Georges Ifrah
Georges Ifrah
Georges Ifrah
La Mésopotamie
et Monsieur Ifrah
James RITTER
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Bulletin de l'APMEP n°399 - Juin 1995
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ces syslèmes contiennent tOute une gamme d'autres rclauon.s entre les suc-
cessifs signes num~riques. non pas sim plement 6 ct 10 (a rom on 5 ou 12)
mais aw.,i 2. 3. 4. 5.
- Qui plus est, les signes numériques eux lnêmes n'ont pas la même valeur
a
dans chacun dos systèmes et leurs valeurs relauves diffèrent. Par ..emple:
un pet it rond vaut dix petlles encoches dans le système qu i compte les
objets discrets, mais six lorsqu'on mesure le grain .
C'est la rationalisation de ccs différents systèmes lors de la centralisation
adm inistrative du lOt millénaire. simpli ficHt..IOn don t On peUl suivre la pro-
gression qui aboutit au système unique de base 60 (voir RrrrER 1993).
L'«abaque sumérienne>to
Dan, la secti on sur l'inventjon et la déve loppement de l'abaque ('1) en
Mésopotamie, nous somméS confrontés à un autre problème d'utili sai ion des
sources : une suggestion faite avec de nombreuses résen'es deVient une
«preuve» chez M. Hrah. Des spéculations propres à cet auteur ~ on( mélan-
gées avec une 'xposition du travru l (sérieux) d' un aUlne (ce qui semble don-
ncr une cauLÎon sclcntifique à l'ensemble).
Après une présentation fantais iste sur les "calculistes" et les abncisles
(p. 289·308), los pages 308-314 reprennent, d'une manière abusive, que lques
pages, tirées de leur contexte . d'un anic\e de l'A.syriologue Step hen
LIJ!BERMA~~ qui prouverait l'existcnce d'un mot pour «abaques») et «abacis·
le» dans les textes mésopotamiens. Une suggesûon faîte avec de nombreuses
réserves. el marquée par de nombreux points d'interrogation par Liebennan~ .
Elle est annoncée par M. U'rah comme une .confirmati on» (p. J08), ne lais-
sant place à «uucun dou(c» (p. 3 14). 011 nOie un glissemenl de ton entre Je.s
phrases mesurées de Lieberman el les certitudes de M. !fraI>- Le «our surmi-
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sc as lO ils (lm-na) meaningl> (p. 346) devient «une très nelle référence au
système des calcu li ("traduite" en akkadJen par lfrah comme obI/a, propre-
ment "pierre", Jamais "argile") (p, 310), Semblabltment le fai t de 1. uaduc-
lion de ces termes '\<attested only in lexical texts, , is lcss than certain»
(p.347) dlsparaîl du rom'n de M. Iftah, qui, non seulemenl donne, sans les
points d'inlerrogation de L iebcnnan. "abaque"J "abacistc" et "ca lculislc",
mais présenle ,on prop'" rêve (sans mentionner que cec i n'npparaît nulle part
dan s Lieberm,n) sous forme. d'une exégèse des sens "étymologiques" des
IW{JllX sumériens dab.-dlm (p. 312) eI511- me-gt (p, 3 12-313).
Pour fnire bonne mesure, M, Ifrab Y mêle des conclusions sur 1. forme e l
le sens des slsoes protosumérlens qui son t exclu sivement les siennes rnru.s
sans indiquer àu lecteur qui eSl l'auteur de quoi. Faisons celle dl:itlnclÎon ,
Les "argumen"" sur la forme du signe sm (p_ 309) sont d'lfrah ct son t
sÎnlplemem faux; le sens de "comptcr" D'est pas attesté pour ce s igne 5
l'époque archaïque (deu< prcmiers cas du signe dans le tableau p.309) où il
représenle beaucoup plus probablement le titre sa/lga (chef admlOistratif d'un
temple) ou, à la li mite IImbis(jg (scribe)'. La descriplion du signe comme
«une main affairée ... » est, bien sûr. complètement fantaisiste. La polysémie
des signe s cunéiformes eSl bien connue aujourd'hui de lout assyriologue :
mais elle l'é tai t bIen avant ce la puisque, par exemple, l'apprenti scribe de
l'époque paJéobabylonienne lUI-même devait apprendre tÔI dans sa carrière
onze prononciations et sens différent· pour ce seul signe'.
Quant au ,igne NIGIN (p.3ID), Il n'apparait à l'époque archaïque que
dan~ l'entrée lexicale sidim~n;g;m" une sorte de fonctionnaire de consLructÎon.
jamais alors avec le sens de " lOl3I" ,
Les nombres Prol()-Elamiles
Dernier problème. malheureusement un des plmi fréquents : l'ignorance
pure et ;omple. L'auleur se vante de son uaviUl de "déchiffrement" (p. 263-
288) su r les systèmes numériques proto-élamites - un systèm e d'écnture
développé dans l'Irun ancIen vers la tin du troisième millénaire, Indépendant
de celw de la Mésopotamie mrus partageant un certain nomb re de traits com-
muns -,
Ma.lheureusement, tout cc travail de l'auteur sur les deux systèmes numé-
riques proto-élumites (en rait, il y en a au moins trois) - et dont les conclu-
i Roben ENGLUNO & lIans NISSEN, Die Je~ilwljsdu!n d~r arclwisdren Tl!:r:u~ aus
Un ... Gobr M""n, BerUn (1993).
8 "Prolo-EIl" : M. CIVIL el ilJ" EA A is naqu ... (Matcnw, for lile Sumenan Le"ieon
14), Pontitieio lnstiluto Blbliro, Rome (1979) p, 54.
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