molécules.
En brisant ces liaisons, on libère l’énergie qu’elles contiennent ; pour en reformer
d’autres, il faut fournir de l’énergie.

C) Energie électrique :
Dans le principe de la pile électrique, une énergie potentielle chimique est convertie en
mouvement d’électrons, c-à-d en courant électrique. Cette énergie électrique peut
également être obtenue en convertissant l’énergie cinétique d’une dynamo en rotation,
selon le principe de l’induction électromagnétique. Du point de vue microscopique,
l’énergie électrique provient du mouvement des électrons dans le milieu conducteur,
donc de leur énergie cinétique. L’énergie électrique obtenue peut elle-même être
transformée en mouvement ou en travail dans les moteurs et les appareils électriques.

d) Energie rayonnante :
Un rayonnement électromagnétique, pour sa part, possède une énergie qui dépend de sa
longueur d’onde et de sa fréquence. Du point de vue quantique, cette énergie est la
somme de l’énergie des photons qui constituent ce rayonnement. Cette énergie est
impliquée dans de nombreuses transformations : elle est emmagasinée par la matière
lorsque celle-ci absorbe un rayonnement, et peut être restituée à l’environnement sous
forme de lumière ou de chaleur.

e) Energie thermique :
La chaleur est la forme d’énergie la plus commune. Elle consiste en un mouvement
désordonné de molécules et d’atomes, appelé agitation thermique. Elle est omniprésente
dans les transformations d’énergie, dont elle constitue souvent un déchet inutilisable.
Dans les appareils mécaniques, par exemple, on ne peut éviter la conversion d’un
certain pourcentage d’énergie en chaleur de friction dans les pièces. De même, dans les
circuits électriques, les pertes de travail utile proviennent de la conversion de l’énergie
électrique en chaleur dans les fils (effet joule). C’est cette détérioration de la « qualité »
de l’énergie au cours de ses multiples transformations qui est exprimée dans le principe
d’entropie.
f) Energie nucléaire :
La théorie de la relativité d’Einstein permet de démontrer que la matière peut se
transformer en énergie et inversement : c’est le principe d’équivalence masse-énergie.
Cette équivalence est à la base des réactions nucléaires de fission et de fusion. Dans la
fission, un noyau atomique se sépare en deux noyaux dont la masse totale est inférieure
à la masse du noyau initial. Le défaut de masse est transformé en énergie, qui est libérée
sous forme d’énergie cinétique des fragments et de rayons gamma.

g) Quantification de l’énergie :

6
L’avènement de la physique quantique a fondamentalement modifié notre perception
de l’énergie. Celle-ci n’est plus considérée comme une grandeur continue mais
discrète : dans un système donné, elle ne peut prendre que certaines valeurs bien
déterminées, et passe de l’une à l’autre par saut. Cette quantification de l’énergie ne
nous apparaît pas au niveau macroscopique, car la différence d’énergie en deux niveaux
successifs est si faible que l’on a l’impression qu’elle varie continûment. En revanche,
au niveau atomique, ce phénomène joue un rôle primordial.

7
II-LE SYSTEME D’INFORMATION
ENERGETIQUE :
SIGLES ET ABREVIATIONS
AIE……………………Agence Internationale de l’Energie
ANARE………………Autorité Nationale de Régulation du Secteur de l’Electricité
APCI………………….Association Professionnelle des Pétroliers de Côte d’Ivoire
AZITO………………..Centrale thermique d’Azito
BEE……………………Bureau des économies d’énergie
BNETD………………..Bureau National d’Etudes Techniques et de Développement
CEB…………………….Communauté Electrique du Benin
CIE……………………..Compagnie ivoirienne d’électricité
CIPREL………………..Compagnie ivoirienne de production d’électricité
CNRA ……………….Centre National de Recherche Agronomique
DCGTX…………….Direction et Contrôle de Grands Travaux
EDM……………….Energie du Mali
EEEOA…………….Système d’échanges d’énergie électrique ouest africain ou West
african Power Pool : WAPP
FAO………………...Organisation Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture
GESTOCI………….Société de Gestion des Stocks Pétroliers de Côte d’Ivoire
GPL………………….Gaz de Pétrole Liquéfié
GPP…………………Groupement Professionnel de l’industrie du Pétrole
IEPF…………………Institut de l’Energie et de l’Environnement de la Francophonie
INS…………………..Institut National de la Statistique
IPNETP…………….Institut Pédagogique National de l’Enseignement Technique et
Professionnel
IREN…………………Institut de Recherche en Energies Nouvelles
I2T…………………..Institut de Technologie Tropicale
LBTP………………..Laboratoire du Bâtiment et des Travaux Publics
PETROCI…………..Société Nationale d’Opérations Pétrolières de Côte d’Ivoire
PIB……………………Produit Intérieur Brut
SIE……………………Système d’information Energétique
SIR……………………Société Ivoirienne de Raffinage

8
SMB………………….Société Multinationale de Bitumes
SOGEPE…………….Société de Gestion du Patrimoine du Secteur de l’Electricité
SONABEL…………..Société Nationale Burkinabé d’Electricité
SOPIE………………..Société d’Opération Ivoirienne d’Electricité
UA…………………….Union Africaine
UE…………………….Union Européenne
UEMOA…………….Union Economique et Monétaire Ouest Africaine
VRA…………………..Volta River Authority
DDO…………………..Distillate Diesel Oil
GWh………………….GigaWatt-heure
HVO…………………..Heavy Vacuum Oil
KWh………………….KiloWatt-heure
MW…………………..MégaWatt
MWh…………………MégaWatt-heure
TEP……………………Tonne équivalent Pétrole
TM……………………Tonne Métrique

9
Les principaux objectifs du projet sont de :
•disposer d’un système d’information énergétique fonctionnel et pérenne d’abord
national puis sous régional (espace UEMOA) ;
•constituer des équipes nationales maîtrisant, en totale autonomie, les éléments de base
(bilans et indicateurs énergétiques) d’un SIE qui constitue un outil d’aide à la décision ;
•permettre la mise en œuvre d’une politique énergétique structurée et cohérente,
articulée autour de priorités clairement identifiées.

Le SIE sera pour la Côte d’Ivoire une plateforme pour :


•identifier les priorités nationales en matière de politique de l’énergie ;
•concevoir, évaluer et suivre les politiques de l’énergie ;
•établir un cadre de concertation nationale pour les acteurs publics et privés du secteur
énergétique ;
•renforcer les compétences institutionnelles du Ministère en charge de la définition et
de la mise en œuvre de la politique énergétique ;
•contribuer à l’établissement d’un secteur de l’énergie plus transparent, ce qui facilite
la mobilisation des financements nécessaires à son développement ;
•former des cadres.

10
Chapitre 1 : GENERALITE SUR LE SECTEUR DE L’ENERGIE
La Côte d’Ivoire est située entre le 5ème et le 10ème degré de latitude nord. Elle couvre
une superficie de 322 462 km2avec une population estimée en l’an 2007, à plus 20
millions d’habitants soit plus 62 habitants au km2. Elle est limitée à l’Est par le Ghana,
au Nord par le Mali et le Burkina Faso, à l’Ouest, par la Guinée et le Libéria et au Sud
par l’Océan Atlantique sur une façade de 550 km.
La majorité de la population vit encore en milieu rural plus de 60% contre plus de 43
en milieu urbain.
La politique ivoirienne en matière d’énergie s’articule autour des axes stratégiques
suivants :
- Promouvoir la maîtrise de l’énergie dans les différents secteurs d’activité ;
- Diversifier et sécuriser les sources d’approvisionnement en énergie ;
- Mettre en œuvre un cadre juridique et institutionnel favorable à la mobilisation des capitaux
intérieurs et extérieurs ;
- Accélérer la politique d’électrification sociale, instrument de lutte contre la pauvreté ;
- Favoriser l’accès à l’Energie à moindre coût ;
Pour mettre en œuvre cette politique, le Ministère des Mines et de l’Energie s’est doté des
structures suivantes.
I- LES STRUCTURES DE L’ETAT
1.1. Sous-secteur de l’Electricité
La Direction de l’Energie a pour missions, la définition, la mise en œuvre et le suivi
de la politique énergétique du Gouvernement en matière :
1. d’équipements de production, transport et distribution de l’énergie électrique ;
2. d’électrification sociale, de renforcement et d’extensions de réseaux ;
3. de gestion et de planification du secteur de l’énergie ;
4. de maîtrise d’énergie et de promotion des énergies renouvelables

Elle est chargée en particulier de :


▪ suivre et de contrôler l’exécution des conventions entre l’Etat et les partenaires ;
▪ actualiser les conventions, négocier et préparer les conventions nouvelles ;
▪ participer à la gestion technique et financière du secteur électrique ;
▪ assurer l’interface entre les partenaires extérieurs et l’Etat en matière de coopération internationale,
notamment en ce qui concerne les interconnexions ;
▪ contribuer à l’élaboration des normes relatives aux matériels et équipements électriques ;
▪ contribuer à l’élaboration de la réglementation dans le domaine de l’énergie ;
▪ assurer la promotion des énergies nouvelles et renouvelables ;
▪ définir et mettre en œuvre la politique nationale de maîtrise de l’énergie ;
▪ définir et mettre en œuvre la politique de valorisation de la biomasse et des résidus agro-industriels
pour la production d’électricité.

11
La SOGEPE (Société de Gestion du Patrimoine du secteur de l’Electricité) assure la gestion des
actifs du secteur, appartenant à l’Etat et veille à l’équilibre financier du secteur de l’Electricité.
Plus spécifiquement, elle veille à la sauvegarde des actifs de l’Etat par le suivi des immobilisations.
Elle assure la gestion comptable et financière des investissements à la charge de l’Etat dans le secteur.
Elle perçoit les redevances dues par le concessionnaire du service public, assure leur comptabilisation
et leur suivi financier. Elle tient les comptes consolidés du secteur.
La SOPIE (Société d’opération Ivoirienne d’Electricité) est chargée du suivi de la gestion des
mouvements d’énergie exercée par le concessionnaire (CIE) ainsi que de la maîtrise d’œuvre des
travaux relevant de la responsabilité de l’Etat.
Elle est responsable de la planification de l’offre et de la demande d’énergie électrique, en
coordination avec le Ministère chargé de l’Energie.
L’ANARE (Autorité Nationale de Régulation du secteur de l’Electricité) a pour mission, le suivi
du respect de la réglementation et des conventions, l’arbitrage des conflits entre les acteurs du secteur,
et enfin la protection des intérêts des consommateurs.
Elle donne son avis sur les autorisations d’exploiter et sur les textes réglementaires en matière
d’énergie électrique. Elle assure enfin le contrôle technique, économique et financier du
concessionnaire et des producteurs indépendants d’électricité.

1.2. Sous-secteur des Hydrocarbures


La Direction des Hydrocarbures a pour missions, la définition, la mise en oeuvre et le suivi de la
politique du gouvernement en matière d’élaboration, de suivi, de législation, de réglementation et de
définition des normes et spécifications des produits pétroliers et gaziers ; du suivi de la recherche, de
l’exploitation et du développement de l’industrie pétrolière.
PETROCI (Société Nationale d’Opération Pétrolière de Côte d’Ivoire) a pour vocation, la
recherche et l’exploitation du pétrole et du gaz sur le territoire ivoirien. Elle intervient à tous les
segments du secteur des hydrocarbures.
GESTOCI (Société de Gestion des Stocks Pétroliers de la Côte d’Ivoire) assure la gestion des
stocks de sécurité pouvant couvrir une période d’arrêt de fonctionnement de la SIR pendant 60 jours et
gère aussi les moyens de transport entre les dépôts.
SIR (Société Ivoirienne de Raffinage) transforme le pétrole brut en produits pétroliers usuels de
consommation (butane, essences super et ordinaire, pétrole lampant, gazoil, DDO, fuel oil 180, fuel oil
380, HVO…).
SMB (Société Multinationale des Bitumes) est spécialisée dans la production des bitumes.
1.3. Biomasse, Maîtrise de l’Energie et autres Energies
Plusieurs Ministères interviennent de façon directe ou indirecte dans la gestion de la biomasse, dans la
promotion des énergies nouvelles et dans les actions liées à la maîtrise de l’énergie :

▪ le Ministère des Mines et de l’Energie assure la promotion des énergies nouvelles et des économies
d’énergie, le suivi du programme de diffusion des foyers améliorés en collaboration avec l’Institut
Pédagogique National de l’Enseignement Professionnel et Technique (IPNEPT) et le Laboratoire du
Bâtiment et des Travaux Publics (LBTP) ;

12
▪ le Ministère de l’Environnement, des Eaux et Forêts assure le suivi des activités de la filière bois de
feu et à charbon ;
▪le Ministère de l’Agriculture et des Ressources Animales s’occupe de la valorisation des résidus
végétaux et agroindustriels dans certaines entreprises ;
▪le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique s’occupe de la recherche
sur les énergies à travers ses structures que sont l’Institut de Recherche sur les énergies Nouvelles
(IREN) et l’Institut de Technologie Tropicale (I2T).

2. LES OPERATEURS PRIVES

2.1. Sous-secteur de l’Electricité

□ La CIE (Compagnie Ivoirienne d’Electricité) est le concessionnaire de service


public national de production, transport, distribution, importation et exportation de
l’énergie électrique.
□ Les producteurs indépendants d’électricité
Deux opérateurs privés sont apparus dans le segment production du secteur de
l’électricité : la Compagnie Ivoirienne de Production d’Electricité (CIPREL) avec
210 MW de puissance installée et AZITO ENERGIE avec 296 MW de puissance
installée.

2.2. Sous-secteur des hydrocarbures

□ les opérateurs du secteur des hydrocarbures :

AFREN, Canadian Natural Ressources (CNR) et Foxtrot International sont des


exploitants du secteur des hydrocarbures qui produisent du pétrole brut et du gaz
naturel. Ce gaz est destiné essentiellement à la production de l’Energie électrique.

□ Les sociétés pétrolières

Les sociétés de distribution de produits pétroliers sont regroupées dans deux


associations dénommées Groupement Professionnel de l’industrie du Pétrole
(GPP) et Association Professionnelle des Pétroliers de Côte d’Ivoire (APCI).

3-DIAGNOSTIC DU SECTEUR DE L’ENERGIE


Malgré les faibles moyens de l’Etat et du secteur public, les investissements réalisés ont
permis d’obtenir les résultats suivants :
3.1.Forces
Electricité
Résultats nationaux (Année 2007)
▪ 1210 MW de puissance installée dont :
- Hydraulique (6 Barrages) 604 MW ;

13
- Thermique 606 MW
▪ 4402 Km de ligne haute tension ;
▪ 18304 Km de ligne moyenne tension ;
▪ 15162 Km de ligne basse tension ;
▪ 42 postes de transformation haute tension ;
▪ 7848 postes de transformation basse tension ;
▪ 2627 localités électrifiées sur 8513 ;
▪ Production brute 5514 GWh ;
▪ Consommation nationale de 4 453 GWh avec une pointe de plus de 762 MW ;
▪ 954 072 abonnés
Exportations d’électricité
La Côte d’Ivoire est interconnectée aux réseaux électriques de la sous-région (Ghana,
Bénin, Togo, Burkina Faso et Mali) avec des exportations de l’ordre de plus de 773
GWh dont :
▪ VRA (Ghana)………………………………………………427 GWh ;
▪ CEB (Togo /Bénin) ………………………………………224 GWh ;
▪ SONABEL (Burkina Faso) ……………………………120 GWh;
▪ EDM (Mali)……………………………………………….2,3 GWh;

Hydrocarbures
▪Découpage du bassin sédimentaire Ivoirien en 28 blocs :
- 20 blocs sont attribués (4 blocs en production) ;
- 8 blocs sont disponibles (4 en on shore, 1 en eaux profondes et 3 dans l’offshore
moyen à profond) ;

▪ 62650 Km de lignes sismiques 2D et 11 482 Km2 de couverture sismique 3 D ;


▪ Plus de 200 puits forés ;
▪ Valorisation du gaz naturel pour la production d’électricité ;
▪ Augmentation de la production pétrolière ;
▪ Régulation des prix aux consommateurs ;
▪ Unité très performante de raffinage d’une capacité de 4 millions de tonnes par an.

3.2. Faiblesses
Electricité
▪ Taux de pénétration de l’électrification (pourcentage de localités électrifiées sur le
nombre total de localités) encore faible, soit 30% ;
▪ Forte dépendance du secteur de l’électricité par rapport aux financements extérieurs ;
▪ Coût de l’énergie électrique relativement élevé pour les populations rurales ;

14
▪ Etroitesse du marché de l’électricité.

Energies renouvelables
▪ Insuffisance de la vitesse de vent pour le développement de l’énergie éolienne
(moins de 4 m/s) ;
▪ Problème de suivi des activités des opérateurs (charbonniers, forgerons etc.) compte
tenu du caractère informel de la filière ;
▪ Cadre institutionnel et réglementaire non incitatifs.

15
Chapitre II : PRESENTATION DU BILAN ENERGETIQUE 2007

METHODOLOGIE :

Dans l’approche SIE-Afrique, un système d’information énergétique est un outil d’aide à la


décision qui s’appuie sur deux composantes essentielles :
▪la maîtrise d’un ensemble d’informations techniques et socioéconomiques nécessaires à
l’élaboration d’une politique énergétique efficiente. Il s’agit :

 Des bilans énergétiques détaillés et documentés ;


 Des indicateurs énergétiques ;
 Des analyses prospectives ;
 Des informations détaillées sur les ressources et potentialités énergétiques, les
technologies utilisées et leur rendement énergétique ainsi que les informations clés sur
les aspects institutionnels et organisationnels du secteur de l’énergie.
▪ la mise en place d’un cadre national de concertation sur la politique de l’énergie,
rassemblant les acteurs publics et privés du secteur.
Pour atteindre ces objectifs, il est indispensable de pouvoir disposer d’informations fiables
sur les différentes formes d’énergie. C’est une démarche qui nécessite la collaboration des
structures en charge des questions énergétiques.
Au fur et à mesure que nous évoluerons dans le déploiement du SIE, certaines données
seront actualisées compte tenu des corrections que nous apporterons.

I- APPROVISIONNEMENT EN ENERGIE PRIMAIRE


Quatre grandes formes d’énergies constituent l’essentiel des approvisionnements en énergie
primaire de la Côte d’Ivoire. En 2007, l’approvisionnement est de l’ordre de 10 millions de
tonnes équivalent pétrole (TEP).

Figure 1 : Approvisionnement en énergie primaire de la Côte d’Ivoire en 2012


Source : SIE-Côte d’Ivoire 2012
Par ordre d’importance, nous avons :
1.1 Les énergies renouvelables combustibles et déchets :
Avec 61,3% des approvisionnements en énergie primaire, les énergies renouvelables
combustibles et déchets, communément appelées biomasse énergie, constituent la
première forme d’énergie disponible compte tenu de la position géographique de la Côte
d’Ivoire, de son climat et de son couvert végétal. Les énergies renouvelables
combustibles et déchets englobent le bois, les produits de défrichement agricole et les
résidus de produits agricoles (bagasse, rafle, coque, fibre de coco, cabosse de cacao,…).

16
En 2007, la Côte d’Ivoire a produit 18,965 millions de tonnes de bois et 100 tonnes de
résidus (il ne s’agit que de quantités valorisées).

1.2. Le pétrole brut


Il représente 29,4% des approvisionnements primaires de la Côte d’Ivoire.
En 2007, la production a atteint 17,65 millions de barils soit environ 2,42 millions de tonnes
métriques (TM). Cette production est en baisse de 22,86% par rapport à l’année précédente.
De cette production, 99,22% a été exportée pour faire place à une importation de 3,61
millions de tonnes métriques.
L’approvisionnement total était de 3,65 millions de TM.

1.3. Le gaz naturel


Il représente 8,1% des approvisionnements en énergie primaire. Fortement liée à la
production d’électricité thermique, la production de gaz naturel a connu un recul de 7,85%
par rapport à l’année 2006. En 2007, les champs Lion, Panthère, Espoir, Foxtrot et Baobab
ont permis d’approvisionner la Côte d’Ivoire à hauteur de 55,615 milliards de pieds cubes
soit 1,574 milliard de mètres cubes (m3).

1.4. L’hydroélectricité
La part de l’hydroélectricité dans les approvisionnements primaires est faible : 1,2%.
Avec 1 796,7 GWh en 2007, soit 32,6% de la production totale d’électricité,
l’hydroélectricité a connu une croissance de 19% en un an. Cette croissance est due à une
meilleure pluviométrie (27,6% d’apport d’eau supplémentaire dans les lacs par rapport à
l’année 2006).
L’année 2007 fait partie des trois années de plus forte production depuis les 20 dernières
années avec 1997 (1 878,8 GWh) et 2001 (1 799,8 GWh).

2. TRANSFORMATION D’ENERGIE
2.1. Production d’électricité d’origine thermique

L’essentiel des approvisionnements en gaz naturel est utilisé pour la production d’électricité
(87,25%) par trois centrales : Azito Energie, CIPREL et Vridi gaz. Outre ces trois centrales, il
existe des centrales décentralisées à combustible liquide (produits pétroliers) et un grand auto-
producteur (la Société Ivoirienne de Raffinage).
Pour générer 3 718, 76 GWh d’électricité (67,51% de la production totale d’électricité), ces
centrales ont consommé en 2007 :
▪ 1 220,01 millions de m3 de gaz ;
▪ 943,3 m3 de DDO ;
▪ 3 085,34 tonnes de HVO ;
▪ 2 270,83 tonnes de Gasoil.

La production d’électricité au gaz naturel représente 66,9% de la production nationale.

17
2.2. Raffinage
En 2007, 3,625 millions de tonnes de pétrole brut et de gaz naturel ont été transformées pour
sortir 3,287 millions de TM de produits pétroliers (3,404 millions de TEP), soit un rendement
de 93,90% en dessous des normes (entre 95 et 97%).
Ces pertes de raffinerie pourraient être attribuables à la fiabilité des données et /ou aux
équipements industriels.

2.3. Carbonisation du bois en charbon de bois


En 2007, la Côte d’Ivoire a produit 968,4 milliers de tonnes de charbon de bois par la
carbonisation de 9 683,68 milliers de tonnes de bois, soit un rendement moyen de 10%.

3. CONSOMMATIONS FINALES d’ENERGIE


En 2007, la consommation finale de toutes les formes d’énergie est de 5,318 millions de TEP,
la consommation d’énergie par tête d’habitant s’élève à 0,27 TEP.

Figure 2 : Consommations finales d’énergie par secteur en 2012 Source : SIE-Côte d’Ivoire 2012

3.1. Analyse par secteur


L’analyse sectorielle des consommations de 2007 donne une part importante accordée au secteur
des ménages avec 71,4% suivi de très loin des services (10,9%), des transports (9%) et de
l’industrie (6,4%). L’agriculture vient en dernière position avec seulement 1,9% de la
consommation d’énergie. Les utilisations non énergétiques représentent 0,5%.

3.2. Analyse par produit


Sur 5,318 millions de TEP consommées en 2007, la biomasse représente la première forme
d’énergie consommée avec une part de 75,5% suivi des produits pétroliers (16,4%), de
l’électricité (5,6%) et du gaz naturel (2,4%) destiné à l’industrie agroalimentaire.

18
Chapitre III- LES GRANDS AXES STRATEGIQUES DE LA POLITIQUE
ENERGETIQUE DE LA COTE D’IVOIRE
Les grands axes stratégiques de la politique énergétique de la Côte d’Ivoire tels que
définis dans le Document de Stratégie pour la Réduction de la Pauvreté (DSRP), la lettre
de politique de développement du secteur de l’électricité et le plan national de
reboisement, prennent en compte toutes les filières énergétiques et combinent les actions
tant au niveau de l’offre que de la demande de l’énergie.
I. LE DEVELOPPEMENT DU POTENTIEL HYDROELECTRIQUE ET DES
CENTRALES THERMIQUES A GAZ

La puissance totale installée en Côte d’Ivoire est actuellement de 1 210 MW avec


50% de thermique gaz et 50% d’hydraulique. En l’état actuel de la consommation
nationale (pointe de charge autour de 815 MW), les besoins nationaux sont
couverts, mais avec une faible capacité d’exporter vers les pays voisins.

Pour satisfaire à moyen et long termes une demande intérieure et extérieure en forte
croissance (8%), il s’agira de réaliser les projets du barrage de Soubré (270 MW),
de la 3ème tranche de la centrale thermique d’Azito (transformation en cycle combiné
de 450 MW) et d’une quatrième centrale thermique en cycle combiné de 370 MW.

D’ores et déjà, l’étape 3 de la centrale thermique de CIPREL a été engagée et


concerne une turbine de 110 MW DONT LA MISE EN SERVICE EST PR2VUE
POUR F2VRIER 2010. Il en sera de même pour les centrales thermiques en cycle
combiné de Grand-Bassam et de Vridi (120 MW chacune).

Cette option mixte (hydraulique/centrale thermique à gaz) permettra à la Côte


d’Ivoire d’atténuer les émissions de gaz à effet de serre d’une part et d’accroître son
indépendance énergétique d’autre part.

2. LE RENFORCEMENT DE LA POSITION DE LA COTE D’IVOIRE SUR LE


MARCHE DE L’ELECTRICITE DE LA SOUS-REGION

L’interconnexion permet aux sociétés d’électricité des pays concernés de conférer à leurs
différents réseaux, une grande souplesse d’adaptation aux variations de la demande, un grand
degré de sécurité d’approvisionnement et de rendre possible la réalisation d’économie d’échelle.

La coopération sous-régionale en matière d’énergie est en phase de développement avec la mise


en place d’un système d’échange d’énergie électrique ouest africain (EEEOA). La Côte d’Ivoire
doit donc accroître sa capacité de production en vue de maintenir sa position d’exportatrice nette
d’énergie au sein du EEEOA.

Pour ce faire, elle doit poursuivre sa politique d’interconnexion avec les pays de la sous-
région :
- Renforcement de l’interconnexion CI/Burkina Faso ;
- Mise en œuvre effective de l’interconnexion CI/Mali ;
- Etude de faisabilité de l’interconnexion CI/Guinée/Libéria/Sierra Leone.

3. L’AMELIORATION DU TAUX D’ACCES A L’ELECTRICITE

19
La Côte d’Ivoire a fait de l’énergie en général et de la promotion de l’électrification rurale en
particulier, une des composantes essentielles de lutte contre la pauvreté, tant en milieu rural
qu’en milieu urbain.
Les efforts financiers du Gouvernement ivoirien avec l’appui des partenaires au développement
ont permis, à ce jour, d’obtenir des résultats appréciables qui situent notre pays parmi ceux ayant
les meilleures infrastructures électriques dans la sous-région.
Le rythme de l’électrification, villes et villages confondus, n’a cessé de croître depuis
l’indépendance. De 14 en 1960, le nombre de localités électrifiées est passé à 2 627 localités
électrifiées au 31 décembre 2007.
Cette performance correspond à un taux d’accès à l’électricité de 72% et un taux de pénétration
de 30,5 %.
Dans le cadre de la lutte contre la pauvreté tant en milieu urbain et de la réduction des disparités
régionales, le programme d’électrification rurale décidé par le Gouvernement (200 localités par
an) devra être maintenu, car plus de 5 800 localités ne sont pas encore électrifiées.
A court et moyen termes, certaines populations vivant en zone rurale et très éloignées ne
pourront pas bénéficier des facilités offertes par le réseau électrique interconnecté. C’est
pourquoi, il convient d’explorer leur alimentation à partir de sources autonomes, notamment les
énergies renouvelables. L’électrification par système solaire photovoltaïque (50 localités en
moyenne par an), permettra de satisfaire les besoins primaires des populations (éclairage public,
centres de convivialité, centres de santé, écoles…).
D’une manière générale, les énergies renouvelables et leur valorisation sont les solutions idoines
pour amorcer un développement durable en milieu rural.
L’Etat devra créer une ligne budgétaire d’environ 30 milliards par an, pour le financement de
l’électrification rurale. La redevance annuelle d’électrification rurale (3 milliards FCFA) est
dérisoire par rapport aux besoins de financement. En tout état de cause, l’électrification devra
être considérée comme une infrastructure socio-économique, au même titre que les écoles, les
centres de santé, les routes, etc. qui bénéficient de financements conséquents de la part de l’Etat.

4.LE RENFORCEMENT DES ACTIONS D’ECONOMIES D’ENERGIE ET DE


PROMOTION DES ENTREPRISES DE SERVICES ECO-ENERGETIQUES.

La facture électrique de l’Etat s’élève à plus de 50 milliards chaque année et elle est en constante
croissance. Les actions qui sont déjà menées par le Ministère des Mines et de l’Energie pour la
réduction de la facture d’électricité de l’Etat doivent être renforcées. Le programme de
fourniture et de pose de batteries de condensateurs dans les établissements publics doit être
poursuivi et renforcé par des allocations budgétaires conséquentes de la part de l’Etat.

En plus du recours à l’appui financier pluriannuel de la part du Gouvernement, le Ministère des


Mines et de l’Energie devra rechercher des concours financiers ou techniques extérieurs destinés
à la maîtrise de l’énergie dans tous les secteurs d’activité (industrie, transport tertiaire et
domestique).

Un accent particulier devra être mis sur les campagnes de sensibilisation à l’utilisation
rationnelle de l’énergie.

5.LA POLITIQUE NATIONALE DE REBOISEMENT


Les prélèvements sur le massif forestier ont entraîné sa très forte dégradation. De 16 millions
d’hectares en 1960, la Côte d’Ivoire compte aujourd’hui moins de 3 millions d’hectares de forêts
qui, malheureusement, d’année en année, se consument dangereusement. Le plan national de
l’énergie de 1990 a mis en évidence des zones déficitaires en ressources ligneuses.

20
Pour remédier à cette situation alarmante, le Gouvernement entend renforcer sa politique de
reforestation par la promotion d’essences à croissance rapide et à productivité élevée.
L’objectif visé est entre autres :
▪ La production pour la satisfaction des besoins énergétiques futures, mais aussi pour l’alimentation
des animaux ;
▪ La protection de l’environnement par la réduction de gaz à effet de serre.
6. LA VALORISATION ENERGETIQUE DE LA BIOMASSE ET DES
RESIDUS VEGETAUX ET AGRO-INDUSTRIELS

La valorisation énergétique de la biomasse et des résidus végétaux et agro-


industriels répond à des objectifs économiques et environnementaux :

- Protection du couvert végétal ;


- Protection de l’environnement par la réduction des gaz à effet de serre (GES) ;
- Amélioration de l’efficacité énergétique pour le consommateur ;
- Incitation des entreprises agro-industriels, ce qui pourrait accroître leur compétitivité.

En amont et en aval de la filière bois de feu et à charbon, il est impératif d’améliorer les
techniques de carbonisation et de promouvoir l’utilisation de foyers améliorés.

7. LE DEVELOPPEMENT DES ACTIVITES D’EXPLORATION


PETROLIERE ET ACCROISSEMENT DE LA PART DE L’ETAT
DANS LES CONTRATS D’EXPLORATION-PRODUCTION

La recherche pétrolière donne des signes d’espoir quant à l’importance des réserves de pétrole et de gaz
naturel en Côte d’Ivoire. La découverte de nouveaux gisements et leur exploitation assureront à notre
pays une sécurité énergétique à long terme et des revenus substantiels pour soutenir son développement
socio-économique. Il y a donc lieu que l’Etat intensifie sa politique de promotion du bassin sédimentaire
et prenne une part importante dans les contrats d’exploration et de partage de production avec les
compagnies pétrolières privées. A moyen terme, cette part devrait passer de 10 à 20%.

8. LA VULGARISATION DE L’UTILISATION DU GAZ BUTANE

L’introduction du gaz butane dans les ménages permet aux populations d’accéder à une forme d’énergie
moderne, plus propre et plus propre et plus économique pour les besoins de cuisson et de chauffage.
Elle permet également de réduire la pression sur les ressources forestières. L’Etat devra améliorer la
mise en œuvre de sa politique de butanisation pour faciliter la disponibilité et la commercialisation du
gaz butane sur toute l’étendue du territoire, notamment dans les centres urbains.

9. LA MISE EN PLACE DU SYSTEME NATIONAL D’INFORMATION


ENERGETIQUE
La Côte d’Ivoire a fait de la mise en place d’un système national d’information
énergétique une de ses priorités. Le SIE constitue en effet, un outil
indispensable pour l’élaboration d’une politique énergétique rationnelle et une
planification énergétique cohérente. C’est pourquoi, sa pérennisation devra être
assurée par le concours financier et logistique de l’Etat.

21
Le SIE-Côte d’Ivoire s’inscrit dans la dynamique régionale du projet SIE-
UEMOA qui constitue un des programmes prioritaires de la politique
énergétique commune (PEC) de l’Union et un des principaux chantiers de
l’Union Africaine (UA).

22
Chapitre III : PRIORITES ET ORIENTATIONS NATIONALES EN FAVEUR D’UNE
ENERGIE DURABLE POUR TOUS EN CÔTE D’IVOIRE
INTRODUCTION

L’énergie est au centre de presque tous les défis majeurs, mais aussi des perspectives prometteuses, qui
se présentent au monde aujourd’hui et notamment à l’Afrique. Qu’il s’agisse d’emploi, de sécurité, de
production, de nourriture ou d’accroissement des revenus de l’adaptation au changement climatique,
l’accès de tous à l’énergie est essentiel. Un cinquième de la population mondiale, soit 1,3 milliard de
personnes, n’a toujours pas accès à l’électricité, dont près de 30 % en Afrique. Environ 2,7 milliards de
personnes dépendent du bois, du charbon ou des déchets animaux pour la cuisson et le chauffage. Dans
le contexte économique actuel, cette situation inéquitable est un obstacle majeur à l’élimination de la
pauvreté.
Dans les pays industrialisés, le problème énergétique provient du gaspillage et de la pollution, pas de la
pénurie. Dans le monde entier, l’utilisation inefficace de l’énergie nuit à la productivité économique et
les émissions liées à l’énergie contribuent pour une large part, au phénomène dangereux du
réchauffement planétaire. Les changements climatiques mettent tous les humains en danger, mais ce
sont les pauvres qui sont les premiers touchés et qui en subissent les conséquences les plus graves.
L’énergie durable, autrement dit une énergie accessible, abordable, plus propre et plus efficace, est
essentielle au développement durable. Elle permet aux entreprises de croître, de générer des emplois et
de créer de nouveaux marchés. Des millions d’enfants peuvent étudier après la tombée de la nuit et les
hôpitaux et les cliniques peuvent fonctionner correctement. Les pays peuvent bâtir des économies plus
résilientes et plus concurrentielles. L’énergie durable permet aux pays de surmonter les limites des
systèmes énergétiques du passé et de promouvoir une économie de l’avenir, fondée sur des énergies
propres.
SE4ALL (Sustainable Energy for All- Energie durable pour Tous).
-Développement durable en Afrique
En Septembre 2011, afin de placer la question de l’énergie au cœur des préoccupations, le secrétaire
général des Nations Unies a lancé l’initiative Energie durable pour tous (SE4All), qui fixe à l’horizon
2030 trois objectifs :
• assurer un accès universel aux services énergétiques modernes ;
• doubler le taux général d’amélioration de l’efficacité énergétique ;
• doubler la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique mondial.
Ces objectifs sont complémentaires. Les progrès enregistrés dans la réalisation de l’un d’entre eux sont
susceptibles de profiter aux autres. L’accès généralisé à l’énergie durable permettrait de stimuler la
croissance économique, d’améliorer l’équité et de protéger l’environnement. En Afrique, les défis sont
immenses mais les opportunités, aussi. La Côte d’Ivoire souhaite jouer sa partition et s’efforce de mettre
en place un programme d’action national au titre de l’énergie durable pour tous.
1-Le potentiel et les enjeux en matière énergétique
Quatre grandes formes d’énergies constituent l’essentiel des approvisionnements en énergies primaires
de la Côte d’Ivoire. En 2012, l’approvisionnement était de l’ordre de 12,14 millions de Tonnes
Equivalent Pétrole (TEP). Cette quantité est en hausse de 12,7 % par rapport à l’année 2011.
Les énergies renouvelables combustibles et déchets englobent le bois, les produits de défrichement
agricole et les résidus de produits agricoles (bagasse, rafle, coque, fibre de coco, cabosse de cacao). Elles
représentent 58,7 % des approvisionnements primaires. En 2012, la Côte d’Ivoire a produit 17,8 millions

23
de tonnes de bois et 84,3 milliers de tonnes de résidus (il s’agit de quantités valorisées en tonne
équivalent bois). En 2012, le pétrole brut constituait 28, 3 % des approvisionnements primaires. La
production se situait à 10,77 millions de barils de pétrole, soit environ 1,46 million de tonnes métriques
(TM). Cette production était en baisse de 13,1 % par rapport à l’année précédente. L’approvisionnement
total de la Côte d’Ivoire en pétrole brut était de 3,44 millions de TM. En 2012, les champs Lion,
Panthère, Espoir, Foxtrot et Baobab ont permis d’approvisionner la Côte d’Ivoire à hauteur de 59,4
milliards de pieds cubes de gaz soit 1,682 milliard de mètres cubes (m3). De cette production, 91,3 %
ont servi à la génération d’électricité. La part de l’hydroélectricité, avec 1 788,59 GWh en 2012 dans les
approvisionnements primaires, est faible : 1,3 %.
Production et consommation durable

APPROVISIONNEMENT EN ENERGIE PRIMAIRE EN 2012

Figure 1 : Approvisionnement en énergie primaire de la Côte d’Ivoire en 2012 source :


SIE- Côte d’Ivoire 2012
La transformation d’énergie

En 2014, le parc de production d’énergie électrique était équipé, par une puissance totale installée de
1 632 MW. Dont 1 028 MW de centrale thermique à gaz (soit 63 %) et 604 MW de centrale
hydroélectrique (soit 37).

Ouvrages de production Année de mise en service Puissance installée


Production 1632
Production hydroélectrique 604
Ayamé 1 1959 20
Ayamé 2 1965 30
Kossou 1972 174
Taabo 1979 210
Buyo 1980 165
Grah 193 5

Production thermique 1028


Vridi TAG 1984 100
CIPREL 1 1995 99
CIPREL 2 1998 111
AZITO 1 1999 148
AZITO 2 2000 148
CIPREL 3 2009 111
AGGREKO 1 2010 70
AGGREKO 2 2012 30
CIPREL 4 2013 111
AGGREKO 3 2013 100

24
L’énergie électrique produite à partir de ces capacités installées s’élevait à 8 201,7 GWh et se
décomposait comme suit : 23 % provenant de l’hydroélectricité et 77 % du thermique utilisant comme
combustible de gaz naturel, le HVO ou le DDO. Un effort est fait par l’Etat pour une plus grande
efficacité énergétique de ces installations avec l’inauguration en juillet 2015 du cycle combiné à la
centrale d’AZITO, il en sera de même très prochainement avec la mise en service du cycle combiné de
CIPREL. Cette nouvelle technologie contribuera à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Le
potentiel hydroélectrique national est évalué à 2 500 MW, avec seulement 25 % en exploitation à ce
jour. Ainsi, une stratégie de mise en valeur a-t-elle été adoptée en vue de permettre à terme de réduire
la part des combustibles fossiles dans le mix énergétique. Le réseau interconnecté de la Côte d’Ivoire a
permis au pays d’avoir, en fin 2014, un taux d’accès à l’énergie (nombre de personnes vivant dans les
localités électrifiées divisé par la population totale multiplié par cent) d’environ 78 % et un taux de
couverture (nombre de localités électrifiées sur le nombre total de localités multiplié par cent) de 43 %.
Au regard du rendement global du réseau électrique, de l’ordre de 79 %, et de l’utilisation qui est faite
des services énergétiques dans les différents secteurs d’activités, il est aisé de conclure que la Côte
d’Ivoire dispose encore d’un gisement important d’économie d’énergie. Sa valorisation va susciter la
mise en œuvre de grands projets sur l’efficacité énergétique. Pour satisfaire le besoin énergétique de
toute la population, la biomasse est l’énergie la plus utilisée. En effet la plupart des ménages ont recours
à cette énergie (bois de chauffe ou charbon de bois) qui représente 70 % de leur besoin en énergie. Sur
7,12 millions de tep consommées en 2012, la biomasse représente la première forme d’énergie
consommée avec une part prépondérante de 69,6 % suivie des produits pétroliers (21,1 %), de
l’électricité (5,3 %) et du gaz naturel (1,7 %). Cette consommation d’énergie par habitant s’élevait à
0,31 tep pour une population estimée à 23,064 millions. L’analyse sectorielle des consommations de
2012 donne une part importante accordée au secteur des ménages avec 67,5 %, suivi de très loin des
services (9,4 %), des transports (16 %) et de l’industrie (4,8 %). L’agriculture vient en dernière position
avec moins de 1 % de la consommation d’énergie. Les utilisations non énergétiques représentent 2,3 %.

CONSOMMATION FINALE D’ENERGIE PAR SECTEUR EN 2012

Figure 2 : Consommations finales d’énergie par secteur en 2012 Source : SIE-Côte


d’Ivoire 2012

2.Les défis pour l’énergie durable en Côte d’Ivoire

Pour une production et une consommation durable, plusieurs défis restent à relever, notamment :
• recourir aux sources d’énergies nouvelles et renouvelables ;
• utiliser des technologies efficientes énergétiquement aussi bien pour la production que pour la
consommation d’énergie ;
• utiliser des technologies faiblement émettrices de carbone, y compris les techniques moins
polluants d’exploitation des combustibles fossiles ;
• exploiter de manière rationnelle les sources traditionnelles d’énergie.

25
Les Etats de la région, réunis au sein de la communauté économique des Etats de l’Afrique de
l’Ouest (CEDEAO), ont pris toute la mesure du problème énergétique. Ainsi, en janvier 2006, les
chefs d’Etat et de gouvernement ont approuvé le livre blanc sur l’accès aux services énergétiques
des populations rurales et périurbaines pour la réduction de la pauvreté et l’atteinte des Objectifs du
millénaire pour un développement durable qui comportait des objectifs ambitieux pour l’accès à
l’énergie à l’horizon 2030. Dans ce cadre, les Chefs d’Etats de la CEDEAO ont adopté en 2012 les
politiques régionales d’efficacité énergétiques et d’énergie renouvelables, qui ont commencé à être
mises en œuvre sous l’impulsion du Centre des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique
de la CEDEAO (CEREEC).
L’énergie consommée est produite à partir de combustibles fossiles et de la biomasse qui détruisent
nos ressources naturelles (pétrole, gaz, charbon de bois et le bois de cuisson), surtout quand elle est
consommée de façon inefficiente.
Au niveau de la qualité du service électrique, les pertes et le temps moyen de coupure demeurent
encore élevés. Comment produire et consommer de façon durable l’énergie dont nous avons besoin ?
L’état a entrepris le remplacement gratuit des ampoules incandescentes par des lampes basse
consommation (LBC) en milieu résidentiel, et des audits énergétiques dans les bâtiments
administratifs afin de réaliser des économies d’énergies. La direction générale de l’énergie a, en son
sein, une direction de la maîtrise de l’énergie et des énergies renouvelables, dont la mission est de,
entre autres, contribuer à l’élaboration et suivre la mise en œuvre des politiques et des projets en
matière d’énergies renouvelables et d’efficacité énergétique. Il en est de même pour le suivi des
programmes d’amélioration des moyens de cuisson, de réduction des émissions de gaz à effet de
serre et des actions à mener dans le transport, l’industrie et le bâtiment, en vue de capter le potentiel
d’économie d’énergie et d’avoir une consommation durable. Les capacités de ces structures seront
renforcées pour permettre une plus grande efficacité dans l’exercice de leurs missions.
Le déséquilibre entre l’offre et la demande en énergie moderne, sur l’ensemble du territoire national,
pousse certaines localités rurales défavorisées à utiliser la biomasse pour satisfaire les besoins de
cuisson.
En Côte d’Ivoire, il existe un potentiel de flux solaire moyen d’environ 5 à 6 kWh/m2 jour pendant
six heures. De plus, le potentiel éolien existe mais reste assez mal connu en l’absence d’études (atlas
éolien) permettant d’identifier les vents dominants, ainsi que leur force et leur régularité.
La Côte d’Ivoire dispose d’un potentiel important de sites susceptibles d’accueillir des centrales
hydroélectriques de grande ou petite capacité. La biomasse est une ressource disponible en grande
quantité, mais utilisée de façon non durable. Malgré tous ces atouts, la part des énergies
renouvelables dans le mix énergétique est estimée à moins de 1,3 % en Côte d’Ivoire si on ne prend
en compte que la petite hydroélectricité ( ‹ 10 MW).
Où en sommes-nous par rapport au SE4LL ?
D’importantes actions sont en cours dans les domaines de l’efficacité énergétique, des énergies
renouvelables et de l’accès à l’électricité.
Ainsi, au niveau de l’efficacité énergétique :
-un programme de distribution de cinq millions de lampes fluo-compactes est en cours de
déploiement en vue de contribuer à la maîtrise de la demande nationale d’électricité :
-des audits sont en cours dans les bâtiments administratifs énergivores ;
-le nouveau code de l’électricité qui a été adopté :
•rend obligatoires et périodiques les audits énergétiques notamment dans les industries et les grands
bâtiments du tertiaire.
•introduit des normes et exigences d’efficacité énergétique pour les grands bâtiments neufs et les
équipements électroménager,
•instaure un système d’étiquetage énergétique des appareils électroménagers,
•exige la prise en compte de l’efficacité énergétique dans la production de l’électricité :
-l’installation et l’inauguration de la nouvelle centrale à cycle combiné d’AZITO, de même que la
mise en service prochaine de celle de CIPREL.

26
Toutes ces actions devraient contribuer à une meilleure maîtrise de la production et de la
consommation d’énergie.
Au niveau des énergies renouvelables, la Côte d’Ivoire ambitionne d’accroître la part des énergies
renouvelables dans le mix énergétique, en la faisant passer à 16 % en 2030.
Ainsi, plusieurs actions sont en cours dont entre autres :
•le processus de sélection de promoteurs pour la construction et l’exploitation d’une centrale solaire
photovoltaïque de 20 MW-crête ; d’une centrale à biomasse de 2 x 20 MW, d’une petite centrale
hydroélectrique de 8 MW, toutes trois connectées au réseau électrique national et de mini réseaux
alimentés par des sources d’énergies renouvelables pour l’électrification décentralisée ;
•le projet BIOKALA de construction d’une centrale biomasse de 2x20 MW.

Au niveau de l’accès à l’électricité, on citera entre autres :


•le programme Electricité pour tous (PEPT) qui vise à faciliter le raccordement des ménages par le
paiement initial de 1000 francs CFA et le remboursement du coût de branchement sur une période
de dix ans, avec pour ambition de raccorder près de 200 000 ménages par an ;
•le programme national d’électrification rurale (PRONER) qui vise à électrifier toutes les localités
de plus de 500 habitants à l’horizon 2016 et toutes les localités de la Côte d’Ivoire à l’horizon 2020.

III-LES SOLUTIONS ENVISAGEES


L’atteinte de l’objectif d’une énergie durable pour tous avant 2030 va nécessiter de développer et
mettre en œuvre des approches intégrées et une synergie entre différents projets et mesures. Les
solutions envisagées vont porter sur le cadre institutionnel et réglementaire, puis sur la disponibilité
de fonds pour le financement des actions, et par la suite sur l’accès aux services énergétiques propres
et aux technologie moins polluantes. Et enfin, il faudra promouvoir des énergies nouvelles et
renouvelables.
1-Le cadre institutionnel et réglementaire
Le projet SE4All étant coordonné par le ministère du Pétrole et de l’énergie, avec l’appui de la
CEDEAO, des plans d’actions d’énergies renouvelables (PANER), d’efficacité énergétique
(PANEE) et d’Agenda d’action SE4All sont en cours d’élaboration. Un atelier de validation du
rapport de base de ces plans d’actions regroupant toutes les parties prenantes nationales s’est tenu
le 20 juillet 2015 à Abidjan.
Des comités de suivi de ces plans d’actions ont été proposés afin de créer un cadre de concertation
multisectoriel permanent sur les questions d’accès à l’énergie durable. L’atelier national a
recommandé la mise en place de ces comités par arrêté interministériel.
Par ailleurs, ces plans d’actions qui cadrent parfaitement avec les objectifs du SE4All, intégreront
le programme national d’investissement pour l’accès aux services énergétiques en Côte d’Ivoire
(PNIASE-CI) qui s’achève en 2015, ainsi que tous les autres plans existants en relation avec cette
thématique.
Le gouvernement s’attache à l’harmonisation des textes réglementaires existants, afin d’intégrer
tous les aspects du développement durable ainsi que les objectifs de l’énergie durable pour tous.

2- Le fonds pour l’énergie durable

Le plan national de développement a estimé les coûts pour la mise en œuvre des réformes et des
projets du secteur de l’énergie en Côte d’Ivoire. Pour financer tous ces projets, il serait utile de
réfléchir à des mécanismes innovants de mobilisation de ressources.

27
3-L’accès à l’énergie

Pour les besoins de cuisson, la Côte d’Ivoire s’attache à promouvoir le biogaz à partir de déchets
agricoles et à rendre accessible les foyers améliorés dans le monde rural. Il faut aussi généraliser
l’accès au GPL surtout en milieu rural et périurbain. L’accès à l’électricité doit se faire par des
branchements subventionnés dans le cadre du PEPT, à travers un fonds revolving destiné aux
quartiers précaires, périurbains et au monde rural.
Il a également été retenu de renforcer l’électrification rurale décentralisée par système solaire et,
pour les besoins d’éclairage, d’utiliser les lampes solaires, surtout pour les habitations mal aérées.
Le gouvernement veille à trouver une adéquation entre les villages programmés, l’installation des
usines, les fonds disponibles au niveau du secteur de l’électricité et les entreprises de montage
électrique, afin de disposer d’une bonne planification dans le secteur énergétique.

4-L’efficacité énergétique
Dans ce domaine la Côte d’Ivoire s’efforce de prendre en compte, dans le programme national
d’efficacité énergétique, les axes suivants, figurant dans la politique régionale d’efficacité énergétique :
•l’éclairage efficace ;
•la cuisson durable ;
•la distribution électrique performante ;
•les normes d’efficacité énergétique et l’étiquetage portant sur les bâtiments et les appareils
électroménagers.
Pour ce faire, sont engagées des actions pour un meilleur cadre légal et réglementaire (en cours avec le
code de l’électricité et ses textes d’application) et une sensibilisation accrue des populations pour des
technologies efficaces et l’adoption de comportements nouveaux en matière d’usage de l’énergie.
5-Les énergies renouvelables dans le mix énergétique
Les énergies renouvelables sont économiquement compétitives pour les zones isolées et éloignées des
réseaux électriques. Il est ainsi prévu, dans le cadre du PRONER, de favoriser l’électrification rurale
décentralisée par des sources d’énergies renouvelables dans le mix énergétique, un cadre réglementaire
attractif est institué.
IV-La coordination et le suivi
Le renforcement des capacités de la direction générale de l’énergie contribue à une meilleure
coordination de toutes les actions liées à l’initiative énergie durable pour tous. Afin de permettre un
suivi des actions liées à l’initiative énergie durable pour tous. Afin de permettre un suivi des actions du
SE4All, certains indicateurs pertinents ont été proposés.
Les indicateurs nationaux proposés sont liés au suivi-évaluation des objectifs fixés par les Nations Unies
à l’horizon 2030 pour l’atteinte de l’énergie durable pour tous.

28
Sous-secteur Indicateurs
Objectif 1 :Assurer un accès
Aux services énergétiques modernes
universel
Accès à l’électricité Taux d’accès à l’électricité des ménages
Taux d’électrification des centres de santé
Taux d’électrification des établissements scolaires
Accès aux énergies modernes de
Taux de ménages utilisant une source moderne de cuisson
cuisson
Taux d’entreprises utilisant une source moderne d’énergie
pour le chauffage
Accès à la force motrice Nombre d’hectares irrigués
Nombre de plateformes installées
Nombre de motopompes solaires installées
Objectif 2 : Doubler le taux d’ Amélioration des actions d’efficacité énergétiques
Quantité en KWh d’économie d’énergie réalisée
Objectif 3 : Doubler le taux
Renouvelables dans le mix énergétique
d’énergies
Pourcentage d’énergies renouvelable dans le mix
énergétique

Conclusion et recommandations
La Côte d’Ivoire est engagée dans une perspective ambitieuse, inclusive et rationnelle de gestion de
l’énergie pour tous.
Nos modes de production et de consommation se traduisent par une exploitation excessive et croissante
des ressources naturelles. Ils affectent le climat, la diversité biologique, les équilibres naturels, voire la
stabilité de nos populations.
Aussi, notre pays s’attache à préserver nos ressources, conformément à notre engagement INDC
(Intended Nationally Determined Contributions), tout en valorisant nos potentialités au bénéfice des
populations. Ainsi, nous veillons à :
• sensibiliser et faire une communication de masse auprès de la population pour une utilisation
rationnelle de l’énergie ;
• faire en sorte que, de par la volonté politique du pays, nous passions de 0 % à au moins 10 % de
l’énergie renouvelable dans le mix énergétique :
• prendre un décret de création de l’agence de maîtrise d’énergie pour mettre en œuvre l’initiative
Energie pour tous ;
• inciter les industriels, les complexes hôteliers et les bâtiments publics à faire des audits énergétiques
périodiques.

29
Chapitre IV : INNOVATION TECHNIQUE ET FINANCIERE POUR LA CUISSON
AU CHARBON DE BOIS EN AFRIQUE : le cas de Soutra fourneau

Introduction
Le bois et les produits de la biomasse lignocellulosique constituent les premières sources d’énergie
domestique à travers le monde. En Afrique, ils constituent la première source d’énergie avec 47 %
du total contre 24,8 % pour le pétrole, 16,5 % pour le charbon, 10,4 % pour le gaz et 1,3 % pour les
autres sources d’énergie renouvelables- barrages hydroélectriques, énergie solaire et énergie
géothermique (AIE, 2002).
En Côte d’Ivoire, on estime à près de 90 % les ménages qui utilisent le bois de chauffage et le
charbon pour leurs besoins en énergie de cuisson (Djezou, 2009). La biomasse, quant à elle,
(essentiellement le bois de chauffage), représente 74 % de l’énergie primaire totale consommée dans
le pays. Les ivoiriens dépendent donc majoritairement de combustibles solides à usage domestique
et commercial, et cela a été le modèle au fil des années.
En effet, les besoins en matière de bois énergie sont très importants et s’accroissent au rythme de la
population, tandis que l’offre n’évolue pas au même rythme. Au Contraire, elle tend à décroître
comparée au dynamisme démographique, ce qui entraîne un déséquilibre du marché de bois énergie
avec pour conséquences des retombées négatives sur l’environnement, le bien-être social et la
sécurité alimentaire durable des populations.
Dans le souci de concilier le bien-être social, la lutte contre la précarité énergétique et le changement
climatique, le programme de foyers améliorés « soutra fourneaux » a été initié. Il vise aussi à
diminuer la pression sur les ressources ligneuses et à limiter les émissions de gaz à effet de serre,
responsables du changement climatique.

Les enjeux de l’amélioration de l’efficacité


énergétique des systèmes de cuisson
a) La déforestation et le changement climatique
La demande de bois de chauffe et en charbon de bois pour les usages domestiques est l’une des
principales causes de la déforestation en Afrique, avec pour conséquence la perte de la
biodiversité.
Même si, à ce sujet, de nombreuses incertitudes scientifiques demeurent sur la vitesse de
déforestation dans certaines régions et sur la capacité de stockage du carbone par les différents
types de forêts, le Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC)
affirme que la vitesse de la déforestation s’établit, par continent, à : 0,8 (0,4 à 1,1) GtC/an en
Asie : 0,7 (0,4 à 0,9) GtC /an en Amérique : 0,3 (0,2 à 0,4) GtC/an Afrique.
Malgré ces chiffres parfois trompeurs, le taux de déforestation en Afrique progresse plus
rapidement que dans certaines parties du monde. Chaque année, le continent perd près de quatre
millions d’hectares de forêts.
Les forêts, par la séquestration naturelle du carbone dans les sols et dans la biomasse forestière,
participent activement à la lutte contre le changement climatique (stabilisation de la quantité de
carbone dans l’air).
A l’inverse, leur destruction dans les grands bassins forestiers tropicaux (Amazonie, Congo,
Indonésie) contribue à l’augmentation de la concentration atmosphérique de gaz à effet de serre.
Les interactions entre les forêts et le changement climatique sont donc très étroites. En effet, la
déforestation libère le carbone naturellement stocké dans les forêts, mais réduit également la
capacité d’absorption globale de la biosphère, si bien qu’une tonne de carbone émise par

30
déforestation contribue plus à l’augmentation de la concentration atmosphérique de dioxyde de
carbone que l’émission d’une tonne de carbone fossile. Par ailleurs, les émissions de gaz à effet
de serre dues à la déforestation (essentiellement dans les régions tropicales) pendant les années
1990 ont été estimées à 1,6 GtC/an soit environ 20-25 % des émissions anthropiques mondiales
de gaz à effet de serre ou 80 % des émissions de dioxyde de carbone.

b) La sécurité énergétique
Dans la région de l’Afrique de l’ouest, le bois et le charbon de bois constitue une part immense
de la demande locale en énergie pour la cuisson. Cette source d’énergie permet de répondre,
principalement, aux besoins de consommation des ménages. Donc sans bois énergie, une grande
partie des familles n’aura pas accès à l’énergie pour les besoins domestiques, ce qui entraîne
des risques d’insécurité énergétique.
Pour ce faire, les populations ont recours à des quantités de plus en plus élevées de bois énergie.
Le recours incontrôlé aux déchets de cultures comme source d’énergie peut également conduire
à un appauvrissement des sols. Enfin, le bois de feu et le charbon étant cher, il devient de plus
en plus inaccessible à une majorité de la population, ce qui entraîne une insécurité énergétique.

c) Les enjeux économiques et sociaux


Actuellement, la majorité des ménages ivoiriens utilisent, pour faire la cuisine, des foyers
traditionnels à charbon acheté environ 5 000 francs CFA, d’une efficacité inférieure à 20 %,
d’une durée de vie de six mois à deux ans maximum et qui produisent des fumées nocives pour
la santé.
Le gaz, réservé aux ménages les plus aisés, n’est pas toujours disponible et certains plats ne
peuvent être cuisinés qu’avec du charbon de bois. Les dépenses des ménages pour acheter le
charbon représentent environ 20 % du budget mensuel des familles (AIE, 2002). L’utilisation
du charbon de bois est une habitude pour beaucoup de ménages ivoiriens. Pour les plats longs à
cuisiner, le coût de la cuisson est généralement moins élevé avec le charbon.
Toutes les Ivoiriennes utilisant régulièrement le charbon de bois, pour un usage familial ou
professionnel (restaurants, cantines), sont des utilisatrices potentielles du Soutra Fourneau car
le charbon de bois est utilisé aussi bien en zone rurale qu’urbaine et périurbaine. Même chez les
ménages les plus aisés qui utilisent souvent le gaz, la femme qui cuisine utilise aussi
régulièrement un foyer traditionnel pour préparer à l’extérieur certains plats comme les « braisés
» ; elle apprécie alors le Soutra Fourneau car il lui permet de cuisiner à l’intérieur en laissant
l’endroit propre et sans avoir trop chaud. Le gaz n’est donc pas un concurrent.

d) L’efficacité énergétique, la santé et la sécurité des utilisateurs

Avec l’intensification de la déforestation et la faible efficacité des systèmes de cuissons


traditionnelles, la promotion et la diffusion de fourneaux améliorés abordables (ICS – Improved
Cook Stove) pour les ménages ivoiriens s’avèrent une nécessité. Les campagnes de sensibilisation
aideront les ménages ivoiriens à remplacer les fourneaux de cuisson à faible efficacité énergétique
réduisant ainsi les émissions de gaz à effet de serre.
Dans un fourneau traditionnel, le charbon incandescent est en contact direct avec le métal ce qui
augmente les risques de brûlures et réduit drastiquement sa durée de vie. L’usage des fourneaux
traditionnels a d’autres conséquences négatives : la dispersion des cendres, des émanations de
fumée, un fort dégagement de chaleur dans les pièces de vie. Cette pollution intérieure des
habitations liée à l’utilisation de fourneau traditionnel est responsable de maladies pulmonaires
(Voire de l’apparition de cancers) qui représentent l’une des premières causes de mortalité en
Afrique subsaharienne. En Afrique de l’Ouest, on constate 400 à 610 décès par million d’habitants
chaque année et en Côte d’Ivoire, environ 22 millions d’hab. x 400 soit minimum 8 800 décès par
an.

31
3) L’approche développée par Soutra Fourneau
Grâce aux activités de conseil et aux prises de participations au capital de PMEs en Afrique
subsaharienne, Ecosur Afrique a constaté que des foyers améliorés sont produits de façon artisanale
au Ghana et au Togo depuis des années et que plusieurs sociétés ont récemment installé des sites de
production au Nigeria, au Kenya et en Tanzanie (principalement des sites d’assemblage de
composants fabriqués en Chine). En Côte d’Ivoire, ils sont totalement absents alors que plus de 80
% des 22 millions d’Ivoiriens utilisent du charbon pour cuisiner, que la déforestation progresse
chaque année, que le pouvoir d’achat des ménages est en baisse et que les conséquences de
l’utilisation des foyers traditionnels sur la santé des femmes sont très néfastes. Ecosur Afrique a
d’abord importé les premiers fourneaux depuis son site de fabrication au Ghana et a lancé la marque
Soutra Fourneau. Face au succès (plus de 20 000 fans Facebook), la mise en place d’une production
artisanale locale a débuté en formant des jeunes au travail de l’argile et du métal. L’objectif est de
rendre accessible au plus grand nombre un produit de grande qualité pour limiter la déforestation,
réduire les émissions de CO2 mais aussi améliorer le pouvoir d’achat et la santé de la population
ivoirienne et en particulier celles des femmes.
a) La description et les objectifs du Soutra Fourneau
Le Soutra Fourneau, de type Jiko, est un modèle éprouvé depuis de nombreuses années notamment
au Kenya, puis au Ghana, au Togo, au Mali. Il est composé d’un insert céramique qui a la propriété
de conserver la chaleur et d’une arrivée d’air contrôlée ce qui lui confère une efficacité élevée
d’environ 30 %. Il dégage moins de chaleur dans la pièce, émet moins de fumées nocives et ne laisse
pas les cendres se disperser dans la maison, protège le carrelage des fissures dues à la chaleur. À
titre d’illustration, l’utilisation d’une trentaine de fourneaux à Abidjan permet de préserver un
hectare de forêts en Côte d’Ivoire, le pouvoir d’achat des ménages est amélioré et la santé des
femmes et des enfants est préservée.
Le fourneau est fabriqué à partir d’argiles provenant des environs d’Abidjan qui sont mélangées et
préparées pour leur donner la forme de l’insert qui compose le « cœur » du fourneau. Parallèlement,
des tôles de métal (souvent de récupération) sont découpées et travaillées pour former la base du
foyer amélioré. Après séchage puis cuisson pendant plusieurs heures dans un four artisanal, l’insert
est assemblé avec la structure métallique qui est ensuite peinte en noir. Le logo et un numéro
d’identification sont posés manuellement sur le fourneau.
Le Soutra Fourneau permet d’économiser jusqu’à 10 % du budget mensuel des ménages qui peuvent
être alloués à d’autres postes de dépenses comme la santé et l’éducation. Pour les femmes qui
tiennent des restaurants, le Soutra Fourneau est un investissement qui permet d’augmenter
rapidement et significativement les bénéfices. Le gain de temps dans la cuisson permet la réalisation
d’autres activités éventuellement génératrices de revenus. Les faibles émissions de fumées
contribuent à faire baisser les dépenses de santé et une dizaine d’emplois directs ont été créés. Ecosur
Afrique souhaite à l’avenir tendre vers la parité homme/femme.
Adaptée au contexte africain, cette technologie de cuisson améliore les conditions sanitaires,
soutient le développement économique et permet de diminuer la précarité énergétique dans des
zones isolées.
Afin de rendre les foyers améliorés accessibles au plus grand nombre et dans la perspective de mieux
quantifier leur impact en matière de développement durable et de réduction des émissions de gaz à
effet de serre, la diffusion de ce type de technologie s’inscrit généralement dans le cadre d’un
programme labellisé Gold Standard en vue de l’obtention de crédits carbone.
Le second objectif du Soutra Fourneau est de résoudre les problèmes sanitaires et environnementaux
liés à l’utilisation des énergies de source non renouvelable.
En effet, le Soutra Fourneau préserve la ressource en consommant moins d’énergie qu’un fourneau
traditionnel lors de la préparation d’un repas.
b) L’innovation technique

32
La technologie du Soutra Fourneau revêt plusieurs avantages. C’est une véritable source
d’innovation technique et sociale. Le premier caractère innovant concerne ses caractéristiques
thermodynamiques. Soutra Fourneau est un fourneau dont l’intérieur en céramique retient la chaleur
des braises, ce qui fait que la cuisson peut même continuer quelque temps après l’extinction des
braises dans le fourneau.
La conception de ce fourneau a été pensée pour minimiser la consommation de charbon de bois en
limitant les déperditions de chaleur. L’utilisateur adopte la même posture pour cuisiner avec ce
fourneau qu’avec un fourneau traditionnel.
En outre, il y a moins de dégagements de chaleur autour du fourneau, idéal pour cuisiner pendant la
saison des pluies. La durée de vie du Soutra Fourneau est plus longue au moins cinq ans
comparativement aux fourneaux traditionnels, dont la durée de vie est autour de deux ans. Le
fourneau pèse environ 7 kg, il est suffisamment lourd pour être stable mais peut être déplacé d’une
pièce à une autre.
Le Soutra Fourneau permet une bonne gestion de la ressource naturelle par conséquent il préserve
les forêts. En effet, avec Soutra Fourneau, une petite quantité de charbon de bois est suffisante pour
cuire les plats les plus longs. À titre d’exemple, pour une dépense de 500 francs CFA de charbon de
bois avec un fourneau traditionnel, une dépense de 200 à 250 francs CFA permettra de cuire le
même plat avec le Soutra Fourneau.
Au niveau social, le fait de rendre ces foyers améliorés largement accessibles aux populations peut
avoir beaucoup d’avantages sur le plan sanitaire, social et économique. Par exemple, les familles
peuvent consacrer plus de temps à d’autres activités en consacrant moins de temps à l’achat de
combustible et à la préparation des repas. Les entreprises locales peuvent émerger à travers la mise
en place des nouvelles industries de fabrication de foyers améliorés (ICS 6) tout en améliorant les
conditions de vies des populations.
En outre, la préparation des repas est plus agréable et plus sûre car elle se fait dans de meilleures
conditions : les risques de brûlures sont réduits, il y a moins de fumées nocives pour la santé et
moins de dégagements de chaleur.
c) L’innovation financière
Le système des crédits carbone s’applique dans les pays en développement pour toute activité
réduisant les émissions de gaz à effet de serre : énergies renouvelables, substitution de combustibles
fossiles, efficacité énergétique, traitement des déchets, etc. Les crédits carbone constituent un revenu
complémentaire perçu en phase d’exploitation des projets. Ils sont principalement vendus aux
gouvernements et entreprises des pays industrialisés. Les transactions sont structurées au comptant
ou à terme, de gré à gré ou sur des Bourses réglementées.
L’intérêt du système est donc double : I) promouvoir le transfert de technologies propres dans les
pays en développement ; II) diminuer la charge financière induite par l’adaptation des pays
industrialisés à la lutte contre le réchauffement planétaire.
L’obtention de crédits carbone est également motivée par la recherche d’une certification tierce
permettant de mesurer de façon objective et impartiale l’impact d’un projet dans la lutte contre le
changement climatique.
À ce jour, plus de 9 000 projets bénéficient du système des crédits carbone dans le monde depuis
2005. Chaque tonne d’émission CO2 évitée ouvre droit à un crédit de carbone. 1 milliard de dollars
américains de crédits carbone ont été échangés en 2014.
Il existe trois certifications principales : La quasi-totalité des projets de crédits carbone est certifiée
auprès d’un des trois standards listés ci-dessous. Chaque label dispose de ses procédures et organes
de supervision et comporte des spécificités. L’enregistrement d’un projet sous deux standards
permet, le cas échéant, d’arbitrer entre les différents marchés en fonction des niveaux de prix. Plus

33
de 90 % des projets de réduction d’émissions CO2 utilisent l’une des trois certifications : Mécanisme
de développement propre (MDP), Verified Carbone Standard (VCS) ou Gold Standard (GS).

Association
Internationale des
Fondateurs Nations-Unies +120 ONGs
Marchés
Carbone(IETA)
Projets enregistrés 7 800 1 200 230
Crédits Carbone
1 600 millions 160 millions 70 millions
délivrés

Les crédits carbone s’échangent sur les marchés réglementés et volontaires. Les crédits carbone
émis sur le marché réglementé (MDP) peuvent être utilisés par des entreprises/États pour respecter
leurs obligations légales de réduction d’émissions CO2. Les crédits carbone émis sur le marché
volontaire (VCS, Gold Standard) sont utilisés par des entreprises/collectivités (communication) ou
citoyens pour compenser volontairement leurs émissions de CO2. Les frontières entre les deux
marchés sont parfois poreuses : certains systèmes d’échanges d’émissions reconnaissent le recours
aux crédits volontaires.
Ecosur Afrique a initié un programme de diffusion des foyers améliorés en Côte d’Ivoire dans le
cadre de la certification volontaire labellisée Gold Standard (Programme d’activités n° 2506,
enregistré en juillet 2015). La valorisation des crédits carbone aura pour objectif de permettre aux
ménages ivoiriens d’acquérir des foyers améliorés à un prix abordable.
Conclusion & perspectives
Le Soutra Fourneau permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre, car l’utilisation du
charbon pour la cuisson des aliments demeure l’une des principales sources de déforestation et
d’émissions de CO2 en Afrique de l’Ouest. Les crédits carbone, aussi appelés réductions
d’émissions, peuvent être produits grâce à la dissémination de foyers de cuisson efficaces en Côte
d’Ivoire car elle contribue à la réduction de la déforestation et donc à la baisse des émissions de
dioxyde de carbone issues de la combustion de combustibles solides non renouvelables. Il s’agit
d’un équipement basique mais aussi d’une technologie de cuisson qui pourrait s’avérer
révolutionnaire si son utilisation était généralisée.

34
Chapitre V : La contribution des entreprises énergétiques au développement
durable en Côte d’Ivoire
Introduction
Il est largement reconnu que le secteur privé joue un rôle de plus en plus actif dans le
développement de toute nation ; sa capacité à générer une croissance inclusive et durable dans
les pays en développement n’est plus à démontrer.
L’entreprise constitue aujourd’hui un puissant acteur du développement durable si la Côte
d’Ivoire, ambitionne être un pays émergent à l’horizon 2020. En dépit de cette réalité, la
contribution des entreprises au développement durable est très souvent jonchée de contraintes
de diverses natures qui demandent une certaine attention.
Le présent document a pour finalité de présenter la perception qu’ont les entreprises du secteur
privé ivoirien du développement durable en Côte d’Ivoire. Il s’agira de faire l’état des lieux du
développement durable dans le secteur privé ivoirien, puis de proposer des recommandations
concrètes susceptibles de favoriser une meilleure prise en compte des principes du
développement durable par le monde des entreprises en Côte d’Ivoire. Ce chapitre traite à la
fois des défis et enjeux du développement durable, selon le secteur privé ivoirien (état des lieux)
et des attentes et recommandations qu’il émet en vue de contribuer à l’ambition légitime de
l’émergence de la Côte d’Ivoire.
1) L’état des lieux du développement durable en Côte d’Ivoire
Depuis quelques années, on assiste en Côte d’Ivoire à une véritable prise de conscience par le
monde des entreprises des véritables enjeux du développement durable. En effet, de nombreuses
entreprises, notamment les multinationales et les grandes entreprises, se dotent de plus en plus
de directions en charge des questions de développement durable et de responsabilité sociétale.
Ce vaste mouvement de prise de conscience n’est pas le fruit du hasard. Il sied d’indiquer que,
dès le début des années 1980, le concept du développement durable a progressivement pris une
importante place dans les affaires, et cela sous la pression des organisations internationales de
lutte pour la protection de l’environnement, des ONG et des organismes de financement.
Les affaires Enron aux États-Unis ou les catastrophes écologiques provoquées par des entités
économiques (Bhopal, 1984 ; marée noire du delta du Niger, 2010, etc.) ont ravivé le débat sur
la question d’une éthique des affaires.
En Côte d’Ivoire, les catastrophes écologiques telles que l’affaire du Probo Koala survenue en
2006, causant la mort et l’intoxication de dizaines de milliers de personnes (déversement de
produits toxiques dans une dizaine d’endroits de la ville d’Abidjan), ainsi que la catastrophe de
Jacqueville (déversement accidentel d’une quantité importante de pétrole brut dans la mer) sont
deux faits majeurs qui ont amplifié la prise de conscience au plan national des enjeux
environnementaux et sociaux de l’activité économique.
Progressivement, les autorités étatiques, sur la base d’accords ratifiés en faveur de la protection
de l’environnement, se sont approprié la question avec la mise en place d’un ministère de
l’Environnement depuis 1981, qui est devenu ministère de l’Environnement, de la Salubrité
urbaine et du Développement durable depuis 2011.
Par ailleurs, le cadre institutionnel et réglementaire connaît une avancée notable avec l’adoption
de nombreux textes faisant la promotion du développement durable auprès du secteur privé. Ce
sont entre autres :

35
•la loi n° 88-651 de juillet 1988 portant protection de la santé publique et de
l’environnement contre les effets des déchets toxiques et nucléaires et des substances
nocives, dont la spécificité réside en l’approche régionale des problèmes environnementaux
;
• le Code de l’environnement de 1996 ;
• le décret relatif aux études d’impact environnemental et social, 1997 ;
• le Code de l’eau, 1998 ;
• le décret « pollueur-payeur », 2012 ;
• le décret du 25 juillet 2013 portant création du ministère de l’Environnement, de la
Salubrité urbaine et du Développement durable (MINESUDD) ;
• le décret n° 2013-327 du 22 mai 2013 portant interdiction de la production, de la
commercialisation, de l’importation, de l’utilisation et de la détention des sachets plastiques
;
• la loi n° 2014-427 du 14 juillet 2014 portant Code de l’électricité ;
• la loi n° 2014-390 du 20 juin 2014 d’orientation sur le développement durable, etc.
Ces différents règlements affichent clairement la volonté de l’État ivoirien de faire du
développement durable, particulièrement de la protection de l’environnement et
l’amélioration du cadre de vie, une réalité dans le contexte économique national.
Par ailleurs, il revient de noter que le secteur privé et son organe de représentation qui est
la CGECI ne sont pas restés en marge des initiatives locales entreprises en faveur du
développement durable. En effet, la CGECI, par l’entremise de ses commissions
Gouvernance RSE (GRSE) et Qualité, Hygiène, Sécurité, Environnement (QHSE), a
entrepris depuis quelques années un important programme de sensibilisation de ses
membres adhérents aux enjeux du développement durable pour l’activité économique ;
aucun secteur d’activité n’échappe à ce programme (banques, assurances, Bâtiment,
Agriculture, Télécoms, etc.).
L’événement majeur qui marque le lancement de ce programme a été le 1 er forum sur les
enjeux de la responsabilité sociétale de l’entreprise en Côte d’Ivoire (2012). À sa suite,
d’importantes conférences en collaboration avec certains partenaires au développement
(AFD, PNUD, BAD, FAO, PNUE, etc.) ont été réalisées dans le seul but d’apporter aux
entreprises de nouvelles solutions plus durables pour leurs activités respectives dans un
contexte économique en pleine mutation.
Plus de 1 500 entreprises ont été sensibilisées sur la problématique du développement
durable. La tendance aujourd’hui consiste pour le patronat ivoirien à accompagner ses
membres adhérents dans des démarches de responsabilité sociale. Cependant, en dépit de
l’engouement que suscite la thématique du développement durable en Côte d’Ivoire, de
nombreux freins inhibent encore son essor. La plus importante de ces contraintes est
vraisemblablement le déficit d’implication des acteurs nationaux dans un partenariat
gagnant-gagnant. En effet, il est récurrent de constater que les premiers acteurs de
l’économie nationale, à savoir les entreprises, ne sont pas toujours associés dès le départ à
l’élaboration des textes de loi et/ou réflexions, ceux-là mêmes qui sont les protagonistes les
plus importants dans l’application des résolutions nationales en faveur du développement
durable. Par conséquent, cela aboutit dans la majeure partie des cas à des difficultés
d’application des textes concernés, ne favorisant pas ainsi leur appropriation par l’ensemble
des entreprises. Pourtant, l’une des valeurs sacro-saintes du développement durable est
l’implication de tous les acteurs (parties prenantes) au processus de prise de décision.

36
Aussi, d’autres défis importants sont à étudier pour favoriser l’ascension du développement
durable dans le secteur privé ivoirien. Sans prétendre à l’exhaustivité, on peut les résumer
dans les points suivants.
a) L’accès à l’électricité et le développement des énergies alternative
Le développement d’un pays ne peut se faire sans l’énergie. L’État, dans le cadre de la mise
en œuvre de son plan de développement énergétique, a entrepris d’importantes actions en
vue de favoriser une fourniture d’énergie électrique, en quantité mais aussi en qualité, aux
ménages ainsi qu’aux entreprises. Aussi, en vue de soutenir la croissance du secteur
industriel qui prévaut en ce moment, ces efforts de l’État sont à poursuivre.
 En 2014, on a assisté à l’adoption d’une loi portant le nouveau Code de l’électricité.
La particularité de cette loi est qu’elle entend positionner la Côte d’Ivoire comme
leader du marché des énergies en :
• développant l’énergie électrique et favorisant l’accès à cette énergie ;
• promouvant le développement des énergies nouvelles et renouvelables (faire
passer la consommation des énergies renouvelables dans le mix énergétique de 3 %
à 20 % d’ici 2030) ;
• favorisant la maîtrise de l’énergie (efficacité énergétique, encouragement au
progrès technologique) et réduisant l’impact du système électrique sur
l’environnement (contribution au développement durable).
 En réalité, celle-ci offre d’importantes opportunités car les activités de production,
de transport, de distribution, d’importation, d’exportation et de commercialisation
de l’énergie électrique ne constituent pas un monopole de l’État. Bien qu’elle ait été
saluée par l’ensemble du secteur privé ivoirien, cette mesure va nécessiter un délai
de mise en œuvre sur le terrain lié à l’évolution des technologies et de son coût
d’accès.
En effet, les énergies alternatives telles que : l’énergie hydraulique dont le potentiel sous-
exploité est estimé environ,10 TWh ;
 L’énergie solaire est encore inaccessible (le coût d’accès à l’énergie solaire reste
très élevé) ;
 La biomasse énergie est considérée comme la source d’énergie la plus utilisée en
Côte d’Ivoire (charbon de bois). Cependant, la production d’électricité reste encore
faible ;
 L’énergie issue des déchets industriels et domestique reste peu développée.
Le développement des énergies alternatives demande, au-delà du simple cadre réglementaire,
d’importants moyens financiers pour favoriser leur développement (suppression des barrières
tarifaires sur certains matériaux d’importation ou au commerce de services énergétiques dans
le secteur privé, etc.).
b) Les activités économiques, l’environnement et le changement climatique
On a enregistré ces dernières années en Côte d’Ivoire de nombreux cas d’entreprises
sinistrées du fait de la variabilité climatique, notamment dans le secteur agricole. Ce secteur,
comparativement aux autres secteurs d’activité, a enregistré entre 2013 et 2014
d’importantes pertes, dues essentiellement aux inondations causées par les pluies
diluviennes qui se sont abattues sur le territoire durant cette période (les entreprises du
secteur en ont payé le prix fort) ou des incendies (ex. Gestoci en zone portuaire, zone
industrielle).

37
La variabilité climatique est bien réelle et ses conséquences pour l’activité économique le
sont davantage. À l’échelle internationale, plusieurs initiatives sont entreprises par la
communauté Internationale pour lutter contre le changement climatique et contre ses effets
pervers pour l’activité économique (plan d’adaptation, stratégie de lutte contre le
changement climatique, etc.).
En Côte d’Ivoire, même si l’on assiste ces deux dernières années à une prise de conscience
des enjeux de ce phénomène (ateliers, conférences-débats, etc.), des actions concrètes
émanant des pouvoirs publics font encore défaut. Pour preuve, il n’existe à ce jour aucune
disposition prévue par les autorités pour assister les entreprises victimes des effets pervers
du changement climatique ou du moins pour assurer la résilience de l’activité économique
face au changement climatique (exemple du secteur agricole).
À côté de ces faits relatifs au changement climatique et à ses effets sur l’activité
économique, on peut noter également les problèmes d’assainissement et de sécurité que
connaissent les zones industrielles et portuaires en Côte d’Ivoire. En effet, les rejets des
structures industrielles et/ou installations classées sont encore évacués dans le milieu naturel
parce que les plates-formes ne disposent pas de dispositif de collecte type station. Les
champs captant de l’eau brute sont envahis par les populations et leurs habitations (non-
respect de la réglementation). Ainsi, la nappe phréatique d’Abidjan menacée risque de poser
de gros problèmes environnementaux.
Au niveau de la gestion des déchets industriels et domestiques, bien que des dispositions
aient été prises au niveau de la salubrité, on note que le tri des déchets n’est pas systématique
à tous les niveaux comme dans certains pays. Lorsque le tri est réalisé par certaines
entreprises, les déchets sont remis ensemble parce que les zones de stockage (intermédiaire,
définitif) ne sont pas organisées pour les recevoir. Enfin, il n’existe pas en Côte d’Ivoire
toutes les structures modernes indispensables pour traiter l’ensemble des déchets.
Dans le même ordre d’idées, le mode de transport des biens et des marchandises n’a pas
connu d’évolution ; nous en sommes toujours au mode de transport individuel (voitures,
camions, bus, etc.). Pourtant, concernant la seule lutte contre les changements climatiques,
ce secteur est responsable d’une majeure partie des émissions brutes de gaz à effet de serre
en Côte d’Ivoire (environ 25 % des émissions). Il constitue aujourd’hui une des causes du
dérèglement climatique. En effet, le mode de transport collectif de grande masse (type train,
tramway à base de l’électricité) est à développer à Abidjan et entre les villes importantes.
Avec l’évolution des technologies nous voyons apparaître de nouveaux modes de transport
comme les véhicules hybrides et électriques. Ne convient-il pas de mener une réflexion pour
se préparer à prendre en compte et accompagner cette technologie ?
c) La fiscalité environnementale et la clarification des rôles des agences nationales de
protection de l’environnement
Dans l’optique de faire respecter la réglementation environnementale, l’État a mis en place
des agences nationales de protection de l’environnement ainsi qu’un système fiscal
environnemental pour prévenir, voire compenser, les dommages causés à l’environnement.
Concernant la fiscalité environnementale, une récente étude du ministère de
l’Environnement et du Développement durable (2015) révèle l’existence d’environ dix-neuf
(19) prélèvements fiscaux en faveur du financement de la protection environnementale en
Côte d’Ivoire. Toutefois, il faut noter que ces taxes sont, dans la plupart des cas, prélevées
à tort. En effet, il est important de faire remarquer que, dans certains cas, ces taxes ne se
sont pas toujours utilisées pour le motif pour lequel elles sont prélevées (taxe reversée au

38
budget de l’État mais non redistribuée). Une situation malheureuse qui conduit les autorités
en charge de la protection de l’environnement à rechercher tous azimuts des fonds pour le
financement de leurs activités. Conséquence : ce sont les entreprises qui sont talonnées (ex.
: taxe initiée par le Centre ivoirien antipollution-CIAPOL pour la destruction des déchets
solides, loi de finances 2015 ou frais de prestations de l’Agence nationale de
l’environnement (ANDE) en matière d’évaluations environnementales, 2014-2015).
Concernant les agences nationales de l’environnement, il est important de faire remarquer
qu’en Côte d’Ivoire il existe plusieurs agences nationales de protection de l’environnement
dont les missions en interface mériteraient que soient apportées des clarifications (exemple
du CIAPOL et de l’ANDE pour les études d’impact environnemental et social-EIES et les
audits environnementaux). Par ailleurs, le secteur privé n’est pas partie prenante dans la
gouvernance de ces entités. Ce sont là des faits qui sont rédhibitoires pour le développement
de l’activité économique.
Aussi, avant de clore ce chapitre, il convient d’indiquer que la fiscalité environnementale
en Côte d’Ivoire, à l’opposé de celle de certains pays du Nord (France, Danemark, Suède,
etc.), a une visée purement dissuasive. Or, l’un des principes phares de la fiscalité
environnementale qui est le principe bonus-malus recommande ce qui suit : « Toute action
à l’encontre de l’environnement doit être dissuadée ; a contrario, une action visant à faire la
promotion de l’environnement doit être encouragée, voire récompensée. » Ce dernier aspect
de la fiscalité environnementale est quasi inexistant dans le système fiscal environnemental
ivoirien. En effet, sur le terrain, de nombreuses entreprises lancent des actions dans le but
de réduire significativement l’impact de leurs activités sur l’environnement (plan de gestion
environnementale, système de management environnemental, démarche RSE, etc.) Pis, ces
entreprises qui sont a priori de bons élèves en matière environnementale reçoivent le même
traitement que celles qui polluent en toute conscience l’environnement. Une pareille
situation ne saurait favoriser une meilleure prise en compte des principes du développement
durable par la communauté des entreprises.
d) L’absence d’un cadre financier et réglementaire incitatif pour la responsabilité
sociétale de l’entreprise (RSE) et l’économie verte
L’année 2014 a vu l’apparition d’une loi d’orientation du développement durable. D’après
les dispositions de cette loi, toutes les organisations en Côte d’Ivoire, publiques ou privées,
sont invitées à s’inscrire dans une démarche de responsabilité sociétale (RS). Par
conséquent, elles devront produire périodiquement un rapport annuel extra-financier qui
présente leurs actions en faveur du développement durable.
Cette loi précise également qu’il est prévu une taxe dont l’objectif sera d’alimenter un fonds
mis en place pour le développement durable. Au regard de ce qui précède, on est tenté de
voir en cette loi une nouvelle stratégie de l’État d’imposer la RSE, qui relève par essence
d’une décision volontariste de l’entreprise, mais aussi d’asseoir une nouvelle taxe en faveur
de l’environnement et du développement durable. Aussi, à la surprise générale, cette loi ne
prévoit aucune mesure d’accompagnement pour les entreprises faisant leurs premiers pas
dans le développement durable (mise en place d’une démarche RSE, rédaction de rapports
extra-financiers, etc.). Aussi, elle ne prévoit pas de mesures d’encouragement (crédit
d’impôt environnemental, dégrèvements fiscaux, primes spécifiques remboursables, etc.) à
l’attention des entreprises faisant montre de leurs qualités en matière de développement
durable (production responsable, utilisation de technologies propres de production, activités

39
vertes telles que la collecte, le traitement et la valorisation des déchets, activités liées aux
énergies renouvelables et à l’efficacité énergétique, etc.).
Dans le même ordre d’idée, le décret relatif aux études d’impact environnemental de 1996
ne prévoit nulle part dans ses dispositions des incitations pour les entreprises mettant en
place des plans de gestion environnementale pour corriger les impacts potentiels de leurs
activités sur l’environnement révélés par l’EIES. Ces dernières (grandes entreprises et
PME) devront s’acquitter des frais importants pour les prestations de l’Agence nationale de
l’environnement (ANDE) en matière d’évaluations environnementales (rédaction des
termes de référence pour la réalisation de l’EIES, validation du rapport d’EIES, etc.).
e) La normalisation et la compétitivité des entreprises
La question de la normalisation est un sujet d’une haute importance pour la compétitivité
des entreprises nationales dans la compétition mondiale. Il apparaît déterminant de bien
positionner les acteurs nationaux (publics et privés) au regard des enjeux en matière de
normalisation et d’élaborer à cette fin une stratégie nationale de normalisation.
En Côte d’Ivoire, la loi 2013-866 du 23 décembre 2013 relative à la normalisation, à la
promotion de la qualité et à l’évaluation de la conformité pose un cadre réglementaire qui
définit les principes essentiels de la politique de normalisation et le rôle des différents
acteurs. En dépit du fait qu’elle soit salutaire, cette loi ne prévoit pas de mesures
d’accompagnement pour les entreprises manifestant l’intérêt de se lancer dans des
démarches de qualité et de certification. Cette situation s’avère plus que compromettante
pour les entreprises nationales confrontées à une rude concurrence du marché.
Au regard de ces nombreux défis, quelques recommandations concrètes s’imposent.
2) Les attentes du secteur privé en matière de développement durable
Pour permettre une réelle contribution du secteur privé au développement durable en Côte
d’Ivoire, les recommandations thématiques ci-après méritent une certaine attention.
a) L’accès à l’électricité et le développement des énergies alternatives
L’objectif de l’État est d’assurer à moyen terme l’équilibre de l’offre et de la demande en
électricité en facilitant l’accès à l’électricité bon marché. L’accès à l’énergie
conventionnelle, facteur de toute croissance, représente un important défi pour l’entreprise
en Côte d’Ivoire. Les efforts de l’État dans ce domaine sont certes louables mais doivent
être intensifiés. À ce propos, il est recommandé de :
• promouvoir les cycles combinés et le potentiel hydraulique ;
• d’améliorer voire de densifier le réseau de transport et de distribution de l’énergie pour
permettre une fourniture d’énergie moins chère, de bonne qualité et en quantité suffisante ;
• promouvoir les économies d’énergie en travaillant sur l’efficacité énergétique au niveau
du secteur privé et de l’État.
Aussi, le recours aux programmes smart grid, qui sont des réseaux électriques intelligents,
est plus que nécessaire pour améliorer la fourniture et la consommation de l’énergie et faire
du consommateur un acteur.
Par ailleurs, si la Côte d’Ivoire veut durablement soutenir la production des entreprises
présentes sur le territoire, il est primordial de promouvoir, à côté de l’énergie
conventionnelle, les énergies renouvelables, en augmentant leur part dans le mix
énergétique.

40
De toutes les sources d’énergies alternatives qui existent, l’énergie hydraulique Semble être
plus accessible. À ce titre, il sied d’indiquer que l’État de Côte d’Ivoire a entamé
d’importants projets comme le barrage de Soubré (production annuelle de 1100 GWh).
D’autres projets vont démarrer dans les prochaines années. Ils permettront d’améliorer les
coûts de facture électrique car le coût du kWh de l’énergie hydraulique est bon marché.
Cette stratégie devrait permettre de positionner à un bon niveau le secteur privé ivoirien
face à la concurrence.
L’énergie solaire constitue une richesse encore sous-exploitée. En effet, contrairement aux
régions du monde, la région ouest-africaine représente un potentiel d’environ 5 à 6
kWh/m2/jour, contre 3 kWh/m2/jour en zone tempérée européenne. S’il est vrai que
l’exploitation de la plupart des systèmes solaires ne nécessite pas de frais importants en
dehors des quelques charges d’entretien, il n’en demeure pas moins que son investissement
initial reste encore très élevé par rapport aux solutions traditionnelles. Il convient donc de
suivre les évolutions des différentes technologies en n’oubliant pas le stockage (batterie).
b) Les activités économiques et les enjeux en matière de gestion environnementale et
de changement climatique
La Côte d’Ivoire, pays en voie de développement dont l’économie dépend en grande partie
de l’agriculture, n’échappe pas aux effets du changement climatique.
Les périodes de sécheresse et d’inondation sont le quotidien du monde agricole affectant,
d’une part, les conditions de vie des populations en majorité agricole et plombant, d’autre
part, le développement socio-économique (près de 1300 ha, représentant environ 22 % des
superficies des cultures de bananes, partis en fumée du fait des pluies diluviennes en 2014).
Devant une telle situation, les recommandations suivantes peuvent être prises en
considération afin d’assurer efficacement la résilience de l’activité économique aux défis
climatiques :
• la mise en place d’un système d’alerte agricole ;
• la vulgarisation des stratégies d’adaptation déjà expérimentées, au plan national et ailleurs
dans le monde, auprès des entreprises nationales ;
• la création d’un fonds national pour financer les mesures d’adaptation et d’atténuation des
effets du changement climatique sur le secteur agricole ;
• la promotion de la gestion durable des terres en tant qu’outil d’adaptation au changement
climatique ;
•le renforcement des compétences des institutions nationales issues des secteurs exposés
aux impacts du changement climatique ;
•l’implication des experts des structures techniques et de recherche (Sodexam, BNETD
CNRA…) dans les actions des ministères et des entreprises sur les changements climatiques
;
• la sensibilisation des populations rurales aux techniques de préservation des écosystèmes
et des terres agricoles ;
• la création d’un Observatoire national de lutte contre le changement climatique.
Par ailleurs, en dehors de la question climatique, il est recommandé d’un point de vue
environnemental et de salubrité :
• d’impliquer le secteur privé dans la gouvernance des instances mises en place par l’État
de Côte d’Ivoire ;

41
• de mettre en conformité les zones industrielles et portuaires (gestion des déchets solides,
liquides et rejets, assainissement, etc.) ;
• de renforcer la gestion des déchets et des rejets ;
• de développer toutes les filières permettant de traiter l’ensemble des déchets et rejets de
toute nature ;
• de préserver les nappes phréatiques, les parcs nationaux et forêts classés pour protéger la
biodiversité ;
•de travailler sur la substitution et l’élimination des produits dangereux ;
• de développer le transport collectif.
La mise en œuvre des recommandations ne peut être possible que si un travail est réalisé
sur les concepts de l’environnement et du développement durable, à tous les niveaux du
système éducatif en Côte d’Ivoire et de la sensibilisation des populations.
c) La fiscalité environnementale et la protection de l’environnement
La fiscalité environnementale est un moyen de promotion du développement durable.
Contrairement à l’image que l’on entend lui donner sous nos tropiques (mission de
dissuasion), la fiscalité environnementale peut jouer un rôle d’incitation à des
comportements plus vertueux dans le monde des entreprises.
Ainsi, pour un système fiscal environnemental efficace, à même de garantir la prise en
compte des principes du développement durable par l’entreprise, les recommandations
suivantes méritent une certaine attention :
• L’exonération fiscale en matière environnementale
Les exonérations fiscales constituent des instruments de nature proche, en théorie, des taxes
qui ont un impact positif, incitant à l’achat de bien ou de service profitable à
l’environnement (Ex. : acquisition de véhicules de transport neufs, achat de technologies
favorables aux énergies renouvelables telles que les plaques solaires, ou production de sacs
réutilisables, activité de collecte, de traitement et de valorisation des déchets, etc.).
• Les réductions d’impôts en faveur de l’environnement
Cela consiste à réduire le taux de la TVA, par exemple pour l’acquisition de matériels
destinés à protéger l’environnement.
Aussi, cela reviendrait également à baisser les coûts des études d’impact environnemental
et social pour inciter les entreprises à des comportements plus vertueux de l’environnement.
• Le crédit d’impôt environnemental
Un crédit d’impôt est une somme soustraite du montant d’impôt qu’une entreprise doit
payer.
Le crédit d’impôt environnemental vise les dépenses effectivement supportées par une
entreprise, ou une personne physique, pour l’amélioration de la qualité de l’environnement.
En France tout comme au Canada par exemple, les dépenses ouvrant droit au crédit d’impôt
sont les économies d’énergie, l’isolation thermique, les équipements de production
d’énergie utilisant une source d’énergie renouvelable.
• Les dégrèvements fiscaux et primes spécifiques non remboursables

42
Il s’agit d’incitations fiscales accordées par des organismes environnementaux dans le but
de protéger l’environnement. Ces incitations peuvent prendre la forme soit d’exonérations
fiscales soit de dégrèvements. Elles ont également pour but de promouvoir le
développement des filières vertes (économie verte).
• La restructuration des taxes existantes
Il s’agit de s’assurer que les taxes perçues par les pouvoirs publics en faveur de
l’environnement sont utilisées ou affectées de manière efficace (ex. : procéder à la
suppression des taxes perçues en matière environnementale qui ne sont pas utilisées à juste
titre). Concernant la clarification des rôles des agences nationales de protection de
l’environnement, il convient de noter qu’une telle initiative sera bénéfique pour l’ensemble
des entreprises du secteur privé.
En réalité, il arrive, dans bien des situations, de voir certaines agences nationales de
l’environnement réclamer leur responsabilité pour une même problématique
(Ex. : cas de l’ANDE et du CIAPOL).
d) La nécessité d’un cadre financier et réglementaire incitatif pour la responsabilité
sociétale de l’entreprise (RSE) et l’économie verte
À côté des différentes recommandations définies précédemment (fiscalité
environnementale, etc.), il est nécessaire qu’un cadre financier national en faveur du
développement durable soit très vite en place. Comme l’a indiqué le Secrétaire général des
Nations Unies, Ban Ki-moon, lors de la réunion spéciale de haut niveau du Conseil
économique et social des Nations Unies (ECOSOC) (2015), un cadre de financement
cohérent et holistique pour le développement durable est primordial. Un cadre financier
national incitatif au développement durable devra, en plus des recommandations fiscales
développées dans le précédent paragraphe, aborder la question du financement des
initiatives privées en faveur du développement durable. À ce titre, les pouvoirs publics sont
invités à coopérer avec les banques et établissements financiers nationaux de sorte à
promouvoir un financement pérenne des activités en faveur du développement durable
(lignes de crédit environnementales, réduction de taux d’intérêt des emprunts contractés
pour des activités en faveur du développement durable, etc.).
e) Les enjeux de la normalisation et la compétitivité des entreprises ivoiriennes
Les enjeux de la normalisation dans une économie sont connus de tous. L’existence d’un
cadre réglementaire national en faveur de la normalisation, de la promotion de la qualité et
de l’évaluation de la conformité est certes appréciable mais reste encore insuffisant pour
faire des normes un levier de développement des entreprises nationales (normes sociales,
normes environnementales, normes produits, etc.). De véritables politiques
d’accompagnement sont nécessaires afin d’aider les entreprises du secteur privé ivoirien,
notamment les PME, à s’engager dans des démarches qualité, environnementales ou RSE.
Par ailleurs, l’évaluation de conformité des produits devra permettre, avec les laboratoires
de référence (accrédités), de s’assurer que les produits fabriqués en Côte d’Ivoire et ceux
entrant sur notre marché sont de bonne qualité. Aussi, en vue de protéger la santé et la
sécurité des consommateurs, les normes d’application obligatoires devront être appliquées
et devront bien évidemment respecter les clauses relatives au commerce (libre-échange).

43
Conclusion
La prise en compte des questions liées à l’environnement et au développement durable dans
le prochain Plan national de développement (PND 2016-2020) affiche clairement la volonté
de l’État de promouvoir un développement bas carbone à l’horizon 2020. Toutefois, la
réalisation d’un projet si ambitieux demande la prise en compte des recommandations du
secteur privé contenues dans le présent document.
Aussi, pour permettre une mise en œuvre réussie de ces différentes recommandations, une
implication du secteur privé aussi bien dans les organes de décision que dans les prises de
décision est capitale dans un rapport gagnant-gagnant. C’est seulement, en effet, à travers
une démarche plus participative que la Côte d’Ivoire arrivera à se hisser au rang des ténors
du développement durable en Afrique et être un pays émergent à l’horizon 2020.

44
Chapitre VI : Les Agrocarburants et le développement durable en Afrique
de l’Ouest

Introduction
Parmi les différences notables entre la Conférence des Nations Unies sur le Changement
climatique de Copenhague en 2009 (COP 15) et celle de Paris en 2015 (COP 21) figurent le
contexte du secteur pétrolier et la prise en compte des agrocarburants.
En 2009, le monde avait vu le prix moyen du baril de pétrole augmenter de 18,52 dollars
US en décembre 2001 à 132,55 dollars US en juillet 2008, pour redescendre, sous l’effet de la
crise des subprimes, à 77,56 dollars US en novembre 2009, à quelques jours de la COP 15. Le
marché tablait alors sur un retour du prix du baril autour de l’axe de 100 dollars US. Les dérives
de la filière agrocarburant figuraient parmi les préoccupations des parties prenantes présentes à
la COP. En effet des éléments de langage étaient arrêtés depuis la Conférence de haut niveau
de la FAO sur la sécurité alimentaire et les biocarburants de Rome fin 2008, et des vois
s’élevaient pour qualifier les biocarburants de crime contre l’humanité. Un mythe des
agrocarburants fleurissait, avec plusieurs projets de plantations de jatropha ou de sorgho à sucre
en Afrique de l’Ouest.
Presque sept ans plus tard, en août 2015, à quelques mois de la COP 21, le prix moyen
du baril était de 45,72 dollars US, au terme d’une baisse régulière initiée depuis juin 2014où le
baril s’échangeait en moyenne à 108,37 dollars US. Pendant plus d’un an, plusieurs facteurs
ont suscité cette baisse, aux premiers rangs desquels l’abaissement de la demande chinoise et
la hausse spectaculaire de la production des Etats-Unis. En 2014, grâce à sa production non
conventionnelle de « pétrole de schiste », les Etats-Unis sont redevenus le premier producteur
du monde avec 11,644 millions de barils/ jours de pétrole (brut et liquides de gaz naturel) devant
l’Arabie saoudite (11,505 millions de barils/ jours) et de Russie (10,838 millions de barils/
jours). Dans un tel contexte, l’engouement pour les agrocarburants est retombé et, avec lui, les
questions essentielles sur le développement de cette filière, à la croisée des enjeux énergétiques,
alimentaires et environnementaux.
Pourtant l’Agence internationale de l’énergie (AIE) appelait, en Octobre 2015, au
développement significatif des agrocarburants pour la diversification et la décarbonisation des
transports à long terme. Elle indiquait plusieurs outils de planification disponibles pour y
parvenir : l’imposition de niveaux de mélange carburant/ agrocarburant, des incitations fiscales
et le développement des chaînes de production/ approvisionnement locales respectueuses de la
sécurité alimentaire. Elle estime que les agrocarburants représenteraient plus de 4% de la
demande des transports routiers en 2020, du fait I) des politiques de soutien renforcées dans des
marchés clés tels que le brésil, l’Inde, l’Indonésie et la Malaisie II) des politiques de mélange
dans plus pays de l’OCDE et du G20, et III) du développement de la seconde génération
d’agrocarburants moins gourmands de ressources alimentaires.
Les agrocarburants ont un rôle à jouer dans l’élaboration des mix énergétiques nationaux.
Les dérives observées ont vite donné lieu à des mesures d’encadrement. L’Afrique, aussi, a
connu la vague d’engouement et d’alerte qui a marqué le développement des agrocarburants de
première génération. Les projets lancés dans la période 2005-2010 en Afrique de l’Ouest ont
rencontré des difficultés techniques, économiques et sociale. Fort de ces expériences, quelle

45
serait la nécessité d’y produire des agrocarburants et quelles recommandations formuler pour
développer des projets raisonnés ?
1. Les agrocarburants, un mal nécessaire ?
Trois principaux facteurs sont mis en avant pour justifier la production des
agrocarburants : l’empreinte environnementale du pétrole, le déclin de la production de
pétrole conventionnel et le prix du baril.
a) Les agrocarburants pour réduire l’empreinte environnementale du pétrole
Le rapport du Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), publié en
2014, estime que le secteur du transport représenterait 14,1 % des émissions de gaz à effet de
serre. Les agrocarburants sont alors présentés comme des stratégies d’atténuation du
changement climatique.
Toutefois des bilans réalisés en 2011 et en 2013 pour la Commission européenne
montrent des résultats mitigés. Analysées sur l’ensemble de la chaîne de valeur production/
distribution des agrocarburants, certaines filières auraient un bilan d’émission de gaz à effet de
serre supérieure au pétrole conventionnel (huile de palme, soja, colza) ; d’autres pourraient
contribuer à la décarbonisation (tournesol, blé, maïs, betterave à sucre et sucre de canne). Toutes
filières confondues, leur empreinte carbone est bien inférieure à celle du pétrole non
conventionnel telles que les sables bitumeux ou le pétrole « de schiste ». L’empreinte
environnementale des agrocarburants doit aussi prendre en compte les besoins de ressources en
eau qui peuvent être importants même pour le jatropha, et des ressources en terres avec des
impacts sociaux possibles lorsque des projets industriels nécessitent de larges surfaces
agricoles.
b) Les agrocarburants, réponse au pic pétrolier ?
Les agrocarburants seraient aussi une réponse au déclin du pétrole. La production
mondiale de pétrole augmente, toutes sources confondues, mais « il faudrait (…) l’équivalent
de quatre Arabie saoudite ou de dix mer du Nord dans les dix prochaines années rien que pour
maintenir l’offre (de pétrole) à son niveau actuel, avant même toute croissance de la demande »,
selon une analyse du PDG de Shell fin 2011.
Ce défi était déjà souligné par l’AIE en 2009, dans une analyse sur 800 champs de
pétrole conventionnel, représentant 75% de la production mondiale. Elle indiquait que le taux
moyen de déclin annuel était supérieur à 6%, malgré la découverte de nouveaux champs et le
maintien d’un plateau de production mondiale jusqu’en 2035.
Fin 2014, l’Agence maintenait ses inquiétudes à long terme, d’autant que la baisse des
prix du baril réduit les investissements indispensables pour repousser le pic pétrolier. A compter
de 2020, la production américaine devrait de nouveau baisser, à l’instar de celle du Canada ou
du Brésil, tandis qu’aucune réplique significative d’un boom du pétrole « de schiste » à celui
des Etats-Unis n’est pronostiquée.
c) Les agrocarburants, alternative au pétrole cher ?
Les agrocarburants devraient être une alternative au pétrole cher, à partir d’un baril
supérieur à 100 dollars US, seuil de référence des investisseurs pour s’engager dans
l’application commerciale de ces filières encore innovantes. Alors que le FMI estimait, en mai
2012, que le prix du pétrole doublerait en une décennie pour atteindre un prix supérieur à 150
dollars US, ses prévisions faites en juillet 2015 à la lumière de la situation économique mondiale
font part d’un prix moyen de 69 dollars US pour l’année 2020. L’économie mondiale peine
toujours à retrouver la voie d’une croissance stable depuis la crise de 2009.

46
Dans un tel contexte de prix, la filière rencontrera des difficultés à se développer.
Cependant, le prix des hydrocarbures ne reflète pas la réalité : une autre étude du FMI, en mai
2015, estime le montant total, international, des subventions à l’industrie des combustibles
fossiles (pétrole, gaz et charbon) à 5,3 trillons de dollars US en 2015. Ce calcul inclut les
subventions directes et le non-paiement de dommages environnementaux (pollution
atmosphérique et émission de carbone). Le FMI insiste sur la robustesse de son modèle et la
nécessité de réduire ces subventions pour encourager l’efficacité énergétique et réduire les
distorsions des marchés fossiles entre énergies fossiles et énergies renouvelables.
Les agrocarburants apparaissent comme une innovation nécessaire. Les exemples de
développements déraisonnés ont, très tôt, levé des réserves qui ont entrainé la vigilance des
consommateurs et la régulation des législateurs. Les bénéfices économiques et/ou
environnementaux attendus ont été revus. Ils sont mieux perceptibles et restent globalement
positifs si le projet suit des normes de performance durable. Le développement de la seconde
génération des agrocarburants doit réduire l’utilisation de produits alimentaires, qui ne
représente qu’une partie des questions à résoudre. Il reste à déterminer l’adéquation de la filière
dans un contexte africain et les recommandations pouvant contribuer à une stratégie.

2) les agrocarburants, quelle pertinence en Afrique de l’Ouest ?


En 2012, 16 principaux pays africains sont considérés comme exportateurs de
pétrole sur 54 : Algérie, Angola, Cameroun, Congo(Brazzaville), Côte d’Ivoire, Egypte, Gabon,
Guinée équatoriale, Libye, Mauritanie, Nigéria, Soudan, Soudan du Sud, République
démocratique du Congo, Tchad et Tunisie. Les réserves prouvées du continent représentaient
124 milliards de barils, auxquels s’ajouteraient 100 milliards de barils de réserves estimées
offshore. A l’échelle mondiale, le continent représente plus de 8% des réserves prouvées et près
de 12% de la production. En Afrique subsaharienne, l’Afrique de l’Ouest comptait près de 90%
des extractions de pétrole, essentiellement dans le golfe de Guinée.
Avec de tels chiffres, la question des agrocarburants pourrait paraître vaine,
particulièrement en Afrique de l’Ouest.
Ses réserves et ses capacités de production sont au-dessus de ses capacités de
consommation. Mais elles sont « modestes », hors Nigéria et Angola : le champ jubilee
découvert en 2007 au Ghana, estimé jusqu’à 1,8 milliard de barils, représente moins d’un mois
de consommation mondiale. Hors Angola, les grands producteurs ne connaissent pas de hausse
significative de production depuis 2004. En août 2011, dans son discours de l’état de la Nation,
le président du Congo, 4è producteur pétrolier d’Afrique subsaharienne, annonçait que la
production de son pays déclinerait à court terme. Celle du Gabon affiche son dernier pic de
producteur en 1997. Le Ghana, la Côte d’Ivoire et le Libéria ont annoncé plusieurs découvertes
en 2012 et 2014, mais la production en eau profonde est coûteuse.
D’une manière générale l’Afrique de l’Ouest importe et subventionne. Sa facture
pétrolière est élevée. Ses capacités de raffinage sont limitées : en 2010, pour 1 dollar US de
produit pétrolier d’origine Afrique de l’Ouest échange dans la région, 5 étaient importés. Le
Nigéria, 1er producteur d’Afrique subsaharienne, aurait subventionné ses importations de
pétrole raffiné à hauteur de 23 milliards de dollars de 2006. Dans un autre domaine, celui de la
production thermique d’électricité, le FMI a recommandé que la Côte d’Ivoire réduise ses
subventions au gaz. Pour tous les pays d’Afrique de l’Ouest, la baisse des cours du brut depuis
2014 induit une baisse des subventions ; pour les pays producteurs elle ne compense pas les
pertes de revenus.

47
Mais sur le long terme, il y a peu de probabilité de voir les prix du pétrole rester sur une
tendance baissière. Et quel que soit le terme, les prix actuels freinent déjà l’accès des
populations à des services énergétiques pétroliers à des coûts socialement inclusifs.
L’approche énergétique des agrocarburants ne se limite pas à la substitution du pétrole
ou à la décarbonisation du transport. En Afrique, la question de l’accès à une énergie
conditionne l’accès au transport, à l’éclairage, à l’agriculture mécanisée, etc.
Des capacités de production, de distribution et de consommation d’agrocarburants à des
échelles nationales et locales peuvent être l’opportunité d’activités locales génératrices de
revenus. Particulièrement en milieu rural et agricole.
3) Quelle filière pour le monde Rural ?
Chaque filière d’agrocarburant doit identifier au minimum les besoins énergétiques
auxquels elle répond, ses marchés pertinents, les matériaux végétaux et les ressources utilisées
(terres cultivables, eau, intrants, etc.), les risques de compétition alimentaire, les technologies
de production et de consommation, leurs circuits de distribution, etc. Tenant compte des enjeux
sociaux et des impacts environnementaux, leur développement doit être guidé par un cadre
régulateur incitatif. Ce cadre doit pouvoir s’adapter au différents contextes technologiques et
agricoles et aux multiples réalités locales.
Malgré la vague d’intérêt et de projets agrocarburants que l’Afrique de l’Ouest a connue
entre 2005 et 2010, les régulations mises en place dans certains pays, les recommandations
formulées à l’échelle de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et de la
Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) entreprises, peu de
projets se sont réellement développés.
a) 2005-2015, quel retour d’expérience ?
Dans la dernière décennie, l’Union européenne (UE) était la principale cible de marché
des premiers opérateurs ouest-africains engagés dans des projets commerciaux. Son objectif de
substituer 10% d’agrocarburants aux combustibles de transport en 2020 suscitait de nombreux
intérêts. Dès 2006, la crise de la tortilla au Mexique a montré l’impact du prélèvement de
l’éthanol sur le maïs, créant une alerte internationale sur les agrocarburants. A partir de 2007,
les objectifs européens ont intégré des critères de durabilité dans sa chaîne
d’approvisionnement, l’Europe a étudié l’impact potentiel de ses politiques agrocarburants sur
ses partenaires ACP (Afrique Caraïbes Pacifique). Dès 2010, le développement de projets
commerciaux de première génération en Afrique de l’Ouest à l’exportation s’est avéré
complexe. En 2015, les projets économiques les plus résilients sont ceux orientés vers les
besoins des communautés locales.
Les grands projets export ont levé des doutes économiques : leur impact sur le prix des
denrées alimentaires, la solidité des modèles techniques, l’évolution du prix du baril et celle du
prix du carbone. Plusieurs impacts environnementaux ont contrebalancé les bénéfices
climatiques attendus : dégradation des sols, déforestation, consommation en eau, perte en
biodiversité, etc. Sur le plan social, les risques d’accaparement des terres et d’atteinte à la
sécurité alimentaire ont freiné l’appropriation locale.
Les projets à petite échelle pour l’accès à l’énergie locale ont validé l’adhésion des
communautés. Ils sont opérationnels, mais les technologies restent rudimentaires et les coûts de
production élevées. En l’état, les modèles économiques valident la faisabilité de l’accès à
l’énergie, mais ils peinent à contribuer à une sécurité énergétique locale et à attirer des
investisseurs pour développer un marché intérieur. Dans l’UEMOA et au Ghana, ces projets

48
ont tous la particularité de repose sur du jatropha, technologie la plus accessible en milieu rural
et connue des populations depuis son introduction au XVIIIe siècle par les Portugais.
Les deux familles de projets ont montré que la formulation d’une réglementation,
lorsqu’elle existe (Ghana, National Bioenergy Policy, 2005 ; Sénégal, Stratégie nationale
biocarburants, 2007 ; Mali, stratégie nationale de développement des biocarburants, 2009), ne
suffit pas à développer une filière. Même lorsque des objectifs de mélange sont formulés,
comme au Nigéria (Biofuels Policy and Incentives, 2007 et 2010) avec des objectifs de mélange
d’éthanol (E20) et de biodiesel (B20) pour la consommation nationale. Ces mesures ont besoin
d’être soutenues par un appui international pour renforcer les cadres politiques et opérationnels
et soutenir le développement de filières appropriées.
b) L’huile végétale pure, le biodiesel ou l’éthanol ?
La production d’agrocarburants pour une amélioration de l’accès à l’énergie peut être
orientée vers quatre principaux marchés : I) les véhicules à motorisation diesel ou essence, II)
la production d’électricité à partir de gazole et de distillate diesel oïl, III) le transport par rail et
IV) le pétrole lampant pour l’éclairage. Le transport routier est l’usage dominant.
Trois familles d’agrocarburants de première génération peuvent être envisagées, selon
les types de moteurs sur le marché cible : huiles végétales pures (HVP), esters d’huiles végétales
(biodiesel) et bioéthanol :
 Les HVP sont plus appropriées pour les moteurs diesel à injection
indirecte. Moins utilisé que les moteurs à injection directe, un kit de
bicarburation peut envisager un mélange HVP/ gazole inférieur à 50 %.
Au-delà de ce mélange, des modifications du moteur sont nécessaires ;
 Les biodiesels sont utilisables purs ou en mélanges, dans des moteurs
diesel à injection directe ou indirecte. Le parc diesel et les volumes de
production guideront les mélanges biodiesel/gazole adéquats au
lancement de la filière : 2%, 5%, 10%, etc. ;
 Le bioéthanol est obtenu par fermentation du sucre des plantes sucrières
ou par hydrolyse de l’amidon des céréales. Il est utilisé dans les moteurs
à essence, en mélanges allant de 5% à 85%. Au-delà de 10% des
modifications des moteurs sont nécessaires.
Dans l’espace UEMOA, les moteurs diesel dominent, reflétant le transport et la
production d’électricité. Le parc automobile est vieillissant avec une moyenne d’âge supérieure
à dix ans et un faible taux de renouvellement. Le taux de couverture électrique laisse de
nombreuses localités non connectés au réseau national, pouvant s’alimenter par des petites
centrales thermiques. Ces indicateurs techniques semblent privilégier la production d’huiles
végétales pures ou estérisées à celle des bioéthanols, pour des volumes et des mélanges
conformes aux parcs de moteurs.

c) Quelles spéculations agricoles ?


Les matériaux végétaux doivent être identifiés au regard des ratios de productivité réelle
à l’hectare et des ressources à mobiliser : disponibilités foncières, facteurs
agropédoclimatiques, ressources en eau, préservation de l’environnement, etc. Cette analyse
doit aussi encadrer les risques de compétition alimentaire par détournement des terres ou des
récoltes.

49
Si l’Afrique de l’Ouest dispose de larges surfaces cultivables non cultivés, la pression
agricole sur son foncier rural se manifeste déjà par des conflits agropastoraux et
intercommunautaires, une dégradation de forêts classées, etc. La valorisation de ces terres est
aussi assujettie à d’autres contraintes : la qualité des infrastructures, l’aménagement des terres,
le morcellement foncier, etc.
Les premières stratégies nationales formulées en Afrique de l’Ouest ont essentiellement
ciblé le jatropha (filière diesel) ou la canne à sucre et le sorgho à sucre (filière essence). L’huile
de palme, principal corps gras de l’alimentation de la CEDEAO dont le déficit atteindrait 1,5
million de tonnes en 2015, n’est pas mentionnée. La production régionale de canne à sucre fait
déjà l’objet de soutien des partenaires économiques et financiers, pour des perspectives non
énergétiques. Les projets jatropha (Mali, Sénégal, Ghana) et sorgho à sucre (Nigéria) ont
dominé le devant de la scène. Ils ont montré des synergies et des compromis de production et
de développement respectueux de la sécurité alimentaire. Mais ces deux filières ont besoin
d’améliorer les matériaux végétaux optimisés, les itinéraires techniques et les modèles
économiques.
4) Quelle Organisation des productions ?
La mise en place de nouvelles filières agricoles nécessite de structurer des réseaux forts
de producteurs et de formateurs, d’encadrer le financement des plantations, la diffusion des
matériaux et des pratiques agricoles. La garantie d’approvisionnements opérateurs auprès de
plantations villageoises et industrielles est indispensable à la viabilité des plans d’affaires. La
garantie d’engagement des opérateurs économiques est indispensable pour les débauchés des
petits producteurs surtout lorsque la culture retenue se valorise principalement dans une filière
agrocarburant.
Deux cycles industriels ont été envisagés. Un cycle court privilégiant l’acquisition de
valeur ajoutée en milieu rural, orienté vers la production d’huiles végétales purifiées. Un cycle
long, à forte valeur ajoutée, pour la production et la distribution de biodiesel et éthanol.
La filière biodiesel a montré l’avantage de pouvoir être développer plus aisément ; le
premier porte sur un cycle pour le développement des HVP en milieu rural, jusqu’à ce que des
indicateurs (Volumes, compétitivité, pénétration de marché,…) permettent d’acquérir des actifs
agro-industriels pour entrer dans le cycle long biodiesel. La filière bioéthanol, pars sa
complexité industrielle, se réalise sur un cycle long.
Les cycles courts, destinés à favoriser l’accès local à l’énergie, peuvent s’appuyer sur
des tailles variables de plantation villageoise, qui se développent au fur et à mesure de
l’engagement des populations. Le modèle économique est essentiellement celui de PME
fournissant des services énergétiques en milieu rural, au développement pragmatique.
Les cycles longs appellent des surfaces importantes et un approvisionnement régulier.
Leur intensité capitalistique encourage des sociétés pouvant à la fois acquérir des actifs
industriels et des plantations industrielles propriétaires, et engager des accords de long terme
avec des planteurs villageois (contacts fermiers, financement des intrants, réseau de collecte,
etc.)
Si la libéralisation du secteur agricole a soutenu le développement de certaines filières
(hévéa, palmier à huile), d’autres ont révélé des insuffisances organisationnelles, avec des coûts
de production et de commercialisation élevés. Quel que soit le cycle industriel, les planteurs
villageois, fragmentés sur de petites surfaces, devront bénéficier d’encadrement pour maîtriser

50
les itinéraires agricoles. Des organisations professionnelles agricoles professionnalisées auront
un rôle à jouer dans l’accompagnement des planteurs.
Les grands projets agrocarburants ont aussi montré l’importance de résoudre les
questions foncières et environnementales, d’un développement transparent et respectueux des
droits des communautés locales, du rôle des gouvernants locaux complétant la régulation du
gouvernement central. Chaque choix aura une empreinte environnementale variant selon les
modèles économiques. Des études d’impacts sociaux et environnementaux identifieront en
amont les bénéfices réels de chaque modèle.
5) Quel cadre régulateur ?
Le développement des agrocarburants, par sa complexité et ses incertitudes, requiert un
cadre régulateur fort et suffisamment lisible pour orienter les positions des opérateurs
économiques. Il doit résulter d’une volonté de l’Etat, à même de garantir un équilibre entre les
intérêts énergétiques, alimentaires, environnementaux et sociaux.
Ce cadre est tout d’abord institutionnel. Il nécessiterait, sur le plan national, une
coordination réunissant au moins les ministères en charge du Plan, de l’Energie, de
l’Agriculture et de l’Environnement ; un organe de régulation de la filière peut être envisagé à
l’instar du Mali ou du Nigéria. Les institutions de l’UEMOA ont très tôt plaidé pour une
harmonisation des choix agro-industriels, réglementaires et économiques à l’échelle régionale.
Plusieurs pays offrent un retour d’expérience, identifiant des dispositions régulatrices
pouvant encourager un développement raisonné :
 La cartographie et l’encadrement de l’accès aux terres cultivables ;
 L’identification des espèces végétales et l’organisation de la diffusion des pratiques et
matériaux agricoles ;
 L’optimisation des ressources environnementales consommées et des rejets agro-
industriels ;
 La normalisation technique des produits agricoles, des agrocarburants et des mélanges
commercialisés ;
 La définition d’un objectif de pourcentage d’agrocarburants consommés sur le volume
national de carburant ;
 L’identification des modalités logistiques de transport/stockage/distribution du réseau
de commercialisation ;
 L’organisation géographique de zones productives, diminuant aussi l’énergie
consommée sur l’énergie produite ;
 La définition de mécanismes d’agrément et de concession de services publics
énergétiques adaptés aux modèles économiques : production de combustible, transport
et distribution d’électricité en réseau local, etc. ;
 La proposition de mécanismes financiers et fiscaux incitatifs, s’inspirant des
exonérations du code des investissements, de la fiscalité des produits pétrolier, etc.,
encourageant in fine la fixation de prix compétitifs.

51
Conclusions et perspectives
L’engouement observé pour les agrocarburants n’a pas donné lieu à de productions
significatives.
La plupart des grands projets annoncés en Afrique de l’Ouest se sont avérés spéculatifs,
la crise financière 2008-2009 et la variation du prix du pétrole n’ayant pas soutenu l’intérêt des
investisseurs. Leurs études d’impact ont permis d’identifier les risques potentiels : économiques
(prix des denrées alimentaires, systèmes fonciers, robustesse des modèles), environnementaux
(dégradation des sols, déforestation, gestion des ressources en eau, émission de gaz à effet de
serre) et sociaux (détournement des terres et des stocks alimentaires, faiblesse des transferts de
technologie, etc.)
Les petits projets destinés à accroître l’accès de l’énergie locale se sont avérés plus
résilients, avec des chaînes de productions/ consommation intégrées et une réelle adoption des
communautés locales. Ils ont montré un potentiel de contribution au développement local et de
création d’emplois, des intérêts environnementaux, des synergies potentielles entre production
agricole et production énergétique. Mais leur développement confidentiel, non optimisé, sur le
plan technique et économique, n’a pas permis de confirmer les bénéfices à grande échelle.
Plusieurs Etats d’Afrique de l’Ouest et les institutions de l’UEMOA ont fait preuve
d’anticipation, en agissant très tôt pour la mise en œuvre d’un cadre réglementaire. Mais les
objectifs et les mandats mis en œuvre n’ont pas eu les résultats escomptés. Un renforcement
des capacités reste nécessaire, il pourra s’appuyer sur les expériences développées sur le
continent durant la dernière décennie.
Les agrocarburants ont un rôle à jouer en milieu rural : faciliter l’accès à l’énergie, créer des
activés génératrices de revenus agricoles et énergétiques, rendre possibles d’autres services
essentiels au développement des communautés locales. Les petits projets ont démontré la
faisabilité technique et sociale des chaînes de valeur locales, intégrant des capacités de
production et de consommation. Si le prix du baril de pétrole évolue dans des perspectives
conformes aux prévisions réalisées par le FMI et la Banque Mondiale en juillet 2015, de
nombreux Etats pourront réduire leurs subventions aux énergies fossiles. Ce répit peut être mis
à profit pour préparer le développement opérationnel des filières locales et les rendre plus
performantes avant que le baril ne retrouve des prix élevés, socialement exclusifs.

52
Chapitre VII : L’initiative Energie durable pour tous en Afrique
1) Les défis et enjeux en matière d’accès à l’énergie durable
Assurer un accès abordable, fiable et durable à l’énergie demeure l’un des défis essentiels
du XXIe siècle. Alors que l’ensemble de la communauté internationale se mobilise en faveur
d’un accès universel, la pauvreté énergétique continue d’affecter 1,1 milliard de personnes dans
le monde selon le second rapport de suivi de l’initiative SE4All publié en mai 2015. Plus de
600 millions d’entre elles résident en Afrique, soit plus de la moitié de la population du
continent. Ces personnes n’ont pas accès à des services énergétiques modernes capables de leur
fournir l’éclairage, le carburant et de l’énergie fiable, et dépendent principalement de la
biomasse traditionnelle pour la cuisine et le chauffage.
De nombreux pays de l’Afrique subsaharienne sont régulièrement confrontés à des pénuries
en électricité. La capacité énergétique combinée des 40 principaux pays consommateurs du
continent est inférieure à celle des 20 millions d’habitants de New York. Les coûts de l’énergie
sont extrêmement élevés et ses sources sont très polluantes sur le continent, le kilowattheure
coûtant 40 à 50 centimes, contre 4 à 17 ailleurs. Le déficit énergétique du continent a
considérablement freiné son industrialisation, alors que le potentiel en ressources énergétiques
classiques et renouvelables reste largement inexploité.
L’accès à une énergie durable est pour l’Afrique une priorité et une condition nécessaire à
la réalisation d’objectifs plus larges que ceux du secteur de l’énergie, à savoir l’éradication de
la pauvreté, l’augmentation de la productivité agricole et des revenus du monde rural,
l’amélioration de l’accès à l’eau potable, à une éducation et des soins de santé de qualité et la
création d’opportunités économiques. L’énergie est donc à la base du développement humain.
De la création d’opportunités d’emplois à la compétitivité économique, en passant par le
renforcement de la sécurité et l’autonomisation des femmes, l’énergie constitue un grand
secteur intégrateur de la dynamique de développement et d’émergence de l’Afrique. L’énergie
concerne tous les secteurs et est au cœur des intérêts fondamentaux de toutes les nations qui
doivent veiller à ce que les bienfaits de l’énergie moderne soient universellement accessibles et
que l’énergie soit produite aussi proprement et aussi rationnellement que possible. Une
transition vers une économie verte est nécessaire pour assurer un développement durable de
l’humanité. Cependant, ce changement ne peut se faire au détriment des priorités de
développement des pays en développement, et toute définition d’une économie verte devra
inclure diverses opportunités pour promouvoir le développement économique et réduire la
pauvreté.
2) L’initiative Energie durable pour tous (SE4All)
L’initiative SE4All (Sustainable Energy for All) du Secrétaire général de l’ONU, lancée en
septembre 2011 en reconnaissance de l’importance de l’énergie pour le développement, est un
cadre de partenariat composé de multiples parties prenantes auquel participent les Etats, le
secteur privé et la société civile. Elle fixe trois objectifs principaux à atteindre à l’horizon 2030 :
 Garantir un accès universel à des services énergétiques modernes ;
 Doubler le taux mondial d’amélioration de l’efficacité énergétique ;
 Doubler la part des énergies renouvelables dans la panoplie énergétique mondiale.
Ces trois objectifs sont complémentaires. De plus en plus abordables, les techniques
d’exploitation des énergies renouvelables apportent les services énergétiques dans des zones
rurales qu’il serait excessivement couteux et peu pratique d’alimenter par des réseaux
électriques classiques. L’efficacité accrue des dispositifs utilisés pour l’éclairage et d’autres

53
applications entraîne une diminution de l’énergie consommée et permet donc de réduire la
quantité d’électricité nécessaire au fonctionnement de ces systèmes. Les gains d’efficacité
qu’enregistrent la production et l’utilisation de l’électricité diminuent la charge des réseaux
électriques et permettent l’alimentation d’un plus grand nombre de foyers et d’entreprises. Par
ailleurs, il convient de noter que l’expansion incontrôlée des systèmes énergétiques à partir des
combustibles fossiles, comme c’est le cas aujourd’hui, pourrait maintenir le monde sur une voie
non viable pour le climat mondial.
La priorité centrale de SE4All est d’apporter un soutien politique de haut niveau en faveur de
l’accès pour tous à l’énergie. Depuis son lancement 80 gouvernements dans le monde y ont
officiellement adhéré, parmi lesquels on compte 43 pays africains. L’année 2012 a été
proclamée une Année internationale de l’énergie durable pour tous les Nations Unies. Des
partenariats entre Etats, banques de développement, secteur privé, société civile et organisations
onusiennes ont été renforcés lors du Sommet de Rio +20 et les engagements de financement
pris ont été significatifs en termes de montants et de variété de contributeurs. Plusieurs
entreprises et des investisseurs ont pris l’engagement de consacrer plus de 50 milliards de
dollars US en vue de contribuer à la mise en place de systèmes énergétiques abordables, fiables
et durables. Le partenariat a mobilisé aussi le secteur privé et la société civile en faveur
d’initiatives à fort impact, telles que l’éclairage hors réseau, l’amélioration des rendements
énergétiques, l’énergie et la santé des femmes, et la fourniture d’énergie renouvelable.
Dans le cadre de cette initiative, des efforts sont déployés pour assurer la promotion des
programmes d’utilisation de fourneaux et de combustible propres pour la cuisson des aliments
en Afrique, Asie du Sud, en Asie de l’Est et en Amérique centrale. Il s’agit de mettre en place
des dispositifs d’atténuation des risques liés aux investissements dans les énergies propres et
d’aider au développement de l’électricité géothermique. Une assistance est aussi apportée aux
collectivités locales pour améliorer la maîtrise de l’énergie et aux pays, pour cartographier leurs
sources d’énergie renouvelables. Une aide spécifique est accordée aux petits Etats insulaires en
développement pour investir dans les énergies propres. Des appuis sont en outre apportés à
certains pour étendre les programmes d’amélioration de l’accès à l’électricité tout en
développant les possibilités d’éclairage hors réseau.
Malgré les progrès accomplis dans le monde pour réaliser les trois grands objectifs de SE4All,
des efforts doivent être davantage consentis pour combler les déficits observés, notamment en
Afrique. Pour y parvenir, les parties prenantes doivent accroître leurs investissements dans le
secteur. Selon le rapport de suivi, les investissements annuels mondiaux en énergie doivent
tripler pour atteindre jusqu’à 1250 milliards de dollars, et entre 40 et 100 milliards mobilisés,
chaque année, pour garantir une électrification universelle.
En revanche, l’accès universel à des combustibles de cuisines modernes ne demande que 4,3
milliards de dollars par an. Pour ce faire, les pays dont la capacité est la plus faible devront
avoir accès aux meilleures technologies vertes et aux connaissances qui s’y rapportent. Pour les
gouvernements ne disposant pas de telles ressources, seuls les partenariats public-privé peuvent
permettre de générer de tels flux.
Pour atteindre les objectifs d’énergie durable, il est essentiel de comprendre les liens qui
existent entre l’énergie et d’autres secteurs comme l’eau, l’agriculture, le genre et la santé.

54
3) La plate-forme africaine de l’initiative SE4All : missions, organisation et
instruments d’appui
L’Afrique est au premier plan de la mise en œuvre de l’initiative SE4All. Une plate-forme
africaine a été mise en place depuis mai 2013 en partenariat avec la Banque africaine de
développement (BAD), la Commission de l’Union africaine, l’Agence de planification et de
coordination du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) et le
programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).
La plate-forme africaine de SE4All vise à promouvoir auprès de des gouvernements africains
les investissements dans ce secteur en vue d’assurer la croissance économique des pays et de
promouvoir l’émergence tant attendue. Elle a pour mission de coordonner et de faciliter la mise
en œuvre de l’initiative sur le continent africain. Elle favorise l’appropriation par l’Afrique,
ainsi qu’une approche exhaustive et inclusive de sa mise en œuvre. En 2014, la Décennie de
l’énergie renouvelable pour tous a été officiellement lancée en partenariat avec la BAD, en vue
de promouvoir l’utilisation de toutes les sources d’énergie et de mobiliser les gouvernements,
le secteur privé, les partenaires au développement et la société civile sur des questions
énergétiques centrales pour le développement durable et l’élaboration des programmes de
développement après 2015.
La plate-forme fait partie de la structure mondiale de mise en œuvre de l’initiative SE4All et
collabore étroitement avec l’équipe mondiale de facilitation de l’initiative. Elle compte deux
unités : un comité de surveillance et des opérations, et un secrétariat. Le comité de surveillance
et des opérations fournit des orientations stratégiques pour les opérations du secrétariat de la
plate-forme et réunit les représentants de la Commission de l’Union Africaine, de l’Agence du
NEPAD, de la BAD, du PNUD et de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de
l’Ouest (CEDEAO). Le secrétariat est responsable de l’exécution des activités de la plate-forme
et de son programme de travail.
Le fonds des énergies durables pour l’Afrique (SEFA) et le Centre pilote des technologies et
financements climatiques en Afrique sont les deux instruments d’appui de SE4All qui
travaillent en étroite collaboration avec la plate-forme africaine.
Depuis son lancement en 2013, la majorité des 43 pays africains adhérents à l’initiative ont déjà
effectué une évaluation de leur situation énergétique par rapport aux trois objectifs de SE4All.
Plus d’une vingtaine d’entre eux développent actuellement leur programme énergétique
national via un agenda d’actions qui constitue la feuille de route énergétique pays. Celle-ci est
fondée sur une planification à moyen et long terme. Certains pays comme le Kenya, la Tanzanie,
le Ghana et Rwanda exécutent initiative, sur le plan national, en collaboration étroite avec le
Centre pilote.
En œuvrant pour atteindre les trois objectifs de SE4All, la plate-forme africaine de l’initiative
participe également à l’effort de réduction des gaz à effet de serre en encourageant la transition
énergétique de chaque pays. L’initiative SE4All permet à cet égard de définir un cadre général
d’action et de fédérer les projets d’accès à l’énergie durable, d’efficacité énergétique ainsi que
le développement des énergies renouvelables.
Conclusion : les initiatives africaines et les projets énergétiques propres en cours
Avec l’avènement du Fonds africain des énergies renouvelables (AREF) mis en place en 2013,
deux programmes d’investissement ont été réalisés, l’un en Ethiopie (Projet géothermique de
Corbetti de 20 MW) et l’autre en Ouganda (Projet hydraulique d’Achwa de 41 MW). En termes
de développement d’énergies renouvelables, le Kenya est un bon exemple de pays africain
résolument engagé dans la diversification de ses ressources hydrauliques déjà existantes. Pour

55
développer ses capacités géothermiques, le Kenya a créé la Société d’exploitation de champs
géothermique qui réalise l’exploration de champs géothermiques ainsi que les forages. Il a
ensuite développé les projets et gère leur exploitation, comme Menegai par exemple.
L’Afrique du Sud, qui encore récemment dépendait presque entièrement du charbon, a réussi
sa transition vers les énergies renouvelables grâce à son Programme d’accélération et de soutien
des investissements privés dans le secteur des énergies renouvelables (Renewable Energy
Independent Power Producer Procurement Program, ou REIPPPP). Aujourd’hui, plus de 60
projets ont été attribués au secteur privé et les premières réalisations sont déjà livrées. Les
engagements du secteur privé atteignent 14 milliards de dollars, et permettront de générer
environ 4 000 MW renouvelables.
Selon les statistiques de l’Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA), si
l’on considère l’ensemble des énergies renouvelables, l’Egypte est le pays avec la plus grande
capacité de production installée issue des énergies durables, suivie de l’Afrique du Sud et la
République démocratique du Congo. Ces trois pays ont une production hydraulique importante.
Concernant le solaire, l’Afrique du Sud, le Kenya, le Maroc et l’Egypte sont en tête ; pour
l’éolien, ce sont l’Egypte, le Maroc et l’Ethiopie. Enfin, le Kenya est le leader géothermie.
L’ensemble de ces pays possède des cadres institutionnels et réglementaires favorables au
développement des énergies renouvelables.
Le Kenya, le Maroc et l’Afrique du Sud ont jeté les bases de programmes de transformation à
grande échelle, avec des réformes publiques permettant de diminuer les risques liés à des projets
d’énergies renouvelables. Aussi, d’autres pays africains ont fait des progrès considérables dans
la création d’un environnement propice pour les investissements énergétiques renouvelables.

56
Chapitre VIII : Bonnes pratiques de développement des énergies propres et
de l’efficacité énergétique en Afrique
1) Le continent africain à l’horizon 2050 : des enjeux énergétiques majeurs
En 2050, plus d’un homme sur quatre vivra en Afrique. D’ici à 2100, la population de ce
continent quadruplera, passant de 1 à près de 4 milliards. Ces milliards d’habitants nouveaux,
il faudra les nourrir, les déplacer, les soigner. Les besoins sont énormes et ce d’autant qu’une
classe moyenne émerge fortement, exigeante et aspirant au confort moderne. C’est ainsi que,
d’après Global Construction 2025, le secteur de la construction africain connaîtra la deuxième
plus forte croissance mondiale dans les années à venir. Le continent devra aussi accélérer son
développement agro-industriel et moderniser son secteur des transports pour faire face à la
demande. Confrontée à ces enjeux majeurs, l’Afrique, si elle veut se donner les moyens de son
essor économique, social et politique, doit pouvoir compter sur une énergie fiable,
économiquement abordable et disponible. Le défi est de taille.
Aujourd’hui, l’Afrique est un continent où l’accès à l’énergie demeure extrêmement sommaire.
Une personne sur quatre a accès à l’énergie en Afrique subsaharienne. En milieu rural, on parle
d’une personne sur dix. En Côte d’Ivoire par exemple, où seules 2800 localités sur les 8500 du
pays sont électrifiées, le taux d’électrification n’est que de 65%. Dans d’autres pays, tels que le
Niger, la République Centrafricaine ou le Malawi, le taux d’électrification demeure inférieur à
40% en 2014-2015. Depuis une vingtaine d’années, la plupart des pays du continent sont en
proie à une crise énergétique récurrente alors même qu’un potentiel remarquable existe.
2) Pétro-dépendance et crises, 20 ans d’enlisement
Les fluctuations du prix du baril du pétrole dans un contexte de forte dépendance à cette
énergie fossile (les pays africains ont, d’après l’IRENA, importé l’or noir à hauteur de 18
milliards de dollars, somme qui dépasse celle reçue en aide étrangère), les coûts
d’investissement rendus nécessaires pour remplacer des équipements de production de plus en
plus vétustes, la mauvaise évaluation de la demande en hausse exponentielle, les pertes sur les
réseaux et les fraudes n’ont cessé d’installer la plupart des pays dans une crise énergétique puis
alimentaire endémique depuis la fin des années 2000.
Ceci a eu pour conséquences des délestages de plus en plus fréquents et de plus en plus
longs, l’augmentation des prix de base, du prix de l’électricité et la nécessité pour les États de
débourser de lourdes subventions pour soutenir le sous-secteur de l’électricité (pour l’année
2010, et pour le seul continent africain, le montant des subventions du secteur pétrolier est
estimé à 50 milliards de dollars, IRENA, 2013).
Dans le même temps, le continent africain subit de plein fouet les effets du
réchauffement climatique (encadré ci-contre) et les conséquences de l’épuisement du stock des
énergies fossiles, dont personne ne mesure encore l’ampleur de l’impact sur le marché de
l’énergie de demain.
Le constat est simple. La population africaine ne pourra pas continuer à subir la forte
précarité énergétique tout en payant l’énergie, les soins de santé et le transport les plus chers au
monde. La planète ne pourra pas absorber l’impact et le coût environnemental du
développement d’un continent de plusieurs milliards d’habitants dont les besoins croissent de
façon exponentielle. Si le monde occidental, et les grands pays émergeant comme la Chine,
l’Inde, le Brésil, etc., ont fondé leur essor sur l’énergie fossile, l’Afrique devra et peut faire
autrement. Pour cela, il convient de changer notre regard sur l’énergie. En commençant par
partir des besoins et donner priorité à la diversification des ressources, notamment locales. Se

57
tourner vers d’autres sources d’approvisionnement en énergie que les énergies conventionnelles
peut plus que jamais contribuer à relever le défi de son émergence économique.

3) Miser sur l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables pour sortir


durablement de la crise

Avec une moyenne quotidienne d’ensoleillement comprise entre 5,25 et 7 kWh/m2/jour, un


potentiel hydroélectrique exceptionnel et une des plus importantes biomasses d’Afrique
(estimée en moyenne à 15 millions T/an) la Côte d’Ivoire, la République démocratique du
Congo comme le Gabon détiennent de très importants gisements d’énergies renouvelables. La
solution énergétique pour sortir de la situation récurrente de crise énergétique Observée dans
nombre de pays passe parfois par la tentation de mettre en place des centrales thermiques de
source non renouvelable telle que le charbon. En effet, selon les promoteurs de centrales à
charbon, il s’agit d’un combustible encore abondamment disponible dans le sous-sol terrestre
(réserves estimées à 150 ans), peu onéreux et donc adapté aux économies des pays en
développement. À ce jour, les réserves mondiales de charbon sont nettement plus importantes
que celles de pétrole et du gaz naturel et donc le coût du charbon est inférieur, la raréfaction
déjà engagée du pétrole accentuera dans les esprits le recours au charbon (puisque les industries
se reporteront vers le combustible charbon pour l’utiliser soit directement, soit pour le
transformer en pétrole lorsque le pétrole sera trop cher). La concurrence accrue pour accéder
aux mines de charbon bon marché finira donc par renchérir son prix.
Par ailleurs, le choix de l’alternative charbon envisagée par certains pays du continent ne va pas
dans le sens de la sécurisation des besoins énergétiques. Des pays comme la Côte d’Ivoire, non
productrice du minerai charbon et qui a maintenu jusqu’à récemment une relative indépendance
énergétique grâce à ses ressources hydraulique, pétrolière et gazière, pourrait se retrouver
dépendante des exportations pour son approvisionnement en combustible si une telle option
était choisie. Et ce sur une forte proportion de son parc de production. Notons qu’en novembre
2010, une vague de froid touchant la Chine entraîna subitement une demande plus forte de ce
pays en charbon qui se répercuta en une hausse de 3 % du prix d’exportation du charbon en
Afrique du Sud qui détient 90 % du charbon africain. Il s’agissait de la neuvième hausse
consécutive de ce prix, qui atteignait ainsi son record depuis 2008. Alors, le passage au charbon
pourrait certes apporter un soulagement immédiat à la crise énergétique qui touche certains pays
mais l’accalmie pourrait être de courte durée, car ces pays pourraient tomber dans une spirale
d’augmentation des prix du combustible, qui les forcerait alors à trouver une solution vraiment
durable à leur problème énergétique.
Du point de vue environnemental, le passage au charbon est une mauvaise nouvelle bien que
ces technologies en développement ouvrent de nouvelles perspectives moins polluantes, ce
minerai étant de loin la source d’énergie fossile la plus émettrice de gaz à effet de serre, sans
parler des autres impacts environnementaux. Aux États-Unis, les efforts de lutte contre le
changement climatique remettent en cause de nombreux projets de nouvelles installations de
centrales au charbon. Les centrales à charbon pourraient entraîner une augmentation
Considérable des émissions de gaz à effet de serre dans un pays où les changements climatiques
menacent déjà de manière extrêmement préoccupante certains milieux naturels et populations.
(Encadré II) Pourtant une alternative existe, propre et durable, pour garantir
l’approvisionnement Energétique du pays en protégeant l’environnement, et qui pourrait être
déployée à un coût probablement comparable aux investissements nécessaires. Le premier volet

58
de l’alternative consiste à développer massivement les énergies renouvelables disponibles sur
le territoire, à travers des projets d’envergure (et non des micro-projets comme actuellement),
constituant un mix énergétique basé essentiellement sur le solaire photovoltaïque aujourd’hui
quasi inexistant, l’énergie hydraulique et la biomasse. Et ce d’autant plus que certains pays
africains sont riches de ces ressources renouvelables. Et ne possèdent pas de charbon.
L’autre volet de la solution est de coupler cette production essentiellement d’origine
renouvelable à une maîtrise systématique de la demande énergétique au niveau des
consommateurs. En effet, aujourd’hui, malgré sa rareté, l’énergie est utilisée dans les villes
africaines de façon irrationnelle, générant un grand gaspillage.
Réformer les modes de construction pour les adapter au climat, éduquer les professionnels du
bâtiment, les industriels et les consommateurs, promouvoir les bonnes pratiques de maîtrise
énergétique feront assurément baisser la demande énergétique globale et, dans le même temps,
permettra de réduire les investissements nécessaires pour accroître les capacités de production
d’énergie.
Cette solution audacieuse « Énergies renouvelables + Maîtrise énergétique » est loin d’être
irréaliste dès lors que les gouvernements et tous les acteurs du secteur prennent les mesures qui
s’imposent.
Dans des pays où l’électricité serait principalement issue des énergies renouvelables :
• le combustible nécessaire à la production d’électricité ne serait plus jamais un problème
puisque les ressources nécessaires (soleil, hydraulique, biomasse, etc.) sont disponibles
gratuitement ou à très faible coût et en quantité illimitée, et cela pour une durée éternelle
puisqu’il s’agit de sources renouvelables (contrairement au charbon minéral ou au fioul utilisé
dans les centrales actuelles) ;
• la combinaison raisonnée des différentes sources d’énergies renouvelables, appuyée par un
recours modeste à certaines formes d’énergies fossiles, doit permettre de gérer le caractère
intermittent de l’électricité d’origine solaire ou éventuellement éolienne ;
• la production d’une électricité fiable, continue et générée par des producteurs domestiques
répartis dans le pays, donc indépendante de toute importation étrangère, garantira la sécurité
énergétique totale de ces pays ;
• chaque bâtiment, terrain ou point d’eau pourrait être utilisé pour générer de l’électricité ;
• les dégradations environnementales collatérales à l’exploitation des énergies fossiles
(contamination des eaux, dégradation des terres, pollution de l’air, etc.) seront réduites ;
• les économies nationales seraient fortement dynamisées par le développement du secteur des
énergies renouvelables, en particulier des industries domestiques réduisant la dépendance aux
importations et créant davantage d’emplois ;
• certains pays pourraient devenir des modèles en matière de développement Durable et de lutte
contre les changements climatiques en Afrique et dans le monde, augmentant la confiance des
investisseurs étrangers.
Cependant, le déploiement massif des énergies renouvelables permettant le remplacement
progressif des centrales aux énergies fossiles existantes ne pourra se produire qu’en réformant
en profondeur la réglementation actuelle pour poser les bases d’un cadre encourageant et
soutenant pleinement la production durable d’énergie propre et la maîtrise de la demande
d’énergie. Notamment en privilégiant une politique basée sur un prix d’achat garanti.

59
4) Booster la production d’énergies renouvelables avec un prix d’achat garanti
Au cours des vingt dernières années, d’innombrables mécanismes d’incitation aux énergies
renouvelables ont été expérimentés dans le monde avec plus ou moins de succès. La plupart
des pays ayant adopté une politique visant à augmenter rapidement la production d’énergies
renouvelables de manière simple, efficace et durable ont cependant fini par adopter le même
mécanisme, qui a effectivement permis un déploiement des énergies renouvelables à une
échelle bien supérieure et à un coût bien plus faible que toute autre stratégie alternative
connue. Cette stratégie est celle du prix d’achat garanti, ou Feed-in Tariff (FiT), déjà
adoptée par 57 pays dans le monde, y compris 20 pays sur 27 dans l’Union européenne et
28 pays en développement, dont 6 en Afrique (Afrique du Sud, Algérie, Île Maurice, Kenya,
Tanzanie, Ouganda). La supériorité de cette stratégie en termes d’efficacité et de réduction
des coûts engagés par rapport aux autres types d’incitations aux énergies renouvelables a
été confirmée unanimement par les plus éminents spécialistes du secteur. Le FiT repose sur
l’obligation pour le ou les opérateurs d’un réseau électrique d’acheter à un prix fixé et sur
une longue durée (15-20 ans) l’électricité produite par un particulier ou une entreprise à
partir d’énergie renouvelable. Avec ce système, une famille ou une entreprise ivoirienne
pourrait par exemple investir dans des panneaux solaires et les raccorder au réseau, puis être
rémunérée pour chaque kWh produit et injecté sur le réseau. En d’autres termes, le courant
électrique circule dans le sens inverse du sens conventionnel, c’est-à-dire du consommateur
(devenu producteur indépendant) au distributeur historique d’électricité (devenu acheteur
du courant produit). Le profil des opérateurs pouvant bénéficier d’une politique nationale et
transparente sur les Feed-in Tariff est très diversifié :les autoproducteurs industriels déjà
présents (qui, actuellement, ne revendent pas leur excès d’électricité sur le réseau), des
opérateurs publics ou privés se positionnant comme gestionnaires de futurs parcs
d'éoliennes, de centrales solaires, hydrauliques ou utilisant la biomasse, mais également les
innombrables particuliers qui aujourd’hui mettent en route leur générateur au moindre
délestage. En effet, ces derniers accepteraient probablement d’investir dans des panneaux
solaires sur le toit de leur domicile si les bases juridiques, techniques et financières étaient
établies. En échange du rachat d’électricité par l’entreprise nationale qu’ils ne
consommeront pas sur place, leur production soulagerait une partie des tensions sur le
réseau, contribuant ainsi à réduire le recours au délestage.
On pourrait imaginer un dispositif doublé d’un engagement contractuel pour que le
particulier s’équipant de panneaux solaires ne subisse plus jamais de délestage.
Juste retour des choses en effet, les consommateurs ayant les moyens de recourir à un
générateur sont d’une part, ceux qui auraient les moyens d’investir dans les panneaux
photovoltaïques et d’autre part, ceux qui souhaitent se garantir un accès à l’électricité 24
heures par jour.
Par ailleurs, il est à noter que l’instrument que constituent les Feed-in Tarif s’applique
également à la production d’électricité issue de la cogénération. La Côte d’Ivoire, par
exemple, possède l’un des tissus industriels les plus développés d’Afrique subsaharienne.
Les industriels pourraient par des FiT être encouragés à investir dans des systèmes de
cogénération s’ils ont l’assurance de pouvoir revendre sur le réseau national les éventuels
excès de production d’électricité obtenus.
Nous espérons que ce plaidoyer ouvrira les portes d’un véritable dialogue et permettra aux
dirigeants africains de comprendre qu’une voie est possible pour sortir de l’impasse et des

60
délestages à répétition en misant fortement sur les énergies renouvelables et l’efficacité
énergétique.
5) Le système des prix d’achat garanti (FiT)
Le mode d’emploi du système FiT est d’un intérêt manifeste.
a) Comment fixer le tarif ?
Tout d’abord, le tarif d’achat du kWh injecté par un producteur indépendant d’électricité
sur le réseau doit être fixé, de telle sorte qu’il soit à hauteur suffisante pour stimuler les
investissements et garantir un amortissement à long terme des équipements sans pour autant
devenir excessif, ce qui rendrait le système trop coûteux ou économiquement irrationnel.
Le choix d’un tarif adéquat est une opération délicate, mais de grands principes sont
désormais identifiés pour le déterminer, ainsi que des méthodes pratiques pour calculer plus
facilement le tarif optimal. La plupart des pays ayant mis en œuvre une politique de FiT
ont, dans un premier temps, eu recours à un calcul simplifié du tarif avant de le complexifier
progressivement en fonction des expériences acquises et grâce à une révision périodique
des mesures adoptées. La Côte d’Ivoire pourra suivre cette approche en décidant par
exemple d’une révision annuelle du tarif de rachat pour l’adapter rapidement aux
éventuelles évolutions, ce changement ne s’appliquant qu’aux nouveaux inscrits et non à
ceux s’étant précédemment engagés et dont le tarif est garanti par la loi soutenant le FiT sur
toute la durée de l’engagement.
Le principe fondamental du calcul du tarif est qu’il reflète les coûts réels de l’équipement
acquis pour la production d’énergies renouvelables en permettant un bon retour sur
investissement, ce qui implique en particulier qu’il varie en fonction de la technologie.
Ainsi, de l’électricité produite à partir de panneaux photovoltaïques, plus coûteux à l’achat,
sera rémunérée plus généreusement que l’électricité produite à partir d’autres sources moins
coûteuses (éoliennes, biomasse). Les coûts d’échelle, qui rendent une installation plus
importante comparativement moins chère qu’un petit équipement, peuvent aussi être
facilement reflétés par un tarif variant en fonction de la taille de l’installation. En fonction
du contexte, d’autres paramètres comme l’inflation ou une indexation dégressive
d’évolution technologique peuvent être pris en compte pour que les tarifs reflètent avec
encore plus de précision les coûts réels des technologies engagées. Des méthodes
économétriques existent pour définir la grille de tarif de rachat garanti qui soit à la fois
optimum pour l’ensemble des consommateurs et suffisamment attractif pour attirer les
opérateurs.
b) Pour quelle durée ?
La durée du paiement versé grâce à la politique de FiT doit être suffisante pour que le
producteur indépendant obtienne un retour sur investissement sur le long terme. Cette
condition est indispensable pour réduire le risque et donc stimuler les investissements, en
permettant aux banques d’accorder des prêts aux conditions avantageuses pour leurs clients.
Cette durée doit donc être liée au montant du tarif : plus la durée de paiement est courte,
plus le montant du tarif doit être élevé pour amortir rapidement l’achat. La durée qui s’est
imposée dans les pays ayant un FiT est de 15-20 ans, ce qui correspond à la durée de vie de
la plupart des équipements d’énergies renouvelables.

61
c) Avec quelles contraintes ?
Outre la garantie à long terme du paiement de l’électricité, une autre condition essentielle
d’un FiT est l’obligation, pour le distributeur d’électricité, d’acheter toute l’électricité
produite à partir d’énergies renouvelables, quelle que soit la demande des consommateurs
raccordés au réseau. Cette condition est tout aussi nécessaire à la diminution des risques liés
à l’investissement dans les énergies renouvelables, puisqu’elle garantit au producteur
indépendant un revenu effectivement proportionnel à la quantité d’électricité injectée sur le
réseau, sans risque de produire une électricité qui ne sera pas rachetée. Grâce à cette mesure,
les énergies renouvelables prennent véritablement le pas sur les énergies fossiles reléguées
au rang d’énergies secondaires utilisées uniquement pour combler la demande résiduelle
non satisfaite par les énergies renouvelables sur le réseau. Progressivement, le
développement des énergies renouvelables, notamment issu de la gestion durable de la
biomasse, réduira cette demande résiduelle jusqu’à l’éliminer lorsque les énergies
renouvelables permettront de satisfaire entièrement la demande. Il deviendra alors même
possible d’exporter l’électricité supplémentaire pour la vendre aux pays voisins. Le principe
d’obligation d’achat est par exemple en vigueur depuis plusieurs années déjà dans de
nombreux pays européens, où le distributeur doit acheter immédiatement et sans condition
l’électricité produite à partir d’énergies renouvelables, au tarif fixé par le FiT.

62
Chapitre IX : Enjeux et défis des énergies propres et de l’efficacité
énergétique en Afrique
Introduction
Le système énergétique africain, dépend excessivement des énergies fossiles, du charbon,
du pétrole et du gaz naturel entrant pour 85 % dans le bilan de la consommation mondiale.
Par ailleurs, cet accès aux services énergétiques modernes est particulièrement inégal
puisque près de 820 millions de personnes, soit 80 % de la population du continent,
dépendent encore de la biomasse énergie pour répondre à leurs besoins de cuisson, de
chauffage, voire d’éclairage alors que l’Afrique est une formidable réserve d’énergies
Renouvelables pour elle-même et même pour les autres continents, la part de l’énergie
propre reste insignifiante dans son mix énergétique. L’énergie durable est une composante
essentielle de l’économie verte. Elle représente un droit universel aux services énergétiques
de base et, en tant que tel, doit interroger nos modes de consommation et de production
énergétique notamment en utilisant des outils de réglementation locaux, nationaux et
internationaux. Alors que l’accès à l’énergie est inégal et limité dans un contexte de
raréfaction des ressources et de changement climatique, les énergies propres combinées à
une politique d’amélioration de l’efficacité énergétique sont la solution pour améliorer la
situation de l’accès à l’énergie des populations africaines.
En effet, l’accès à l’énergie est l’une des conditions essentielles du développement car elle
conditionne la satisfaction des besoins sociaux de base (eau, nourriture, santé, éducation,
etc.). Le continent africain reste à la traîne en matière d’accès à l’énergie, tant dans les zones
rurales (où les taux d’électrification sont extrêmement faibles) que dans les zones urbaines,
touchées par des problèmes de sécurité de l’approvisionnement. L’Afrique, qui compte 15
% de la population mondiale, ne représente que 5 % de la consommation finale d’électricité,
et une consommation d’énergie par habitant deux fois inférieure à la moyenne mondiale.
Alors que la lutte contre la pauvreté demeure la priorité absolue pour le continent, celui-ci
souffre d’un déficit d’investissement, notamment technologique, qui le condamne bien
souvent à l’utilisation des énergies conventionnelles, de la biomasse traditionnelle aux
énergies fossiles.
La transition vers les énergies renouvelables n’est pas un choix idéologique mais une
nécessité face à l’épuisement programmé des énergies fossiles et face au défi immense que
représente le changement climatique.
1) Les défis et enjeux
La flexibilité et la liberté que procure la maîtrise de l’énergie sont des atouts maîtres pour
l’émergence des pays en développement qui sont pour la plupart en phase de conception et
de développement de leurs infrastructures énergétiques.
Cela est particulièrement vrai pour l’Afrique où les taux d’accès aux services énergétiques
modernes sont parmi les plus bas au monde.

63
Pour faire face au double défi de l’accès à l’énergie et de la lutte contre le changement
climatique, le développement des énergies renouvelables en Afrique sera confronté à trois
enjeux majeurs :
• l’enjeu économique et financier : malgré d’importants développements technologiques,
les technologies d’énergie propre demeurent relativement plus coûteuses que les techniques
conventionnelles, notamment fossiles. Face à la priorité donnée aux enjeux de
développement, et malgré les nombreux avantages dont sont dotées les énergies
renouvelables – EnR (emplois locaux, prix orientés à la baisse, réduction de la dépendance
aux énergies fossiles), les États et les populations africains continuent aujourd’hui à donner
la priorité aux énergies fossiles, faute de moyens financiers. Pourtant, en cas de prix élevé
du diesel et du gaz, le photovoltaïque est très rapidement compétitif. L’un des enjeux
principaux est donc le financement de la transition énergétique africaine, pour permettre
aux États comme aux communautés de mettre en place des politiques publiques soutenant
le développement des EnR. Cela doit donc être une des composantes essentielles du Fonds
vert pour le climat adopté à Cancun, et qui prévoit 100 milliards de dollars US de
financements pour la lutte contre le changement climatique à l’horizon 2020 ;
• l’enjeu technologique : le développement des technologies renouvelables implique des
savoir-faire nouveaux, aussi bien pour les communautés que pour les entreprises assurant
les services énergétiques que dans le domaine de la recherche. Aujourd’hui, les technologies
renouvelables sont principalement concentrées entre les mains de quelques acteurs, dans les
pays industrialisés et les pays émergents, malgré les expérimentations développées par les
acteurs de terrain dans le cadre de projets de développement. La mise en place de
mécanismes de transferts de technologies ainsi que le déploiement de stratégies de
recherche sur le territoire africain sont donc les conditions sine qua none de l’accès des
communautés aux services énergétiques renouvelables ;
• l’enjeu gouvernance : l’accès de tous aux énergies renouvelables implique une redéfinition
de la gouvernance des politiques énergétiques dans les pays africains. Les ONG et les
communautés, qui développent depuis plus d’un demi-siècle des projets innovants dans ces
domaines, sont en effet les mieux à même de participer à la définition des technologies à
mettre en place, dans la mesure où elles connaissent parfaitement les besoins des
populations. Aujourd’hui, la gouvernance énergétique reste malheureusement concentrée
dans les mains des acteurs institutionnels et n’encourage pas la mise en place de politiques
publiques adaptées, prenant en compte les réalités du terrain.
Par ailleurs, les problèmes suivants doivent être pris en compte :
• les économies de l’Afrique de l’Ouest sont confrontées au défi de la restructuration de la
demande dans le secteur informel de l’énergie, qui est actuellement dominé par le bois de
chauffe et à celui de devoir créer de nouveaux marchés pour les biocarburants à destination
des transports et de l’industrie. Ces changements sont essentiels au développement des
systèmes de production et de distribution, à la création de nouvelles entreprises, à la
mobilisation des investissements et à l’augmentation des revenus des pauvres dans les zones
rurales et dans les zones urbaines. Les politiques publiques doivent promouvoir la
suppression progressive de la production et de l’utilisation du charbon de bois, encourager
fortement la production et la commercialisation de nouveaux carburants et des réchauds
plus verts, établir des mandats de mélange de carburants pour les transports et assurer

64
l’approvisionnement en nouvelles sources d’énergies renouvelables dans les zones rurales
et urbaines. Créer un marché durable de la bioénergie dépend d’objectifs bien définis et de
cibles spécifiques et délimitées dans le temps ;
• la planification foncière est un élément capital. Les gouvernements peuvent choisir
d’assigner des terres directement à des producteurs locaux ou à des producteurs étrangers
dans des conditions de systèmes foncier spécifiques. Ils peuvent donc garantir le contrôle à
long terme. Une telle approche a été considérée dans plusieurs pays, bien qu’elle doive
encore être évaluée afin d’obtenir des résultats concluants. Quoi qu’il en soit, renforcer la
propriété foncière de façon à protéger les petits exploitants et les producteurs industriels
doit faire partie des cadres d’action.
2) Les orientations de politiques
Comme les autres secteurs économiques, l’énergie occupe une place importante dans les
politiques gouvernementales. L’engagement politique pour ce secteur est marqué par
l’adoption d’un cadre institutionnel, législatif et réglementaire. Les principes du
développement durable ont été appliqués à toutes les formes d’énergie. Le continent africain
possède un potentiel considérable pour le développement des énergies renouvelables mais
ne dispose pas de politique énergétique forte, clairement définie et dotée de moyens
financier importants, pour la promotion de celles-ci. Ainsi, le sous-secteur de l’énergie
solaire a commencé à occuper une place de choix dans les préoccupations des pouvoirs
publics en 1995, avec des produits développés, notamment dans les utilisations ponctuelles
telles que le pompage solaire, les télécommunications, le chauffage, la réfrigération,
l’éclairage, etc. Dans le cadre de l’amélioration de la situation, l’Union économique et
monétaire Ouest-Afrique (UEMOA) s’est alliée au Hub rural pour l’Afrique de l’Ouest et
l’Afrique du Centre, et a commandité un rapport réalisé par la Fondation pour les Nations
Unies (FNU), le Centre international pour le commerce et le développement durable
(ICTSD) et l’Energy and Security Group (ESG).
Le but de ce rapport était d’évaluer le potentiel du secteur agricole en matière de production
des bioénergies et d’identifier les obstacles dans les pays membres de l’UEMOA, en tenant
compte du besoin vital de sécurité alimentaire de la région. Plusieurs approches pour couvrir
les coûts différentiels des politiques d’énergie Renouvelable et de la bioénergie sont
possibles.
Elles comprennent la plupart du temps :
• l’ajout d’une très petite surcharge sur les factures d’électricité des consommateurs. Cette
surcharge peut être réinvestie dans un fonds public consacré au soutien à la bioénergie et
aux énergies renouvelables. Ceci peut comprendre le soutien aux programmes de prêts, aux
activités de recherche et de développement et aux programmes de formation. Aux États-
Unis, par exemple, 17 États ont créé des fonds d’allocations publiques pour le
développement de la bioénergie et des énergies renouvelables, qui devraient rapporter 6.8
milliards de dollars américains d’ici à 2017 pour soutenir financièrement ces technologies ;
• l’imposition d’une taxe carbone sur les carburants fossiles ;
• la mise en place d’un fonds dédié, directement financé par le gouvernement ou soutenu
par des bailleurs de fonds.

65
La politique en matière d’énergies renouvelables de la communauté économique des États
de l’Afrique de l’Ouest – CEDEAO (PERC) a été édictée par les Chefs d’État et de
gouvernement de pays membres de la CEDEAO en juillet 2013. Son objectif premier était
de « s’assurer que de plus en plus des sources d’énergies renouvelables comme les énergies
solaire et éolienne, les petites centrales hydrauliques et les bioénergies alimentent le réseau
électrique et assurent l’accès aux services énergétiques dans les zones rurales ».
Par ailleurs, la CEDEAO a adopté en octobre 2012, la stratégie régionale d’éclairage
efficace. Cette initiative phare du Conseil de coopération économique du Pacifique (PEEC)
vise l’élimination progressive de lampes à incandescence grâce à l’application d’une
approche de politique intégrée comportant les deux étapes suivantes :
• promotion de l’éducation, de l’institutionnalisation et de la réglementation ;
• adoption, d’ici à 2016, des politiques permettant l’élimination progressive des lampes à
incandescence d’ici à 2020.
En avril 2011, pour gérer la crise énergétique en Afrique de l’Ouest, les gouvernements des
pays membres de l’Union économique et monétaire pour l’Afrique de l’Ouest (UEMOA)
ont adopté une stratégie énergétique commune, soit l’initiative régionale pour l’énergie
durable (IRED). L’objectif premier de l’IRED est d’offrir à tous les habitants de l’UEMOA
d’ici à 2030 un accès à une source d’énergie propre à bas prix au sein d’un large marché
ouest-africain d’énergie propre. Pour atteindre cet objectif, l’IRED vise plus
particulièrement la promotion de l’efficacité énergétique et de l’énergie renouvelable. Dans
le cadre de l’IRED, un réseau d’organismes nationaux a été mis sur pied pour favoriser la
mise en œuvre de l’initiative dans chaque pays membre. L’instigateur de l’IRED est le
département de l’énergie, des télécommunications et des technologies de l’information.
Les objectifs stratégiques précis de l’IRED sont de :
• assurer un accès universel à l’électricité en faisant passer le taux d’électrification dans
l’UEMOA de 30 % (en 2008) à 80 % d’ici à 2020 et à 100% d’ici à 2030 ;
•réduire le prix de l’électricité pour renforcer la compétitivité et la croissance économique
des pays de l’UEMOA. L’objectif est de diminuer le prix moyen de l’électricité dans
l’UEMOA de 0,06 USD/kWh d’ici à 2020 ;
• développer une énergie propre en exploitant de façon optimale le potentiel de l’UEMOA
dans l’hydroélectricité, l’énergie solaire et la biomasse, permettant ainsi aux membres de
tirer le meilleur parti des mécanismes pour un développement propre et des fonds
disponibles sur le marché du carbone.
L’efficacité énergétique est une composante essentielle de l’IRED, comme le démontre
clairement le deuxième axe stratégique : « Élaborer un plan régional de maîtrise de la
consommation d’électricité ». Le plan d’action inclus dans l’IRED se divise en trois phases
(2010 à 2012, 2013 à 2020 et 2021 à 2030). Lors de la phase I (2010 à 2012), le Programme
régional d’économie d’énergie (PREE) devrait être mis en place. Doté d’un budget
d’environ 30 millions de dollars américains (15 milliards XOF), le PREE vise les quatre
éléments suivants :
• le soutien institutionnel pour la création d’organismes d’efficacité énergétique dans les
États membres ;
• la distribution de lampes écoénergétiques dans les États membres ;
• l’ajout d’étiquettes de performance énergétique sur les appareils électroménagers dans
l’UEMOA ;

66
•l’ajout d’exigences en matière d’efficacité énergétique aux codes du bâtiment des États
membres.
Le programme de normalisation et d’étiquetage prévoit de :
• mener des évaluations sur la possible réduction des pointes de consommation d’électricité
grâce à l’utilisation de lampes écoénergétiques ;
•utiliser des dispositifs d’éclairage écoénergétiques et des ensembles solaires pour
l’éclairage des voies publiques ;
•acheter des dispositifs d’éclairage écoénergétiques et les distribuer aux ménages ;
•Trouver des partenaires et construire une usine de fabrication de lampes écoénergétiques
dans l’UEMOA.
3) Les bonnes pratiques
C’est dans un contexte difficile que la banque africaine de développement, les agences des
Nations Unies et les communautés économiques régionales mettent en place et en œuvre
des programmes ambitieux de maîtrise de l’énergie. On pense notamment :
• au cadre d’investissement dans l’énergie propre pour l’Afrique du groupe de la Banque
africaine de développement (BAD) ;
• au cadre d’investissement pour l’énergie propre et le développement du groupe de la
Banque mondiale ;
• aux directives efficacités énergétiques et plan global efficacité énergétique de l’Union
européenne ;
• au programme énergie pour le développement durable du PNUD ;
• à l’initiative régionale pour l’énergie durable de l’Union économique et monétaire pour
l’Afrique de l’Ouest (UEMOA) et à son programme régional d’efficacité énergétique ;
• la création de l’Agence internationale de l’énergie renouvelable (IRENA) et de l’ECREEE
participe à la même dynamique.
Un cadre réglementaire et institutionnel régional pour la bioénergie existe, et est fondé sur
le livre blanc CEDEAO-UEMOA de 2006, qui offre une structure appropriée pour
l’intégration de la bioénergie au sein des objectifs d’accès à l’énergie établis dans la région
de la CEDEAO.
Les cadres réglementaires et institutionnels auront besoin de refléter les différences de
capital naturel, de structure des secteurs forestier et agricole, des options pour le
développement de la bioénergie et de structure des processus décisionnels politiques des
différents pays :
• au Mali, le cadre de réglementation pour la bioénergie est défini dans les politiques
nationales d’énergie, la stratégie nationale pour l’énergie renouvelable et la stratégie
nationale pour le développement de biocarburants. Toutes ces initiatives seront mises en
place par l’Agence nationale de bioénergie
(BIOCARMA) ;
• au Bénin, une commission nationale pour le développement de la bioénergie est
actuellement mise en place.
La présence de tous les protagonistes (institutionnels, publics et privés) au sein de la
commission sera nécessaire pour pouvoir coordonner les politiques à travers les différents
secteurs impliqués dans le développement de la bioénergie ;
• au Sénégal, le ministère des Biocarburants et des Énergies renouvelables joue un rôle
central dans le gouvernement national, même dans les cas où les décisions liées aux

67
biocarburants sont sous la responsabilité d’autres ministères, tels que l’Énergie ou
l’Agriculture, ou leurs organismes affiliés ;
• au Niger, le secteur de la bioénergie est géré par le ministère de l’Énergie, le ministère de
l’Écologie et le ministère de l’Agriculture. Un comité multisectoriel national de l’énergie a
été établi en 2005 et une structure interministérielle pour la coordination a été créée en 2006.
Un cadre national pour une consultation sur l’énergie domestique et alternative doit être
créé. Il sera coordonné par le Conseil national de l’environnement pour un développement
durable (CNEDD), les représentants des structures responsables de l’énergie, l’agriculture
et l’environnement, et d’autres ministères techniques concernés.
Un plan directeur dans le domaine de la bioénergie pour la période de 2009 à 2011 a été
développé dans le cadre du rapport commandé par l’UEMOA. Les activités principales sont
organisées en cinq catégories essentielles :
• le développement des ressources ;
• les politiques publiques ;
• le financement ;
• le développement de marché ;
• le transfert de technologie et la recherche et le développement (R&D).
4) Les perspectives et recommandations :
Dans le cadre de la généralisation des initiatives, force est de constater qu’il est nécessaire
d’adopter une stratégie de bouquet de technologies adaptées aux enjeux de développement,
afin de faciliter l’accès de tous aux énergies renouvelables.
Plusieurs domaines méritent d’être poussés, comme :
• la géothermie : les sources d’énergie géothermique les plus abondantes se rencontrent
dans les régions de tectonique intense, dont l’Islande est l’exemple le plus connu où la
géothermie est particulièrement bien exploitée, mais parmi lesquelles il ne faut pas oublier
les Antilles ou La Réunion. Le développement de la géothermie peut aussi être envisagé en
Afrique en recherchant des roches ignées chaudes à grande profondeur dans des fossés
tectoniques. Cette perspective appelle d’importants travaux de recherche : exploration
géologique, étude mécanique et hydrologique des roches, modélisation afin d’évaluer les
incidences du procédé sur les aquifères situés dans les couches supérieures et sur les terrains
superficiels ;
• l’éolien qui présente un fort potentiel dans les pays les moins avancés. Sous des conditions
de vent adaptées, il se situe déjà dans la zone de compétitivité des énergies renouvelables.
Si les principaux modèles sont adaptés à l’approvisionnement d’un réseau électrique, il
existe aussi des formes d’éoliennes adaptées à l’électrification rurale. Couplé à d’autres
sources d’énergies pour remédier aux intermittences, l’éolien présente un fort potentiel pour
l’Afrique. Cette technologie a cependant des coûts d’investissement plus élevés que les
énergies fossiles, et nécessite une main-d’œuvre qualifiée, ce qui la rend parfaitement
éligible aux différents mécanismes de transfert de technologie ;
• la méthanisation des déchets : la production de biogaz, obtenue par la fermentation des
déchets organiques, représente une forme d’énergie renouvelable adaptée aux besoins des
zones rurales et isolées, et sans impact sur l’environnement. La méthanisation permise par
les biodigesteurs permet d’accroître l’accès à l’énergie propre pour l’éclairage et la cuisson
des aliments et réduit les dépenses des ménages ruraux et périurbains en bois de chauffe, en
charbon et en pétrole. L’effluent ou résidu de bouse (sans le méthane qui s’est échappé sous
forme de gaz) est un engrais organique de meilleure qualité que le fumier et le compost

68
ordinairement produits. Il permet ainsi d’accroître la production agricole et de réduire la
charge de travail des femmes. Les résultats scolaires sont améliorés grâce à l’éclairage. Les
conditions sanitaires sont améliorées car les maladies liées à la fumée et aux odeurs sont
diminuées. La productivité animale est améliorée grâce à la stabulation et par une meilleure
prise en charge alimentaire et sanitaire du bétail. Enfin, l’implantation des biodigesteurs est
une opportunité de création d’emploi dans la zone d’activité ;
• le solaire Photovoltaïque (PV) : le solaire photovoltaïque est une des énergies
renouvelables au plus fort potentiel en Afrique avec l’hydroélectricité. En parc au sol, elle
est parfaitement adaptée au réseau électrique, mais peut aussi, en complément d’énergies
techniques (ou installée avec des batteries), s’imposer comme une solution d’électrification
rurale. Son principal défaut demeure son coût de production encore plus élevé que les
solutions thermiques (gaz, pétrole, charbon), mais ceux-ci sont orientés à la baisse, et le
solaire PV devrait être compétitif avec les énergies fossiles d’ici à dix ans. En outre,
l’Afrique ne compte pas d’unité de production de panneaux importante, ce qui la rend
dépendante des importations. Le transfert de technologies, aussi bien de production que de
mises en œuvre et de maintenance, est donc fondamental pour réussir la transition
énergétique en Afrique.
Malheureusement, certains obstacles freinent le développement de ces solutions :
– l’absence ou faiblesse du cadre politique, juridique et réglementaire pour que celui-ci soit
plus attractif que les investissements dans les énergies renouvelables ;
– le manque de prise en compte des énergies renouvelables dans la planification du
développement au niveau local ;
– le développement des filières commerciales et artisanales et des compétences dans les
différents domaines des énergies renouvelables devra être une priorité ;
– l’absence d’instruments financiers adaptés aux investissements dans les énergies
renouvelables, notamment les unités décentralisées ;
– les banques et autres institutions financières sont insuffisamment mobilisées et formées
pour le financement des énergies renouvelables.
Le solaire thermique sous la forme d’énergie solaire concentrée souffre évidemment de
l’intermittence due au manque d’ensoleillement durant la nuit. Afin de pallier cette carence,
il est envisagé de stocker l’énergie au moyen d’une transformation de phase : emmagasiner
l’énergie en faisant fondre une masse de sel (chlorure de sodium), la chaleur latente pouvant
ensuite être récupérée durant sept heures à travers des échangeurs pour actionner la turbine
et l’alternateur.
• l’hydrolien maritime et fluvial : avec son contour maritime, ses grands fleuves, l’Afrique
peut tout à fait produire une grande partie de son électricité et de manière continue à partir
de la force des courants marins et fluviaux. Cette technologie émergente forme un véritable
défi, susceptible d’accroître les partenariats durables entre vieilles économies et économies
naissantes, comme en font partie la plupart des pays africains ;
• les barrages hydroélectriques : basés sur une technologie similaire à ce qui a été décrit
précédemment, ces barrages existent dans le monde depuis les années 1920, mais leur taille
n’a cessé de croître jusqu’à atteindre en Chine des dimensions qui posent de graves
problèmes écologiques. Ces barrages ont également comme fonction d’être un formidable
élément de stockage hydraulique, permettant d’utiliser en tant que de besoin la ressource.
Semblable au stockage « météorologique », la mise en œuvre du stockage d’énergie sous
forme d’énergie potentielle de gravité d’une masse d’eau est une pratique courante dans les
usines marémotrices et dans les centrales hydroélectriques associées à des barrages :

69
Lorsque l’énergie est excédentaire et donc peu chère, on pompe de l’eau de l’aval vers
l’amont pour augmenter la hauteur de retenue dans le bassin de l’usine ou dans le barrage ;
• la biomasse : par la photosynthèse, l’énergie solaire se trouve emmagasinée dans la
biomasse stockée obtenue à partir du dioxyde de carbone et de l’eau. La biomasse est ainsi
une ressource renouvelable puisqu’elle procède à la capture du dioxyde de carbone, lequel
est ensuite libéré lors de son utilisation. Cette énergie renouvelable est la plus anciennement
exploitée par l’homme, sous forme de combustible de chauffe. Les applications actuelles
concernent la production de carburants de substitution destinés essentiellement aux
transports et aux engins : le choix s’est porté sur le bioéthanol et sur le biodiésel. La culture
intensive de biomasse destinée à la production de biocarburants peut porter atteinte à la
biodiversité, par exemple en conduisant à des déforestations.
Le développement des EnR passe aussi de la suppression progressive des subventions à la
production des énergies fossiles : les EnR souffrent aujourd’hui d’un coût bien souvent
supérieur aux énergies conventionnelles, qui sont lourdement subventionnées pour la
plupart. Les financements publics dédiés au niveau international aux énergies fossiles sont
estimés à 500 millions de dollars par an, dont plus de 100 milliards consacrés à la
production.
Ces subventions, en faussant les règles du jeu économique, freinent la transition énergétique
dans les pays les moins avancés. Il est donc souhaitable de mettre fin aux subventions à la
production d’énergie fossile, pour réorienter ces masses financières afin de soutenir les
énergies renouvelables. Les subventions à la consommation ont quant à elle bien souvent
une vocation sociale et permettent aux populations les plus vulnérables d’accéder à quelques
services de base énergétique. Cependant, orientée vers les énergies fossiles, elles
contribuent à perpétrer un modèle qui inscrit les pays les moins avancés dans une
vulnérabilité forte en renforçant la dépendance des citoyens et des entreprises aux sources
fossiles. Pour rendre attractif et possible l’utilisation des EnR, il est indispensable de mettre
en place un cadre normatif et réglementaire solide et efficace.
Chaque fois que cela est économiquement rentable, il est indispensable que les pays les
moins avancés (PMA) donnent la priorité aux énergies renouvelables en les mettant au cœur
de leur politique énergétique. Certaines énergies renouvelables sont compétitives face aux
sources fossiles, et notamment au diesel, très utilisé en zone rurale.
Pour cela, la priorité doit revenir aux sources locales d’énergies, qui doivent être porteuses
de sécurité d’approvisionnement énergétique. Dans le cadre des appels d’offres et des
politiques d’électrification, les énergies renouvelables peuvent par exemple être soutenues
par l’introduction de critères environnementaux, mais aussi par le développement d’outils
économiques comme les tarifs d’achats. Les projets énergétiques étant généralement
soutenus dans le cadre des politiques de financement, le rôle des banques de développement
et des bailleurs de fonds doit être de s’assurer que les surcoûts engendrés par ces projets,
dans les zones où les énergies renouvelables ne sont pas compétitives par rapport aux
énergies fossiles, ne viennent pas compromettre les objectifs d’accès à l’énergie. À ce
niveau, les financements innovants pour le climat doivent jouer un rôle important dans
l’accompagnement des stratégies nationales de développement sobre en GES.
Pour adapter le processus de transformation, aux besoins et suivre les politiques et les
technologies énergétiques, il est indispensable de créer des centres de recherche et de suivi.
La plupart des énergies renouvelables reposent sur des technologies importées des pays
industrialisés ou émergents. Face au défi que représentent l’accès à l’énergie et
l’électrification en Afrique, il est indispensable de développer des pôles d’excellence

70
industrielle dans ces différents secteurs, afin que le continent bénéficie de l’ensemble des
avantages des EnR, aussi bien en termes de réduction des externalités environnementales
que de création d’emplois et d’activités économiques.
La perspective décrite ci-dessus des défis énergétiques pour les prochaines décennies
appelle évidemment la question des moyens nécessaires à la prise de décisions pertinentes
et à leur mise en œuvre. Il apparaît d’abord que, tout en respectant les spécificités locales,
tant en ce qui concerne les ressources que les besoins, l’engagement doit se situer au niveau
international. Sans qu’il soit nécessaire d’invoquer l’éthique ou la vertu, la simple réalité
économique impose ce niveau de coopération pour l’harmonie et la régularité des échanges
en raison de l’importance des tâches en jeu et de leur coût. Il s’agit d’un engagement
international pour la recherche, d’un engagement international pour l’évaluation
indépendante des décisions possibles, d’un engagement international pour la construction
de démonstrateurs, de prototypes et d’installations pilotes, et d’un engagement international
pour la formation de compétences. Enfin, depuis un an, l’approche cleantech vise à
développer des technologies propres et de nouveaux usages en consommant plus
intelligemment les ressources et en réduisant la pollution. Le concept de « négawatt » met
en avant l’objectif d’économie d’énergie de cette démarche, par un changement de
technologie et d’infrastructure via :
• l’efficacité énergétique (ex : bâtiments, véhicules, systèmes de chauffage moins
consommateurs d’énergie) ;
• la sobriété énergétique, grâce à une évolution des comportements (ex : des mesures
coercitives, comme la taxe intérieure sur les produits pétroliers ayant eu une incidence sur
les choix de voitures et les habitudes de conduite). Les cleantech ne recouvrent pas un
secteur industriel en particulier, puisqu’il s’agit d’une démarche transversale à respecter
depuis la conception des nouveaux produits, services et processus, jusqu’à leur scénario
d’usage final.

71

Vous aimerez peut-être aussi