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Idrissa - Abdou - These UAM

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UNIVERSITE ABDOU MOUMOUNI DE NIAMEY

FACULTE DES LETTRES ET SCIENCES HUMAINES

DEPARTEMENT D’HISTOIRE

THESE DE DOCTORAT UNIQUE

LES CENTRES D’ETUDES ISLAMIQUES DE L’OUEST DU NIGER DU


XVIe AU XIXe SIECLE

PRESENTEE ET SOUTENUE PAR : Abdou IDRISSA

SOUS LA DIRECTION DU PROFESSEUR Kimba IDRISSA

Jury :

Pr Nikoué GAYIBOR Université de Lomé, Président

Pr Kimba IDRISSA, Université Abdou Moumouni de Niamey, Directeur et Rapporteur

Dr Hamidou DIALLO, MC, Université de Ouagadougou, Membre

Pr Michel D.K VIDEGLA, Université d’Abomey -Calavi, Cotonou, Membre

Dr Addo MAHAMANE, MC, Université Abdou Moumouni de Niamey, Membre

ANNEE ACADEMIQUE 2012- 2013

i
DEDICACE

A Feue ma mère, Haoua ;

A mon père qui, ne lira pas cette thèse pour qu’il en fasse l’orgueil d’un sentiment

paternel ;

A ma femme, Badaratou ;

A mes enfants : Aboubacar, Salah-Addine, Haoua, Salim et Salima ;

A ma nièce, Fatimatou ;

A tous mes amis.

ii
REMERCIEMENTS

Nous remercions toutes les personnes physiques et morales qui ont contribué à la

réalisation de ce travail. Nous tenons en particulier à remercier le professeur Kimba Idrissa

qui, en dépit de ses lourdes charges a accepté de diriger ce travail et le mener à terme ; ses

conseils stimulants, son exigence ainsi que ses observations pertinentes ont largement

contribué aux mérites de ce travail. Cette thèse a été pour nous une véritable école où nous

avons dans la pratique appris et exercé le métier d’Historien. Merci, encore une fois,

Professeur Kimba IDRISSA pour nous avoir appris l’Histoire.

Nous tenons à remercier le personnel des Archives Nationales du Niger, de l’IRSH, de

la carte scolaire, de la Faculté des Lettres, et Sciences Humaines, des centres de

documentation du Nord Nigeria. Nous sommes extrêmement reconnaissant à tous ceux qui

nous ont aidé et reçu notamment le professeur Djibo Hamani qui a mis à notre disposition sa

bibliothèque privée, Alzouma Bazi Cissé, Diouldé Laya, Boubacar Hama Beidi. Nous

remercions également tous les témoins qui ont accepté de répondre à nos questions. Nous

exprimons notre reconnaissance à tous les enseignants et à tous les doctorants du Département

d’Histoire.

Nous tenons à exprimer notre gratitude à notre épouse et à nos enfants dont la

compréhension et le soutien m’ont permis d’accomplir ce travail. Enfin, nous tenons à

remercier tous nos collègues et toutes les bonnes volontés dont les conseils et l’assistance ont

été très utiles dans l’élaboration de ce travail.

iii
SIGLES ET ABREVIATIONS

ABU : Ahmadu Bello University.

ACCT : Agence de Coopération Culturelle et Technique.

AHN. : Association des Historiens Nigériens à Niamey.

ANN : Archives Nationales du Niger à Niamey.

A R E N : Archives Des Etudes Nigériennes.

B C A F : Bulletin du Comité Africain des Renseignements.

BCR : Bureau Central du Recensement.

B I F A N : Bulletin de l’Institut Français d’Afrique Noire. Le Centre de Publication se

trouvait à Dakar jusqu’en 1939. BIFAN est divisé en 1954 en série A (Sciences

Naturelles) et en série B (Sciences Humaines). Il devient en 1966 Bulletin de

l’Institut Fondamental d’Afrique Noire.

C E A : Cahiers d’Etudes Africaines.

C E L T HO : Ancien C R D TO, Centre d’Etudes Linguistiques et Historiques par Tradition

Orale (Niamey).

C N R S : Centre National de Recherches Scientifiques, Paris.

C N R S H : Centre Nigérien de Recherches en Sciences Humaines.

CRDTO : Centre Régional de Recherche et de Documentation pour la Tradition orale devenu

CELTHO à Niamey.

E N : Etudes Nigériennes.

iv
FLSH : Faculté des Lettres et Sciences Humaines.

I F A N : Institut Français (puis Fondamental) d’Afrique Noire.

I U P: Ibadan University Press (Ibadan, Nigeria).

J A L: Journal of African Languages (London).

J H S N: Journal of the Historical Society of Nigeria (Ibadan).

J S A: Journal de la Société des Africanistes.

IRSH : Institut de Recherche en Sciences Humaines à Niamey.

MARA : Département des Manuscrits Arabes et Ajamis à l’IRSH.

M I F A N: Mémoires De l’Institut Français d’Afrique Noire.

NAK: National Archives of Kaduna.

N E A: Nouvelles Editions Africaines.

O R S T O M : Office de la Recherche Scientifique et Technique d’Outre- Mer (Paris).

P U F : Presses Universitaires de France.

RIESCA : Réseau International d’Etudes Stratégiques sur les Conflits en Afrique.

SD : Sans date.

SL : Sans lieu d’édition.

SM : Sans maison d’édition.

SNED : Société Nationale d’Edition et de Diffusion.

SOK : Sokoto

v
LEXIQUE DES TERMES LOCAUX

Alfa : Mot Zarma-Soŋey signifiant lettré musulman.

Alkali : Mot Zarma- Soŋey qui signifie cadi.

Amirou : Terme d’origine arabe qui vient d’émir adopté par les Zarma-Soŋey et qui siginifie

souverain (il s’agit généralement d’un chef de canton).

Bittinkoobé : Mot peul désignant les habitants du Bittinkodji.

Caw- Dooni : Mot Zarma- Soηey qui signifie chant religieux.

Douddale : Grand feu autour duquel étudient les talibé la nuit.

Fitna : Mot d’origine arabe adopté par les Zarma- Soŋey et qui signifie crise ou calamité qui

peut frapper une communauté.

Gobirawa : Habitant du Gobir.

Gourma : Les populations riveraines du fleuve- Niger désigne par le mot Gourma, la

rive droite du fleuve par opposition au haoussa qui veut dire rive droite.

Folley : Possession en Zarma-Soŋey.

Kabbawa: Habitant du Kebbi.

Konu : Signifie guerre en peul.

Laawol : Mot Peul signifiant route.

Lamido : Mot Peul signifiant souverain.

Modibbo : Mot Peul signifiant alim.

vi
Shooro : Pratique culturelle peul qui consiste à cultiver le sens de la bravoure chez les Jeunes

à travers l’épreuve de flagellation réciproque.

Wonkoye : Chef de guerre en Zarma- Soŋey.

Zima : Prêtre de la religion traditonnelle en zarma-Soŋey.

Zollo : Gourde en Zarma- Soŋey.

vii
NOTE LINGUISTIQUE

Dans le cadre de ce travail, nous avons choisi d’utiliser la graphie française afin

d’harmoniser l’écriture des noms. Ainsi, les noms suivants s’écrivent comme suit :

Argoungou, Birni N’Gaouré, Gourmancthé, Gwandou, Haoussa, Kourfey, Kourté,

Peul, Say, Touareg, Wogo, Zarma… Par contre le nom Soŋey fait exception à cause des

différentes formes de son écriture dans la graphie française (Songhay, Songoï, Songhaï,

Sonraï…).

Nous avons décidé de laisser les noms des entités politiques, des communautés, des

titres ou fonctions politiques, des villages, des villes et des personnes invariables. Nous avons

convenu d’écrire :

Un Alfa…………………………………………………………… des Alfa

Un modibbo………………………………………………………. des modibbo

Un Peul …………………………………………………………….. des Peul

Un Touareg…………………………………………………………. des Touareg

Un Haoussa………………………………………………………… des Haoussa

Un talibé………………………………………………………….. des talibé

Par contre, les termes figurants dans les citations respectent les transcriptions adoptées par

leurs auteurs

viii
Sommaire
Introduction générale……………………………………………………………1 - 33

Première partie : L’islam dans l’Ouest du Niger du XVIe au XVIIIe siècle…………...34 - 87

Chapitre I : Aperçu géographique et historique ………………………………………..35 - 52

I- Aperçu géographique ………………………………………………………35 - 40

II- Peuplement de la zone et structures sociales……………………………….40 - 52

Chapitre II : Etude de trois anciens centres d’études islamiques de l’Ouest

du Niger ………………………………………………………………5 3 - 68

Introduction…………………………………………………………..53

I- Kafi, un ancien centre d’études islamiques……………………………..53 – 58

II- Etude du cas du centre d’études islamiques de N’Dounga Saney. …….58- 64

III- Le centre d’études islamiques de Kouré Saney………………………….64 - 67

Chapitre III : L’évolution de l’islam dans l’Ouest du Niger du XVIIe au

XVIIIe siècle……………………………………… ………………..69- 84

I- Le retrait des résistants soηey dans le Dendi et le passage d’Ali Anna dans le

Dallol…………………………………………………………………………..69 - 70

II- Le retour d’Ali Anna dans le Dallol……………………………………….71 - 76

III – La fondation de Kwama dans le Dendi et l’arrivée des musulmans touareg Kel Essuk

dans le Taghazar…………………………………………………………76 – 79

IV- Etude des centres d’études islamiques………………………………… 80 - 84

Conclusion de la première partie………………………………………..85 - 86

ix
Deuxième partie : Le centre d’études islamiques de Birni N’Gaouré………….88 - 147

Introduction……………………………………………………...89

Chapitre IV : Boubacar Loudoudji et son œuvre……………………………………..90 - 107

I- Situation géographique et économique………………………………..90 - 93

II- Le règne de Boubacar Louloudji……………………………………….94 - 99

III– La dérive totalitaire de Boubacar Louloudji……………………………….99 - 107

IV-La prise de Garouré et l’exil de Boubacar Louloudji……………………..107 - 113

V- L’œuvre religieuse de Boubacar Louloudji : la création des centres d’études

Secondaires ……………………………………………….. ……..113- 118

Chapitre V : L’œuvre d’Aboulhassane, fils et successeur de Boubacar Louloudji …119- 136

I - Le règne d’Aboulhassane ………………………………………………….119 - 125

II- La chute de Tamkalla et la succession d’Aboulhassane………………..125 - 136

Chapitre VI- Le rétablissement du pouvoir peul dans le Dallol………………….137 - 145

I – La reconquête de Dallol par Bayéro Aboulhassane …………………….137 - 140

II- La bataille de Boumba……………………………………………………141- 143

III - L’organisation politique et administrative du centre d’études islamiques de Birni

N’Gaouré ………………………………………………………………….143 – 145

Conclusion de la deuxième partie………………………………………146

x
Troisième partie : Etude du centre d’études islamiques de Say ………………...148 - 241

Introduction……………………………………………………………149

Chapitre VII : Historique du centre d’études islamiques de Say………………….150 - 172

I – L’installation de Mahaman Diobbo à Say…………………………150 - 160

II- La date de la création de la ville de Say et l’occupation du site…..160 - 165

III- Mahaman Diobbo : l’homme, l’environnement social et intellectuel…165 - 171

IV – L’organisation du centre d’études islamiques………………………..171- 183

Chapitre VIII : L’œuvre littéraire et philosophique de Mahaman Diobbo………..184- 207

I- Les chants religieux………………………………………….185- 193

II – La portée des chants religieux……………………………………..193 - 210

Chapitre IX : L’œuvre des successeurs de Mahaman Diobbo………………..208- 238

I- Le successeur d’Alfa Mahaman Diobbo………………………208 – 216

II- Les successeurs de Boubacar……………………………..........214 - 217

III- Les rapports entre Say et le monde musulman……………………..217 - 227

IV- Contribution de Say à l’islamisation de l’Ouest nigérien…………227- 238

Conclusion de la troisième partie………………………....238

Quatrième partie : Les centres d’études islamiques secondaires et la situation

religieuse de la zone à la fin du XIXe siècle……………239- 294

Introduction………………………………………………………….240

Chapitre X : Le centre d’études islamiques secondaire de Sinder………………242 - 262


xi
I- Les origines du fondateur du centre d’études islamiques secondaire….243 - 248

II- L’œuvre des successeurs de Tondo Djalley……………………………248- 253

III- Les règnes d’Oumarou Djibrilla et d’ Attikou Mahamadou……………254 - 262

ChapitreXI: Les centres d’études islamiques secondaires de Tirga, Goudel et

Kounari…………………………………………………………….263- 282

I- Le centre d’études islamiques secondaire de Tirga…………………263 - 266

II- Les modibadjés à Goudel et à Soudouré……………………………266- 269

III- Le centre de Kounari……………………………………………….269 - 282

Chapitre XII : Bilan de l’œuvre des leaders religieux des centres d’études

islamiques à la fin du XIXe siècle……………………………………………….283 - 293

I- La situation religieuse de la zone à la fin du XIXe siècle ………283 - 286

II- L’apport de l’islam aux sociétés de l’Ouest nigérien…………..287 - 293

Conclusion générale……………………………………….294- 298

Sources et Bibliographie………………………………………………………299 - 355

A – Les sources…………………………………………………………….......300- 328

I- Les sources orales……………………………………………….…..300-306

II- Les sources écrites………………………………………………….307- 328

B- Bibliographie………………………………………………… ……..........329 - 355

I- Outils de travail………………………………………… …….……..330 - 331

II- Etudes et ouvrages généraux…………………………………………..331- 342

III- Etudes et ouvrages spécialisés…………………………………………343 - 353

xii
Site Web………………………………………………………….……..353

Table des cartes…………………………………………………………354

Table des photos et illustrations…………………………………………355

Annexes………………………………………………………………………………356 -439

Annexe I : Chant religieux de Mahamane Diobbo…………………………………....357 - 366

Annexe II : Chant religieux d’Ousmane Dan Fodio………………………………….367 - 371

Annexe III : Tarikh anonyme sur les relations entre Gwandou et Argoungou………372 -378

Annexe IV : Texte en fulfulde sur Boubacar Loudoudji …………………………….379- 381

Annexe V : Récits sur la brouille entre Guéladio et Sékou Amadou…………………382 -385

Annexe VI : Quelques folios du tarikh de Sinder…………………………………….386 - 410

Annexe VII : Quelques images du nord Nigeria……………………………………..411 - 418

Index général…………………………………………………………………………419 - 428

Table des matières……………………………………………………………………429 - 439

xiii
INTRODUCTION

Ce travail est une contribution à la connaissance du fait islamique dans l‟espace

nigérien précolonial en général, et dans l‟Ouest du Niger en particulier. Il porte sur les

centres d‟études islamiques de l‟Ouest du Niger du XVIe au XIXe siècle. L‟espace

géographique concerné par cette étude n‟est pas facile à délimiter surtout quand on se situe

dans la période précoloniale. Kimba Idrissa définit cette zone comme l‟espace « allant du

Liptako- Gurma (à l’Ouest) au Dallol Mawri (à l’Est) et de l’Anzuru (au Nord) au Dendi

(au Sud) » (Idrissa, 1979 : 10). Dans le cadre de cette étude, nous désignons par l‟Ouest du

Niger, des territoires qui relèvent de la République actuelle du Niger. Cet espace s‟étend

entre 0o et 5o de longitude Ouest et entre 11o et 16o de latitude Nord. Il est limité à

l‟Ouest par le Burkina- Faso, au Nord par le Mali, au Sud par le Benin et le Nigeria, à l‟Est

par la région de Tahoua. Il s‟agit dans l‟ensemble, d‟une zone relativement vaste qui

couvre une superficie d‟environ 130 000 km2 soit 10,26% du territoire national1.

A propos de la définition du concept de centre d‟études islamiques, les auteurs

présentent des approches différentes. Pour Seyni Moumouni2, seules les localités disposant

d‟une zaouïa peuvent être qualifiées de centres d‟études islamiques. Or, selon un

témoignage recueilli par Lem auprès d‟Alazi, un alim3 peul du Nord dahoméen, au XIXe

siècle dans tout le moyen Niger, il n‟y a que deux centres qui disposent d‟une zaouïa :

Sokoto et Say (Lem, 1932 : 66). La Zaouïa est définie :

« En arabe zâwiya et en turc zaviye, type de couvent musulman qui connut une
particulière faveur dans le Maghreb médiéval à partir du XIVe et XVe siècle.
Toute zaouïa se compose d’une mosquée, d’un dôme (Koubba) qui couvre le
tombeau du marabout dont elle porte le nom, d’un local où on ne dit que le Koran
(Coran), d’un second réservé à l’étude des sciences, d’un troisième servant d’école
primaire pour les enfants, d’une habitation destinée aux élèves et aux tolbas
(étudiants) qui viennent faire ou perfectionner leurs études ; enfin, d’une autre
habitation où l’on reçoit les mendiants et les voyageurs ; quelquefois d’un

1- BCR/PH : Bureau Central du Recensement général de la population et de l‟habitat 2001.


2
- Entretien avec Seyni Moumouni, enseignant- chercheur à l‟IRSH le 11/06/12.
3- Alim : Signifie lettré musulman, c‟est le singulier d‟ouléma.

1
cimetière destiné aux personnes pieuses qui auraient sollicité la faveur de reposer
près du marabout » (Dictionnaire historique de l‟islam, 2004 : 864).

Quant à Jean Louis Triaud, il définit la Zaouïa comme « un établissement religieux

sédentaire » (Triaud, 1995 : 2). Balogun lui, assimile les centres d‟études islamiques à des

émirats et les qualifie de : « Gwandu emirates to the west » (Balogun, 1970 : 108 ). Dans

cette approche, l‟auteur met plus l‟accent sur l‟aspect politique car Amirou ou Emir est le

titre porté par les souverains qui sont allés à Sokoto chercher l‟étendard: « The Gwandu

emirates to the west of the metropolitan centre were Junju, Birni Ngaure, Say, Kunari,

Torodi, Bitinkogi, Yaga and Liptako » (Balogun, 1970 : 108 – 109). Or, tous les émirats de

l‟Ouest du Niger ne sont pas des centres d‟études islamiques.

Seyni Moumouni et Balogun ont donné une approche globale du concept de centre

d‟études islamiques. Notre conception s‟approche de celle de Lem qui le définit

comme « un centre de propagation de l’islam » (Lem, 1932 : 65 ). Cette définition serait

plus complète si on y ajoute l‟aspect acquisition du savoir religieux. La définition de

Moulaye Hassane est beaucoup plus proche de la nôtre. Selon cet auteur, le centre d‟études

islamiques est « un lieu d’acquisition et de diffusion du savoir religieux » (Hassane, 1995 :

9).

Le centre d‟études islamiques est appelé dans la langue peul Jangirde. C‟est un

mot composé de Jande qui veut dire étude et de Girde qui signifie lieu. Littéralement, le

Jangirde se définit comme un lieu d‟acquisition du savoir où séjournent des apprenants

venus d‟horizons divers. Il est composé des éléments suivants : deux ou plusieurs

douddales1(pour les principaux centres), d‟une habitation pour les talibé (suudu ahibe),

d‟une autre pour les maîtres qui viennent approfondir leurs études (suudu modibbe). La

formation des maîtres est assurée par le fondateur du Jangirde ou ses compagnons. Autour

1 - Douddale : Grand feu autour duquel étudient les talibé la nuit.

2
de chaque douddale, il y a un ou deux Santarou (encadreurs). Après la formation de base,

les élèves passent à l‟étape suivante : l‟étude des hadiths et le tafsir (commentaire du

Coran). Les élèves formés jusqu‟à un certain niveau retournent pour la plupart dans leurs

villages pour ouvrir des douddales. On assiste ainsi, à une sorte de boule-de-neige de

l‟enseignement coranique dans la zone d‟influence du fondateur du centre d‟études

islamiques. En définitive, nous retenons que ce dernier est un lieu d‟apprentissage et de

propagation du savoir religieux. Les conditions évoquées par les différents auteurs sont

plus ou moins réunies selon les contextes.

Cette étude couvre la période allant du XVIe au XIXe siècle avec deux dates

importantes servant de bornes chronologiques : 1501 et 1897. Le XVIe siècle est marqué

par la phase soηey qui débute vers 1501 avec la création de Kafi, le premier centre

d‟études islamiques de l‟Ouest du Niger par Elhadji Mamoudou. Ce dernier a effectué le

pèlerinage à la Mecque avec le souverain soηey, l‟Askia Mohamed. C‟est au cours de ce

voyage pour les lieux saints qui a duré du 09 septembre 1496 au 23 août 1497 (Kâti, 1913 :

25), que les deux pèlerins ont traversé l‟Ouest du Niger et ont déploré la forte implantation

des croyances ancestrales dans cette zone. Selon les traditions de Kafi, Askia Mohamed a

pris l‟engagement de répandre l‟islam dans cette partie de l‟Empire dès son retour de la

Mecque. C‟est ainsi que Kafi sera créé au tout début du XVIe siècle. Peu après la création

de ce centre d‟études islamiques, l‟Askia Mohamed va installer des lettrés musulmans dans

d‟autres localités de notre zone d‟étude. En l‟absence d‟érudits locaux aptes à assumer une

telle charge, le souverain a sollicité l‟aide des ouléma waa zi et saney de Gao. Ces derniers

se sont installés dans plusieurs localités de l‟Ouest du Niger au début du XVIe siècle (Kafi,

N‟Dounga, Kouré, Zouzou…) pour créer des centres d‟études islamiques dans lesquels

sont enseignées des personnes venues d‟horizons divers. Cette politique voulue et

encouragée par l‟Askia Mohamed a commencé à donner des résultats concluants quand

3
intervient la conquête marocaine de 1591 qui va mettre fin à cette première phase du

processus d‟islamisation de la zone : « Après la chute de l’Empire songaï des Askias en

1591, un premier cycle se termine dans l’islamisation de l’Afrique soudanaise » (Triaud,

1973 : 15).

Quant au XIXe siècle, il est marqué par un renouveau islamique. Cette période

marque en effet, un tournant dans le processus d‟islamisation de l‟Ouest du Niger.

Contrairement aux agents d‟islamisation du XVIe siècle qui étaient étroitement liés au

pouvoir et aux souverains, ceux du XIXe siècle se sont détachés de ces cours royales pour

s‟adonner à leur principale mission : l‟enseignement et la diffusion de l‟islam. Ainsi, après

une longue léthargie, la religion de Mohamed réapparait en force sous l‟impulsion de

lettrés musulmans essentiellement peul. D‟aucuns l‟assimilent même à une revanche :

« Comme une braise conservée sous la cendre, l’Islam noir, réfugié dans de petits
groupes de fidèles prépare sa revanche. Après une longue léthargie, l’étincelle de
l’Islam jaillira deux siècles plus tard. Il faudra attendre en effet le XIXe siècle, les
invasions peul et la conquête française pour voir le mouvement d’islamisation
reprendre vie et, cette fois, atteindre les masses populaires (…) » (Triaud, 1973 :
15).

Mais, ce renouveau islamique animé essentiellement par des Peul, va prendre fin en 1897

avec la création du poste de Say par le Lieutenant Pelletier. Cette date marque le début de

la conquête coloniale dans l‟Ouest du Niger qui ouvre une nouvelle ère dans l‟histoire de

cette zone.

Avant le XIXe siècle, le processus d‟islamisation de l‟Ouest du Niger est mal connu.

Pourtant tout autour de cette zone, il y a des pays de vieilles traditions islamiques (Mali,

Soηey, Ayar, Etats- Haoussa, Sokoto…). La rareté de documents sur l‟islamisation dans

notre zone d‟étude peut être liée au fait que cette zone est restée jusqu‟à l‟avènement du

Jihad d‟Ousmane Dan Fodio, en marge de tous les mouvements que le Soudan a connus :

commerce caravanier, mouvements arabe et berbère, bouleversements politiques qui ont

4
donné naissance à des Etats. Cette position de retrait a eu un impact négatif sur le

processus d‟islamisation :

« La situation géographique de la région même semble défavorable à


l’implantation de l’islam jusqu’à la fin du XVIIIe siècle. Restée longtemps
relativement à l’écart des grands courants d’échanges économiques et culturels qui
animaient alors tout le soudan central, c’est seulement à partir du XIXe siècle que
la religion de Mohamed se développera de façon effective » (Idrissa, 1979 : 81).

L‟étude de l‟islam dans l‟Ouest du Niger a peu intéressé les chercheurs. Il existe

néanmoins quelques travaux qui traitent de l‟islamisation au Niger. La thèse de Moulaye

Hassane (1995), La transmission du savoir religieux en Afrique subsaharienne : Exemple

de commentaire Coranique à Saayi, est l‟un des rares documents consacrés à la

transmission du savoir coranique dans la ville de Say. L‟intérêt de ce travail, c‟est qu‟il

nous donne une idée sur la chaîne de transmission du savoir religieux dans l‟un des centres

d‟études islamiques les plus importants de notre zone d‟étude. Mais, elle se limite

seulement à la ville de Say et ne couvre que la période du XIXe siècle.

Une autre thèse non moins importante, c‟est celle de Kimba Idrissa (1981),

Guerres et sociétés. Même si cet ouvrage n‟a pas pour objet d‟étude l‟islam, il comporte

néanmoins, une partie consacrée à cette religion dans notre zone d‟étude. On y trouve les

différentes phases d‟islamisation de l‟Ouest du Niger. L‟ouvrage contient aussi des

informations intéressantes sur les deux principaux centres d‟études islamiques (Say et

Garouré) ainsi que sur leurs fondateurs respectifs : Mahamane Diobbo et Boubacar

Louloudji.

Deux autres ouvrages d‟ensemble traitent du processus d‟islamisation au Niger. Il

s‟agit de ceux de Djibo Hamani (2007), L’Islam au Soudan Central : Histoire de l’Islam

au Niger du VIIe au XIXe siècle et de Maikoréma Zakari (2007), L’Islam dans l’espace

nigérien : Des origines (VIIe siècle) au début des années 2000. Le premier couvre la

période allant du VIIe siècle au XIXe siècle. Quant au second, il est consacré à l‟époque

5
allant du VIIe siècle à l‟an 2000. Ces ouvrages sont d‟une grande importance car ils

permettent d‟avoir une vue d‟ensemble sur le processus d‟islamisation dans ce pays. Mais,

comme leur champ d‟étude est très vaste, les deux auteurs n‟ont abordé notre zone d‟étude

que partiellement. Ils donnent des informations sur les deux principaux centres d‟études

islamiques du XIXe siècle (Say et Garouré). Dans ces ouvrages, l‟accent est surtout mis sur

les fondateurs de ces centres. Le fonctionnement de ces derniers ainsi que la portée de

l‟œuvre des ouléma, fondateurs de ces centres n‟ont pas été abordés.

La thèse de Mahaman Alio (1997), The place of Islam in Shaping French and British

colonial Frontier Policy in Hausaland 1890 – 1960 a été d‟un apport appréciable dans

l‟élaboration de ce travail. L‟intérêt de cette étude, c‟est qu‟elle s‟est appesantie sur le

Jihad et son impact dans l‟Ouest du Niger. On y trouve les différentes campagnes

militaires menées par Abdoulaye Fodio et Mohamed Bello dans le Gourma. Mais, ce

travail non plus n‟a pas abordé le fonctionnement des centres ainsi que le rôle qu‟ils ont

joué dans l‟islamisation de la zone. C‟est une étude qui ne porte que sur la période allant de

la fin du XIXe siècle (1890) à l‟indépendance du Niger (1960).

Dans cette catégorie de documents, il y a des études qui abordent les relations

entre la périphérie (centres d‟études islamiques de l‟Ouest du Niger) et le centre

(Gwandou ou Sokoto). La thèse de Saka Balogun (1970), Gwandu emirates in the

nineteenth century with special reference to political relations (1817- 1903), consacrée à

l‟émirat de Gwandou traite des relations entre cet Etat et ses dépendances de l‟Ouest. Il

s‟agit des relations d‟entraide et d‟assistance mutuelle. Elles reconnaissent certes,

l‟autorité de cet Etat mais elles jouissent d‟une large autonomie. C‟est un travail important

qui s‟est largement appesanti sur l‟histoire des centres d‟études islamiques de notre zone

d‟étude (Say, Birni N‟Gaouré, Kounari…). On y trouve surtout des informations

intéressantes sur les deux principaux centres. L‟auteur présente Birni N‟Gaouré comme le

6
plus puissant des centres sous le règne de Boubacar Louloudji : « Birni Ngaure become

the most extensive and powerful emirate, in the west of Gwandu. It was also the first

established in the zaberma area. The founder of the emirate was a Fulani malam, Abu

Bakr Luduje » (Balogun, 1970: 110). Traduction:[Birni N‟Gaouré était le plus vaste et le

plus puissant émirat, dans la partie Ouest de Gwandou. Il était également le premier Etat

implanté dans une région zarma. Le fondateur de cet émirat était un marabout peul,

Aboubacar Louloudji]. Cette étude est d‟un intérêt fondamental pour tout chercheur qui

travaille sur les centres d‟études islamiques se trouvant dans la sphère d‟influence de

Gwandou.

Dans sa thèse, Bello Alkali (1969), A Hausa community in crisis : Kebbi in the

nineteenth century, s‟est surtout appesanti sur les relations conflictuelles entre le Kabi et

Gwandou ainsi que sur les différentes alliances nouées au gré des circonstances. On y

découvre les conditions dans lesquelles la fameuse alliance qui porte le nom du souverain

du Kabi de l‟époque (Nabame alliance) a été constituée. L‟intervention de cette coalition

dans le Dallol est à la base de la chute de Tamkalla (capitale du centre d‟études islamiques

du Boboye) en 1854. Dans cette étude, ce sont les questions politiques qui ont été

largement développées.

Il ressort de tout ce qui précède qu‟aucune étude spécifique sur les centres d‟études

islamiques de l‟Ouest du Niger n‟est encore disponible. Ce travail se propose de combler

ce vide. Il s‟agit ainsi d‟apprécier le rôle joué par les centres d’études islamiques dans le

processus d’expansion et de consolidation de l’islam dans l’Ouest du Niger du XVIe

au XIXe siècle. Un premier aspect du travail porte sur l‟analyse de l‟évolution de l‟islam

dans la zone du XVIe au XVIIIe siècle. Le deuxième axe de réflexion est consacré au

renouveau islamique du XIXe siècle qui verra l‟éclosion de plusieurs centres d‟études

islamiques. L‟étude de ce renouveau amène tout naturellement à aborder une troisième

7
question sur le rôle que ces centres d‟études islamiques ont joué dans le développement

de l‟urbanisation, du commerce et la formation d‟un nouveau groupe social (les lettrés) qui

s‟est nettement distingué des autres catégories de population.

Au lieu d‟avoir une approche globale, nous avons préféré une étude au cas par

cas des centres d‟études islamiques. Une telle démarche s‟impose compte tenu de la

spécificité de chacun de ces centres. En effet, les fondateurs des centres, malgré leur

appartenance à la même confrérie religieuse (Qadriya) et à la même zone géographique,

ont œuvré chacun à sa façon et dans sa sphère d‟influence, au rayonnement de la religion

musulmane. Leurs œuvres n‟ont pas eu la même portée. Chaque centre sera ainsi l‟objet

d‟une étude. Ce qui permet de mieux apprécier le rôle joué par chacun dans le processus

d‟islamisation de l‟Ouest du Niger et de faire une évaluation globale.

Le travail comporte quatre parties : la première intitulée, l‟islam dans l‟Ouest

du Niger du XVIe au XVIIIe siècle, sera structurée en trois chapitres. Le premier chapitre

porte sur l‟aperçu géographique et historique de la zone. Le second est consacré à l‟étude

des centres d‟études islamiques du XVIe siècle. Le troisième chapitre fait le point sur

l‟évolution de l‟islam du XVIIe au XVIIIe siècle.

La deuxième partie du travail est consacrée à l‟étude du centre d‟études islamiques du

Boboye. Elle comporte trois chapitres. Le premier porte sur l‟œuvre de Boubacar

Louloudji, héritier de ce centre créé par son grand père, Ali Anna. Il montrera à travers ce

personnage, comment les ambitions démesurées d‟un leader religieux peuvent faire

sombrer toute une région dans le chaos. Le deuxième chapitre est consacré à l‟œuvre

d‟Aboulhassane, fils et successeur de Boubacar Louloudji. Il aborde également la chute de

Tamkalla, capitale du centre d‟études islamiques du Boboye qui consacre aussi la fin de

l‟hégémonie peul dans la zone. Le troisième chapitre porte sur la reconquête du Dallol par

Bayéro, petit fils de Boubacar Louloudji.

8
La troisième partie du travail porte sur Say, le plus important centre d‟études

islamiques de l‟Ouest du Niger. Elle est structurée en trois chapitres. Le premier est

consacré à l‟œuvre de Mahaman Diobbo, fondateur de Say. Il fait aussi l‟historique de la

création de ce centre et énonce les raisons qui expliquent le rayonnement de cette ville

religieuse. Les deuxième et troisième chapitres sont consacrés à l‟impact de l‟œuvre de

Mahaman Diobbo et de ses successeurs. La quatrième et dernière partie, quant à elle, est

consacrée à l‟étude des centres d‟études islamiques secondaires (Sinder, Tirga, Kounari,

Goudel). Cette partie est également structurée en trois chapitres. Le premier étudie le

centre d‟études islamiques secondaire de Sinder et le second porte sur ceux de Tirga, de

Kounari, et de Goudel. Le troisième chapitre est consacré au bilan de l‟œuvre des lettrés

musulmans à la veille de la pénétration coloniale.

Nous n‟avons pas la prétention de faire toute la lumière sur la question, nous souhaitons

humblement que ce travail puisse contribuer à éclairer le lecteur sur le processus

d‟islamisation dans notre zone d‟étude.

9
Méthodologie et sources

I- Méthodologie

Pour traiter ce sujet, nous avons adopté une démarche qui comporte trois étapes : la

recherche documentaire, les enquêtes sur le terrain suivi du traitement des données et la

rédaction. La recherche documentaire nous a conduit dans les différents centres de

documentation de la ville de Niamey à savoir la bibliothèque de la Faculté des Lettres et

Sciences Humaines (FLSH), celles de l‟Institut de Recherche en Sciences Humaines

(IRSH), du département d‟Histoire, la bibliothèque centrale de l‟Université Abdou

Moumouni, le Centre Culturel Franco – Nigérien (Jean Rouch) ainsi que dans les

bibliothèques privées des professeurs Djibo Hamani et Kimba Idrissa. Cette recherche

documentaire s‟est poursuivie dans le Nord du Nigeria à la bibliothèque centrale

Abdoulaye Fodio de l‟Université Shaykh Ousmane Dan Fodio de Sokoto, les bibliothèques

des départements d‟Histoire des Universités de Sokoto et de Zaria (ABU) et celle d‟Arewa

House. Après ces recherches documentaires, nous avons consulté les documents d‟archives

conservés aux Archives Nationales de Niamey, ceux de Waziri Janaidu House (Sokoto),

d‟Arewa House et de National Archives (Kaduna). Nous avons aussi entrepris une

recherche documentaire sur le Net.

Après la recherche documentaire qui nous a permis d‟élaborer un guide

d‟entretien, nous avons effectué plusieurs déplacements sur le terrain pour faire des

enquêtes. Ces déplacements nous ont conduit dans une vingtaine de localités de notre zone

d‟étude et dans plusieurs quartiers de la Communauté Urbaine de Niamey (voir carte p 16).

Ces enquêtes auraient pu être élargies à d‟autres villages mais le fait de travailler sur une

zone vaste avec peu de moyens nous a rendu la tâche difficile. Le choix de ces villages est

motivé par le rôle qu‟ils ont joué dans l‟histoire de notre zone d‟étude. Nous avons procédé

10
à ce niveau, à une collecte extensive et intensive des informations en organisant des

entretiens individuels et collectifs.

II – Les sources

1- Les sources orales

Elles ont été d‟une grande importance dans l‟élaboration de ce travail. Dans

l‟Ouest du Niger, il n‟y a pas de spécialistes des sources orales comme cela s‟observe au

Mali avec la caste des Dyeli1 où chaque grande famille a son griot qui détient pratiquement

tout sur le passé de celle-ci. Ces Dyeli sont des spécialistes de l‟art de la parole car ils

subissent un apprentissage rigoureux étalé sur plusieurs années. Selon M. Niane, ils sont

les détenteurs de la „‟tradition archive‟‟ : « celle- ci est le monopole de spécialistes (dyεli =

griots) qui, après avoir bénéficié d’un enseignement systématique, conservent un corps de

traditions précis et organisé, soit au niveau du village, soit au niveau de la chefferie

(canton) où ils résident » (Niane rapporté par Person, 1962 : 463). Au Niger, l‟information

est transmise oralement d‟une génération à une autre. Les informations ne sont pas

forcément détenues par les personnes âgées. On peut aussi les recueillir auprès des jeunes

avertis qui ont vécu pleinement leur culture. C‟est pourquoi, nous avons procédé à une

enquête extensive et intensive, rappelons- le, pour recueillir le maximum d‟informations

sur le terrain. Trois langues ont été utilisées pour recueillir les informations : le français, le

zarma et le fulfuldé. C‟est un travail difficile car la tradition orale n‟est pas toujours bien

conservée. Les informateurs présentent des lacunes car les contradictions et les „‟trous de

mémoire‟‟ sont abondants. Mais, ces contradictions ne constituent pas un obstacle comme

le souligne Mamoudou Djibo : « Loin de constituer un obstacle, les contradictions sont

1 - Dyeli signifie griot en Bambara.

11
pour nous très riches en enseignements, elles nous révèlent en effet, la position de certains

informateurs par rapport au fait dont il est question » (Djibo, 1986 : 3).

Une autre difficulté est liée à l‟immensité du terrain et à la rareté des témoins

détenteurs des traditions orales. Lors de nos enquêtes sur le terrain, nous avons constaté au

niveau des différentes localités visitées que peu de personnes connaissent l‟histoire de leur

terroir. Parmi les informateurs que nous avons rencontrés, rares sont ceux qui ont de larges

connaissances sur les différentes questions abordées. Même les Alfa, supposés être les

dépositaires de l‟histoire des familles des fondateurs des centres d‟études islamiques ont

des connaissances vagues sur le sujet. En effet, seuls les hauts faits et ceux qui relèvent de

l‟imaginaire populaire sont retenus par ces Alfa. Les leaders religieux sont généralement

présentés par la plupart de nos informateurs comme des wali1, faiseurs de miracle.

Boubacar Louloudji en est un exemple avec sa rocambolesque histoire de Louloudji. La

tendance à donner une origine orientale aux fondateurs des centres d‟études islamiques est

largement répandue. C‟est un artifice pour donner plus de poids et de légitimité à leurs

familles. La famille Mahaman Diobbo par exemple est originaire du Macina. Le fait de la

rattacher à la famille du prophète lui permet d‟avoir une assise populaire et de faire passer

ainsi le message de Dieu. Il existe néanmoins quelques rares informateurs qui ont des

connaissances assez larges sur le passé de leur région mais, ils sont généralement très

réservés et n‟interviennent que quand un informateur avance une contre vérité évidente. Il

appartient au chercheur de les identifier et de créer un climat de confiance pour les amener

à délier la langue.

Les enquêtes ont été menées entre 2007 et 2012 dans une vingtaine de localités.

Nous avons procédé à ce niveau à un échantillonnage, un choix raisonné en fonction de

l‟importance des lieux mais aussi de leur position géographique (lieux éloignés et lieux

1 - Wali : Contrairement à une opinion largement répandue, le wali n‟est pas un faiseur de miracle mais un
saint.

12
difficiles d‟accès).Toutes les enquêtes orales ont été effectuées dans l‟Ouest du Niger. Les

informations ont été recueillies auprès d‟informateurs issus des différentes catégories

sociales de la zone : chefs de canton, de village ou de quartier, lettrés musulmans,

fonctionnaires, paysans… Les procédés utilisés pour la collecte des informations sont : les

prises de note et les interviews. Le procédé le plus utilisé est l‟entretien collectif. Au cours

de cet entretien, nous cherchons à identifier les informateurs qui semblent mieux maîtriser

le sujet en discussion et nous organisons ensuite des interviews individuelles. Des fois, les

noms de certains informateurs bien connus dans la zone pour leur attachement à la tradition

orale nous sont recommandés à partir de Niamey par les ressortissants de la localité. Pour

cette catégorie d‟informateurs, l‟interview se déroule chez eux. Après les entretiens, nous

procédons au croisement de nos informations afin de retenir les versions les plus probables.

A ce niveau, le chercheur doit être particulièrement attentif car c‟est un travail

particulièrement délicat : « Si les méthodes générales de la critique historique restent les

mêmes, leur application pose ici des problèmes très particuliers, qui méritent un examen

attentif » (Person, 1962 : 462).

Parmi nos principaux informateurs, nous pouvons citer : Alzouma Bazi Cissé. Il est

le descendant de Mahaman Diobbo qui s‟est le plus intéressé à l‟histoire de sa famille. Cet

informateur m‟a été recommandé par Diouldé Laya. C‟est avec lui que nous avons recueilli

des informations intéressantes sur l‟histoire du centre d‟études islamiques de Say telles que

l‟organisation de la communauté, l‟enseignement coranique, l‟option de Mahaman Diobbo

pour la non violence…

Un autre informateur non moins important est Abdoulsalam Soumaila grâce à qui

nous avons recueilli des informations sur l‟histoire des Zooran du quartier Zooranay de

Say. Idrissa Aboubacar est un informateur qui a des larges connaissances sur l‟histoire des

Peul en général et sur celle des modibadjés en particulier.

13
Amadou Oumarou nous a été recommandé à partir de Say par les ressortissants de

Wouro- Guéladio vivant dans cette ville. Il est l‟un des meilleurs informateurs car malgré

son âge avancé, il est d‟une lucidité remarquable dans son raisonnement. Il a des larges

connaissances sur l‟histoire des Ferobé du Kounari depuis leur départ du Macina jusqu‟à

leur installation sur le nouveau site. C‟est grâce à lui que nous avons su que cette localité

n‟avait pas été seulement un centre militaire mais qu‟il avait joué un rôle important dans

l‟islamisation de la zone. Selon cet informateur, c‟est Hamboy, fils et successeur de

Guéladio qui transforma ce lieu en un centre d‟études islamiques.

Nous avons également écouté à la sonothèque de l‟IRSH, plusieurs bandes sonores

sur l‟histoire du Boboye, de Say, de Kounari ainsi que les chants religieux d‟Alfa Mahaman

Diobbo. C‟est un patrimoine important mais qui est malheureusement en péril car les

bandes sont mal conservées, mal entretenues et sont entreposées dans une salle vétuste. Ce

patrimoine doit être sauvé car la plupart des informateurs interrogés ne sont plus de ce

monde. Si nous laissons ces bandes s‟abîmer par négligence, c‟est tout un pan de

l‟histoire de notre pays qui va disparaître ; d‟où l‟urgence de sauver ces documents de la

sonothèque.

Malgré leurs lacunes, les sources orales sont des sources importantes pour l‟historien qui

veut étudier la période antérieure à la colonisation. Il doit par conséquent les soumettre à

la critique interne et externe afin d‟en tirer matière à histoire, ce que souligne Hamidou

Diallo en ces termes : « Confrontée aux données des archives coloniales, la tradition orale

apporte l’éclairage d’une vision de l’intérieur permettant de cerner certaines déformations

de la réalité historique » (Diallo, 2009 : 42).

Une des lacunes majeures des sources orales, c‟est le manque de dates : « Mais s’il

est un point où la tradition orale paraît particulièrement faillible, et où effectivement elle a

permis d’incroyables erreurs chez beaucoup de ses utilisateurs, c’est la chronologie »

14
(Person, 1962 : 463). Pour combler cette lacune, nous avons procédé à une confrontation

des différentes versions recueillies aux données des archives coloniales et des manuscrits

arabes. Cette démarche nous a permis de dater certains événements majeurs qui ont marqué

l‟histoire des centres d‟études islamiques.

15
Carte No1 : Lieux d’enquêtes

16
2 – Les recueils de traditions orales

Outre les témoignages oraux, nous avons consulté les recueils de traditions orales.

Il s‟agit de documents élaborés essentiellement à partir des données des sources orales. Ce

sont généralement des compilations dont le mérite est d‟avoir traduit et publié en français

des traditions orales. Ces données allaient certainement disparaître n‟eût été l‟intelligence

d‟esprit des auteurs qui les ont recueillies et publiées. Dans cette catégorie de documents,

nous pouvons citer ceux des auteurs nigériens comme Boubou Hama (1969), Diouldé Laya

(SD), Hama Beidi Boubacar (2003).

Boubou Hama par exemple a écrit plusieurs ouvrages grâce à la collecte des

traditions orales. A titre d‟exemple, on peut citer l‟ouvrage intitulé : Histoire traditionnelle

des peul du Dallol Boboye. Il a été présenté à la réunion de Ouagadougou (juillet-août

1968) sur la planification de la collecte des traditions orales du fait de son originalité. Ce

qui a retenu notre attention dans cet ouvrage, c‟est le fait qu‟il retrace l‟histoire de la

famille de Boubacar Louloudji depuis l‟arrivée d‟Ali Anna dans le Dallol jusqu‟à la

conquête de cette localité par l‟administration française. On y trouve également l‟étonnante

aventure de l‟érudit aveugle. Mais n‟étant pas historien de formation, Boubou Hama n‟a

pas soumis ses informations à la critique historique avant de les mettre à la disposition du

lecteur. Malgré tout, cet ouvrage constitue un document de première main pour le

chercheur qui veut étudier l‟histoire des Peul du Dallol- Bosso. Il faudrait tout simplement

le consulter avec prudence en soumettant les informations qu‟il contient à la critique afin

d‟en tirer profit.

Diouldé Laya a écrit plusieurs ouvrages à partir de la collecte des traditions orales.

On peut citer celui intitulé, Say : ‘’Les premiers venus, nos grands parents ont occupé les

terres qu’ils voulaient „‟. Cette étude contient des informations recueillies auprès de feu

17
Alfaizé Abdoulsalam Cissé1 auquel il faut ajouter quelques personnes âgées de la ville de

Say et des villages environnants ayant des connaissances sur le passé. L‟intérêt de ce

document, c‟est qu‟il fournit des informations sur l‟histoire de la ville ainsi que sur

l‟implantation de l‟islam dans la zone au XIXe siècle. Cette entreprise est donc à saluer,

car elle a permis de recueillir des informations précieuses auprès d‟informateurs qui

auraient disparu certainement avec leur savoir, sans que nous ne puissions y avoir accès.

Comme Boubou Hama, l‟auteur consigna par écrit les informations qu‟il a recueillies sans

les soumettre à la critique. Les documents écrits par ces deux auteurs doivent être exploités

avec un esprit critique par le chercheur. Même si les écrits de Boubou Hama et de Diouldé

Laya sont des traditions brutes recueillies et non soumises à la critique, leur importance

réside dans le fait qu‟ils mettent à la disposition du chercheur des informations fournies par

des anciens qui ont en mémoire des éléments d‟informations sur le passé de leur zone.

Un autre recueil de traditions orales non moins important est celui de Boubacar

Beidi Hama (2003), Histoire des peuls du Dallol Bosso. Cet ouvrage est une reprise du

travail de Boubou Hama. Les deux travaux sont presque identiques et présentent la version

officielle de l‟histoire des Peul du Dallol Bosso, recueillie auprès de Siddo Sayoma,

souverain de Birni- Sillantché. On y trouve l‟histoire des Peul de cette zone depuis

l‟arrivée du grand père de Boubacar Louloudji, Ali Anna à la fin du XVIIe siècle (de

passage pour la Mecque), dans le Dallol jusqu‟à l‟installation de l‟administration coloniale.

Cet ouvrage a été enrichi par des traditions locales en fulfuldé recueillies auprès des

notables de la cour de Birni N‟Gaouré. La seule différence entre les deux ouvrages, c‟est la

partie consacrée aux institutions du centre d‟études islamiques du Boboye qui ne figure pas

dans l‟ouvrage de Boubou Hama. Ce dernier et Boubacar Beidi Hama, n‟ont recueilli que

des traditions brutes qui n‟ont pas été soumises rappelons-le, au traitement méthodologique

1 - Alfaizé Abdoulsalam Cissé est le prédécesseur du chef de canton actuel de Say.

18
approprié. En effet, dans sa démarche, Boubacar Hama Beidi essaie de prouver que

l‟arrivée des Peul dans le Dallol est antérieure à celle des Zarma. Mais malgré tout, son

ouvrage présente un certain intérêt car il permet au chercheur d‟avoir des informations

précieuses sur l‟histoire des populations du Boboye. Le chercheur qui le consulte doit

avoir l‟esprit critique constamment en éveil pour ne pas tomber dans le piège des versions

officielles.

III- Les sources écrites

1- Les sources en langue arabe et ajami

Il s‟agit des documents écrits par les lettrés musulmans en langue arabe ou dans une

autre langue du terroir avec des caractères arabes. L‟importance de ces documents réside

dans le fait qu‟ils contiennent des informations fournies par des contemporains, qui ont

vécu pour la plupart les évènements qu‟ils relatent. En allant sur le terrain, notre intention

est de recueillir le maximum de manuscrits. En effet, nous travaillons sur les centres

d‟études islamiques créés par des lettrés musulmans. A notre avis, ces derniers ont

certainement produit plusieurs documents (textes religieux, essais politiques,

correspondances diverses…). Les écrits de certains auteurs occidentaux que nous avons

lus, nous ont encouragés dans cette logique :

«Parmi les souvenirs légués par les saints personnages du passé, il existe un Coran
écrit à la main de Abdoulaye, frère de Ousman dan Fodio ; le livre aurait été remis
par l’auteur à Mohaman Diobo, ainsi que deux autres livres, et légués par
Mohaman Diobo à son fils Boubacar.
Ces ouvrages sont actuellement détenus, le premier par Youssoufou, les deux
autres par Alassane Cissé, chef de canton de Say » (Lem, 1943 : 73).

Jusqu'à la fin de la première moitié du XXe siècle, certains documents anciens ont

pu échapper aux incendies et aux termites. Ce témoignage de Lem prouve l‟existence de

manuscrits dans ce centre d‟études islamiques. En plus, Say a entretenu des relations

19
cordiales avec Sokoto, ce qui laisse supposer l‟existence de correspondances diverses

entre les deux localités. Le deuxième auteur qui signale l‟existence des manuscrits dans

certains centres d‟études islamiques de l‟Ouest du Niger est Gironcourt. Celui- ci a en

effet, effectué de 1908 à 1909, une mission scientifique de collecte d‟inscriptions lithiques

et de manuscrits le long de la vallée du Niger. Il affirme lui-même avoir séjourné à Sinder

et à Say. Il a bénéficié dans ses investigations au Niger, de l‟aide d‟Alfa Issoufi Hâlil :

« Ce fut à Sinder (Niger) que s’établit pour un mois mon chantier de copie, grâce à
la confiance, exceptionnelle chez un musulman de ces régions, que me témoigna le
marabout songhoy Issoufi Alilou (…), il mit à mon service comme copistes, ses
meilleurs disciples, et, le travail terminé à Sinder, m’accompagna avec eux, auprès
des marabouts peuls de Say jusqu’ici restés fermés. Un séjour à Say (juin 1912),
marqua la fin de mes recherches archéologiques (…). Finalement, ces recherches
m’avaient fait recueillir 812 inscriptions lithiques et un ensemble de 223
manuscrits représentant, 4000 pages de texte arabe (collections déposées à
l’Académie des Inscriptions et Belles- Lettres) » (Gironcourt, 1912 : 30- 31).

Ces propos de Gironcourt laissent supposer l‟existence de manuscrits dans notre zone

d‟étude. Sur le terrain, la moisson a été maigre. La plupart de ces manuscrits ont de nos

jours disparu. Nous avons fait des démarches dans le sens de la consultation de ces

manuscrits. D‟abord sur les différents moteurs de recherche (Google, bing, gallica, persee),

puis nous avons postulé aux subventions de CODESRIA pour aller le plus loin possible

dans nos enquêtes, mais en vain.

Même à Sinder où quelques manuscrits sont encore disponibles, ils sont dans un état de

vétusté en raison de la mauvaise conservation. La consultation de l‟important fonds

entreposé au Département des Manuscrits Arabes et Ajami (MARA) de l‟Institut de

Recherche en Sciences Humaines (IRSH), n‟a pas été à la hauteur de nos attentes. Ce

département dispose d‟un catalogue dans lequel sont répertoriés les manuscrits mais

malheureusement, notre niveau en arabe ne nous a pas permis d‟exploiter judicieusement

ce fonds. Nous avons néanmoins, bénéficié du concours de deux „‟arabisants‟‟ : Salaou

Alassane du MARA et Abdoulaye Boubacar de la Direction de l‟Enseignement Arabe du

20
Ministère des Enseignements Moyen, Supérieur et de la Recherche Scientifique, qui nous

ont aidé à exploiter ce catalogue de MARA. Au total, nous n‟avons eu que deux

manuscrits :

- ‘’Tarihîn Abinda Ya Gudana Tsakanin Gwandu Da Argungu A

Takaitse’’ autrement dit : „‟Condensé de l‟histoire des relations entre Gwandou et

Argoungou‟‟. C‟est un manuscrit anonyme de 3 folios provenant de la région de Dosso. Il

se trouve actuellement dans la bibliothèque du Département des Manuscrits Arabes et

Ajami (MARA) sous la côte 401.

- Le ‘’Tarikh Sinder’’, c‟est un vieux manuscrit repris par Sounakoye Djibrilla afin de

pallier la disparition des manuscrits anciens. Le premier „‟Tarikh Sinder’’ fut rédigé au

début du XXe siècle par le cadi de Sinder de l‟époque, Elhadji Omar Issoufi Halîl. Ce

dernier disposait de sa propre bibliothèque privée qui avait été fermée peu après son décès

au cours des années 1960. Les manuscrits de cette bibliothèque étaient rangés dans des

cantines et conservés dans la maison familiale. Mais, les mauvaises conditions de

conservation avaient fait que la plupart des manuscrits s‟étaient détériorés avec le temps.

Parmi les manuscrits fortement endommagés figure, le ‘’Tarikh Sinder’’. Devant l‟état de

dégradation avancé de ce document, les autorités de cette localité avaient jugé utile de le

reproduire. Cette tâche fut confiée à Sounakoye Djibrilla, petit fils d‟Omar Issoufi Halîl.

Ce fut donc auprès du chef de canton actuel, Elhadji Ibrahim Djingarey et de son entourage

que Sounakoye Djibrilla avait recueilli l‟essentiel des informations sur l‟histoire des

populations de l‟île. A ces informations, il avait ajouté les siennes pour rédiger ce Tarikh.

C‟est un manuscrit de 63 folios dont la traduction nous a posé énormément de

problèmes. Mais grâce à l‟aide de deux arabisants rappelons-le, nous avons pris

connaissance de sa substance. C‟est un document précieux mais qui comporte néanmoins,

quelques lacunes. On y note un certain anachronisme. En effet, dans tout le document,

21
l‟auteur n‟évoque que les règnes de Mahamane Diobbo et de son fils, Boubacar alors que

certains de ces événements qu‟il relate, se sont déroulés longtemps après leur décès. A

titre d‟exemple, le tarikh souligne qu‟Attikou Mohamadou s‟est installé sur l‟île de Neni

sous le règne de Boubacar Modibo alors que l‟évènement dont il est question, s‟est déroulé

en 1900. Or, à cette date, les Français se sont déjà installés à Say. En plus, ce manuscrit ne

précise pas les noms des officiers français qui ont attaqué l‟île de Sinder. Malgré ces

quelques insuffisances, ce manuscrit est un document important car il contient des

informations précieuses sur l‟histoire des populations de la zone en général et celle de

Sinder en particulier. Dans l‟ensemble, nous nous sommes heurté à la rareté de cette

catégorie de documents dans notre zone d‟étude. Un travail de sauvetage des manuscrits

découverts s‟impose afin de sauver le peu qui reste.

2- Les Tarikh El fetach et Es – Soudan

Le premier tarikh a pour auteur Mahmoud Kâti (1913). Cet auteur est intéressant

car il a assisté impuissant à l‟effondrement de l‟Empire soηey suite à l‟invasion marocaine.

Dans son ouvrage, Askia Mohamed est présenté comme un grand défenseur de l‟islam qui

est toujours à l‟écoute des musulmans. L‟Empereur a œuvré sans relâche au rayonnement

de la culture islamique dans toutes les régions du pays. C‟est dans ce cadre qu‟il plaça des

lettrés musulmans dans quelques localités de notre zone d‟étude. Quant au second auteur,

Es- Sa‟di (1981), il a surtout mis l‟accent sur l‟évolution de l‟Empire soηey depuis le règne

d‟Askia Mohamed jusqu‟à l‟invasion marocaine. Les deux auteurs présentent Askia

Mohamed comme un Souverain qui a beaucoup d‟estime pour les ouléma. L‟expansion de

l‟islam au sein de l‟Empire est au centre de ses préoccupations. L‟intérêt de ces deux

ouvrages, c‟est qu‟ils contiennent des dates repères importantes. On y trouve par exemple

la date du pèlerinage d‟Askia Mohamed sur les lieux saints ainsi que les noms des grands

22
savants musulmans qu‟il a rencontrés au cours de ce voyage. Cette date nous a permis de

faire des recoupements et de déterminer l‟époque à laquelle le village de Kafi a été créé.

3- Les écrits des acteurs du Jihad

Les trois grandes figures du Jihad à savoir Shaykh Ousmane Dan Fodio, son frère

Abdoulaye et son fils Mohamed Bello, sont tous des lettrés musulmans qui ont largement

contribué au rayonnement des sciences arabo- musulmanes au XIXe siècle. Ils ont écrit un

nombre important de documents pour expliquer l‟islam, les idées du Shaykh, et les causes

du Jihad. On peut citer entre autres : Bayān Wūjūb Al- Hijra ‘A La’ L- Ibad de Shaykh

Ousmane Dan Fodio ; Tazyin al- Warqāt bi ba’d mā li min al- abyāt d‟Abdoulaye Fodio ;

Infaku’l Maisuri de Mohamed Bello… Parmi ces ouvrages, celui d‟Abdoulaye Fodio

contient des informations intéressantes sur notre zone d‟étude.

En effet, le Tazyin al – Waraqāt traite de la formation et du développement de la

communauté du Shaykh. Il traite aussi du déclenchement du Jihad ainsi que de

l‟établissement de la communauté à Sokoto. Ce document contient également des

informations sur l‟impact de ce mouvement religieux dans notre zone d‟étude. L‟auteur

donne les raisons qui ont poussé le Shaykh à déclencher le Jihad. Contrairement à la thèse

largement répandue par les auteurs occidentaux selon laquelle le Jihad est une guerre

hégémonique menée par les Peul, Abdoulaye donne sa version des faits en ces

termes : « And we are an army victorious in Islam, and we are proud of nothing but that.

Tribes of Islam and Tūrubbi is our clan.Our Fulāni and our Hausa all united, and among

us other than these, certain tribes joined together for the help of God’s religion- made up

the union » (Hiskett, 1963 : 110). Traduction: [Ainsi, nous sommes une armée victorieuse

en islam, et nous sommes fiers de cela. Les tribus de l‟islam et les Toroobé constituent

notre clan. Nos Peul et nos Haoussa, tous unis, et parmi nous plus que ceux- là, d‟autres

23
tribus nous ont rejoints pour défendre la cause de la religion de Dieu. Tout cela est la base

de notre force]. Enfin, on y trouve des informations sur les campagnes menées par

Abdoulaye Fodio entre 1809 et 1810 dans le Gourma.

Même si les acteurs du Jihad tentent de démontrer à travers leurs écrits que cette

guerre n‟a aucun caractère ethnique, sur le terrain ils ont agi autrement. En 1812 par

exemple, le Shaykh Ousmane Dan Fodio a partagé l‟empire au profit des seuls membres

de sa famille : l‟Est à son fils Mohamed Bello, l‟Ouest à son frère Abdoulaye, le Nord à un

autre membre de sa famille, Ali Jedo responsable des opérations militaires et le Sud à

ses deux fils, Abdoulsalam et Boukari. Certains souverains ont trouvé ce partage injuste et

lui ont fait le reproche en ces termes : «Mallam kai raban kura », autrement dit : « Mallam

tu as fait le partage de l‟hyène ». Dans nos sociétés quand une personne fait un partage très

inégal en sa faveur, les gens lui reprochent d‟avoir fait « le partage de l‟hyène », c'est-à-

dire qu‟elle a pris la plus grosse part.

4- Les sources d’origine coloniale

Nous entendons par sources d‟origine coloniale les écrits des explorateurs, des

conquérants militaires, ceux des administrateurs coloniaux et des acteurs de la

colonisation.

a- Les écrits des explorateurs et des conquérants militaires

Les explorateurs et les conquérants militaires mus par le désir de recueillir le

maximum d‟informations sur l‟Afrique ont écrit une quantité importante de documents sur

les différentes régions traversées. Leurs écrits comportent des détails sur le cadre naturel,

les structures politiques, le mode de vie des populations, les ethnies, leur histoire, leurs

coutumes. Leurs travaux renferment néanmoins des préjugés : « Les jugements des

24
explorateurs sur l’Afrique sont aussi divers que le pays, les explorateurs eux-mêmes et les

circonstances de leur passage ( ). Mais chacun apporte son tempérament et ses préjugés »

(Deschamps, 1967 : 258). Mais, cela ne doit pas nous pousser à nier toute qualité à leurs

écrits. Ces derniers contiennent en effet, des informations intéressantes sur la situation

sociale, politique, religieuse, économique et culturelle des sociétés visitées. Ils contiennent

quelques dates repères importantes qui permettent de dater avec exactitude certains

évènements qui ont marqué l‟histoire de notre zone d‟étude. Parmi les ouvrages des

explorateurs, celui de Henri Barth, Travels and discoveries in north and central Africa

being a journal on an expedition, 1849 -1855 a été d‟un apport non négligeable dans

l‟élaboration de ce travail. Barth est en effet, l‟un des grands explorateurs du XIXe siècle,

qui a parcouru une bonne partie de l‟espace nigérien, depuis les régions sahariennes

jusqu‟aux zones sud du pays. Il a séjourné à Gwandou entre le 17 mai et le 04 juin 1853

puis du 17 au 21 août 1854 (aller- retour Tombouctou). Il a visité presque tous les centres

d‟études islamiques de notre zone d‟étude. Même si dans son ouvrage il n‟a pas fait un

développement détaillé sur l‟islam, il a tout de même fourni des informations

intéressantes sur les principaux centres d‟études islamiques de l‟Ouest du Niger (Say,

Tamkalla, Kounari, Sinder) où il a séjourné : description des paysages, des hommes, des

marchés, du climat politique… Contrairement à la plupart des explorateurs du XIXe siècle,

Barth montre avec un esprit scientifique l‟importance de l‟histoire des Etats soudanais qu‟il

a traversés et décrit les mœurs des sociétés de ces zones. A chaque halte, il donne le

moment auquel il est arrivé dans la zone, le jour et l‟année, bref comme le souligne

Cornevin Robert, l‟ouvrage de Barth « apporte un extraordinaire coup de projecteur sur

toute une région » (Cornevin, 1961 : 489). Ainsi, l‟un des mérites de cet ouvrage, c‟est

d‟avoir permis de dater avec précision la chute de Tamkalla. Cette date (1854), nous a

25
servi de repère pour faire une chronologie de l‟histoire du centre d‟études islamiques du

Boboye.

Dans cette catégorie de sources, la contribution des auteurs comme Hourst (1898),

Sur le Niger et au pays des Touaregs, de Toutée (1899), Du Dahomey au Sahara : la

nature et l’Homme, a été non négligeable. Hourst a séjourné cinq (5) mois durant dans la

région de Say, plus précisément sur l‟île de Talibiya où Archinard a construit un fort. Sa

mission a atteint cette ville, le 07 avril 1896 (Hourst, 1898 : 268). Mais à cause de ses

démêlés avec Amadou Satourou, Alfaizé de Say, Hourst s‟insurge contre les musulmans :

«Les musulmans sont en général, je parle des chefs et des marabouts du moins,
menteurs et de mauvaise foi. Il y a cent manières, y compris la restriction mentale,
de jurer sur le Coran sans être en rien tenu. Aurait-on été entièrement de bonne foi,
le prophète n’enseigne-t-il pas qu’on rachète un serment violé par quatre jours de
jeûne ? Si, même lorsqu’ ils s’engagent à leur manière, les musulmans sont aussi
fourbes, qu’est-ce que cela doit être lorsqu’ils emploient des moyens qui ne leur
sont pas coutumiers, des moyens qui n’ont pour eux aucune valeur morale ? Parmi
ceux-ci, je tiens au premier chef les traités en tant d’articles que nous passons avec
eux» (Hourst, 1898 : 270-271).

Cette diatribe contre les musulmans s‟explique par le refus du souverain de Say

d‟entériner les traités signés avec les missions précédentes (Monteil, Baud, Decoeur..). En

effet, les éléments fugitifs d‟Ahmadou Sékou ont devancé la mission Hourst à Say :

« Bayéro et ses alliés quittèrent Séba et prirent le chemin du Zarmatarey. Ils vinrent

s’installer à Lontia1 » (Hama Beidi, 2003 : 137). Ils ont fait comprendre au souverain de

cette localité que ces traités ne sont rien d‟autres qu‟un marché de dupe. Les Toucouleurs

du Macina ont expliqué à Afaizé Amadou Satourou, les motivations réelles des Français.

Ayant pris conscience du danger, il refusa non seulement d‟accorder l‟autorisation de

séjour à la mission mais aussi décida de ne plus respecter les clauses des traités déjà signés,

car les Français lui ont menti sur leurs contenus. C‟est ce refus qui provoqua la colère de

1 - Lontia : village situé à cinq kilomètres de la ville de Say.

26
Hourst ; d‟où ces propos durs contre les musulmans. Malgré ces écueils, il met en relief

l‟enracinement de l‟islam dans la zone.

Quant à l‟ouvrage de Toutée, il contient des renseignements forts intéressants sur le

degré d‟islamisation des différentes régions qu‟il a traversées. De toutes ces régions

traversées, il présente Say comme un véritable centre d‟études islamiques comptant un

nombre important de lettrés musulmans qui maîtrisent parfaitement la langue arabe : « A

partir de Saye, on peut faire lire une lettre en arabe, on trouve des secrétaires capables de

rédiger et d’écrire un traité, une lettre politique et, à plus forte raison une correspondance

privée » (Toutée, 1899 : 185). Malgré le poids de préjugés et les erreurs d‟appréciation, dus

au contexte difficile dans lequel les ouvrages ont été élaborés, les écrits des explorateurs et

missions de reconnaissance apportent un éclairage sur l‟histoire des zones traversées. Il

faut simplement les analyser avec prudence afin d‟en tirer profit : « Les règles habituelles

de la méthode et de la critique historiques s’appliquent aux documents oraux comme aux

sources écrites » (Vansina, 1961 : 2).

b – Les écrits des administrateurs coloniaux

Contrairement aux explorateurs qui n‟ont consacré que quelques pages à l‟islam,

les administrateurs coloniaux ont écrit une quantité importante de documents sur la

question. L‟islam perçu comme un danger, a été l‟objet d‟une attention particulière de la

part du pouvoir colonial. Cependant, la plupart des acteurs de la colonisation ignorent

totalement la réalité du fait islamique en Afrique ; ce qui explique certaines affabulations

telles que : ‟‟Islam noir‟‟, „‟maraboutisme‟‟, ‟‟Islam africain‟‟, „‟naturisme‟‟... Les travaux

des administrateurs coloniaux qui fournissent des indications intéressantes sur l‟islam en

Afrique occidentale sont ceux de Brévié (1923), de Gouilly (1952), Froelich (1962)… Ces

travaux renferment néanmoins beaucoup de préjugés. En effet, ils abordent pour la plupart,

27
la question de l‟islam sous un angle racial. Ainsi, pour ces auteurs, la création des

principaux centres d‟études islamiques de l‟Ouest du Niger par des lettrés musulmans peul

est liée non pas au contexte mais au génie de leur race. Malgré ces écueils, leur apport reste

non négligeable grâce à quelques dates repères, à des cartes et statistiques… qu‟ils

contiennent. On y trouve également des informations sur les principales phases de

l‟islamisation en Afrique occidentale ainsi que sur les différentes confréries musulmanes.

Mais, c‟est surtout l‟ouvrage de Paul Marty (1931), L’islam et les tribus dans la colonie

du Niger, qui a été d‟un grand apport dans l‟élaboration de ce travail. Son intérêt, c‟est

qu‟il indique le niveau d‟implantation de l‟islam dans les différents cercles de la colonie

au début du XXe siècle. Il rapporte aussi des informations sur les personnalités politiques et

religieuses ainsi que sur les institutions. Cet ouvrage a le mérite de donner au chercheur,

des statistiques sur le nombre de musulmans et de non musulmans par cercle mais aussi sur

l‟ensemble du territoire. En dehors de ce document, on note l‟ouvrage d‟Yves Urvoy

(1936), Histoire des populations du Soudan Central, qui est important car il retrace

l‟histoire des populations nigériennes. Ce livre est d‟un grand intérêt pour la connaissance

du passé des habitants du Niger. S‟agissant de notre zone d‟étude, c‟est surtout l‟étude de

Lem (1943), ‘’ Un centre d’islamisation au Moyen Niger : Say’’ qui fournit des

renseignements forts intéressants sur ce centre d‟études islamiques. Malgré quelques

écueils, cette étude permet d‟avoir une vision globale sur l‟histoire de Say, depuis sa

création jusqu‟à l‟implantation du pouvoir colonial. Les documents des auteurs

occidentaux contiennent certes des lacunes, mais lus avec le maximum d‟esprit critique, le

chercheur peut en tirer des renseignements forts intéressants.

28
c- Les sources d’archives

Les documents d‟archives que nous avons exploités dans le cadre de ce travail

sont : les Archives Nationales du Niger et celles du nord Nigeria. Elles sont produites pour

l‟essentiel par les administrations coloniales française et britannique. En ce qui concerne

les archives nationales du Niger, il s‟agit des monographies, des rapports de tournées, des

rapports politiques, des rapports économiques, des fiches de renseignements sur les ouléma

et des correspondances diverses.

Au niveau des Archives Nationales de Niamey, les documents sont conservés dans

des conditions acceptables. On peut, une fois les formalités administratives remplies, y

accéder facilement. A l‟intérieur du pays, les archives sont difficiles d‟accès car elles sont

gérées comme des poubelles dans de vieux bâtiments coloniaux. Il faut signaler que les

archives locales consultées (Filingué, Tillabéri, Dosso, Say et Kollo) sont très mal

conservées par les responsables administratifs. A Say par exemple, en 1997, nous avons

trouvé un nombre important de documents d‟archives. Lors de notre dernier séjour dans

cette ville en 2007 et en 2008, nous avons constaté qu‟il n‟ ya plus de documents datant

de la période coloniale. Certains ont été emportés par les agents du Ministère de l‟Intérieur

qui travaillent dans le cadre du tracé de la frontière Burkina- Faso- Niger. D‟autres ont

disparu du fait de la négligence des autorités locales. L‟effondrement du toit du vieux

bâtiment a détruit les documents datant de la période coloniale. La conservation des

archives à Tillabéri et à Dosso est identique à celle de Say. En effet, les salles dans

lesquelles elles sont entreposées sont de véritables poubelles. Malgré un séjour

relativement long dans ces différentes localités, nous n‟avons pas trouvé un seul document

ayant trait à notre sujet.

Les documents produits par des Occidentaux, qui pour la plupart ont peu de

connaissances sur l‟islam, comporteront certainement des lacunes que seul un esprit

29
critique constamment en éveil peut déceler. Malgré tout, ils contiennent des informations

intéressantes sur l‟islam telles que des tableaux statistiques sur le nombre de musulmans

par villages, par subdivisions ou par cercles, sur les érudits, leurs mouvements, sur les

écoles coraniques, les confréries... Ils fournissent également des cartes et des dates sur

quelques évènements historiques. Il faudrait tout simplement être prudent dans

l‟exploitation de ces documents afin de relever les insuffisances et les combler par un

travail de recoupement des sources.

Le Nord du Nigeria dispose d‟importants dépôts d‟archives comme Waziri

Janaidu House à Sokoto, Arewa House et National Archives à Kaduna. Ces dépôts

contiennent une quantité importante de documents. Seul un long séjour permet de les

exploiter judicieusement. La documentation sur le Jihad et ses répercussions par exemple,

est très abondante. On y trouve des informations intéressantes sur l‟impact de ce

mouvement religieux dans notre zone d‟étude. Les documents d‟archives sont composés

des écrits des acteurs du Jihad et ceux des agents de la colonisation. Ils contiennent

également des informations sur les centres d‟études islamiques de l‟Ouest du Niger

(surtout les deux principaux : Say et Boboye).

L‟analyse des écrits des différents auteurs européens que nous avons consultés nous

a permis de faire les constats suivants :

- La plupart des auteurs ignorent la réalité du fait islamique ;

- Ceux qui ont quelques connaissances sur la question sont dans leur majorité influencés

par la pensée coloniale du XIXe siècle. Ils privilégient la suprématie et la piété des

populations à „‟peau claire‟‟, qui sont des vrais musulmans selon eux. Quant aux noirs, ils

pratiquent un islam fortement influencé par la religion traditionnelle. Ce sont ces auteurs

qui soutiennent les thèses d‟‟‟Islam noir‟‟, d‟‟‟Islam africain‟‟, de „‟naturisme‟‟ ;

30
Il y a une minorité d‟auteurs qui ont essayé de faire preuve d‟esprit scientifique.

Malheureusement, ils ont été limités dans leurs raisonnements à cause de la barrière

linguistique et la méconnaissance du milieu.

5- Les travaux universitaires

Les chercheurs se sont peu intéressés à l‟histoire de l‟islam dans l‟Ouest du Niger. Il

existe néanmoins des thèses consacrées à l‟histoire des populations de cette zone. Parmi

ces études, celle de Boubé Gado (1978), Le Zarmatarey a contribué de manière

significative à l‟élaboration de ce travail. Elle fournit des renseignements sur les

mouvements des populations dans notre zone d‟étude et les conséquences y découlant.

L‟intensification de ces mouvements va accentuer la pression sur les terres. Cette situation

va provoquer des guerres qui vont entraîner des mutations socio- économiques dans la

zone au XIXe siècle. Cette étude fournit également des informations intéressantes sur les

fondateurs des deux principaux centres d‟études islamiques (Say et Garouré). A cette

thèse s‟ajoutent celles de Mohamed Sidi Mahibou (1983), La pensée politique et sociale

d’Abdullahi B. Fūdi (1765- 1829) et de Hamidou Diallo (2009), Histoire du Sahel au

Burkina- Faso : agriculteurs, pasteurs et Islam (1740- 1960). La première est une analyse

de l‟œuvre d‟Abdoulaye Fodio. Ce dernier est présenté comme un grand prédicateur

jouissant d‟une grande réputation dans tout le Soudan : « Il fut même une période où les

dirigeants de différentes régions au Soudan étaient unanimes à lui demander conseil sur

des questions religieuses et temporelles » (Mahibou, 1983 : 47). C‟est ce que fit Daouda

Bougaran au moment où il préparait la guerre contre Boubacar Louloudji. Abdoulaye est

aussi présenté comme un grand combattant ayant remporté des victoires

décisives : « Abdullahi fut un combattant du 1er rang et un commandant très apte à diriger

les batailles. Beaucoup de combats ont abouti à la victoire grâce à la direction qu’il sut

31
leur donner » (Mahibou, 1983 : 201 – 202). Le second ouvrage porte sur l‟islam dans le

sahel du Burkina- Faso. Ce qui est intéressant dans cette étude, c‟est qu‟on constate que

les migrations peul vers le sahel Burkinabé et vers notre zone d‟étude, remontent à la

même période et ont eu les mêmes conséquences de part et d‟autre : pression sur la terre

engendrant des conflits entre agriculteurs et éleveurs, le rôle joué par l‟islam dans ces

conflits fonciers. L‟histoire de l‟islam dans le sahel Burkinabé ressemble beaucoup à celle

du Dallol Boboye. Comme Boubacar Louloudji, certains leaders religieux du sahel

Burkinabé ont profité du Jihad pour mener, une véritable guerre d‟expansion. Ce qui va

plonger la zone dans la violence.

6- Quelques problèmes généraux de la recherche

Ce travail est le fruit de plusieurs années de recherche bibliographique et

d‟enquêtes car notre sujet porte sur une question sur laquelle aucune étude spécifique n‟est

encore disponible. Il exige de nous un important travail de terrain sur un vaste champ

d‟étude. Faute de moyens appropriés, nos enquêtes n‟ont pas couvert toutes les

communautés vivant dans notre zone d‟étude. La communauté touareg par exemple, qui

compte en son sein des érudits qui ont marqué l‟histoire de la zone, n‟a pas été touchée par

nos enquêtes. La collecte des traditions orales n‟a pas été aisée. Ainsi, plus on remonte

dans le temps, plus les informations de qualité sont rares. Par ailleurs, les manuscrits

relatifs aux périodes reculées ne sont pas disponibles dans notre zone d‟étude. Nous avons

tenté néanmoins, d‟apporter notre modeste contribution à l‟étude de l‟évolution de l‟islam

dans l‟Ouest du Niger au cours de ces périodes reculées.

La dispersion de la documentation ne nous a pas non plus facilité la tâche. Nous

avons effectué deux voyages dans le Nord du Nigeria qui ont été limités dans le temps.

Seul un séjour long et des moyens conséquents permettent d‟exploiter judicieusement la

32
masse de documents disponibles dans ces centres de documentation. Compte tenu de toutes

les difficultés rencontrées, l‟étude peut souffrir d‟imperfection. Nous sollicitons par

conséquent l‟indulgence du lecteur quand il sera amené à constater des lacunes.

33
PREMIERE PARTIE : L’ISLAM DANS L’OUEST DU NIGER DU XVIe AU XVIIIe SIECLE

34
Cette partie est un aperçu sur l‟évolution de l‟islam dans l‟Ouest du Niger du XVIe

au XVIIIe siècle. Elle permet de saisir le processus ayant conduit au renouveau islamique

du XIXe siècle. Elle comporte trois chapitres. Le premier porte sur un aperçu géographique

et historique de la zone. Le second est consacré à l‟étude de trois centres d‟études

islamiques du XVIe siècle (Kafi, N‟Dounga et Kouré) qui permettra d‟apprécier le niveau

d‟implantation de l‟islam dans notre zone d‟étude au cours de cette période. Le troisième

chapitre portera sur l‟évolution de l‟islam dans l‟Ouest du Niger du XVIIe au XVIIIe

siècle. Il s‟agit d‟une période caractérisée d‟abord par une phase de stagnation de l‟islam

et ensuite une phase de recul. Après la chute de l‟empire soηey, les centres d‟études

islamiques créés par les lettrés musulmans waa zi et saney verront leurs activités

considérablement réduites. En outre, entre le début du XVIIe siècle et la première moitié du

XVIIIe siècle, la zone va accueillir plusieurs communautés composées essentiellement

d‟adeptes de la religion traditionnelle. Du coup, on assiste à une stagnation de l‟islam dans

l‟Ouest du Niger. Pire, on observe même un recul de la religion de Mohamed dû au retour

en force des croyances ancestrales.

35
Chapitre I : Aperçu géographique et historique

Presque entièrement situé dans la zone soudanienne, l‟Ouest du Niger confine vers le

Nord aux limites sud de la zone sahélienne à hauteur du 15e parallèle. C‟est une région de

brousse arbustive et de savanes jouissant au XIXe siècle, d‟importants atouts naturels. Les

grands groupes ethniques peuplant actuellement cet espace sont arrivés tardivement. Dans

la plupart des cas, les populations anciennes ont été assimilées ou refoulées loin de leurs

sites d‟accueil initiaux.

I- Aperçu géographique

L‟Ouest du Niger du point de vue morphologique est presque une pénéplaine. A

part quelques rares massifs cristallins et les buttes témoins du Continental Terminal, le

relief est plus marqué par la vallée du fleuve, ses affluents et les vallées fossiles de la rive

gauche du fleuve (dallols). On distingue trois zones climatiques dans l‟Ouest du Niger : la

zone sahélienne, la zone sahélo- soudanienne, la zone soudanienne.

Les populations sont concentrées le long des principaux cours d‟eau (le fleuve

Niger et ses affluents notamment). L‟implantation des centres d‟études islamiques, objet de

cette étude, semble être aussi dictée par les réalités géographiques du milieu. Ainsi, la

plupart de ces centres se trouvent aux abords des cours d‟eau : Say et Sinder (sur le fleuve

Niger), le centre d‟études islamiques du Boboye (dans le Dallol) ou encore Tirga et

Kounari (aux abords du Goroubi).

36
1- Le fleuve Niger et ses îles

a- Le Fleuve

Il est le cours d‟eau le plus important de notre zone d‟étude qu‟il parcourt sur 550

kilomètres. C‟est également le fleuve qui permet de relier le Dendi aux grandes villes

situées en amont du fleuve (Gao, Tombouctou notamment). Selon Henri Barth, le débit de

ce cours d‟eau était très important au XIXe siècle et sur ses berges poussait le

„‟bourgou1’’en quantité :

« C’est dans ce lit que roule le mystérieux Niger, enserrant souvent de longues
îles verdoyantes dont les parties les plus hautes, de niveau avec la rive à
laquelle elles se reliaient autrefois, émergent seules des flots ; lors des
grandes crues, le fleuve remplit ce vaste lit tout entier et le dépasse même à
certains endroits où la rive offre un passage plus facile à ses eaux débordées.
A cette époque, il n’en était pas ainsi, et une végétation magnifique couvrait
complètement l’étroit canal laissé au fleuve… » (Barth, 1861 : 172).

Le Niger divise la zone en deux parties : la rive gauche (haoussa) et la rive

droite (gourma). Mais cela ne constitue pas, comme on pourrait le croire, une barrière entre

les populations des deux rives ; c‟est au contraire une merveilleuse voie de communication

non seulement entre le Nord et le Sud, mais encore entre l‟Ouest et l‟Est. Le système

hydrographique comprend, outre le fleuve, les affluents de la rive droite qui drainent

d‟importantes quantités d‟eau vers le fleuve. Il s‟agit du Nord au Sud : du Goruol, du

Dargol, de la Sirba, de la Topoa et de la Mékrou.

Le Goruol prend sa source dans le Liptako près de Djibo et son court atteint deux cent

kilomètres environ :

« A sec pendant neuf mois de l’année, il se transforme après les pluies d’hivernage
en un torrent impétueux, très difficilement franchissable et mesurant jusqu’à cent
mètres de largeur d’eau profonde. Non seulement il alimente les mares qui
communiquent avec son lit, mais encore draine encore au fleuve une quantité d’eau
considérable. Pendant la saison sèche, son lit est creusé de puits de distance en
distance ; généralement, il est sablonneux, quelquefois il est encombré par des
rochers mis à nu par l’érosion des eaux »2.

1 -Bourgou : Une herbe qui pousse au bord du fleuve. Son nom scientifique est Echinochloa stagnina.
2
- ANN- 22- 1- 13- bis : Notice générale sur le cercle de Dounzou de Panet Lieutenant- Colonel, 1905, p. 8.

37
Le Dargol appelé Téra de sa source à ce village, Folkou dans son cours moyen et

Dargol dans son cours inférieur et jusqu‟à son confluent avec le Niger, prend sa source

dans les mares de Som :

« Il traverse ensuite celle d’Ossolo à partir de laquelle son cours ressemble plutôt
à un chapelet de mares étroites qu’à une rivière ayant un lit déterminé. Il a une
longueur de cent cinquante kilomètres. Pendant l’hivernage, sa largeur atteint
jusqu’à cent cinquante mètres. Il est à sec une partie de l’année, dès que les pluies
d’hivernage cessent de l’alimenter. Néanmoins, on trouve l’eau dans les mares de
Som, d’Ossolo et de Téra pendant neuf ou dix mois de l’année et les nombreux
puits qui sont creusés dans son lit sur toute l’étendue de son parcours, ne tarissent
jamais complètement. Aussi la région traversée par le Dargol est à la fois fertile,
surpeuplée et riche. Les gros villages se succèdent très rapprochés les uns des
autres et tous possèdent d’immenses approvisionnement de mil et de troupeaux
considérables »1.

La Sirba est le troisième affluent de la rive droite. Selon Panet :

« La Sirba descend de Torodi et mérite encore davantage que les rivières


précédentes, la qualification de torrent impétueux (…). Le lit est profond, tantôt
sablonneux, mais le plus souvent rocheux (…) . La largeur de la Sirba ne dépasse
pas cinquante mètres ; elle se déroule au milieu de forêts d’arbres puissants parmi
lesquels on trouve le Caïlcédra que les indigènes emploient pour la construction de
pirogues renommées et d’ailleurs très pratiques pour la région »2.

Les mares sont de deux sortes : celles qui tarissent chaque année pendant un temps plus ou

moins long et celles qui ne tarissent pas tout au long de l‟année.

Les deux autres affluents sont la Tapoa et la Mékrou qui constituent des frontières

naturelles (Nord et Sud) pour le parc National du „‟W‟‟. Avec une superficie de 220 000

ha, ce parc renferme l‟essentiel de la diversité biologique animale et végétale du pays.

b- Les îles

Elles possédaient une végétation abondante au XIXe siècle : « Les îles étaient bien

boisées » (Barth, 1861 : 177). La végétation et les eaux qui les entourent font de ces îles

des sites défensifs assez intéressants pour des populations fuyant l‟insécurité. Le choix de

1
- ANN- 22- 1- 13- bis : Notice générale sur le cercle de Dounzou de Panet Lieutenant- Colonel, 1905, p. 10.
2
- ANN- 22- 1- 13- bis : Notice générale sur le cercle de Dounzou de Panet Lieutenant- Colonel, 1905, p. 10.

38
ces lieux par certains érudits comme terres d‟accueil est certainement lié à leur position

stratégique sur le fleuve Niger.

2 - Les Dallols

Ce sont des „‟vallées mortes‟‟ situées à la rive gauche. Elles étaient de puissants

affluents du Niger aujourd‟hui desséchés, mais qui drainaient autrefois des masses d‟eau

considérables vers le fleuve. Elles sont au nombre de trois et sont situées dans la partie Est

de notre zone d‟étude. Ces vallées ont des terres très fertiles, la nappe se trouve à une

profondeur moins élevée et les pâturages aussi sont verdoyants. De tous ces Dallols, le

plus important est le Dallol Bosso, long de 300 km et large de 5 à 15 km par endroits.

Ensuite vient le Dallol Maouri. Plus court que le précédent, il est aussi d‟une fertilité

remarquable. Enfin nous avons le Fogha, qui est en réalité un affluent du précédent : « Il

est surtout réputé pour ses salines, exploitées toute l’année dans sa vallée supérieure

(Kawara- Debe- Bara) et en saison sèche seulement dans son cours inférieur (Tunuga-

Sabon – Birni) » (Du Picq, 1931 : 502). Une importante quantité de sel était extraite dans

cette vallée et elle alimentait au XIXe siècle, le circuit commercial de l‟espace nigérien

: « Probably the most important item in Sokoto trade with the reste of the Caliphate from

this early period was the salt produced in Dallol Fogha » (Abubakar, 1982 :

153).Traduction : [Probablement, le produit le plus important dans les échanges

commerciaux entre Sokoto et le reste du Califat, c‟était le sel produit dans le Dallol

Fogha]. Les pâturages salés du Dallol Bosso et du Fogha attirent particulièrement des

groupes peul venus de tous les horizons : « Adhabés du Liptako, Bitinkobés du fleuve,

Sanguinankobés du Gando affluèrent vers 1850 dans les vallées »1. Ces vallées sont des

zones de forte concentration humaine : « Toutes ces vallées ont joué au cours de l’histoire

1 - ANN- 5-1-13 : Histoire du peuplement du cercle de Dosso, Périé et Sellier, 1946, P. 25.

39
un rôle important. Elles canalisent et dirigent les migrations. Elles sont aujourd’hui des

lieux de peuplement à densité élevée : la proximité de l’eau, la fertilité des sols ayant

attiré, puis retenu les populations »1.

Le Dallol Bosso tire sa source au niveau des nombreuses vallées du Nord de

Tahoua (dans le Tassili) et vient se jeter dans le fleuve au Sud du „‟W‟‟. Barth qui est

passé par Tamkalla le présente comme une vallée disposant d‟importants

atouts : « Tamkala était situé au bord d’une vallée marécageuse, le dallol Bosso, aux

palmiers d’Egypte nombreux et complètement inondée à cette époque » (Barth, 1861 :

192). Les terres fertiles de cette vallée seront l‟objet essentiel de la rivalité entre les Peul et

les Zarma, les deux communautés les plus importantes vivant dans le Dallol. Dans cette

lutte pour le contrôle des riches terres de cette zone, l‟islam a joué un rôle important.

II- Le Peuplement de la zone et structures sociales

Le processus de mise en place des communautés actuelles vivant dans l‟Ouest du

Niger s‟est fait par des migrations successives depuis des siècles. En effet, selon les

sources archéologiques, il n‟y a que dans le Zarmaganda où l‟on peut repérer un

peuplement ancien autrefois troglodyte2 (cii, dakalance). Les premiers occupants de la

zone furent ainsi les Boussa, les Gourmantché, les Mossi. Ils furent chassés

progressivement par les nouveaux arrivants (Zarma- Soŋey, Touareg, Peul…). D‟autres

groupes socioculturels (Kourfayawa ou Soujé) venus de l‟Est s‟installèrent un peu plus au

Nord au cours de la même période. Ainsi, l‟Ouest du Niger compte les groupes

ethnolinguistiques suivants : Gourmantché, Zarma- Soηey, Haoussa, Touareg et Peul.

1 - ANN-15-1-10 : Notice sur l‟Histoire du peuplement du cercle de Niamey par Michel Sellier Sd, p. 4.
2 - Troglodyte : Ce sont des populations anciennes qui aménageaient des habitats sous-terrains
pour y vivre.

40
1- Les Gourmantché

Ce sont les populations les plus anciennes de notre zone d‟étude. Ils semblent avoir été

les premiers occupants de cette zone. Sur la rive droite du fleuve par exemple, ils ont créé

plusieurs villages :

« La rive droite du fleuve était, alors occupée par les Gurma, sédentaires,
chasseurs et pêcheurs qui ont laissé des traces nombreuses de leur occupation et
dont les villages étaient extrêmement peuplés si l’on en juge d’après les ruines.
Celles de Bosey – Bangu constituent un exemple »1.

A partir du XIVe siècle, les Gourmantché seront chassés de la région de Téra et seront

contraints de se replier vers le Sud jusque sur la rive droite de la Sirba. A partir de cette

date, commencent les déboires de ces populations qui seront refoulées vers le Burkina-

Faso actuel par les différentes communautés venues de l‟Ouest (Mali actuel) et qui sont à

la recherche de nouveaux sites d‟accueil (Soηey, Peul, Touareg). C‟est une population qui

est restée en grande majorité, adepte de la religion traditionnelle : « Les Gourmantchés

sont fétichistes et réfractaires à l’Islam »2.

2- Le groupe Zarma- Soŋey

Selon les traditions locales recueillies par Boubou Hama (SD) et Boubé Gado

(1980), la plupart des groupes actuels sont venus s‟installer tardivement dans l‟Ouest du

Niger. Sur le fleuve et de part et d‟autre de ce cours d‟eau, le fond du peuplement est

constitué de Kaado, Wogo, Kourté. Après l‟avènement de la dynastie des Askia, des

Sonantché fuyant Gao vont trouver refuge dans notre zone d‟étude. Plus tard, la défaite de

Tondibi intervenue en 1591 va pousser les résistants soηey à quitter la capitale de l‟Empire

pour préparer la résistance contre l‟envahisseur à partir du Dendi. Après avoir tenté en

1- ANN- 15-1-10 : Notes sur l‟Histoire du peuplement du cercle de Niamey par Michel SELLIER, p. 8.
2 - ANN- 15-1-8 bis: Monographie du cercle de Niamey, 1955, p. 40.

41
vain de reprendre Gao, les Soηey vont se disperser pour créer plusieurs petits Etats sur la

rive droite du fleuve.

Quant aux Zarma, selon plusieurs écrits (écrits arabes, tarikhs de Tombouctou, écrits

d‟administrateurs coloniaux..), les traditions orales et des éléments tirés de la cosmogonie

Zarma- Soŋey, ils sont en partie des Soŋey de la dynastie des Zaa c'est-à-dire des

« Zaberbanda » qui se sont individualisés de ce groupe vers l‟an mille (1000). Cette

individualisation serait probablement la cause déterminante de leurs migrations successives

entre le Xe et le XVIIe siècles. Avant leur arrivée, le Zarmatarey était habité par « de

Goubé, de Kallé, de Wâzi, de Sabiri, de Gabda, de Kogori et autres groupuscules sans que

l’on ne sache exactement lesquels ont assimilé plus ou moins les Zarma et lesquels furent

plus ou moins assimilés par eux ou émigrèrent sous leur pression » (Gado, 1976 : 39).

Selon des sources concordantes (Boubou Hama et Boubé Gado), les Zarma proviennent de

la région du lac Débo (Mali). Ils vont quitter cette zone suite à une brouille les ayant

opposés aux Peul. Sous la pression de ces derniers, ils entreprirent leur „‟vol cosmique‟‟

sur le « Barmadaba » ou (fond de grenier) entre le XVe et le XVIe siècles pour s‟installer

dans le Zarmaganda sous la conduite de Mali Béro. Ce dernier mourut à Sargane dans la

première moitié du XVIe siècle. A partir de cette localité, le groupe se disloqua : « Venant

de l’ouest, des populations de langue Zarma- Soŋey s’établirent entre le Xe et le XVIIe

siècles dans le Zarmaganda, le long du fleuve et dans le Dallol Bosso » (Gado, 1980 :

110). A partir du XVIIe siècle, les Zarma de Mali Béro s‟infiltrèrent dans le Dallol Bosso.

3- Les populations haoussa

On les subdivise en trois principaux groupes :

42
- Les Goubawa : « Les Gubawa venus probablement au XIVe du Dawra, s’installèrent

dans le Dallol Mawri » (Arzika, 1986 : 7). Selon une tradition recueillie par Marc Henri

Piault, les Goubawa affirment être les premiers occupants du Dallol Maouri :

« Les plus anciens des occupants actuels du Dallol, les Gubawa affirment avoir
trouvé le pays vide à leur arrivée. C’est au moins la tradition que l’on retrouve à
Lugu parmi les descendants de Dagoje et de Gije, deux frères fondateurs des
lignages initiaux. Ces deux hommes étaient venus en compagnie de leur sœur la
Sarauniya et d’un troisième homme, Guji, dont on ignore l’exacte relation de
parenté avec les précédents mais qui avait pour fonction d’égorger les animaux des
sacrifices ordonnés par la Sarauniya. Ces quatre personnages venaient de l’Est et
plus particulièrement du Daura, le premier des sept grands Etats hausa, les Hausa
Bokway » (Piault, 1970 : 48 - 49).

Les Goubawa font partie des premiers occupants du Dallol. De Lougou, ils vont essaimer

en occupant les terres de cette riche vallée.

- Les Arawa : Selon la tradition locale, ils viennent « du Bornu dont ils étaient chassés à

la suite de guerres et qu’ils se seraient installés dans l’Aréwa (Dogondoutchi) et à

Argoungou sous les ordres d’un chef nommé Kado »1.

Les Goubawa et les Arawa sont les deux groupes les plus importants du Dallol Maouri :

« Dans le Dallol Mawri, les deux groupes prépondérants sont d’une part les
Gubawa, parmi lesquels se trouvent les plus anciens occupants du territoire et qui
sont à l’origine du village de Lugu, résidence de la Sarauniya principale puissance
spirituelle du Dallol ; d’autre part les Arawa issus du mariage d’un guerrier
bornuan avec une jeune fille bagube. Ce sont ces derniers qui ont progressivement
établi leur pouvoir sur le Dallol en lui donnant des structures politiques » (Piault,
1970 : 42).

Le mariage entre ce guerrier bornouan et la jeune fille bagoubé va sceller les liens entre

Goubawa et Arawa. Ces derniers vont s‟individualiser au XVIe siècle, grâce à cet apport

bornuan :

« Les Arawa qui étaient à l’origine des Gubawa ou provenaient d’un même
stock Hausa qu’eux, s’individualisèrent après un apport bornuan au XVIe

1- ANN- 5-1-3 : Monographie de Gaya : le droit Tienga par Marsaud 1909 et Esperet 1917, p. 18.

43
siècle qui leur conféra le nom des descendants de Ari ou Arawa qui se
transforma en Arawa pour les habitants et Arewa pour la région » (Gado,
1980 : 187).

Une des particularités de ce groupe, c‟est son attachement aux croyances

ancestrales : « Pour trouver un fétichisme plus fortement organisé, il faut aller en pays

Maouri : cette race qui lutta continuellement contre ses deux adversaires de l’est et de

l’ouest, haoussas et djermas, ne s’est pas non plus laissé envahir par leur islamisme »1.

Les deux groupes (Goubé et Maouri), sous la pression démographique se répandirent dans

le Dallol Bosso.

-Les Kourfayawa : Comme pour les migrations des sous-groupes zarma, l‟arrivée des

Kourfayawa dans le Kourfey s‟est faite par vagues successives. « Vers la fin du XVIIIe

siècle, des Kurfeyawa venant du nord-est s’établirent dans le nord du Dallol Bosso »

(Nicolas, 1950 : 48- 49). La majeure partie d‟entre eux est demeurée haoussaphone ; une

portion a cependant abandonné le haoussa au XIXe siècle pour adopter la langue zarma.

Cette communauté les appelle ‘’Soujé’’ qu‟ils soient haoussaphones ou zarmaphones.

Cette arrivée des Kourfayawa se situe en troisième position après celle des Gubawa et des

Zarma : « Parmi les mouvements de populations qui intéressent le Kurhway, la migration

des Kurhwayawa est l’une des plus récentes puisque leur arrivée se situe en troisième

position après l’arrivée des Gubawa et des Zarma et aussi l’une des plus importantes »

(Salifou, 1986 : 49). Selon le même auteur, leur arrivée se situerait vers la fin du XVIIIe

siècle : « Le mot Kurhway ainsi que le mot dérivé Kurhwayawa sont récents et ils

dateraient seulement de l’implantation de ce peuple dans sa zone d’habitation actuelle,

c’est- à- dire vers la fin du XVIIIe siècle » (Salifou, 1986 : 66).

1 - ANN- 5-1-3 : Monographie de Gaya : le droit Tienga par Marsaud 1909 et Esperet 1917, p. 55.

44
4- Les Touareg

La chute de l‟empire soŋey en 1591 a eu pour conséquence, le développement de

l‟insécurité dans toute la sphère d‟influence de cet Etat. A cause de l‟instabilité politique,

plusieurs communautés (Soηey, Peul et Touareg), entamèrent une migration vers l‟Ouest

nigérien. L‟installation des Touareg dans la zone s‟étala du XVIIIe au XIXe siècle.

Dans le département actuel de Tillabéri, à la fin du XVIIIe siècle, vont s‟installer

trois groupes touareg : les Tahabanaten venant de Tombouctou qui s‟installèrent entre

Ayorou et Famalé ; les Rhattafen venant de Gao en descendant le fleuve ; les Hellagazen

qui comme les deux autres groupes arrivent du Mali. Deux groupes de la région

d‟Ansongo, les Tenguerédesh et les Logmaten arrivent dans la région du Gorouol et de

Téra. D‟autres groupes vont s‟installer dans le Zarmaganda et le Dallol Bosso. C‟est ainsi

qu‟un groupe de touareg musulmans Kel-Essouk conduit par Khamed Elhadji et venu de

la région de Tahoua au début du XVIIIe siècle, s‟établit dans le Taghazar. Ils seront rejoints

par les Kel-Nan, les Isherifen, les Kel- Tebonant du groupe Kel Dinnik et les Lissawan au

début du XIXe siècle. Les Kel- Nan vont s‟établir dans l‟Imanan au début du XIXe siècle :

« L’Imanan, dont le nom qui signifierait en Zarma, « laissons- les passer », attitude
qu’auraient observé les Zarma en voyant arriver les premiers Kel- Nan dans la région
au tout début du XIXe siècle, région qui était occupée par des Kallé, des Gubé et des
Kufayawa zarmaphones » (Gado, 1980 : 194).

5- Les Peul

L‟émigration des Peul vers l‟Ouest nigérien qui débuta vers le XVe siècle, s‟accéléra

après la défaite de Tondibi de 1591. C‟était une infiltration sous forme de recherche de

nouveaux terrains de parcours avec parfois une sédentarisation. Il est important de noter

que les vagues migratoires peul ont toutes pour point de départ le Macina. En effet,

l‟expédition marocaine de 1591 qui mit fin à l‟empire soŋey eut pour conséquence une

situation d‟insécurité sur le plan politique (insécurité et instabilité politique), sur le plan

45
économique (déclin de la vie économique) et social (surpeuplement de certaines zones,

sédentarisation forcée dans d‟autres) au niveau de la boucle du Niger. L‟insécurité et

l‟instabilité politique poussèrent plusieurs groupes peul à quitter leurs foyers d‟origine en

direction de l‟Est. Ces migrations commencées dès le XVe siècle, s‟intensifièrent aux

XVIIe et XVIIIe siècles : « Cette période du XVIIe- XVIIIe marque l’apogée des migrations

peul en direction de l’Est » (Baka ,1992 : 10). Ces Peul seront les principaux agents

d‟islamisation dans l‟Ouest du Niger au XIXe siècle.

a- L’installation des Peul sur la rive droite du fleuve

Avant le XVIe siècle, quelques groupes peul ont commencé à s‟infiltrer dans

l‟Ouest du Niger. Parmi ces groupes figure celui des Peul Fetobé ou Bittinkoobé. Parti du

Macina, ce groupe s‟était rendu dans la région de Gao puis s‟installa à Bitti près de

Labézenga. A la suite d‟une querelle avec des Touareg, ce groupe quitta la région pour

s‟installer au Nord de la Sirba :

« Sous la conduite d’un chef nommé Ali yoro Ama Mala, cette fraction peule a
quitté le Macina à une date qui n’a pu être précisée. La tradition orale nous
apprend seulement que ce groupe Fetobe, au départ du Macina, se rendit dans la
région de Gao, puis qu’il s’installa à Bitti près de Labezenga. A la suite d’une
querelle entre Sala frère du chef Fétobe et un Touareg (qui se seraient disputés une
femme, disent les uns, un cheval prétendent les autres), une lutte s’engagea entre
Touareg et Peuls Fétobés. Ces derniers vaincus durent abandonner Bitti et se
réfugier dans le sud (au nord de la Sirba), vers 1513 »1.

Mais, les différentes guerres contre les Gourmantché, les Touareg, les Soηey n‟ont

pas facilité la tâche à ce groupe. Sous la pression de ces différentes communautés, les

Bittinkoobé vont descendre plus au sud pour s‟installer dans le Bittinkodji. Selon Hassan

Baka : « La migration des Bittinkobe, du Macina à Bitti se situerait dans la première

moitié du XVIIe siècle. Celle de Bitti au Bittinkodji se situerait à la fin de la première

1- ANN- 16-1-1 : Notes sur Peuls et Gourmantchés de la région de Say par A Loyzance, SD, p. 3.

46
moitié du XVIIIe siècle » (Baka, 1992 : 31).Taillebourg situe l‟arrivée de ce groupe,

sensiblement à la même période :

« Les premiers éléments que nous avons pu recueillir sur l’histoire du cercle de Say
remontent vers l’année 1500 et concernent principalement la province de Lamordé.
Des Bitinkobé venus du pays de Bité près de Gao quittèrent cette région pour
échapper dit la légende au privilège abusif que s’arrogeaient les Touaregs de
coucher la première nuit des noces avec les jeunes mariées, mais plus
vraisemblablement à la suite d’une querelle ayant causé la mort d’un chef Touareg
surpris avec la femme d’un chef de Bitinkobé aïeul du chef de Youri »1.

Ce qui est intéressant à souligner ici, c‟est qu‟au sein des communautés peul, on note

l‟existence de lettrés musulmans dans plusieurs familles. Mais, c‟est surtout au XIXe siècle

que les Bittinkoobé vont jouer un rôle important dans l‟islamisation de l‟Ouest du Niger,

avec l‟avènement de Sorry Beldo Hooré qui va fonder le centre d‟études islamiques

secondaire de Tirga.

b- Les Fetobé ou Foulmangani

C‟est longtemps après les Bittinkoobé que les Fetobé ont quitté le Macina pour se

rendre au Liptako. Les traditions restent muettes en ce qui concerne la date de cette

migration. Selon Loyzance : « Ils ont quitté cette province vers 1765. C’est à la suite du

décès du chef de la tribu Gaya et du règlement de sa succession que les Fetobe

Foulmanganis sont partis du Liptako »2. Ils vont s‟installer dans une localité nommée

Nipelma, située entre Botou et Sambalgou. Ce sont ces Peul qui s‟installeront plus tard à

Tamou.

c – Les Torobé

Il y a eu plusieurs vagues migratoires des Peul Torobé. Celle de Moussa Jokollo par

exemple aurait quitté le Fouta- Toro au XVe siècle. Mais, l‟une des vagues les plus

1 - Archives des Etudes Nigériennes no 16 (IRSH) : Historique du cercle de Say par Taillebourg 1912, p. 1.
2 - ANN-16- 1- 1 : Notes sur Peuls et Gourmantchés de la région de Say par A Loyzance, SD, p. 5.

47
importantes a quitté le Macina au cours du XVIIIe siècle. Elle s‟est dirigée vers Gao mais

le séjour dans cette localité a été assez court (la tradition locale reste muette sur les raisons

de ce séjour relativement bref). Descendant le fleuve sous la conduite de leur chef, ce

groupe est venu s‟installer à Boulkabou, au Nord de la Sirba. Selon Loyzance, c‟est au

début du XIXe siècle qu‟il va se fixer à Tiouridi : « Vers 1819, sous le règne de Madiou,

fils de Mourindi, ils furent attaqués par les Songhaïs et chassés de la région. Ils

traversèrent alors la Sirba et vinrent s’installer à Tiuridi Maoundi »1.

d – Les Ferobé

Après sa défaite face à l‟armée du nouveau roi du Macina, Sékou Amadou, Guéladio et

sa suite ont quitté le Kounari pour s‟installer non loin de Say au bord du Goroubi vers

1833.

e- L’installation des Peul sur la rive gauche du fleuve

Dans cette partie de notre zone d‟étude, les Peul sont surtout attirés par les riches

terres des Dallol sur lesquelles l‟herbe pousse en abondance. Ainsi, ils vont s‟infiltrer par

petits groupes au XVIIe siècle et le mouvement va s‟intensifier au cours du XVIIIe siècle.

Cette arrivée des Peul n‟a pas posé de problèmes de cohabitation au début :

« Depuis le 17e siècle, de petites fractions peules Torobés et Bitinkobés, avaient


commencé à s’infiltrer avec leurs troupeaux sur les pâturages du Niger et des
Dallols. Les pâturages salés du Dallol Bosso et du Fogha les attiraient
particulièrement. Cette arrivée des peuls par petits groupes passa tout d’abord
inaperçu. Ils vécurent côte à côte avec les sédentaires pendant deux siècles sans
autre conflit que les inévitables contestations de puits et de zones de pâturages »2.

C‟est au XIXe siècle, avec la pression démographique et l‟avènement de Boubacar

Louloudji, qu‟on assiste à des heurts entre les deux communautés dans le Dallol Bosso.

1- ANN-16-1-1 : Notes sur Peuls et Gourmantchés de la région de Say par A Loyzance, SD, p. 7.
2 - 5-1-13 : Histoire du peuplement : cercle de Dosso par Périé et Sellier, 1946, p. 23.

48
Cette vallée fut jadis une terre d‟accueil pour des éleveurs à la recherche de pâturage

ou des populations fuyant la sècheresse et les guerres. En effet, l‟accès facile à l‟eau et la

fertilité de la terre vont attirer des populations venues d‟horizons divers à s‟y installer.

L‟occupation de l‟espace par les différentes et nombreuses communautés n‟est pas sans

conséquences. Elle sera à la base des bouleversements socio- politiques qui vont marquer

la zone au XIXe siècle. Il faut souligner qu‟avant l‟arrivée des différentes vagues de

populations, la zone était peuplée par : des Goubé, des Toulmey, des Moulantché, des

Boussantché, des Tchanga qui seront par la suite supplantés par les Tobili et les Golé.

Boubou Hama lie l‟arrivée de ces premières populations dans le Dallol à l‟assèchement du

Sahara : « Le Dallol avec l’assèchement du Sahara, fut un point de chute pour les peuples

qui venaient de l’Ouest et du Nord. Parmi ceux-ci, les Moulantche semblent avoir joué un

grand rôle dans la vie économique du Dallol » (Hama, 1968 : 7). A ces premières

populations viendront se greffer des Zarma, des Touareg, des Peul, des Haoussa… Dans le

Dallol Bosso, ces différents groupes seront rassemblés par un érudit peul, Ali Anna qui de

retour de la Mecque va créer le village de Garouré.

6- Les relations entre les différents peuples

Jusqu‟au XVIe siècle, en dehors de quelques conflits mineurs autour des points

d‟eau, les populations qui vivent dans notre zone d‟étude ont entretenu entre elles des

relations pacifiques. L‟installation de nouveaux groupes de migrants s‟est faite aussi

pacifiquement. Mais, entre le XVIe et le XVIIIe siècle, on note une poussée progressive

vers l‟Ouest du Niger : « L’anarchie qui suivit la chute de l’Empire Sonraï mit en

mouvement tous les peuples du bassin moyen du Niger. Les Touaregs descendirent de leurs

montagnes vers les plaines verdoyantes du Niger, razziant les populations et les

soumettant à leur tyrannie » (Périé – Sellier, 1950 : 1025). Cette poussée due à l‟arrivée

49
de plusieurs groupes de migrants et à la pression démographique va mettre fin à la

cohabitation pacifique. Les guerres qui vont opposer les différentes communautés (surtout

sédentaires et nomades) n‟a aucun caractère ethnique. Il s‟agit d‟une lutte pour le contrôle

de la terre dans un espace devenu trop petit pour une population de plus en plus

nombreuse :

« Il convient à notre avis de ne pas se méprendre sur le sens des guerres qui
ensanglantèrent cette région surtout dans la deuxième moitié du XIXe siècle. Elles
furent surtout des évènements politiques nés de la volonté de groupes récemment
immigrés comme les Peuls et les Touaregs, ou en expansion comme les Zarma, de
se tailler de nouveaux territoires » (Hamani, 2007 : 269).

Au début du XIXe siècle, on assiste non seulement à des querelles intestines au sein d‟une

même communauté mais aussi entre les différents groupes vivant dans cet espace :

« Au début du XIXe siècle, deux faits nouveaux vont secouer le Zarmatarey, qui
jusque là n’a connu que de petits affrontements avec les Mawri et les Kurfayawa et
les querelles intestines des Zarma de Mali- Bero. En effet en ce début de siècle,
l’infiltration des Twareg se fait plus nombreuse dans l’Immanan et dans le
Tagazart où existaient depuis le XVIIIe siècle quelques Twareg qui vivaient sans
trop de heurts avec les populations voisines. L’occupation de l’Immanan va
renforcer celle du Tagazart et provoquera un état endémique de razzia, de rapines
et de guerres entre les Twareg et les Zarma du Tondikange, du Dallol, du plateau,
et aussi entre les Twareg et les Kurfayawa du Kurfey, les Mawri du Mawrey et les
Gubé du Gubey » (Gado, 1980 : 183).

Cette situation qui prévaut dans le Zarmatarey, on la retrouve dans toutes les autres parties

de l‟Ouest du Niger : « Ce qui compliquait davantage les problèmes de cette région, c’était

sa situation de zone d’immigration dans laquelle continuaient à s’implanter des groupes

de provenances et d’ethnies diverses » (Hamani, 2007 : 265). C‟est cette zone secouée par

des crises qui va connaître le renouveau islamique du XIXe siècle. Ce dernier, au lieu

d‟aplanir les différends va plutôt déclencher un véritable mouvement de populations en

raison de l‟insécurité consécutive au Jihad d‟Ousmane Dan Fodio : « Le Jihad d’Ousmane

Dan Fodio va faire monter la tension dans la zone » (Idrissa, 1980 : 1).

50
7– Les structures sociales

Le pouvoir politique traditionnel est incarné par les chefs de villages pour les

sédentaires ou de tribus pour les populations nomades. En dehors des Haoussa, les

différents groupes socioculturels en présence dans l‟Ouest du Niger font partie des sociétés

fortement hiérarchisées. On y distingue trois à quatre catégories sociales. La société

Zarma- Soŋey se subdivise en trois catégories :

- les descendants de l‟ancienne aristocratie (koy- izé qui détiennent le pouvoir

politique) ;

- les hommes libres (les talaka- izé ou borcin) ;

- les descendants d‟anciens esclaves (bagna- izé) ;

Les sociétés peul font la distinction entre trois catégories :

- Les (rimbe) qui forment la classe des chefs détenteurs du pouvoir politique et

celle des ouléma qui sont des hommes de lettres. Ils sont détenteurs des terres

agricoles qu‟ils exploitent eux- mêmes ou qu‟ils mettent en métayage ;

- Les (macibe) qui sont des anciens captifs qui n‟ont pas de terre mais peuvent y

accéder par métayage ou par achat ;

- Les gens de caste qui forment la classe des artisans.

Ces mêmes clivages se retrouvent dans les sociétés touareg mais elles sont encore plus

marquées que dans les sociétés zarma- soŋey. On distingue les catégories sociales

suivantes :

- Les imajeghen qui constituent la classe des nobles guerriers ;

- Les ineslemen qui forment la classe des hommes de lettres ;

- Les inadhen qui sont des artisans ;

- Les iklen qui constituent la classe des captifs ;

51
Il faut souligner que chez les sédentaires comme chez les nomades, les captifs étaient

généralement des prisonniers de guerre. On devenait aussi captif soit par achat, soit par

naissance. Avec le brassage de ces différents groupes, on rencontre dans l‟Ouest du Niger

plus de la moitié des ethnies du pays, soit cinq (5) des huit (8) ethnies qui composent la

population nigérienne. Ce sont les Zarma- Soŋey, les Peul, les Touareg, les Haoussa, les

Gourmantché et même des Kanouri (Damana, Filingué).

Avant l‟introduction de l‟islam dans l‟Ouest du Niger, c‟étaient les religions du

terroir qui dominaient dans cette zone. De nos jours, l‟islam demeure la religion

dominante. Il cohabite avec le christianisme qui reste encore très minoritaire. L‟importance

de l‟islam dans l‟Ouest du Niger s‟explique par le fait que de nos jours, tous les villages

administratifs de cet espace, dispose d‟au moins une mosquée. L‟islam serait introduit dans

cette zone depuis très longtemps par le Mali avec notamment la phase Soŋey du XVIe

siècle. Mais c‟est surtout avec la phase peul du XIXe siècle, qu‟on assiste à une progression

sensible de la religion de Mohamed dans cette zone. En effet, les principaux centres

d‟études islamiques de l‟Ouest du Niger sont créés et animés par des Peul au cours de ce

siècle.

52
CHAPITRE II : ETUDE DE TROIS ANCIENS CENTRES D’ETUDES

ISLAMIQUES DE L’OUEST DU NIGER : KAFI, N’DOUNGA et

KOURE

Avant le XVIe siècle, beaucoup de zones d‟ombre subsistent sur l‟islamisation de

l‟Ouest du Niger. C‟est surtout avec la phase soŋey qu‟on assiste à une première percée de

l‟islam dans cette zone avec l‟installation des lettrés musulmans dans des localités comme

N‟Dounga, Kouré, Zouzou, Kafi… par l‟Askia Mohamed afin de propager l‟islam. Cette

œuvre sera poursuivie après la mort du souverain soηey dont les successeurs accordaient

une attention particulière aux lettrés musulmans qu‟ils comblaient de cadeaux et dotaient

de la documentation nécessaire à l‟accomplissement de leur mission religieuse. La création

des centres d‟études islamiques explique le grand intérêt que l‟Empereur Soηey accorde à

l‟enseignement du savoir religieux. Ces centres, surtout les deux principaux (Kafi et

N‟Dounga) vont rayonner jusqu‟à la chute de l‟Empire Soηey en 1591. Ce chapitre traitera

du rôle joué par trois de ces centres dans l‟islamisation de l‟Ouest du Niger au XVIe siècle.

I- Kafi, un ancien centre d’études islamiques

Village créé au début du XVIe siècle par Elhadji Mamoudou, ancêtre fondateur, il

est situé à 18 kilomètres au Sud de Dosso, sur le tronçon latéritique Agali- Kafi-

Dioundou. Kafi vient du mot haoussa : « mu ka fa nan » qui veut dire

littéralement : « installons-nous ici » d‟où l‟origine de Kafi. Ce site semble être un point

d‟escale sur la route caravanière Dosso- Dioundou- Nord Nigeria. C‟est ce qui explique

probablement l‟origine haoussa du nom de ce village.

53
1- Les origines du fondateur de Kafi

Le village de Kafi fut fondé au début du XVIe siècle (vers 1501) par Elhadji

Mamoudou. Ce dernier est l‟ancêtre des Zarma waa zi de la région de Dosso. C‟est un

alim, originaire de Tindirma (Mali actuel). Il faisait partie des ouléma qui effectuèrent le

pèlerinage aux lieux saints avec l‟Askia Mohamed. Selon Mahmoud Kâti, qui faisait aussi

partie de la délégation, il effectua son pèlerinage à la Mecque du 9 septembre 1496 au 29

août 1497 :

« Ayant fait ses préparatifs, il partit en l’année 902 [9 septembre 1496 – 29 août
1497], emmenant avec lui les notables ulémas suivants : le Cheikh Mohammed
Toulé, l’alfa Sâlih Diwara, Gâo- Zakaria, Mohammed Ténenkou, le Câdi Mahmoûd
Niédobogho, le Cheikh môri Mohammed Haougâro et celui qui a assumé la charge
périlleuse de rédiger le présent récit, c'est-à-dire moi- même Mahmoût kâti » (Kâti,
1913 : 25 -26).

En dehors des ouléma, les princes aussi faisaient partie du cortège et l‟Askia fit preuve

d‟une grande générosité au cours de ce voyage : « Mohammed entreprit, avec ses princes

et ses savants, un pèlerinage à la Mecque, qui contribua puissamment à accroître sa

renommée» (Barth, 1861 : vol 19). En traversant l‟espace nigérien, l‟Empereur et sa suite

passèrent par la région de Dosso et, c‟est non loin de cette ville qu‟il repéra le site sur

lequel sera érigé le village de Kafi. Selon la tradition locale, il apprécia beaucoup

l‟emplacement du site et, l‟Askia Mohamed proposa à Alfa Mamoudou d‟installer, à leur

retour, un de ses fils sur le site pour en faire un centre de diffusion du savoir religieux. En

effet, l‟Empereur Soηey constata en traversant la région de Dosso que l‟islam était

pratiquement inexistant. Il demanda à l‟ancêtre des Zarma waa zi, de faire du site qu‟ils

avaient repéré, un centre d‟études islamiques; proposition qu‟il accepta car en tant qu‟Alfa,

son devoir était avant tout d‟œuvrer pour l‟expansion de l‟islam. « Les enfants d’Elhadji

Mamoudou dont les noms ont été retenus par la tradition locale sont : Oumarou et

54
Alhassane »1. Il laissa un symbole (dont la nature n‟a pas été déterminée par nos

informateurs) sur le site. C‟est ainsi qu‟au retour du pèlerinage, après avoir accompagné

l‟Askia Mohamed jusqu‟à Gao, Elhadji Mamoudou rentra à Tindirma dans son village

natal et fit part de sa décision d‟installer une partie de sa famille sur le site qu‟ils avaient

repéré dans la région de Dosso. Il revint ainsi quatre (4) ans après dans cette zone avec son

fils aîné, Oumarou et quelques membres de sa famille. Ils vinrent s‟installer à Kafi au

début du XVIe siècle. Ils débroussaillèrent la zone et Elhadji Mamoudou retrouva le

symbole qu‟il avait laissé sur le site lors du passage du cortège d‟Askia Mohamed. Après

avoir béni le site, il ordonna à sa famille de s‟installer sur les lieux.

2- L’œuvre d’Oumarou et de ses successeurs

Après avoir installé les membres de sa famille sur le site, Elhadji Mamoudou

retourna définitivement à Tindirma où il mourut. Avant la construction des maisons,

Oumarou et sa suite creusèrent d‟abord un puits pour mettre les populations à l‟abri du

manque d‟eau. Aussitôt après son installation à Kafi, il ouvrit une école coranique,

fréquentée au début par ses enfants et ceux de sa descendance. Avec le temps, certaines

populations des villages environnants comprirent les bienfaits de l‟islam et commencèrent

à y inscrire leurs enfants. Kafi devint ainsi le premier centre d‟études islamiques créé au

début du XVIe siècle dans l‟Ouest du Niger.

A leur arrivée dans la région de Dosso, dans les villages environnants, « personne

ne priait »2. Pour mieux répandre l‟islam, les Waa zi eurent l‟ingénieuse idée de fonder

plusieurs villages dirigés par des Alfa. En effet, quand le nombre d’ouléma augmenta

sensiblement à Kafi, une réunion fut convoquée et au cours de celle- ci, le Farakoy3, animé

1 - Entretien avec Shaykh Djibo Amadou, imam de Kafi le 23/10/11.


2 - Entretien avec Shaykh Djibo Amadou, imam de Kafi le 23/10/11.
3 - Farakoy : c‟est un mot d‟origine soηey. Selon la tradition locale, lors de leur voyage pour la Mecque, un
rocher barra le chemin au cortège d‟Askia Mohamed et, de part et d‟autre, il n‟y avait pas d‟issue. L‟Askia

55
par le souci de propager l‟islam, conseilla aux érudits de Kafi de quitter le village pour

aller en créer d‟autres. C‟est ainsi que plusieurs lettrés musulmans quittèrent le premier site

d‟accueil pour fonder chacun un nouveau village. Dans chaque nouvelle localité créée, fut

ouverte une ou plusieurs écoles coraniques. Cette politique va se poursuivre jusqu‟à la

période coloniale. Les lettrés musulmans créèrent ainsi 16 villages. Il s‟agit de : Bodinga,

Banikoubey, Maydahini, Garbey- Tombo, Tchawyé, Guismaϊzé- Kouara, Boula- Koara,

Modi- Kouara, Mallam- Kouara, Farakaϊna, Mallé, Gourounsi- Bora- Kouara, Badounjé-

Koara, Tchigoudou- Kouara, Deyzobon, Silfa. Il faut signaler qu‟avant le règne de Toga, le

Farakoy était à la fois chef spirituel et temporel. C‟est à partir du règne de celui- ci, vers la

fin du XVIIe siècle, qu‟on assista à la séparation entre les deux pouvoirs : le spirituel du

temporel. Si Toga avait procédé à cette division, c‟est parce qu‟il n‟avait pas le bagage

intellectuel requis pour assumer la charge de chef spirituel. Il désigna alors parmi les lettrés

musulmans un imam (la tradition locale reste muette sur le nom de ce dernier) qui était

chargé d‟assumer cette responsabilité. Depuis lors, dans chaque village, il y a un Farakoy

et un imam. La tradition locale retient les noms des dirigeants suivants : Oumarou,

Alhassane, Alazou, Soguessa, Toga, Abdoullahi, Boubou, Shefou, Issaka, Sidikou,

Boubacar, Ahmadou, Barkiré, Hassoumi, Ibrahim et le Farakoy actuel, Djibrilla. Sans être

exhaustive, cette liste donne une piste aux chercheurs qui seraient tentés de faire une

étude sur l‟histoire des Waa zi.

Oumarou est l‟un des premiers ouléma à introduire l‟islam dans la région de

Dosso :

« Quand Oumarou s’était installé à Kafi, l’islam n’était pas encore introduit dans
cette zone parce que dans tous les anciens villages qu’il avait trouvés, les
populations ne pratiquaient que la religion traditionnelle. Et il n’y avait pas une
seule personne qui priait dans ces villages. D’après ce que nos parents nous ont

Mohamed demanda à Alfa Mamoudou d‟implorer Dieu afin qu‟il leur fraye un passage. Alfa Mamoudou pria
Dieu et le rocher se fendit en deux, le cortège passa et poursuivit son chemin. Depuis ce jour, Alfa
Mamoudou fut surnommé Farakoy et tous les chefs des villages waa zi portent le titre de Farakoy. Il s‟agit
d‟une image qui dérive du mot zarma fara, qui signifie fendre le bois.

56
appris, cette situation était presque générale. En fait, toute l’histoire du village et
des environs était consignée à l’écrit dans un manuscrit consumé
malheureusement dans un incendie qui avait ravagé le village, il y a cinquante ans
de cela. En effet, tous les documents anciens ainsi qu’un Coran écrit à la main
étaient conservés dans une caisse qui se trouvait dans l’une des cases de mon père.
Un matin pendant l’hiver vers 10 heures, j’étais sorti du village avec des
compagnons d’âge et c’est au niveau de Garbey- Tombo que nous apercevions une
immense fumée qui se dégageait au dessus de notre village. Nous avions aussitôt
rebroussé chemin. Mais, quand nous étions arrivés, c’était la consternation, une
bonne partie du village fut consumée par le feu. En effet, le temps que les secours
s’organisaient, avec le vent de l’hiver qui propageait facilement ce feu, la plupart
des cases du village avaient été réduites en cendre. Malheureusement, la case dans
laquelle se trouvait la caisse contenant les manuscrits et l’unique Coran (écrit à la
main) n’avait pas été épargnée par le feu et c’est ainsi que ces documents si
précieux avaient disparu »1.

Avant la construction de la mosquée et l‟ouverture d‟une école coranique,

Oumarou, rappelons- le creusa d‟abord un puits. Ce dernier se trouve actuellement au

milieu du village de Kafi à quelques vingt mètres à l‟Est de la grande mosquée. Selon la

tradition locale, l‟eau de ce puits a des vertus médicinales car jusqu‟ à aujourd‟hui les

personnes qui ont le goître, si elles séjournent à Kafi et qu‟elles boivent cette eau une

semaine durant, le gonflement du cou disparaitrait. Une autre œuvre du premier Farakoy

du village de Kafi, c‟est la construction d‟un mur d‟enceinte (Birni) pour sécuriser la

population. C‟était un Birni2 avec trois entrées principales. Cette fortification est l‟une des

plus anciennes de la zone. Selon la tradition locale ce mur a été construit 10 ans après

l‟installation des Waa zi sur le site vers 1511. Ce qui explique probablement l‟invitation

des autorités religieuses de Kafi par Boubacar Louloudji à tracer la fondation de la

fortification de Garouré.

1- Entretien avec Shaykh Djibo Amadou, imam de Kafi le 23/10/11.


2 - Birni : Mot d‟origine haoussa signifiant mur d‟enceinte.

57
3- La situation religieuse dans la zone à la fin du XVIe siècle

En dehors de Kafi et des seize autres villages créés par des Alfa waa zi, l‟islam était

peu répandu dans la zone. Selon Shaykh Djibo Amadou :

« Jusqu’à une période récente, la plupart des gens dans la province de Dosso
n’étaient pas convertis à l’islam. Le premier Alfa qui commença à enseigner le
Coran à Dosso est originaire de Kafi. Même la Idah1 ne fut instituée à Dosso que
sous le règne du Zarmakoye, Moumouni2(1938- 1953) sous la houlette d’un alim de
Kafi, Alfa Guéro. La plupart des imams de Dosso furent formés à Kafi. En réalité,
avant l’avènement des Wali3 dans cette région et même au-delà, l’islam n’était pas
très répandu. Il y a trente ans de cela, j’avais personnellement baptisé des vieux de
plus de soixante ans qui se sont convertis à l’islam. C’est pour vous dire que cette
religion n’a eu une emprise réelle dans la zone que ces derniers temps »4.

Comme on le constate, la religion de Mohamed n‟a touché qu‟une petite portion de la

population de la région de Dosso à la fin du XVIe siècle. Et même dans les villages touchés

par cette religion, celle-ci cohabite avec la religion traditionnelle. Après Kafi, nous allons

analyser la situation religieuse au bord du fleuve Niger à travers l‟exemple des Saney de

N‟Dounga.

II- Etude du centre d’études islamiques de N’Dounga saney

L‟Ouest du Niger faisait partie de l‟Empire soŋey au moment de sa splendeur. Le

règne de l‟Empereur musulman l‟Askia Mohamed verra une expansion de l‟islam au sein

de l‟Empire. Dans le souci de propager cette religion, l‟Askia Mohamed installa des lettrés

musulmans dans toutes les grandes régions du pays : « Askiya Mohammed déploya, en

effet, le plus grand zèle pour fortifier la communauté musulmane et améliorer le sort de ses

membres » (Kâti, 1913 : 115). C‟est ainsi qu‟il plaça des familles d‟érudits dans quelques

1- Idah : Tradition islamique au cours de laquelle une femme veuve observe le deuil de son défunt mari
pendant quatre mois et dix jours.

2 - Zarmakoye Moumouni est le père de feu Moumouni Adamou Zarmakoye, père fondateur de l‟ANDP,
ancien Président de l‟Assemblée Nationale du Niger.
3
-Wali : Il s‟agit des lettrés musulmans du XIXe siècle.
4 - Entretien avec Shaykh Djibo Amadou, imam de Kafi le 23/10/11.

58
localités de l‟Ouest du Niger. Malgré, l‟effort considérable fourni par ces ouléma, l‟islam

est resté une religion marginale dans cette zone jusqu‟au XIXe siècle: « A côté de

l’animisme, l’islam jusqu’au XIXe siècle occupait une position marginale » (Idrissa, 1981 :

42). Mais, ce qui est sûr, c‟est que cette politique a permis pour la première fois, une

progression quoi que timide, de l‟islam dans l‟Ouest du Niger. Selon Saka Balogun,

avant l‟ère soηey, les Zarma étaient majoritairement adeptes de la religion

traditionnelle : « A large section of the zabarmawa who profess Islam today redielate

traditions on the spread of Islam. According to these traditions, no zaberma accepted

Islam until a group of Muslim scholars arrived at Ndunga from the West» (Balogun, 1970:

73). Traduction: [Une majeure partie des Zarma qui pratiquent l‟islam aujourd‟hui

associent les traditions dans la pratique de l‟islam. Selon ces traditions, aucun Zarma n‟a

embrassé l‟islam jusqu‟à l‟arrivée à N‟Dounga d‟un groupe d‟intellectuels musulmans

venus de l‟Ouest]. Dès lors, on comprend aisément les difficultés rencontrées par les

ouléma waa zi et saney pour répandre l‟islam dans cette zone.

1- Le peuplement de l’île de N’Dounga

a- Les origines des Saney

Les différentes versions de la tradition locale que nous avons recueillies sur place

privilégient l‟origine orientale des Saney :

- Une première version fait venir les Saney de Tombouctou mais fait remonter

leur origine à la famille du prophète par le truchement de Hassane et Ousseini,

les jumeaux du calife Ali et de Fatima ;

- La deuxième version soutient que les Saney viennent du Macina. Elle fait aussi

remonter leur origine à la famille du prophète ;

59
- Une troisième version fait venir les Saney de Gao et donne la même origine que

les deux premières ;

- La quatrième version quant à elle donne le nom d‟un chérif Hassane qui serait

venu de Gao et qui aurait ouvert la première école coranique de N‟Dounga.

En réalité, ces ouléma ne sont pas des Arabes mais des Noirs originaires de la région de

Gao. Cette thèse orientaliste est développée par presque toutes les grandes familles

musulmanes d‟Afrique. Elle vise seulement à donner plus du poids et légitimité aux lettrés

musulmans. Selon la tradition locale, les Saney sont les premières populations à arriver

sur l‟île et, ils viennent de Saney de Gao du Mali actuel. Il s‟agit de quelques familles de

lettrés musulmans sous la conduite de Hassane et de Zemia accompagnés de leurs

progénitures. Selon cette même tradition, ils se sont servis d‟une gourde magique pour

repérer le site. Cette gourde a été lancée dans le fleuve depuis Gao et elle s‟est accrochée à

une herbe au niveau de N‟Dounga. C‟est ainsi que l‟île fut choisie comme site d‟accueil

par les Saney. Cette légende tend à donner à cette migration un caractère magico –

religieux. Dans la réalité, c‟est l‟Empereur soηey qui a instruit ces ouléma à quitter la

région de Gao qui compte déjà un nombre assez significatif de lettrés musulmans pour

s‟installer dans notre zone d‟étude afin de propager l‟islam. Le choix du site de N‟Dounga

s‟explique par sa position géographique stratégique sur le fleuve Niger.

b- L’occupation de l’île par les Saney et les Zarma Kogori

Selon la tradition locale, le site fut peuplé en deux étapes :

- Les premiers occupants de l‟île furent des ouléma (soŋey) originaires de Gao et

qui se seraient installés sur le site au début du XVIe siècle. Ils seraient arrivés sur le lieu

(2 ou 3 ans après la fondation de Kafi) vers 1503- 1504 ;

- La deuxième étape est marquée par l‟arrivée des guerriers (Wangari) dirigés par

60
Mallam à N‟Dounga vers la fin du XVIIIe siècle : « Mallam vers 1790 ? va s’établir à

l’actuel emplacement de Dounga- Taré »1.

2- Les Saŋey de N’Dounga

Les Saney sont des populations soŋey originaires de Gao. Selon Alkali Amadou

Tidjani :

« Les Saney sont les premières populations à occuper le site. Ils viennent de Saney
du Mali (Gao). Les nouveaux arrivants étaient conduits par deux frères : Hassane
et Zemia. Ils étaient venus avec tous les membres de leurs familles. A leur arrivée,
il n’y avait aucune famille sur l’île. Ils s’y étaient installés et l’endroit qui n’était
qu’un hameau va devenir un village avec les naissances, les mariages et l’arrivée
d’autres groupes de populations »2.

Selon la tradition locale, les Saney ont quitté Gao et sont venus s‟installer dans l‟Ouest du

Niger pour accomplir une mission religieuse. Les traditions recueillies sur place relatent

que Hassane eut un fils du nom d‟Amadou considéré comme l‟ancêtre des Saney de

N‟Dounga. Il eut à son tour plusieurs fils dont : Ibrahim, Moctar, Ousmane, Abdoulaye,

Amina Baaba. Il eut également quatre filles qui sont : Hassana, Ramatou, Nayé et Dommo.

Leurs descendants étaient restés seuls sur l‟île pendant une longue période quand un jour,

des Wangaari à la recherche du butin découvrirent le petit village caché par les arbres.

C‟était le bruit des coups de pilons des femmes qui guidèrent les guerriers. Ils furent

émerveillés par la beauté du site. Ils exprimèrent leur désir de s‟y installer. Ils se

présentèrent aux érudits qui acceptèrent leur doléance de rester sur l‟île à condition qu‟ils

n‟y apportent pas la Fitna3. Les guerriers approuvèrent alors cette condition. Les ouléma

leur demandèrent aussi de s‟installer un peu loin de leur site car musulmans et adeptes de

1 - ANN- 1E17.83 : Subdivision centrale de Niamey : Rapports de tournées effectuées de 1934 à 1946 dans
le canton de N‟Dounga par l‟administrateur Berger, p. 1.
2 - Entretien avec Alkali Amadou Tidjani le 01/04/11 à N‟Dounga.
3- Fitna ou désordre : Terme arabe fréquemment employé dans la longue histoire de l‟islam, pour y désigner
les périodes de troubles, de scissions et de luttes internes, parfois de guerres civiles ou d‟anarchie qui
marquèrent l‟évolution de la communauté musulmane.

61
la religion traditionnelle ne peuvent pas cohabiter sur un même lieu. Les guerriers

acceptèrent et s‟installèrent un peu plus au Sud. Ils créèrent le quartier Sebanguey. C‟est

ainsi que le petit village passa d‟un quartier à deux : Saney et Sebanguey. Les Wangaari

reconnaissèrent l‟autorité religieuse des Saney ainsi que leur droit sur la terre. Quant aux

Saney, ils admirent à leur tour l‟autorité politique des Wangaari. Selon Hassane Djibo :

« Les guerriers qui découvrirent ce site sont Gabey et son grand frère1. Après une
entente avec les Saney sur un certain nombre de principes, les guerriers
s’installèrent sur l’île et s’adonnèrent à leur principale activité, la guerre.
Quelques années après leur installation sur l’île de N’Dounga, Gabey décida de
quitter le site de son grand frère et alla créer son quartier, ce fut l’origine du
quartier N’Dounga-Fondobon. Ainsi, le village passa de deux quartiers à trois :
Saney, Sebanguey et Fondobon. Actuellement, seuls les descendants de ces deux
frères ont le droit d’être prétendants à la chefferie de cette entité socio-
politique »2.

3- L’activité religieuse des Saney sur l’île de N’Dounga

Les Saney étaient des lettrés musulmans et en tant que tels, ils n‟avaient d‟autres

activités que les études islamiques et l‟agriculture pour assurer leur subsistance. Ils étaient

restés seuls et, c‟est longtemps après que des Wangaari (guerriers) à la recherche du butin

avaient découvert ce petit village. Selon Alkali Amadou Tidjani :

« Nos ancêtres après s’être installés sur l’île avaient ouvert une école coranique et
apprenaient aux enfants du village à lire, à écrire et à interpréter le Coran. Mais,
c’était un islam tolérant car les Saney étaient restés sur place et avaient opté pour
une conversion par le consentement volontaire. En effet, même leurs voisins
immédiats, les Wangari étaient des adeptes de la religion traditionnelle et cela n’a
pas posé de problèmes de cohabitation. Ils ne faisaient pas le déplacement pour
aller de village en village prêcher pour amener les gens vers l’islam. Ils n’avaient
pas non plus entrepris de Jihad. Mais, quelques parents émerveillés par le
comportement des Saney envoyèrent leurs enfants sur l’île afin qu’ils soient
éduqués par ces derniers »3.

1- La tradition reste muette sur le nom du grand frère de Gabey.

2 - Entretien avec Hassane Djibo le 03/04/11 à N‟Dounga.


3 - Entretien avec Alkali Amadou Tidjani le 01/04/11 à N‟Dounga.

62
Avec cette politique d‟installation de familles des lettrés musulmans par Askia Mohamed

dans certaines localités de l‟Ouest du Niger, on assiste à une lente progression de l‟islam

dans cette zone. Cette situation s‟explique par la forte implantation des croyances

ancestrales dans la région au XVIe siècle (voir carte no2).

Selon la tradition locale toute l‟activité religieuse était au début concentrée sur l‟île,

mais avec le temps, quelques habitants des villages environnants avaient compris les

bienfaits de la nouvelle religion. Ils avaient commencé ainsi, à envoyer leurs enfants chez

les Saney afin qu‟ils reçoivent une éducation religieuse. Mais, le nombre était resté limité ;

ce qui fait que l‟œuvre des Saney de N‟Dounga n‟avait pas eu une grande portée. C‟est au

moment où les populations avaient commencé à manifester leur intérêt pour la nouvelle

religion, qu‟était intervenue la conquête marocaine qui marque un coup d‟arrêt dans le

processus d‟islamisation. L‟action des Saney n‟avait pas non plus rappelons- le, un

caractère contraignant. En effet, lors de leur installation sur l‟île de N‟Dounga, les

Wangaari avaient clairement fait comprendre aux Saney qu‟ils étaient des guerriers et

qu‟ils comptaient le demeurer sans pour autant constituer une menace pour leur religion.

Cette proposition fut acceptée par les érudits. Ils avaient continué à pratiquer la religion

traditionnelle. Mais généralement avant d‟aller en guerre, ils partaient voir les Saney pour

que ces derniers leur implorent Dieu afin que leur sortie soit couronnée de succès. Hassane

Djibo souligne cette entente cordiale entre ouléma saney et Wangaari, adeptes de la

religion traditionnelle :

« Nos grands parents n’avaient d’autres métiers que la guerre. Ils n’étaient pas des
musulmans mais ils entretenaient de très bonnes relations avec les Saney à qui
revenaient le poste d’Alkali. Le détenteur de ce poste dispose du pouvoir judiciaire.
Tous les litiges sont jugés en sa présence. Il écoute les plaignants et donne son avis
sur le litige conformément à la Shari’a. Quant au Wonkoy, il tranche en dernier
ressort. S’agissant de l’islam, c’est tout récemment que les descendants des
Wonkoy ont commencé à pratiquer cette religion et même à envoyer leurs enfants
chez les Saney en vue de leur initiation »1.

1- Entretien avec Hassane Djibo le 03/04/11 à N‟Dounga.

63
Ce témoignage prouve qu‟avant le XIXe siècle, l‟islam n‟était pas fortement

implanté dans notre zone d‟étude. En effet, c‟est au cours de ce siècle, qu‟il y eut une

progression sensible de la religion de Mohamed dans l‟espace nigérien avec le Jihad

d‟Ousmane Dan Fodio. Les autorités religieuses de N‟Dounga, alliées de Sokoto avaient

demandé en1263 de l‟hégire (1847 du calendrier grégorien) l‟autorisation de construire une

mosquée de vendredi sur l‟île. Elle fut accordée par l‟émir de Gwandou. Ainsi, N‟Dounga

fut l‟une des premières régions de l‟Ouest du Niger à disposer d‟une mosquée de vendredi.

De l‟installation des Wangaari sur cette île à nos jours, il y eut neuf (9) Alkali qui se sont

succédé. La tradition locale n‟a pas retenu, le nom du premier. Il s‟agit de : Bohari Baaba,

Salifou, Issa, Aboubacar, Yayé, Hassoumi, Moussa, Ismailou dit Diado et Amadou Tidjani,

l‟actuel Alkali. Après N‟Dounga, on note la création d‟autres centres d‟études islamiques

par les Saney comme celui de Kouré.

III- Le centre d’études islamiques de Kouré Saney

Kouré est le chef- lieu du canton actuel du Namaari. Il est limité :

Au Nord par Hamdallay ;

A l‟Est par Dantchandou ;

A l‟Ouest par N‟Dounga ;

A Sud par Kirtachi et le fleuve Niger ;

Au Sud- Est par Harikanassou et Birni- N‟Gaouré.

Les populations de Kouré sont des descendants de Hali Koda, le cadet des enfants de

Tagourou. A cause de leur nombre, ils vont s‟éparpiller pour occuper l‟espace compris

entre le Dallol et le fleuve: « Ainsi, la descendance de Hali Koda, très nombreuse, se

disperse au cours des XVIIe et XVIIIe siècles dans toute la région comprise entre le Dallol-

Mawri et le fleuve- Niger, créant de multiples villages zarma » (Rothiot, 1984 : 40). C‟est

64
ainsi que les villages autour de Dantchandou et ceux de Kouré, N‟Dounga, Liboré, Saga,

Hamdallay seront créés.

1- Les origines des Saney de Kouré

Les Saney de Kouré ont les mêmes origines que ceux de N‟Dounga. Les

traditions recueillies sur place les présentent comme des descendants du

prophète : « D’après cette tradition, les gens de saney descendaient d’Ousseini1 et seraient

des chérif »2. Cette version est largement répandue, elle vise tout simplement à donner une

certaine légitimité à cette famille d‟érudits.

Selon la tradition locale, les Saney venus de Gao au début du XVIe siècle se sont

installés d‟abord à N‟Dounga. Ils se sont inspirés de l‟exemple des Waa zi de Kafi. En

effet, quand le nombre de lettrés musulmans est devenu important sur l‟île, les Saney ont

décidé de se disperser pour aller s‟installer dans plusieurs autres villages voisins. Cette

stratégie vise à répandre l‟islam dans une région où la religion traditionnelle est

dominante. L‟installation des Saney sur un nouveau site permet de tisser des relations avec

les populations de la localité. Avec le temps celles- ci vont se raffermir et certaines

personnes qui fréquentent ces lettrés musulmans finiront par comprendre les bienfaits de

l‟islam et décideront ainsi de se convertir à la religion de Mohamed. On assiste ainsi,

grâce à des contacts individuels, à la conversion d‟une partie de la population.

2- L’installation des Saney à Kouré

Le village de Kouré serait fondé vers la fin du XVIIIe siècle : « Kaada est le

fondateur du village de Kure, chef- lieu de la principauté historique de Namari, vers

1779 » (Soumana, 2010 : 41). Selon la tradition locale, les Saney auraient quitté le premier

1 - Hassane et Ousseini sont les fils jumeaux d‟Ali (gendre du prophète) et de Fatima (Fille du prophète).
2- ANN- 1E17. 83 : Subdivision centrale de Niamey : Rapports de tournées effectuées de 1934 à 1946 dans
le canton de N‟Dounga par l‟administrateur Berger.

65
site (elle reste muette sur le nom de ce site) qu‟ils occupaient non loin de Kollo, pour

s‟installer à Kouré peu de temps après la création de ce village par des guerriers. Selon

Garba Maïkido Dioffo :

« A leur arrivée, ils étaient bien accueillis par les autorités de Kouré qui leur
avaient octroyé une partie des terres de la localité. La superficie des terres données
aux Saney était déterminée par des lancées de flèches. Les Saney avaient vivement
remercié les autorités et avaient pris l’engagement qu’ils ne poseraient pas d’actes
qui puissent troubler la quiétude sociale. Depuis leur arrivée jusqu’aujourd’hui, il
n’y a pas eu de problème de cohabitation entre les Saney et les populations
trouvées sur place »1.

3- L’œuvre religieuse des Saney

Au niveau du premier site d‟accueil, les Saney n‟ont d‟autres activités que

l‟agriculture et l‟enseignement religieux. Arrivés à Kouré, ils vont conserver les mêmes

activités. Ainsi, dès leur installation dans ce village, les Saney ont ouvert une école

coranique fréquentée au début timidement, par les populations de Kouré et des villages

environnants : « Les autorités elles- mêmes étaient des guerriers et portaient le titre de

Zarmakoye, la religion traditionnelle était fortement implantée dans la zone d’où le peu

d’engouement pour la nouvelle religion »2. Au début, l‟école était fréquentée uniquement

par les enfants des Saney. Mais avec le temps, les enfants des autres quartiers de Kouré

ainsi que ceux des villages environnants commencèrent à fréquenter cette école, il s‟agit

des villages de Sina- Kouara, de Karabedji, de Satché, de Windé… Plusieurs lettrés

musulmans ont été formés dans cette école : Baaba- Haoussa et Abdou de Sina-Kouara,

Alfa Yayé, Dagara (tous issus de la chefferie de Kouré)… On assiste ainsi à une

progression lente de l‟islam dans la région, qui va s‟accélérer au XIXe siècle avec le Jihad

d‟Ousmane Dan Fodio.

1 - Entretien avec Garba Maïkido Dioffo, enseignant à la retraite à Kouré le 13/05/12.


2- Entretien avec Garba Maïkido Dioffo, enseignant à la retraite à Kouré le 13/05/12.

66
La création des centres d‟études islamiques dans l‟Ouest du Niger au début du

XVIe siècle est une action voulue et encouragée par Askia Mohamed. Ce dernier avait un

grand respect pour les hommes de savoir qu‟il comblait de présents :

« Sa préoccupation pour la religion ne se démentit pourtant nullement tout au long


de son règne. Il choya les ulamâ, ceux de Tombouctou en particulier. Les Shérifs
(descendants du Prophète par Fatima) furent comblés de biens et reçurent d’autres
privilèges comme celui de s’asseoir auprès de l’Askiya sur son dais. Seuls les
lettrés avaient le privilège de manger avec lui, et il se levait pour saluer les
pèlerins à leur retour de la Mecque, ainsi que les savants.
On se rappelle l’installation des cadis dans toutes les localités assez importantes
pour en recevoir un, et ce dans l’ensemble du pays. Dans le Dendi, on cite le cas de
Sanay dans l’actuel arrondissement de Kollo » (Hamani, 2010 : 118).

C‟est avec ces centres d‟études islamiques créés au XVIe siècle, par des Waa zi et des

Saney qu‟on assiste pour les premières fois à la progression non moins importante de

l‟islam dans cette zone. Après la mort du grand Askia, ses successeurs vont essayer tant

bien que mal de poursuivre son œuvre :

« Ce mouvement humaniste, d’essence religieuse a été favorisé par l’action des


Askia. Ces princes Songhai étaient des gens instruits aimant les plaisirs de l’esprit
et s’employant par tous les moyens à encourager les hommes du savoir. Ils étaient
généreux à l’égard des lettrés, leur offraient des terres, des esclaves, des biens en
nature et leur procuraient des livres nécessaires à leurs recherches » (Sékéné
Mody, 1966 : 167).

Mais, cette politique soutenue par les Askia va connaître un coup de frein brutal

avec l‟invasion marocaine de 1591. Cette défaite provoque la ruine de l‟Empire. Ainsi,

l‟œuvre des lettrés musulmans va régresser considérablement après la défaite de Tondibi.

Si le XVIe siècle se caractérise par la fondation de plusieurs centres d‟études

islamiques qui ont joué un rôle important dans l‟islamisation de cette partie du Niger,

comment la religion de Mohamed a-t-elle évolué dans cette zone après l‟occupation

marocaine surtout au cours de la période allant du XVIIe au XVIIIe siècle ?

67
Carte No2 : Etat de l’islamisation de l’Ouest du Niger à la fin du XVIe siècle

68
Chapitre III : L’évolution de l’islam dans l’Ouest du Niger du XVIIe au XVIIIe

siècle

Après la chute de l‟empire soηey, une désorganisation politique s‟en est suivie et

on assiste dès lors à des mouvements migratoires de plusieurs peuples vers l‟Ouest du

Niger. Ces vagues migratoires sont composées à la fois de musulmans et de non

musulmans. Quelles répercussions l‟arrivée de ces différents groupes va t- elle avoir sur

l‟évolution de l‟islam dans notre zone d‟étude ?

I- Le retrait des résistants soηey dans le Dendi et le passage d’Ali Anna dans

le Dallol

1- Le retrait des résistants soηey dans le Dendi

Il faut rappeler à ce niveau que le Dendi fait partie de l‟Empire soηey, c‟est la

province du sud dirigée par un Dendi- Fari. Après la défaite de Tondibi, les résistants

soηey sous la conduite de l‟Askia Nouhou (1592- 1599) vont s‟installer dans cette partie de

l‟Empire afin d‟organiser la résistance contre l‟envahisseur : « En transférant la capitale

de Gao au cœur de Dendi, l’Askya Nouh (1592- 1599) et ses partisans entendaient

assumer pleinement l’héritage et la pérennité de l’empire fondé par ses ancêtres »

(Dramani, 1982 : 209). Selon Mahmoud Kâti, l‟Askia Nouhou était l‟un des plus rusés des

fils de l‟Askia Dâoûd :

« Il se trouvait en prison au moment de l’arrivée de l’expédition de Djouder au


Songaï ; il y avait été jeté par son frère l’askia Ishâq. Lorsqu’Ishâq eut pris la fuite,
Noûh se fit élargir de sa propre autorité et s’en rassembler ses frères, qui formèrent
avec lui un groupe nombreux. C’était un bon cavalier, gros, très brave, de haute taille
et de figure agréable » (Kâti, 1913 : 296).

69
Ce qui est intéressant à ce niveau, c‟est l‟introduction de l‟islam par ces guerriers

musulmans de Gao dans une région où les populations autochtones, les Tchanga, sont

restées jusque-là adeptes de la religion traditionnelle :

« On ne peut non plus oublier que les populations qui, après 1591, quittèrent Gao et
sa région pour mener à partir du Songoi nigérien la résistance contre l’envahisseur
marocain, étaient toutes musulmanes et le sont certainement restées malgré les progrès
évidents d’un certain syncrétisme développé au cours de leur contact avec les paysans
animistes devenus le vivier essentiel de leur armée de partisans » (Hamani, 2007 :
265).

Le contact entre populations autochtones et nouveaux arrivants a eu pour

conséquence, une timide progression de la religion musulmane au sein d‟une communauté

restée jusque là réfractaire à l‟islam. Même si l‟islamisation n‟a touché qu‟une minorité de

la population locale (surtout l‟aristocratie politique et guerrière), elle marque une étape

importante dans le processus d‟intégration ; renforçant ainsi les liens entre les deux

groupes : « Enfin l’islamisation scelle ce processus d’intégration avec la conversion

partielle à cette religion monothéiste qui détruit en partie les valeurs traditionnelles

tchanga » (Ayouba, 1995 : 108).

2- Le passage d’Ali Anna dans le Dallol

Ali Anna, un peul „‟Barry‟‟ de Dâri Fittouga (Macina), accompagné de quelques

disciples arriva dans le Dallol Bosso vers la fin du XVIIe siècle alors qu‟il partait pour la

Mecque. Sur le chemin, il passa par le Boboye et fit une escale dans le village de Karra1 ,

occupé par des Peul. Il y séjourna neuf mois durant avant de poursuivre son chemin pour

les lieux saints. A son retour de la Mecque neuf ans plus tard, il repassa par le village de

Karra, mais n‟y trouva personne. En effet, selon la tradition locale, l‟arrivée des Touareg

dans la zone a provoqué une sorte de panique et occasionné la dispersion des Peul.

1- Le village de Karra est situé à 8 kilomètres au sud de Birni-N‟Gaouré actuel. Le village tire son nom
d‟une plante appelée karra en zarma(roseaux en langue française) qui pousse en abondance dans la mare.

70
II- Le retour d’Ali Anna dans le Dallol

1- La création du village de Garouré

Ali Anna longeant la vallée fossile à la recherche des Peul de Karra, constata dans

la zone la présence des Touareg. Il se dirigea vers ces derniers qui se trouvaient au bord

d‟une mare et se présenta devant leur chef. Après les salutations d‟usage, un dialogue

s‟était engagé entre les deux hommes. Au cours de cet échange de vues, le chef targui

rassura Ali Anna et lui fit comprendre que les Peul n‟avaient pas quitté le Dallol, mais

qu‟ils s‟étaient simplement dispersés. Selon la tradition locale de Birni- N‟Gaouré :

« Le chef Targui impressionné par cet alim demanda à ce dernier d’invoquer


Dieu en sa faveur et en contre- partie, il lui cèderait les terres du Boboye. Ce
qui fut fait et le Targui céda la zone à Ali Anna. Ce dernier rassembla les Peul
dispersés et fonda le village de Garouré où il édifia une école coranique
fréquentée à la fois par les Zarma et les Peul. Il épousa une femme du nom de
‘’Pendo Diadié’’ et eut de cette union cinq enfants, trois garçons et deux filles :
Amadou Ali, Sambo Ali, Harouna Ali, Aïsata Ali, Aminata Ali »1.

Il s‟agit là d‟une tentative de justifier le pouvoir alors qu‟Ali Anna était avant tout un alim

à la recherche d‟un site où il va accomplir sa mission religieuse. Ce lettré musulman

rassembla les Peul dispersés dans le Dallol suite à la pression touareg. Selon des sources

concordantes, l‟arrivée des Zarma dans cette vallée est antérieure à celle des Peul :

« Au cours de la seconde moitié du XVIe siècle, des groupes Zermas et leurs


vassaux Sabiri et Gollé, descendent des plateaux arides du Zermaganda vers la
riche vallée du Boboy qu’ils durent considérer comme leur terre promise, car l’eau
affleure presque au niveau du sol.
Il semble que la principale cause de cet exode soit d’ordre démographique. C’est
l’expansion naturelle d’un peuple devenu trop nombreux pour une terre pauvre »2.

Mais, selon Hama Beidi Boubacar (2003), les Zarma seraient arrivés dans cette vallée

après la nomination d‟Ali Anna comme Lamido Dallol par le chef touareg3 :

1 - Sonothèque de l‟IRSH : entretien avec Siddo Sayoma le 23/04/69.


2 - ANN- 5-1-13 : Histoire du peuplement du cercle de Dosso par Périé et Sellier, 1946, p. 1.

3 - Le chef touareg : Il s‟agit d‟Alissan de Tabla.

71
« Le chef targui dit aux peuls :’’désormais, c’est le marabout que je vous donne
comme Lâmido’’. Ensuite il demanda au marabout où il désirait construire ses
cases. Celui-ci montra un petit plateau entre des baobabs. Les Peuls et les
Touaregs construisirent la concession du marabout. Quelques jours après le chef
targui quitta le Dallol pour rejoindre son pays. Devenu le seul maître du Dallol, Ali
Anna fonda le petit village de Garure. Il pria les Peul de faire venir leurs parents et
tous les gens qui dépendaient d’eux. [ ]. Un jour un Haoussa atteint d’acite vint
avec sa femme. Ali Anna le soigna avec le fruit du Parinari microphylla. Lorsqu’il
fut complètement guéri, Ali lui ordonna d’aller s’installer à Garou. De même, Ali
installa son fils aîné Amadou à Banga. Après, les Zarma vinrent s’installer dans le
Dallol. Ali Anna, Lâmido du Dallol, était très écouté et devint le guide spirituel
pour tout le pays » (Beidi Hama, 2003 : 25).

Sans nier le rôle de rassembleur joué par Ali Anna, car ayant réussi en si peu de

temps à réunir plusieurs communautés autour de lui et à créer une nouvelle autorité

politique et religieuse dans le Dallol, il est difficile de croire que les Peul aient précédé les

Zarma dans cette vallée. L‟auteur a oublié certainement de préciser qu‟il s‟agit de la partie

sud de cette vallée car la partie nord jusqu‟à Kiota était occupée par les Zarma bien avant

l‟arrivée d‟Ali Anna. Selon Boubé Gado, la localité de Kiota serait créée après la

dislocation des enfants de Tagourou autour de 1600 :

« Toutefois un fils de Mali, Tagourou se forgea un fief important à Koobi dans le


futur Tondikangué. Mais, la convoitise de ses enfants consacrera la dislocation en
micro- autorités du pouvoir paternel autour de 1600, dislocation favorisée par
l’apport d’une clientèle Kallé. Sajam l’aîné tenta, un parricide avec ses frères et fut
écarté du trône en faveur de Boukar l’avant dernier fils, qui avait éventé le secret.
Les trois frères s’en allèrent chacun de son côté avec sa clientèle et ses gens et
refusèrent de reconnaitre la primauté donnée à Boukar par le trop vieux Tagourou
(…). Hali Koda, le cadet, qui semble de loin avoir la plus nombreuse clientèle
surtout Kallé et Golé eut aussi une nombreuse progéniture. Son fils Zem fondera la
chefferie du canton de Kiota » (Gado, 1977 : 4 - 5).

Boubacar Hama Beidi a dû certainement se référer aux grandes vagues

migratoires des Zarma dans cette vallée et sur les plateaux qui remontent aux XVIIe et

XVIIIe siècles pour souligner l‟antériorité des Peul dans la zone. En plus, s‟agissant du chef

targui, l‟auteur affirme qu‟il s‟agit d‟Alissan de Tabla : « A son retour de la Mecque neuf

ans plus tard, Ali Anna ne trouva personne à Karra. Les habitants avaient été chassés par

72
les Touareg de Alissan Tabla du Tagazar. Le village était en ruine » (Beidi Hama, 2003 :

19). Toutes les sources que nous avons consultées situent l‟arrivée de cet érudit touareg

dans le Dallol au début du XVIIIe siècle. Or, avant cette période, ce groupe a déjà créé un

certain nombre de villages dans cette vallée. Plusieurs auteurs affirment que l‟arrivée de

cette communauté dans le Boboye est antérieure à l‟installation d‟Ali Anna. Pour

Beauvilain par exemple, l‟arrivée des Zarma dans cette vallée date du moment où Mali

Béro s‟est installé dans le Zarmaganda actuel :

« C’est alors que débute l’invasion Djerma. Chassés du Mali par les Touareg, les
Peul, ils arrivent, sous la conduite de Mali Bairo, dans la région
d’Anderamboukan. De là, ils se scindent en deux groupes : l’un occupe le
Djermaganda actuel, l’autre descend le Dallol jusqu’au Niger, absorbant ou
repoussant les premiers occupants » (Beauvilain 1977 : 53).

Rothiot quant à lui situe l‟arrivée de Goubé puis des Zarma entre le Xe et le XVIe siècle

dans le Dallol :

« Du Xe au XVIe siècle, des populations arrivent par vagues successives dans


l’ouest nigérien et cherchent la région la plus favorable à leur sédentarisation.
Dans le Dallol- Bosso, aux premiers migrants Kallé, Golé, et Sabiri s’ajoutent
bientôt les Goubé puis les Zarma de Mali Béro » (Rothiot, 1984 : 59).

De nombreux témoignages affirment l‟existence de plusieurs villages Goubé et

Zarma dans le Dallol lors du passage d‟Askia Mohamed et de ses compagnons pour la

Mecque : « Lors de leur passage, Askia Mohamed et sa suite avaient trouvé plusieurs

villages Gube et Zarma dans le Dallol »1. Comme le confirment ces témoignages, les deux

communautés ont donc précédé Ali Anna et sa suite dans la vallée.

La version de la tradition locale n‟évoque pas les autres groupes ethniques qui

vivaient dans la zone bien avant l‟arrivée des Peul et des Touareg. Plusieurs auteurs

soulignaient la présence d‟autres groupes comme les Goubé dans la zone lors du passage

d‟Askia Mohamed qui partait pour la Mecque. Moumouni Yacouba signale l‟existence de

1- Entretien avec Djibo Amadou, imam du village de Kafi le 23/10/11.

73
villages Goubé dans le haut Dallol lors du passage de l‟Empereur soηey en ces

termes : « La deuxième étape conduisit les pèlerins dans le royaume goubé de Goubékoye

Bonkano. Vers 1495- 1496, le Haut Dallol Bosso était habité par des Goubé, un peuple

originaire du Gobir » (Yacouba, 1997 : 411). Mais, Beauvilain Alain est encore plus

explicite sur la question. Il donne les périodes au cours desquelles plusieurs vagues de

populations sont venues occuper le Dallol :

« A partir du VIe- VIIe siècle arrivent des Haoussa venus de l’Est. Au XIII- XIVe
siècle, lors de l’extension de l’empire songhay, Haoussa et Songhay se métissent
pour donner les Goubey. Jusqu’au XVIIe siècle, le Dallol est occupé au sud par les
Tulmey (Haoussa) et les Kallé (Songhay), au nord par les Sakié et les Goubey »
(Beauvilain, 1977 : 53).

D‟autres auteurs comme Boubou Hama (1968), Soumana Harouna (1985) signalent

l‟existence des Goubé, des Toulmey, des Boussantché, des Moulantché, des Tchanga et

même des Gourmantché…. Comme on le constate, les Peul ne sont pas les premiers à

occuper le Dallol comme le prétend la tradition locale de Birni N‟Gaouré rapportée par

Hama Beidi (2003).

2- La création du centre d’études islamiques de Garouré par Ali Anna

Ce qu‟on peut retenir du séjour d‟Ali Anna dans le Dallol, c‟est l‟ouverture d‟une

école coranique à Garouré, fréquentée à la fois par les enfants peul et zarma. Grâce à sa foi

et à son talent de rassembleur, il a réussi à réunir autour de lui les deux communautés les

plus importantes du Boboye (zarma et peul). Il a enseigné le savoir religieux à plusieurs

enfants de ces deux groupes dans un climat de paix et de tolérance. Cet érudit peul est très

écouté par les populations locales. Il devient ainsi, le guide spirituel de tout le Dallol.

Depuis lors, les Zarma, plus nombreux s‟éparpillèrent dans toute la région en y créant des

nouveaux villages. Sentant le poids de l‟âge, Ali Anna décide de quitter la localité pour

74
son pays natal. Il est accompagné par des membres de sa famille dont son fils aîné, Sambo

« Devenu vieux, Ali rassembla tous les peul. Il leur fit savoir qu’à son âge son
devoir lui commandait de retourner chez lui, au Macina, pour montrer ses enfants
à ses parents et, aussi, pour leur faire connaître leur pays d’origine [……]. Ali
Anna, après avoir séjourné, au Boboye 44 1 ans dans son village de Garouré 2,
retourna au Macina » (Hama, 1968 : 24- 25).

Ali Anna arriva dans le Dallol vers la fin du XVIIe siècle : « Accompagné de ses disciples,

Ali Anna, un Peul Barry de Dâri Fittouga du Macina, arriva dans le Dallol Bosso vers la

fin du XVIIe siècle » (Hama Beidi : 19). Il y séjourna 44 ans avant de regagner son pays

natal. Son voyage pour les lieux saints a duré neuf ans. On peut situer son départ à la fin de

la première moitié du XVIIIe siècle. Avant de partir, il a confié le trône à son gendre, le

mari de sa fille Aïssa. Il va mourir au Macina, quatorze ans après son retour dans ce pays.

Après le départ d‟Ali Anna, les populations regroupées par cet érudit se sont dispersées à

nouveau et l‟islam qui a commencé à se répandre dans la zone va considérablement

régresser dans le Dallol. Son fils Sambo revient dans cette localité et ouvre une nouvelle

école à Darey.

3- L’œuvre de Sambo Ali Anna

Après la mort de son père, Sambo Ali Anna revient dans le Dallol et va retrouver

les siens dans le village de Darey : « Dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle, Sambo,

dont le père Ali Anna avait déjà séjourné dans la région lors de son passage pour la

Mecque et au retour, revint dans le pays » (Hamani, 2007 : 267). Il sera bien accueilli par

les populations de ce village. Il va poursuivre l‟œuvre de son père en ouvrant une école

1 - Les 44 ans, c‟est le temps qu‟Ali Anna a passé hors de son pays natal.
2- Le village de Garouré se trouvait un peu au Nord de Birni N‟Gaouré actuel. Selon Boubou Hama ce nom
vient du mot zarma ‟‟Garou’’ car le village était situé au pied d‟une colline qui avait la forme d‟une maison,
d‟un ‘’garou’’. La langue peul en a fait „‟Garouré’’. Après la construction du mur (Birni en hausa) qui
protège Garouré par Boubacar Louloudji, la ville prit le nom de Birni N‟Garouré. L‟administration coloniale
est responsable de la déformation du nom de la ville qui devient Birni N‟Gaouré au lieu de Birni- Garouré.

75
coranique. Il parvient, comme lui, à réunir autour d‟un même douddale les enfants peul et

zarma. Ces propos de Kimba Idrissa illustrent bien cette coexistence pacifique entre les

deux communautés : « Tous les gens du Dallol, Peul et Zarma, apprirent le retour de

Sambo. Ils accoururent vers lui, lui construisirent une concession à Darey. Après ce geste

touchant de sympathie, Sambo ouvrit une école coranique. Peul et Zarma envoyèrent leurs

enfants en masse » (Idrissa, 1981 : 47). Le Dallol a vécu ainsi en paix jusqu‟à la mort de

Sambo. C‟est avec son fils et successeur, Bouboucar Louloudji que les relations entre les

deux communautés vont se détériorer.

III- La fondation de Kwama1 dans le Dendi et l’arrivée des musulmans

touareg Kel Essuk dans le Taghazar

1-La fondation de Kwama par Ahmed Baba

Selon la tradition locale, cet érudit serait d‟origine arabe. On retrouve cette

thèse orientale dans presque toutes les familles des lettrés musulmans de l‟espace nigérien

précolonial. Mais, la véritable confusion sur les origines de ce lettré musulman a été semée

par Hambali Muhammadu qui le confond au célèbre savant de Tombouctou qui porte le

même nom : « The most important man in the history of Junju is Sheikh Ahmed Baba,

former scholar of the University of Timbuktu » (Hambali, 1972: 1).Traduction : [La plus

importante personnalité dans l‟histoire de Dioundou est le Shaykh Ahmed Baba, ancien

savant de l‟Université de Tombouctou]. Voulant montrer par tous les moyens qu‟il s‟agit

bel et bien du grand intellectuel de Tombouctou, l‟auteur affirme que le village de Kwama

a été fondé en 1635 par cet érudit après le déclin de l‟empire soηey: « Sheikh Ahmed Baba

founded Kwama village in about 1635 » (Hambali, 1972: 3). Autrement dit : [Shaykh

Ahmed Baba fonda le village de Kwama vers 1635].

1- Kwama est un village situé dans le Dendi .

76
En réalité, il ne s‟agit pas du savant musulman de Tombouctou mais d‟un autre

érudit qui porte le même nom que lui. En effet, toutes les sources que nous avons

consultées montrent qu‟Ahmed Baba, après avoir purgé sa peine de prison à Marrakech est

revenu à Tombouctou rouvrir son école. Il est mort dans cette ville, le 22 avril 1627, donc

bien avant la création du village de Kwama. Joseph Cuoq nous donne plus de précision sur

la mésaventure de l‟érudit de Tombouctou après la défaite de Tondibi:

« Il appartient à une famille de Cadis et d’ulémas. Cette appartenance à une


famille d’érudits lui valut d’hériter d’une riche bibliothèque. Un évènement capital
bouleversa cette vie apparemment des plus paisibles : ce fut l’invasion de la boucle
du Niger par l’armée marocaine en 1591. Quand le gouverneur marocain s’installa
à Tombouctou, Ahmad Bābā, ainsi que les autres membres de sa famille dont son
cousin, le Cadi Abu Hāfs Umar refusent de le reconnaître. L’affaire fut portée
devant le sultan de Marrakech qui après avoir tergiversé ordonna d’arrêter les ‘’
ulama’’ et de les ramener à Marrakech. L’arrestation fut l’occasion de pillage, de
violences, de viols et de traitrises dont les tarikhs nous ont gardé le souvenir.
L’internement des prisonniers fut immédiat. Le cadi ne sortit de sa geôle que
quelques mois avant sa mort. Ahmad Bābā fut également libéré mais prié
cependant de ne pas quitter la ville où il séjourna près de 13 ans. Il fut rendu à la
liberté avec tous ses compagnons par Mulay Zaydan, le successeur du sultan al-
Mansur et rentra à Tombouctou le 8 avril 1607 où il mourut le 22 avril 1627 »
(Cuoq, 1984 : 223).

Ces propos de Cuoq prouvent qu‟il ne s‟agit nullement du savant Ahmed Baba de

Tombouctou car il y a huit (8) ans d‟écart entre la date du décès de cet érudit et la date de

création du village de Kwama fournie par Hambali. D‟autres sources avancent le XIX e

siècle, comme date probable de la création de ce village :

« Au début du XIXe siècle un arabe, originaire de Fez (Maroc) se rendant à la


Mecque traversa les pays Haoussa. Treize ans après, il revint par le même chemin (…)
Après avoir traversé une brousse sauvage, il s’arrêta au nord du Fogha sous un
baobab. Comme sa suite l’avait laissé seul plongé dans ses méditations, un génie sortit
de l’arbre et lui demande de rester, à cet endroit. Le génie lui demanda aussi de faire
alliance entre Allah et les génies du sol et lui promit en échange de favoriser tous ses
descendants qui formaient une race spéciale de ‘’Komawa’’ (Singulier : Bakomé).
Amadou Baba accepta et fonda le village de Koma1 mais il ne régna pas lui-même et
confia le village de Koma à son fils Boubakar Baba Alfa »2.

1 - Koma : Il s‟agit du village de Kwama.


2 - ANN- 5. 1. 14- Subdivision de Gaya : Dictionnaire des villages 1946, p. 5.

77
Après un recoupement de ces différentes versions, Kwama serait créé vers la fin

du XVIIIe siècle. Mais, ce centre n‟a pas eu toute l‟importance que lui accordent les

traditions locales. D‟ailleurs après la mort de son fondateur, une querelle de succession

opposa ses descendants qui se dispersèrent pour fonder plusieurs autres villages parmi

lesquels Dioundou. Et l‟œuvre religieuse s‟estompa.

2-L’arrivée des Touareg Kel Essouk dans le Taghazar

a- L’origine de Khamed Elhadji

Khamed Elhadj pour certains, Ahmed Elhadji pour d‟autres, cet érudit surnommé,

Alissan de Tabla était un saint homme qui serait arrivé au Taghazar vers le début du XVIIIe

siècle. Selon la tradition locale de Tabla, ce lettré musulman n‟est pas un Kel Essouk mais

un chérif, descendant du prophète et originaire de Médine.

Selon des sources concordantes (Boubé Gado, 1980 et Seyni Gagara, 2003),

Khamed Elhadj était un Touareg Kel Essouk qui aurait quitté l‟Ader avec plusieurs

groupes touareg à la suite d‟un conflit qui l‟opposa à une armée du Zamfara :

« Il y a environ un siècle une tribu maraboutique qui habitait les environs de


Bagaggi près de Tahoua a fuit de querelles avec les gens du Zanfara. Craignant
des représailles à la suite de quelques méfaits les marabouts qui étaient peu armés
se décidèrent à émigrer avec tous leurs campements sous le commandement
d’alissen. Ils s’établirent à Tabula1 près de Sandiré »2.

Selon Seyni Gagara, Khamed Elhadj serait arrivé au début du XVIIIe siècle dans le

Taghazar avec plusieurs tribus touareg musulmanes : « Plusieurs tribus maraboutiques

qui vivaient avec lui sous sa protection l’accompagnèrent. C’étaient des Debbakar, des

Ihayyawane, des Izawitan, des Tamijirt de l’Azawak oriental » (Gagara, 2003 : 35). Malgré

1 - Tabula : Il s‟agit de Tabla.

2 - ANN- 15. 1. 2 : Notice sur le cercle du Djerma et Historique du cercle par le capitaine Salaman 1903 –
1904, p. 19.

78
le nombre relativement élevé de tribus maraboutiques qui composent sa suite, la portée de

l‟œuvre d‟islamisation de cet érudit est très limitée.

b- L’œuvre religieuse de Khamed Elhadj

Au début, Khamed Elhadj et sa suite n‟avaient d‟autres activités que les études

coraniques et l‟élevage du bétail. Les enfants des différentes tribus touareg installées à

Tabla fréquentaient l‟école ouverte par cet érudit. L‟islam commença à se propager de

façon sensible au sein de cette communauté. Mais, l‟arrivée d‟autres migrants a eu pour

conséquence, une pression sur la terre. Ainsi, les velléités guerrières vont prendre le dessus

sur la mission religieuse. L‟islam qui a commencé à se propager dans le Taghazar va

considérablement régresser dans la zone comme le souligne le capitaine Salaman :

« A leur arrivée, ils ne portaient pas de boucliers, ils jouèrent le rôle de marabouts
pieux, inoffensifs et pauvres. Ils ne tardèrent pas à changer de tactique dès qu’ils
eurent effectué la reconstitution de leurs troupeaux ; ils prirent les armes et la lutte
avec les Djermas ne cessa plus guère jusqu’à l’occupation française »1.

Khamed Elhadj œuvra au début pour le rayonnement de l‟islam dans cette partie du Dallol

Bosso. Mais, son œuvre n‟avait pas eu une grande portée car du fait de la pression

démographique, le contrôle de la terre devint l‟enjeu essentiel de la rivalité entre les

différents groupes vivant dans le Dallol. La mission religieuse fut ainsi reléguée au second

plan et l‟islam amorça ainsi, un recul. Après un séjour dont la durée n‟avait pas été

déterminée par les traditions locales, Khamed Elhadj mourut à Tabla et son fils Hamed lui

succéda.

1 - ANN- 15-1-2 : Notice sur le cercle du Djerma et Historique du cercle par le capitaine Salaman 1903 –
1909, p. 19.

79
IV- Etude des centres d’études islamiques

1- Les conditions de création des centres

Le centre d‟études islamiques est rappelons-le, un lieu d‟apprentissage et de

propagation du savoir religieux. Il s‟agit d‟un site choisi par un érudit soit du fait de sa

position géographique stratégique, soit à cause de sa proximité des zones de forte

concentration humaine. Peut être considéré comme centre d‟études islamiques, toute

localité dans laquelle s‟installe un lettré musulman avec pour mission principale, la

diffusion du savoir religieux. Cette propagation se fait à travers la création par l‟érudit

d‟une ou de plusieurs écoles coraniques. Le Soudan occidental a connu des grands foyers

religieux qui ont joué un rôle important dans la propagation de l‟islam avant le XIXe

siècle :

« Le XVIe siècle fut une période particulièrement brillante dans l’histoire du Soudan
occidental. Tombouctou, Dienné, Gao,Oualata etc… devinrent les centres actifs d’un
grand mouvement religieux et intellectuel. Ces villes étaient en relation avec les
grandes universités d’Afrique du nord (Fès, le Caire) et de l’Orient arabe » (Cissoko,
1966 : 167).

C‟est surtout au XIXe siècle qu‟on assiste à une progression sensible de l‟islam dans notre

zone d‟étude avec la multiplication des centres d‟études islamiques. La transmission du

savoir religieux dans ces derniers repose essentiellement sur l‟apprentissage du

Coran : « Cet apprentissage est en ce sens primordial pour tout croyant qui se doit d’en

connaître, ne fut- ce qu’une partie » (Hassane, 1995 : 84). Ce savoir est enseigné autour

des douddales ou écoles coraniques. Ces dernières, ont joué un rôle de premier plan dans la

diffusion de l‟islam dans l‟espace nigérien en général et dans l‟Ouest du Niger en

particulier.

« Le point de départ de l’enseignement classique est l’alphabet arabe puis le Qur’ān.


Dans les écoles qur’āniques ( ), l’enfant apprend à lire et à écrire et à réciter par
cœur le Qur’ān sans le comprendre car la compréhension vient dans un autre stade,
qui est l’étude de l’exégèse (tafsîr) et les sciences qur’āniques » (El Hamel, 2002 :
127).

80
2- Le fonctionnement des centres d’études islamiques

L‟enseignement du savoir religieux constitue l‟activité principale des centres. Il est

dispensé pour les jeunes apprenants dans les écoles. On distingue deux types d‟écoles

coraniques : la permanente et la saisonnière. « L’école permanente est celle qui est

traditionnellement implantée dans les anciens campements, devenus par la suite des

quartiers » (Hassane, 1995 : 85). Cette école est fréquentée non seulement par les élèves

(talibé) originaires du centre mais aussi ceux des villages voisins et parfois lointains. Ces

jeunes sont confiés au maître par leurs parents. Il est désormais chargé de la formation

religieuse du jeune apprenant mais aussi de son éducation morale pour en faire un modèle :

« Quand l’enfant accède à l’école coranique, l’enseignant l’entoure d’une attention toute

particulière et prend les dispositions qui favorisent sa réussite » (Hassane, 1995 : 87).

Quant à l‟autre école, elle est saisonnière. Après les travaux champêtres, la plupart des

enseignants qui résident dans les villages se trouvant dans la sphère d‟influence du

fondateur du centre d‟études islamiques quittent ces lieux pour venir s‟installer à côté du

maître afin d‟approfondir leurs connaissances. Ils sont généralement accompagnés de leurs

talibé. Ainsi pendant la saison sèche, le nombre de douddales augmente considérablement

dans le centre. A l‟approche de la saison des pluies, ces écoles saisonnières ferment leurs

portes. Les enseignants et leurs élèves regagnent les villages pour les travaux champêtres.

Le fondateur du centre d‟études islamiques dispose au sein de son entourage de

plusieurs répétiteurs qui sont chargés d‟encadrer les jeunes apprenants. Ce sont des élèves-

ma appelés santaru en fulfuldé. L‟enseignement est dispensé dans la cour du maître ou non

loin de celle- ci. Une case est généralement aménagée pour abriter les élèves. La nuit, les

apprenants étudient autour d‟un grand feu qu‟ils entretiennent à tour de rôle. Le jour, ils

révisent les passages du Coran sous un hangar qui se trouve non loin de leur case. La

première étape de l‟enseignement consiste à apprendre à l‟élève l‟alphabet arabe :

81
« Pour résoudre le problème de l’identification des lettres, l’enseignant fait appel à la
langue maternelle de l’élève, haoussa, soηey- zarma, peule ou autre et se réfère parfois
à des objets ou des images présents dans l’environnement de celui- ci. Ainsi, chaque
lettre aura une description propre qui la caractérise » (Hassane, 1995 : 97).

Chaque apprenant dispose d‟une planchette rectangulaire polie sur les deux faces appelée

walaha en zarma. C‟est sur cette planchette que le répétiteur écrit quelques lettres de

l‟alphabet à l‟élève.

Après l‟identification des lettres, la deuxième étape consiste à apprendre à l‟élève à

lire et à écrire. A ce niveau, c‟est un passage du Coran que l‟élève cherche à mémoriser en

quelques jours. Ce sont les répétiteurs qui sont chargés d‟apprendre le passage à l‟élève et

de veiller à ce que cette partie soit bien assimilée par celui- ci avant de l‟autoriser à

progresser. Les cours se déroulent du vendredi soir au mercredi soir. Ils débutent à l‟aube

avant la prière du matin. Les élèves sont pris en charge par la communauté. Aux heures

des repas, ils vont de porte en porte chercher la pitance en chantonnant d‟une voix

mélodieuse :

« Almajiri bara Les émigrés sont de [passage] dehors


Irkoy taamo Toi qui es fidèle à notre Seigneur
Irkoy baako qui adore notre Seigneur et fait grâce
Kan Irkoy na noo à qui notre Seigneur a fait grâce
Irkoy ma ni no hankan Que notre Seigneur te donne ce dont
ni ga ceeci tu as besoin
Irkoy ma ni wa balayu Que notre Seigneur t’épargne la calamité!
Ya Allahu ya koy gummaa Ô Allâh, Toi seigneur, le Clément » (Hassane, 1995 :
91).

Généralement avant la fin de cette chanson, les locataires de la concession offrent à l‟élève

une partie du repas du jour. Les répétiteurs ne sont pas rémunérés à la fin du mois. Ils sont

également pris en charge par la communauté. Le fondateur du centre d‟études islamiques

partage généralement les dons qu‟il reçoit entre les tous ouléma de sa cour (y compris les

répétiteurs).

82
Cette première phase pend généralement fin après cinq à six ans d‟études pour les

élèves brillants. Elle s‟étale sur huit à dix ans pour les élèves qui ont des difficultés

d‟assimilation. Après cette étape viennent les autres : le niveau complémentaire et le

niveau formation des formateurs (voir pp 236 – 237). Ces deux niveaux sont appelés

beyrey- caw autrement dit „‟l‟étude du savoir‟‟ et les programmes d‟enseignement tournent

autour de la théologie, de la jurisprudence, de la grammaire arabe…

3- Le choix des sites d’accueil

La plupart des centres d‟études islamiques ont été créés à l‟écart des cours traditionnelles

que les lettrés musulmans considèrent comme corrompues. La création ex-nihilo du plus

grand nombre de ces centres s‟explique par l‟insécurité qui sévit dans la zone. Les ouléma

sont porteurs d‟un message. Or, pour faire passer ce message, il faut éviter d‟être partisan

dans ces conflits qui déchirent l‟Ouest du Niger. En s‟installant à côté d‟un souverain

d‟une principauté, le camp adverse peut mal interpréter le choix du lettré musulman. Pour

observer une stricte neutralité, les érudits choisissent généralement des terrains vides

d‟hommes pour s‟installer. N‟étant plus partisans dans ces conflits, ils deviennent

crédibles. Quelqu‟un qui est socialement crédible, s‟il vient avec un message, il a toutes les

chances de le faire passer. C‟est à cause de leur neutralité que beaucoup d‟entre eux ont

servi d‟intermédiaires pour régler les différends et les litiges. Ils président aussi les

cérémonies de mariage, de baptême, de décès… Le choix des sites situés à l‟écart

s‟explique surtout par le souci qu‟ont les érudits de se faire accepter par la société mais

aussi de réussir leur mission religieuse :

« Les lettrés musulmans de l’époque sont des fins connaisseurs de la société. Ils
connaissent l’importance de garder des bons rapports avec le milieu. Ils évitent
toujours une rupture car ils savent comment vivre en harmonie au sein de la société. Ils

83
élaborent des stratégies pour se faire accepter puis après, ils essaient de convertir les
gens sans chercher à les transformer culturellement »1.

1
- Entretien avec docteur Moulaye Hassane, enseignant- chercheur au MARA, le 10/12/2012 à l‟IRSH.

84
Conclusion de la première partie

Au terme de cette étude, il ressort que l‟islam est un fait ancien dans l‟Ouest du

Niger où son premier contact selon Paul Marty et Moumouni Yacouba est antérieur à la

phase soηey du XVIe siècle : « Nous savons, par traditions, que l’islam a été apporté

dans le Djermaganda et les pays voisins, vers Tessaoua et Zinder par le Grand Chérif

Mohammed Abd- Al- Karim Al - Marili1, ou tout au moins, par ses disciples immédiats »

(Marty, 1931 : 342). Selon Moumouni Yacouba, les populations de Dendi (la partie Sud

de notre zone d‟étude) ont connu l‟islam avant l‟avènement d‟Askia Mohamed : « Avant

l’avènement du fondateur de la dynastie des Askia, l’islam était connu des populations du

Dendi surtout dans les centres urbains » (Moumouni, 1997 : 362). Comme on le constate,

la religion de Mohamed est un phénomène ancien dans notre zone d‟étude mais c‟est un

islam très marginal pratiqué seulement par quelques rares notables.

C‟est surtout au XVIe siècle qu‟il va faire une progression sensible dans notre

zone d‟étude avec l‟installation des lettrés musulmans par Askia Mohammed dans

plusieurs localités. Après la chute de l‟empire soηey, l‟activité religieuse de ces ouléma

connait un ralentissement. L‟islam a régressé pas seulement dans l‟Ouest du Niger mais

dans toute la sphère d‟influence de l‟Empire Soηey : « De 1591 à la fin du XVIIIe siècle,

l’islam connut une longue léthargie dont il ne se réveillera qu’à partir du XIXe siècle sous

l’action des Peul » (Hama, 1978 : 64). Les lettrés musulmans qui viendront après la

conquête marocaine dans la zone n‟ont pas pu faire progresser l‟islam à cause de la

résurgence de la religion traditionnelle :

« Avant le XIXe siècle, l’islam n’était pas très répandu dans l’Ouest du Niger. Au
XIXe siècle même il n’y avait que quelques rares localités qui disposent d’une
mosquée de vendredi, il s’agit de Say, de N’Dounga, de Birni N’Gaouré, de
Sinder… Dans presque tous les villages du Niger Jusqu’à une période récente, on

1
- Al –Marili : Il s‟agit d‟Almaghili.

85
organisait la fête du septième mois de l’année appelée Yénandi. C’était une
cérémonie qui drainait une foule importante. Les Saney faisaient partie des
premiers érudits à œuvrer pour l’expansion de l’islam dans la zone. Mais, la chute
de l’empire avait eu pour conséquence le retour en force des croyances
ancestrales »1.

On assiste ainsi, à une stagnation de la religion de Mohamed du XVIIe siècle à la fin de la

première moitié du XVIIIe siècle. On observe même un recul de l‟islam dans l‟Ouest du

Niger au cours de la seconde moitié du XVIIIe siècle. Cette situation est due à un retour en

force de la religion du terroir car les érudits de cette époque n‟ont ni l‟aura, ni le charisme

de leurs prédécesseurs pour faire passer le message de Dieu. L‟arrivée de plusieurs autres

groupes de migrants composés essentiellement d‟adeptes des croyances ancestrales n‟a

pas facilité la tâche aux lettrés musulmans :

« Les traces de cette religion vont progressivement se dissoudre au contact de


populations animistes notamment les Sonay, les Gubey et les Mawri. Ce retour à
l’animisme a été facilité par le mode de migration qui n’a pas été un mouvement de
masse et l’arrivée de chaque nouveau groupe contribue à la dissolution de l’islam
qui, soulignons- le manquait de soutien dans un cadre qui n’était pas propice à son
développement(…). Il semble que la période allant de la fin de XVIe siècle à la fin
du XVIIIe siècle soit dans notre région, celle de retrait de l’islam au profit de
l’animisme qui connaît un regain de vitalité » (Idrissa, 1979 : 82).

L‟islam se trouve ainsi largement supplanté par la religion du terroir. Cette dernière est

restée prépondérante dans la zone jusqu‟à la fin du XVIIIe siècle. Il faudra attendre le

renouveau islamique du XIXe siècle, pour assister à un retour en force de la religion de

Mohamed.

1- Entretien avec Garba Maikido, enseignant à la retraite à Kouré le 13/05/12.

86
Carte No 3 : Centres d’études islamiques de l’Ouest du Niger du XVIe au XIXe siècle

87
DEUXIEME PARTIE : LE CENTRE D’ETUDES ISLAMIQUES DE BIRNI

N’GAOURE

88
DEUXIEME PARTIE : LE CENTRE D’ETUDES ISLAMIQUES DE BIRNI

N’GAOURE

Il s‟agit dans cette partie d‟étudier le personnage et l‟œuvre de Boubacar Louloudji,

petit fils d‟Ali Anna. Nous aborderons ensuite les causes des hostilités dans le Dallol qui

ont conduit à la chute de Garouré et à l‟exil du fondateur de ce centre d‟études islamiques.

Contrairement à Mahaman Diobbo qui a brillé par l‟exemple dans toute la partie Ouest du

Niger, Boubacar Louloudji est un personnage controversé qui par ses ambitions

politiques démesurées, va plonger le Dallol dans un cycle infernal de violences.

D‟ailleurs, la différence sur le plan des comportements entre les deux personnages a poussé

les populations de Say à surnommer Alfa Mahaman Diobbo, rappelons – le, „‟ Alfa

Gouma „‟, ce qui veut dire le „‟ marabout discret ‟‟ et Boubacar Louloudji „’Alfa Hotta’’,

le „‟marabout chaud „‟.

Nous nous pencherons aussi sur l‟œuvre des successeurs de cet érudit et leurs

démêlés avec les Zarma. La mésaventure de cet alim, nous le verrons, n‟a

malheureusement pas servi de leçon à ses héritiers qui vont poursuivre la même politique

expansionniste de leur père, ce qui va raviver la tension dans le Dallol. C‟est pourquoi, le

centre d‟études islamiques créé dans cette vallée est celui dont la situation religieuse et

politique fut la plus tumultueuse. Les violences qui ont secoué ce centre vont se

poursuivre jusqu‟à la fin du XIXe siècle et auront leur couronnement en 1896, avec la

bataille de Boumba, la plus sanglante de l‟histoire de la zone.

89
Chapitre IV: Boubacar Louloudji et son œuvre

Il est le personnage qui a le plus marqué l‟histoire du Dallol. Si au début, il a

poursuivi la même politique que ses prédécesseurs (l‟enseignement religieux dans la paix),

la seconde phase de son règne fut très tumultueuse en raison du caractère oppressif du

régime. Ce qui va plonger la zone dans la violence. Il s‟agit dans ce chapitre d‟aborder la

situation géographique de Birni N‟Gaouré1, l‟œuvre religieuse de Boubacar Louloudji, la

dérive totalitaire du modibbo et ses différends avec les Zarma.

I- Situation géographique et économique

Le centre d‟études islamiques du Birni N‟Gaouré reste incontestablement l‟un des

plus importants de l‟Ouest du Niger. Le choix de cette dénomination s‟explique par le fait

qu‟il a changé plusieurs fois de capitale à cause des soubresauts politiques qui ont secoué

cette zone : Darey, Kotchirey, Garouré, Tamkalla, Kollo, Bikim puis Birni N‟Gaouré.

Tamkalla est la capitale du centre d‟études islamiques de 1832 à 1861. C‟est un village

historique. Après la défaite des Peul devant la coalition Zarma- Kabi, la population a été

dispersée. Le site de ce village se trouve à 7 kilomètres à l‟Ouest de Birni N‟Gaouré qui est

cumulativement chef-lieu de canton et de département. Précisons que c‟est une ville située

à une centaine de kilomètres de la capitale, Niamey, sur la route principale (RN1) reliant

l‟Ouest et l‟Est du pays. Tamkalla est un village situé dans la vallée fossile du Dallol

Bosso à 5 kilomètres au Sud de Margou. Le relief de ce centre d‟études islamiques est

essentiellement dominé par la grande vallée sèche appelée communément Boboye qui

prédomine sur presque toute la bande sud du département sur une longueur d‟environ 170

kms et s‟étend sur 10 à 20 kms de large. Le Dallol Bosso est une importante vallée fossile

située entre 12º25 et 14º10 de latitude Nord et est orienté selon un axe Nord-sud. En fait,

1
- Birni N‟Gaouré porte aussi le nom de la vallée qui traverse cette zone. Les Zarma l‟appellent Boboye et
les Peul Dallol.

90
c‟est le nom donné par les Peul à cette vallée fossile. En peul, „’Dallol’‟ veut dire

« vallée ». Les Zarma quant à eux donnent à cet affluent, le nom de « Boboye ». Il est

limité au Sud par le fleuve, et s‟étend au Nord au delà de la frontière nigéro- malienne. Il

est bordé à l‟Ouest par le plateau du Zigui et à l‟Est par celui du Fakara. Longue de plus de

1600 km, le Dallol Bosso est une vallée morte d‟une rivière. Elle est la plus large des

vallées fossiles de la rive gauche du fleuve. D‟orientation constante Nord-sud, elle présente

une anomalie entre Bonkoukou et Baléyara. Là, la vallée se resserre jusqu‟à 5 kilomètres.

Le Dallol était autrefois un puissant affluent qui devrait drainer des masses

considérables d‟eau vers le fleuve Niger. Aujourd‟hui, cet affluent est desséché et, est

devenu une vallée fossile qui ne draine plus de l‟eau jusqu‟au fleuve. Comblé par les

apports éoliens et victime de la dégénérescence du régime des pluies, le Dallol est

aujourd‟hui une vallée morte, encombrée par le sable. En considérant l‟ancien lit de ce

puissant affluent desséché, on ne peut que regretter les causes climatiques néfastes qui

transformèrent ce cours d‟eau en vallée sèche. Mais, malgré l‟assèchement de son lit, elle

est d‟une importance capitale pour les populations à cause de sa fertilité remarquable et

surtout l‟accès facile à l‟eau. Dans son lit, on dénombre plusieurs mares permanentes et

semi- permanentes. Les eaux souterraines sont également importantes.

Le Dallol se situe dans la partie sahélienne du Niger, caractérisée par une seule

saison des pluies, s‟étendant de juin à septembre avec des étés rudes : maxima pouvant

dépasser 45º en avril- mai. La fraicheur relative des mois de novembre à février permet la

pratique des cultures de contre- saison. Le climat est de type sahélien au Nord et sahélo-

soudanien au Sud. Le Boboye se situe entre les isohyètes 750 mm au Sud et 550 mm au

Nord. La végétation est celle du climat tropical sec : savane arborée et arbustive. Elle est

beaucoup plus abondante dans le lit de la vallée et moins abondante sur les plateaux

environnants où elle prend la forme de brousse tigrée. Actuellement, le Boboye est un

91
département situé dans la partie Ouest de la région de Dosso. Il couvre une superficie de

4432 km². Il s‟étend sur une longueur d‟environ 70 km du Sud au Nord. Il est limité :

- A l‟Est par le département de Dosso ;

- A l‟Ouest par celui de Kollo ;

- Au Nord par les départements de Loga et de Filingué ;

- Au Sud par le fleuve faisant frontière avec le Benin.

A cause de ses immenses ressources, le Dallol a toujours été considéré comme

un petit paradis au milieu de ses immenses plateaux arides. Non seulement ses terres sont

riches mais aussi la nappe phréatique est à faible profondeur. Dans la partie Ouest du

Niger, le Boboye était considéré comme un des cadres de référence de l‟autosuffisance

alimentaire. En dehors de sa vocation agricole, cette vallée est aussi une zone favorable à

l‟élevage. C‟est pourquoi la zone du Dallol est un lieu de brassage de populations venues

d‟horizons divers comme le souligne Moussa Brah : « Le pays des Dallol est l’une des

régions où se groupent les plus grandes diversités de genre de vie, d’ethnies et de races

tant les peuples, les cultures se sont interpénétrés les uns les autres.. » (Brah, 1983 : 41).

C‟est aussi une zone dans laquelle, les populations s‟adonnent à l‟exploitation du natron

dans les différentes salines se trouvant sur le site.

92
Carte N°4 : Localisation du département de Birni N’Gaouré ou Boboye dans l’Ouest du Niger

93
II- Le règne de Boubacar Louloudji (1796- 1833)1

Le Jihad d‟Ousmane Dan Fodio eut des répercussions importantes sur

l‟évolution sociopolitique du Dallol au XIXe siècle. Au cours de cette période, Boubacar

Louloudji, fondateur du centre d‟études islamiques du Boboye va marquer la zone. Avant

le Jihad, il était un alim populaire et respecté dans tout le milieu car il n‟avait pas encore

affiché ses ambitions politiques. La paix régnait dans la région et les enfants des

communautés peul et zarma étudiaient le Coran autour des mêmes douddales. Mais, dès le

déclenchement du Jihad, il prit fait et cause pour celui- ci. Boubou Hama le présente

comme un personnage difficile à saisir :

« Et, dans l’histoire du Boboye, l’étonnante aventure de Bubacar Lududji qui se


déroule dans la double personnalité de cet homme providentiel, à la fois un saint,
un voyant et un guide intransigeant d’une très grande lucidité et d’une
détermination rapide, déconcertante parfois […]. Il domine le Dallol de sa
personnalité mal connue qui, pourtant a cimenté à chaud, les éléments constitutifs
du passionnant royaume peul du Boboye dont l’histoire est une suite de leçons de
morale qu’il faut à chaque tournant, méditer» (Hama, 1968 : 14).

Mais qui est Boubacar Louloudji ?

1- Les origines de Boubacar Louloudji

Il a pour grand père, Ali Anna, un peul originaire du Macina qui a séjourné dans le

Dallol au cours de son voyage pour la Mecque. A son retour des lieux saints, il fonda, le

centre d‟études islamiques de Garouré. Devenu vieux, il quitta cette vallée avec deux de

ses fils, Sambo et Harouna, pour regagner la terre de ses ancêtres, le Macina où il mourut.

Dix ans après la mort de son père dans son village natal à Foutouga, Alfa Sambo décida de

revenir dans la zone pour rendre visite à ses parents restés sur place. Il laissa son frère

Harouna qui mourut plus tard au Macina. Selon la tradition locale, à son retour dans le

Boboye, il trouva que le village de Garouré fut détruit par des gens venus de l‟Ader. Après

1 - Selon la tradition locale, Boubacar Louloudji aurait accédé au trône à l‟âge de 25 ans et serait mort vers
1833 à l‟âge de 62 ans. Ces différents éléments nous ont permis de faire des recoupements et d‟avoir sa durée
de règne.

94
ce pillage, les Peul quittèrent le village et s‟installèrent à Dârey1 près de Kala où Sambo

Ali les retrouva. Ils étaient dirigés par un Peul appelé Hamma Tombo Kaïna. Ce dernier

remit la chefferie à Alfa Sambo. Comme son père, il ouvrit une école coranique pour

enseigner tous les enfants du village et ceux des villages environnants et même lointains.

Hamma Tombo Kaïna, l‟ancien dirigeant donna aussi sa fille Korga en mariage au nouveau

leader, Alfa Ali Sambo. De cette union, Sambo eut cinq enfants : Hamma, deux jumelles,

Hâoua et Adama, un fils Boubacar (qui sera plus tard surnommé Boubacar Louloudji) et

enfin, un autre garçon du nom de Djibo. Tous les fils de Sambo suivaient les cours en

même temps que les autres enfants. Selon la tradition locale, Boubacar fut parmi les élèves

de son père, celui qui est doté d‟une intelligence remarquable.

2- L’enfance et la formation religieuse de Boubacar Louloudji

a- L’enfance

Boubacar Louloudji est né dans le Dallol à Dârey selon la tradition locale de Birni

N‟Gaouré et à Louloudji selon celle de ce village. Il fut un élève au parcours exceptionnel.

Malgré son infirmité (aveugle à l‟âge de 12 ans), il a pu poursuivre ses études et a fait

preuve d‟une intelligence remarquable. Quelle est l‟origine du surnom Louloudji2 ? Selon

1 - Dârey : Selon Adamou Seybou, chef de village de Dârey, le nom de son village est d‟origine peul. En
effet, leurs ancêtres étaient des chasseurs, ils avaient choisi ce site parce qu‟il y avait trop d‟antilopes (Oryx)
dans la zone. Et quand les Peul conduisaient leurs animaux au pâturage, ils les regardaient avec admiration et
disaient en fulfuldé : « Daaré Kooba », c'est-à-dire regardez ces antilopes d‟où le nom Dârey. Selon une
autre version, Darey, village situé à 19 kilomètres au Nord- est de la ville de Birni, tire son nom d‟un arbre
fruitier qui pousse en abondance sur les terres du village. Les Zarma donnent le nom de Darey à cet arbre
(son nom scientifique est Zizuphus mauritiana) d‟où le nom du village, Darey. Mais la version qui nous
semble vraisemblable, c‟est la première car selon la tradition locale, le village serait fondé par un chasseur
Golé du nom de Bagaza. Et généralement, les chasseurs s‟installent là où le gibier est abondant. Bagaza vient
de Gao, il s‟est installé d‟abord à Kiota Nazamné avec les membres de sa familles et ses esclaves puis à
Tombo Kossomboli avant de s‟installer sur le site de Darey. Selon cette même tradition, le choix de ce site
s‟explique par l‟abondance du gibier dans la zone à cette époque. En effet, selon Adamou Seybou, les Peul
dirigés par Hamma Tombo Kaina avaient trouvé le chasseur et sa famille sur place et, les deux communautés
cohabitaient pacifiquement, chacune avec son dirigeant. Les Peul faisaient paître tranquillement leurs
animaux à côté des chasseurs qui s‟adonnaient eux aussi à leur activité principale c'est-à-dire la chasse. Et
quand Sambo était revenu, Hamma Tombo lui remit le pouvoir du village peul de Dârey.
2 - Louloudji, village situé à une dizaine de kilomètres au Nord- ouest de l‟actuel Birni N‟Gaouré. Il tire son
nom du fait qu‟à l‟époque, les populations de ce village à cause des moustiques et des fauves construisaient

95
la tradition locale, il a eu ce surnom à la suite d‟une histoire rocambolesque qui s‟est

déroulée dans le village de Louloudji au moment où Boubacar était jeune ‘’talibé’’. En

effet, Alfa Sambo, son père était un alim très respecté par les populations du Dallol.

Chaque année, au moment des récoltes, les paysans prélevaient leur „‟Zakat 1’’ sur la

récolte qu‟ils donnaient en aumône à cet érudit. Et, ce sont les ‘’talibé’’ du maître qui

allaient de village en village percevoir la ‘’zakat’’. Tous les élèves s‟acquittaient de cette

tâche à l‟exception de Boubacar Louloudji.

Exaspérés par le comportement de Boubacar, ils exigèrent une année qu‟il fasse

partie de la délégation car avant tout, c‟est sa mère la première bénéficiaire du mil qu‟ils

vont apporter. Le maître ayant senti la détermination de ses élèves de ne pas consentir à

aller prendre le mil sans la compagnie de son fils, ordonna à celui - ci de les suivre. Mais

avant leur départ, il recommanda à ses élèves de ne pas trop charger Boubacar d‟un poids

au- dessus de ses forces. Ils acceptèrent mais arrivés dans le village de Louloudji, ils firent

le contraire de ce que leur avait recommandé leur maître :

« Au moment des récoltes, comme à l’accoutumé, ‘’Alfa Sambo envoya ses élèves
dans le Dallol afin d’y percevoir la dîme de mil auprès des cultivateurs qui la lui
donnaient chaque année. Avant le départ des élèves pour cette mission, Alfa leur
recommanda de ne pas trop charger son fils Boubakar. Arrivé au village de
Loudoudji où les élèves devaient charger le mil, Boubakar les supplia de l’aider à
prendre sa charge. Les élèves, jaloux de ses succès à l’école, ne voulurent pas lui
venir en aide. Ils l’abandonnèrent seul à Loudoudji. Boubakar par miracle
parvint, tout seul, à prendre le chargement et vint à Darey avant ses camarades
qui l’avaient abandonné.
A son arrivée, son père lui demanda les nouvelles de ses camarades. Boubacar lui
raconta, alors tout ce qui s’était passé à Loudoudji. Alfa Sambo cacha Boubakar [
]. Quant aux élèves qui étaient venus d’ailleurs bien après Boubakar, ils
semblaient ignorer tout de lui et ils se contentèrent, tout simplement de dire que
celui- ci était allé s’amuser dans le village et que depuis trois jours, ils ne
l’avaient plus revu. Sur ce, Alfa Sambo, afin de les démentir et aussi pour prouver
tout ce qu’il savait d’eux, sortit de sa cachette Boubakar dont la présence étonna

leurs cases au dessus des hangars. Louloudji est le pluriel du mot peul, ‘’Loudou’’, qui signifie, case au
dessus d‟un hangar. Les Zarma le Surnomment Louloudji car selon eux, Boubacar est né dans le village de
Louloudji.
1 - Zakat : il s‟agit ici, de la dîme sur les récoltes. En effet, après les récoltes au-delà de 30 bottes, les paysans
musulmans prélèvent une dîme sur les récoltes (1 botte sur 10 bottes) qu‟ils remettent au modibbo du village
ou de la zone.

96
tous les élèves qui crièrent ‘’Ah ! Voilà Boubacar de Loudoudjé. A partir de ce
jour, Boubacar fut qualifié de saint et surnommé ‘’ Loudoudji’’» (Hama, 1969(a) :
26- 27).

A partir de cet incident Sambo, décida de ne plus laisser son fils suivre les

‘’talibé’’ et ordonna à Boubacar de conduire les chèvres au pâturage. Un jour qu‟il

conduisait ses bêtes, il vit venir à lui une autruche qui, de ses ailes, le frappa sur le visage.

Ayant très mal aux yeux, il courut jusqu‟au village où il entra dans leur concession. Son

père alla le rejoindre à l‟intérieur de la maison et lui demanda ce qui n‟allait pas. L‟enfant

raconta à son père toute l‟histoire. Sambo se mit aussitôt à prier Dieu pour qu‟il rende la

vue à son enfant mais en vain. Boubou Hama rapporte les mots de désespoir de Boubacar

Louloudji en ces termes : « Ne continue pas de demander à Dieu de me rendre la vue. Je

vois dans le ciel, quelque chose que peut être tu ne vois pas » (Hama, 1969(a) : 29). Au

moment où cet incident arriva, Sambo avait 22 ans de règne et Boubacar n‟avait que 12

ans. Malgré son handicap, il resta un élève brillant car bien qu‟aveugle, il lisait tous les

livres que son père lui présentait. C‟est surtout cette intelligence exceptionnelle de cet

élève qui, malgré son infirmité savait lire et écrire qui poussa la population à croire à son

génie et à le considérer comme un faiseur de miracle. Il ya lieu de se poser la question :

Comment à une époque où il n‟y avait pas le braille, un aveugle parvenait – il à lire des

documents ?

Boubacar continua ses études et un jour, il demanda à son père le nom du village

créé par son grand père et exprima son désir d‟aller vivre sur le site. Quant il eut atteint

l‟âge de 17 ans, son père fit venir les habitants du village, les Zarma qui habitaient l‟ancien

site de Garouré et les informa du désir de son fils. Ils manifestèrent leur inquiétude car

selon eux l‟endroit est hanté. Mais malgré l‟inquiétude des Zarma, Sambo et les habitants

de Dârey quittèrent le village pour s‟installer à Garouré sur insistance de Boubacar

Louloudji. Beidi Boubacar rapporte :

97
« Arrivé sur les lieux, Boubacar dit aux zarma ceci: ‘’ comme l’ancien site du
village est hanté, nous allons nous installer devant à coté du baobab rouge. Les
zarmas et les peuls acceptèrent. Ils allèrent tous construire leurs cases près du
baobab rouge. Et ils nommèrent le village de Kotchirey. C’était là que vécut Alfa
Sambo pendant 14 ans jusqu’ à sa mort » (Hama Beidi, 2003 : 39).

b- La formation religieuse

Boubacar Louloudji est le fils d‟Alfa Sambo et de Korga. Dès le jeune âge, il entra

à l‟école coranique de son père avec les autres jeunes du village et ceux des villages

environnants. D‟après la tradition locale, il fut le „‟talibé’’, le plus brillant de l‟école de son

père. Très tôt, il devint dans le pays, très populaire à cause de son intelligence mais aussi

de ses ambitions politiques démesurées. Après l‟étude du Coran et de quelques hadiths, il

quitta son village natal pour approfondir son savoir notamment dans le Gobir. Selon Saka

Balogun, il fréquenta plusieurs écoles coraniques et aurait même eu des contacts avec

Shaykh Ousmane Dan Fodio lors de ses différents périples :

« Abu Bakr Luduje succed as a leader, inhering the growing influence and fame of
his family. Abu Bakr himself, before this time, had been moving from one place to
another, as a student, learning from his learned friends. It is probable he had made
some contacted with the Fulani malems of Gobir, including Uthman on possibly
studied under the during this period. When Abu Bakr settled at Birni Ngaure, his
political influence grow remarkably » (Saka, 1970 : 111).

Traduction : [Aboubacar Louloudji a réussi en tant que chef à rehausser l‟influence

grandissante et la célébrité de sa famille. Boubacar lui- même, avant cette période

voyageait d‟un endroit à un autre, étant jeune élève, pour apprendre auprès des aînés lettrés

musulmans. Il est probable qu‟il eut pris contact avec les ouléma peul du Gobir y compris

Ousmane sous lequel il aurait beaucoup appris pendant cette période. Quand Boubacar se

fut installé à Birni N‟Gaouré, son influence politique s‟était véritablement accrue]. C‟est

surtout avec le Jihad d‟Ousmane Dan Fodio que cet érudit va devenir un personnage

influent et va marquer d‟une manière durable l‟histoire de l‟Ouest du Niger en général et

du Dallol en particulier. C‟est un homme doué d‟une intelligence remarquable, ambitieux

98
et difficile de caractère. Ses ambitions démesurées vont malheureusement plonger le

Boboye dans la violence.

III- La dérive totalitaire de Boubacar Louloudji

1- Les démêlés entre l’homme et les Zarma : les causes du conflit

Le centre d‟études islamiques de Garouré est l‟un des plus importants centres de

l‟Ouest du Niger créé par Boubacar Louloudji : « Birni Ngaure become the most extensive

and powerful emirate, west of Gwandou. It was also the first to be established in zaberma

area. The founder of the emirate was a Fulani Malam, Abu Bakr Luduje » (Balogun, 1970:

110). Traduction : [Birni N‟Gaouré était devenu l‟émirat le plus vaste et le plus important à

l‟Ouest de Gwandou. Il était aussi le premier émirat en zone zarma. Le fondateur de

l‟émirat était un marabout peul, Abou Bakr Loudouji]. A la mort de Sambo, les Zarma déjà

témoins du comportement capricieux de son fils, n‟eurent pas confiance en Boubacar. Ils

quittèrent le village de Kotchirey : un groupe se dirigea à Karra, un autre à Karma et un

troisième à Tchérindji1. Il faut noter à ce niveau qu‟avant l‟avènement de Boubacar

Louloudji, ses parents s‟étaient comportés en véritable modibbo et n‟avaient d‟autres

occupations que l‟enseignement coranique. Ils jouissaient d‟une grande notoriété dans le

Dallol à cause de leurs comportements exemplaires comme le souligne Saka Balogun :

« The founder of the emirate was a fulani Malam, Abu Bakr Luduje. Before him; two

members of his family had been connected with the area and had acquired some influence

as malams among zabermawa» (Balogun, 1970 : 110). Traduction : [Le fondateur de

l‟émirat était un marabout peul, Boubacar Louloudji. Avant lui, deux membres de sa

famille, en tant que marabouts avaient de l‟influence parmi les Zarma].

1 - Tchérindji, village situé à 5 kilomètres au nord de la ville actuelle de Birni sur la route de Kiota. Ce
village tire son nom d‟une herbe qui pousse en abondance dans cette zone, le ‘’bourgou’’ (Echinochloa
stagnina).. En effet, les Zarma et les Peul donnent le nom de ‘’Tchérindji’’ à la botte de cette herbe. Et,
comme on trouve les bottes de cette herbe en quantité dans ce village, il prit alors le nom de Tchérindji.

99
Après la mort de son père Alfa Sambo, Boubacar quitta Kotchirey pour créer

Garouré, le Birni N‟Gaouré actuel. En tant qu‟alim, il ouvrit une école coranique et fit

construire une mosquée de vendredi. Cette école était fréquentée à la fois par les jeunes

peul et zarma (parmi ses élèves, il est important de souligner un nom, Daouda Bougaran,

qui sera plus tard à la tête de la coalition armée contre son ancien maître). Le Dallol connut

la paix pendant plusieurs années car Boubacar Louloudji jusque là se comportait en

véritable éducateur. Les Zarma le considéraient comme un saint. Mais, ce climat de paix

se détériora au début du XIXe siècle avec le déclenchement du Jihad par le Shaykh

Ousmane Dan Fodio. Ce qui entraîna des bouleversements politiques profonds dans le

Dallol. Ce mouvement religieux fera tâche d‟huile dans tout le Soudan central au XIXe

siècle. Et dans l‟Ouest du Niger, parmi les fondateurs des centres d‟études islamiques, c‟est

Boubacar Louloudji seul qui prit faits et causes pour ce mouvement. Il saisit l‟occasion

pour mener une véritable politique expansionniste dans le Dallol. Comme l‟avait souligné

Kimba Idrissa, il voulait transformer « une autorité morale en une sujétion politique »

(Idrissa, 1994 : 177). L‟autorité religieuse du Dallol sera ainsi érigée en un véritable

pouvoir politique oppresseur. Cette nouvelle donne politique va provoquer la colère des

Zarma de l‟Est, alliés du Kabi et de l‟Aréwa. L‟islam, qui devrait être le ciment de l‟unité

entre les deux principales communautés de cette zone, sera utilisé comme une arme par

l‟érudit pour asservir le groupe des sédentaires. Parlant du règne de celui- ci après

l‟avènement du Jihad, Soumana Harouna le considère comme « l’autorité la plus

étouffante que les sujets de Garure aient jamais connue » (Harouna, 1985 : 57).

C‟est un incident dramatique au bord d‟un puits entre un jeune sédentaire et un jeune

nomade de Karra, qui va servir de prétexte à Boubacar Louloudji pour lancer sa campagne

politique expansionniste dans le Dallol :

« Généralement dans le Dallol, quand un jeune se marie, il passe la journée chez


son ami. Les jeunes zarma quand ils reçoivent des jeunes mariés viennent chez les

100
peul chercher un mouton ou le vau d’une vache qu’ils vont égorger pour leur hôte.
C’est ainsi qu’un Zarma vint trouver un Peul au bord d’un puits et lui demanda de
lui donner une vache qu’il va égorger pour son hôte. Le jeune peul lui dit de
choisir au sein du troupeau et de tuer la vache qui lui plait sauf une (il s’agit d’une
vache Malle, très grasse, habbanaye1). Mais, le jeune zarma fit la sourde oreille et
tua la vache du peul. Ce dernier mécontent prit à son tour sa lance et tua le
Zarma »2.

Pour sauver sa vie, le Peul courut pour informer Boubacar Louloudji qui le cacha à

l‟intérieur de sa concession. Les Zarma poursuivirent ses pas jusqu‟à l‟entrée de la

concession de l‟érudit et dirent : « Nous poursuivons un gibier et il est rentré dans votre

concession. Il faut le faire sortir pour qu’il réponde de ses actes »3. Il les calma et leur

promit de régler le différend conformément à la shari‟a. La tradition locale et plusieurs

auteurs confirment cette version de Siddo Sayoma :

« It was a dispute between a zaberma young man and a fulani hardsman which
soon developped into a tribal warefare between the two ethnic groups of the
combatants. The dispute which arose over a cow led to the death of the zaberma
young man when the fulani herdman struck him with his spear. When a group of
zaberma failed in their attempt to track down the fulani killer, they accepted an
offer of arbitration made by Luludje and dispersed the zaberma were to be
deceived…..» (Balogun, 1970: 111).

Traduction : [C‟était une dispute entre un jeune zarma et un berger peul qui s‟était vite

transformée en conflit tribal entre les combattants des deux groupes ethniques de la région.

La dispute dont une vache était la cause avait abouti à la mort du jeune zarma quand le

jeune berger à l‟aide d‟une lance lui assena le coup fatal. Comme le groupe de jeunes

zarma n‟arrivait pas à trouver le peul assassin, ils acceptèrent une offre d‟arbitrage de la

part de Louloudji. Quand les jeunes zarma s‟étaient dispersés, ils avaient été trahis].

Il voudrait tendre un guet-apens aux Zarma en les calmant et en leur

demandant de retourner chez eux puis de revenir le lundi suivant pour que le différend soit

1- Habbanaye : c‟est une promesse de don que les Peul font généralement à des parents ou amis. Elle consiste
à prendre l‟engagement de donner le vau d‟une vache bien ciblée à un parent quand celle- ci mettra bas. Pour
les Peul, c‟est une parole d‟honneur qu‟un noble est tenu de respecter.
2 - Archives sonores de l‟IRSH : entretien avec Siddo Sayoma réalisé par Diouldé Laya le 23/04/1969.
3 - Archives sonores de l‟IRSH : entretien avec Siddo Sayoma réalisé par Diouldé Laya le 23/04/1969.

101
jugé conformément à la loi coranique dans la mosquée, en présence des parents des deux

protagonistes. Mais, c‟était juste une ruse pour les tromper car en réalité il voudrait gagner

du temps. En effet, avant le départ des sédentaires, il leur disait ceci : « Vous venez avec

tous les parents de la victime et l’agresseur aussi doit venir avec tous ses parents »1.

Après leur départ, il informa sa communauté de son intention d‟entreprendre le Jihad et

qu‟il commencera avec eux. Boubacar convoqua alors les Peul et leur demanda de venir en

grand nombre et bien armés, le lundi. Ils arrivèrent les premiers et se cachèrent dans la

mosquée avec leurs armes. Le lundi matin comme convenu, les membres de l‟autre

communauté vinrent en grand nombre (300 guerriers) devant la mosquée où chacun voulait

entrer avec ses armes. Le modibbo leur demanda de ne pas rentrer dans l‟édifice avec des

armes car selon lui, il est interdit d‟entrer dans la maison de Dieu, armé. Les sédentaires

qui ne se doutaient de rien et qui avaient confiance en lui avaient accepté de déposer les

armes. Entre-temps, les Peul bien armés étaient embusqués dans la mosquée. Selon Siddo

Sayoma : « Quand les Zarma désarmés rentrèrent dans la mosquée, les Peul surgirent

avec leurs armes, les ligotèrent et les massacrèrent, leurs cadavres furent jetés dans une

grotte non loin de Birni qui porte depuis ce jour, le nom amato2 »3 .

Ce carnage gratuit montre toute la cruauté de l‟homme. Non content d‟avoir massacré des

innocents musulmans car ils ont accepté volontairement de se soumettre à la sentence du

Saint- Livre, le Coran, Boubacar Louloudji décida à partir de ce jour d‟entreprendre une

véritable politique expansionniste à laquelle il attribua le nom de Jihad. Il devint alors

après ce carnage plus autoritaire à l‟égard de ce groupe. Ainsi, au nom de la lutte contre les

„‟infidèles‟‟, cette communauté sera victime d‟exactions les plus ignobles de la part d‟un

1 - Archives sonores de l‟IRSH : entretien avec Siddo Sayoma réalisé par Diouldé Laya le 23/04/1969.
2 - Amato : Nom d‟une grotte située à 1,5 km au sud de Garouré. Amato est un mot zarma qui signifie, „‟que
la grotte se remplisse‟‟.
3 - Archives sonores de l‟IRSH : entretien avec Siddo Sayoma réalisé par Diouldé Laya le 23 /04/1969.

102
leader religieux, censé la protéger. Mais comme le souligne Boubou Hama, la plupart des

acteurs du Jihad ont profité de ce mouvement religieux pour assouvir des fins politiques :

« On ne peut guère douter que le Cheikh ait été lui-même un homme très religieux
et qu’il prenait ses recommandations au sérieux. Pourtant, beaucoup de ses
partisans furent malheureusement de simples aventuriers et la religion leur servait
simplement à cacher leur soif de puissance. Quand venait le moment du pillage, ils
dépouillaient sans différence musulman et païen » (Hama, 1967 : 74).

Boubacar Louloudji fait malheureusement partie de cette catégorie de partisans

opportunistes car on ne peut pas mener des exactions sur des populations déjà converties à

l‟islam, au nom de cette religion. Même les populations du Dallol qui ne se sont pas

converties ne constituent pas une menace pour la religion de Mahomed. Seules des raisons

politiques peuvent justifier les actes aussi graves posés par un leader religieux.

Selon Hama Beidi Boubacar :

« Boubacar Loudoudji a pris goût au pouvoir, il voulait alors asservir les Zarma,
mais il n’avait pas de prétexte valable et leur nombre le faisait peur. En effet, les
Zarma sont trois fois plus nombreux que les Peul. Déclarer la guerre à une
communauté aussi nombreuse sans raison valable serait un acte suicidaire pour
cet alim. Et, le Jihad constitue le plus beau cadeau offert par Shaykh Ousmane
Dan Fodio au modibbo du Dallol. L’incident qui déboucha sur la mort du jeune
zarma est une belle occasion saisie par Boubacar Loudoudji pour réduire la
capacité de nuisance des Zarma. En massacrant 300 guerriers zarma et en jetant
leurs corps dans une grotte, il veut affecter psychologiquement cette communauté.
Il a minutieusement préparé la guerre, alors que les Zarma ne sont pas bien prêts à
faire la guerre. Profitant de l’impréparation de ce groupe et de l’effet de surprise,
Boubacar Loudoudji va conquérir plusieurs villages zarma au nom du Jihad disait-
il alors que les mobiles sont purement politiques »1.

Après le charnier d‟ „‟Amato‟‟, Boubacar informa officiellement en présence des Peul qu‟il

a pris la décision de déclarer la guerre aux Zarma. Cette nouvelle attitude de Boubacar

Louloudji va malheureusement plonger le Dallol dans la violence.

1- Entretien avec Hama Beidi Boubacar le 16/01/11 à Birni N‟Gaouré.

103
2- Le déroulement du conflit

Voulant imposer sa domination sur toute l‟étendue du Dallol, Boubacar

Louloudji va déclarer la guerre aux Zarma. Selon la tradition locale rapportée par Boubacar

Hama Beidi, ce sont les mauvais conseillers de l‟érudit qui sont à la base de la brouille

entre les sédentaires et le modibbo Dallol :

« Pendant 30 ans, le Dallol connut la paix. Après, Boubacar eut des mauvais
conseillers qui le brouillèrent avec les gens de son royaume. Ceux qui étaient en
désaccord avec lui furent vendus dans les pays étrangers. Boubacar et les siens
multiplièrent les exactions contre les Zarma pendant longtemps » (Hama Beidi,
2003 : 53).

Sans nier en bloc le rôle joué par les conseillers de Boubacar Louloudji dans la

détérioration du climat politique dans le Boboye, il faut surtout souligner que le modibbo

Dallol est une personnalité capricieuse, aux ambitions politiques démesurées. Les

différentes péripéties lors de son exil, nous donnent d‟amples informations sur la vraie

nature de l‟homme. Même hors de son pays, il n‟a pas cessé ses agissements contraires aux

principes de l‟islam.

Mettant en avant ses ambitions politiques, il va multiplier les exactions contre les

Zarma. Il donna l‟ordre à des jeunes peul d‟aller chercher un cheval rouge qui se trouvait à

Karra. Selon la tradition locale, tout celui qui monterait sur ce cheval pour entreprendre des

conquêtes deviendrait maître du Dallol. Selon cette même source, l‟érudit quoique aveugle

monta sur ce cheval, brûla le village de Karra puis ce fut successivement, et en 15 jours, le

tour des villages de Djodéli, Korankassa, Gorzoré, Guillaré, Alfabéri, Zouzou- Saney,

Bombéri… Il y a lieu à ce niveau de se poser des questions : comment un aveugle qui

même en marchant est tiré par un guide, peut- il monter avec tant d‟adresse sur un cheval

et brûlé en un temps record autant de villages ? Comment un alim qui a déclenché le Jihad

contre les „‟mauvais musulmans‟‟ peut- il croire à cette histoire de cheval rouge ? Il s‟agit

d‟une tentative d‟explication d‟une guerre dont les mobiles sont surtout politiques. Quand

104
les Zarma de Kiota lui demandèrent : « Pourquoi brûles- tu tant de villages »? Il leur

répondit ceci : « Il y a deux choses qui, quand elles viennent à manquer dans un pays, il

devient ingouvernable : le pouvoir et la religion ; et c’est par le feu qu’on les impose »1.

Mais selon la plupart de nos informateurs, le souverain est surtout intéressé par les terres

du Dallol, et a utilisé la religion comme prétexte pour mener une guerre d‟expansion :

« La cause principale du conflit, c’est le contrôle des terres du Boboye. On ne peut


pas à mon avis mener le Jihad contre des populations qui se sont converties et qui
font les cinq prières quotidiennes. Son règne fut un véritable calvaire pour les
populations zarma car il est trop capricieux. Il interdisait par exemple aux femmes
zarma de poser la marmite après la tombée du soleil car la fumée du feu le
dérange, disait- il. Bref, je ne peux pas vous raconter tous ses caprices mais
retenez seulement que la cause principale du conflit, c’est le foncier »2.

Après ses premières expéditions couronnées de succès, Boubacar Louloudji

craignant une éventuelle incursion de ses ennemis, jugea utile de fortifier sa ville de

Garouré. Il décida de la construction d‟un mur et, pour ce faire exigea la contribution des

populations du Dallol. Il répartit le travail entre les différentes communautés. Comme lors

de la construction de la mosquée, Boubacar fit appel aux gens de Kafi (Dosso) et c‟est

Farakoy, le dirigeant du village qui traça le plan du ‘’Birni’’ sur le sol. Boubacar divisa le

travail entre les différents villages. La construction de ce mur fut l‟occasion saisie par lui

pour torturer moralement les populations du Dallol, particulièrement les Zarma et les

Maouri. En effet, chaque soir, Boubacar se rendait sur le chantier pour constater lui- même

l‟évolution des travaux. Mais chaque fois qu‟il y arrivait, quelle que soit la qualité du

travail abattu, il disait toujours la même chose en fulfuldé: « ‘’Wodaï’, autrement dit ’’ce

n’est pas bon’’. Et, il obligeait les gens à recommencer le travail » (Hama, 1969(a) : 30).

Ce cynisme de Boubacar Louloudji dura 3 ans et, un jour, le groupe Maouri à l‟intérieur

duquel se trouve Bonkano Bamey, décida de mettre fin à ce comportement insupportable

de modibbo Dallol. Fidèle à ses habitudes, un soir, il se rendit sur le chantier et répéta le

1- Archives sonores de l‟IRSH : entretien avec Siddo Sayoma réalisé par Diouldé Laya le 23/04/69.
2 - Entretien avec Mayaki Bonkano le 13/09/11 à Tchérindji.

105
même refrain en fulfuldé : „‟Wodaï’’. Exaspéré par cette attitude de Boubacar Louloudji, le

chef Maouri rétorqua en ces termes : ‘’Wodi, Wodaï, Wodata’’ qui signifie : ‘’c’est bon’’,

‘’ce n’est pas bon’’, ‘’ ce ne serait jamais bon’’! (Hama, 1969(a) : 31). Et le chef ordonna

à tout son groupe d‟abandonner le travail. Ces mots courageux prononcés par Bonkano

Bamey firent une forte impression sur tous les autres travailleurs. Ces derniers qui

attendaient depuis fort longtemps la délivrance, cessèrent aussitôt le travail et regagnèrent

leurs villages. Ce fut, le début de la révolte des Maouri et des Zarma contre la dictature de

cet alim.

Outre la torture morale, il imposait de lourds tributs aux sédentaires. Il vendait même

des hommes libres comme esclaves et n‟hésitait pas à déposer tout souverain zarma qui ose

le défier. C‟est à cause de ce comportement contraire aux principes de l‟islam que « les

principautés de Doso, de Dancandu, de Damana, et Yéni saluèrent de vive voix le geste de

Bonkano. Elles assurèrent leur soutien indéfectible à l’audacieux » (Harouna, 1985 : 58).

La nouvelle coalition Zarma- Maouri était décidée à mettre fin à ce règne de terreur de

l‟érudit. Mais, elle voulait éviter tout désaccord avec les autorités de Gwandou. Pour

montrer sa bonne foi et son attachement à l‟islam, avant d‟engager la guerre, elle envoya

une délégation auprès d‟Abdoulaye Fodio pour l‟informer du comportement de Boubacar

Louloudji. Une attitude qu‟elle juge contraire aux prescriptions de l‟islam : persécutions

des musulmans, vente d‟hommes libres comme esclaves… : « Zabermawa and fulani

traditions on the rule of Luduje agree on the fact of the oppressive nature of the

administration. Many Zabermawa, Muslims and non- Muslims alike were captured and

sold into slavery » (Balogun, 1970 : 170). Traduction : [Les traditions zarma et peul à

propos du règne de Louloudji sont unanimes sur le caractère agressif de l‟administration.

Plusieurs Zarma musulmans et non musulmans ont été capturés et vendus comme

esclaves]. Il faut signaler à ce niveau que dès le début du Jihad, Shaykh Ousmane Dan

106
Fodio, ayant constaté les velléités expansionnistes de Boubacar Louloudji, le rappela à

l‟ordre : « J’ai appris ce que tu as fait. J’ai appris que tu as brûlé des villages. Désormais,

suivant la voie de la religion, tu dois d’abord proposer l’Islam aux gens. C’est seulement,

quand ils refuseront que tu pourras et devras leur faire la guerre » (Hama, 1969 (a) : 40).

IV- La prise de Garouré et l’exil de Boubacar Louloudji

1- La prise de Garouré

Malgré les conseils du Shaykh, dans les faits, il fit fi et se mit à persécuter des

peuples déjà convertis à l‟islam. C‟est pourquoi, la coalition a bon espoir que sa cause sera

entendue par les autorités religieuses de Gwandou. Après avoir reçu les représentants de la

coalition, Abdoulaye envoya une lettre à Boubacar pour lui demander de cesser de tels

comportements. Mais, celui-ci au mépris du respect de la hiérarchie continua à gouverner

le Dallol avec une main de fer. Les Zarma envoyèrent une seconde fois leurs représentants

à Gwandou pour se plaindre de son comportement. L‟Emir de cet Etat autorisa, Bougaran,

ancien élève de Boubacar et chef de la délégation qui a séjourné dans la capitale de

l‟émirat à combattre son maître car ses pratiques sont contraires à la religion. De retour,

celui- ci apporta la bonne nouvelle à ses partisans : Abdoulaye Dan Fodio nous autorise à

chasser Boubacar Louloudji du Dallol. Bougaran se retire à Gorou- Bankassam1 pour

préparer le combat. Informé par un de ses partisans qu‟une guerre se préparait contre lui,

Boubacar demanda de faire sortir les femmes et les enfants de Garouré et de les amener du

côté de Kafi2. Abdoulaye conseilla à Bougaran d‟engager les hostilités un jeudi matin. Et,

c‟est durant cette journée que l‟assaut fut donné contre le Birni du Lamido. Les Peul

essayèrent de résister à l‟assaut mais en vain :

1 - Gorou- Bankassam, village situé à une cinquante de kilomètres à l‟Est de Dosso ; le fondateur est un sudié
du nom de Bankassam. Ce dernier choisit un koris (Gorou en zarma) comme site pour le village qu‟il créa
d‟où le nom Gorou- Bankassam autrement dit, le koris de Bankassam.
2 - Kafi est un ancien centre d‟études islamiques. Ses autorités entretiennent des relations cordiales avec
celles du Dallol.

107
« Hamma Bugaraan, un descendant de Buyaki, établi à Nikki, entreprit de
rassembler les mécontents Zarma dont notamment Sorkoyzé, un prétendant évincé
de la chefferie de Kiota et Gani Koda, Zarmakoy de Doso. L’armée zarma prit
Garure qu’elle brûla et Bubakar Ludduji s’enfuit vers le Gwandu » (Gado, 1980 :
204).

Boubacar prit la fuite avec sa suite mais il sera poursuivi par les Zarma jusqu‟au pied d‟une

colline sur laquelle, il parvint à monter. Bougaran demanda à ses hommes de ne plus le

poursuivre et de lui laisser la vie sauve. Les Zarma ont chassé ainsi, Boubacar du

Dallol : « De 1808 à 1831, les zarma débarrassés de la domination des peul du Dallol

retrouvent leur indépendance » (Rothiot, 1984 : 60).

2- L’exil de Boubacar Louloudji

Après la chute de Garouré, commence la longue errance du souverain du Dallol hors

de son pays. Plusieurs péripéties vont le conduire dans diverses localités. Il se rendit avec

sa suite d‟abord dans le Sud du Dallol à Kouassi. Dans cette localité, il livra bataille contre

un redoutable guerrier, Gourou- Goungouno. Il le vainquit et le mit à mort. Il continua son

chemin vers Gwandou où il sera accueilli hors de la ville par Abdoulaye Fodio en

personne. Mais malgré l‟hospitalité dont il fut l‟objet, Boubacar ne remercia pas l‟émir, au

contraire, il lui fit part de son amertume car il le considère comme étant responsable de sa

déchéance :

« Tu as prié pour les Zarma pour que je sois chassé et pour que Birni N’Garure
devienne des ruines où seules les pintades pourront venir tranquillement pondre
leurs œufs ? Quant à moi, je ne souhaite pas la destruction de Gandou, seulement,
j’espère que les bûcherons de ce village, seront dorénavant accompagnés par des
cavaliers chaque fois qu’ils partiront chercher du bois » (Hama, 1969 (a) : 33).

D‟après la tradition locale Boubacar refusa l‟invitation d‟Abdoulaye qui, pourtant ordonna

à sa suite de l‟héberger dans la ville de Gwandou. Il se rendit à Fouda où il sera rejoint par

108
sa famille et une partie de ses sujets qui s‟étaient réfugiés à Kafi lors du siège de Garouré

par les Zarma.

La défaite n‟a pas apporté un changement qualitatif dans l‟attitude de Boubacar

Louloudji. Partout où il passe, il se comporte en étranger insupportable. C‟est ainsi

qu‟après Fouda, il s‟est rendu à Sokoto où il sera accueilli hors de la ville par Shaykh

Ousmane Dan Fodio en personne. Il l‟a hébergé dans sa ville. Mais très tôt, Boubacar va

devenir un hôte encombrant :

« Le lendemain, Ousmane fit beaucoup de cadeaux à Boubacar Loûdoûdji. Avec


tout cela Boubacar était devenu insupportable, car il avait ordonné à ses gens de
s’emparer des animaux qui y passeraient pour le marché et de les tuer. Ainsi ils
faisaient comme avait dit le maître. Les gens de Sokoto, malgré leur patience
partirent se plaindre chez Ousmane Dan Fodio. Celui-ci réunit tous les habitants
de Sokoto pour leur dire qu’il ferait partir son étranger. Au cours de la réunion, il
dit que Boubacar n’était pas un marabout mais un roi, et que le roi ne fait que
piller ses sujets. Après 3 mois, Ousmane Dan Fodio supplia Boubacar d’aller à
Wourno voir son fils Attiku. Ainsi Boubacar Loûdoûdji partit avec tout son monde.
Il demeura à Wourno pendant deux mois. Et là aussi, il recommença ce qu’il faisait
à Sokoto » (Hama Beidi, 2003 : 61-62).

A Wourno aussi, la population sera obligée de trouver une astuce pour le faire partir. De ce

village, il s‟est rendu successivement dans les localités suivantes : Dioguirma, Kaodié,

Nikki (dans le Borgou), Samsoro, Toura, … puis à Botou. Mais partout où il passe,

Boubacar s‟est montré insupportable et les populations ont dû trouver un stratagème pour

le faire partir (voir manuscrit en annexe).

A Botou, il sera bien accueilli par le souverain de cette localité, Niantiamiri Biga.

Avant son départ, le leader de cette ville, bien que fervent adepte de la religion

traditionnelle a donné ses trois (3) filles en aumône à Boubacar Louloudji qui a procédé au

partage :

« Lorsqu’il arriva à Botou, Boubacar reçut un accueil chaleureux de la part du


roi. Il vit avec ses gens à Botou pendant trois mois. Le roi de Botou donna ses trois
filles en aumône à Boubacar Loûloûdji. Ce dernier partagea les deux filles entre
Aboulhassane et Aboulwafa. Il prit lui- même la troisième fille, après avoir reçu, en
plus, des bœufs et des captifs » (Hama Beidi, 2003 : 67).

109
Selon la tradition locale, il est resté trois mois à Botou et deux ans à Malleyel. Il a quitté

ensuite Botou pour ce dernier village. C‟est dans cette localité qu‟il a appris qu‟Alfa

Mahamane Diobbo se trouve à Gaoudel et il est allé le rejoindre. Les deux ouléma sont

restés ensemble trois mois durant dans ce village. Puis, ils vont quitter Gaoudel pour

Larba.-Birno où Mahaman Diobbo a voulu rester mais les princes se sont opposés,

craignant son influence, d‟où cette fameuse chanson „‟Kolle1 –Larba-Birno ma Koli Alfaga

ga, zankay ma koli Talibey ga … 2„‟, littéralement cette expression signifie : „‟ Kolle de

Larba- Birno craint le maître et le suit de près et les enfants aussi craignent les‟‟ talibé’’ et

les suivent de près‟‟. Leçon bien apprise, les sages du village suivent de près les faits et

gestes du religieux et les enfants du village à leur tour surveillent les „‟talibé’’, parce que

l‟influence de l‟érudit dans la zone est telle que les princes ont eu peur de l‟héberger.

Après ce refus, les deux ouléma ont quitté Larba-Birno, ils ont transité par Kaporé, un

village de Bittinkodji avant d‟arriver à Neni-Goungou. Sur cette île très tôt, la nouvelle de

la présence de deux saints se propagea rapidement jusqu‟au Zarmaganda et sur toute la rive

droite du fleuve. Les populations de ces contrées vont affluer à Neni en y apportant des

biens aux saints. Mais là aussi, Boubacar Louloudji ne va pas tarder à décevoir ces

personnes animées de bonne volonté. Boubou Hama nous donne d‟amples informations

sur le mauvais comportement de cet érudit sur l‟île :

« Mais Boubacar, allant dans le sens de ses habitudes, se mit à tuer les bœufs et les
ânes qui transportaient tous ces biens à Neni. Quand les animaux venaient du
Zarmaganda, il les vendait sur la rive Gourma du fleuve et, quand ils provenaient
de cette rive du Niger, il les bazardait au Zarmaganda. Les gens finirent par se
méfier de l’île de Neni et de Boubacar Loudoudji. Ils n’allèrent plus le voir. Quand
ils le pouvaient, ils allaient rendre visite à Alfa Mahamane Diobbo. Celui-ci leur
disait toujours :
- Allez apporter vos présents au marabout du Dallol, Boubacar Loudoudji.
A cette invitation, les gens répondirent :
- Nous ne pouvons pas apporter nos présents au méchant marabout du Dallol »
(Hama, 1969(a) : 54).

1 -Kolle est le nom du guerrier de Larba qui est farouchement opposé à l‟installation de Mahaman Diobbo
dans son village.
2 - Entretien avec Alzouma Bazi Cissé à Niamey le 11/11/07.

110
Ce passage de Boubou Hama montre bien à suffisance l‟ingratitude du modibbo Dallol.

En effet, malgré l‟hospitalité dont il fut l‟objet de la part des populations de Neni et de ses

environs, Boubacar Louloudji refusa de mettre fin à ses caprices. C‟est ainsi qu‟il s‟en prit

aux biens des populations qui avaient pourtant accepté volontairement de venir en aide à

des hommes de Dieu. A notre niveau, ce comportement nous pousse à nous poser un

certain nombre de questions : Est- ce sa cécité précoce qui le pousse à être aussi méchant ?

Ou ses ambitions politiques démesurées ?

Le comportement de Boubacar et la brouille entre Alfa Mahaman Diobbo et les Peul de

Bittinkodji, poussèrent les deux saints à quitter Neni pour Goudel. Dans ce village,

Mahamane Diobbo fut bien accueilli par la population locale. Après avoir séjourné à

Goudel, les deux ouléma et leurs suites quittèrent cette localité pour Say. Boubacar

Louloudji resta à Say deux ans durant. Entre- temps, la paix semble revenue dans le Dallol.

Il exprima son désir de retourner vivre sur sa terre natale. Il demanda à Mahaman Diobbo

d‟intercéder auprès des Zarma pour que ces derniers le laissent revenir dans son pays et

promit de se tenir tranquille. Ce qui rassura cette communauté qui par respect pour l‟érudit,

autorisa son retour dans le Dallol. Mais avant de quitter, il promit à Mahamane Diobbo

qu‟il viendrait faire la prière chaque vendredi à Say. Boubacar Loudoudji quitta ainsi la

cité religieuse pour Tondifou1 à la périphérie du Dallol. Il séjourna quatre ans durant dans

ce village où il fora un puits. Si nous tenons compte de la date de la création de la cité de

Mahamane Diobbo (1825), Boubacar serait arrivé à Tondifou vers fin 1827 et le début de

18282. Et comme il l‟avait promis, il venait chaque vendredi faire sa prière à Say. Un jour,

il invita Mahamane Diobbo à visiter le Dallol, le pays d‟où il fut chassé. L‟érudit trouva le

site très intéressant et encouragea Boubacar à regagner en paix sur sa terre natale.

1 - Tondifou, village du canton de Kirtachi situà 79 kilomètres de Birni N‟Gaouré.


2 - En effet, selon la tradition et les recoupements que nous avons eu à faire, Say serait fondé vers 1825. Et,
Boubacar Louloudji vécut deux ans durant à Say avant d‟aller à Tondifou. On peut donc situer de départ
pour Tondifou vers la fin de 1827 et le début de 1828.

111
Grâce à la médiation de Mahaman Diobbo, religieux bien connu et très respecté

dans tout l‟Ouest du Niger, Boubacar Louloudji et les siens avaient été réinstallés dans le

Dallol. L‟érudit de Say avait accompagné Boubacar dans son pays natal. Il fonda ainsi

une nouvelle capitale, Tamkalla vers 1832-1833. Par rapport à l‟origine de ce nom,

Boubacar Hama Beidi donne la version suivante :

« Lorsqu’ils atteignirent la falaise occidentale du Dallol, Boubacar Loûdoûdji


demanda de descendre les bagages. Il dit à son ami Alfa Mahamane Diobbo de
regarder le Dallol. Celui- ci trouva ce pays très beau et l’admira. Ensuite
Boubacar Loûdoûdji lui dit :’’tu vois, c’est de l’eau qui ne tue pas, ne noie pas. Ce
n’est pas comme l’eau du fleuve’’. Après, Mahamane Diobbo dit à son
ami :’’Pourquoi ne veux-tu pas aller à Birnin Garouré ? Il lui répondit :’’C’est ici
tami-kala, j’ai tout enroulé. C’est le centre de la dîna tandis que Birnin Garouré,
c’est la royauté dont le feu ne s’éteindra jamais’’ » (Hama Beidi, 2003 : 73).

Pour montrer sa bonne foi, il envoya une lettre pour s‟excuser auprès de

Mohamed Bello et d‟Abdoulaye Fodio. Il leur assura de sa volonté de vivre désormais dans

le Dallol en paix. Convaincu cette fois-ci de la sincérité de Boubacar, Abdoulaye envoya

un médiateur, son fils Mohamed, pour réconcilier les Zarma et les Peul. Mais, avant son

arrivée, les Zarma paniqués par ce retour inattendu de Boubacar Louloudji avaient déjà

préparé la guerre. C‟est à Kiota, que Mohamed Abdoulaye va livrer bataille contre la

coalition zarma qui sera vaincue. Au cours de ce combat, Bougaran sera tué. Après cette

victoire, le Dallol connut de nouveau la paix. Boubacar vécut sept mois durant à Tamkalla

avant de rendre l‟âme au cours de l‟année 1832-1833. Mais avant de mourir, il prit soin de

désigner son successeur afin d‟éviter les querelles de succession qui sont en général à la

base du déclin des Etats. Pour éviter d‟éventuelles contestations, il procéda à un tirage au

sort. Boubacar Hama Beidi nous donne plus de détails sur ce mode de scrutin :

« Un jour Boubacar, sentant sa mort prochaine appela ses 15 fils adultes capables
de prétendre au trône de Tamkalla : ‘’ Je ne vous laisserai pas dans l’embarras
après ma mort, je vous ferai un tirage au sort’’. Il inscrit sur 15 bouts de papiers
les professions auxquelles pouvaient prétendre ses fils : chefferie, marabout,
berger, cultivateur, guerrier… Il mit les papiers dans un panier avec une
ouverture juste pour une main. Il agita le panier pour bien mélanger les papiers.

112
Ensuite, il invita chacun à y introduire sa main et à prendre un seul papier. Chacun
en prenait un, le regardait, puis le mettait dans sa poche. Boubacar Loudoudji
invita chacun à lire son bout de papier. Ensuite, il dit à ses enfants : ‘’ Le tout
puissant a donné à Aboulhassane la chefferie, à Aboulwafa1 le titre d’Imam. Que
chacun se contente de ce dont Dieu lui a donné et reconnaisse sa place dans sa
famille’’ » (Hama Beidi, 2003 : 81).

Quelques jours après, Boubacar rendit l‟âme à Tamkalla suite à une piqûre d‟un scorpion :

« Boubacar vécut sept mois à Tamkalla et rendit l’âme suite à la piqûre d’un scorpion »

(Hama, 1969 (a) : 67).

V- L’œuvre religieuse de Boubacar Louloudji : la création des centres

d’études secondaires

La tentative de Boubacar Louloudji de mener une guerre d‟expansion a

malheureusement plongé le Dallol dans la violence. Cette agression va creuser le fossé

entre celui- ci et les Zarma. Ces derniers hésitent à envoyer leurs enfants à l‟école d‟un

maître „‟méchant‟‟. Malgré ce contexte de crise, Boubacar initia la création des centres

d‟études islamiques secondaires dans le Boboye.

1- Le centre d’études islamiques secondaire de Birniyel de Mamadi Diobbo (1823-

1837)

Comme son père Sambo et son grand père Ali Anna, Boubacar ouvrit une école

coranique fréquentée à la fois par des jeunes peul et des jeunes zarma parmi lesquels,

Bougaran qui conduisit la coalition qui le chassa du pouvoir. En dehors de son école, il

installa des modibbo un peu partout dans le Boboye afin que ces derniers l‟aident à

1 - Selon la tradition locale, Aboulhassane et Aboulwafa sont nés la même nuit de mères différentes.
Aboulwafa naquit vers 9h du soir et Aboulhassane ne vint au monde que bien plus tard, le matin de bonne
heure, presque à l‟heure de la prière. Mais, ce sont les parents d‟Adama Kouré, la mère d‟Aboulhassane qui
vinrent annoncer les premiers la naissance de celui-ci. Boubacar décida de nommer l‟enfant Aboulhassane.
On vint ensuite, après la prière du matin, lui annoncer la naissance du fils de sa femme Dioko. On lui dit
même que l‟enfant naquit dès le début de la nuit, vers 9h du soir. Mais, sa bénédiction était déjà allée au fils
de sa femme Adama Kouré, né bien après celui de Dioko. L‟enfant de celle-ci fut appelé Aboulwafa. La
tradition lie la chance d‟Aboulhassane à cette bénédiction.

113
propager l‟islam dans cette zone. Parmi ceux- ci, l‟un des plus célèbres reste

incontestablement Mamadi Diobbo, fondateur de la cité religieuse de Birniyel1. C‟est un

lettré musulman venu de Tendirma (Macina). Il appartient à la famille des Peul Silloubé2.

Il voulait effectuer un pèlerinage à la Mecque mais arrivé dans le Boboye au début de

l‟année 1833, la fatigue et le poids de l‟âge (62 ans) l‟obligèrent à renoncer à son projet. Il

fit alors escale à Tamkalla où il fut bien accueilli par Boubacar Louloudji. Ce dernier

apprécia les hautes qualités intellectuelles de son hôte et lui demanda de rester pour l‟aider

dans la Diina :

« Boubacar Louloudji indiqua un site non loin de Tamkalla sur lequel Mamadi
Diobbo et sa suite s’installèrent. C’est ainsi que Mamadi fonda la cité religieuse de
Birniyel. Il ouvrit une école coranique que fréquentaient ses enfants et ceux des
villages environnants. Parmi ses enfants le plus brillant reste indubitablement
Toukour Mamadi. Après la mort de cet érudit en 1837, c’est le grand frère de
Toukour, Sidikou qui prit le pouvoir. Sidikou Mamadi (1837- 1866), succéda à son
père en 1837 et poursuivit son œuvre. Mais c’est surtout avec Toukour Mamadi
(1866- 1901) que l’on assista à une intense activité religieuse à Birniyel avec
l’ouverture de plusieurs écoles coraniques dans le village »3.

Selon la tradition locale, il y avait une véritable ferveur religieuse dans le village surtout

sous le règne de Toukour Mamadi. Mais avec la chute de Tamkalla, le village avait

disparu car les populations s‟étaient dispersées :

« Une bonne partie s’était réfugiée dans le Sourguey c'est-à-dire l’Imanan. Après
le retour de la paix, la population de Birniyel avec Mamadi Toukour à leur tête
revint occuper le site de leur ancien village. De la fondation du centre jusqu’en
1901, c’était la Qadriya qui était en vogue dans ce village et ses environs. La
Tidjaniya sera introduite à Birniyel sous le règne d’Ibrahim Sidikou (1901- 1946).
Le Shaykh Hanafi de Fandou Bali- Bali par exemple fit ses études coraniques dans
ce centre »4.

1- Birniyel : village situé à quelques 15 kilomètres de Margou. Birniyel signifie en peul, petite forteresse.
Birniyel et Dionkoto étaient en fait deux sites défensifs créés par les autorités de Garouré pour surveiller et
contrecarrer les mouvements des cavaliers du Kabi.

2- Les Silloubé sont des Sarakollés d‟origine.


3 - Entretien avec Ismaila Amadou paysan à Birniyel le 09/10/2011.
4 - Entretien avec Oumarou Amadou imam de la mosquée de Birniyel le 09/10/2011.

114
2- Le centre de Garbou1

Le village fut créé vers 1833 par Ali Tchanga, un peul originaire de Famaké

(Macina). Il appartient à la famille des Peul Sidibé. Ali Tchanga y était venu avec sa

famille et quelques lettrés musulmans. Contrairement à la plupart des Peul qui avaient pour

activité principale l‟élevage, il s‟est singularisé par la pratique de la chasse. De sa

fondation jusqu‟à la période coloniale, Garbou avait toujours fourni aux Lamido du

Boboye, les meilleurs archers de la zone. Ce village et Dionkoto étaient des forteresses

construites sur la voie qu‟emprunte généralement l‟armée du Kabi pour attaquer le Boboye.

C‟étaient des sites défensifs qui servaient en même temps de remparts. Depuis la chute de

Garouré, les Lamido du Boboye et leurs successeurs ne vivaient plus au même endroit, afin

d‟éviter le problème de relève car en cas d‟attaque si le Lamido et son Yerima étaient tués,

il y aurait une période de flottement du pouvoir aux conséquences incalculables. Le yerima

est le remplaçant du souverain en cas d‟absence. Il est aussi l‟héritier du trône en cas de

décès du souverain : « Il jouit du pouvoir de donner des ordres à tous les dignitaires au

nom du chef » (Beidi Hama, 2003 : 173). C‟est ainsi qu‟Aboulhassane installa,

Aboulwafa, le futur héritier du trône de Tamkalla à Garbou. Il ouvrit une école dans ce

village et enseignait les enfants de ce village et ceux des villages environnants. Jusqu‟au

règne de Lamido Soumana, les yerima du trône du Boboye avaient toujours été installés à

Garbou. Ainsi, les souverains Aboulwafa, Sita et Soumana avaient comme yerima,

Bayéro, Beidi et Sita. Et tous ces suppléants avaient résidé à Garbou. C‟est Soumana qui

mit fin à cette pratique en envoyant son remplaçant à Falmey. Selon Garba Zoumari :

« De sa création à nos jours, dix chefs se sont succédé sur le trône de Garbou, il
s’agit de : Ali Tchanga (1833- 1865), Hama Foulan (1865- 1897), Amadou Ali
(1897- 1915), Boubacar Bouro (8 mois), Baaba Wala (1915- 1954), Sambo Hama
(1954- 1972), Boubé Zika, Salou Sambo, Manou Salou, Amadou Salou et Garba
Salou depuis 1980 »2.

1 - Garbou, c‟est le nom du village d‟origine de son fondateur, Ali Tchanga.


2 -Entretien avec Garba Zoumari paysan à Garbou le 09/10/2011.

115
3–Le centre de Boumba1

A la différence des deux autres villages, Boumba n‟est pas fondé par

un Peul. C‟est un village fondé par un Goubé nommé Bilan. Son père, Kada, venu de

Loga séjourna à Gobéri, à Tiguey puis à Patchiga où il mourut :

« Après la mort de Kada, son fils Bilan quitta Patchiga et vint fonder
Boumba. Après la mort de Bilan Kada, c’est Souley Kada qui accéda au
pouvoir puis ce fut le tour de Sidikou Kada, Guittizé- Baaba, Bonkano
Souley, Sidikou Souley, Koukou Bilan, Yayé Koda Souley, Seyni Sidikou,
Adamou Seyni, Adamou Sidikou, Abdoulaye Moumouni (souverain
actuel) »2.

Il faut souligner ici que Kada fut un grand alim. Il fit ses études coraniques au Macina. Il

avait ouvert une école coranique à Boumba fréquentée par les enfants de ce village et ceux

des villages environnants :

« Tous les souverains qui se sont succédé sur le trône de Boumba, de sa création
jusqu’aujourd’hui sont des lettrés musulmans à l’exception de Yayé Souley Koda.
Ce dernier n’a étudié que la moitié du Coran avant d’être enrôlé comme tirailleur
parmi les troupes françaises à la guerre de 1914- 1918. Il n’a donc pas eu la
chance de poursuivre ses études coraniques »3.

Selon la tradition locale, le village est resté jusqu‟à nos jours un centre d‟études

islamiques disposant de plusieurs douddales : « A l’époque chaque quartier disposait d’un

douddale et Boumba était l’un des rares villages disposant d’un Coran écrit à la main

offert par les autorités de Gwandou. Mais, l’installation de l’administration française a

ralenti l’activité religieuse dans ce village »4. Selon les dignitaires de ce village, le Coran

dont il est question est actuellement disponible dans les archives de la cour. Nous n‟avons

1 - Boumba : Il y a deux versions sur la signification de Boumba. Selon la première, Boumba tire son nom
d‟une plante épineuse appelée Goumbi (Acacia ataxacantha) en Zarma qui était très abondante sur le site,
donc Boumba tire son nom de la déformation de Goumbi. Selon la deuxième version, après la création du
village, il y eut une grande famine qui décima tout le troupeau du village. Et les gens se plaignaient de cette
situation en disant en zarma : « wa si no kala day gumba. » autrement dit : « il n‟y a pas de lait, il ne reste
que la boule sans lait. » d‟où l‟origine de Boumba.
2 - Entretien avec Abdou Saley paysan à Boumba le 09/10/2011.
3 - Entretien avec Idrissa Daouda paysan à Boumba le 09/10/2011.
4 - Entretien avec Djibrilla Omar imam de la grande mosquée de Boumba le le 09/10/2011.

116
malheureusement pas eu la chance de le voir et de le filmer car le Gardien détenant les clés

de la chambre dans laquelle se trouve le document est absent lors de notre séjour dans le

village.

Boubacar Louloudji est un personnage controversé qui a marqué de façon

durable, l‟histoire du Dallol Bosso. Petit fils d‟Ali Anna, il a réussi au début comme ses

parents à réunir autour de lui les enfants issus des deux importantes communautés (zarma

et peul) du Dallol. Mais avec le déclenchement du Jihad, Boubacar „‟changea de fusil

d‟épaule‟‟ et se mit au nom de ce mouvement religieux à agresser des villages zarma. Ce

comportement d‟un leader religieux contraire aux principes de l‟islam va pousser cette

communauté à la révolte : c‟est le début des violences dans le Dallol. Ses successeurs ont-

ils réussi à ramener une paix durable dans cette vallée fertile ?

117
Photo no 1 : La tombe de Boubacar Louloudji à Tamkalla

Photo prise à Tamkalla le 08/09/2011

118
Chapitre V : L’œuvre d’Aboulhassane, fils et successeur de Boubacar Louloudji

Après la mort de Boubacar Louloudji et les violences connues sous son règne,

l‟espoir était permis de croire à une accalmie dans le Dallol. Mais, ses successeurs

assoiffés de pouvoir allaient commettre les mêmes erreurs que lui, plongeant ainsi cette

zone dans un cycle infernal de violences.

I- Le règne d’Aboulhassane (1833- 1866)

Il est le successeur de son père. Comme ce dernier, il a eu un début de règne paisible

mais la fin de son régime sera caractérisée par la reprise des hostilités dans le Boboye.

1- Le choix de l’homme

Après la mort de Boubacar Louloudji, son fils, Aboulhassane désigné comme

successeur par son père suite à un tirage au sort, le remplaça. Il s‟empressa d‟informer les

autorités de Gwandou de sa prise du pouvoir. Abdoulaye l‟invita chez lui, Aboulhassane

raconta toute la procédure à l‟émir qui fut rassuré. Après le départ de son hôte, il informa

amir al moumine de Sokoto (le commandeur des croyants), Mohamed Bello qui, à son

tour, envoya des émissaires auprès de l‟émir de Gwandou, Abdoulaye pour lui dire ceci :

« Ousmane Dan Fodio1 nous charge de te dire de conseiller Abulhasane dans le


sens de la modération. Il nous charge de dire d’aller toi-même à Tamkalla et d’y
réunir peul et zarma pour les conseiller de s’entendre comme les enfants d’un
même père et d’une même mère dans la foi de l’islam, et d’avoir, le plus tôt
possible, à cesser entre eux des guerres inutiles et sanglantes » (Hama, 1969(a) :
70).

Après avoir lu la lettre de Mohamed Bello, Abdoulaye se rendit à Tamkalla où il réunit les

deux communautés. Les Zarma acceptèrent de s‟entendre avec les Peul au nom de l‟islam,

1 - Il s‟agit plutôt de Mohamed Bello car Ousmane Dan Fodio est décédé bien avant l‟accession
d‟Aboulhassane au pouvoir.

119
leur religion commune. Avant de quitter le Dallol, il demanda aux populations de

construire un „‟Birni’’ pour protéger la ville contre les assauts éventuels des ennemis. Il

traça lui-même le plan du mur d‟enceinte de la ville et consacra Aboulhassane

„‟Lamido’’(ce titre est plus politique que religieux). Il lui délimita son territoire (bordure

Est du Dallol- Maouri du côté de Gwandou, Sansané- Haoussa à l‟Ouest, Tounfalis au

nord et Tanda du côté du Dendi) et lui dit ceci avant de retourner à Gwandou :

« Lamido- zarma, Aboulhassane, la paix est là, devant toi. Si tu commandes avec
sagesse ou tu gouvernes mal, sache que chacun de tes gestes est pesé par Dieu
devant lequel tu es responsable de toi- même et de tout un pays. Quand tes sujets
viennent te voir, rends-leur la justice, suivant la loi du Coran, selon les coutumes
islamiques. S’ils sont assez nombreux et qu’ils en manifestent le désir, donnez-leur
le chef de leur choix. Si parmi les villages qui dépendent de ton état certains
arrivent à la désunion entre eux ou à la révolte contre toi, ne leur fais pas la guerre
avant de me prévenir » (Hama, 1964-1969 : 71).

Il faut noter à ce niveau que Boubacar Louloudji est le premier à porter ce titre

de Lamido- zarma. Son père, Sambo et son grand père, Ali Anna ne se sont pas intéressés

au pouvoir temporel. Ils ont vécu comme des leaders religieux. Ils ont œuvré surtout pour

la propagation de l‟islam dans la zone. C‟est Boubacar Louloudji avec ses ambitions

politiques démesurées qui va chercher à se faire introniser Lamido- zarma. Ce changement

de titre est intervenu après la construction du „‟Birni‟‟ de Garouré :

« Quand l’enceinte fut achevée, Boubakar écrivit à Ousmane Dan Fodio pour lui
dire qu’il s’était réconcilié avec les gens du Boboye. Ceux- ci dit –il, répondirent
nombreux à mon appel. Ils accoururent à Garouré où ils construisirent une
enceinte pour protéger la ville. Ousman Dan Fodio envoya, à la suite de la lettre
de Boubakar, des émissaires pour le couronner ‘’Lamido- zarma’’ » (Hama, 1969
(a) : 41).

Lamido- zarma signifie, souverain du Zarma en peul. Bien que peul, il porte ce titre car il

se trouve à la tête d‟une zone peuplée majoritairement par des Zarma. En plus, il

ambitionne d‟étendre son pouvoir hégémonique sur cette communauté. Après la mort de

Boubacar Louloudji, son fils Aboulhassane s‟est rendu aussi à Gwandou pour chercher le

120
soutien d‟Abdoulaye afin qu‟il soit nommé „‟Lamido- zarma’’. C‟est ce qui justifie le

déplacement de l‟émir de Gwandou dans le Boboye. Après ses sages conseils, Abdoulaye

est retourné à Gwandou avec l‟espoir que le Dallol connaîtra désormais la paix. La

présence massive des Zarma au cours de cette réunion prouve si besoin est, qu‟ils

entretiennent des relations cordiales avec les autorités de Gwandou. En atteste, le voyage

de Bougaran dans cet Etat pour informer les autorités du comportement déviationniste de

Lamido et l‟avis favorable qu‟il reçut pour chasser Boubacar Louloudji du Dallol.

Les Zarma étaient restés des années durant tranquilles jusqu‟au moment où

Aboulhassane adopta un comportement dictatorial et commença à opprimer ses sujets. La

paix dans le Dallol dépend en réalité du comportement des érudits placés à la tête du centre

d‟études islamiques du Boboye. Si ces religieux avaient des problèmes avec une partie de

leurs sujets, c‟est parce qu‟ils avaient oublié qu‟ils étaient avant tout des porteurs du

message divin. Et en tant que tels, ils devaient être des Lamido justes et équitables. Ils

s‟étaient malheureusement laissés influencer par leur entourage et s‟étaient comportés

comme des tyrans au milieu d‟une communauté composée majoritairement par des gens

plus ou moins avertis sur les questions religieuses. Ce sont ces comportements des

souverains contraires à la religion de l‟islam qui étaient à la base de leurs démêlés avec les

Zarma de l‟Est. En effet, les seuls moments d‟accalmie étaient ceux au cours desquels les

Lamido Dallol ne s‟étaient pas écartés des principes religieux et s‟étaient adonnés

pacifiquement à la diffusion du savoir religieux dans leur zone.

2-La reprise des hostilités dans le Dallol

Après le départ d‟Abdoulaye, la paix fut de courte durée dans le Dallol car deux (2)

ans plus tard, une crise éclata. En effet, la population du village de Bengou, dans le Dendi

refusa de payer l‟impôt : le „‟koumsou’’. Aboulhassane, conformément aux conseils

121
d‟Abdoulaye Fodio, ne livra pas directement bataille à ce village. Il envoya d‟abord un

message aux gens de Bengou, pour les convaincre de payer l‟impôt mais ceux- ci

refusèrent. Il informa aussitôt Abdoulaye qui l‟assura de son soutien et lui donna rendez-

vous à Dioundou :

« Le Lamido Zarma envoya une lettre pour mettre au courant Abdoulaye Dan
Fodio qui lui répondit de le rejoindre à Dioundou. Ils s’y rencontrèrent, chacun
avec sa troupe, pour donner une correction aux habitants de Bengou. C’était un
jeudi soir. Ils passèrent la nuit à Dioundou. Le vendredi après la prière, ils
montèrent sur leurs chevaux et se dirigèrent vers Bengou. Les habitants de Bengou,
ayant appris leur arrivée à Dioundou, quittèrent leur village. Le Sultan de Gandou
et le Lamido Zarma trouvèrent un village vide, aucune âme n’y vivait. Ils apprirent
que tous les guerriers s’étaient réunis à Tanda. Et ils se dirigèrent vers Tanda (…).
Un combat très violent s’engagea entre les Peuls et les Zarmas. Ces derniers,
acculés par leurs ennemis au fleuve, firent appel à leurs frères de Karimama qui
les firent traverser le fleuve. Ainsi ils se mirent sur la rive droite. Les Peuls mirent
le feu au village de Tanda. A la poursuite des Zarmas, ils longèrent le fleuve
jusqu’à Kouassi où ils s’arrêtèrent » (Hama Beidi, 2003 : 89 - 90).

Après cette bataille, Abdoulaye retourna à Gwandou et mourut peu de temps après.

Aboulhassane envoya une lettre de condoléances à sa famille. Il fut remplacé à la tête de

Gwandou par son fils Mohamed. Dans le Dallol, la paix semble revenir mais pour

quelques années. En effet, un Peul maltraité à Botou et désireux de se venger, vint après

avoir retrouvé la liberté trouver Aboulhassane. Il lui fit comprendre (en exagérant les faits

bien sûr) que les Gourmantché sont les pires ennemis de l‟islam car pratiquant le „’Shirk1

de façon cruelle. Il lui décrit les pratiques occultes des populations de Botou : « J’ai vu là

où, vraiment, on est infidèle ! Cet endroit, ce village, c’est Botu. Dans ce village, les

habitants ont emmuré vivant, un homme dans une statue en banco et c’est derrière le

‘’tooru2’’, qu’ils font leurs prières » (Hama, 1964-1969 : 78). Irrité par ces propos du Peul,

Aboulhassane chercha à vérifier les faits. Il écrivit à Boubacar Alfa Mahaman Diobbo pour

lui demander son avis sur ces pratiques ancestrales qui avaient cours à Botou. Boubacar

répondit à Aboulhassane en ces termes : « Je ne sais pas beaucoup de choses sur le chef de

1 - Shirk : Associationnisme c'est-à-dire le mélange des croyances ancestrales et de l‟islam.


2 . Tooru : C‟est une divinité de la religion traditionnelle.

122
Botou. Je sais qu’il est très généreux et qu’il donne et fait l’aumône aux musulmans. Mais

seulement, je sais qu’il ne fait pas la prière, qu’il n’est pas musulman » (Hama, 1964-

1969 : 78).

Mais, le Peul maltraité, la rage au cœur et non content de cette réponse de

Boubacar Alfa Mahaman Diobbo, se rendit lui-même à Gwandou pour raconter l‟histoire à

Mohamed Abdoulaye. Ce dernier se rendit aussitôt à Tamkalla et demanda à Aboulhassane

de le suivre pour qu‟ils aillent ensemble mener la guerre sainte contre le village de Botou.

Arrivés à Diongoré, non loin de Say, les deux hommes firent appel à Boubacar Alfa

Mahamane Diobbo. Ce dernier, se conformant à la philosophie politique de son père (la

non violence), leur répondit en ces termes : « Vous allez livrer combat à un homme qui

n’est pas musulman certes, mais qui leur donne et qui leur fait sans cesse l’aumône,

beaucoup de bien » (Hama, 1964- 1969 : 80). Même Aboulhasane ne voulait du tout pas de

cette guerre :

« Aboulhassane allait à cette guerre à contrecœur, il avait épousé une des sœurs du
chef de Botou. De Diogoré les troupes de Gandou et de Tamkala se dirigèrent
Botou. Le combat s’engagea. Comme les gens de Tamkala allèrent mollement dans
cette ville, le gros du travail fut laissé aux troupes du Gandou. Les Gourmantchés
résistèrent héroïquement, les Peuls se replièrent sur Kirtachi » (Hama Beidi, 2003 :
99).

Il faut souligner à ce niveau que la plainte du Peul n‟est que la goutte d‟eau qui a fait

déborder le vase. La communauté gourmantché est restée fermement attachée à ses

croyances ancestrales et a refusé de se laisser pénétrer par l‟islam. Ce refus de se convertir

à la religion de Mohamed, irritent les autorités de Gwandou qui cherchent le moindre

prétexte pour livrer bataille contre cette communauté. La plainte du Peul est une belle

occasion offerte à Mohamed Abdoulaye.

Ce fut un échec pour la coalition. Après ce fiasco, Mohamed Abdoulaye retourna à

Gwandou et Aboulhassane regagna Tamkalla. La paix continua de régner dans le Boboye

123
car les dirigeants des régions exerçaient leurs fonctions conformément à leurs prérogatives.

Seules les affaires litigieuses les plus graves qu‟ils n‟avaient pas pu trancher étaient

transmises au ‘’ Lamido’’ du Dallol. Si ce dernier n‟arrivait pas à son tour à trancher, il

transmettait le litige au sultan de Gwandou qui tranchait en dernier ressort. Le Boboye

connut ainsi la paix et les populations vaquèrent normalement à leurs occupations. Mais,

un incident grave intervenu dans le Zigi fit monter la tension. En effet, un chef zarma

Seyni Kâdi commit l‟adultère dans le village de Gassé- Béri. L‟affaire fut portée devant

Aboulhassane qui trancha :

« Voyez d’après la loi du Coran, l’acte que vient d’accomplir Seyni Kâdi mérite la
mort. Maintenant qu’il encoure cette peine, par mesure de clémence, je vais le
déporter de son village. Je vais l’assigner en résidence forcée dans un autre coin
de mon royaume ; ce sera là sa punition, la peine de prison que son acte, avec
beaucoup d’indulgence, appelle, c’est un strict minimum. De Bankadé,
Aboulhassane déporta Seyni Kâdi à Pullo1, à l’Ouest de Tamkalla »2.

Ainsi, l‟acte ignoble de Seyni Kâdi ne fut pas jugé conformément au Coran car le

‘’Lamido’,’ voudrait éviter une sentence lourde qui pourrait occasionner un soulèvement

des Zarma. Mais malgré cette indulgence d‟Aboulhassane, certains membres de ce groupe

se montrèrent farouchement hostiles à cette sentence. Il avait certainement pressenti le

danger et il l‟avait évité de justesse. Deux ans après, les incidents se multiplièrent non

seulement entre les deux communautés du Dallol mais aussi entre Zarma eux-mêmes. Mais

le Lamido parvenait malgré tout, à régler à l‟amiable ces litiges.

Mais comme son père, cette accalmie fit naître chez Aboulhassane, une certaine

folie de grandeur. Il perdit ainsi sa lucidité d‟avant et s‟érigea en véritable dictateur. Il se

1- Pullo signifie en fulfuldé peul, le premier site du village est situé à l‟Ouest de Margou. Le village actuel
est situé entre les villages de Kodo et de Kanaré.
2 -Archives sonores de l‟IRSH : entretien avec Siddo Sayoma le 23/04/1969.

124
présenta aux yeux de ses sujets comme étant l‟homme réunissant toutes les qualités (le plus

intelligent, le plus instruit, le plus brave, le plus beau1…) :

« Je vous réunis pour me ‘’vanter’’. Dans le pays zarma, personne n’a commandé
avec autant d’honneur et de bonheur que moi. Il y a 27 ans que je commande ce
pays dans la paix. Je me vante de cela. Tout jeune encore, j’ai 30 enfants. Je me
vante de cela aussi. Sans ma responsabilité de chef, je peux prouver au pays zarma,
que dans celui-ci, je suis le plus instruit. C’est pour moi un sujet de vanité. C’est
encore ma qualité de sultan qui m’empêche de prouver que dans le zarma, je suis
l’homme le plus brave. C’est là pour moi une occasion de satisfaction personnelle.
C’est toujours mon état de sultan qui m’interdit de prouver que dans le zarma, je
suis l’homme le plus beau » (Hama, 1969 (a) : 85-86).

Se sentant très puissant, Aboulhassane oublia les sages conseils d‟Abdoulaye

Fodio et se comporta en „‟Lamido’’ absolu: « In zaberma, Abu al-Hasan continued military

operation against the zaberma which he completed in 1848/9. He than gave the zaberma a

treatment which was strictly not legally proper in the context of the Islamic law, even to

conquered people» (Alkali, 1969: 191). Traduction : [Dans la zone zarma Aboulhassane a

continué ses opérations militaires contre les Zarma entre 1848 et 1849. Puis il fit subir aux

Zarma un traitement qui était contraire à la loi islamique, même un peuple conquis ne

devait pas être soumis à une telle torture]. Pire, il laissa ses enfants maltraiter les paisibles

populations du Boboye. Le centre d‟études islamiques tomba ainsi dans l‟arbitraire et le

désordre. Les Zarma de l‟Est ressentirent vivement cette injustice contraire aux lois

islamiques et s‟organisèrent en conséquence afin de freiner cette dérive totalitaire.

II- La chute de Tamkalla et la succession d’Aboulhassane

1- La chute de Tamkalla

Pour dénouer la situation, les Zarma de l‟Est font appel à Daouda, le fils de

Bougaran. Ce dernier se rendit à Argoungou, pour solliciter l‟appui militaire du Kabi.

1 - Pour plus de détails sur l‟attitude nouvelle d‟Aboulhassane, voir les ouvrages de Boubou Hama, Histoire
traditionnelle des Peul du Dallol Boboye et de Boubacar Hama Beidi, Histoire traditionnelle des Peul du
Dallol Bosso.

125
Mais à Gwandou une fausse nouvelle circulait dans la ville accusant le Zarmakoye de

Dosso, Kossam, d‟être le cerveau de cette conspiration. Mohamed ne put se contenir

devant une nouvelle aussi grave. Il ne prit même pas le soin de vérifier l‟information à la

source. Convaincu que Zarmakoye venait de signer une alliance avec le pire de ses

ennemis, Kabi, Mohamed Bello mobilisa une armée pour attaquer la ville de Dosso : « Il y

eut quiproquo ; les Peul de Gando crurent que c’était Kossam, le roi de Dosso, qui avait

demandé l’aide de leur ennemi mortel, contre leur protégé Aboulhassane. Les Peul de

Gando décidèrent d’apporter la guerre à Dosso » (Hama, 1969 (a) : 87). Malgré toutes les

explications fournies par Aboulhassane pour dissuader Mohamed à renoncer à son projet,

celui-ci attaqua cette ville qui selon lui a renié la religion. Cette guerre menée contre

Dosso par l‟armée de Gwandou avait été interprétée par les Zarma comme étant une

stratégie d‟Aboulhassane visant à les affaiblir. Elle encouragea aussi, les Wangaari à

sceller une alliance solide avec le Kabi : « Events connected with the defeat of Dosso were

to create conditions which prompted the 1849 alliance » (Alkali, 1969 : 188). Traduction :

[Les évènements liés à la défaite de Dosso ont abouti à l‟alliance de 1849]. Les Zarma de

l‟Est, irrités par le comportement du Lamido Boboye, ont décidé de se révolter contre lui.

Mais ce qui va surtout faire monter la tension dans le Dallol, c‟est le

comportement des enfants d‟Aboulhassane. Ces derniers sont devenus incontrôlables et

rendent la vie difficile aux populations de la zone. Ils ont multiplié les abus et les exactions

contre les populations :

« Nous avons vu comment Aboulhassane, grisé par le pouvoir, se départit de la voie


droite du Coran et comment aussi il lâcha la bride de l’arbitraire à ses fils. Et c’était
de ce côté qu’allait lui venir le premier pavé lancé dans sa mare de tranquillité. En
effet, les enfants du prince enlevèrent par la force la vache d’une femme peul,
Halimatou, du village de Korankassa. Celle-ci supplia en vain les fils d’Aboulhassane
de lui rendre sa vache. Enfin n’en pouvant plus elle alla jusqu’à Tamkalla trouver
Aboulhassane. Elle dit tout son malheur au monarque. Celui-ci l’écouta d’une oreille
distraite puis, il dit :
- Ces choses regardent les enfants. Je ne peux pas m’occuper d’une affaire des
enfants. Retourne chez eux et arrange-toi pour qu’ils rendent ta vache.

126
Halimatou retourna encore chez les fils d’Aboulhassane. Ce fut en vain. On la
renvoya par un refus hautain. Furieuse, Halimatou retourna de nouveau chez
Aboulhassane. [……..].
Malgré les pleurs et les supplications d’Halimatou, Aboulhassane, par cruauté, ne voulut
pas s’intéresser à ce cas flagrant d’injustice qui réclamait la vengeance de Dieu. Excédée,
Halimatou s’adressa de toute sa foi et de tout son cœur directement à Dieu, au-delà des
hommes, d’Aboulhassane et de ses fils » (Hama, 1969 (a) : 89 - 90).

Elle pria ainsi, Dieu afin qu‟il punisse Aboulhassane et, la prière de cette pauvre femme fut

exaucée par le Seigneur. En effet, le comportement des enfants d‟Aboulhassane fit monter

la tension même au sein de sa communauté. Ainsi, un Peul du village de Windé, Zakara,

témoin de la scène pathétique, se rendit lui-même à Argoungou pour informer le chef de la

coalition zarma, Daouda du comportement insupportable adopté par Lamido et ses fils. Et,

ce comportement l‟avait rendu impopulaire même au sein de sa propre communauté.

L‟émissaire eut alors, un argument de taille pour convaincre le Sarkin Kabi, Nabamé de la

nécessité de l‟aider mais aussi des chances qu‟ils avaient de remporter la victoire à cause

de l‟impopularité d‟Aboulhassane. Et d‟ailleurs, il était arrivé au moment opportun dans le

Kabi. En effet, les autorités de cet Etat cherchaient aussi à mettre fin au pouvoir

hégémonique peul de Gwandou. Ainsi, se constitua au cours de l‟année 1849-1850, la

coalition qui porte le nom Nabamé qui est composée des éléments du Kabi, des Zarma de

l‟Est, du Dendi et de l‟Arewa: «The Nabame alliance is perhaps the most important single

event in the 19th century history of Kebbi. The objective of the alliance was to eliminate

Fulani control in the region of the componment states, and in the case of Kebbi to regain

the independence lost. » (Alkali, 1969 : 230 - 231).Traduction: [L‟alliance Nabamé est

peut- être, le seul évènement le plus important dans l‟histoire du Kabi au XIXe siècle.

L‟objectif de l‟alliance était de mettre fin à l‟hégémonie peul dans la région et permettre au

Kabi de retrouver son indépendance perdue]. Cette alliance marque un tournant décisif

dans l‟histoire du Boboye car elle va permettre au Kabi d‟instaurer son hégémonie sur les

territoires contrôlés par les Zarma de l‟Est.

127
Au même moment où cette alliance se nouait entre les Zarma de l‟Est, le Dendi, le

Kabi et l‟Aréwa, un autre guerrier commença à faire ses preuves dans le Dallol, il s‟agit

d‟Issa Korombé. Ce dernier est revenu dans son village après un long exil. Il sera très vite

populaire dans la région en faisant preuve de bravoure et de finesse au cours des combats

qu‟il engagea contre les Touareg. Il sut ainsi contenir les assauts de ces derniers et rejoignit

la coalition Zarma appuyée par l‟armée du Kabi pour combattre Aboulhassane. Il tint ces

propos devant les résistants :

« Je suis entré de la brousse et je reviens à présent. Et quiconque revient de la


brousse à la suite de telles conditions, se donne un but précis. Que tous les hommes
libres vivant ici dans le Kabbi, et se reconnaissant enfants de Untel et Untel se
préparent ; nous allons reprendre notre boboϊ, puisque l’on ne peut vivre
éternellement chez autrui » (Laya, 1976 : 47- 49).

Issa intégra ainsi la troupe de Daouda qui bénéficie désormais du soutien des Kabbawa et

des Arawa. La coalition forte de ce soutien prépare la reconquête du Dallol :

« Les Zarma se tournèrent ensuite vers l’autre camp ennemi. Pour ce faire, les
chefs militaires se réunirent à Fada Zéno près de Doso où ils attendaient l’’armée
du Kabi. Les alliés firent mouvement vers Tamkalla. Le Lamido de Tamkalla avisé
prit l’initiative de se rendre à Kala où il espérait prendre de vitesse ses ennemis.
Ces derniers s’étaient cette fois-ci, démarqués de leur itinéraire habituel.
Auparavant, les zarma et leurs alliés attaquaient les Peul de Kala1. Cette fois-ci,
après l’étape de Kwara-Zeno, ils descendirent directement à Tamkalla. Quand le
Lamido Abul Hassan se rendit compte qu’il avait fait un faux calcul, il dépêcha un
messager, Sagaidou à Tamkalla. Dans son message, il ordonna à son représentant
de déclarer Tamkalla ‘’ville ouverte’’. Mais le messager fit le contraire à sa tête et
engagea cinq mille hommes dans la bataille. Isa Korombe et ses alliés infligèrent
une défaite cuisante à l’armée ennemie » (Harouna, 1985 : 64-65).

Quelle triste fin pour le Lamido Aboulhassane qui a réussi au début de son règne à

instaurer un climat de paix dans le Dallol. C‟est surtout son comportement déviationniste

et les lourdes fautes commises par ses enfants qui l‟ont rendu impopulaire vers la fin de

son règne et ont permis à la coalition d‟avoir le dessus. Les autorités de Gwandou,

préoccupées par la situation du Kabi n‟ont malheureusement pas pu apporter un appui

1 - Kala, village situé sur le tronçon Birni- Kiota à quelques 20 kilomètres de Birni.

128
militaire à Aboulhassane dont la capitale Tamkalla fut mise à sac par la coalition en 1854.

Barth décrit l‟état lamentable de la ville lors de son second passage, c'est-à-dire en 1855 :

« The town of Tamkala, which gives great celebrity to this region, had suffered
considerably during the revolution of zabérma ; and in the bulky crops of native
corn (which were just ripe) had not hid the greater part of the town from view, it
would most probably have presented even a more diladated appearence ; for not
only was the wall which surrounded the place in a great state of decay, but even the
house of the governor himself was reduced almost to a heap of ruins » (Barth,
1965 : 538).

Traduction: [La ville de Tamkalla qui donne une grande célébrité à cette région, avait

notoirement souffert de la révolution zarma. Ainsi, les cultures abondantes de maïs local

(qui venait juste d‟être mûr) n‟obstruait en rien la vue de cette ville, mieux lui offrait

l‟aspect d‟une ville saccagée car, non seulement les murs qui entouraient la place étaient

dans un état de ruines totales, mais aussi, même la maison du chef était réduite presque en

gravats]. Cette destruction de Tamkalla, la capitale du centre d‟études islamiques du

Boboye par la coalition, a considérablement affecté l‟influence de Gwandou dans cette

partie : « By the year 1854 the independance of Kebbi had been archieved. Fulani political

influence in the region had been completely eliminated» (Alkali, 1969: 250).Traduction :

[A partir de 1854, l‟indépendance du Kabi avait été acquise. L‟influence politique peul

dans la région avait été complètement jugulée].

Mais, conformément aux recommandations de Boubacar Louloudji qui conseilla sa

descendance de se réfugier sur l‟île de Bikim1, la famille quitta le Boboye pour s‟installer

provisoirement dans cette localité. Une seconde fois, le centre d‟études islamiques du

Dallol connut une période de troubles au cours de laquelle les Peul perdirent le pouvoir et

la famille dirigeante contrainte à s‟exiler. Boubou Hama souligne cette triste fin des

„‟Lamido’’ du Dallol:

1- Bikim est une île située sur la rive droite du fleuve dans le parc national du „‟W‟‟ à l‟Ouest de Boumba et
au nord de la Mékrou. C‟est une île difficile d‟accès à cause de l‟abondance des arbres mais aussi des bras du
fleuve de la Mékrou.

129
« Mais, ce qui est caractéristique dans le Dallol, c’est le pouvoir, basé sur la
morale du Coran. Nous y voyons les princes prospérer quand ils ont respecté cette
morale, et succomber et punis, quand ils sont tombés dans l’arbitraire et
l’injustice. Chacun de leurs actes, chacune de leurs actions sont appréciés sous
l’angle de la justice permanente de Dieu » (Hama, 1969(a) : 94).

Cette analyse faite de l‟auteur sur l‟évolution de la situation politique dans le Dallol est

pertinente. En effet, Ali Anna et Sambo ont vécu en paix dans cette zone parce qu‟ils se

sont conformés à la morale du Coran. Mais, Boubacar Louloudji et son fils Aboulhasane

ont tous eu une fin de règne douloureuse à cause du non respect de cette morale. Le

premier fut contraint à l‟exil ; quant au second, il eut une fin tragique car il trouva la mort à

Kollo. L‟évolution politique du centre d‟études islamiques de Garouré est différente de

celle de Say qui a connu la stabilité depuis sa création jusqu‟à l‟arrivée des troupes de

conquête coloniale. Ce qui a permis à ce centre de rayonner dans tout l‟Ouest du Niger et

même au-delà. En effet, si Say a connu une telle stabilité, c‟est grâce au comportement

exemplaire de Mahaman Diobbo et de ses successeurs, qui ont opté pour la cohabitation

pacifique en développant une culture de paix et de tolérance entre les habitants.

2- Les successeurs d’Aboulhassane

Après Aboulhassane, ses successeurs ne vont pas véritablement régner sur le

Dallol. Tafa, enfant choyé par son père est déjà tristement célèbre dans le Boboye à cause

de son comportement insupportable à l‟égard des populations de cette zone. Nous pouvons

affirmer sans risque de nous tromper qu‟il est en grande partie responsable du malheur qui

frappa son père. Sans consulter ses oncles, Tafa1 s‟empare du pouvoir et s‟érige en maître

absolu. Il s‟installe à Kollo et affiche un mépris total non seulement à l‟égard de ses sujets

mais aussi à l‟égard des autres membres de sa famille. Cette attitude du nouveau dirigeant

1 - Tafa n‟a normalement pas droit au trône car selon les témoignages que nous avons recueillis à Birni, il a
tiré l‟imamat lors du tirage au sort organisé par son père peu avant son décès. Et, Boubacar conseilla
vivement à ses enfants de respecter le sort que Dieu a réservé à chacun d‟eux.

130
pousse les membres de sa famille à quitter Kollo pour se réfugier sur l‟île de Bikim.

Véritable dictateur, il n‟épargne personne même pas ses propres frères. Ainsi, il n‟hésite

pas à humilier publiquement son frère, Bayéro :

« Un jour, Tafa partit à Kouré. Dans cette ville, il acheta du mil mais, n’ayant pas
d’argent pour le payer, il se saisit sans façon de la jument que montait son frère,
Bayoro. Il offrit cette jument en paiement du mil qu’il venait d’acheter. Non content
de cette attitude indélicate à l’égard de son frère, il le mit à pied et l’obligea à
trotter devant son cheval. Ainsi de Kouré à Kollo, tout le monde vit Bayoro trotter
devant le cheval de son frère Tafa, nouveau Lamido- Zarma du Boboye. Bayoro
n’était pas content du traitement qui lui fut infligé. Il en fit part à Kollo à ses autres
frères qu’il ne fallait pas l’étaler au grand jour » (Hama, 1969 (a) : 97).

131
Photo no2 : La tombe de Yakubu Nabame, souverain du Kabi, autour duquel se
constitua, la fameuse coalition qui porte son nom et qui mit en déroute les Peul.

La tombe de Yakubu Nabame à Argoungou.


Photo prise à Kanta Meseum à Argoungou le 17/08/10

132
Les Zarma de l‟Est, très inquiets par la reconstitution du pouvoir peul à Kollo

décident de tendre un guet-apens à Tafa :

« C’est un habitant de Bassi, Modi, ami intime de Tafa que Daoudou choisit pour
qu’il conduise le nouveau Lamido dans son piège. Modi vint à Kollo et dit à
tafa : ‘’ tu es maintenant un Amirou, il faut faire le tour de ton territoire car tous
les Zarma ne sont pas contre vous’’. Tafa demanda parmi les membres de sa
famille ceux qui vont l’accompagner dans sa tournée. Ils refusèrent tous de
l’accompagner et prièrent même Tafa de ne pas effectuer la tournée. Malgré le
refus des siens de l’accompagner, Tafa prit l’imprudente décision d’effectuer la
tournée car il a confiance en Modi. Devant le refus de Tafa et sentant le danger
qu’il courait, Bayéro et les autres frères de Tafa quittèrent Kollo pour se réfugier à
Bikim. Peu de temps après, Tafa sera pris au piège à Gorou- Koumassi et tué »1.

La capitale du Dallol sera transférée sur l‟île où Amadou Koursounani, oncle d‟Aboulwafa

accéda provisoirement au trône (la tradition locale reste muette sur la durée de son règne).

Il fit appel à Aboulwafa refugié à Dioguirma. Celui-ci se rendit aussitôt à Bikim et prit le

pouvoir. Mais, le non respect des règles de succession ne plut pas à Bayéro qui quitta le

lieu : « Bayéro Aboulhassane n’était content, car il voulait en toute occasion l’application

stricte de la coutume. Il commença à faire des exactions et Aboulwafa, indigné de cette

attitude, l’appela et le gronda. Fâché, Bayéro Aboulhassane décida de partir » (Hama

Beidi, 2003 : 123). Il alla ainsi, en aventure dans l‟espoir de trouver le pouvoir mystique

mais aussi, l‟appui militaire nécessaire pour combattre les Zarma et reconquérir le Dallol :

« Bayoro se rendit à Wanzarba auprès de la Kassay, prêtresse supérieure des


Soninké. Bayoro vécut pendant deux ans auprès de cette femme. Chaque mois,
celle- ci lui donnait à téter un de ses seins. Un jour, la Kassay fit venir Bayoro et
lui dit : ‘’Maintenant, tu peux partir, je t’ai donné tous les secrets que je possède »
(Hama, 1969 (a) : 102 - 103).

Sur l‟île de Bikim, Aboulwafa mourut après sept (7) ans de règne. Puis ce furent

Seydou Diaré, Dadi et Soumana dit Baba Sidi qui régnèrent respectivement neuf (9) et

treize ans :

1 - Sonothèque de l‟IRSH : entretien avec Siddo Sayoma le 23/04/1969.

133
« Après le départ de Bayéro, Aboulwafa vivait heureux pendant sept ans. Il mourut
à Bikim. Seydou Diaré le remplaça. Il suivit le chemin de son prédécesseur : il était
aussi un marabout. Il régna pendant neuf ans. Après sa mort, Dadi fut nommé roi à
Bikim. Il régna pendant trois ans. Il s’inspira de l’exemple d’Aboulwafa. C’était
l’époque où le Dallol vivait l’ère des marabouts. Son successeur fut Soumana dit
Baba Sadi. Il vécut comme ses prédécesseurs » (Hama Beidi, 2003 : 125).

Il faut à ce niveau souligner qu‟après Aboulhassane, les Peul ont véritablement

perdu le pouvoir dans le Dallol. Au cours de la période qui suit et qu‟on peut qualifier de

période intermédiaire, les descendants de Boubacar Louloudji tentent tant bien que mal de

conserver l‟unité de la famille et un semblant de pouvoir dont l‟autorité ne s‟exerce que sur

l‟île de Bikim. D‟ailleurs, après Tafa les autres Lamido ont surtout régné en chefs religieux

et non en chefs politiques. Ils ont consacré leur temps de règne à l‟enseignement religieux

sur cette île. Ils ont œuvré pour le rayonnement de la religion musulmane mais dans un

espace limité. Ce flottement du pouvoir prendra fin avec le retour de Bayéro Aboulhassane

dans le Dallol.

134
135
Cette carte permet de situer les villages qui ont joué un rôle important dans l‟histoire du

centre d‟études islamiques de Birni N‟Gaouré. Il s‟agit de : Tamkalla (capitale de ce centre

de 1833 à 1854), de Tondifou (village dans lequel Boubacar Louloudji a séjourné deux ans

après son retour dans le Dallol), de Boumba (la bataille sanglante de 1896 a eu lieu dans

cette localité), de Birnial (Birniyel), un centre d‟études islamiques secondaire du Boboye

etc.

136
Chapitre VI : Le rétablissement du pouvoir peul dans le Dallol

Après la chute de Tamkalla en 1854, les Peul ont véritablement perdu le pouvoir

dans le Dallol. La capitale de ce centre sera transférée à Kollo puis à Bikim. Déçu par la

défaite sanglante des siens et désireux de se venger, Bayéro quitta cette dernière localité

pour chercher les secrets de la guerre. Ce chapitre abordera son exil, son retour triomphal

dans son pays natal ainsi que l‟organisation politique et administrative du centre d‟études

islamiques du Dallol.

I- La reconquête du Dallol par Bayéro Aboulhassane

1- L’exil de Bayéro

Bayéro est né à Tamkalla, d‟Aboulhassane son père et de Hassia1, sa mère. Il fit ses

études coraniques dans l‟école de son père, à Tamkalla. Après la prise de la capitale du

Boboye par les Zarma, il vécut un moment à Kollo. Mais le comportement du nouveau

Lamido, Tafa, l‟incita à quitter cette localité avec ses autres frères pour s‟installer sur l‟île

de Bikim. Meurtri par la défaite et les dissensions au sein de sa propre famille, désireux

surtout de se venger, Bayéro Aboulhassane prit le chemin de l‟exil. En quittant ce village,

il n‟avait qu‟un souci principal : comment procéder pour reconquérir le Dallol perdu ?

Suivant les conseils du souverain de Dantchandou, Bayéro comprit qu‟il ne pouvait

remporter cette bataille, si lui-même n‟arrivait pas à acquérir les secrets de la guerre. Il se

rendit à cet effet dans plusieurs localités à la recherche de ces derniers. Ainsi, de cette île, il

se rendit à Diongoré, à Dantchandou- Sillankey, à Torodi, à Karma, à Guessé puis à

Wanzarbé, fief des Soninké2. Dans ce village, Bayéro y demeura deux ans durant. Il profita

de son séjour à Wanzarbé pour s‟initier aux secrets de la guerre auprès de la prêtresse du

1 - Hassia est une zarma, c‟est une femme kallé du village de Guessé dans le Zarmaganda.
2 - Soninké : Ce sont les détenteurs de la magie Soŋey.

137
village, Kassaï. Il y a lieu à ce niveau de se poser des questions : Est – ce que l‟homme

religieux qui a le pouvoir ou qui cherche le pouvoir est le même que le simple religieux

prêcheur ? Comment un érudit qui se bat pour l‟instauration d‟un islam extirpé de toutes

les survivances des croyances ancestrales peut – il se permettre de chercher les secrets de

la guerre chez une prêtresse de la religion traditionnelle ? La réponse à ces questions se

trouve dans le comportement de Bayéro qui est prêt à tout pour reconquérir le trône de ses

ancêtres. Après Wanzarbé, il se rendit chez les Kounta du Mali puis se fixa dans le Yaga1

où il fut très mal accueilli par la population. Son frère, Abdou le rejoignit dans cette

localité :

« Bayéro vint s’installer à Séba dans le Yaga sans donner des explications aux
habitants intrigués et pendant deux ans, il ne pouvait trouver une parcelle pour
construire. Chaque fois qu’il sollicitait un bout de terre, on lui disait :’’ si tu veux
une parcelle pour construire ta case, pourquoi as- tu abandonné la terre de ton
père ? Retourne chez toi. ‘’Bayéro supporta quand même toutes les tracasseries
des gens de Séba » (Hama Beidi, 2003 : 129).

Devant l‟hostilité des Peul de Yaga à l‟égard de Bayéro et de son frère, les deux

étrangers firent preuve de bravoure pour amener les populations à les accepter comme des

siens. L‟occasion leur fut offerte par des guerriers Mossi qui, un jour, attaquèrent Séba, la

capitale et vainquirent les Peul. Ils enlevèrent tous les bœufs de la ville. Alertés, Bayéro et

son frère Abdou se lancèrent à la poursuite des guerriers mossi et les vainquirent :

« Ayant appris la nouvelle, Bayoro scella son cheval, le monta et se lança, seul, à
la poursuite des Mossi. Il les rattrapa. Il engagea le combat contre eux après avoir
traversé une rivière mais il y fut projeté avec violence dans le lit de la rivière où il
eut les mains déchirées et la figure meurtrie. Dans cette position il avait perdu
connaissance et était à la merci de ses ennemis. Mais, Abdou eut vent du départ de
Bayoro. Il le suivit à la trace et il le trouva juste au moment où il tombait dans la
rivière. Il le souleva, lava ses blessures, mais il ne perdit pas son temps. Il se lança
à la poursuite des Mossi avec encore plus de vigueur que Bayoro. Les cavaliers
Mossi eurent peur. Ils se sauvèrent en laissant le troupeau de bœufs entre les mains
d’Abdou. Celui- ci ramena à Séba son frère Bayoro, pantelant de sang, et le
troupeau au complet » (Hama, 1969(a) : 104 -105).

1 - Yaga est une ville située actuellement au Burkina-Faso.

138
Cette victoire surprise des deux frères face à de redoutables guerriers poussa les

populations de Yaga à changer d‟attitude à leur égard. D‟ailleurs, le roi, très content de

l‟exploit des deux frères, leur donna en mariage deux de ses filles : « Le roi de Yaga fut

stupéfait devant le courage des deux frères. Il donna à Bayoro sa fille Ayssa et à Abdou,

son autre fille, Fatima » (Hama, 1969 (a) : 105). Ainsi, les deux frères furent hébergés

comme des héros à Séba. Bayéro profita de ce nouveau climat favorable pour faire venir sa

famille. Même des Peul et des Zarma se joignirent à sa famille pour s‟installer à Yaga :

« Bayoro devint dans le Yaga un guerrier de premier plan. Il y fut rejoint par des Zarma et

des Peul » (Hama, 1969 (a) : 105).

2- La rencontre entre Bayéro et les Foutanké

Vers la fin du siècle débute la conquête coloniale en Afrique occidentale. Le roi du

Djoloff, Ali Bori N‟Diaye révolté contre les français, sera chassé de son royaume par les

troupes du colonel Dodds. Ce dernier prit la capitale du Djoloff, Yang- Yang, le 24 mai

1890, obligeant ainsi le souverain à s‟enfuir pour se réfugier au Nioro, dans le Macina.

Ahmadou Sékou reçut le fugitif du Djoloff. Mais, le Macina sera à son tour attaqué par les

colonnes françaises d‟Archinard. Le Nioro sera pris en janvier 1891. Ahmadou Sékou ne

s‟avoue pas vaincu. Tout en se repliant sur le Hombori, il continue de harceler les français.

A partir de 1893, Ahmadou Sékou et Ali Bori N‟Diaye prirent la fuite vers l‟Est pour

chercher refuge à Sokoto. Après avoir transité par Dori, les fugitifs arrivèrent dans le Yaga.

Comme le dit un adage populaire : « Le malheur des uns fait le bonheur des autres ». En

effet, pour Bayéro, l‟arrivée des troupes des deux rois, équipées d‟armes modernes

constituent un „‟don de Dieu‟‟, une occasion à ne pas rater pour prendre sa revanche sur les

Zarma.

139
Après avoir sympathisé avec les nouveaux arrivants, il prit tout son temps pour leur

expliquer les mobiles de son exil et son désir de reconquérir la terre de ses ancêtres. Les

Foutanké comprirent l‟enjeu et décidèrent de lui apporter tout leur soutien. Ainsi, Bayéro

et ses alliés quittèrent Yaga et vinrent s‟installer à Lontia1. Le séjour dans la localité de Say

est confirmé par les traditions locales mais aussi par plusieurs auteurs parmi lesquels,

Lem :

« Un ultime épisode de la lutte des colonnes françaises contre Ahmadou se situe


dans la région de Say, qui fut, en 1893, le lieu de refuge temporaire du chef
toucouleur. Battu par Archinard, chassé de Ségou et de Nioro, réfugié dans le
Macina, après avoir essayé vainement un retour offensif, ayant dû s’enfuir
successivement à Hombori, puis à Dori, Ahmadou arriva jusqu’à Say : traversant
le Niger il alla s’installer plus au Nord à Dounga, entre Say et Niamey. Quelques
années plus tard il devait quitter le pays et aller se fixer dans la province de Sokoto
où il mourut obscurément, en 1898 » (Lem, 1943 : 62).

Connaissant la force de frappe de la coalition zarma, Bayéro voulut réunir toutes les

chances de son côté. Il alla ainsi à Kounari, à Dantchandou puis à Kirtachi, solliciter

l‟appui militaire des souverains de ces différentes localités. De Lontia, les Foutanké

commencèrent leurs expéditions contre les villages de Tondo, de Tchérindji, de Kouda-

Gandé… Aussitôt, la nouvelle du retour de Bayéro circula dans le Dallol. Ce retour fit

monter la tension dans cette zone. Commence alors une nouvelle période de troubles avec

son cortège de malheurs. Après ces premières expéditions punitives couronnées de succès,

l‟armée de la coalition se retira à Lontia pour préparer minutieusement leur plan de guerre

contre les Zarma.

1 - Lontia, village situé actuellement à cinq kilomètres de la ville de Say sur la route principale, Niamey- Say.
Hourst évoque la présence des Foutanké lors de son passage en 1896 dans son ouvrage, intitulé, Sur le
Niger et au pays des Touareg, 1898.

140
II- La bataille de Boumba

1- La défaite des Zarma

Bayéro et ses alliés, après avoir peaufiné leur stratégie de guerre, traversèrent le

fleuve et brûlèrent plusieurs villages sur leur passage. La stratégie de la coalition consiste à

priver les sédentaires de leur principal soutien, le Kabi en attaquant et en détruisant cet Etat

au préalable. Mais avant d‟atteindre le Kabi, les Zarma se lancèrent à la poursuite de la

coalition. Le combat décisif eut lieu à l‟embouchure du Dallol- Bosso, à Boumba : l‟armée

d‟Issa Korombé se trouvait du côté du fleuve et celle de la coalition vers le plateau. C‟est

l‟un des combats les plus meurtriers de l‟histoire du Boboye. Le souvenir de ce combat est

resté très vif dans les traditions locales. Il prit le nom de ‘’ Boumba hané1’’. Il opposa la

coalition zarma à celle des Foutanké. Ce fut un combat meurtrier au cours duquel les

sédentaires perdirent 3000 guerriers : « La bataille de Bumba fut la plus sanglante de toute

l’histoire du Zarmatarey car Bumba hané, « le jour de Bumba », coucha 3.000 Wangaari

zarma et parmi eux les plus farouches, les plus indomptables et les plus implacables

guerriers vétérans de la « reconquista » zarma » (Gado, 1980 : 266). Issa Korombé, le

grand guerrier, fut tué au cours du combat : « Le colosse de la guerre, Issa Korombé, fut

tué d’une balle tirée par Marou Koumbel du Fouta » (Hama, 1969 : 109). Cette défaite de

la coalition (zarma- kabbawa et arawa), malgré l‟importance des effectifs de son armée

était certainement due au fait que les Foutanké étaient techniquement mieux équipés car

disposant d‟armes à feu alors que les coalisés n‟avaient que des armes traditionnelles :

« Deux souverains détrônés : Amadou Chékou chassé du Macina et Ali- Bori ex- roi du

Diolof, à la tête de 2000 ou 3000 guerriers fanatiques, armés de fusils et bien entraînés

par quinze années de lutte contre nos troupes, arrivèrent sur les bords du Niger » (Périé et

1 - Boumba hané ou Boumba Alamisso : Le jour de Boumba ou le jeudi de Boumba car la bataille eut
lieu un jeudi.

141
Sellier : 1057). Bayéro, grâce à l‟appui de cette armée bien entraînée et équipée de fusils a

infligé une lourde défaite à la coalition (Zarma- Kabbawa et Arawa) à Boumba.

2- Le Dallol après la défaite des Zarma

Après cette défaite, les sédentaires se replièrent à Dosso qui sera vaillamment

défendu par le Zarmakoye Attikou, successeur d‟Alfa Atta, tué au cours du combat. Devant

la forte résistance des rescapés de Boumba à Dosso et à Koygolo, la coalition des

Foutanké abandonna la zone en 1897 et essaya de rejoindre Sokoto. Ne pouvant passer par

le Sud car le Dendi et le Kabi défendent la cause des Zarma, la coalition contourna ces

zones en remontant au Nord pour redescendre et passer à l‟Est de Dogondoutchi et

atteindre ainsi Sokoto. En traversant le Kourfey, la coalition tomba dans un guet- apens,

une bonne partie de la troupe fut massacrée. Au même moment, l‟arrivée des français est

annoncée, obligeant ainsi la coalition à se disperser et à chercher à regagner

précipitamment Sokoto. Fourage Gérard décrit les difficultés auxquelles les Foutanké

furent confrontés après la défaite de Boumba :

« Certes les forces rassemblées par le Zarmakoi Alfa Atta de Dosso et confiées au
chef de guerre (Wonkoi) Issa Korombé subissent une sanglante défaite à Bumba en
1896 ; mais les toucouleurs ne parviennent pas à prendre Koigolo ni à s’ouvrir une
route vers l’est car le Zarmakoi Attiku et le wonkoi Moussa ont su cristalliser les
résistances, rassembler de nouvelles troupes et reprendre l’initiative. C’est
finalement vers le nord et à travers le Kurfeye que les toucouleurs, réduits en
nombre par des échecs subis à Bonkoukou dans l’Imanan et à Filingue, réussissent
à se frayer un passage vers Sokoto » (Fourage, 1899 - 1911 : 264- 265).

D‟après plusieurs sources, Ali Bori N‟Diaye n‟a pas pu atteindre Sokoto. Il

serait mort à Lougou (Doutchi) selon certaines versions et à Koudourou (Nigeria) selon

d‟autres. Quant à Ahmadou, il sera reçu par l‟Emir de Sokoto qui l‟installa dans la

province du Zamfara où il mourut l‟année suivante en 1898. Bayéro s‟établit

momentanément dans le Taghazar à Sandiré jusqu‟à l‟occupation de la région de

142
Dosso par l‟administration coloniale. Ayant déjà toutes les informations sur la force de

frappe de cette dernière, il envoya une lettre de soumission au chef de poste de Dosso

en 1899. Quelques jours plus tard, il effectua une visite pour rencontrer les autorités

coloniales de Dosso :

« L’objet du déplacement était de demander l’autorisation de s’établir à Tamkalla.


Ce qui fut accordée contre versement d’un lourd tribut. Par contre la demande
d’implantation à Garbu et Gawa (sur la route de Karimama) fut refusée, du moins
momentanément afin de ménager la susceptibilité des Zarma qui n’appréciaient
pas ce retour des peul disait-on » (Idrissa, 1981 : 102).

Mais, l‟administration coloniale va procéder plus tard à la délimitation des territoires

revenant à chacun des souverains protagonistes. Ainsi, Zarmakoye eut le Nord et l‟Est

du Dallol et Bayéro, l‟Ouest et le Sud, c'est-à-dire le Bas- Dallol et les régions

comprises entre le Niger et le Dallol- Bosso. Ce qui permit aux fugitifs de regagner le

bercail et à Bayéro de retrouver le trône de ses ancêtres.

III- L’organisation politique et administrative du centre d’études islamiques de

Birni N’Gaouré

1- L’organisation politique

S‟agissant de l‟organisation politique, les autorités du Dallol se sont beaucoup

inspirées du modèle de Sokoto. A la tête du centre se trouve le chef temporel et spirituel

qui porte le titre de Modibbo. Mais rappelons- le, depuis l‟avènement de Boubacar

Louloudji, ce titre fut remplacé par celui de Lamido- zarma. La dévolution du pouvoir est

héréditaire : le Lamido est choisi parmi les descendants d‟Ali Anna, fondateur du centre

d‟études islamiques de Garouré et la succession se faisait de frère à frère selon le droit

d‟aînesse. Les représentants de Sokoto assistent à l‟intronisation du nouveau souverain :

« Après son élection, le conseil dépêche une délégation, au commandeur des


Croyants. Celui- ci envoie l’Emir de Gandou qui vient couronner le nouveau chef.
Il vient avec les vêtements blancs pour le nouveau chef, une gandourah, un turban

143
et un burnous. C’est un représentant de Say qui est chargé de revêtir le nouveau
chef. Puis le nouveau chef, assis sur une peau de mouton blanche, se lève, s’avance
vers l’Emir et place les mains dans les siennes en signe d’hommage. Après le reste
de la population vient lui rendre hommage. Au même moment on tape le tambour
de guerre, annonçant des événements » (Hama Beidi, 2003 : 167).

Le Lamido dirige la prière et conduit la guerre sainte, assisté par les chefs de villages et de

quartiers. Avant l‟avènement du Jihad, Ali Anna et Sambo avaient régné comme des chefs

religieux. Ils n‟avaient pas de dignitaire pour les assister : « Jadis, le chef portait le titre de

Môdibbo Dallol. Il n’avait pas de dignitaires qui l’assistaient » (Beidi Hama, 2003 : 163).

Ces religieux étaient très respectés et leurs décisions s‟imposaient à tous. Mais, le Jihad

aura pour conséquences dans le Dallol, un changement de titre. Ainsi, modibbo Dallol sera

remplacé par Lamido- zarma. Selon Saka Balogun, dans les centres d‟études islamiques de

l‟Ouest du Niger, les deux personnages importants de la cour sont le cadi et l‟imam. C‟est

au niveau du centre d‟études islamiques de Birni N‟Gaouré seulement qu‟on rencontre un

troisième dignitaire, le Majidadi : « Apart from Birni Ngaure which constantly appointed

the Majidadi before its Capital was sacked in c. 1854, all the other emirates West of

Gwandu appointed only the Qadi and the Imam » (Balogun, 1970 : 263). Traduction : [En

dehors de Birni N‟Gaouré qui a constamment nommé le Majidadi avant le saccage de sa

capitale en 1854, tous les autres émirats de l‟Ouest de Gwandou ne nomment que le Cadi

et l‟Imam]. Le Majidadi, c‟est un mot d‟origine haoussa qui signifie littéralement l‟homme

satisfait, il est chargé des relations extérieures. Il est choisi parmi les fils de la sœur du

souverain.

Dans tous les centres d‟études islamiques, la composition de la cour n‟a pas connu

de changement majeur avant la période coloniale. C‟est au cours de cette époque que

certains souverains ont commencé à nommer les dignitaires de la cour selon le modèle des

cours haoussa. C‟est le cas par exemple de Birni N‟Gaouré où c‟est le successeur de

144
Bayéro, Beïdhi, qui va nommer plusieurs dignitaires en s‟inspirant de la composition de la

cour de Gwandou :

« Le blanc à son arrivée leur demanda :’’Qui vous avez élu ? C’est bien Beïdhi, n’est – ce
pas ? ’’ La majorité déclara : ‘’Oui c’est lui que nous voulons’’… Le blanc remit un écrit
qui faisant de lui le Lâmido. Un nouveau règne commença. Une fois revêtu de ses habits,
le chef nomme des dignitaires de la cour suivant les traditions du Haoussa » (Hama Beidi,
2003, 169).

C‟est ainsi que des titres comme Mayaki, Lawan- Putchi, Waziri, Mayfada… feront leur

apparition :

- Mayaki qui signifie en haoussa chef de guerre ;

- Lawan- Putchi qui est le chef de la cavalerie ;

- Waziri : Ce titre est décerné à un fils de la sœur du chef sans droit à la chefferie.

Il remplit la charge de conseiller ;

- Mayfâda : En haoussa „‟le chef du conseil‟‟, il est chargé du protocole. Il est

chargé notamment de distribuer de la cola aux dignitaires en conseil.

2- L’organisation administrative

Jadis, le modibbo Dallol était le chef de l‟administration. Les délibérations avaient

lieu dans la mosquée. Il nommait les chefs de quartiers et de villages. Chaque dirigeant

administrait les populations placées sous sa tutelle. Les villages étaient regroupés en

secteurs. A la tête de chaque secteur se trouvait un dirigeant qui était chargé de transmettre

les ordres de Lamido. Selon Boubacar Hama Beidi : « Les chefs portaient toujours le titre

de hôrêdjo. Après la guerre sainte, on plaça à la tête de chaque groupe un chef diom wuro,

issu de la grande famille de migration. Et ces groupes devinrent des villages » (Hama

Beidi, 2003 : 163).

145
Conclusion de la deuxième partie

Le centre d‟études islamiques de Birni N‟Gaouré était un modèle de réussite à ses

débuts à cause de la politique d‟apaisement et de rassemblement menée par les pères

fondateurs (Ali Anna et Sambo). Ces derniers ont surtout mis l‟accent sur l‟enseignement

religieux dans la paix. Mais avec l‟avènement de Boubacar Louloudji, ce centre va

basculer dans la violence et, depuis lors les heurts sont fréquents dans le Boboye avec tout

un cortège de malheurs. C‟est l‟ambition démesurée de ce chef religieux qui voulait

contrôler toutes les terres du Dallol qui va mettre le feu aux poudres. Ses successeurs vont

poursuivre sa politique totalitaire, ce qui va envenimer la tension dans la zone et fera de

cette dernière l‟un des plus grands foyers d‟insécurité de l‟Ouest du Niger.

146
Photo no 3: Issa Ko à Boumba

La bataille de Boumba eut lieu sur ce terrain en 1896. Le chef de Guerre zarma, Issa

Korombé fut tué au cours de cette bataille sous ce baobab à droite (dès lors l’arbre

prit le nom d’Issa Ko).

Photo prise à Boumba le 09/10/11.

147
TROISIEME PARTIE : LE CENTRE D’ETUDES ISLAMIQUES DE

SAY

148
Le XIXe siècle, marque un tournant dans l‟histoire de l‟islamisation de l‟Ouest du

Niger. Le Jihad d‟Ousmane Dan Fodio aura des répercussions sur l‟ensemble de la zone et

on assistera à l‟émergence de deux principaux centres d‟études islamiques et de plusieurs

centres secondaires qui vont jouer un rôle important dans la propagation de l‟islam dans

l‟Ouest du Niger. Parmi ces centres d‟études islamiques, Say reste incontestablement le

plus important. L‟histoire de ce centre est liée à celle d‟un homme, son fondateur : Alfa

Mahamane Diobbo. Cet alim, originaire du Macina fonda au début du XIXe siècle, la cité

religieuse de Say. Grâce à sa culture islamique et à son sens profond de justice et d‟équité,

il va rapidement faire de cette ville un grand centre d‟études islamiques dont l‟influence

s‟étend dans tout l‟espace allant du Dendi à Gao.

Dans cette partie, nous allons à travers l‟étude de ce centre d‟études islamiques

montrer comment le fondateur de Say qui s‟est installé dans cette ville après la chute de

Garouré a pu réussir à faire de ce centre, un pôle d‟attraction et un important foyer de

diffusion du savoir islamique dans l‟Ouest du Niger. Nous tenterons également dans cette

partie de traiter de l‟évolution de ce centre d‟études islamiques sous la direction des

successeurs d‟Alfa Mahaman Diobbo jusqu‟à la création du poste de Say en 1897, qui

marque le début de la conquête coloniale au Niger.

149
Chapitre VII : Historique du centre d’études islamiques de Say

Dans l‟espace nigérien, le XIXe siècle est marqué par le renouveau islamique de

Shaykh Ousmane Dan Fodio. Parmi les centres d‟études islamiques créés dans l‟Ouest du

Niger à la faveur de cette révolution, Say reste incontestablement le plus important.

Contrairement à la plupart des grands ouléma de son époque qui étaient contraints

(à cause du refus des populations de pratiquer un islam pur), d‟entreprendre le Jihad pour

répandre l‟islam, Mahaman Diobbo opta pour une adhésion à la religion de Mohamed par

la persuasion et le consentement volontaire du fidèle. Cette attitude non violente, fait la

singularité de ce‘’Wali’’ surtout pendant ce siècle dominé par des guerres. Il fit de Say un

véritable havre de paix, un carrefour du point de vue islamique et des échanges

commerciaux. Mais, malgré cet important rôle historique qu‟il a joué, il y a peu d‟écrits sur

l‟histoire de ce centre. C‟est pourquoi nous avons proposé d‟étudier ce dernier. Ville créée

par cet érudit, Say est le centre d‟études islamiques le plus important de l‟Ouest du Niger

au XIXe siècle. Ce n‟est pas un hasard si l‟administration coloniale y construisit en 1959, la

première medersa de la colonie du Niger. Ce n‟est non plus pas par hasard si cette cité a été

choisie pour abriter depuis le 15 janvier 1987, l‟Université Islamique financée par

l‟Organisation de la Conférence Islamique (O.C.I). Un rôle historique aussi important joué

par Say, sur le plan religieux mérite qu‟on s‟y attarde.

I – L’installation de Mahaman Diobbo à Say

1- Situation géographique et humaine

La ville de Say est actuellement chef lieu d‟un département. Cette entité

administrative est située à l‟extrême Sud-ouest du pays entre les latitudes 12º et 13º30. Le

département couvre une superficie de 13 501 km².

150
Carte no 6 : Localisation de Say dans l’Ouest du Niger

151
La population est composée de Peul (42%), de Zarma-Soŋey (22%), de Gourmantché

(22%), de Haoussa1… Une seule voie relie la ville de Say au reste du pays. Il s‟agit de la

route Niamey-Say, qui continue au- delà de cette ville vers Tamou et jusqu‟au Parc

National du W (important site touristique de l‟Ouest du Niger). Située au bord du fleuve,

Say a été pendant longtemps une ville carrefour :

« Pour tous les royaumes qui ont vu le jour dans cette région du Niger, le fleuve a
toujours constitué une artère vitale. Son contrôle devient alors plus qu’un
impératif, parce qu’un cours d’eau en lui-même est souvent une voie de circulation,
dont les techniques de transport appliquées de pont de rupture de charge,
combinées à une confluence ou un carrefour routier, constituent une position
urbaine particulièrement importante. Aussi, la ville de Say 2, qui était le
représentant spirituel du Sultanat de Sokoto, permettait à ce dernier le contrôle
effectif de cette région » (Sajo, 1982 : 9).

Après la chute de Tamkalla en 1854, les voies de la rive gauche du fleuve sont

passées sous le contrôle de la coalition Zarma – Kabi, Say devient dès lors le représentant

de Gwandou dans tout l‟Ouest du Niger. Ce rôle politique aura un impact positif sur les

activités économiques faisant ainsi, de cette ville, un carrefour sur le plan commercial.

2- Le départ de Mahaman Diobbo de son pays natal

Selon la tradition locale, Alfa Mahaman Diobbo a quitté le Macina pour accomplir

une „‟mission‟‟ (Dontoni) que Dieu lui a recommandée. Selon cette tradition, c‟est à l‟âge

de 39 ans que l‟esprit de sainteté lui aurait été révélé dans sa grotte appelée Diobbo. A

partir de ce moment, il eut pour mission de prêcher pour répandre l‟islam. Cette version

cherche à donner une origine mystérieuse à la mission religieuse. Elle assimile Mahamane

Diobbo au prophète Mohamed. Mais, la version la plus répandue sur ce déplacement est

celle d‟Alzouma Bazi Cissé :

«Le fait qu’il ait quitté son village pour la région de Gao, c’est parce qu’il avait
une sœur qui vivait à Gabéro (village situé non loin de Gao) avec son mari. Cette

1
- -BCR : Recensement général de la population et de l‟habitat 2001.
2
- Il s‟agit d‟un usage détourné de termes, c‟est plutôt le dirigeant du centre d‟études islamiques de Say qui
est le représentant spirituel de Sokoto dans la zone.

152
sœur était restée longtemps dans ce village sans donner de ses nouvelles. Inquiété
par ce silence, Alfa Mahaman Diobbo avait décidé de la rejoindre pour voir ce qui
n’allait pas. Mais, sa sœur serait morte bien avant son arrivée dans le village. A
partir de là, il décida de continuer son chemin. Aujourd’hui, encore, il y a des gens
de Gabéro qui chantent des chants religieux de Mahaman Diobbo. S’agissant de
son itinéraire, après Gabéro, il séjourna à Gao puis à Larba.-Birno où il voulait
rester mais les Soŋey se sont opposés. Après ce refus, il quitta ce village, il transita
par Kaporé, un village de Bittinkodji avant d’atterrir à Neni-Goungou…»1.

Au niveau des sources écrites, il y a plusieurs versions. La première est celle des

auteurs comme Urvoy (1936) et Lem (1943) qui pensent qu‟il aurait quitté son village natal

pour effectuer un pèlerinage à la Mecque mais qu‟arrivé à Neni, le poids de l‟âge l‟obligea

à renoncer à ce voyage. La seconde version est soutenue par Kimba Idrissa qui retrace un

itinéraire presque identique à celui de la tradition orale :

«Vers la fin du 18e siècle, devenu grand marabout, il entreprend des prédications
dans la zone Sonay de Kokoro et du Gorouol autour du village de Bangutara,
Larba, Tirga, dans le Dargol autour de Sinder où il rencontra le marabout connu
sous le nom de Issoufou Sinder. Très vite son audience s’élargit et fit de nombreux
disciples parmi les Sonay, les Kurtey, les Wogo, les Zarma et les Peul qui
reconnurent sa sainteté. De nombreux éléments de ces groupes le suivirent dans ses
déplacements. Empruntant la voie du fleuve, il fit de courts séjours à Gudel,
Kaporé (dans le Lamordé), puis se fixa pour une dizaine d’années dans l’île de
Neni (près de Niamey) » (Idrissa, 1981 : 44 - 45).

Son séjour sur cette île serait le plus long des différentes étapes (7 ans pour

certains, 10 ans pour d‟autres). A Neni, très vite la renommée du saint gagna le

Zarmaganda et toute la rive Gourma. De ces deux régions, les aumônes et les dîmes des

fidèles affluèrent sur l‟île. Déjà beaucoup de fidèles ayant eu écho de ce grand érudit

étaient venus lui prêter allégeance et se convertir volontairement à l‟islam. En effet, dans

cette localité, Alfa Mahaman Diobbo fit la connaissance d‟importantes personnalités

religieuses parmi lesquelles :

- Alfa Sorry Beldo Hooré, un érudit peul avec lequel Mahaman Diobbo échangeait

des expériences dans le domaine du savoir religieux. Il était à l‟époque le lettré

2 - Entretien avec Alzouma Bazi Cissé le 11/11/07 à Niamey.

153
musulman le plus influent du Bittinkodji : « Mohaman Diobo fut l’hôte à Neny,

d’un marabout influent pour l’époque, Alfa Sori, dont le tombeau longtemps

vénéré, se trouve encore au village de Tirga » (Lem, 1943 : 67).

- Boubacar Loudoudji : après sa défaite face aux Zarma et après plusieurs

péripéties l‟ayant reconduit à Foudou, à l‟Est de Gwandou puis à Sokoto, à Wourno, il

parcourut le Bargou puis arriva à la Tapoa. C‟est dans cette région du Liptako-Gourma

qu‟il eut vent de la présence de Mahaman Diobbo dans le pays soηey ; il alla alors le

rejoindre à Gaoudel selon certaines sources et à Neni selon d‟autres.

- Alfa Adamou, ancêtre des Zooran1 du quartier Zooronay de Say. Selon la

tradition de sa famille, il est originaire de Bounza (Nigeria) et est issu d‟une famille de

lettrés musulmans. Même dans sa ville natale, leur quartier porte le nom « Zooronawa ».

Selon Abdoulsalam Soumaila, petit frère de feu Oumarou Soumaila (ancien président de

l‟Association Islamique du Niger) et descendant d‟Alfa Adamou :

« Les raisons du départ de cet alim de Bounza sont liées à un différend qu’il a eu
avec le Sultan de l’époque. En effet, ce dernier lui a confié le poste d’Alkali de la
ville mais il a décliné l’offre. Il n’a pas accepté ce poste parce que c’est un
religieux respecté et aimé par la population. Il craignait en occupant ce poste de
commettre des erreurs en tranchant des différends et d’être mal vu par la
communauté. Mais ce refus irrita le Sultan. Après cette brouille, il décida d’aller
approfondir ses connaissances religieuses au Macina. A son retour au pays, il
aurait appris la présence de Mahaman Diobbo à Neni et décida alors de lui rendre
visite. Après les salutations d’usage, Alfa Adamou aurait fait comprendre à
Mahaman Diobbo qu’il désirerait rester à ses côtés pour l’aider dans sa tâche.
L’érudit rassura son étranger en lui faisant comprendre son projet de quitter l’île
de Neni pour s’installer quelque part en aval. L’érudit et son hôte s’installeront
plus tard sur l’île qui portera le nom de Say. C’est pourquoi le quartier Zooronay
est l’un des plus anciens quartiers de la ville de Say »2.

Il faut signaler que c‟est après la mort de Sorry Beldo Hooré que les relations entre

Alfa Mahaman Diobbo et la population de Lamordé se sont détériorées. En effet, les

habitants de cette localité ont beaucoup d‟estime pour Sorry Beldo Hooré. Ce dernier est

1
- Le zooran est issu d‟un père d‟origine servile et d‟une mère libre.
2- Entretien avec Abdoulsalam Soumaila à Say le 12/12/07.

154
un grand lettré musulman originaire de Bittinkodji, très respecté du fait de son savoir, de

son attitude mais aussi de son ascendance. Il est issu de la famille aristocratique de cette

principauté car sa mère est une princesse de Lamordé. Selon Alio Mahaman, il est la plus

importante personnalité religieuse de la zone : «When the Jihad started, the most important

personnality on the right bank of the River Niger was Alfa Sory Beldo Hore, installed at

Tirga» (Mahaman, 1997:120). Autrement dit: [Quand le Jihad avait commencé; la

personnalité la plus importante sur la rive droite du fleuve Niger était Alfa Sorry Beldo

Hooré, installé à Tirga].

3- Le départ de Neni et l’installation à Say

Selon la tradition locale, l‟affluence des gens sur l‟île de Neni et la renommée de

l‟érudit inquiétèrent les princes de Lamordé. Le décès de Sorry Beldo Hooré constitua

une occasion belle que les autorités politiques du Bittinkodji n‟hésitèrent pas à saisir. Pour

décourager Mahaman Diobbo et l‟inciter à quitter leurs terres, elles capturèrent deux de

ses talibé. Ils avaient été vendus par la suite comme esclaves sur un marché de la place.

Ayant appris la nouvelle, il se rendit à Lamordé pour réclamer ses talibé mais en vain. Cet

acte l‟affligea et il décida alors de quitter l‟île. Il traversa le fleuve pour s‟installer à

Goudel, village situé en face du lieu de départ sur la rive gauche. Il fut chaleureusement

accueilli par la population de ce village. Mais avant de quitter Neni, il invoqua Dieu afin

qu‟il vengeât ses talibé. Quelques jours après son départ, des guerriers touareg attaquèrent

le village de Lamordé qui fut pillé et saccagé. A Goudel, Mahaman Diobbo prit une

femme de nom de Gomni avec laquelle il eut trois garçons et deux filles. Moulaye

Hassane traite de son séjour à Goudel :

«Lors de cette étape, Diobbo aurait épousé la fille du chef de Goudel, dénommée
Gomni ; de leur union naquirent cinq enfants dont deux filles : Ramatoullaye et
Rakitoullaye et trois garçons : Abdul- Wahabi, Mamoudou et Abdoul Wahidou. Le

155
premier et le troisième de ses fils succédèrent plus tard à la chefferie de Saayi»
(Moulaye, 1995 : 30).

Le séjour d‟Alfa Mahaman Diobbo à Goudel a été confirmé par tous nos interlocuteurs

interrogés sur place dans ce village. Selon Seydou Hamidou, chef du quartier Yantala

haut :

« Mahaman Diobbo après avoir quitté Neni est arrivé à Goudel où il fut
chaleureusement accueilli par le souverain de ce village. Il était resté dans le
quartier Koudai au bord du fleuve. Son séjour à Goudel n’a pas été long mais
avant de quitter, il épousa une des filles du souverain, du nom de Gomni. C’est Alfa
Mahaman Diobbo qui traça la fondation de la plus vieille mosquée de ce
quartier…»1.

Après un séjour relativement court à Goudel, l‟érudit et sa suite quittèrent ce

village. Embarqués dans des pirogues, ils descendirent le fleuve jusqu‟au niveau de l‟île

qui portera plus tard le nom de Say. Par rapport à l‟origine de ce nom, nous avons plusieurs

versions :

- La Première version, c‟est celle du calebassier de Boubou Hama :

« Boubacar Loudoudji, demanda à Alfa Mahaman Diobbo de lui apporter le fruit


plein d’un calebassier. Il pratiqua un trou à la calebasse pleine. Par ce trou, il la
vida et en fit une gourde. Dans celle-ci, il mit un talisman écrit en arabe. Il dit
alors à Mahaman Diobbo :
* Mettons cette gourde dans l’eau du Niger : laissons-là, librement, suivre le
courant, partout où elle s’arrêtera, ce sera là que se trouvera notre bonheur. Ce
sera, encore, l’indication de l’emplacement où nous construirons la résidence
définitive, où nous ferons éclater la lumière de la foi et de la connaissance. Les
deux marabouts suivirent la marche de la gourde. Les deux hommes continuèrent
leur chemin, toujours, ils suivirent la gourde magique. Celle-ci finit par
s’accrocher à un ‘’ Kundu’’ (l’herbe aquatique du fleuve) ; Cette herbe donne le
‘’ Burgu ‘’ dont on nourrit les chevaux) au large de l’île sur laquelle est bâtie la
ville actuelle de Say. Ce fut Mahaman Diobbo qui vit le premier la gourde. Il dit à
Boubacar :
* Voilà notre ‘’chose‘’ que nous avons mise à l’eau à Neni. Elle est accrochée au
‘’Kundu’’, devant nous là-bas. Boubacar comme surpris cria : Saayi- Saayi !
Puis revenant de sa surprise, il continua de dire en peul :
* Saayi- Saayi! Doo woni saayi! Saayorde diina ! (ouverture – ouverture c’est ici
l’ouverture- le centre bouillonnant de la diina, c'est-à-dire de l’Islam et de la
connaissance).

1 - Entretien avec Seybou Hamidou le 22/11/07 à Niamey.

156
* C’est là que nous construirons, c’est là que tu allumeras le feu de ton auréole
qui attirera toutes les populations de la rive droite du Niger.
Les deux marabouts firent accoster leurs pirogues. Ils ordonnèrent à leurs hommes
de débroussailler l’île à laquelle Boubacar donne le nom de Saayi d’où Say»
(Hama, 1969(a) : 54-56).

- La deuxième version rapportée aussi par Boubou Hama donne une autre

«variante» de la signification de ce nom. Selon cette version, les deux ouléma étaient

arrivés au niveau de Say sous un orage. A la fin de l‟orage, Mahaman Diobbo dit à

Boubacar : «Younde Saayi,(l’orage s’est dissipé). Après cet orage, les deux amis arrêtèrent

alors là, leur long exode. Ils appelaient l’endroit Saayi d’où Say » (Hama, 1969 :57).

- La troisième version, avance que le nom Say dérive de l‟arabe „‘Cha’’a ou

chance. Ainsi „‟ cha’a „‟ devient Say. En effet, „‟Saaya’‟ en Zarma et „‟Saa’a‟‟ en peul,

signifie chance et sont empruntés à l‟arabe.

- Selon la tradition locale, il quitta le Macina (Mali actuel) au début du XIXe siècle,

séjourna successivement à Ouadalan (canton d‟Arbiden- cercle de Dori), Larba-Birno

(Dargol), Kapporé, Digué, Neni-Goungou et Goudel avant de s‟installer définitivement

vers 1825 sur l‟île de Say où il trouva un pêcheur du nom de Albarka Toka. Les premiers

mots qui sortirent de sa bouche furent : „’Saayi doo wooni saaye diina’’ ; (ce lieu s‟appelle

Say et sera le point du départ du rayonnement de l‟islam). Et depuis lors Say, devient la

plaque tournante de l‟érudition pour des milliers de disciples et lettrés musulmans, un pôle

d‟attraction politique, social, religieux et économique.

- Enfin, sur la carte de l‟itinéraire suivi par Mahaman Diobbo, on voit une ville au

Sud- est du Macina, non loin de Djenné, qui porte le nom de Say. L‟existence de cette ville

dans le pays d‟origine de l‟érudit, nous laisse supposer que Say doit être une répétition du

nom de la ville natale de cet alim. En effet, la plupart des auteurs confirment que ce dernier

est originaire du Macina. Leurs versions, l‟itinéraire suivi par cet érudit et le fait que nous

ayons plusieurs exemples dans la sous région : Nikki (Niger) et Nikki (Benin), Bodinga

157
(Niger) et Bodinga (Nigeria), Kounari (Niger) et Kounari (Mali)…, nous pousse à soutenir

la thèse selon laquelle, Say est le nom de la ville natale de Mahaman Diobbo.

158
Carte N°7: Itinéraire de Mahaman Diobbo

159
L‟histoire de la gourde magique, indiquant les sites d‟accueil aux populations qui

émigrent est très ancienne. On la retrouve dans les traditions orales de plusieurs localités

de l‟Ouest du Niger : N‟Dounga- Saney, Bittinkodji, Sinder….. Quelle est sa signification

exacte ? D‟après Alkali Amadou Tidjani : «Il s’agit d’une gourde dans laquelle un lettré

musulman fait des incantations afin que Dieu fasse pour le groupe en déplacement, le

choix du site propice à l’épanouissement de la communauté. Et généralement, ce choix

s’avère le meilleur »1. Mais à notre avis comme la référence à la thèse orientale, il s‟agit là

d‟un moyen pour les nouveaux arrivants de donner un certain pouvoir magico- religieux à

leur autorité.

II- La date de la création de la ville de Say et l’occupation du site

1- La date de la création de la ville

Trois dates sont avancées pour situer la création de la ville de Say. Selon

Maikoréma Zakari, Say serait fondé vers 1812 (Zakari, 2007: 96). Boubou Hama (1967) et

Diouldé Laya (1991) avancent la date de 1816. Balogun avance aussi la même date : « He

probably settled permanently at Say about 1816 » (Balogun, 1970: 115). Traduction : [Il

s‟est probablement installé à Say de manière définitive vers 1816]. Selon Lem et la

tradition locale, Say serait fondé vers 1825 : « En 1825, Diobo descendant le fleuve avec sa

suite de talibé s’arrêta en face de Say, qui lui parut une région fertile » (Lem, 1943 : 67).

Taillebourg2 et Moulaye Hassane donnent également l‟année 1825, comme date de la

fondation de la ville de Say : « Après avoir séjourné à Neeny et à Goudel, séjour dont la

durée n’est pas précisée, Diobbo et son entourage continuèrent de descendre le courant en

pirogue. Ils arrivèrent un soir de 1242/1825 à hauteur de l’île qui allait abriter Saayi »

(Hassane, 1995 : 30).

1- Entretien avec Alkali Amadou Tidjani à N‟Dounga le 01/04/11.


2 - Archives des Etudes Nigériennes no 16 (IRSH) : Historique du cercle de Say par Taillebourg, 1912, p. 11.

160
Les recoupements des évènements qui ont marqué les relations entre Say et ses

voisins, nous poussent à soutenir la version selon laquelle cette ville serait fondé en 1825

car selon la plupart de nos informateurs, Mahaman Diobbo a vécu neuf années seulement

dans cette cité avant de rendre l‟âme. Son fils, Boubacar a accédé au pouvoir en 1835

(Hassane, 1995 : 80). Les différentes sources que nous avons recueillies indiquent que

Guéladio a trouvé Mahaman Diobbo au pouvoir : « Après sa reconversion à l’islamisme

par le marabout de Say, celui- ci réclama à Guéladjo, en plus des cadeaux rituels, son

magnifique cheval. Le nouveau converti, hautin refusa de se séparer de son coursier. Alfa

Maman Diobbo ne lui tint pas grief » (Dionmansy, 1959 : 6). L‟érudit de Say selon la

même source serait mort, un (1) an après l‟installation de Guéladio sur le site d‟accueil

(1834). Selon Loyzance, il serait arrivé vers 1834 et aurait trouvé l‟érudit de Say au

pouvoir :

« Lorqu’en 1820 Galadio, chef de Kounari, eut été définitivement vaincu par Sekou
Hamadou, qui s’était emparé du commandement du Macina, il partit avec la
plupart de ses gens dans le Liptako, puis vers 1834 résolut de se rendre auprès
d’Ousman Dan Fodio, chef de Sokoto. Il se mit donc en route sur Say, et y
rencontra le marabout Mohaman Diobbo. Ce dernier au nom de Abdoulaye, chef
de Gwandou, lui remit la région jadis occupée par les Foulmanganis. Galadio fit
venir les gens de la fraction qui se trouvaient encore à Dori et fonda l’actuel
village de Gueladio »1.

Mais, selon Balogun, le Kounari serait fondé vers 1833: « Like the other emirates,

Kunari was established about 1833 by entering into an agreement with Gwandu»

(Balogun, 1970: 119- 120). Traduction: [Comme les autres émirats, Kounari avait été

établi vers 1833 avec l‟accord de Gwandou]. Si Mahaman Diobbo était décédé au cours

de l‟année 1834, après avoir vécu neuf (9) durant à Say, il serait arrivé dans cette localité

vers 1825. Certains évènements ayant marqué l‟histoire du Dallol, nous permettent de

retenir cette date. L‟exil de Boubacar Louloudji par exemple d‟après la tradition locale a

1 - ANN- 16-1-1 : Notes sur Peuls et Goumantchés de la région de Say, 1919, p. 8.

161
duré plus de dix ans (13 ou 14 ans). La prise de Garouré selon Soumana Harouna (1985)

date de 1811. Il aurait rejoint Mahaman Diobbo à Gaoudel vers 1814. Les deux érudits ont

vécu ensemble deux ans à Larba – Birno. Ils ont quitté cette localité vers 1817 pour

s‟installer à Neni :

« De Botou, Boubacar Loudoudji se rendit à Mallèle d’où il gagna ‘’Gaoudel’’


(Tillabéry) où il contacta Alfa Mahaman dont il entendit parler depuis Niki.
A’’Gaoudel’’, il demeura 3 mois environ avec Alfa Diobbo. Boubacar proposa de
continuer, avec lui, son voyage vers l’Est. Ainsi, de Gaoudel, les deux hommes
vinrent dans le canton de Dargol, où ils s’installèrent dans le village de Larba-
Birno. Pendant les deux années de leur séjour à Larba, les deux marabouts
essayèrent vainement d’islamiser les Songhay de cette région ( ). La ‘’non
islamisation’’ des Songhay et leurs pillages fréquents obligèrent les marabouts à
quitter Larba- Birno. Ils continuèrent toujours à l’Est jusqu’à ‘’NENI’’ »
(Hama, 1969 (a) : 34).

Après avoir séjourné sept (7) ou dix ans (10) ans durant à Neni, ils quittèrent

cette île pour s‟installer à Say au début de l‟année 1825. A Say, Boubacar Louloudji ne

resta que deux (2) ans durant. Il quitta cette ville vers 1827, pour s‟installer à Tondifou où

il était resté quatre (4) ans avant de créer Tamkalla dans le Dallol. Si on retient la date

1825, comme celle de la création de la ville de Say, Tamkalla serait fondé vers 1832. Cette

date est vraisemblable car après recoupement des sources, Boubacar Louloudji aurait

quitté Tondifou vers 1831 pour Tamkalla au cours de l‟année suivante vers 1832. Il

n‟avait vécu que sept (7) mois seulement dans cette ville car il mourut au cours de la même

année. Tous les témoignages que nous avons recueillis dans le Dallol affirment

qu‟Aboulhassane a accédé au pouvoir quelques mois après la mort de son père, en 1833.

2- L’occupation du site

Say est une île située sur la rive droite du fleuve Niger à 54 kilomètres de Niamey,

dans une zone basse où un bras du fleuve coupe la ville de la terre ferme pendant la période

de crue. Pendant l‟étiage, ce bras du fleuve se transforme en véritable marécage. C‟est sur

162
une partie de ce bras qu‟est réalisé l‟aménagement hydro- agricole actuel de Say. Avant

l‟arrivée de Mahaman Diobbo, la zone était habitée par les populations Gourmantché.

Mais, les quelques maigres renseignements que nous avons reçus à ce sujet ne nous

permettent pas de dater avec exactitude leur installation dans la zone. Selon A. Loyzance :

« Ils se seraient installés dans la première moitié du 16è siècle. Ces Gourmantchés ont été

repoussés vers le Sud-ouest actuel par les peuls Bittinkobés lors de leur installation »1.

Tous les auteurs qui ont traité la question du peuplement de la zone affirment l‟antériorité

de la présence des Gourmantché dans cette partie de l‟Ouest Niger. Selon Saka Balogun,

cette communauté a précédé tous les autres groupes ethniques vivant dans cette zone:

« Available evidence strougly suggests that the Gurmawa inhabited, before the
other ethnic groups, most of the area now populated by the Cengawa, Songayawa,
Arawa, Kurfawa and Zabarmawa in the Dendi region of Nigeria, the south-
western part of the Niger Republic and the South- eastern extreme of upper Volta.
When the Gurmawa occupied the area is not known. It is certain, however, that by
the sixteenth century or even before, they were already scattered in small groups
all over the area» (Balogun, 1970 : 27).

Traduction: [Des preuves disponibles appuient fortement la thèse selon laquelle, les

Gourmantché auraient habité bien avant les autres groupes ethniques, la plupart des zones

peuplées de nos jours par les Tchangawa, les Soηey, les Arawa, les Kourfayawa, les

Zarma, dans les régions Dendi du Nigeria, la partie Sud- Ouest de la République du Niger

et l‟extrême Sud- Ouest de la Haute- Volta. La période pendant laquelle les Gourmantché

ont occupé cette zone demeure inconnue. Il est cependant, certain que dès le XVIe siècle,

ou même avant, ils étaient éparpillés en petits groupes dans toute la zone]. Il est donc

incontestable que les Goumantché sont les premiers occupants de la région mais, ni la

documentation disponible, ni les enquêtes que nous avons menées sur le terrain ne nous ont

permis de préciser la date exacte de leur arrivée dans cette zone. Ce qui est sûr, avant

l‟arrivée de Mahaman Diobbo à Say, les Gourmantché avaient déjà été refoulés plus à

1- ANN --16.1-1. Notes sur les peuls et les gourmantchés de Say par A.Loyzance, SD, p. 1.

163
l‟Ouest par les Peul Bittinkoobé : « Ces Bitinkobé, déjà fervents adeptes de l’Islam, plus

nombreux, plus forts, imposèrent leur religion et exercèrent pendant longtemps une lutte

implacable contre les populations fétichistes locales rebelles à l’Islam » (Lem, 1943 : 59).

Selon la tradition locale de Say, à son arrivée sur le site, Mahaman Diobbo n‟a

trouvé qu‟un pêcheur du nom d‟Albarka Toka et sa famille. Après avoir accosté sur l‟île,

l‟érudit et sa suite débroussaillèrent l‟endroit et commencèrent la construction de leurs

maisons. Pour certains, c‟est le souverain de Jangoré qui autorisa le religieux à s‟installer

sur l‟île ; pour d‟autres celui de Lontia. Dans tous les cas, les populations des deux villages

appartiennent à la même famille. Après avoir fini de débroussailler, Mahaman Diobbo et

ses disciples s‟installèrent d‟abord au bord du fleuve où il fit construire la première

mosquée de la ville de Say, à quelques mètres de la rive du fleuve. Cette mosquée se

trouve actuellement au quartier Bolonguièye de Say. Il faut noter au passage qu‟elle a été

plusieurs fois reprise. Quant à Boubacar Louloudji, il s‟installa un peu plus loin du fleuve.

L‟emplacement du modibbo Dallol s‟appelle Jama‟aré (c‟est sur ce site que se trouve le

quartier actuel de Modibadjé) à coté du quartier Zooronay, créé par Alfa Adamou.

L‟emplacement initial du quartier Modibadjé se trouvait à coté de la grande mosquée

actuelle de Say. C‟est l‟administration coloniale qui procéda au déplacement de certains

quartiers de la ville pour s‟y installer.

Peu après son installation au bord du fleuve, divers groupes ethniques venus surtout

de l‟Ouest s‟installèrent à côté de cet érudit. Devant l‟afflux des nouveaux venus,

Mahaman Diobbo dut leur céder la place pour s‟installer plus à l‟Ouest sur le site actuel de

Faada-Béri. C‟est là qu‟il commença l‟édification de la deuxième mosquée de Say dont la

construction ne sera effective que sous le règne de son fils et successeur, Boubacar. Elle est

actuellement la mosquée principale de la ville de Say. Ainsi, les quartiers de la ville se

multiplièrent. Avec l‟afflux des gens, outre les quartiers principaux créés par les trois

164
ouléma : Faada-Béri par Mahaman Diobbo, Jama‟aré par Boubacar Louloudji, Zooronay

par Alfa Adamou viennent s‟ajouter ceux créés par les populations des différentes

communautés qui ont rejoint l‟érudit : Bolonguièye, Goungo-Bon, Bonféba, Barma-

Goura.

Le lettré musulman s‟est installé d‟abord au bord du fleuve. Après l‟abandon de cet

endroit par Mahaman Diobbo, son piroguier, Oussou et sa famille y élirent domicile. Ainsi,

fut créé le quartier Bolonguièye. Quant à Goungo-Bon, il est créé par une partie de

l‟équipe qui a suivi le lettré musulman jusqu‟à Say. C‟est un quartier peuplé en majorité

de Kourté. Il compte également en son sein des Wogo et des Zarma-Soŋey. Goungo-Bon

est un nom composé de ‘’Goungou’’ signifie en zarma „‟l‟île‟‟ et „’Bon’’, signifie

„‟dessus‟‟ donc Goungo-Bon signifie „‟sur l‟île‟‟. Il faut signaler que le site initial de ce

quartier se trouvait derrière la préfecture actuelle de Say. Bonfeba est créé par des Peul

Sillantché mais il n‟existe plus de nos jours. Ce groupe a quitté Say pour s‟installer dans le

Dallo-Bosso. Barma-Goura, prolongement sud de Say, est créé par Barma, un guerrier

originaire de Hondobon ; village situé à 5 kilomètres de Gothey sur la route de Téra. Ce

quartier aussi a disparu parce que devant le refus de l‟érudit de faire la guerre, Barma est

retourné dans son village natal car c‟est un guerrier qui n‟a d‟autres activités que celle-ci.

L‟ensemble de ces quartiers forme le premier village de Say qui deviendra très tôt une

ville à cause de l‟afflux des gens, du développement des activités agro- pastorales et

commerciales. C‟est pourquoi, après l‟installation de Mahaman Diobbo à Say, plusieurs

communautés vont venir s‟installer à côté du vénérable alim.

III- Mahaman Diobbo : l’homme, l’environnement social et intellectuel

Ce lettré musulman originaire du Macina va marquer l‟histoire de l‟Ouest du


Niger grâce à son option pour un islam tolérant et un mode d‟islamisation par la voie
pacifique.

165
1- L’origine sociale de Mahaman Diobbo

On ne saurait parler de Say sans évoquer le nom du vénérable alim, du nom de

Mahaman Diobbo. Selon la tradition locale, cet intellectuel musulman soufi de la confrérie

« Qadriya », serait d‟origine arabe. Son père, Boubacar Salihou et sa mère Ramatoulaye

auraient quitté leur ville natale, Sardadine (à coté de Médine) à la suite d‟une sécheresse

vers le XVIIème siècle pour venir en Afrique. Après avoir traversé la Syrie, le Maroc,

l‟Algérie, la famille s‟installa dans la région du Macina (Mali actuel) où son père trouva la

mort. Il serait né dans cette localité. Il faut signaler à ce niveau, que cette référence à

l‟origine orientale des communautés musulmanes dans l‟espace nigérien n‟est pas

spécifique à la famille de l‟érudit de Say. En effet, presque toutes les grandes familles

musulmanes d‟Afrique ont conservé dans leurs traditions, cette version qui fait venir le

fondateur d‟Orient. Cette thèse vise à donner un cachet de légitimité à sa mission.

Mais, en réalité, Alfa Mahaman Diobbo est un peul originaire du Macina. Son père

s‟appelle Boubacar et Salihou est le nom de son grand père. Diobbo est « son surnom, en

référence à la colline où il se retirait pour ses invocations nocturnes (wird) » (Hassane,

1995 : 15). Il aurait quitté cette région dans la seconde moitié du XVIIIe siècle pour

effectuer son pèlerinage à la Mecque selon certaines sources, et pour d‟autres pour

accomplir une mission, ‘’dontoni’’ en zarma. Il séjourna dans plusieurs localités (Gao,

Dori, Larba- Birno, Neni…..), avant de s‟installer définitivement à Say.

2- Les versions des différents auteurs sur ses origines.

Au niveau des sources écrites, les versions pour situer l‟origine de Mahaman

Diobbo restent vagues et contradictoires. Yves Urvory (1936) dans son ouvrage, écrivait

ces quelques lignes sur l‟origine du fondateur de Say : «La ville fut fondée dans les

dernières années du XVIIème siècle par Alfa Mahaman Diobbo c’était un marabout

166
originaire du Macina ; où il vivait avec sa famille» (Urvoy, 1936 :75). La période qu‟il

avance ne se justifie pas car tous les auteurs sont unanimes à reconnaître que la ville de

Say fut fondée au début du XIXe siècle et non à la fin du XVIIe siècle. Dans la

monographie de Say de 1915 (anonyme), Mahaman Diobbo est présenté comme un Peul

originaire du Fouta Djalon. Le capitaine Salaman quant à lui, le présente comme un Peul

originaire du Sénégal :

«Vers la fin du 18e siècle , une partie de la famille de Dem que l’on peut
considérer comme la famille royale du Fouta , quitte les rives du Sénégal avec une
famille nombreuse : Arrivée à Say, la caravane s’y arrête et une partie s’était
installée définitivement sous le commandement de Mahaman Diobbo : ce dernier
prit vite de l’influence, marabout lettré, il acquit aussitôt dans le pays la réputation
d’un homme sage et prudent. Dans ce pays où la religion musulmane était
d’importation récente, l’arrivée d’un vrai marabout, homme de bon conseil,
connaissant le Coran et sachant l’interpréter, fut événement. Mahaman Diobbo
laissa accréditer la légende qui disait qu’il était un chérif : les chérifs
appartiennent à la descendance de Fatima ; la fille préférée de Mohammed »1.

Le capitaine Salaman non plus ne lève le voile sur l‟origine de l‟érudit. Les auteurs

nigériens qui ont écrit sur l‟histoire de Say comme Boubou Hama, Moulaye Hassane, n‟ont

pas tracé l‟arbre généalogique de Mahaman Diobo même si la plupart reconnaissent qu‟il

est originaire du Macina.

Une autre version sur l‟origine de l‟alim, est celle de Mahaman Alio qui écrivait

ceci: « Alfa Mahaman Jobbo said to have been born at Bamba ; Kooro-Gounga or Jenne

the traditions are very vague on this Diobbo matter » (Mahaman, 1997 :113).Traduction :

[On dit qu‟Alfa Mahaman Diobbo est né à Bamba; à Kooro- Goungou ou à Djenné. Les

traditions restent vagues en tout ce qui concerne Diobbo]. Quant à kimba Idrissa; il donne

la version suivante dans son ouvrage : « Mahaman Diobo ; fils de Boubacar Peulh

originaire de Macina ; naquit à Bamba près de Gao... » (Idrissa, 1981 ; 45). Moulaye

Hassane souligne cette confusion autour des origines de Mahaman Diobbo en ces termes :

1- ANN - 15.1-2. Notice sur le cercle Djerma et historique du cercle par le Capitaine Salaman, 1903-1904,
P. 1.

167
«Plusieurs lieux de naissance sont rapportés : Bamba pour certains, Kooro-
Goungou (île sur le fleuve non loin de Gao) pour d’autres ou Djenné…Quant à sa
date de naissance, elle n’est mentionnée nulle part, les indications approximatives
que nous avons pu trouver la situent à la fin du 18ème siècle..» (Hassane, 1995 : 16).

Ces propos de Moulaye Hassane résument tout sur l‟état des connaissances sur la

question. L‟analyse des différentes versions et des traditions recueillies sur place ainsi que

l‟itinéraire suivi par cet érudit permettent d‟affirmer sans risque de nous tromper que

Mahaman Diobbo est originaire du Macina (Mali actuel) :

« J’ai rencontré un député originaire du Macina lors d’une de nos missions


parlementaire à Bamako, un Cissé qui a exprimé le désir d’avoir un entretien privé
avec moi. Lors de notre conversation, il m’a posé des questions sur mes origines.
C’est à travers mes réponses qu’il a pu identifier la famille à laquelle j’appartiens.
Il m’a confirmé que les descendants des frères et cousins de Mahaman Diobbo sont
vivants et qu’ils forment une grande famille. Il m’a indiqué le nom du quartier
qu’ils habitent et m’a invité par la même occasion à leur rendre visite. Je lui ai
promis de m’y rendre mais malheureusement plusieurs contraintes m’ont empêché
d’effectuer le déplacement »1.

Mahaman Diobbo est originaire du Macina comme le soulignent la plupart des auteurs et

serait né à Say (Mali actuel) comme l‟indique la carte de son itinéraire.

Avant d‟entamer nos recherches sur le terrain, nous étions confiant quant à

l‟existence de documents écrits sur l‟histoire du centre d‟études islamiques de Say vu sa

renommée dans notre zone d‟étude. Mais, ce qui nous a surtout surpris une fois sur le

terrain, c‟est le manque de manuscrits dans cette ville. Pourtant au XIXe siècle, d‟après

certains témoins et certains explorateurs comme Toutée, Gironcourt, cette ville comptait

un nombre significatif de lettrés musulmans de haut niveau. Normalement, il devait y avoir

une masse critique de documents en langue arabe. Lors de nos entretiens, tous nos

interlocuteurs ont confirmé l‟existence de ces écrits dans le temps mais selon eux, ils ont

tous disparu. Selon Soumana Nouhou : « Il y avait le Tarikh de Say, écrit par Alfa

Mahaman Diobbo lui-même. Et dans ce document, il y avait l’histoire de sa famille. Mais

1 - Entretien avec Alzouma Bazi Cissé, infirmier à la retraite le 01/08/12 à Niamey.

168
par suite de négligence de la part de nos parents, ce tarikh a disparu »1. Cette version a été

confirmée par Alzouma Bazi Cissé, infirmier à la retraite et ancien député national ainsi

que plusieurs ouléma que nous avons interrogés sur place.

3–La construction du personnage

Mahaman Diobbo aurait été d‟abord formé dans l‟école coranique de son père,

Boubacar. Après ses études auprès de celui- ci, il quitta le Macina pour Gao afin de

parfaire ses connaissances religieuses. Par rapport à son intelligence, nous avons recueilli

plusieurs témoignages parmi lesquels celui d‟Abdoulsalam Soumaila, petit fils d‟Alfa

Adamou, compagnon de Mahaman Diobbo :

« D’après ce que mon père m’a rapporté, lui aussi tient cette information de ses
parents, Mahaman Diobbo était très brillant. Il a eu à le démontrer lors de sa
rencontre avec Sorry Beldo Hooré, l’un des plus remarquables Alfa de la zone
avant l’avènement du Jihad. Pour tester son niveau, cet érudit l’a soumis à
plusieurs épreuves (lecture et commentaire de documents religieux) et il a pu
surmonter ce test en lisant et en commentant avec une certaine aisance tous les
documents qui lui ont été soumis »2.

Pour approfondir ses connaissances, il quitta son village natal pour Gao, rappelons- le, un

des grands centres d‟études islamiques de la région à l‟époque :

« Il quitta son village natal, semble- t- il, pour Gao où il se fixa un certain temps
peut – être pour approfondir ses études, car il est de tradition en Afrique sud-
saharienne que le disciple, une fois entamée la lecture du Coran, change de maître
et même de village. Il part à la recherche d’autres expériences lui permettant
d’acquérir des méthodes diverses. Cette tradition lui facilite également
l’acquisition des connaissances aussi bien religieuses que sociales » (Hassane,
1995 : 17).

1- Entretien avec Soumana Nouhou à Say le 23/10/07.


2 - Enretien avec Abdoulsalam Soumaila, Imam de la mosquée de Zooronay à Say le 12/12/2007.

169
Mais, la tradition locale reste muette sur les noms des maîtres qui l‟ont formé après son

père. Selon Moulaye Hassane, le nom d‟un seul enseignant a été retenu, il s‟agit d‟Alfa

Bandjagouri qui serait originaire de Tirga (Hassane, 1995 : 16).

4- Mahaman Diobbo, apôtre de la non violence

Mahaman Diobbo est issu d‟une famille de lettrés musulmans du Macina. Parmi les

membres de sa famille, son père reste incontestablement celui qui a eu une grande

influence sur le personnage :

« Mahaman Diobbo tient en grande partie son pacifisme de son père. Ce dernier
est un partisan de la non violence. Il a enseigné à son fils dès son jeune âge ses
vertus. Malgré ses qualités intellectuelles exceptionnelles, Mahaman Diobbo était
calme et moins bouillonnant que les jeunes talibé de son âge. Pour son père, un
bon alim est celui qui évite la bagarre, les ‘’on dit’’ bref tous les comportements
négatifs que Dieu stigmatise dans le Coran »1.

Imbu des théories pacifistes de son père, Mahaman Diobbo va quitter le Macina pour un

long périple qui va le conduire dans plusieurs localités avant son installation définitive à

Say.

Au cours de ces différentes escales, il a rencontré plusieurs érudits (Tondo Djalley,

Alfa Lamine, Sorry Beldo Hooré, Alfa Adamou, Boubacar Louloudji…). Tous ces lettrés

musulmans ne se sont pas directement impliqués dans le Jihad, excepté Boubacar

Louloudji. La différence de caractère entre l‟alim de Say et ce dernier poussa les

populations de Neni à qualifier le premier d‟Alfa Gouma, c'est-à-dire le marabout discret et

le second Alfa Hotta qui signifie, le marabout chaud.

Tondo Djalley et son compagnon Alfa Lamine sont partisans de la non violence.

C‟est pour fuir la violence qu‟ils quittèrent leur terre natale, Bourra pour s‟installer sur l‟île

de Sinder. Sorry Beldo Hooré est le fondateur du centre d‟études islamiques secondaire de

1 - Entretien avec Alzouma Bazi Cissé, infirmier à la retraite le 01/08/12 à Niamey.

170
Tirga. De son vrai nom Boureima Boukari, il doit son surnom à sa bonté. Sorry Beldo

Hooré signifie un chanceux, en un mot quelqu‟un de bien. Selon les témoignages recueillis

à Tirga et à Say, c‟est lui qui a initié Mahaman Diobbo à la Qadriya. Quant à Alfa

Adamou, il est l‟ancêtre des habitants du quartier Zooronay de Say. Il est connu grâce à

son profond attachement à la paix. Son arrière petit fils (l‟ancien président de l‟Association

Islamique du Niger), feu Alfa Oumarou Soumaila a surtout brillé dans ce pays à cause de

son profond attachement à un islam tolérant. Tous ces érudits que Mahaman Diobbo a

rencontrés et avec lesquels il a échangé ont contribué à la construction du personnage. Ils

l‟ont renforcé dans son élan pacifiste faisant ainsi de cet alim, un véritable apôtre de la non

violence.

IV- L’organisation du centre d’études islamiques

1- L’installation de l’érudit à Say

Selon Séré De Rivières, Say avait pris de l‟importance bien avant l‟arrivée de

Mahaman Diobbo sur le site : « Say avait toujours eu une importance politique. Askia

Mohamed (XVe siècle) en avait fait le chef lieu administratif de la région, en y installant

une garnison militaire. » (Séré De Rivières 1965 : 92). Cette version n‟est soutenue par

aucun autre auteur et tous les informateurs que nous avons interrogés à Say et dans les

villages environnants affirment n‟avoir jamais entendu parler de l‟existence de cette

garnison. L‟auteur a dû certainement confondre la ville de Say située dans l‟Ouest du

Niger à celle qui porte le même nom et qui est située au sud de Mopti (Mali actuel) qui a

probablement joué ce rôle.

Avant l‟arrivée du saint homme à Say, le site était très peu connu des populations de

l‟Ouest du Niger. Mais, avec l‟installation de Mahaman Diobbo sur l‟île, sa sainteté ainsi

que son sens élevé de justice et d‟équité vont attirer de nombreuses populations : le site

171
devient, en peu de temps, le foyer intellectuel et commercial le plus important de l‟Ouest

du Niger. Il faut signaler à ce niveau que les terres de Say appartenaient au chef de Lontia 1.

Selon Alzouma Bazi Cissé :

« Alfaga après sa brouille avec les Bittinkobé de Lamordé va quitter l’île de Neni
pour s’installer à Goudel où il sera chaleureusement accueilli par le souverain de
ce village. C’est de cette localité qu’il a envoyé des émissaires auprès du dirigeant
de village de Lontia afin qu’il accepte son installation ainsi que celle de sa suite
sur les terres de Say. Le souverain de Lontia a accepté avec plaisir l’arrivée d’un
érudit sur ses terres. Comme on le constate, ce sont les autorités de Lontia qui ont
placé Mahaman Diobbo sur leurs terres et non celles Gwandou. D’ailleurs celui-ci
n’a jamais cherché à se faire nommer Amirou par Gwandou »2.

Contrairement à la plupart des grands intellectuels musulmans de son époque qui étaient

contraints d‟entreprendre le Jihad pour répandre l‟islam, Mahaman Diobbo opta pour une

adhésion à l‟islam par la persuasion et le consentement volontaire du fidèle. Cette attitude

pacifiste fait la singularité de ce lettré musulman surtout pendant ce siècle dominé par des

guerres. Il fit de Say un véritable havre de paix, un carrefour sur le plan religieux et

commercial. La ville devient ainsi le centre d‟études islamiques le plus important de

l‟Ouest du Niger.

2- Les institutions du centre d’études islamiques de Say

a- L’organisation religieuse

Alfa Mahaman Diobbo transforma la cité en un véritable carrefour sur le plan

religieux. Malgré les crises du XIXe siècle, il opta pour un islam tolérant, car pour cet

alim, la foi étant avant tout une affaire de cœur, le prêche est certainement un moyen

plus efficace (que la sagaie) pour amener les gens à l‟islam. Son profond attachement à un

islam tolérant, il l‟exprime dans cet extrait tiré du poème 1 (Uruufaba) de notre corpus en

ses vers 100 à 110 :

1 - Lontia : Village à cinq (5) kilomètres de Say sur la route principale, Niamey- Say.
2 - Entretien avec Alzouma Bazi Cissé, infirmier à la retraite à Niamey le 01/08/12.

172
kuba tamgam Bamba kayri1 Ukuba combattit et défie Bamba

Bamba banda Gulbi kayri Après Bamba Goulbi tomba

Gulbi banda Koyri kayri Après Goulbi Koyri tomba

Koyri banda Jaaja kayri Après Koyri Jaaja tomba

Diina yulwa Ukuba zamana Et la foi prospéra du temps d‟Ukuba

Ukuba banda fatara foka Après Ukuba vint une période

Fuutu cindo zammana na ika Certains du Fouta apostasièrent

Melle cindo zammana na ika Certains de Melle apostasièrent

Gibla cindo zammana na ika Certains de Gibla apostasièrent

Diina ra ihun Ukuba banda La religion relâcha après Ukuba 2

La première strophe montre les succès fulgurants d‟une armée islamique conduite

par Uqba Ibn Nàfi‟ dans le cadre d‟une conquête ; une véritable collection de victoires. Par

contre, la seconde strophe est d‟un tout autre ton : l‟apostasie massive est tout aussi rapide

que la conversion, sitôt que la contrainte cessa. Ce qui aboutit à un relâchement total de la

religion. Ce chant religieux justifie l‟option du fondateur de Say pour une conversion

volontaire du fidèle. Selon Alzouma Bazi Cissé :

« Si Mahaman opta pour la conversion volontaire, ce n’était point faute de moyens


de faire la guerre. Des guerriers lui ont plusieurs fois proposé de constituer une
armée à son service (qui pour diffuser l’islam, qui par appât de butin). Mais,
jamais il ne les accepta. L’île de Barma Goura, située à quelques kilomètres en
aval de Say, porte le nom d’un chef de guerre (Barma), originaire de Hondobon
(canton du Kourté actuel) ; il suivit longtemps Alfa Mahaman Diobbo espérant le
convaincre de l’utilité de son art. De guerre lasse, il capitula et quitta Say. Des
chefs de guerre de Dantchandou, Kotaatchi, Dar Esalam auraient aussi fait, en
vain, des propositions similaires à l’érudit de Say »3.

1-Chant religieux composé par Alfa Mahaman Diobbo et recueilli par Diouldé Laya auprès d‟Alfa Agano en
1968.
2 - Ukuba : Il s‟agit du conquérant arabe Uqba Ibin Nàfi‟ al-Fihri qui a entrepris une expédition en 666 dans
le Fezzan(Libye) puis dans le Kawar (Niger).
3 - Entretien avec Alzouma Bazi Cissé, infirmier à la retraite à Niamey le 01/08/12.

173
En fait, la lecture d‟un seul de ses poèmes suffirait à convaincre le lecteur du profond

respect que Mahaman Diobbo avait pour toute forme de vie, humaine, animale ou végétale.

La ville de Say est avant tout une cité religieuse, son organisation aussi a une base

religieuse. Le fondateur du centre n‟a jamais voulu porter le titre d‟Amirou et il s‟est

toujours fait appeler „‟ Modibbo „‟ qui signifie littéralement marabout. Mais, comme tout

groupement humain suppose une organisation, Mahaman Diobbo a mis en avant la

religion pour organiser sa communauté. Il est chef religieux, gardien de la foi islamique. Il

dirige lui-même les prières et veille au respect des règles de l‟islam sur l‟ensemble du

territoire. Il nomma un suppléant en la personne de Hama Hamsou, qui dirigeait la prière

en cas d‟empêchement du grand alim. Alfa Mahaman Diobbo est aidé dans sa tâche

religieuse par les imams de quartiers et les grands ouléma de la ville. Ces derniers ont

toujours été consultés par l‟érudit afin qu‟ils donnent leur avis sur les questions d‟intérêt

général. On distingue ainsi les dignitaires religieux suivants au niveau de la cour :

« Depuis sa fondation, jusqu’à la mort du père fondateur, Say donnait l’image d’un
foyer d’acquisition et de diffusion du savoir, géré par un groupe collégial de
personnalités religieuses. Ce groupe était dirigé par Diobbo, homme saint et
inspiré. Ce dernier présidait en personne le conseil et désignait les responsables de
la structure étatique qui, constituée de trois instances principales, était de
conception très simple :
A son sommet se trouvait, l’imam des imams en la personne de Diobbo, qui
déléguait son autorité à d’autres personnalités religieuses assumant le
fonctionnement réel de tel ou tel secteur. Lui-même gérait les questions à caractère
politique et diplomatique essentiellement les réconciliations entre les hommes, les
groupes et les régions proches ou lointaines. Il conférait également le rattachement
initiatique selon le rituel de la confrérie (Qâdirîya) dont il était le représentant
dans cette région » (Hassane, 1995 : 72 – 74).

Après ce grand imam des imams, il y a le cadi nommé par Mahaman Diobbo. Il

est chargé de faire appliquer la loi musulmane (Shari’a) en accord avec un Conseil

constitué de grands lettrés, spécialistes en jurisprudence musulmane de rite malikite. Dans

le souci de maintenir la cohésion sociale, l‟autorité religieuse de Say a fait cultiver l‟esprit

174
de tolérance et a impliqué les sages des différentes communautés vivant dans cette localité

dans la gestion des affaires politiques et juridiques. Ainsi, quand un différend éclate entre

deux membres d‟une communauté, les sages ont le devoir de trouver une solution

consensuelle. Ils procèderont à l‟interpellation des deux individus et leur demanderont

d‟exposer chacun sa version. Ils font tout pour rapprocher les points de vue afin de mettre

fin à ce différend. Mais, si les parties campent sur leur position, les sages feront appel au

dirigeant du groupement ou du village. A défaut d‟une solution, l‟affaire est portée devant

le cadi. Ce dernier juge les actes les moins importants chez lui dans sa „‟zaura1’’. Mais, les

actes graves et ceux n‟ayant pas fait l‟objet d‟un compromis, sont jugés à la mosquée

principale en présence du grand imam. C‟est une audience qui se fait en présence des

parents des personnes qui seront jugées :

« Le présumé coupable fait le lavage de purification puis les ablutions. On procède


à une dernière consultation pour faire comprendre aux parents la gravité de l’acte
que leur enfant veut poser et s’ils sont prêts à l’assumer. Si un des parents
s’oppose, il sera chargé de faire réparation en payant immédiatement ou en fixant
un délai d’un commun accord avec les juges, délai qu’il est sensé respecter. En
revanche, si les parents sont d’accord, il jurera de la façon suivante :
«Da ay ga taari
-Irkoy may lali, Alkuraana,
-Ma’ga massi’ibey
-Kan hunu weyne huney,
- Wala weyne kaney,
- Da azawa kambe,
-Da dandi Kambe,
Ma kan ay bon »

«Si je mens
-Que notre seigneur me maudisse au nom du Coran,
-Que les calamités venant du levant,
-Du couchant du soleil,
- Du nord et du sud,
Me tombent dessus ! » (Moulaye, 1995 :76).

Selon la croyance populaire, même si l‟auteur d‟un tel acte était innocent, il ne s‟en

sortirait pas indemne. C‟est pourquoi les gens dans la plupart des cas préféraient payer les

1 - Zaura signifie vestibule en langue française.

175
réparations plutôt que de laisser leurs enfants poser un acte aussi grave. Outre son rôle de

juge, le cadi dirigeait les cérémonies religieuses de mariage, de baptême. C‟est lui qui

présidait aussi aux funérailles lors des décès. Il était chargé de réconcilier également les

couples en cas de différend, mais il ne prononçait jamais de divorce, car ceci était du

ressort du grand imam des imams. Comme on le constate, le cadi jouait un rôle important

dans la communauté, c‟est pourquoi, il est le deuxième personnage après le grand imam.

La troisième personnalité est l‟imam désigné aussi par le fondateur du centre

d‟études islamiques de Say :

« Il dirige les prières quotidiennes à la mosquée principale, s’il le peut, ainsi que
la prière hebdomadaire (Salat al Gumma) et celles des deux fêtes annuelles
(Ramadan et adhâ). Il reste à la disposition des fidèles qui lui soumettent leurs
questions éventuelles, aussi bien sociales que religieuses » (Hassane, 1995 : 79).

Pour faire de Say un véritable foyer d‟acquisition et de diffusion du savoir

religieux, il a ouvert des écoles coraniques ‘’douddales’’ dans les quartiers de la ville de

Say. Dans ces écoles coraniques, les jeunes ‘’talibé’’ (écoliers) apprennent à lire le Coran

mais aussi à écrire. Il s‟agit non seulement des enfants de la ville de Say mais aussi de

ceux venus du territoire Kourté, du Soŋey, du pays Wogo, de Boumba…L‟activité

religieuse était surtout intense pendant la saison sèche. Pendant cette période les parents,

cultivateurs pour la plupart, confient les enfants aux ouléma, qui profitent de cette longue

saison pour venir à Say approfondir leurs connaissances. Les quartiers de la ville

rivalisaient dans la ferveur religieuse pendant cette période :

« Il y a même eu des écoles coraniques dirigées par des femmes où on enseignait


les jeunes filles et les femmes âgées. Les ouléma quant à eux, étaient formés dans la
cour de la grande mosquée. Cette cour était une grande école où les lettrés
musulmans venaient échanger leurs connaissances car il y avait plusieurs niveaux
d’enseignement. En effet, les ouléma étaient divisés en plusieurs groupes. Et, ils
étaient orientés dans les groupes en fonction de leur niveau et de leur spécialité.
Cette organisation permet non seulement aux érudits d’approfondir leurs
connaissances mais aussi d’échanger sur des questions religieuses importantes.
Ainsi, grâce à son talent, Alfa Mahaman Diobbo fit de Say, le centre islamique le
plus important de l’Ouest du Niger. En dehors de l’aspect religieux, ces rencontres

176
entre érudits permettent de tisser des relations ; donc de développer la solidarité
au sein de la communauté »1.

Dans la cour de la grande mosquée, il y avait un hangar et des arbres, les groupes d‟ouléma

étudiaient tantôt sous le hangar tantôt sous les arbres.

Ce qui fait la particularité du centre d‟études islamiques de Say, c‟est l‟attachement des

autorités aux valeurs islamiques. Le symbole du pouvoir est une «peau de prière» (peau de

mouton), ceci pour rappeler la mission religieuse de cette ville. En plus, les descendants de

Mahaman Diobbo qui se sont succédé au trône après sa mort portent tous le titre de

«Alfaizé» (terme Zarma-Soŋey qui signifie fils du marabout). Ce nom est choisi par l‟érudit

avant sa mort en vue de pérenniser l‟essence religieuse de sa cité. Ce titre est pédagogique

car il veut que ses successeurs gardent en mémoire, l‟origine de leur autorité qui se veut

avant tout l‟incarnation d‟un pouvoir religieux. Par conséquent, ils doivent se comporter

en véritables défenseurs de l‟islam.

b-L’organisation économique

Say est avant tout un centre d‟études islamiques qui n‟a ni armée, ni police.

L‟administration du pays est différente de celle des Etats centralisés. Une telle

organisation se contente de peu de ressources. En effet, Alfa Mahaman Diobbo est une

personnalité religieuse, désintéressée par le bien matériel. Durant les neuf (9) années qu‟il

a vécu à Say, il n‟a institué ni taxe, ni impôt. Il a simplement désigné un de ses

compagnons (la tradition locale reste muette sur son nom) pour surveiller le marché et le

fleuve dans l‟unique but de sécuriser la ville contre les pillards et de veiller à ce que les

marchands vendent leurs articles aux clients conformément aux règles de l‟islam. Les

1 - Entretien avec Alzouma Bazi Cissé, infirmier à la retraite à Niamey le 16/12/10.

177
ressources du centre d‟études islamiques au temps de Mahaman Diobbo sont constituées

essentiellement par les dons, l‟aumône légale ... :

« Celles- ci provenaient essentiellement de l’aumône légale que prélevait la


population de la cité et de ses environs après les récoltes composées de mil, riz ;
maïs, sorgho, et de fruits de cueillette. On ajoute à ces ressources les aumônes
provenant du commerce, les produits d’importation : coton, sel, dattes, cola,
métaux précieux, etc… » (Hassane, 1995 : 80 – 81).

Compte tenu de la personnalité du fondateur de la ville de Say, les présents venaient de

tous côtés. Et, comme Alfa Mahaman Diobbo est un pieux qui craint de commettre

l‟injustice, il a toujours chargé l‟imam en la personne de Hama Hamsou de procéder à la

répartition des présents. Ces quelques vers extraits du chant1 de notre corpus (vers 125

à 135), nous donnent plus d‟informations sur sa personnalité :

«Iri si te koy sonku tooŋe Nous ne serons pas souverain afin d‟éviter l‟injustice»

Iri si ciiti sonku tooŋe Nous ne serons pas juge afin d‟éviter les abus»

Iri si bolnay sonke tooŋe Nous ne serons pas marchand afin d‟éviter les provocations»

Iri heri fay sonke tooŋe Nous ne partagerons pas de bien afin d‟éviter les

provocations»

Sai fa waazu iri ma tuba 1” Uniquement les prêches nous conduisant à la soumission à

Dieu».

(Traduction Idrissa, 1981 : 46).

Mahaman Diobbo n‟a jamais, selon la tradition locale, touché aux biens destinés à la

communauté :

« Mahaman Diobbo a toujours vécu du fruit de son travail. Il se nourrissait du lait


de ses chèvres et d’autres biens qu’il recevait de la vente des cordes qu’il
confectionnait. Parfois, il reçoit des présents des souverains de la région qu’il

1 - Sonothèque de l‟IRSH : Chant recueilli par Diouldé Laya auprès d‟Alfa Agano en 1968.

178
partage avec sa communauté. Détenteur du pouvoir spirituel, Alfa Mahaman
Diobbo distribue aussi les terres à la population de Say. Et, chaque fois qu’une
nouvelle vague de migration arrive dans cette ville, il indique au leader du groupe
l’endroit où sa communauté doit s’installer ainsi que la portion de terres qu’elle
peut exploiter. Ainsi, à cause de cette attitude exemplaire de cet intellectuel
musulman, le nombre de nouveaux venus se multiplia, transformant ainsi le village
de Say en une ville carrefour »1.

Il faut rappeler à ce niveau que l‟autorité à Say fut d‟abord une autorité

religieuse avant de devenir politique. En tant qu‟autorité religieuse, elle n‟a pas de

notabilités aux fonctions précises comme il en existe dans les grandes entités politiques ou

même au niveau de certaines principautés. Il n‟y avait donc pas d‟institutions socio-

politiques et administratives. En effet, à sa création, Say était un lieu d‟apprentissage du

Coran et des préceptes de l‟islam. La vie de la cité et les questions religieuses étaient

gérées par le groupe d‟ouléma, réuni autour d‟Alfa Mahaman Diobbo. Toutes les questions

concernant la vie de la cité sont réglées après une large consultation entre les différents

membres du groupe. A la tête de ce groupe se trouve l‟imam des imams, Mahaman

Diobbo. Ce dernier s‟est toujours comporté comme un chef religieux et n‟a jamais cherché

à exercer une autorité politique. Mais, comme toute organisation humaine suppose une

autorité, Mahaman Diobbo, personnage sage et respecté est le chef spirituel et a délégué

une partie des ses pouvoirs à ses compagnons. L‟une des personnalités importantes du

groupe est l‟imam Hama Hamsou, un modibadjé, homme de confiance du fondateur de la

ville de Say. Ce dernier a surtout convaincu par sa piété et son exemplarité. C‟est avec

l‟afflux des gens que le fondateur de la ville décida d‟organiser la cité sur une base

religieuse.

1-Entretien avec Alzouma Bazi Cissé à Niamey le 13/11/07.

179
3 - Mahaman Diobbo, homme de paix et médiateur

Il doit sa renommée à sa foi mais aussi à son comportement. Le succès de son œuvre

s‟explique surtout par la politique de l‟exemple. En effet, pour répandre la religion

musulmane Mahaman Diobbo, religieux profondément pacifiste opta pour une adhésion

volontaire du fidèle à l‟islam. Cette attitude pacifiste fait la singularité de l‟homme surtout

pendant ce siècle dominé par des guerres. Très tôt, sa renommée va se répandre de part et

d‟autre du fleuve Niger : de Gao au Dendi et du Gourma au Zarmatarey et même au pays

haoussa :

« Il est à peu près certain que Say avant sa décadence actuelle était le principal
centre commercial du Moyen Niger. Toutes les caravanes venant du Nord- Est, du
Nord et de l’Est s’y donnaient rendez- vous pour se rendre à Sansané Mango et
Salaga ; Say était en outre un gros centre religieux où une grande quantité de
musulmans venaient faire pèlerinage au tombeau de Mohaman Diogbo grand père
du chef actuel, dont la réputation de grand marabout et de saint homme s’était
répandue jusqu’au-delà de Gao »1.

Et, des populations venaient d‟horizons divers à Say pour chercher des conseils, pour

régler des litiges mais aussi pour solliciter la médiation du saint homme pour mettre fin à

des différends les opposant à d‟autres communautés. A ce niveau, nous pouvons signaler

trois exemples de médiation menée par cet alim et qui ont toutes été couronnées de

succès.

- Le premier cas concerne, les Wogo de Bourra. Lors de son passage

dans le pays soŋey, il a trouvé les Wogo dans une situation très difficile. Ces populations

font constamment face à des incursions des pillards touareg. Il a promis à leur Alfa, Tondo

de lui trouver un site où lui et sa suite seront à l‟abri des incursions de ces pillards. Les îles

paraissent aux yeux de Mahaman Diobbo des lieux sûrs car isolées par l‟eau, elles

permettent à la population de vivre tranquillement et de vaquer à ses occupations. Mais,

comme les îles situées non loin de Tillabéri appartiennent à Amirou Kourté, il a d‟abord

1
- IRSH, Historique du cercle de Say, BRO 189, p. 9.

180
écrit à ce dernier pour lui demander l‟autorisation de laisser les Wogo de Bourra exploiter

les terres de Sinder. Amirou Siddo Yoro dit Tolakoy, accepta la proposition de l‟érudit

mais à condition que cette communauté paie la dîme sur la terre. Cette version est

rapportée par le capitaine Salaman : « Peu après le nommé Tondo, chef d’une fraction

d’Ouagobés de Gao et le Marabout AMADOU LAMINE vinrent saluer le chef de Say et lui

demander un terrain pour lui et les siens. ALPHA MOHAMAN s’adressa à Tolakoy. Ce

dernier l’autorisa à habiter les îles de Sinder »1. C‟est donc l‟intervention de Mahaman

Diobbo qui a permis aux Wogo de s‟installer sur les îles et de créer le centre d‟études

islamiques secondaire de Sinder. Si Amirou Kourté a répondu favorablement à la lettre de

l‟érudit, c‟est certainement grâce à sa sainteté :

« C’est en tout cas au début du XIXe siècle, du fait de la pression touarègue, que
Tondo Jelley a dirigé la migration de Bourra (où se trouvait à l’époque l’ensemble
du groupe) à Sinder d’une partie des wogo, en ralliant sur son parcours divers
groupes Kado, Sorko, ou autres et s’est installé au Nord de Tillabéry entre les deux
chefferies kourtey grâce à l’intervention du célèbre marabout de Say Alfa
Mahaman Jobbo » (Olivier Sardan De, 1982 : 392).

Comme on le constate, c‟est par l‟action de Mahaman Diobbo, homme de Dieu très

respecté dans la zone que Tondo et sa suite ont été autorisés à s‟installer sur l‟île.

- Le deuxième cas concerne les Wogo de Sinder. En effet, sous le règne

d‟Oumarou Djibrilla, la principauté connut une crise politique grave. A l‟origine de cette

crise, un différend qui opposa Amirou à son cadi, Ranié. Ce dernier cachait les présents

qu‟il recevait lors de ses tournées à l‟intérieur du centre d‟études islamiques pour rendre

des jugements au nom du souverain de Sinder. Mais, toutes les tractations de ce dernier

pour ramener le cadi à la raison se sont avérées vaines. Ce qui poussa le leader du centre à

le limoger :

« Ce limogeage va provoquer la colère des Kourté, propriétaires des terres de l’île


de Sinder car la mère du cadi est une princesse Kourté de Sansané- Haoussa. Ils

1 - ANN- 15- 1- 2 : Notice sur le cercle du Djerma et Historique du cercle par le capitaine Salaman 1903-
1909, p. 10.

181
vont exproprier les terres des Wogo mais grâce à la médiation de Mahaman
Diobbo, ils ont accepté de les restituer aux populations de Sinder »1.

- Le troisième cas concerne Boubacar Louloudji. Après la prise de

Garouré en 1811 par les Zarma, le Lamido Dallol était contraint de s‟exiler. Après avoir

transité dans plusieurs localités, il va rejoindre Mahaman Diobbo dans le pays soŋey à

Gaoudel. Les deux Alfa vont faire le reste du trajet ensemble. Après la création de Say,

Boubacar va rester dans cette ville deux ans durant. Un jour, il a exprimé son désir de

retourner dans son pays natal. Mais, les Zarma sont là et l‟attendent de pieds fermes :

« Pour éviter que son retour provoque des heurts, Boubacar Louloudji a demandé
à Mahaman Diobbo, homme de paix, influent et respecté par toutes les
communautés de l’Ouest du Niger, d’entreprendre une médiation afin que les
Zarma acceptent son retour dans le Dallol. Alfa Mahaman Diobbo décide
d’entreprendre la médiation, mais à condition que Boubacar Louloudji accepte
aussi de rester tranquille après son retour dans son pays natal. Malgré tous les
actes posés par cet alim dans le Boboye, les Zarma par respect à l’érudit l’ont
autorisé à y revenir. Et comme promis, il n’a plus posé d’actes allant dans le sens
de la remise en cause du compromis trouvé par Alfa Mahaman Diobbo »2.

On retrouve cette version dans la monographie de Say :

« Les Djermas s’allièrent au Kabbi et les Peulhs furent chassés de tout le Dallol
Bosso et du Fogha. Ils durent se refugier sur le Gourma à Say et à Néné. Sur
l’intervention de Mohaman Diobo chef de Say, les Peulhs furent cependant
autorisés à passer sur la rive gauche. Ils s’installèrent à Tiamkalla où ils résidèrent
pendant 30 ans en paix »3.

C‟est avec le fils et successeur de Boubacar Louloudji, Aboulhassane que les

hostilités vont reprendre dans le Dallol. Mahaman Diobbo est en effet, un homme de paix

dont l‟influence s‟exerce sur la zone allant de Gao au Dendi. Autour de cet érudit, se sont

rassemblées des populations d‟origines diverses (Zarma, Soηey, Wogo, Peul…) liées

uniquement par la foi musulmane. La tolérance et la paix que l’alim a su cultiver entre les

habitants de Say ont fait de ce centre d‟études islamiques, un lieu de cohabitation

1 - Version recueillie dans le Tarikh Sinder folio 33.


2 - Entretien avec Boubacar Hama Beidi le 09/10/11 à Birni N‟Gaouré.
3 - ANN- 15-1-1 : Monographie du cercle du Djerma 1901, P. 88.

182
pacifique, ce qui a permis une large diffusion du savoir religieux dans sa zone d‟influence.

Ce succès de Mahaman Diobbo, dans un contexte marqué par des crises s‟explique par son

option pour la non violence. Alors que le Dallol est plongé dans des crises, il a réussi à

faire de Say un havre de paix, ce qui fait de lui l‟érudit le plus influent et le plus respecté

dans l‟Ouest du Niger.

183
Chapitre VIII : L’œuvre littéraire et philosophique de Mahaman Diobbo

On ne peut pas comprendre le succès de l‟homme sans se référer à sa pensée

politique et religieuse. Une pensée qu‟il exprime à travers une vingtaine de chants

religieux qu‟il a composés en zarma (alors qu‟il est peul) depuis le début du XIXe siècle et

qui nous sont parvenus grâce à une chaîne de transmission. Composés pour la plupart

entre la fin du XVIIIe et le début du XIXe siècle par Mahaman Diobbo, ces chants nous

sont parvenus grâce à Alfa Agano1. Malheureusement, les dernières générations n‟ont pas

pu garder ce patrimoine afin de le transmettre aux générations suivantes. C‟est le lieu de

remercier Diouldé Laya qui, en 1968 a recueilli ces chants (sur instruction du Président de

l‟Assemblée Nationale de l‟époque, Boubou Hama) auprès du vieux Agano, le dernier de

la lignée des érudits à avoir mémorisé ces chants.

Il affirme avoir appris une cinquantaine de chants mais avec l‟âge, il a oublié la

plupart. La bande disponible à la sonothèque de l‟IRSH compte vingt trois (23) chants dont

deux composés par Boubacar dit Modibo, fils et successeur de Mahaman Diobbo, il

s‟agit du : chant 1(Uruufaba : appel au secours), chant 2 (Alciyooma zaaro : le jour du

Jugement Dernier), chant 3 (Wa mooru ibiliisa : éloignez- vous de Satan), chant 4 (Diina

fayda : les bienfaits de la foi), chant 5 (Wa tooηe naη : gardez – vous de nuire à autrui)

chant 6 (Hunde- beerey : l‟orgueil), chant 7 (Tuubi fayda : bienfaits du repentir), chant 8

(Muhammadu : Mohamed), chant 9 (Beeney nda gandey : les cieux et les terres), chant 10

(Boori fannu : les bonnes œuvres), chant 11 (Woy nda aru futey : les femmes et les

hommes de mauvais caractères), chant 12 (Muumuni woyey : les croyantes), chant 13

1 - Alfa Agano, de son vrai nom Abdoulbâki Koureyssiyou, Agano est le petit fils d‟Alfa Adamou, un des
compagnons de Mahamane Diobbo et ancêtre des habitants du quartier Zooronay de Say. La descendance
d‟Alfa Adamou a compté des noms d‟illustres hommes en matière de culture islamique, parmi lesquels nous
pouvons citer Alfa Soumaila (frère aîné de Agano), feu Alfa Oumarou Soumaila, fils du précèdent, neveu et
gendre de Agano (ancien président de l‟Association Islamique du Niger). Agano est donc un digne
descendant de cette lignée d‟érudits de la ville de Say. Il est décédé en 1979 à l‟âge de 88 ans.

184
(Meehaw : le jeûne), chant 14 (Tooηe kow : le provocateur), chant 15 (Saaray : la

tombe)… Ces chants religieux composés par Alfa Mahaman Diobbo sont des poèmes qui

présentent une extrême richesse sur le plan esthétique et thématique.

Ils sont appelés „‟Caw dooni1’’en zarma et ont en général, un trait commun : inciter

les croyants à la méditation et les amener sur la voie de l‟islam. Le chant religieux a en

effet le pouvoir de créer un univers de détachement, de recueillement, de spiritualité. Il

incite les fidèles à bannir des comportements incompatibles avec l‟islam (l‟orgueil et la

vanité) et à suivre l‟exemple du prophète Mohamed. Fait frappant, ces chants sont destinés

à la communauté et non à des individus. Ils constituent un moyen d‟éducation islamique

car ils sont chantés dans des circonstances précises : cérémonies de mariages, réunions des

marabouts, les vendredis, recherche de pitance par les talibé… Selon Soumana

Abdourahamane :

« C’est au prêche, et rien que cela, qu’Alfa Mahaman Diobbo consacra sa vie.
Outre le « douddale », il utilisa d’autres moyens comme ces chants qu’il composait
et chantait à l’occasion des rassemblements. Il les faisait apprendre aussi à ses
disciples qui les chantaient devant les concessions en quête de leurs repas. Par ce
procédé, l’érudit multipliait aussi sa voix et assurait la répétition quotidienne de ces
chants à la devanture de la plupart des concessions »2.

I- Les chants religieux

1- L’importance de la poésie dans la culture islamique

a. La place de la poésie en Arabie au temps du prophète

La poésie a joué un rôle important dans la diffusion de l‟islam. Le Coran constitue en

lui- même un véritable phénomène poétique dont la révélation a fait grand effet dans une

Arabie fière de sa poésie. Et, c‟est d‟abord par la beauté de sa forme et l‟harmonie de son

rythme qu‟il s‟est imposé comme miracle. Selon Simozrag et Goasguen, le verbe

coranique est apparu à un moment où la poésie est en vogue dans le monde arabe :

1 - Caw dooni signifie chanson religieuse en zarma.


2 - Entretien avec Soumana Abdourahamane, Chargé des affaires culturelles à l‟ambassade des Etats- Unis
le 05/12/2009 à Niamey.

185
« A l’âge d’or de l’éloquence arabe où la langue atteignit l’apogée de sa pureté et
de sa force où les titres d’honneur étaient décernés solennellement aux poètes et
aux orateurs dans les concours annuels, il a suffi de l’apparition du verbe
coranique pour que l’amour acharné de la poésie et de la prose fut bouleversé, de
même que les sept poèmes dorés et suspendus sur le temple d’Al- Ka’ba furent
descendus. Dès lors, toutes les âmes durent se prêter à cette merveille de
l’expression arabe » (Simozrag et Goasguen T2, 1999 : 105).

La beauté convaincante du verbe coranique contribua ainsi à rallier de nombreuses

personnes dont Omar Ibn Al Kattab, second calife de l‟islam ou encore Ka‟ab Ben

Zouhayr, auteur du fameux poème « Al burda » dédié au prophète et marquant la

conversion de son auteur à l‟islam. Le fait que dès les débuts de l‟expansion de l‟islam,

le prophète se soit entouré de poètes célèbres (Hassan Ibn Thabit, Ka‟ ab Ben Malik, Abda

Allah Ben Rawâha…), témoigne de l‟importance de la poésie dans la religion de

Mahomed. Tous ces poètes ont mis leur art au service exclusif de la foi. La poésie devient

ainsi, un auxiliaire indispensable pour la diffusion du message islamique. Les agents

propagateurs de l‟islam vont apporter cet art dans les régions du monde touchées par cette

religion.

b- La place de la poésie en Afrique musulmane

En Afrique musulmane aussi, cet art a été largement utilisé par les ouléma, ce qui a

permis un développement de la poésie d‟inspiration islamique sur le continent. En islam, il

appartient à chaque leader d‟une communauté islamique, d‟ordonner ce qui est licite et

d‟interdire ce qui est illicite, d‟ordonner le bien et d‟interdire le mal :

« Dans les écrits de ces intellectuels, ainsi que dans leurs sermons et leur
propagande, l’on décèle des ingrédients du langage politique de l’islam. Ce
langage, lorsqu’il fait écho à des aspirations d’émancipation, peut mobiliser de
vastes secteurs de la population. Parmi les concepts mobilisateurs de l’action
politique, figure l’obligation de faire la commanderie du bien et l’interdiction du
mal (al-amr bi ‘l- ma’ ruf wa al- nahy an al- munkar » (Kane, 2003 : 30).

Pour faire passer le message divin dans une société où la majorité ne sait ni lire ni écrire,

les ouléma font recours à la poésie. Chantée dans la langue du terroir, elle permet

186
d‟atteindre toutes les couches de la société. C‟est un moyen d‟éducation efficace d‟autant

plus que son langage est simple et facile à assimiler.

Au XIXe siècle avec le Jihad d‟Ousman Dan Fodio de la confrérie Qadriya, on

assiste au développement d‟une littérature (surtout la poésie) d‟inspiration islamique.

Parmi les auteurs, on peut citer : le Shaykh lui même, son frère Abdoulaye, sa fille Nana

Asmaou, Mallam Janeidou… Dans la sphère d‟influence du califat de Sokoto, des érudits

locaux ont également utilisé la poésie comme moyen de diffusion de l‟islam. Parmi ceux -

ci, nous pouvons citer Mahaman Diobbo, auteur d‟une vingtaine de poèmes. Au XX e

siècle, la Qadriya sera supplantée par la Tidjania au Niger. Cette confrérie va donner à la

chanson religieuse plus d‟éclat. La fête de l‟anniversaire de la naissance du prophète

Mohamed (Muludh), organisée chaque année à Kiota est l‟occasion choisie par les

Zakhirou1 pour exposer leurs talents. Ceci prouve que la chanson religieuse fait partie de la

culture islamique et joue un rôle moteur dans la diffusion de la religion de Mahomed.

2- La place de la poésie dans le centre d’études islamiques de Say

Malgré l‟importance de ce centre, nous n‟avons pas eu de manuscrits dans cette

localité. Les témoignages recueillis à Say et ses environs confirment l‟existence des

manuscrits qui ont malheureusement disparu à cause des mauvaises conditions de

conservation des documents dans la ville :

« Les manuscrits de la ville de Say étaient conservés dans une maison située à
l’intérieur du palais. Mais, cette pièce présente un trou au niveau du toit. Une
année, il y a eu des pluies diluviennes et l’eau passait par ce trou pour se déverser
dans le récipient qui n’était malheureusement pas couvert. C’est l’odeur
nauséabonde qui se dégageait du canari qui avait alerté les locataires du palais.
Quand ces derniers étaient arrivés au niveau du récipient, le constat était amer :
tous les documents s’y trouvant avaient été réduits en bouillie. C’est ainsi que nous
avions perdu ces manuscrits »2.

1 - Zakhirou : Ce sont des disciples des Shaykh qui ont mémorisé les chansons religieuses.
2 - Entretien avec Alzouma Bazi Cissé, infirmier à la retraite à Niamey, le 01/08/2012.

187
Selon d‟autres informateurs, ils ont été rongés par des termites. Les chants religieux

constituent un patrimoine historique important qui a pu être conservé et transmis de

génération en génération. Ces poèmes ont été composés par Mahaman Diobbo dans des

circonstances précises :

a – Les chants d’assistance morale

Quand la communauté fait face à une épreuve, il compose un chant pour l‟exhorter à

accepter cette difficulté comme émanant de Dieu. Le chant „‟Uruufaba’’, par exemple, a

été composé sur l‟île de Neni suite à une terrible sècheresse. Il s‟agit là d‟une invocation

pour demander la clémence de Dieu, nous pouvons à titre d‟exemple retenir quelques vers

de ce poème (chant 1 : Vers 5 à 20) :

Ay ga urru, faabakow ku J‟appelle au secours, le secoureur tarde

Faaba tamba wakti yoη ku Au secours ! C‟est assez d‟attente

Gaahamey beri jinde yoη ku Les corps se sont amaigris et les cous allongés

Borciney koy tuuri yoη ku Les nobles sont réduits à ramasser du bois

10 Ya Ilahi, urru faaba O Seigneur, porte- nous secours!

Faaba tamba almaney ben Secours – nous vite, le bétail est décimé

Haw koyey naη zama haw ben Les bergers n‟en sont plus, faute de troupeau

Barikarey go kaaru heri ben Voici les cavaliers mais, point de monture

Iri ga jirbi farmi mana ben On est contraint à dormir en saison de culture

15 Ya Ilahi, urru faaba O Seigneur, porte – nous secours!

Wande kooga kurηe na fay L‟époux a divorcé l‟épouse maigre

Kurηe kooga wande na a fay L‟épouse a divorcé l‟époux maigre

Bagna laala na nga koy fay Le mauvais esclave a renié son maître

188
Zamana diina mo na koy fay Et les gens, se sont écartés de la voie de Dieu

20 Ya Ilahi, urru faaba O Seigneur, porte – nous secours!

Dans ces vers, Mahaman Diobbo décrit une sècheresse qui a sévi à Neni pendant qu‟il y

était. Pour montrer l‟ampleur de la calamité, l‟auteur décrit l‟état du cheptel décimé. Bien

plus qu‟une perte matérielle, ceci constitue un drame pour une communauté d‟éleveurs. Il

invoque Dieu pour conjurer ce malheur.

b- Les chants de méditation

Nous avons aussi des chants composés par Mahaman Diobbo dans le but de

ramener les gens sur le droit chemin de Dieu. A un certain moment, il a eu à constater des

comportements incompatibles avec l‟islam (port d‟amulettes par les enfants au cou ou à la

hanche) dans la ville, il a aussi composé des chants pour inciter les gens à les bannir. Les

vers suivants du chant 2 de notre corpus interpellent les croyants (Alciyooma zaaro ou le

Jour du Jugement Dernier) :

Ya muumuney woro kulu O croyants!

Wa tun iri ma tuubi ka naaη Repentons- nous et cessons

Zunuubi kayney i beerey Les péchés grands et petits

Kaη iri na goy hasara Qui ternissent nos bonnes œuvres

Mais, dans la plupart des cas, ces chants portent sur des rites islamiques, ils

constituent un moyen d‟éducation religieuse en même temps, ils interpellent les fidèles à se

conformer aux principes de l‟islam, à bannir l‟orgueil, la vanité et à respecter tous les êtres

vivants. Les chants religieux visent à éduquer la communauté. Par rapport à l‟authenticité

189
de ces chants, nos informateurs affirment que Mahaman Diobbo est sans aucun doute leur

auteur :

« D’abord ce n’est pas du zarma courant et les formes canoniques du soηey de Gao
et de Tombouctou contenues dans ces chants prouvent si besoin est qu’ils ne
viennent pas de Sokoto et qu’ils ont été bel et bien produits par Mahaman Diobbo.
Cet accent soηey prédominant dans les chants n’est du tout pas étonnant quand
l’on sait que l’auteur a séjourné une vingtaine d’années en pays soηey notamment
à Gao (Mali actuel et à Larba (Téra/Niger), avant de se fixer à Say. Si ces chants
provenaient de Sokoto, les mots haoussa ou peul seraient prédominants, ce qui
n’est le cas »1.

Selon Soumana Abdourahamane, l‟adoption de la langue zarma pour diffuser le message

divin par un érudit peul a été mal interprétée par les Bittinkoobé :

« L’adoption de cette langue par Alfa Mahaman Diobbo dans le seul but de diffuser
le message islamique fut d’ailleurs la cause de l’hostilité des Peul de Lamordé à
son égard, lors de son escale à Neni. C’était, pour eux, une aliénation d’autant plus
intolérable qu’elle venait d’une autorité morale. Leur hostilité devint alors
tellement vive qu’ils en sont arrivés à enlever et à vendre comme captifs deux des
disciples de Mahaman Diobbo. Dans le chant 1 de notre corpus « Uruufaba », ce
dernier avait fait allusion aux comportements des gens de Lamordé (chant1 : vers
120 à 125) qu’il juge tout à fait incompatible avec une foi sincère. Car, pour lui il
n’y a que la foi qui compte. S’il avait quitté le Macina natal, c’est pour contribuer
à la diffusion de l’islam. Et pour atteindre cet objectif il était prêt à adopter tout
comportement, culturel ou autre ; pourvu que le message passât. Pour lui toute
langue comme toute autre spécificité ethnique ou même raciale n’est que moyen
dont meilleur usage ne pourrait en être fait qu’en matière de culte. Car, devant
Dieu il n’y a d’identités autres que croyant ou non- croyant »2.

Le chant Hunde- beerey ou l’orgueil (chant 7) de notre corpus s‟adresse en premier lieu à

un des fils de Mahaman Diobbo. « Abdoulwahidou qui ne respecte du tout pas son demi-

frère, Boubacar dit modibbo malgré ses qualités intellectuelles certaines. Il se fait très

orgueilleux vis-à-vis de son demi- frère. Ce qui n’est du tout pas du goût de leur père qui

aime tant ce dernier »3. Nous avons à titre d‟exemple, ces quelques vers de ce chant :

1 Entretien avec Diouldé Laya, sociologue à la retraite à Niamey le 31 /07/12.


2 - Entretien avec Soumana Abdourahamane, Chargé des Affaires Culturelles à l‟ambassade des Etats- Unis
à Niamey le 05/12/ 09.

3 - Entretien avec Alzouma Bazi Cissé, infirmier à la retraite à Niamey le 01/08/12.

190
Hunde- beerey nga no ay ga hoy dooni wo ra C‟est l‟orgueil que je pourfendrai dans ce

chant

Da i ma tuubi kala i ma du alciyoma Ceux qui s‟en repentent jouiront au Jour

Dernier

Ya bunay, ma hundi ye ganda Koy se O mon enfant, fais- toi humble devant le

Seigneur

Hunde – beeray si di nga Koy alcioyooma Car l‟orgueil ne mènera point à Dieu au Jour

Dernier

Ya bunay, si dokoray ni nayze folloη O mon enfant, ne déconsidère pas tes proches

Dokorayka ga tun suba baabu daama Qui déconsidère les gens se trouvera, Demain,

embarrassé

Ya bunay, si hortu mo hundi kulu ga O mon enfant, ne sois pas méchant envers les

Tous les êtres

Hundi horta ga tun suba baabu jirma L‟âme méchante sera ressuscité Demain sans

honneur

Tous les témoignages que nous avons recueillis sont concordants et présentent Mahaman

Diobbo comme le véritable auteur de ces chants religieux.

A un moment où nos sociétés sont secouées par des violences (conflits fonciers

principalement), nous pensons que la diffusion de la chanson islamique permet d‟atténuer

la survenance des conflits au Niger. Comme le souligne si bien Diallo Boubacar,

coordonnateur du (RIESCA), dans son discours d‟ouverture de la cérémonie du premier

festival de la chanson islamique pour la paix au Niger : « Même si des violences

inexplicables surviennent dans nos Etats qui, sont pourtant musulmans, il existe des

mécanismes qui, s’ils sont utilisés, peuvent contribuer à prévenir ces conflits. Les chansons

191
islamiques font partie des mécanismes disponibles »1. Il faut souligner à ce niveau que ces

chants sont des poèmes. Et, leur composition sous forme de poèmes n‟est pas du tout

étonnant. En effet, le Coran rappelons - le constitue en lui-même un véritable phénomène

poétique dont la révélation fit grand effet dans une Arabie fière de sa poésie.

3- La chaîne de transmission des chants religieux

Alfa Agano a appris les chants auprès de son cousin, Hamma Kâto :

« C’est auprès de son cousin Hamma Kâto (surnommé Mâzou- Baaba) qu’Alfa
Agano apprit ces chants religieux (après ses études coraniques). A noter que ce
cousin est plus âgé qu’Agano. Hamma Kâto a ainsi connu les enfants d’Alfa
Mahaman Diobbo. C’est d’ailleurs de Modibo qu’il tient ces chants. Agano lui-
même est de la troisième génération sur l’arbre généalogique de Say, son grand
père étant l’un des compagnons du fondateur de Say »2.

Il faut à ce niveau saluer Alfa Agano, qui malgré le poids de l‟âge et son infirmité, fut le

« berger » de ces chants religieux à la conservation desquels, il consacra toute sa vie. En

effet, non voyant de sa naissance, il avait eu à mémoriser le Coran. Ce qui prouve le mérite

de cet homme qui devait par la suite mémoriser ces chants qu‟il déclamait à des occasions

régulières : apparition du croissant lunaire marquant le début du jeûne, fête de l‟Achoura

célébrée le 10 du mois d‟Al Muharram (premier mois de l‟année musulmane)…… Il les

déclamait aussi sur demande, ce qui donnait lieu à des veillées dans les familles qui

l‟invitaient. Ces invitations dépassaient d‟ailleurs les limites de Say : « Agano dit avoir été

dans de nombreuses localités où ces chants sont très appréciés »3.

Très attaché à ce riche patrimoine légué par ses parents, cet érudit a durant toute sa

vie lutté pour que la jeune génération s‟intéresse à ces chants mais en vain. Cette

inquiétude d‟Agano est fondée car quelques années après sa mort, aucun Alfa de la ville de

1 - Le Sahel nο 7895 du 22 mars 2010, p. 10.


2 - Entretien avec Soumana Abdourahamane, Chargé des Affaires Culturelles à l‟ambassade des Etats- Unis
le 05/12/09 à Niamey.
3 - Entretien avec Soumana Abdourahamane, Chargé des Affaires Culturelles à l‟ambassade des Etats- Unis
le 05/12/09 à Niamey.

192
Say ne sait chanter ces chants. Tout ce patrimoine allait disparaitre n‟eût été l‟engagement

d‟un homme, Diouldé Laya qui a eu l‟ingénieuse idée d‟enregistrer ces chants en 1968

avant la mort d‟Alfa Agano. Ils sont actuellement disponibles à la sonothèque de l‟IRSH

mais, l‟état de conservation de la bande sur laquelle 23 chants ont été enregistrés laisse à

désirer ; d‟où la nécessité de doter ce département de moyens financiers adéquats afin de

mettre tout ce patrimoine à l‟abri des intempéries. La conservation de ce patrimoine est

d‟autant plus nécessaire surtout que les détenteurs des informations ne sont plus de ce

monde.

II- La portée des chants religieux

1- Le chant religieux comme outil de conversion

La poésie occupe une place de choix dans ce qu‟on peut appeler la bibliothèque

islamique en Afrique de l‟Ouest. Tous les grands leaders du Jihad Al – Hajj Omar,

Ousman Dan Fodio, Sékou Amadou… étaient des grands poètes. Elle était un moyen de

communication par lequel les grands intellectuels débattaient des questions politiques,

religieuses et philosophiques. Les poèmes d‟Ousman Dan Fodio sont récités par les talibé

en arabe ou en haoussa même aujourd‟hui. Les chants religieux présentent un intérêt

certain dans les sociétés islamiques. Dans un milieu où la majorité de la population ne sait

ni lire ni écrire, ils constituent un moyen efficace d‟éducation :

« Le caractère du milieu socio- culturel, essentiellement marqué par l’oralité,


réduit l’accès à la connaissance livresque. C’est pourquoi les lettrés recourent à la
tradition orale comme support de vulgarisation du savoir religieux pour la majorité
des croyants qui ne savent ni lire ni écrire. Une place de choix revient à la poésie
religieuse chantée en différentes langues du terroir en raison de son avantage
éducatif ludique » (Hassane, 1995 : 520).

Les chants religieux ont un aspect pédagogique car chantés dans la langue du terroir,

l‟objectif visé est la recherche de l‟adhésion de l‟auditeur à l‟islam avec pour but ultime

193
son salut. Pour ce faire, le contenu des chants est minutieusement préparé car l‟auteur doit

concevoir un récit qui fortifie l‟âme et qui interpelle l‟esprit. C‟est ainsi que la plupart des

chants religieux tournent autour de la mort et l‟intensité avec laquelle elle est annoncée ne

laisse personne indifférente. En dehors de la mort, plusieurs aspects de la vie courante sont

abordés. Il est important pour tout musulman de connaître l‟importance du Zikr. Pour s‟en

convaincre faisons recours aux versets du saint Coran : « Souvenez- vous d’Allah, assis ou

couchés » (Sourate 4 An- Nisa V, 103). Une autre sourate : « C’est bien dans le Zikr

d’Allâh que les cœurs trouvent la quiétude » (Sourate 13 Ar- Rad V, 28). Les sourates du

Coran qui soulignent les vertus du Zikr sont nombreuses d‟où l‟importance de la collecte

des œuvres déjà connues. Ces chants contiennent des leçons de sagesse et des invocations

qui incitent à la ferveur et à la défense de la religion.

2- La portée littéraire des chants religieux

Sur le plan littéraire, ces chants religieux sont tous des poèmes en vers avec des

rimes régulières. Les limites des strophes sont claires avec une richesse exceptionnelle sur

le plan rythmique, avec des figures de style. Le penchant de l‟érudit de Say pour la poésie

s‟explique aisément quand on sait le rôle que celle-ci a joué dans la révélation. Avant cette

dernière, la poésie était en vogue en Arabie. Les chants religieux constituent la preuve que

Mahaman Diobbo est un alim ayant eu une large culture islamique. C‟est un moyen

indispensable pour la propagation de toute religion car ils facilitent et rendent agréable

l‟assimilation. Pour le cas de l‟islam, la chanson religieuse constitue un support d‟autant

plus authentique, en ce sens que le saint Coran a d‟abord frappé les esprits et les âmes par

sa perfection poétique. Il est donc normal que les chants religieux fleurissent dans toutes

les communautés musulmanes. L‟esthétique contenue dans ces chants n‟est qu‟un moyen

au service d‟une cause, rappelons- le, la recherche de l‟adhésion du destinataire à l‟islam.

194
Le corpus présente une variété de textes : du narratif, du descriptif, de l‟explicatif…

Le chant intitulé « Al Ciyoma Zaaro » (« le Jour du Rassemblement » par exemple est un

texte narratif. L‟auteur y fait le récit, tel que prévu par les textes religieux, de ce jour

exceptionnel : « Jour du Jugement Dernier », « Jour des Comptes », « Jour du

Rassemblement, « Jour de la pesée » etc… Les terminologies sont nombreuses pour

désigner ce jour redouté des âmes, car elles y rendront compte de toutes leurs œuvres,

bonnes ou mauvaises. Un autre aspect qui montre la richesse de ces chants sur le plan

littéraire, c‟est la gravité du ton dans la plupart des textes. Cette caractéristique s‟explique

par les thèmes dont le plus dominant est celui de la mort. Celle- ci est en effet, le thème

central de plusieurs textes. Et à chaque fois, il est fait des récits et des descriptions tous

affligeant les uns et les autres. Cette gravité du ton vise à toucher la sensibilité du fidèle

afin de l‟amener à méditer profondément sur ce « Jour des Comptes ». L‟auteur dans ces

trois vers du chant 2 (49 -51), nous donne une idée des conditions dans lesquelles les âmes

seront ressuscitées :

Boro Kulu kaη ga tun suba ra Tous les ressuscités en ce Jour

Bankaray a si afo ga Ils Seront tous sans le moindre habit

Gaa- Koonu, ce- koonu Corps nu, pieds nus.

La poésie islamique se caractérise par sa finesse esthétique. L‟art islamique en

général a suscité partout où il est diffusé de vives admirations. A Say, les chants religieux

constituent un riche patrimoine légué par Alfa Mahaman Diobbo. Malheureusement, de nos

jours peu d‟intérêt est accordé à ces chants comme l‟attestent les conditions dans lesquelles

ils sont conservés à la sonothèque de L‟IRSH. Le magnétophone dont dispose le service

tombe régulièrement en panne. Raison pour laquelle nous avons passé des mois avant de

195
pouvoir écouter tous ces chants religieux. Pire, à Say, nous n‟avons rencontré aucun Alfa

capable de réciter ne serait- ce qu‟une strophe de ces chants. Nous nous sommes même

rendu dans la famille d‟Alfa Agano à Zooronay où Abdoulsalam Soumaila, imam du

quartier et descendant de cet érudit nous a clairement dit ceci : « Jeune homme ne perds

ton temps à chercher dans cette ville, celui qui sait chanter les chants légués par Alfaga et

Modibo1. Le dernier Alfa de la ville à les mémoriser est Agano et, il est décédé depuis

longtemps ». Ces propos d‟imam Abdoulsalam Soumaila, prouvent l‟urgence qu‟il y a pour

les chercheurs à collecter le plus rapidement possible les informations sur notre passé

auprès des détenteurs encore vivants de la tradition orale. Si Diouldé Laya n‟avait pas eu

l‟intelligence d‟enregistrer ces chants auprès du dernier de la lignée à les avoir mémorisés,

ce serait tout un pan de l‟histoire de notre pays qui aurait disparu. A la question de savoir si

ces chants ont réellement été composés par Mahaman Diobbo, Abdoulsalam Soumaila a

répondu :

« Ces chants ont été effectivement composés par Alfaga et Modibo car chaque
chant à une histoire c'est-à-dire nous savons le lieu et les circonstances dans
lesquelles il a été composé. Le chant urufaaba de Mahaman Diobbo a été composé
sur l’île de Neni suite à une terrible sècheresse »2.

3 - La portée philosophique des chants religieux

Sur le plan philosophique, les chants religieux ont une portée réelle. Il s‟agit de

chants d‟assistance morale aux membres de la communauté mais aussi, d‟un constant

rappel au devoir (la soumission à Dieu). En effet, l‟adoration de Dieu est précédée de la

connaissance divine. Sans connaissance d’Allah, il n‟y a pas d‟adoration. Et, ces chants

développent des thèmes importants tels que, la soumission à Dieu, la sincérité dans les

actes de dévotion, l‟humilité, la solidarité, l‟endurance, l‟amour du travail….. Tous ces

thèmes développés visent l‟éducation des individus car la qualité de tout groupe humain est

1 - Alfaga: il s‟agit de Mahaman Diobbo et Modibo, c‟est son fils et successeur, Boubacar.
2 - Entretien avec Abdoulsalam Soumaila imam de la mosquée de Zooronay à Say le 12/12/07.

196
fonction des individualités qui la composent. La formation des individus pour qu‟ils

comprennent leur religion afin de bien faire l‟adoration est un devoir pour tout ‘’alim’’.

L‟adoration de Dieu est en effet, clairement énoncée dans le Coran : « Je n’ai créé les

djinns et les hommes que pour qu’ils m’adorent » (Coran, 51/56).

Selon Soumana Abdourahamane :

« La composition de ces chants est liée à la fonction même de l’érudit de Say. En


effet, dans cette ville on ne dit pas ‘’qui est assis sur le trône ?’’ Mais ‘’qui est
assis sur la peau ?’’ Le pouvoir est symbolisé à Say par une peau de prière, ce qui
montre que le souverain est avant tout un leader religieux, un guide. En tant que
tel, il doit avoir des qualités intellectuelles et morales. Il doit être humble,
disponible, accessible aux gens, être à l’écoute de son peuple qu’il doit orienter sur
le droit chemin… Contrairement à certaines pratiques auxquelles on assiste de nos
jours chez certains religieux, Mahaman Diobbo n’a jamais accepté que les gens
aillent cultiver ses champs. Il a œuvré toute sa vie pour amener les membres de sa
communauté à comprendre et aimer leur religion. Et, la composition des chants
religieux rentre dans ce cadre »1.

Dans les textes apparaît une variété de traits de caractères dont deux nous semblent

essentiels : le travail et la modération.

a- L’exhortation du fidèle au travail

Pour Alfa Mahaman Diobbo, la paresse est un défaut que tout bon musulman

doit combattre par l‟amour du travail. C‟est pourquoi ce dernier est un sujet constant dans

la plupart des chants religieux. Il est présenté comme une exigence pour tout être humain

jouissant de ses facultés physiques et mentales. Le travail constitue en effet un acte de

dévotion à Dieu. Et, c‟est par lui également que l‟homme acquiert son autonomie, son

indépendance et même sa notoriété. Dans ses chants, l‟auteur exhorte l‟auditoire non

seulement à l‟effort physique mais aussi à l‟effort intellectuel et spirituel. Le travail

physique est surtout évoqué à travers l‟exploitation de la terre, synonyme d‟efforts

physiques et surtout d‟activité licite. Nous avons un exemple dans le chant 4, vers 41 à 44 :

1 - Entretien avec Soumana Abdourahamane, Chargé des Affaires Culturelles à l‟ambassade des Etats- Unis
le 05/12/09 à Niamey.

197
« Da ni si ba ma jaase Si tu veux éviter le déshonneur

Ganji ho ka hense Défriche les terres

Day ma far hunay se Cultive- les pour ta subsistance

Lambu daŋ ka fayda Aie (aussi) un jardin pour ton bien »

Le premier vers de la strophe montre le caractère valorisant du travail de la terre pour

l‟homme. Il est la condition de son honneur, car le travail assure l‟indépendance. L‟idée du

défrichage dans le second vers, vise à créer des conditions optimales de l‟accès à la

propriété foncière ; car un morceau de terre pris en bail expose l‟exploitant aux humeurs du

bailleur. Les deux derniers vers de la strophe précisent la mise en valeur des terres

recommandées par l‟auteur qui distingue deux types de cultures : la culture de subsistance

et le jardin. Ici, il faut noter la haute vision de ce lettré musulman, car le jardin constitue un

palliatif pour le travailleur et le met à l‟abri des caprices du climat. En effet, en cas de

sècheresse, le jardin peut lui assurer le complément indispensable à sa survie. Ainsi, le

travail physique envisagé par l‟auteur assure une indépendance à la fois foncière,

alimentaire et économique. Ce qui met l‟individu à l‟abri de préoccupations préjudiciables

à la concentration, au retour sur soi ; le travail physique crée ainsi les conditions propices

au travail intellectuel et spirituel. Dans ce contexte, Abu- Obaϊd a entendu Abu Horaϊra

s‟exprimer ainsi : L‟Envoyé de Dieu a dit : « Aller chercher une charge de bois et la

rapporter sur son dos vaut mieux pour chacun de vous que de demander quelque chose à

quelqu’un, qu’il vous donne cette chose ou qu’il vous la refuse » (El- Bokhâri, 1984 : 11).

Le travail intellectuel et spirituel est un prolongement logique du travail agricole.

Dans les chants religieux, le rapport est très étroit entre activités physiques, intellectuelles

198
et spirituelles. Toujours dans le chant 4, vers 13 à 16, l‟auteur utilise une image pour

inciter les gens au travail car c‟est un acte de piété :

« Ay ga saabu koy din Je rends grâce à Dieu

Kaŋ na diina fari di Qui fit de la religion un champ

Annabey na dumi di Les prophètes ont apporté les semences

Hay wa duma ka fayda Semez donc pour avoir les bienfaits »

Cette métaphore du champ confirme l‟idée que tout travail licite est d‟abord un acte de foi

voué à Dieu. Ensuite, le rapprochement établi entre le champ et la religion signifie que les

bienfaits sont au bout de l‟effort. Autant on ne tire de profit d‟un champ qu‟après l‟avoir

travaillé, autant la foi ne profite à l‟homme que s‟il œuvre dans ce sens, avec tout ce que

cela signifie d‟efforts. La valeur de la métaphore est ici de donner aux auditeurs une image

expressive la plus proche de leur réalité pour les convaincre de la nécessité d‟un effort

soutenu pour mériter le salut.

b- L’exhortation du fidèle à la modération

L‟islam est une religion qui a toujours prôné la modération en toute chose et

contrairement à l‟image véhiculée par une certaine opinion en Occident selon laquelle

l‟islam est une religion d‟intolérance et d‟extrémisme. L‟islam tel qu‟enseigné par le

prophète Mohamed est une religion universelle dont le message transcende le temps et

l‟espace et qui propose aux hommes un ordre social régi par les lois divines, sources de

bonheur pour l‟humanité. Tout musulman qui se conforme au Message du prophète ne

saurait être excentrique ni « extrémiste ». Toutes les biographies du prophète attestent de

son humilité et de sa modération. Dans le corpus, plusieurs chants exhortent à la

199
modération en insistant sur trois domaines : le déplacement, le propos et l‟alimentation.

Exemple : Chant 11, vers 41 à 44 :

« Dira- dira ma kayna Sois sobre en déplacement

Ni senni mo ma kayna Sois sobre en propos

Ni ŋaari mo ma kayni Sois sobre en alimentation

Day ni tuubi fayda Et tu en auras les bienfaits.

La modération prônée par l‟auteur dans les déplacements est précisée dans les vers 45 à 52

du même chant :

« Kala ni Jingarey do Ne va qu‟à la mosquée

Wala ni hayni fari do Ou à ton champ de mil

Wala ni haabu kali do Ou à ton jardin de coton

Day ni tuubi fayda Et tu en auras les bienfaits.

Wala ma koy jihaadi1 Ou bien fais le Jihad

Wala janaa- za koy yoŋ Ou va à un enterrement

Wala ni ðayze fo yoŋ Ou saluer les tiens

Day ni tuubi fayda Et tu en auras les bienfaits »

Comme on le constate, ce sont les déplacements dits méritoires que l‟auteur met en

exergue. En cela, l‟auteur de ce chant, Mahaman Diobbo, est un exemple pour avoir

1 Jihaadi : Ici, le mot Jihad désigne toute action accomplie pour raffermir sa foi. Contrairement aux idées
réductrices, Jihad ne signifie pas exclusivement guerre au sens militaire du terme. Dans ce contexte précis, il
inclut des voyages d‟études ou de diffusion de l‟islam, l‟assistance apportée aux nécessiteux, les réalisations
d‟ouvrages d‟intérêt collectif (mosquées, puits…..).

200
parcouru une bonne partie du territoire du Mali actuel et de l‟Ouest du Niger (voir carte de

l‟itinéraire) dans cette mission, sans jamais user de violence !

L‟auteur incite les gens à la modération dans le propos. La langue est en effet, un

organe susceptible de grande nuisance à autrui. Et, le prophète a souvent attiré l‟attention

des musulmans sur cet aspect ainsi que le rapporte ce hadith : « Le vrai musulman est celui

dont aucun autre n’a à redouter ni la main ni la langue ». Aussi, la modération dans le

propos est une recommandation sans cesse rappelée dans la plupart de ces chants.

Exemple de ce chant vers 33 à 40 :

« Da ni si ba ma kaaru Si tu ne veux pas enfourcher

Taari bari ka zooru Le mensonge, rétif à la bride

Day ni deene zooru Alors retiens ta langue

Senni ga ka fayda Pas trop de propos, pour ton bien

Da ni si ba ma kawla Si tu veux éviter l‟ingérence

Day ma mooro kiila Ne te mêle pas aux « on dit »

Senni boobo kaala Et de beaucoup de propos d‟autrui

Hin ni me ka fayda Retiens ta langue à propos »

L‟image du cheval, un animal naturellement fougueux, que l‟auteur évoque ici, c‟est pour

étayer la capacité de nuisance de la langue. Cela signifie qu‟il faut nécessairement dompter

sa langue, savoir la retenir pour ne pas en souffrir, tout comme le cavalier tire sur la bride

pour ne pas subir la fougue de sa monture, l‟homme doit tout faire pour bien contrôler sa

langue. Dans la seconde strophe, nous avons des détails sur quelques nuisances de la

langue. Comme le dit le proverbe haoussa : « La langue est comme une hache, il faut

201
savoir la contrôler ». Et, plusieurs hadiths s‟insurgent contre les nuisances de la langue

car elles peuvent compromettre nos mérites. D‟ailleurs ne nous enseigne-t-on pas qu‟on

doit remuer sept fois la langue avant de parler ?

En plus de la langue, l‟auteur nous incite à la modération dans l‟alimentation. Pour

vivre, l‟homme doit manger mais il est dangereux d‟en faire une fin. Même dans les contes

populaires, la gourmandise est toujours stigmatisée. Ces quelques vers montrent

l‟antinomie entre la foi et la gourmandise :

« Albora kaŋ a senni kulu L‟homme qui n‟a de cesse de se plaindre

Ce nga gaasu nga tu mana to De ne pas avoir assez à manger

Abine si fari goy ibaada ra Il n‟aura pas cultivé suivant la foi

Farka buzugu nga gunde ra Son ventre recouvre une panse d‟âne »

Ici, la gourmandise est présentée comme un défaut qui altère la dignité de l‟être comme le

montre le rapprochement établi entre l‟homme gourmand et l‟âne. En définitive, la

modération prônée par Alfa Mahaman Diobbo dans le déplacement, le propos,

l‟alimentation entre dans le Jihad, c'est-à-dire l‟effort sur soi.

4- La portée sociale des chants religieux

Mahaman Diobbo serait mort vers 1834 après avoir fait de Say, l‟un des centres

intellectuels les plus importants de l‟Ouest du Niger. La chanson islamique était en vogue

au XIXe siècle dans tous les centres religieux de l‟espace nigérien. Shaykh Ousmane Dan

Fodio avait composé plusieurs chants religieux parmi lesquels, le chant intitulé Gimmul

SEKHOU OTHMANO (en annexe). Ce chant dédié à Dieu montre l‟importance de la

chanson au XIXe siècle dans l‟éducation religieuse des hommes. Les chants visent à

202
toucher les cœurs des fidèles afin de les amener à craindre Dieu et à se repentir

sincèrement. Dans un milieu où la majorité de la population ne sait ni lire ni écrire, le chant

religieux, rappelons – le, est le meilleur moyen pour faire passer directement le message

de Dieu.

Sur le plan intellectuel, les chants religieux mettent l‟accent sur la culture de

l‟esprit. Les exhortations à la quête du savoir y sont nombreuses et très explicites. Exemple

du chant 12 de notre corpus, vers 35 à 40 :

« Da ni ban ka boona ni neeseiji ma tin Si tu te préoccupes de la Pesée de tes œuvres

Ma goy fannu taaci a mayka ma ma Oeuvres quatre choses à l‟intention du gardien

de la balance

Ma koy hã ni bayray, ma goy nda gumo Cherche le savoir et fais-en usage

Ma naŋ ni da ma boori takey se gumo Aie de bonnes intentions pour tes semblables

Ma naŋ ni da ma boori ni goy yoŋ kuna Aie des bonnes intentions dans tout ce que tu

œuvres

Ni zaahiri ni baatini, si te yaasima » Extérieurement comme intérieurement ; ne sois

pas mécréant »

Ce chant d‟Alfa Mahamane Diobbo intitulé les « bonnes œuvres » a été entièrement

consacré aux actes méritoires. Dans cet extrait, le savoir est mis en avant parmi les quatre

qualités susceptibles de peser positivement en faveur de l‟homme le jour du Jugement

Dernier. L‟auteur insiste et encourage les gens à la quête du savoir, surtout le savoir utile.

203
En apprenant aux auditeurs les actes méritoires, ce chant est d‟un apport important pour la

culture d‟esprit. Le savoir permet à l‟homme d‟assumer son destin en tant qu‟individu et en

tant que fidèle d‟une religion vis-à-vis de laquelle il a des responsabilités. De nombreux

versets du Saint Coran insistent sur l‟importance du savoir. Le premier verset révélé au

prophète l‟invite à la lecture donc à la recherche du savoir, il s‟agit de la sourate AL-

ALAQ (L‟ADHERENCE) : Coran sourate 96.

Le succès de Mahaman Dobbo est surtout lié à son comportement d‟homme de paix et

de médiateur infatigable. Il a aussi un sens profond de justice et d‟équité. Il a réussi à faire

de Say, un havre de paix, ce qui va attirer des populations venues d‟horizons divers faisant

ainsi de cette ville, un carrefour sur le plan religieux et commercial. Say devient ainsi, le

plus grand centre d‟études islamiques de l‟Ouest du Niger au XIXe siècle. Mahaman

Diobbo est un érudit qui a marqué l‟espace allant du Dendi à Gao par son aura :

« Bien entendu le projet de voyage à la Mecque fut abandonné, Mohaman Diogbo


déjà vieux et fatigué n’aurait jamais pu arriver jusqu’à la ville sainte, du reste il
avait atteint son but, la religion de l’Islam s’étendait dans toute la vallée du
Moyen- Niger et son pouvoir personnel s’étendait sur toutes les régions qu’il avait
traversées »1 .

Son penchant pour le chant s‟explique par le fait qu‟il constitue un auxiliaire indispensable

car il facilite la diffusion de la religion et rend agréable son assimilation. Son chant sur le

Jugement Dernier pénètre l‟âme et interpelle l‟esprit. Le chant est un moyen d‟éducation

religieuse efficace utilisé par cet érudit pour atteindre la grande masse. L‟idée d‟enseigner

la religion par le chant procède d‟un tact pédagogique évident car partout au monde, le

chant est destiné au peuple et c‟est pourquoi le fond et la forme sont minutieusement

étudiés afin de le mettre à la disposition de l‟auditoire. Ceci pour donner au message toutes

les chances de se fixer. Auteur de plusieurs poèmes qui présentent de remarquables

qualités esthétiques, Mahaman Diobbo est incontestablement un intellectuel compte tenu

1 - Archives des Etudes Nigériennes no 16 (IRSH) : Historique du cercle de Say par Taillebourg, 1912, p. 12.

204
de la qualité de sa production. Son succès s‟explique par son attachement à un islam

tolérant qu‟il exprime à travers ses chants religieux.

Ce qui fait la singularité de Mahaman Diobbo, c‟est son option pour la non violence

dans un contexte marqué surtout par des conflits armés. Le refus de faire la guerre a fait sa

renommée au niveau des populations essoufflées par les conflits. Son succès s‟explique

aussi par les médiations qu‟il a menées et son sens profond de justice et d‟équité. Il a réussi

à faire de Say, le plus grand centre d‟études islamiques de l‟Ouest nigérien au XIXe siècle.

Nous pensons que si l‟œuvre de cet alim a eu du succès, c‟est à cause de son option pour la

non violence. Même ceux qui ont opté pour le Jihad, sur le terrain, le bilan est mitigé.

Contrairement à ses contemporains, Mahaman Diobbo n‟a pas laissé d‟écrit mais, il

a légué des textes oraux qui sont des poèmes. Ces derniers appelés Caw dooni (Chants

religieux) en zarma sont des traités sur la vie du musulman dans sa cité. Tous ses poèmes

interpellent le fidèle à préparer sa vie dans l‟au- delà : ils montrent au musulman comment

se comporter dans la société, le chemin à suivre pour avoir le Salut… Son penchant pour

la poésie s‟explique par le fait tous les grands acteurs du Jihad l‟ont utilisée comme

principal moyen d‟éducation et de moralisation de la société. En plus, la poésie chantée

dans la langue du terroir est facile à retenir même pour les illettrés. Son chant sur le

Jugement Dernier pénètre l‟âme et interpelle l‟esprit. Le chant est un moyen d‟éducation

religieuse efficace utilisé par cet érudit pour atteindre la grande masse.

Mahaman Diobbo n‟a certes pas laissé d‟écrits mais, pour nous l‟intellectualisme

n‟est pas forcément lié à l‟écrit, c‟est une réflexion sur le monde. Le fait qu‟il soit

l‟auteur de textes oraux qui sont de véritables traités sur la vie du musulman fait de lui un

intellectuel. Le fait aussi qu‟il ait opté pour la non violence comme mode de conversion

des fidèles, nous confirme la hauteur de vue de l‟auteur. Et, nous le classons dans la

205
catégorie d‟intellectuels que Kane (Kane, 2003) qualifie d‟ « intellectuels non

europhones ».

206
Carte No 8 : Aire d’influence de Mahaman Diobbo

207
Chapitre IX : L’œuvre des successeurs d’Alfa Mahaman Diobbo

Après la mort de l‟alim vers 1834, ses fils vont le succéder. Ils vont essayer de

maintenir tant bien que mal le rayonnement de Say sur le plan religieux et économique.

Mais en 1897, interviendra la période coloniale et Say tombera ainsi en décadence. Ce

chapitre abordera l‟œuvre des successeurs de Mahaman Diobbo, les rapports entre Say et le

monde musulman, le rôle joué par ce centre dans l‟islamisation des populations de l‟Ouest

du Niger.

I- Le successeur d’Alfa Mahaman Diobbo

Parmi ses successeurs, Boubacar est présenté comme celui qui a les mêmes traits de

caractères que son père. Selon la tradition locale, ce sont ses qualités morales et

intellectuelles évidentes qui ont poussé l‟érudit à porter son choix sur lui et non sur son

grand frère, Sidi.

1-Le choix de Boubacar

Malgré l‟entente cordiale au sein du cercle des ouléma, Mahaman Diobbo n‟a pas

laissé au groupe collégial (groupe d‟érudits) formé autour de lui, la latitude de choisir par

consensus son successeur après sa mort. Au niveau de sa famille même, il a porté son

choix non pas sur son fils aîné, Sidi mais sur son petit frère, Boubacar. Sentant ses forces

l‟abandonner, il a envoyé l‟aîné de ses fils à Sokoto avec un message contenu dans une

enveloppe scellée. Dans ce message, il informe les autorités de Gwandou qu‟il a porté son

choix sur son fils Boubacar dit Modibo pour le succéder et leur demande par conséquent

d‟entériner ce choix. Alors que d‟habitude, tous les sujets qui engagent la vie de la cité

208
sont débattus et traités par le groupe collégial et les solutions trouvées ont toujours été

consensuelles. Cette anticipation pour désigner son successeur ne procède- t- elle pas d‟une

volonté de conservation du pouvoir au seul profit de sa famille ?

Comme à Sokoto et dans tous les grands centres religieux, les dirigeants se sont

arrangés à léguer le pouvoir à leurs descendants. Mahaman Diobbo n‟a pas échappé à cette

logique. Il a empêché à son fils aîné de le succéder. Pourtant, c‟est lui qu‟il a envoyé à

Sokoto pour apporter la lettre :

« Sentant ses forces l’abandonner, Alfa Mahamane Diobbo envoya son fils aîné
Sidi Alpha Mahamane Diobbo avec un message officiel à Sokoto cacheté et scellé.
Sidi qui ne pensait qu’à remplacer son père au pied levé, s’est précipité à Yaouri
(Nigeria) en pirogue. De Yaouri, il prit des chevaux jusqu’à Sokoto. Arrivé à
Sokoto, il remit le message officiel au Sultan qui était en même temps le suzerain du
royaume de Say. Après lecture du Message, le Commandeur des croyants, Sultan
de Sokoto, aurait dit à Sidi : « Restes ici, je vais dans un village, à mon retour, je te
donnerai la réponse » (Cissé, 2001 : 24).

Les autorités de Sokoto dépêchèrent aussitôt des émissaires mais ces derniers

n‟avaient pas trouvé Mahamane Diobbo en vie. Ils assistèrent à l‟enterrement de ce dernier

et lirent devant l‟assistance le message désignant Boubacar comme successeur. Après

l‟intronisation de Boubacar, Sidi fut remercié par l‟émir de Sokoto qui l‟invita à rentrer à

Say. De retour dans cette localité, il apprit la nouvelle et s‟indigna en soupirant : « Je ne

reconnaitrais jamais un tel pouvoir ». Il quitta alors la cour pour créer sa propre cour qui

deviendra à la longue un quartier :

« Sidi de retour a appris la nouvelle, surpris, il soupira et dit en Djerma : « Aï si


sapé assé » cela veut dire littéralement : » Je ne soutiendrai pas Modibo1». Il
refusa donc de le reconnaitre comme roi de Say. Immédiatement après la décision
prise par Sidi, ses captifs se sont rendus à FADA2 pour défaire toutes les paillotes
et ils sont venus construire un véritable village là où était assis Sidi. Un mois après
ces événements le roi Modibo demanda à sa cour : « Qui a perçu Sidi ? » Un
courtisan lui répondit : « Sidi s’est installé au bord du fleuve où il règne sur un
petit FADA ». Modibo rétorqua : « Que Dieu fasse qu’il en soit ainsi. Que ce soit
effectivement un petit FADA ». Voilà la raison pour laquelle, il existe deux Fadas à

1 - Modibo : C‟est le surnom de Boubacar.


2 - Fada, c‟est le quartier dans lequel réside le souverain qui dirige la principauté de Say. En Haoussa Fada,
c‟est le singulier, au pluriel, c‟est Fadodi. Au lieu de deux Fadas, c‟est plutôt deux Fadodi.

209
Say : Fada- Beyri où règne le roi de Say, et Fada Kaina, notre quartier où règne
les descendants de Sidi » (Cissé, 2001 : 24).
L‟auteur exagère quand il assimile Say à un royaume. Ce centre d‟études

islamiques n‟est ni un royaume ni un émirat, c‟est une entité socio- politique à la tête de

laquelle se trouve un leader religieux qui porte le titre d‟Alfaizé (après la mort du

fondateur). Il faut souligner à ce niveau qu‟il est un descendant de Sidi et selon lui, c‟est le

penchant de son grand père pour la guerre qui constitue la principale raison pour laquelle

Mahaman Diobbo ne l‟a pas choisi comme successeur :

« Son fils aîné, Sidi, bien qu’étant lettré en arabe était surtout un guerrier
farouche, intrépide, vaillant, téméraire et réputé invincible sur les champs de
bataille. Aussi le « Wali1 » nourrissait- il quelques appréhensions pour la
propagation de l’islam dans sa région. Car contrairement à la « Jihad islamique »
plus ou moins en vogue à ce moment là, il souhaitait une adhésion à l’islam par la
persuasion et le consentement volontaire du fidèle » (Cissé, 2001 : 21).

Nous ne savons pas d‟où est- ce que l‟auteur tire toutes ces qualités guerrières qu‟il

attribue à son grand père car Say est avant tout, un centre de propagation de l‟islam qui ni

armée ni police. En plus, Say n‟a jamais fait la guerre. Comment un homme issu d‟un tel

milieu peut – il devenir un grand guerrier ?

Selon les descendants de Boubacar, si le fondateur de la ville de Say a porté son choix

sur leur grand père, c‟est parce qu‟il remplit les conditions pour diriger un centre d‟études

islamiques. Sur ce plan, tous les témoignages concernant Boubacar concordent quant à

l‟identité de caractère entre son père et lui. Il est aussi présenté comme un Wali par la

population de Say.

2- L’œuvre de Boubacar (1834-1860)

Il est généralement considéré comme celui qui a véritablement régné sur le centre

d‟études islamiques de Say car son père, Mahaman Diobbo n‟a jamais voulu du titre

1 - Wali : Il s‟agit de Mahaman Diobbo. Contrairement à la tradition populaire, le wali n‟est pas un faiseur de
miracle mais un saint.

210
d‟Amirou et n‟a pas cherché à se faire investir par les autorités de Gwandou. Sa seule

préoccupation était sa mission religieuse, tâche à laquelle, il avait consacré toute sa vie.

Pendant les vingt six ans (26 ans) qu‟il passa à la tête de Say, Boubacar contribua à

augmenter la réputation de ce centre. Il multiplia le nombre d‟écoles coraniques et fit de

Say, un foyer d‟attraction très important. Comme son père, Boubacar fut un pacifiste qui a

convaincu par l‟exemple. Selon Alfaizé Amadou Issa Cissé, chef de canton actuel de Say :

« Alfa Mahaman Diobbo n’a jamais régné sur cette cité, il a certes exercé son
pouvoir spirituel et son magistère moral car tout comme Ousmane Dan Fodio, Alfa
Mahaman Diobbo n’était pas un chef, mais un guide. C’est son fils, Boubacar qui
commença à régner sur Say avec le titre de ‘’Alfaizé’’ et ce, 26 ans durant»1.

Et d‟après de nombreux témoignages Boubacar était un ‘’Wali’’, à l‟image de son

père. En effet, il va faire de Say une plaque tournante de l‟érudition pour les milliers de

disciples et d’ouléma, un pôle d‟attraction politique, social et religieux. Sur le plan

politique, son œuvre se caractérise surtout par le raffermissement des liens entre Say et

Sokoto d‟une part et Say et Gwandou d‟autre part. Malgré ce poids politique, Boubacar est

resté attaché à la ligne de conduite de son père, la non violence. En effet, quand Mohamed

Abdoulaye (fils d‟Abdoulaye Dan Fodio) a sollicité son aide pour combattre les

Goumantché de Botou, Boubacar refusa. Boubou Hama rapporte cette désapprobation :

« Voulant livrer bataille aux gourmantchés de Botou, Hamadou Abdoulaye et


Aboulhassane fils de Boubacar Loudoudji firent appel à Boubacar Alpha Mahaman
Diobbo, roi de Say. Ils mirent celui-ci au courant de leurs intentions. Comme les gens de
Say ne faisaient jamais la guerre, Boubacar Mahaman Diobbo dit à ses amis :
-Vous allez livrer combat à un homme qui n’est pas musulman certes, mais qui leur
donne des cadeaux et qui fait sans cesse de l’aumône, beaucoup de bien. Après cette
remarque, Boubacar Mahaman Diobbo regagna Say. Aboulhassane était fort mal en point.
Il n’alla à cette guerre qu’à contre cœur. De Diongoré, Hamadou Abdoulaye et
Aboulhassane conduisirent leurs armées devant Botou » (Hama, 1969 (a) : 79 - 80).

Ces propos montrent la hauteur de vue de Boubacar, qui tient à suivre la ligne de

conduite de son père. En effet, ce dernier disait toujours ceci ; Ay si boro ŋwa, boro si ay

55- Entretien avec Alfaizé Amadou Issa Cissé à Say, le 12/12/07.

211
ŋwa autrement dit :  je n‟agresse personne et personne n‟ose m‟agresser. Et, Modibo

étant toujours à ses cotés, imita l‟exemple de son père sur tous les plans.

Sur le plan religieux, Modibo a maintenu et a renforcé l‟enseignement religieux

dans le centre d‟études islamiques de Say :

« Modibo fut un homme d’une grande culture islamique. En dehors des écoles
coraniques créées par son père, il a ouvert plusieurs autres écoles à Say et dans les
villages se trouvant dans sa sphère d’influence. Il va chercher à se faire introniser
Amirou par les autorités de Gwandou. C’est sous son règne que le poids politique
de Say a été renforcé. Avec la chute de Tamkalla, ce centre d’études islamiques est
devenu le représentant de Gwandou dans l’Ouest du Niger. Ce rôle politique
dévolu à cette ville a renforcé les activités religieuses et économiques. Comme son
père, il a rédigé plusieurs chants religieux parmi lesquels fooma (vanité),
Muhammadu (le prophète), Muumuni Woyey (les croyantes)… C’est sous règne
que Say est devenu véritablement un carrefour sur le plan religieux et
économique »1.

Comme sous le règne de son père, on distingue trois niveaux d‟enseignement que

Boubacar va renforcer : le niveau élémentaire, le niveau complémentaire et le niveau

formation des formateurs. Le niveau élémentaire, c‟est le premier niveau qui va de

l‟initiation à la mémorisation. La première étape de ce niveau consiste à enseigner

l‟alphabet arabe aux talibé :

« Pour résoudre le problème de l’identification des lettres, l’enseignant fait appel à


la langue maternelle de l’élève, haoussa, peul-e, songay-zarma ou autre et se
réfère parfois à des objets ou des images présents dans l’environnement quotidien
de celui- ci. Ainsi, chaque lettre aura une description propre qui la caractérise »
(Moulaye, 1995 : 97).

Après ce niveau élémentaire qui consiste à identifier les lettres, à lire, à écrire et à

mémoriser le Coran, l‟élève passe au niveau complémentaire où il étudie des manuels de

théologie, de jurisprudence musulmane, de grammaire arabe. Après, il a le choix de rentrer

dans son village pour ouvrir une école ou d‟intégrer le troisième niveau, celui de la

formation des formateurs : « Ce niveau se trouve dans la cour de la grande mosquée et est

1 - Entretien avec Sita Akilou, paysan à Say le 23/10/2007.

212
dirigé par l’imam des imams. C’est le stade d’approfondissement des connaissances

religieuses »1.

En dehors de ces trois niveaux, il existe, un niveau informel, les cercles de

causeries pour approfondir ses connaissances :

« Parallèlement à cet enseignement structuré qui est l’apprentissage du Coran, il


existe un autre mode d’enseignement plus informel. Nous voulons parler des
cercles de causeries traditionnelles.
Les cercles de causeries ne sont pas à proprement parler des lieux d’enseignement
mais, animés par des personnes instruites en matière de sciences religieuses. Ces
cercles jouent un rôle fort important dans la transmission d’un certain savoir
religieux puisqu’ils permettent à beaucoup d’acquérir des éclaircissements sur
certains points qui leur étaient restés obscurs » (Moulaye, 1995 : 120).

Parmi ces niveaux d‟enseignement, le cours élémentaire est le plus fréquenté.

Généralement, la plupart des talibé ne dépassent pas ce niveau car ils fréquentent ces

écoles pour apprendre juste quelques versets indispensables à la prière. Ce sont les élèves

issus de familles de lettrés musulmans qui vont jusqu‟au niveau supérieur parce que le

savoir permet à cette époque d‟accéder aux plus hautes fonctions. Sous le règne de

Boubacar tous les stades étaient très actifs. Il y avait une véritable ferveur religieuse dans

la ville à cette époque. :

« Boubacar s’était surtout attelé durant son règne à faire rayonner la ville de Say
sur le plan religieux. Pendant la saison sèche, les talibé venaient des villages
environnants de Say (Torodi, Lontia, Diongoré…), mais aussi des contrées
lointaines telles que le pays Soηey, Wogo, le Zarmaganda… En dehors des élèves,
plusieurs maîtres s’y rendaient pour approfondir leurs connaissances. Say était
devenu, un véritable pôle d’attraction sur le plan religieux »2.

Après Boubacar, ses successeurs vont s‟efforcer à maintenir cette ferveur religieuse.

Ces trois niveaux, on les retrouve presque dans tous les centres d‟études islamiques en

Afrique. Mais dans des grands foyers religieux (Sokoto, Gao…), il y a des grandes écoles

pour l‟étude des sciences annexes : philologie, philosophie, l‟astrologie, mathématiques,

sciences secrètes…

1 - Entretien avec Alzouma Bazi Cissé, infirmier à la retraite à Niamey le 16/12/2010


2- Entretien avec Sita Akilou, paysan à Say le 23/10/2007.

213
II- Les successeurs de Boubacar

1-Le choix d’Abdourahamane (1860 -1872)

Après le décès de Boubacar Alfa Mahaman Diobbo, le conseil des ouléma de la

ville de Say choisit son frère, Abdourahamane pour le remplacer. Il régna sur Say de

1860 à 1872. Comme son prédécesseur, son intronisation se déroula en présence des

représentants de Sokoto et de Gwandou. Cette présence entérine le choix du souverain par

le conseil des ouléma et apporte la bénédiction du calife de Sokoto et de l‟émir de

Gwandou. Il faut signaler à ce niveau que, même si le dirigeant est toujours choisi au sein

de la famille de Mahaman Diobbo, des critères sont définis pour accéder au trône. Il s‟agit

surtout du critère religieux qui met en avant à la fois les capacités intellectuelles mais aussi

les qualités morales des candidats. En effet, pour diriger un centre d‟études islamiques

comme Say, il faut un homme qui a non seulement une large culture islamique mais aussi

qui est moralement irréprochable. Abdourahamane est jugé apte par le conseil des ouléma

à assumer une telle charge. Selon la tradition locale, durant ses douze années de règne, il

n‟a pas failli à la mission qu‟on lui a confiée. Il s‟est efforcé de garder l‟image de marque

de la cité religieuse, afin que Say puisse continuer à jouer son rôle sur le plan religieux et

économique :

« Abdourahamane n’est pas un Wali comme ses prédécesseurs. Mais, c’est un


érudit ayant des connaissances approfondies dans les sciences religieuses. Il a
maintenu et renforcé tous les niveaux d’enseignements et Say a conservé son statut
de carrefour religieux jusqu’à la fin de son règne. Ses successeurs vont essayer tant
bien que mal de conserver cet acquis mais l’installation de l’administration
coloniale va entrainer le déclin de centre d’études islamiques »1.

1 - Entretien avec Soumana Nouhou, directeur de la radio Liptako de Say le 23/10/2007.

214
2- Les autres Alfaizé et le début de la fin d’une époque

Avant l‟installation de l‟administration coloniale, tous les souverains qui se sont

succédé à la tête du centre d‟études islamiques ont été choisis par le conseil des ouléma de

la ville. Ce conseil composé par les imams des différents quartiers de Say a toujours été

guidé par le souci majeur de choisir parmi les descendants d‟Alfa Mahaman Diobbo un

dirigeant capable de poursuivre la mission religieuse du fondateur de la ville, de maintenir

l‟équilibre sociale et de faire régner la paix sur l‟ensemble du territoire.

C‟est ainsi que, les Alfaizéqui se sont succédé sur le trône de Say depuis

Abdourahamane jusqu‟à l‟installation de l‟administration coloniale ont été choisis par le

conseil en fonction des critères précités. Ce sont :

- Moulaye Alfa Mahaman Diobbo (1872-1874).

- Abdoulwahidou Alfa Mahaman Diobbo (1874-1880).

- Salifou Alfa Mahaman Diobbo (1880-1887).

- Amadou Satourou Modibo (1887-1895).

Au début de la pénétration coloniale française, Say fut occupé sans conquête sous

le règne d‟Amadou Satourou Modibo, petit fils de Mahaman Diobbo. Say fut érigé en

cercle autonome en 1902. Le premier poste de Say a été inauguré par le lieutenant Pelletier

en 1897. Ce dernier, dès son arrivée fixa son campement sur l‟île de Talibiya (à quelques 5

kilomètres au sud de Say). Quelques années plus tard, l‟administration coloniale

abandonna l‟île pour s‟installer à l‟actuel emplacement de la préfecture. C‟est ainsi que,

des quartiers comme Goungo-Bon, Bonfeba, Modibadjé seront déplacés et le terrain sera

occupé par l‟administration coloniale. En 1902, Say devient un cercle autonome rattaché

au Dahomey (Benin actuel). Le décret du 28 décembre 1926, rattache au Niger les

215
territoires qui constituaient le cercle de Say et l‟ancienne subdivision de Téra. Le cercle de

Say fut supprimé le 30 novembre 1927 et devint alors subdivision de Niamey.

Avec l‟implantation de l‟administration coloniale, la chaîne initiatique est rompue,

les déplacements des lettrés musulmans sont contrôlés. Avec l‟institution de

l‟enseignement de type européen, les enfants de la ville et surtout les descendants des

souverains sont envoyés à l‟école coloniale et, le temps consacré à l‟étude du Coran a été

considérablement réduit. Par conséquent, les jeunes n‟ont pas le niveau de leurs aînés et

Say amorça ainsi son déclin en tant que centre d‟études islamiques. Et les populations

n‟ont plus en mémoire que le passé glorieux de la ville. En plus, ce sont les échanges qui

font la richesse d‟une culture. En freinant le mouvement des ouléma, l‟administration

coloniale mit fin au rayonnement du centre d‟études islamiques de Say :

«Les marabouts de Say étaient en rapport avec ceux de Sokoto, correspondant par
l’intermédiaire de divers émissaires talibé, marabouts itinérants ou simples
colporteurs caravaniers sur les questions religieuses. Il semble que leur instruction
religieuse ait été assez élevée. Cependant leur enseignement n’était qu’un
enseignement de premier degré et leurs talibés les plus doués allaient continuer et
compléter leurs études, soit à Gao pour les études littéraires, soit à Zinder, pour les
études exégétiques. A l’arrivée des français, ces relations cessèrent et la décadence
qui devait frapper Say au point de vue commercial devait aussi l’atteindre au point
de vue religieux» (Marty Paul, rapporté par Idrissa, 1987, vol4 : 455).

Cette régression de l‟influence religieuse et des activités d‟enseignement des

grands centres intellectuels n‟était pas uniquement perceptible à Say, on note la même

tendance au niveau de tous les grands centres d‟études islamiques de la colonie du Niger.

Selon Marty Paul : «La conséquence majeure de la politique coloniale résidait dans ces

faits. En limitant l’influence des marabouts à leur canton de résidence, l’administration

brisait en même temps l’audience des plus grands d’entre eux » (Marty Paul, rapporté par

Idrissa, 1987, vol4 : 456). Cette situation suscita cette remarque de la part de Kimba

Idrissa : « Les échanges culturels et scientifiques, moteurs essentiels de l’accroissement

des connaissances, par la même occasion baissèrent, portant préjudice à l’enseignement

216
supérieur et à la recherche » (Idrissa, 1987, vol4 : 456). Comme on le constate, la

colonisation porta un coup dur aux activités religieuses dans le centre d‟études islamiques

de Say qui amorça ainsi son déclin.

III- Les rapports entre Say et le monde musulman

1- Les rapports entre Say, Gwandou et Sokoto

Gwandu: «The word Gwandu is a derivation from the Hausa word ‘Gandu’
which originally means a royal farmland inhabited by (farms) slaves. The
village now called Gwandu initially belonged to Kanta the great Sarkin
Kebbi. In this farmland, an overseer (Sarkin gandu) was appointed to
supervise the activities of the gandu and his village gradually grew into a
sizeable settlement» (Magaji, 1986: 12).

Traduction: [Le mot Gwandou dérive du mot haoussa 'Gandu‟ qui signifie à l'origine un

domaine royal, habité et mis en valeur par des esclaves. Le village qui s'appelle maintenant

Gwandou appartenait initialement au grand Sarkin Kanta de Kabi. Dans ces champs, un

surveillant (Sarkin gandu) avait été nommé pour superviser les activités sur le domaine et

ce village peu à peu était devenu un centre important]. Ce fut le fondateur de l‟Etat du

Kabi, Kanta qui initia la création de villages d‟esclaves pour mettre en valeur et à son

profit, les réserves de terres fertiles de son territoire. Plus tard, des Peul attirés par la

fertilité des sols sont venus s‟installer à côté de ce village d‟esclaves. Après la conquête de

Birni -N‟Kabi par les jihadistes, Shaykh Ousmane Dan Fodio implanta une base militaire

dans le village. C‟est un site stratégique qui permet de maintenir l‟influence du Shaykh

dans la zone mais aussi de contenir les assauts des Gobirawa, des Touareg mais aussi des

Kabbawa. Quelques années plus tard, Gwandou sera érigé en base militaire et

administrative de la partie Ouest du Califat suite à la division de cet état en deux par

Ousmane Dan Fodio après la chute d‟Alkalawa : « After the capture of Alkalawa, the shehu

gave all the country west of Gwandu to Abdullah and all the east to Bello » (Hiskett, 1963:

16). Traduction: [Après la chute d‟Alkalawa, le Shaykh a donné toute la partie Ouest de

217
Gwandou à Abdoulaye et toute la partie Est à Bello].Selon Saka Balogun, cette division est

intervenue en 1812: « Earlier in 1812, the Shaikh had divided the Caliphate into spheres of

influence under the supervision of his most senior lieutenants. Abdullah was given

territories west of Sokoto while Muhammed Bello was assigned the Eastern emirates »

(Saka Balogun, 1970: 103).Traduction: [Très tôt, en 1812, le Shaykh avait divisé le Califat

en plusieurs sphères d‟influence sous la supervision de ses plus anciens lieutenants. Les

territoires à l‟Ouest de Sokoto revinrent à Abdoulaye tandis que Mohammed Bello se vit

assigner les émirats de la partie Est]. En réalité, le Shaykh a divisé l‟Etat en quatre parties :

l‟Est échoit à son fils Mohamed Bello, l‟Ouest à son frère Abdoulaye Dan Fodio, le Nord à

Ali Jedo, le responsable des opérations militaires et le Sud à ses deux Abdoulsalam et

Boukari (Balogun, 1974 : 405).

Le Shaykh, compte tenu de l‟immensité de l‟empire a probablement procédé à ce partage

afin de permettre une meilleure organisation militaire et administrative de Sokoto. Mais,

cette division ne signifie pas le retrait total du Shaykh de la vie politique, il resta tout de

même responsable de l‟appareil militaire et administratif de l‟Etat jusqu‟à sa mort en avril

1817. C‟est après la mort du Shaykh et la querelle de succession qui s‟en est suivie entre

Abdoulaye et son neveu Bello que Gwandou est érigé en entité autonome comme le

souligne Saka Balogun : « He returned to his base of Bodinga disappointed. It was from

this year Abdullah began to control western section of the Caliphate without reference to

Sokoto » (Balogun, 1970 : 107- 108). Traduction : [Il retourna dans sa base de Bodinga très

déçu. Ce fut à partir de cette année là qu‟Abdoulaye commença à contrôler la section Ouest

du Califat sans tenir compte de Sokoto]. Mais, les deux émirs vont se réconcilier plus tard

surtout après la bataille de Kalambaina au cours de laquelle, Mohamed Bello apporta son

appui militaire à son oncle pour mettre en déroute la coalition du Zamfara- Kabbawa-

Arawa et Dendawa :

218
« The military success of Kalambaina restored an atmosphere of understanding
between the rulers. Abdullah now recognized Bello as the caliph and swore
allegiance to him accordingly. The Amir al-Mu’minin, in turn, confirmed the
appointment of Abdullah as the Emir of Gwandou » (Balogun, 1970 : 166).

Traduction : [Le succès militaire de Kalambaina restaura une atmosphère de

compréhension entre les dirigeants. Abdoulaye, ensuite reconnut Bello comme le Calife et

lui voua allégeance comme il se doit. Quant à Amir Al Mumin, il confirma à son tour, la

désignation d‟Abdoulaye comme émir de Gwandou]. Même si juridiquement, cet émirat

est une dépendance de Sokoto, il n‟en demeure pas moins qu‟il jouit d‟une large

autonomie à cause de la personnalité de son leader qui a joué un rôle important dans les

différentes opérations militaires qui ont abouti à la formation de l‟Empire de

Sokoto : « The Emir of Gwandu, after his appointment, was free to, and did take his

executive decisions and carried them out without reference to Sokoto » (Balogun, 1970 :

341). Traduction : [L‟Emir de Gwandou, après sa désignation était libre de prendre les

décisions et il les faisait exécuter sans se référer à Sokoto].

L‟Etat de Gwandou était bien connu dans l‟Ouest du Niger car il y a plusieurs

territoires de cette zone qui reconnaissent sa suzeraineté (Say, Birni- N‟Gaouré,

N‟Dounga, le Namari, (Kouré), Goudel, Boubon, Lamordé, Dargol, Téra, le Liptako, le

pays Kourté et Sinder) pour son influence religieuse qui s‟étendait jusqu'à Gao. Selon Saka

Balogun, les Lamido ou Amirou, placés à la tête de ces territoires jouissent d‟une

autonomie de gestion: « For most of the nineteenth century, the running of the emirates of

Gwandu, Birni Ngaure, Say, Torodi, Bittinkogi, Kunari, Yaga and Liptako was seen mainly

as the responsibility of their respective Emirs » (Balogun, 1970 : 262). Traduction :

[Pendant presque tout le XIXe siècle, la gestion des émirats de Gwandou, Birni-Gaouré,

Say, Torodi, Bittinkodji, Kounari, Yaga et Liptako étaient considérés comme étant sous la

responsabilité de leurs émirs respectifs].

219
Selon cet auteur, toutes les entités socio- politiques qui avaient reçu l‟étendard du

Jihad à Sokoto sont des émirats : « Each of the Jihad leaders in the various localities

which eventually came under Gwandu administration obtained a flag, the symbol of

Caliphal authority to establish an emirate » (Balogun, 1970 : 375- 376). Traduction:

[Chacun des dirigeants des diverses localités qui sont sous la tutelle de Gwandou a reçu

l‟étendard, le symbole de l‟autorité Califale d‟établir un émirat]. S‟agissant des centres

d‟études islamiques de l‟Ouest du Niger, il est exagéré de les qualifier d‟émirats. Ce sont

plutôt des entités socio- politiques à la tête desquelles se trouvent des leaders religieux.

Ces entités n‟ont pas la dimension et ne disposent pas non plus toutes les institutions d‟un

émirat. Le simple fait d‟avoir l‟étendard ne peut pas faire d‟eux des émirats.

Les autorités de ces centres, envoient à la fin de chaque année à celles de Gwandou

des présents en guise de reconnaissance. En cas de difficultés, elles sollicitent l‟appui

militaire de l‟armée de cet Etat. Il faut souligner à ce niveau que, la défaite du Kabi a été

un facteur déterminant dans l‟émergence de Gwandou entant qu‟émirat : « The successful

defeat of Kebbi, enabled the Muslims to move from Sabon Birni in Zamfara Kingdom to

Gwandu town in Kebbi. It was this continuous muslim trek to Gwandu that made possible

the establishment of a more permanent settlement in the area » (Maigari, 1988:

15).Traduction: [La défaite cuisante de Kabi a permis aux musulmans d‟avancer de Sabon-

Birni du royaume de Zamfara à Gwandou, ville au Kabi. C‟était cette perpétuelle excursion

musulmane sur Gwandou qui a rendu possible leur installation définitive dans la zone]. La

création de cet émirat ne vise qu‟à assurer une meilleure administration d‟un Califat

devenu très vaste. Mais, la mission des leaders du Jihad reste la même : répandre l‟islam à

travers l‟éducation religieuse des Sarakouna, des juges, des ouléma en un mot de toute la

communauté. Boubou Hama fournit plus d‟informations sur les relations entre Gwandou et

ses dépendances de l‟Ouest :

220
«L’importance de Gwandu réside dans ses rapports plus ou moins tenus avec les
Zarma et les peuls du Dallol, de Say, de Lamordé et de Torodi. Le royaume de Téra
allait chercher le turban vert à Sokoto. Rapidement, cet état ne devint plus que
purement théorique et d’ordre spirituel maintenu, d’ailleurs par le relais très
souple du saint de Say, Alfa Mahaman Diobbo, répondant d’Abdoulaye Dan Fodio
dans le‘’Boboye’’, chez les Zarma et les sonŋay du fleuve, du Dendi, du Bargou, de
Téra et de Kokoro» (Hama ,1967 : 160).

Say entretenait des relations privilégiées avec Gwandou. Dans l‟Ouest du Niger,

ce centre d‟études islamiques grâce à sa position géographique, permettait aux autorités de

Gwandou de contrôler les voies du fleuve (surtout celles de la rive droite). Après la chute

de Tamkalla en 1854, les principales voies d‟accès au fleuve sur la rive gauche passaient

sous le contrôle des Zarma, alliés du Kabi. Les autorités de Say devinrent alors, les

représentants de Gwandou dans toute la zone :

« The sack of Tamkala exterminated the emirate. The control of the former territory
of Tamkala in a large and strategic section of Dendi enabled the Kebbi alliance to
blockade the surviving emirates of Gwandu in Gurma country. This blockade
succeded in making passage and communications between Gwandu and these
emirates generally very difficult. It was this difficulty that compelled Gwandu to
delegate her supervisory authority to Say as already noted. The result was Gwandu
cessed to exercice effective control over the surviving emirates West of its capital
from about 1860 » (Balogun, 1970 : 430).

Traduction : [La mise à sac de Tamkalla mit fin à l‟existence de l‟émirat. Le contrôle de

l‟ancien territoire de Tamkalla dans une section importante et stratégique du Dendi permit

à l‟alliance Kabi le blocus des émirats survivants de Gwandou dans le Gourma. Ce blocus

avait rendu difficile le passage et les communications entre ces émirats et Gwandou. C‟est

cette difficulté qui avait contraint Gwandou à déléguer ses pouvoirs de surveillance à Say.

Le résultat, ce que Gwandou avait cessé d‟exercer un contrôle effectif sur ces émirats de

l‟Ouest à partir de sa capitale autour de 1860].

A partir de cette date, seules les autorités de Say étaient intronisées par cet émirat.

Alfaizé de Say intronisait à son tour, les autres Amirou de la région : N‟Dounga, Karma,

Larmordé, Birni N‟Gaouré. Le rôle de représentant de cet Etat avait renforcé l‟influence

221
religieuse de Say dans l‟Ouest du Niger. Les relations entre Say et cet Gwandou s‟étaient

surtout raffermies sous le règne de Boubacar. Selon Alfaizé Amadou Issa Cissé, chef de

canton de Say :

«Alfa Mahaman Diobbo a tout simplement régné en tant que chef religieux et n’a
pas cherché à être sous la coupe directe de Sokoto. Toutefois, il a entretenu de
bonnes relations avec cet Etat grâce à l’échange de correspondances. C’est avec
le fils et successeur, de Mahaman Diobbo, Boubacar nommé comme représentant
du Gwandou dans l’Ouest du Niger que les liens entre Say et cet Etat vont se
renforcer davantage »1.

Balogun Saka confirme les propos de l‟honorable chef de canton en ces termes:

« Modibo, the son and first successor of Jobo is generally regarded as the first
Emir of Say. Wide-spread traditions maintain that, although there was
understanding between Muhammad Jobo and Gwandu, Jobo lived and died as a
religious leader, not as a ruler. Say traditions itself asserts that Modibo was the
first appointed Emir of Say » (Balogun, 1970 : 116).

Traduction : [Modibo, fils et premier successeur de Diobbo est considéré comme le

premier Emir de Say. Des traditions très répandues soutiennent que, bien qu‟il eût une

compréhension mutuelle entre Diobbo et Gwandou, celui- ci vécut et mourut à Say comme

un chef religieux, mais pas comme un souverain. La tradition à Say, elle –même affirme

que Modibo était le premier Emir désigné de Say].

La plupart des ouvrages qui ont abordé la question tout comme la tradition locale

confirment la version selon laquelle, Mahaman Diobbo n‟a pas cherché à être sous la

coupe de Sokoto :

« Bien qu’au moment de son installation à Say vers 1812, cette localité était déjà
sous la juridiction de Gwandu, Alfa Mahamman Jobbo se garda de se faire
nommer amir par les autorités musulmanes de cette localité, il préféra se consacrer
essentiellement à son travail de propagation d’un islam pur qui se fit exclusivement
de manière pacifique… » (Zakari, 2007 : 96).

1 -Entretien avec Alfaizé Amadou Issa Cissé, chef de canton de Say le 12/12/07.

222
Tous les témoignages que nous avons recueillis à Say confirment cette version. Gwandou

même ne s‟est affirmé comme émirat à part entière qu‟après la mort d‟Ousmane Dan

Fodio, comme le souligne Balogun : «Gwandu emerged as a distinctive and separate

Emirate in the Sokoto caliphate after the death of Shaikh Uthman Dan Fodio in 1817»

(Balogun, 1967 : 278).Traduction : [Gwandou a émergé comme un émirat distinct et séparé

de Sokoto après la mort de Shaykh Ousmane Dan Fodio en 1817]. Les relations entre

Gwandou et Say vont surtout se renforcer sous le règne de Boubacar. C‟est ce dernier qui

ira chercher le drapeau et il s‟est fait nommer en même temps représentant de l‟émirat à

l‟Ouest du Niger. Le poids politique de Say dans la zone va devenir important après la

chute de Tamkalla en 1854. Say va ainsi prendre la relève de Gwandou dans cette zone.

Depuis lors, c‟est l‟émir de Gwandou qui intronise le souverain de Say qui, à son tour

intronise les autres Amirou de l‟Ouest du Niger qui sont sous la tutelle de Gwandou. Selon

Lem :

« jusqu’en 1912, date où cette coutume fut abolie pour des raisons politiques par
l’administrateur Taillebourg, les chefs du canton de Say, successeurs de Mohaman
Diobo, recevaient à leur nomination l’investiture du chef de Gandou et eux- mêmes
donnaient par délégation l’investiture, au nom de ce chef nigérien, à tous les
nouveaux chefs de cantons et de villages soumis à leur influence » (Lem, 1943 :
68).

Saka Balogun confirme cette influence politique de Say dans la zone :

« What is particullary significant about Say is the widespread fame which


Muhammad Jobo gave the emirate. This fame made it possible for Say to enjoy a
king of hegemony over all the other emirates west of Gwandu, especially after the
Kebbawa led a succeful resistance movement against Gwandu from the middle of
the nineteenth century »

Traduction :[Ce qui est significatif à propos de Say, c‟est la renommée que Mahaman

Diobbo a donnée à l‟émirat. Cette notoriété a permis à Say d‟avoir l‟hégémonie sur les

autres émirats de l‟Ouest de Gwandou, surtout après la résistance victorieuse des Kabbawa

au milieu du XIXe siècle ]. Ainsi, par délégation de pouvoir les autorités de Say intronisent

les souverains des autres centres d‟études islamiques : « La cérémonie d’investiture, qui

223
consistait dans la remise d’un turban, et qui très probablement continua à s’exercer à

l’insu des autorités françaises, donnait une véritable consécration religieuse aux nouveaux

élus » (Lem, 1943 : 69).

Avant la dévolution de ce pouvoir politique à Say, après la mort d‟un

souverain, les autorités du centre d‟études islamiques envoyaient un émissaire à Gwandou

pour informer l‟émir. Ce dernier envoyait son représentant avec des cadeaux (un boubou,

un manteau, un turban pour superviser la cérémonie d‟investiture :

« Once the candidate had been obsen Gwandu was again informed and resquete to
send the traditional insignia of office, a garment (riga), a cloak (al- kibba) and
turban (rawani). A representative of Emir of Gwandu, the Magajin Gari for most of
the time, went to the emirate with the various articles and other gifts to install the
Emir » (Balogun, 1970: 376 – 377).

Traduction: [Une fois que le candidat est désigné, Gwandou est de nouveau informé et

sollicité pour envoyer les traditionnels insignes de l‟émirat, un boubou (riga), un manteau

(al- kibba) et d‟un turban (rawani). Le représentant de l‟émir, le Magajin Gari pour la

plupart du temps, est chargé de se rendre dans l‟émirat avec divers articles et d‟autres

cadeaux pour introniser l‟émir]. Sous le règne de Boubacar, Say sera désigné représentant

de Gwandou dans la zone et aura le privilège d‟introniser les souverains.

Après la mort de Boubacar, ses successeurs continuèrent son œuvre de consolidation

des relations entre Say et Sokoto d‟une part et, Say et Gwandou d‟autre part. La présence

de Sarkin Musulmi de Sokoto et celle de l‟émir de Gwandou lors de l‟intronisation de

l‟actuel chef de canton, constitue la meilleure preuve de la perpétuation des relations qui

remontent à près de deux siècles.

2- Les rapports entre Say et le reste du monde musulman

Centre d‟études islamiques par excellence, Say avait entretenu des relations

cordiales avec les grands centres religieux de la région mais aussi ceux des pays voisins

224
(Mali et Nigeria notamment). Il s‟agit surtout d‟échanges de haut niveau entre les ouléma

de Say et ceux venant d‟horizons divers comme le souligne Lem dans ce passage :

« Les marabouts de Say étaient en rapport avec ceux du Sokoto, de Gao, de Dori
et du Liptako, correspondant par l’intermédiaire de divers talibés, marabouts
itinérants ou simples colporteurs et caravaniers, sur des questions religieuses et
politiques. Il semble que leur instruction religieuse ait été assez relevée » (Lem,
1943 : 71).

Au XIXe siècle, Say était un centre d‟études islamiques très important dont

l‟influence s‟étendait du Dendi à Gao rappelons- le. L‟importance de ce centre explique

l‟arrivée massive des gens venant d‟horizons divers pour s‟y installer. En plus, les ouléma

de l‟Ouest du Niger qui viennent pour la plupart approfondir leurs connaissances dans la

cité religieuse, on note aussi, l‟arrivée des populations issues des communautés zarma et

peul pour solliciter des prières : « The role of a meeting place which Say began to play

was also facilited by the fame of its founder. Many Fulani and Zabarmawa alike, travelled

to Say to seek the prayers of the pious and mystic Jobo » (Balogun, 1970 : 116).

Traduction: [Le rôle de carrefour que Say a commencé à jouer a également été facilité par

la renommée de son fondateur. Beaucoup de Peul et Zabarmawa se rendent à Say pour

chercher les prières du pieux et mystique Jobo].

Le mois de Ramadan constitue, le moment favorable pour intensifier les activités

religieuses car durant ce mois, les ouléma de Say, organisent le tafsir1. Cette importance

sur le plan religieux, Say le doit surtout à la personnalité de son fondateur, Alfa Mahaman

Diobbo. Selon Lem, l‟action religieuse de ce dernier a été couronnée de succès, ce qui a

permis à Say de rayonner dans la zone et même au-delà :

« Sans avoir été à la Mecque, le marabout peulh avait admirablement rempli un tel
rôle. Il avait réussi à créer un foyer religieux rayonnant sur toute la vallée du
Moyen- Niger. Il avait étendu son pouvoir spirituel personnel sur toutes les régions
traversées depuis son départ de Gao » (Lem, 1943 : 68).

1- Tafsir : C‟est la lecture et le commentaire du Coran.

225
En dehors de la mission religieuse conduite avec succès, Alfa Mahaman

Diobbo est aussi un juge et un grand médiateur. Selon Sita Akilou : «En dehors des

échanges sur le plan religieux, beaucoup de gens viennent d’horizons divers pour

soumettre leurs litiges au jugement du souverain de Say à cause de son sens élevé de

justice et d’équité »1.

Say, en plus de Gwandou entretient des relations privilégiées avec Gao. Barth nous

informe sur le voyage de Boubacar dans la région:

« I had already been informed in Gando that A’bu’ Bakr, two years previously,
had navigated the river with a small flotilla of boats, upward as Gagho or Go’go’,
the ancient Capital of Songhay, and collected tribute from the Fulbe or Fellani
settled near the place, but that he had been prevented by the threatening attitude of
the Tawarek from penetrating any farther. In consequence of this expedition on the
river, made in open baots which where continually filing with water, the governor
was suffering very severely from rheumatism, and was scarcely able to move »
(Barth, 1965 : 178).

Traduction : [J‟avais déjà été informé à Gwandou qu‟Aboubacar, deux ans auparavant,

avait navigué difficilement sur le fleuve avec une petite flottille à la hauteur de Gao ou Go‟

go‟, l‟ancienne capitale du Soηey, et recouvra des tributs auprès des Fulbé ou Fulani

installés non loin de la place, mais qu‟il avait été empêché par l‟attitude menaçante des

Touareg de pénétrer plus loin. La conséquence de cette expédition effectuée sur le fleuve,

dans une embarcation à ciel ouvert qui reçoit de façon continue les eaux des vagues, le

gouverneur était sévèrement atteint de rhumatisme et était à peine capable de se déplacer].

Après la mort de Mahaman Diobbo, beaucoup de fidèles de passage ont fait escale à Say

pour visiter la tombe du saint.

1 - Entretien avec Sita Akilou à Say le 23/10/07.

226
IV- Contribution de Say à l’islamisation de l’Ouest nigérien

1- Say, centre politique

Malgré les crises du XIXe siècle, Say qui n‟a ni armée, ni police, exerce une

influence sur une grande partie de l‟Ouest du Niger. La paix qui règne sur l‟île, sa position

géographique stratégique et l‟attitude de Mahaman Diobbo ont largement contribué à

augmenter sa renommée. D‟abord, bien avant son arrivée à Say, il était déjà bien connu

dans la zone du moyen Niger grâce à ses nombreuses escales tout au long de son

itinéraire. Et, au fur et à mesure qu‟il avançait vers Say, sa renommée grandissait. A

propos de sa renommée, Boubé Gado écrivait ceci :

« Alfa Mahaman Jobbo fut un de ces lettrés migrants que la renommée « d’homme
de Dieu » précédait le long de leurs nombreuses étapes. Sarakollé pour les uns,
peul pour les autres, son appartenance ethnique a été reléguée à l’arrière plan par
sa personnalité et une érudition reconnue de longue date aux Africains soudanais
du clan des Cissé. A ces qualités exceptionnelles s’était ajouté un sens pointilleux
de l’équité et du travail personnel qui le mettait au-dessus des autres modibo
(moadib) et alpha de son temps. L’envergure du personnage allait servir Say qui
devient rapidement le centre économique le plus important entre le pays haoussa et
la boucle du Niger en même temps qu’il s’affirmait comme le foyer intellectuel
reliant les centres religieux de Jenné, Gao et Tombouctou à l’ouest et ceux de
Sokoto et wurno à l’est » (Gado, 1980 : 197).

Le rayonnement de Say s‟explique par sa position géographique mais également

par le comportement des différentes autorités religieuses qui se sont succédé à la tête de ce

centre d‟études islamiques avant la pénétration coloniale. Selon Alzouma Bazi Cissé :

«Contrairement à certains centres islamiques où on organise une fête religieuse (il


fait allusion au Muludh, organisé à Kiota), à Say, les religieux n’organisent pas de
cérémonies de ce genre. Les gens arrivent dans cette ville uniquement à cause de
sa renommée sur le plan religieux. Et tous les nouveaux venus y sont
chaleureusement accueillis et leur sécurité est garantie…»1.

Le comportement exemplaire du fondateur de la ville et de ses successeurs et surtout

leur attachement à un islam strictement pacifique fondé sur une conversion volontaire, va

1 -Entretien avec Alzouma Bazi Cissé à Niamey le 20/11/ 07.

227
faire de Say un havre de paix qui attirera des peuples d‟origines diverses et lui conférera un

caractère sacré. Il faut noter à ce niveau que le XIXe siècle est une période d‟insécurité à

cause des différentes guerres qui ont émaillé cette époque. Les populations essoufflées par

les conflits n‟aspirent qu‟à la paix. Et, la cité de Say est l‟une des plus paisibles de l‟Ouest

nigérien, c‟est pourquoi, elle attire des gens venus d‟horizons divers. L‟attitude d‟Alfa

Mahaman Diobbo explique le fait que les habitants de Say l‟aient surnommé, rappelons- le

„’Alfa Gouma’’, ce qui veut dire „‟le marabout discret‟‟. Say a ainsi brillé grâce à sa

fonction religieuse et la paix y régnait jusqu'à l‟arrivée des troupes de conquête coloniale

qui vont démanteler cette organisation mise en place par le fondateur du centre d‟études

islamiques.

2- Say, centre économique et nœud caravanier

Say occupe une position géographique stratégique sur le fleuve Niger. Et, c‟est

grâce à sa position de carrefour qu‟elle deviendra aussitôt après sa création, un centre

économique important et un nœud caravanier. Il faut signaler que c‟est surtout sous le

règne de Boubacar, fils et successeur d‟Alfa Mahaman Diobbo, qu‟une organisation

économique digne de ce nom verra le jour. Outre l‟aumône et les dons provenant

d‟horizons divers, il institua des taxes et impôts. Bénéficiant d‟un charisme à l‟image de

son père, il fit de Say pendant ses 26 ans de règne (1834-1860), un véritable carrefour sur

le plan religieux et économique. La ville va continuer à jouer ce rôle après la mort de

Boubacar.

Le poids économique de Say s‟explique par sa position géographique. En effet, la

ville est située au bord du fleuve entre Yaouri et Gao d‟une part et entre le Zarmatarey et

le Gourma d‟autre part. Cette position géographique fit de cette ville un des marchés les

plus actifs de l‟Ouest du Niger :

228
« Le fait que Say soit au bord du fleuve, entre Yaouri (Nigeria actuel) et Gao fait
d’elle non seulement un passage obligé car à l’époque, le fleuve constituait la
principale voie de transport de marchandises mais aussi un point d’escale. En plus,
on vendait un peu du tout des tissus en coton, des céréales, de la cola, des
animaux, des chaussures »1.

Lem souligne l‟importance de la position géographique stratégique du site de Say :

« Il est vraisemblable que Say, outre son importance religieuse, était aussi un des
principaux centres de transit commercial du Moyen Niger, situé sur un des points
de passage du fleuve où les gués sont les plus faciles et les plus fréquentés. Toutes
les caravanes venant du nord, du Nord-est et de l’est, de l’Azaoua, de l’Aïr et du
Damergou, devaient y passer pour se rendre à Sansanne Mango, dans le nord du
Togo, et à Salaga, en Gold Coast » (Lem, 1943 : 64).

Le fleuve, principale voie de navigation, permet de relier Say à Gao et au Dendi

puis Say au pays haoussa par le Kabi. On peut également emprunter les voies terrestres

comme celle qui permet de relier le Zarmatarey au Gourma : route Kodo- Say-

Tchantchargou. Une autre route permet de relier le centre d‟études islamiques au pays

haoussa, c‟est celle du Boboye qui passe par le Dendi (Boumba) puis le Kabi. En effet,

avant sa décadence, Say était le principal centre commercial du Moyen Niger. Cette

importance économique soulignée par Lem, apparaît encore sous la plume de Diouldé

Sajo :

« En effet, pendant plus d’un demi- siècle, Say est le centre commercial du moyen
Niger. Toutes les caravanes venant du nord et de l’est s’arrêtent ici avant de
continuer leur route vers Sansané Mongo (nord de la République de Togo) pour
chercher de la kola et certains articles d’importation comme les tissus, la
quincaillerie….. Le marché de la ville acquiert une certaine importance. C’est le
lieu privilégié d’approvisionnement d’esclaves, troupeaux, mil, etc » (Sajo, 1982 :
21).

Comme on le constate, la position géographique de la ville est un atout indéniable

qui a permis à Say de rayonner au XIXe siècle, non seulement sur le plan religieux mais

aussi sur le plan économique. Selon la tradition locale sous le règne de Boubacar (1834-

1- Entretien collectif à Say le 10/10/07.

229
1860), l‟importance était telle qu‟il s‟y tenait tous les jours un marché à Say. Les produits

échangés sur ce marché étaient très variés. Il s‟agit de l‟or, des esclaves, de la cola, des

chevaux, du natron… Ce commerce était florissant à cause non seulement de la position

géographique stratégique du site mais, aussi à cause de la paix qui y régnait. Comme l‟ont

souligné Boubé Gado et Diouldé Laya :

« Say devint ainsi, grâce à sa situation privilégiée, le centre économique le plus


important entre le pays haoussa et la boucle du Niger ‘’ en même temps qu’il
s’affirmait comme le foyer intellectuel reliant le centre de Djenné, Gao,
Tombouctou à l’ouest, à ceux de Sokoto ou Wourno à l’est » (Gado et Laya : 14).

A cause de sa position géographique stratégique, Say fut érigée en capitale politique et

religieuse du Moyen Niger par les autorités de Gwandou rappelons – le, après la chute de

Tamkalla en 1854. Avec ce nouveau statut, on assiste à une intensification du commerce

entre Say et le pays haoussa qui portait sur les produits suivants : la cola, les pagnes noirs

et les tissus. Barth souligne la présence de ces commerçants haoussa lors de son passage à

Say en 1855 :

« The market was in many respects better provided than an our outward journey
but with this advantage was coupled the great disadvantage to me personnally that,
a large troop of hausa traders having recently arrived and richly supplied the
market with the manufactures of that region…» (Barth, 1965 : 535 ).

Traduction : [Le marché était, à bien d‟égards que lors de nos voyages passés, mais pour

moi, personnellement, ce grand avantage est couplé d‟un inconvénient ; celui de voir ces

derniers temps de nombreuses troupes de commerçants haoussa envahir le marché avec des

produits richement manufacturés de cette région].

Say entretenait des relations commerciales avec le Borgou (Nord Benin) qui lui

fournissait surtout de l‟antimoine. La ville recevait aussi des produits provenant du Nord

Togo et du Nord Ghana. En dehors des produits, il y avait aussi des esclaves même si la

tradition locale minimise la portée de ce commerce. Le centre d‟études islamiques de Say

230
dispose également d‟importantes potentialités agricoles et pastorales qui attirent les

commerçants venus d‟autres horizons. Selon Hassane Baka :

« L’agriculture a connu une importance particulière dans cette région, en raison


de l’abondance de la main-d’œuvre servile que les populations peul possédaient.
Donc à quelques exceptions près, chaque famille peul avait ses (ou son) esclaves
qui lui assuraient une production agricole régulière. Certains étaient occupés dans
l’élevage » (Baka, 1992 : 91- 92).

Toutefois le développement de ces échanges sera entravé par le climat d‟insécurité qui

sévit dans l‟Ouest du Niger notamment le conflit armé dans le Dallol. Et, c‟est la

colonisation française qui va donner le coup de grâce et Say perdit ainsi son poids

économique comme le souligne si bien Lem :

« L’occupation française détourna une partie de ces courants commerciaux ; le


passage de plusieurs colonnes, notamment celle de Voulet- Chanoine, apporta la
perturbation dans le pays. Les conséquences furent la dispersion des habitants,
l’arrêt des transactions commerciales, d’où s’en suivit au point de vue économique
une décadence assez rapide de Say, qui n’est plus aujourd’hui qu’une quelconque
bourgade nigérienne n’ayant d’autre importance que sa fonction administrative »
(Lem, 1943 : 1943).

Le nom du village de Diongoré situé sur la route de la Tapoa rappelle le rôle que cette

ville a joué sur le plan économique par le passé: « Le nom du village de Diongoré, non loin

de Say, prouve que la ville de Say était une zone de transit pour les commerçants Haoussa.

Le nom de ce village est d’origine Haoussa, un Zongo Foulanisé sous l’appellation de

Zongoré, d’où Diongoré » (Hama, 1968 : 323).

Say va continuer à jouer pleinement ce rôle sous les règnes d‟Alfa Mahaman

Diobbo et de ses fils Boubacar et Abdourahamane. Bien avant l‟arrivée des Blancs, la ville

a amorcé son déclin tant sur le plan religieux qu‟économique. Les derniers Alfaizé n‟ont

pas l‟envergure de leurs prédécesseurs. On assiste ainsi, à un ralentissement des activités

religieuses et économiques mais aussi à une diminution progressive de la population de la

ville. En effet, le marché qui est quotidien va devenir hebdomadaire. Petit à petit, on assiste

231
au départ d‟une bonne partie de la population qui va créer des villages tout autour de Say.

La colonisation portera le coup de grâce et Say cessera de jouer son rôle de foyer

intellectuel et économique de l‟Ouest nigérien et tombe ainsi en décadence.

3– Say, centre de diffusion de l’islam

a. Say, terre d’accueil

Au XIXe siècle, à cause de l‟insécurité qui régnait dans la zone, Say, havre de paix

était devenue un pôle d‟attraction. C‟est pourquoi, elle devient rapidement sous l‟influence

de Mahaman Diobbo, le centre d‟études islamiques le plus important de l‟Ouest du Niger.

Raulin souligne cette importance de Say en ces termes :

«Alfa Mahaman Diobbo jouissant d’un admirable charisme acquis grâce à son
intégrité morale et à son attachement à un islam strictement pacifique fondé sur
une conversion volontaire, va faire de Say un havre de sécurité, qui attirera des
peuples d’origines diverses et lui conférera un caractère sacré, de nombreux
fidèles du soudan central l’ont visité en tant que lieu saint » (Raulin, cité par
Moulaye, 1995 : 65).

Selon la tradition locale, s‟il n‟a pas entrepris le Jihad comme la plupart des

musulmans de son temps, ce n‟était point faute de moyens de faire la guerre :

« Des guerriers lui ont plusieurs fois proposé de constituer une armée à son
service (qui pour diffuser l’islam, qui par appât du butin). Mais jamais il ne les
accepta. L’île de Barma-Goura, située à quelques kilomètres en aval de Say, porte
le nom d’un chef de guerre (Barma), originaire de Hondobon (village situé à 5km
de Gothey sur la route de Téra). Il suivit longtemps Alfa Mahaman Diobbo,
espérant le convaincre de l’utilité de son art. Devant le refus catégorique de cet
érudit pacifiste, il quitta Say pour regagner son village natal. D’autres chefs de
guerre de Dantchandou, Kotatchi, auraient aussi fait, en vain des propositions
similaires à Mahaman Diobbo. Mais, l’érudit de Say déclina l’offre de ces
guerriers car pour lui, Say reste et demeure, un centre d’études islamiques, il n’a
donc pas besoin de constituer une armée pour sa sécurité »1.

1 - Entretien avec Alzouma Bazi Cissé à Niamey le 20/11/ 07.

232
Balogun souligne le caractère pacifique de ce centre: « Apart from Say, which did

not send military expeditions of its own, the emirs of all the Zabarma and Gurma emirates

or their close relatives commanded their forces in battle » (Balogun, 1970 : 277).

Traduction : [A l‟exception de Say qui n‟envoie pas des expéditions militaires

personnelles, les émirs de tous les émirats zarma et gourma ou ceux qui leur sont proches

envoyaient leurs forces en guerre]. Ce comportement du fondateur de Say eut un écho

favorable dans la zone, et c‟est ainsi que des populations d‟origines diverses (Zarma,

Soŋey, Kourté, Wogo…) sont venues s‟installer dans cette ville. Quand la population de la

cité a considérablement augmenté, Alfa Mahaman Diobbo désigna de nouveaux sites sur

lesquels de nouvelles vagues de populations se sont installées et ont créé de nouveaux

villages aux environs de Say. Ainsi, des villages comme Bogha, Dokimana, Sidi-Koira,

Dabiel, Alloré, Dagaré, Dalwey… virent le jour. C‟est surtout la religion qui attira ce

beau monde à Say. En plus de l‟influence religieuse, le centre d‟études islamiques est aussi

une terre d‟asile pour les populations essoufflées par des guerres. En effet, les populations

serviles qui ont fui les villages de leurs maîtres, arrivées à Say, ont toutes les chances de

retrouver leur liberté. Plusieurs cas, nous ont été cités lors de nos enquêtes. A titre

d‟exemple nous avons cette version rapportée par Alzouma Bazi Cissé :

« Des Bellah de Bankilaré, lors d’une incursion dans le Bittinkodji, ont profité de
la proximité de la cité religieuse pour fuir et se réfugier à Say. Arrivés dans cette
ville, Mahaman Diobbo leur a dit de ne pas s’inquiéter, à partir de ce jour là, ils
étaient libres. Le chef guerrier Wanzeidou a envoyé des émissaires à Say pour
réclamer ses esclaves. Mais, l’érudit a dit aux émissaires que les Bellah font
désormais partie de sa famille et qu’il ne va pas les lui livrer. Après avoir insisté
mais en vain, le guerrier Wanzeidou rebroussa chemin. Alfa Mahaman a indiqué
un site à coté d’Alloré aux Bellah. Ces derniers créèrent leur village au bord d’une
mare d’où son nom Fetobellaabe (mot peul qui signifie la mare des Bellah »1.

L‟arrivée massive de nouvelles vagues de migrations a fait de Say, une véritable

ville cosmopolite. Comme a eu à le souligner le chef de canton de Say :

1 -Entretien avec Alzouma Bazi cissé, infirmier à la retraite à Niamey le 20/11/07.

233
« Au temps de sa splendeur, Barth disait que la ville de Say dut compter jusqu’à 30 000

habitants. Elle devint un centre d’attraction pour les vagues de migrations de populations

d’origines diverses» (Barth, rapporté par le chef de canton de Say in Sahel Dimanche n°

1254 du septembre 2007, p10). Avec trente mille (30000) habitants, Say était un gros

centre car près de deux siècles après, la ville de Say et les villages environnants de la

commune ne comptent que 35 021 habitants selon le recensement général de la

population et de l‟habitat de 2001.Ce chiffre est avancé par plusieurs informateurs qui

citent Barth comme référence. Mais, l‟ouvrage de cet auteur que nous avons consulté

donne une autre version :

« J’arrivai donc à Saï, où un logement me fut donné aussitôt après ma visite au


gouverneur; mais ce logement, étroit et mesquin, ne répondait nullement à mon
désir [ ]. L’intérieur de la ville, qu’entoure une muraille de terre peu élevée, n’est
guère habité, les maisons se trouvant dispersées tout autour ; le nombre des
habitants peut être d’environ 8000 » (Barth, 1861 tome3 : 258).

Nous ne savons pas d‟où est- ce que nos informateurs tirent ce chiffre. Mais, même avec

8000 habitants, Say était au XIXe siècle, une ville non moins importante.

b- Say, un important centre d’enseignement

Dès son installation à Say, Alfa Mahaman Diobbo et les érudits qui l‟accompagnent

ont ouvert des écoles coraniques dans tous les quartiers de la ville. Dans ces écoles, sont

éduqués non seulement les enfants de la cité et des villages voisins, mais aussi ceux venant

du pays soŋey, Kourté, Wogo….Cette formation se fait autour des „’douddales’’ (grand feu

autour duquel étudient les talibé la nuit). Pendant la saison sèche, la ville de Say grouille

de monde. Des enfants venus d‟horizons divers avec leurs maîtres s‟installent dans cette

ville pour apprendre le savoir religieux. Jusqu‟à une période récente, la plupart des jeunes

talibé de l‟Ouest du Niger ont suivi leur formation de base à Say. Il faut rappeler qu‟il y a

234
trois niveaux de formation : le niveau élémentaire, le niveau complémentaire et le niveau

formation des formateurs. A ce propos, voici un témoignage de l‟imam Idrissa Boubacar:

« Les maîtres qui nous ont formés affirment avoir fait leurs études coraniques à
Say. L’exemple que je connais le plus est celui de mon grand frère qui a fait ses
études coraniques à Say avant de les poursuivre au Nigeria. Il a étudié autour du
même ‘’douddale’’ que feu Oumarou Soumaila, ancien président de l’Association
Islamique du Niger ; c’est le père de ce dernier qui les a enseignés »1.

Selon tous les témoignages recueillis à Say, à l‟époque la population n‟avait que deux

activités principales : le travail des champs et la lecture du Coran. Il y avait même une

sorte de concurrence entre les différents quartiers de la ville.

En dehors des écoles coraniques tenues par les ouléma des quartiers dans lesquelles

sont formés des jeunes originaires de Say mais aussi de contrées voisines et lointaines. Il y

a aussi un niveau supérieur où sont formés les maîtres. Selon Alzouma Bazi Cissé :

«La plupart des érudits de l’Ouest-nigérien étaient à l’époque formés à Say jusqu’à
un certain niveau. Quelques autres vont parfaire leurs connaissances soit au
Nigeria, soit au Macina. Mais dans la plupart des cas, ils restent à Say car il y a
toute une organisation mise en place par Alfa Mahaman Diobbo : C’était une sorte
d’écolesupérieure où les gens venaient apprendre, parce qu’il y avait plusieurs
niveaux d’enseignement. Les maîtres étaient organisés en plusieurs groupes.
Chaque groupe est tenu par un maître spécialiste d’une branche et qui aide les
ouléma à parfaire leurs connaissances dans ce domaine. Et, si l’érudit a atteint un
certain niveau, il peut changer de groupe pour se spécialiser encore dans une autre
branche »2.

Il faut signaler que les lettrés musulmans formés à Say, pour élargir la chaîne de

transmission du savoir religieux, de retour dans leurs villages respectifs, ouvrent à leur

tour des écoles coraniques. C‟est ainsi que la religion de Mohamed va se propager

progressivement pour couvrir une bonne partie de l‟Ouest du Niger.

1 - Entretien avec imam Idrissa Boubacar à Bongoula le 4/11/07.


2 - Entretien avec Alzouma Bazi Cissé, infirmier à la retraite à Niamey le 20/11/07.

235
4- La réaction de Say face à la colonisation

Say, centre d‟études islamiques important ne s‟est pas soulevé contre la

pénétration coloniale. Par contre au cours de nos enquêtes sur place, certains témoignages

incitent à en donner une autre version. Ainsi, Alzouma Bazi Cissé soutient que Say a bel et

bien résisté à la pénétration coloniale mais de manière pacifique :

« En fait, il y a toujours eu une autre interprétation de cette réaction. La vérité, c’est


que bien avant l’arrivée des Blancs, un détachement de la troupe du prince fugitif
devant les troupes d’Archinard à savoir Amadou de Ségou, a séjourné à Say trois mois
durant. La mission de ce détachement, c’est de convaincre Alfaizé de Say pour qu’il fui
avec eux. Ainsi, ils vont se réfugier à Sokoto et organiser à nouveau la résistance.
Alfaizé a décliné l’offre et a juré de ne jamais quitter la ville de ses ancêtres quel qu’en
soit le prix. Mais, le chef de la mission a fait comprendre au souverain de Say qu’il ne
pourra pas résister car les Blancs sont lourdement armés. Selon l’émissaire, même
Amadou qui dispose d’une armée a été battu à plus forte raison Say qui n’en dispose
pas. Mais, Alfaizé campe toujours sur sa position initiale. Devant son refus
catégorique, le détachement quitta la ville. Au sein du conseil des ouléma, il y a eu
deux tendances :
-La première est celle qui soutient Alfaizé qui campe sur sa position et qui se
dit décider à défendre Say.
-L’autre tendance, a opté pour la négociation. C’est celle-ci qui est
majoritaire.
En fait, comme ils l’ont fait un peu partout en Afrique, les Européens ont trompé
les dignitaires de Say en leur faisant croire qu’ils sont simplement de passage. Ces
propos ont rassuré le deuxième camp qui a fait pression sur le chef afin qu’il accepte de
négocier. Mis en minorité, il s’exécuta mais à la condition que les Français ne mettent pas
pieds à l’intérieur de la ville sainte. Informés, ceux- ci ont donné leur accord de principe et
le traité fut signé à 5 kilomètres au sud de la ville de Say sur l ‘île de Talibiya »1.

Les autorités de Say interdirent l‟entrée de la ville au lieutenant de Vaisseau Hourst

qui se réfugia sur l‟île de Talibiya et fonda fort Archinard : « En 1896, la mission du

Lieutenant de Vaisseau, Hourst, descend le fleuve depuis Kulikoro. Le 7 avril l’entrée de la

ville de Say lui est interdite. Le fleuve baisse, la mission se réfugie dans une île en amont

de Haynikiray. Elle y fonde ‘’Fort Archinard’’ où elle reste cinq mois »2. Les Français

restèrent sur cette île quelques années avant de transférer le poste à Say. On peut dire que

la mission envoyée par Amadou, le souverain déchu du Macina a beaucoup influencé

1 - Entretien avec Alzouma Bazi Cissé à Niamey le 13/11/07.


2 - ANN- 15-1-6 : Le cercle du Djerma par Michel Sellier 1800 – 1900 « Reconnaissances ». Mars 1947-
Mars 1948, p. 4.

236
l‟attitude de la population de la cité religieuse à l‟égard des Français. Ces évènements sont

intervenus sous le règne d‟Amadou Satourou. Et, l‟hostilité de ce dernier à l‟égard des

troupes coloniales est largement développée par Hourst dans son ouvrage intitulé, Sur le

Niger et au pays des Touaregs. La résistance de Say était en fait une résistance passive. En

effet, les autorités de Say n‟ont pas pris des armes contre le pouvoir colonial. Mais, elles

ont manifesté leur hostilité à l‟égard du système par l‟adoption d‟un certain nombre de

comportements tels que le refus d‟envoyer leurs enfants à l‟école comme le souligne

Lem :

« Il est à remarquer qu’aucun de ces marabouts ne parle le français et qu’aucun de


leurs enfants ne fréquente l’école française… Leurs connaissances en matière de
culture occidentale sont donc nulles. Ce refus de se laisser pénétrer par notre
influence et notre culture est un témoignage entre tant d’autres de l’hostilité
générale des milieux musulmans d’Afrique noire à l’égard de la colonisation
européenne » (Lem, 1943 : 73).

Après l‟installation des français à Say, on assiste donc à une régression

considérable du niveau des ouléma même si le nombre de musulmans reste très élevé

comme l‟atteste ce témoignage du commandant du cercle de Say : « Dans le cercle de Say

plus des 9/10e de la population sont musulmanes ; mais sans fanatisme apparent »1. En

effet dans la région de Say, seuls les Gourmantché sont restés attaché à la religion

traditionnelle et sont demeurés réfractaires à l‟islam. La surveillance stricte des marabouts

et l‟interdiction de voyager sans autorisation imposée par l‟administration coloniale vont

faire baisser considérablement le niveau des ouléma. Un autre témoignage confirme cette

version : « Une enquête menée sur place, en 1932, montrait de manière évidente

l’affaiblissement des études musulmanes dans un centre dont l’influence religieuse avait

été autrefois si active » (Lem, 1943 : 71). Comme on le constate, l‟administration coloniale

1 -ANN- 1.E.10- 34- Colonie du Niger : rapport politique annuel, p. 15.

237
a malheureusement freiné un processus enclenché depuis le début du XIXe siècle,

occasionnant ainsi une baisse considérable du niveau des érudits.

Conclusion de la troisième partie

Ville créée au cours de la première moitié du XIXe siècle (vers 1825) par Alfa

Mahaman Diobbo, Say est devenue en peu de temps, le centre d‟études islamiques le plus

important de l‟Ouest du Niger. Un tel succès dans une entreprise religieuse en un temps

aussi court est un fait rare, sinon rarissime. Il faut reconnaître que ce succès est en grande

partie lié à la personnalité du fondateur de la ville qui, dans un contexte de crise, a su par

son comportement exemplaire et son option pour la non violence, attirer de nombreux

fidèles vers Say. Désintéressé par le bien matériel, Mahaman Diobbo est un lettré

musulman ayant un sens profond de justice et d‟équité. En optant pour la conversion

volontaire du fidèle, il fît du coup de Say, un havre de paix, ce qui va pousser des milliers

de fidèles fuyant l‟insécurité à venir s‟y installer :

« Say, fondée par le célèbre marabout peul Alfa Mahaman Diobbo, adossée aux
chefferies peules de Ouro- Guéladjo et Torodi, a été au XIXe siècle le principal
centre d’islamisation du Niger occidental. La réputation d’Alfa Mahaman Diobbo
s’étendait dans le pays Songhay – Zarma, de Téra au Zarmaganda,d’Ayorou à
Dosso, les marabouts qu’il avait formés, peuls, zarma, songhay, touaregs,
sillonnaient la région. C’était de préférence à lui qu’on avait recours pour
l’intronisation des nouveaux chefs ; son arbitrage politique était souvent sollicité ;
les tributs, hommages, dîmes et dons affluaient à Say » (Sardan Olivier De, 1982 :
24).

238
QUATRIEME PARTIE : LES CENTRES D’ETUDES ISLAMIQUES

SECONDAIRES ET ETAT DE L’ISLAMISATION DE LA ZONE A LA FIN DU

XIXe SIECLE

239
QUATRIEME PARTIE : Les centres d’études islamiques secondaires et état de

l’islamisation dans la zone à la fin du XIXe siècle

Ils sont appelés centres d‟études islamiques secondaires parce qu‟ils sont tous

dans la sphère d‟influence de Say et ont entretenu des relations cordiales avec ce centre.

Cette partie est consacrée à l‟étude de ces centres. Elle fait aussi le point sur l‟état de

l‟islamisation dans notre zone d‟étude à la fin du XIXe siècle. Dans le premier chapitre, il

s‟agit de montrer comment, Tondo blessé au cours d‟un combat sera conduit par un érudit

touareg dans sa famille. Ce saint homme va le soigner et l‟inscrire dans l‟école coranique

qu‟il dirige. Devenu Alfa, Tondo va quitter Bourra, son village natal pour créer un centre

d‟études islamiques sur une île du fleuve Niger à Sinder. Ce centre créé par cet alim

deviendra en peu de temps, l‟un des centres d‟études islamiques les plus importants de la

région de Tillabéri. Sinder va briller tout au long du XIXe Siècle et, jusqu‟à une période

récente, il compte un nombre important de lettrés musulmans.

Les deux chapitres suivants traitent des centres d‟études islamiques secondaires de

Tirga, Goudel et Kounari. Ce dernier est un centre militaire que Hamboy, fils et

successeur de Guéladio va transformer en centre d‟études islamiques. Le troisième et

dernier chapitre dresse un bilan de la situation de l‟islam dans notre zone d‟étude à la fin

du XIXe siècle.

240
Chapitre X : Le centre d’études islamiques de Sinder

Dans l‟Ouest du Niger, le XIXe siècle se caractérise par une insécurité quasi-

permanente : « Jusqu’au XIXe siècle, cette région reste marquée par des mouvements de

population liés aux transformations inhérentes à la chute du Songhay d’une part et de

l’autre à l’anarchie dans le Dallol et à l’expansion du Califat de Sokoto » (AHN, 2006 :

249). Les Wogo de Bourra harcelés par les Touareg vont quitter cette localité pour

s‟installer sur l‟île de Sinder. Ce site stratégique situé sur le fleuve Niger a été choisi par

Tondo Djalley, leur souverain. Il s‟agit dans ce chapitre d‟aborder l‟histoire du peuplement

de l‟île, l‟œuvre de Tondo Djalley et celle de ses successeurs.

241
Carte N° 9 : Localisation du Canton de Sinder

242
I- Les origines du fondateur du centre d’études islamiques de Sinder

1- Histoire du peuplement selon la tradition orale

Selon la tradition orale, le canton de Sinder aujourd‟hui devenu commune rurale

serait fondé vers 1813 par un alim du nom de Tondo Djalley. Originaire du Mali, ce

dernier et sa suite auraient quitté Bourra afin d‟échapper aux exactions exercées par les

Touareg. C‟est ainsi qu‟ils naviguèrent sur le fleuve en suivant une gourde. C‟est cette

dernière qui devrait leur indiquer le site idéal où ils pourraient rester et s‟épanouir sans

courir de danger. Après une longue traversée, Tondo et sa suite finirent par s‟arrêter non

loin de Tillabéri sur l‟île qui porte depuis lors le nom de Sinder1 . L‟important au niveau de

ce centre d‟études islamiques, c‟est que son histoire se trouve consignée à l‟écrit dans un

manuscrit rédigé par un érudit local au début du XXe siècle et reproduit en 1986 par son

petit fils, Djibo Sounakoye.

2 – Le Tarikh de Sinder

C‟est un manuscrit qui rapporte l‟histoire de ce centre d‟études islamiques. Il

comporte après la page de garde un titre en arabe : ‘’Khutuwatu Ahli Sinder’’qui signifie

„‟les traces de l‟histoire de Sinder‟‟. Ce manuscrit a été découvert en mai 2009, à Sawani

par une équipe de recherche du département des manuscrits arabes et ajami (MARA) sous

la conduite de docteur Seyni Moumouni qui a entrepris un projet de prospection,

d‟acquisition et de valorisation des manuscrits arabes et ajami au Niger. Dans le

département de Tillabéri, elle s‟est rendue dans plusieurs localités : Darbani, Neni, Sinder

etc… Elle a eu au cours de cette mission à collecter plusieurs manuscrits dont celui de

Sinder. A Sawani, chef lieu de la commune rurale, l‟équipe de recherche a été reçue par la

famille de l‟ancien imam et cadi de la localité, feu Elhadji Oumarou Issifi. Le manuscrit en

1 - Sinder : Selon la tradition locale, quand Tondo et sa suite arrivèrent sur l‟île, ils trouvèrent sur place
l‟hospitalité d‟une famille Gourmantché avec à sa tête le nommé Sinader. Sinder serait donc la déformation
du nom de Sinader.

243
question fut découvert dans la bibliothèque privée du petit fils de ce dernier, Sounakoye

Djibrilla.

Le « Tarikh Sinder » est rédigé en langue arabe en 1986 par Sounakoye Djibrilla et

est composé de 63 folios. C‟est un alim du village de Sawani, capitale de la commune

rurale. Il est né vers 1942 dans une famille soηey dans la commune rurale de Sinder. Il fit

ses premières études coraniques auprès de son grand père, Oumarou Issifi Halîl à Sawani.

Il partit ensuite approfondir ses connaissances à Zaria au Nigeria. Il passa une bonne

partie de sa vie dans cet Etat avant de décider de rentrer à Sawani pendant le règne de

l‟actuel chef de canton, Ibrahim Djingarey. Grand passionné de l‟histoire, Sounakoye

Djibrilla fréquenta les cours de plusieurs chefs traditionnels de la région. Ce fut donc

auprès d‟Amirou Elhadji Ibrahim Djingarey (actuel chef de canton) et de son entourage

qu‟il recueillit l‟essentiel des informations sur l‟histoire de l‟île. Devenu aveugle à l‟âge de

soixante ans, il meurt à l‟âge de 66 ans, en juin 2009 à Sawani.

Le tarikh commence par un basmala et le nom du premier auteur Elhadji Oumarou

Issifi Halîl. Plus connu sous le nom d‟Alfa Issifi Sinder, ce dernier est l‟un des célèbres

ouléma de ce centre d‟études islamiques. C‟est au sein de sa famille que les autorités de

Sinder ont de tout temps choisi le Cadi. Selon des sources concordantes, c‟est Alfa Issifi

qui accompagna Gironcourt lors de sa mission de collecte de manuscrits dans le moyen

Niger en 1912. Ce fut un éminent érudit qui fut le maître de plusieurs lettrés musulmans de

la zone parmi lesquels Dodo, le père de feu Oumarou Soumaila (ancien président de

l‟Association Islamique du Niger). En son temps, les apprenants venaient de tous les

horizons (Gao, Tombouctou, Dori, Say, Birni…..) pour approfondir leurs connaissances

religieuses à Sinder. Elhadji Oumarou Issifi avait une bibliothèque privée dans laquelle les

manuscrits furent rangés dans des cantines. Mais, la bibliothèque était fermée peu après

244
son décès au cours des années 60. Quand la bibliothèque fut ouverte des années plus tard,

la plupart des documents furent endommagés.

Les feuilles du tarikh sont paginées, mais le texte ne comporte pas de

ponctuation. Le manuscrit traite de l‟histoire des populations de Sinder depuis leur terre de

départ (Bourra) jusqu‟à leur terre d‟accueil (Sinder). Le corps du texte comporte des

médaillons sous forme de séparateur dans lesquels sont écrits les noms des différents

Amirou qui se sont succédé sur le trône de Sinder. Il traite aussi des rapports entre les

différentes communautés vivant dans cette commune et ses environs. On y trouve

également la généalogie des différentes personnalités politiques et religieuses de l‟île de

Sinder. Le manuscrit est un document historique écrit par un alim de la localité à la fin du

XXe siècle, ce qui prouve que Sinder fut un centre d‟études islamiques. En effet, l‟œuvre

de Sounakoye Djibrilla est le prolongement naturel de la production d‟une chaîne

ininterrompue de savants. C‟est d‟ailleurs à cause de sa richesse que l‟équipe de l‟IRSH a

proposé le manuscrit à l‟Institut Afro- Arabe de Rabat pour son édition. L‟Institut a

accepté cette proposition et le „‟Tarikh Sinder’’ serait actuellement en cours d‟édition.

C‟est le lieu de saluer cette initiative de l‟IRSH car quelques mois après cette mission,

Sounakoye Djibrilla a rendu l‟âme à Sawani. Ce sont les chercheurs du MARA qui ont

mis ce manuscrit à notre disposition.

3- Synthèse de l’histoire du peuplement selon le Tarikh de Sinder

Le Tarikh décrit l‟histoire des populations de ce village depuis leur départ de

cette localité jusqu‟à leur installation définitive sur les îles de Sinder. Cette migration est

conduite par Tondo Djalley. Ce dernier est issu d‟une famille très attachée aux croyances

ancestrales. Blessé au cours d‟un combat ayant opposé l‟armée de sa principauté à celle

d‟un campement touareg, il sera recueilli par un érudit. Il va ainsi apprendre le Coran

245
auprès de son tuteur. Devenu Alfa, Tondo a exprimé le désir de retourner vivre parmi les

siens dans son village natal.

Face à l‟insécurité et l‟hostilité de ses oncles à l‟égard de l‟islam, il va quitter Bourra

à la recherche d‟un site d‟accueil plus paisible où il pourra s‟adonner à l‟enseignement et à

la diffusion de l‟islam. Suivant les conseils d‟Alfa Mahaman Diobbo, Tondo et sa suite

vont s‟installer sur les îles de Sinder. Pour éviter tout problème avec les Kourté, il a

sollicité son intervention pour qu‟il intercède auprès de leur Amirou. Ce dernier a répondu

favorablement à la requête de l‟érudit de Say. Il a donné toutes les terres situées à l‟Est de

Sinder aux Wogo et la partie Est est mise en bail. Les populations peuvent exploiter cet

espace moyennant le payement d‟une dîme annuelle. On retrouve cette version dans la

monographie du capitaine Buck sur le cercle de Tillabéri :

« Les Wogos sont les derniers arrivés dans le cercle il y a une centaine d’années,
venant de Gao, à la suite de leur chef Tondo DYELLE. Refoulés par les Courtèyes
déjà installés dans les îles, ils se rendirent à Say et demandèrent l’intervention de
Mahamane Diobbo, à la suite de laquelle ils purent s’établir à Sinder Bourra d’où
ils rayonnèrent. A l’heure actuelle, ils habitent les îles situées au Nord de Fouley
jusqu’à Garokoyré (canton de Dessa) »1.

Cette version est également confirmée dans une notice sur le cercle du Djerma, rédigée par

le capitaine Salaman : « Peu après le nommé Tondo, chef d’une fraction d’Ouagobés et le

marabout Amadou Lamine vinrent saluer le chef de Say et lui demander un terrain pour lui

et les siens. Alpha Mohaman s’adressa à Tolakoy2. Ce dernier l’autorisa à habiter les îles

de Sinder »3.

Après leur installation sur les terres de Sinder, Tondo et ses compagnons vont

ouvrir des écoles coraniques pour enseigner les enfants des différentes familles qui ont

migré avec lui. Il est resté au pouvoir pendant 17 ans (1813- 1830). Ses successeurs vont

poursuivre s‟on œuvre jusqu‟à l‟installation de l‟administration coloniale. Après

1 - ANN- 1E7 – 23 : Monographie du cercle de Tillabéry par le capitaine Buck, 1907, p. 6.


2 - Tolakoy est le surnom de Sido Yoro, chef des Kourté.
3 - ANN- 15-1-2 : Notice sur le cercle du Djerma et Historique du cercle par le capitaine Salaman, pp. 9 -10.

246
l‟installation de cette dernière, les terres de Tolakoy seront partagées entre les Kourté et les

Wogo :

«A la création du 3e territoire militaire, quelques remaniements territoriaux eurent


lieu. Les Kourteys en conçurent un violent ressentiment. Le chef Kourtey ne
conserva que le commandement des îles comprises entre Koutoukalé – Goungou et
Tillakaîna. Les îles plus au Nord furent données au chef de Sinder »1.

4- Recoupement entre le tarikh de Sinder et la tradition orale

L‟étude comparative entre le Tarikh et la tradition locale fait ressortir les constats

suivants :

- Il n‟y a pratiquement pas de contradictions entre le Tarikh de Sinder et la

tradition locale. On relève seulement un détail important dans le Tarikh qui ne figure pas

dans la version officielle, c‟est le nom du souverain Oumarou Djibril (1886-1896). Ce nom

n‟est pas mentionné sur la liste officielle des souverains affichée dans la salle d‟accueil de

la résidence du chef de canton. A notre avis l‟absence du nom de ce dirigeant sur cette liste

est due à une omission inhérente à la nature humaine car le chef de canton nous a affirmé

que le lettré de la famille s‟est inspiré du Tarikh pour dresser la liste des souverains depuis

la création de ce centre d‟études islamiques jusqu‟à son règne. C‟est une liste manuscrite

dont plusieurs noms sont presque illisibles aujourd‟hui. En faisant le cumul des durées de

règne de cette liste, on se rend compte que le centre d‟études islamiques de Sinder aurait

duré 188 ans au lieu de 198 ans sur le Tarikh. Il y a donc dix années de moins, ce qui

pourrait correspondre à la durée de règne d‟Oumarou Djibril.

- Les deux sources sont mêmes complémentaires. Mais, on note que le Tarikh

n‟indique pas le nom du lettré musulman qui fut le maître de Tondo ; il ne donne pas non

plus de détails sur la délimitation des terres attribuées à ce souverain par Amirou Kourté.

Quant à la tradition locale son insuffisance majeure, c‟est qu‟elle ne donne pas de dates

1 - ANN- 15. 1. 1 : Monographie du cercle du Djerma, 1901, p. 56.

247
repères. Cette lacune est comblée par le Tarikh qui comporte des dates repères importantes

sur la création du centre, sur la durée de règne des souverains etc. L‟auteur a utilisé les

dates du calendrier grégorien et celles du calendrier musulman. Même si au niveau de la

correspondance, il y a souvent des problèmes : écart entre la date figurant sur le calendrier

musulman et celle correspondante sur le calendrier grégorien.

- Enfin, nous retenons un aspect important de la vie de ce centre. Pour la

première fois une grande famille de lettrés musulmans ne rattache pas ses origines à un

pays de l‟orient. Le tarikh ainsi que la tradition orale affirment sans ambages que les

ancêtres des érudits de Sinder étaient des adeptes de la religion traditionnelle. Les deux

sources s‟étalent longuement sur la question et les contenus sont pratiquement identiques.

C‟est pourquoi nous avons jugé utile de ne retenir que le contenu du Tarikh dont les

importantes dates repères facilitent nos analyses.

II- L’œuvre des successeurs de Tondo Djalley

Devenu vieux, Tondo convoqua ses quatre frères et leur conseilla de garder des

relations cordiales avec les enfants de Mahaman Diobbo. Il les invita à répondre

favorablement à toutes les sollicitations des gens de Say. Ses frères respectèrent ses

dernières volontés et les relations entre Say et Sinder restèrent cordiales jusqu‟au règne de

Amirou Oumarou Djibril. Tondo fut un homme pieux et sage. Il faisait toutes ses prières de

vendredi à Say. Quand un moment il constata qu‟il lui était difficile de parcourir toutes

les semaines, la distance qui sépare Say et Sinder, il demanda à Mahaman Diobbo

l‟autorisation de construire une mosquée pour la prière de Vendredi sur l‟île. Mais, ce désir

ne sera réalisé que sous le règne de Zindiko Djalley. Cette mosquée sera rénovée sous le

règne de Youssouf, fils de Halil.

248
1- L’œuvre de Zindiko Djalley (1830- 1844) et de ses successeurs

Après Tondo, c‟est son frère Zindiko qui prit le pouvoir. De son vrai nom, Ali, il

régna de 1830 (1250) à 1844. Comme son grand frère, c‟était un pieux très attaché à

l‟islam. Il observa à quelques exceptions près la même attitude que son frère. Malgré la

distance, il se rendait aussi, tous les vendredis à Say pour faire sa prière. Pour permettre à

la population de l‟île d‟accomplir ensemble la prière de ce jour saint, il réitéra aux

autorités de Say la demande d‟autorisation de construire une mosquée de vendredi.

L‟autorisation fut aussitôt accordée. Zindiko fit bâtir la mosquée. C‟est un Amirou qui se

préoccupe beaucoup du bien être des populations de Sinder et du développement de

l‟éducation religieuse en témoigne cette version du Tarikh :

« Il fora partout où le besoin se fit sentir des puits sur l’île. Il mit aussi l’accent sur
le développement des travaux maraîchers et sur la sécurité dans le centre. Comme
pour le cas de Say, il opta pour la méthode pacifique pour gérer sa population et
pour répandre l’islam en donnant lui- même l’exemple. Ce fut un fin diplomate qui
sut développer des relations cordiales avec ses voisins. Il mit à profit ce temps de
paix pour développer l’enseignement islamique sur l’île de Sinder »1.

Zindiko mourut à Sinder en 1844 (1264), après quatorze années de règne.

Après sa mort, son frère, Boubacar Djalley prit le pouvoir au cours de la même année.

Son règne fut caractérisé par la guerre contre les infidèles des contrées voisines :

« C’est Alfaizé Boubacar de Say qui l’autorisa à combattre un mécréant qui semait
la terreur dans la région. Ce mécréant fut poursuivi par l’armée de Boubacar
Djalley dirigée par Mahrishane, un redoutable guerrier de Sinder. Le mécréant fut
poursuivi jusqu’aux environs de Djamballa où il fut tué »2.

Boubacar eut un règne très court. Il mourut après deux ans de règne en 1846. Après sa

mort, il y eut une querelle de succession entre Mahrishane Dandakoye et Mahamadou

Tondo. Le différend fut porté devant les autorités de Say qui tranchèrent en faveur de ce

dernier (1846- 1861). Se règne fut marqué par deux évènements majeurs : une famine et

1 - Tarikh Sinder, folio 17.


2 - Entretien avec Mohamed Djingarey, chef de canton de Sinder à Sawani le 20/03/11.

249
une guerre. Selon la tradition locale, il eut une famine terrible sous son règne qui endeuilla

les populations de l‟île. Son règne fut également caractérisé par une guerre contre un kofr

du nom de Sahdjilé qui menaçait les paisibles populations de la localité. C‟est au cours du

combat qui opposa l‟armée de ce mecréant et celle de Sinder que Mahrishane, le

redoutable guerrier de l‟île trouva la mort. Ainsi, la famine et l‟insécurité avaient fait

baisser l‟activité religieuse dans cette localité. Mais, le successeur de Mahamadou,

Tahirou, un grand lettré musulman va marquer l‟histoire du centre d‟études islamiques

secondaire de Sinder.

2 -Tahirou Tondo (1281- 1288)- (1861-1868)

Tahirou Tondo est l‟exemple type de son père. C‟est un fervent croyant dont le

règne fut marqué par l‟accalmie sur tous les plans. En effet, le nouveau souverain est un

homme de paix doté d‟un sens élevé de justice et d‟équité. Les principaux thèmes abordés

lors de ses prêches tournent autour de la justice, de la vérité, du jugement dernier, de

l‟amour du travail, du respect du bien d‟autrui…. Son attitude exemplaire lui a valu la

sympathie des populations de l‟île et celle des habitants des régions voisines. Sous son

règne le centre d‟études islamiques connut la prospérité car il n‟y eut ni guerre ni famine :

« Amioru Tahirou fut aussi un dirigeant très généreux, il avait des greniers
remplis de vivres qui servaient à venir en aide aux populations nécessiteuses de
l’île. En effet, pour éviter à ce que les vivres soient détournés, il préparait à
manger dans son palais pour les indigents qui s’y rendaient en masse. En plus du
repas, il payait la dot et tous les accessoires du mariage à tous les jeunes qui
avaient atteint l’âge de se marier et qui, malheureusement n’avaient pas de
moyens. Il était tellement bien et juste que mêmes les animaux féroces avaient
cessé d’attaquer les animaux domestiques de l’île. C’est sous son règne que l’islam
fut largement répandu à Sinder et dans les contrées voisines »1.

1 - Tarikh sinder folio 26.

250
Amirou Tahirou était certes généreux et juste mais, même au temps du prophète les

animaux féroces dévoraient leurs proies. Ceci n‟est que le fruit de l‟imaginaire populaire

pour magnifier la bonté de cet érudit.

Sous son règne, on assista à une certaine ferveur religieuse sur l‟île. Les talibé

venaient non seulement des villages insulaires comme Wissili, Fala, Tessa- Goungou…

mais aussi des deux rives du fleuve (Djamballa, Darbani, Bibiyargou, Bankilaré…). Mais,

son règne fut de courte durée. Il n‟eut durant sa vie qu‟une seule fille du nom de Mariah. Il

meurt après sept ans de règne laissant une population de Sinder profondément meurtrie.

Après la mort de Tahirou, c‟est Soumana Bokar (1288- 1292)- (1868- 1872) qui prit

le pouvoir. Son règne fut surtout caractérisé par la reprise des hostilités entre les Touareg

du Haoussa1 (Bibiyergou situé sur la rive gauche) à ceux du Gourma (Bankilaré situé à la

rive droite). Selon la tradition locale, c‟est sous le règne de Soumana que les Touareg de

Bankilaré refusèrent de payer tribut à ceux du Haoussa. Ces derniers déclarèrent alors la

guerre aux Touareg de Bankilaré. Ils avaient constitué une forte armée appuyée par des

alliés Kourté, Zarma, Soŋey. Quand les Touareg du Gourma apprirent la nouvelle, ils se

réunirent autour de leur souverain, Helowanzaïdou. Ce dernier organisa la résistance. Il

scinda la population du village en deux groupes afin de préparer la contre- attaque : le

premier groupe était dirigé par l‟un de ses fils, Karmazi. Ce groupe se dirigea vers le

village de Tara ; l‟autre groupe, à la tête duquel, se trouvait le chef Helo lui-même se

dirigea vers Sinder :

« Helo et ses hommes quittèrent ainsi Bankilaré. Il conduisit son groupe sur
l’île de Sinder où il fut bien accueilli par Amirou. Ce dernier les hébergea à côté
d’une montagne qui porte actuellement le nom de Helo (Helo Tondo2). Mais, cet
endroit était distant du village de Sinder, Helo jugea utile pour sa sécurité et celle
des siens de s’installer sur un autre site proche du village de Sinder. Soumana
Bokar les hébergea de nouveau. Le souverain touareg saisit l’occasion pour
l’informer des raisons qui les avaient poussés à quitter leur village pour venir

1 - Les Touareg de la rive gauche : il s‟agit des Touareg de Bibiyergou (village situé à une quinzaine de
kilomètres de Sinder) appuyés par ceux d‟Inates.
2 - Helo Tondo : Montagne située non loin du chef lieu de la commune rurale de Sinder.

251
s’installer sur l’île. Amirou Sinder promit de les soutenir si les Touareg du
Haoussa osèrent les attaquer sur son territoire. Malgré cette menace, ceux - ci
attaquèrent l’armée de Helo sur l’île. Les deux armées (l’armée de Helo et celle de
Sinder) firent ainsi bloc contre les Touareg du Haoussa et remportèrent la victoire.
Depuis ce jour, les Touareg de Bankilaré ne payaient plus tribut à ceux de la rive
gauche. Après cette victoire, Amirou Sinder demanda au souverain touareg de
retourner à Bankilaré pour vivre en paix avec les siens »1.

Mais, Soumana ne règna que quatre ans sur le trône de Sinder. Il mourut en 1872 (1292) et

laissa derrière lui deux filles et quatre garçons qui sont : Lagaré, Salamatou, Youssouf,

Abdoulsalam, Guisso et Abdallah.

Ali Zindiko (1292- 1293)- (1872-1873) accéda au trône en 1872 après la mort de

Soumana Bokar. Il n‟était pas l‟unique prétendant au trône, il avait pour concurrent,

Alboria Saouda. Ce dernier était déjà candidat contre Soumana Zindiko. Mais, les notables

de Sinder choisirent Ali Zindiko à son détriment. Ils avaient comme argument le droit

d‟aînesse en raison de la jeunesse d‟Alboria Saouda. Comme son prédécesseur, Ali

Zindiko entrera en guerre contre un adversaire redoutable, Amirou Tillakaina, Nabayzé2. Il

n‟eut malheureusement pas le temps de ramener la paix car il mourut après une année de

règne. Il laissa derrière lui quatre enfants : Hamidou, Hassane, Ibrahim et Omar.

En 1873 (1293), après la mort d‟Ali Zindiko, Alboria Saouda accéda enfin, au trône

dans une confusion totale :

« Après son intronisation, le fils de Mahrichane, Khalil apprit la nouvelle et revint


à Sinder après un long séjour dans le Gourma pour des soins car il était tombé
malade. Il était à Foneko3. Avant même son intronisation, les notables du village
avaient demandé à Alboria Saouda d’attendre le retour de Khalil pour qu’ils
procèdent au vote mais celui - ci refusa catégoriquement. Il avait été intronisé par
un groupe de courtisans. Quand Khalil apprit la nouvelle de l’usurpation du
pouvoir par Alboria, il était fâché, fou- furieux. Il demanda aux notables, les
raisons pour lesquelles ils avaient placé Alboria sur le trône pour succéder à Ali

1 - Tarikh Sinder folio 28.


2 - La guerre entre le chef de Tillakaina, Nabayzé et les autorités de Sinder est due à la tentative de Nabayzé
de prendre les animaux de Sinder. En effet, pendant la vaine pâture, les animaux de Sinder partaient paître à
Garié (île située en face de Tillabéri). Nabayzé voulut saisir l‟occasion pour prendre de force les animaux de
Sinder, ce qui suscita la réaction des populations de Sinder.
3 - Foneko: village du département de Téra, c‟est aussi le village natal de Boubou Hama, premier président
de l‟Assemblée Nationale du Niger.

252
Zindiko. Il leur fit comprendre qu’il n’était pas d’accord avec ce choix. Khalil
rentra directement chez le souverain pour lui arracher les insignes du pouvoir et
personne ne s’y opposa. Les insignes étaient restés avec Khalil trois (3) mois
durant. Après, les notables de Sinder se réunirent chez Khalil pour le prier de
remettre les insignes du pouvoir à Alboria Sauda. Il accepta de les remettre sous la
pression des notables et des sages du village »1.

Sous le règne d‟Alboria Saouda, Sinder n‟a connu ni famine, ni catastrophe

naturelle, ni guerre. La paix régna sur l‟île et sur l‟ensemble des territoires qui étaient sous

sa tutelle. La prospérité aussi s‟établit. Sinder ne connut pas de sècheresse. Aussi, les

activités religieuses s‟intensifièrent-elles dans ce centre : « Sous son règne, on assista à

l’arrivée sur l’île de plusieurs talibé venus des villages environnants mais aussi des

contrées lointaines comme Bourra (Mali). Il intensifia les échanges entre Say et Sinder »2.

Mais, son règne fut de courte durée. Il mourut après trois ans d‟exercice du pouvoir en

1876 (1296). Il eut trois enfants qui sont : Khalil, Abbas et Fatouma.

Après la mort d‟Alboria Saouda, Amadou Bokar (1296- 1303)- (1876- 1878),

accède au pouvoir. Amirou paisible et juste, il s‟efforça durant son règne à faire régner la

paix sur l‟ensemble du territoire de Sinder. L‟islam prospéra sur l‟île et ses environs. Parmi

ses successeurs, nous pouvons retenir, Boulkassoum Mahamadou (1303- 1307)- (1878-

1884) et Sabarey Djibrilla (1307- 1309)- (1884- 1886). Leurs règnes furent dans

l‟ensemble paisibles. On assista à un développement de l‟enseignement religieux sur l‟île.

C‟est seulement sous le règne de Boulkassoum Mahamadou qu‟une guerre opposa Sinder

et Djamballa3. Elle se solda par la mort de plusieurs guerriers de Djamballa et la saisie

d‟un nombre important de captifs dans leur rang.

1 - Tarikh Sinder folio 30.


2 - Entretien avec Younoussa Sinder à Sawani le 20/03/2011.
3 - La guerre entre Djamballa et Sinder est due à une pratique courante des guerriers de Djamballa. Ces
derniers organisent pendant la saison des pluies des rapts d‟esclaves. Ils attendent en effet, que les jeunes
agriculteurs de Sinder organisent „‟le Boogu’’ (travaux collectifs organisés par les paysans pour s‟entre-
aider) pour les attaquer par surprise et amener ainsi des bras valides en captivité : cette situation exaspéra la
population de Sinder qui s‟organisa et attaqua à son tour les chasseurs d‟esclaves de Djamballa.

253
III- Les règnes d’Oumarou Djibrilla et d’Attikou Mahamadou

1- Le règne d’Oumarou Djibrilla (1309- 1311)- (1886- 1894) et la crise au sein

de l’instance judiciaire

Homme de paix et de justice, il entreprit des négociations avec les autorités de

Djamballa. Sa démarche consiste à se réconcilier avec les ennemis d‟hier de Sinder. Grâce

au climat de paix qui régnait sur l‟ensemble du territoire, les cadis de l‟île avaient repris

service. Ils étaient sollicités un peu partout dans les contrées voisines (Djamballa, Wissili,

Bankillaré, Darbani…) pour régler des différends. Ils effectuaient leurs tournées toutes les

trois semaines et choisissaient généralement la journée du vendredi. Mais, un de ces cadis

adopta un comportement indigne de son rang. En effet, il cachait à Amirou Sinder, les

présents qu‟il recevait lors de ses tournées. Quand il achèvait sa tournée, il rentrait

directement dans le village de ses oncles, Sansané- Haoussa. Le cadi en question s‟appelait

Ranié, un petit fils d‟Aboubacar, le premier cadi de Sinder mais sa mère était une princesse

de Sansané- Haoussa. Choyé par ses oncles, il avait élu domicile dans son village

maternel :

« Informé par les siens du comportement indélicat de Ranié, cadi de Sinder,


Amirou Oumarou, le convoqua et lui demanda de cesser d’adopter un tel
comportement qui est indigne de son rang. Il lui demanda de choisir entre deux
choses : soit résider à Sinder ou bien tout ce qu’il aura comme cadeaux ne sortira
pas de l’île. Selon Amirou Sinder : ‘’Les biens de Sinder ne sortent pas de Sinder’’.
Mais malgré cet avertissement, Ranié refusa d’obtempérer. Amirou l’interpella à
nouveau mais cette fois-ci devant des témoins avertis. En effet, à cette époque
vivaient sur l’île de Sinder trois grands Shaykh parmi les Shaykh de l’islam, il
s’agit du Shaykh Mamane Walidjo, du Shaykh Albassati et du Shaykh Elhadji
Seydou. Le souverain de Sinder a fait appel à ces ouléma afin qu’ils parviennent à
convaincre le cadi sur la nécessité de respecter les instructions du souverain. Mais,
le cadi dit non aux lettrés musulmans. Devant ce refus catégorique du cadi,
Oumarou a demandé à ces derniers d’écrire une lettre dans laquelle ils vont
donner tous les détails concernant les origines du différend qui l’oppose à son cadi.
Le différend fut ainsi porté devant les autorités de Say qui tranchèrent en faveur
d’Amirou Sinder qui démit le cadi et nomma, Elhadji Seydou à sa place. Mais un
problème se pose, Elhadji n’est pas un ayant droit car n’étant pas descendant du
Shaykh Aboubacar1. Après cette destitution, les descendants du Shaykh Aboubacar

1- Shaykh Aboubacar est un alim que Tondo, le fondateur de Sinder avait trouvé sur l‟île de Wissili et lui
avait demandé de le suivre, en contrepartie, il lui le nommerait Imam et Cadi de Sinder. Depuis la création de

254
se sont réunis chez le cadi, Alfa Ranié pour faire des invocations contre Oumarou
Djibrilla ainsi que sa descendance parce qu’il avait violé le pacte qui liait leurs
ancêtres. Dans leurs invocations, ils avaient imploré Dieu d’empêcher à ce
qu’aucun descendant d’Oumarou Djibrilla n’ait accès au trône de Sinder jusqu’au
jour du Jugement Dernier. Dieu avait exaucé la prière des descendants du Shaykh
Aboubacar car aucun descendant de ce souverain n’avait accédé au trône après ce
dernier jusqu’à ce jour »1.

Après ces prières, le cadi destitué a regagné la terre de ses oncles. Mécontentes de

cette décision, les populations kourté, propriétaires des terres de l‟île décidèrent de

reprendre leurs biens fonciers. Ce qui provoqua une crise grave entre les deux

communautés qui a failli dégénérer en conflit armé. Suite à cette décision des Kourté,

Amirou Sinder demanda à la population de restituer toutes les terres et d‟aller mettre en

valeur les terres du Gourma. La tension dura un an. A la septième année de son règne, en

1893, les autorités de Say entreprirent des négociations qui aboutirent à la réconciliation

entre les deux communautés et les Kourté restituèrent les terres à la population de Sinder.

Après cette réconciliation, Amirou Oumarou vécut une année sur le trône. Il décéda en

1894 et ne laissa qu‟un seul enfant du nom de Hari.

2- Attikou Mahamadou dit Ambela (1311- 1316)- (1894- 1999) et la conquête

coloniale

Il est le treizième Amirou de l‟île de Sinder. Il monta sur le pouvoir après la

mort d‟Oumarou Djibrilla. C‟est sous son règne qu‟interviendra la conquête coloniale

avec son cortège de malheurs. Le tarikh de Sinder donne d‟amples détails sur les heurts

entre la population de Sinder et les français :

« C’est à la deuxième année de son règne c’est à dire en 1896, que des soldats
français étaient arrivés à Sinder à bord de trois pirogues et avaient campé à
proximité du village. Ils avaient demandé à Amirou Sinder d’intimer à sa

Sinder jusqu‟au règne d‟Oumarou Djibrilla, ce sont les descendants du Shaykh Aboubacar qui ont occupé, le
poste de cadi d‟où l‟indignation de ses descendants lors de la nomination d‟Elhadji Seydou comme cadi de
Sinder.
1 - Tarikh Sinder folios 38- 39.

255
population de ne pas sortir la nuit mais également que personne ne vienne les voir
pendant la nuit car ils n’hésiteraient pas à tirer sur tout ce qui bouge.
Mais après cette annonce, un prince du village de Sinder nommé Adam, fils
d’Amirou Sabarey était sorti la nuit (pour ses besoins naturels). Dès que les soldats
français l’avaient aperçu, ils avaient ouvert le feu sur lui et l’avaient tué. Le
lendemain matin, les français étaient venus pour demander à Amirou quelques
hommes pour leur montrer les limites du territoire de Sinder. Amioru Sinder
désigna six hommes pour guider les français. Mais avant leur départ, il avait
demandé aux guides de les amener loin du village de Sinder et de s’enfuir. Les six
hommes avaient accompagné les français jusqu’au niveau de l’île de Farka où ils
avaient décidé de passer la nuit. Au moment où ils dormaient, deux des six guides
s’étaient évadés pour revenir à Sinder. Après les quatre autres s’étaient également
enfui à leur tour. Et quand les français avaient découvert la fuite, ils s’étaient
lancés à leur poursuite et avaient pu arrêter les deux guides qu’ils avaient abattus
sur le champ. Puis arrivés au niveau du village, ils avaient accosté à côté d’une
colline et s’étaient mis à tirer sur la population du village en faisant une victime du
nom de Abass, fils d’Amioru Alboria Saouda et beaucoup de blessés dans le
village. Après ce crime crapuleux, les français avaient poursuivi leur chemin
jusqu’à Kandadji où ils avaient encore ouvert le feu et avaient tué un homme du
nom de Bantassi Dicko. Ce dernier était un joueur de tam- tam. Ils avaient blessé
plusieurs autres. Puis ils avaient continué jusqu’au niveau de Sawani où une de
leurs pirogues s’est brisée au niveau de Koyria et avaient pu sauver les deux
autres. Après ça, ils avaient poursuivi leur chemin et les populations de Sinder
n’avaient plus eu des nouvelles des français jusqu’à la cinquième année du règne
d’Attikou, c'est-à-dire en 1900 »1.

Selon la tradition locale, c‟est au cours de cette année aussi, qu‟un groupe de

français étaient arrivés à Sinder du côté de Gourma. Ces français avaient attaqué l‟île de

Sinder avec leurs armes à feu entraînant une fuite de la population. En effet, cette dernière

s‟était scindée en deux groupes qui avaient pris différentes directions : un premier groupe

dirigé par Amirou Sinder Attikou accompagnés de Alfaga Youni, Shaykh Alboussani,

Shaykh Elhadji Sadou, Ibrahim Ali Zindiko et beaucoup d‟autres personnes de Sinder

avaient pris la direction de Karma. C‟est de cette localité qu‟ils eurent les nouvelles du

massacre de plusieurs personnes de Sinder par l‟armée française à Sansané- Haoussa. Les

victimes auraient été jetées dans une fosse dans cette localité. Amirou Sinder et les Shaykh

dépêchèrent deux émissaires au sein du groupe pour aller recueillir des informations à

Sansané- Haoussa. Les deux émissaires revinrent et confirmèrent au souverain et à ses

1 - Tarikh Sinder folio 57.

256
compagnons le massacre de la population. A partir de Karma, le groupe s‟était scindé en

deux : un groupe composé d‟Amirou Attikou Mahamadou, du Shaykh Alboussati et du

Shaykh Elhadji Sadou avait pris la direction de l‟Est. Il marcha jusqu‟à Kaoura en pays

Haoussa. Dans cette localité, le groupe s‟était subdivisé encore en deux : un groupe dirigé

par le Shaykh Alboussati a continué vers le Hedjaz. Ces gens ne sont plus revenus à

Sinder. L‟autre groupe dirigés par Amirou Sinder et le cadi Elhadji Sadou est allé jusqu‟à

Bagoudou dans le Gwandou puis à Zaria où ils s‟installèrent. Après un court séjour à Zaria,

le souverain et quelques personnes décidèrent de revenir au pays. Ils vinrent s‟installer à

Neni. Entre-temps, une partie de la population de Sinder qui avait fui était revenue sur l‟île

mais elle était sans souverain. La population avait décidé de nommer, Ousmane Djibrilla

son frère à sa place. Raison pour laquelle Attikou Mohamadou était resté à Neni jusqu‟à sa

mort. Sa tombe est actuellement visible sur l‟île.

Mais, la seconde vague issue de la première scission du groupe d‟Amirou Attikou et

placée sous la direction d‟Alfaga Youni et Ibrahim, fils d‟Ali revint sur ses pas. Ils

descendirent aux environs de Sawani plus précisement à Gourga- Béri. Ibrahim Ali quitta

cette localité avec sa suite pour s‟installer à Ganda- Fabou. Toutes ces localités se trouvent

sur l‟île de Sawani.

Mais selon la tradition locale, la majorité de la population de Sinder au moment

des tirs des soldats français est sortie de l‟île pour se réfugier à Djamballa et à Sakoira. Les

populations fugitives dans ces deux localités vont tenter de négocier. Parmi ces réfugiés de

Djamballa, il y avait un homme courageux et rusé, Khalil. Il a fait recours à un interprète

peul de l‟armée française qui lui a expliqué l‟état d‟esprit des français. L‟interprète lui a

fait savoir que ce sont des gens qui acceptent la réconciliation et les arrangements à

condition d‟en faire la demande. C‟est ainsi que Khalil est allé avec ce Peul ainsi que

quatre notables de Sinder à la rencontre des français. Ils sont rentrés dans une pirogue à

257
l‟arrière de laquelle ils ont fixé un fanion blanc signe de leur volonté de paix. Ils accostent

sur l‟île de Diounta où se trouve la base des français. Khalil s‟est dirigé vers le

commandant qui l‟a accueilli avec tous les honneurs et lui a demandé l‟objet de sa visite.

Khalil a répondu qu‟il est venu chercher la paix et proposer l‟allégeance de la population

de Sinder. Le commandant français a accepté l‟offre d‟allégeance de la population à

condition qu‟elle lui paie un impôt. Il a donné trois jours à Khalil pour demander à toute la

population de Sinder où qu‟elle se trouve de revenir vivre sur l‟île avec leur souverain.

Khalil est revenu et a réuni tous les ressortissants de Sinder pour les informer de

l‟engagement pris par les français lors de leur rencontre, de leur désir de vivre en paix

avec eux. Et c‟est ainsi que la majorité de la population est retournée vivre sur l‟île de

Sinder. Mais, Alfaga Youni a préféré rester définitivement à Gourka- Béri avec ses

disciples. Tous les chefs de familles de Sinder se sont réunis chez Alfaga Youni pour élire

un nouveau souverain et le choix fut porté sur la personne de Guibey, fils d‟Ali, fils de

Tondo qui est à l‟époque l‟aîné de la famille de Djalley. Mais, il refuse de prendre le

pouvoir. C‟est à ce moment que les chefs de familles se sont entendus sur la personne

d‟Ousmane fils de Djibrilla pour remplacer Attikou Mohamadou en fuite et c‟est en 1901.

Au 3e jour, ils ont présenté le nouveau souverain au commandant français qui les a

accueillis avec tous les honneurs. Le commandant leur a demandé de retourner vivre en

paix dans leur village. Et l‟officier français a continué à résider à Lassia jusqu‟à la 5ème

année du règne d‟Ousmane en 1906 avant de s‟installer à Doulsou.

Ce qu‟on peut retenir de cette version, c‟est que jusqu‟à la période coloniale,

Sinder comptait un nombre important de lettrés musulmans. Même à une époque encore

récente, Sinder reste et demeure, le centre d‟études islamiques le plus important du secteur

de Tillabéri. En atteste ce témoignage du chef du secteur :

258
« Il y a dans le secteur de Tillabéri, un centre très important du point de vue
musulman : c’est Sinder- Bourra1. Là est une mosquée, la seule du secteur, un peu
piteux comme construction, mais très fréquentée, il y a toujours un assez grand
nombre de fidèles de marabouts en prières ou en confrérie »2.

Selon Séré De Rivières, la cause de ces échauffourées, c‟est la résistance des

Touareg. Ces derniers ont refusé de se soumettre à l‟administration coloniale. Pourchassés

par les troupes françaises, ils ont trouvé refuge dans les îles de Sinder, ce qui a provoqué la

colère des français à l‟égard des populations vivant dans la zone :

« Après une période d’expectative, Bokar Ouanzeydou3 manifesta ses sentiments


hostiles aux Français. En octobre 1898, une colonne part de Dori sous les ordres
du commandant Crave, marche sur Diagourou, surprend les Peul et les met en
fuite : Diagourou est pris et brûlé. Crave se retourne contre les Logomaten de
Bokar Ouanzeydou, qui est rejoint et battu à Karakoiré, sur les bords du fleuve, le
27 octobre. Les Touaregs se réfugient dans les îles de Sinder ; Crave les y poursuit
et fonde un poste à Sinder (2 novembre 1898). Toujours à la poursuite des
Touareg, il remonte le fleuve jusqu’à Doulsou où un second poste est installé (12
novembre 1898). Une série d’opérations de reconnaissances parsemées de
combats, se déroule alors de Yatacala à Ansongo, tandisque la mission Voulet-
Chanoine descend le fleuve vers Say » (Séré de Rivières, 1965 : 204- 205).

Cette version est confirmée aussi par le capitaine Buck dans sa monographie sur le cercle

de Tillabéri :

« Bokar Wanzeydou, chef de Logomaten soutenu par quelques bandes de peuls du


Diagourou poursuivi depuis Dori par le commandant Crave organisait son centre
de résistance à Sinder. En marchant à sa poursuite le commandant Crave créait au
passage un poste à Ayaru (canton de Doulsou) et finissait par s’installer à Sinder
d’où il pouvait contrôler le fleuve. En octobre 1899, cette zone de commandement
est fractionnée et le cercle de Sinder est créé »4.

1 Sinder- Bourra : Sinder est affectueusement appelé Sinder- Bourra par la population locale afin
d‟immortaliser le nom du village natal du fondateur de Sinder : Tondo Djalley.
2- ANN- 1E7- 33- TMN- Cercle de Niamey : secteur de Tillabéri- Monographie du secteur de Tillabéri, p.
24.

3 - Bokar Ouanzeydou est le chef des Touareg de Bankilaré. Les Touareg de cette localité entretenaient des
relations cordiales avec les autorités de Sinder depuis des décennies. D‟ailleurs, c‟est une coalition de
l‟armée de Bankilaré et celle de Sinder qui avait battu les Touareg du Haoussa (Bibiyergou).
4 - ANN- 1E 7-23 : Monographie du cercle de Tillabéry par le capitaine Buck, 1907, p. 14.

259
De la création de Sinder à nos jours, vingt et un (21) Amirou se sont succédé au trône. Le

tableau ci-dessous donne des précisions sur les différents souverains qui ont régné sur le

trône de Sinder de sa création à nos jours.

260
Liste des Amirou qui se sont succédé à la tête du centre d’études islamiques

secondaire de Sinder de sa création à nos jours.

N0 Nom et Prénoms Durée de règne (en année)

1 Tondo DJALLEY 1813- 1830

2 Zindiko DJALLEY 1830- 1844

3 Bokar DJALLEY 1844- 1846

4 Mahamadou TONDO 1846- 1861

5 Tahirou TONDO 1861- 1868

6 Soumana BOKAR 1868- 1872

7 Alio ZINDIKO 18726 1873

8 Alboria SAOUDA 1873- 1876

9 Amadou BOKAR 1876- 1878

10 Boulkassoum MAHAMADOU 1878- 1884

11 Sabarey DJIBRILLA 1884- 1886

12 Oumarou DJIBRILLA 1886- 1894

13 Attikou MAHAMADOU 1894- 1899

14 Ousmane DJIBRILLA 1899- 1915

15 Boubacar MAHAMADOU 1915- 1923

16 Harouna OUMAROU 1923- 1926

17 Issaka MOUSSA 1926- 1934

18 Idrissa ATTIKOU 1934- 1940

19 Djingarey IBRAHIM 1940- 1983

20 Harouna DJINGAREY 1983- 1988

21 Mahamadou DJINGAREY Depuis 1989

261
Tondo Djalley, wogo issu d‟une famille adepte de la religion traditionnelle est

celui qui a conduit une partie de la communauté wogo de Bourra à Sinder Bourra. Avec

l‟appui des érudits qui l‟ont suivi, il va faire de Sinder un centre d‟études islamiques de

renommée régionale. Même si Sinder n‟a pas eu le même poids que Say et le centre du

Dallol, il n‟en demeure pas moins que jusqu‟à l‟installation de l‟administration coloniale, il

est le plus important centre du secteur de Tillabéri.

Sinder comptait également plusieurs écoles coraniques avec un nombre élevé de

talibé plus que dans les autres localités. Selon l‟administrateur Leca, même si les écoles

coraniques sont nombreuses dans tout le cercle de Tillabéri, ce sont celles de Sinder

seulement qui comptent un nombre assez élevé d‟élèves :

« On peut les considérer comme très nombreuses mais elles n’ont que peu
d’importance. En général chaque marabout est chef d’école, il n’ya souvent qu’un
élève parfois trois - quatre. A Sinder seulement on trouve un centre d’écoles un peu
plus sérieux qui comptent parfois vingt et même vingt- cinq élèves »1.

1- ANN- 1E 7-23 : Monographie du cercle de Tillabéry par le capitaine Buck, 1907, p. 13.

262
Chapitre XI : Les centres d’études islamiques secondaires de Tirga, de Goudel et de

Kounari

Le Jihad d‟Ousman Dan Fodio a eu pour conséquence, une dissémination des

centres d‟études islamiques dans l‟espace nigérien en général et dans l‟Ouest du Niger en

particulier. Outre les deux principaux centres (Say et le centre du Dallol) et un centre

secondaire non moins important (Sinder), on note l‟existence de plusieurs centres

secondaires parmi lesquels, on peut citer : Tirga, Goudel, Kounari. Ce chapitre abordera

l‟étude de l‟œuvre des ouléma qui ont marqué l‟histoire de ces centres au XIXe siècle.

I- Le centre d’études islamiques secondaire de Tirga

1- Historique du Village

Le village de Tirga est situé à cinq(5) Kilomètres à l‟Est de Kobadié1 sur les bords

du Goroubi. C‟est là que se trouve la tombe du „‟Wali’’, Sorry Beldo Hooré. Ce dernier est

un Peul du Bittinkodji issu de la famille aristocratique car sa mère, Houtman Boureima est

la sœur de Warou Boureima, petit fils d‟Ali Yéro, fondateur de la principauté du

Bittinkodji. Tirga était une réserve foncière sur laquelle vivaient des Gourmantché avant

l‟arrivée de „‟Bittinkoobé‟‟. C‟était le grand père de Sorry Beldo Hooré, Boureima Ali

yéro dit Maya qui occupa les terres de Tirga. Le nom ‘’Tirga’’, fut donné à ce site après

une guerre qui opposa les Peul du camp de Boureima Ali Yéro el les Gourmantché,

populations autochtones. Les combats entre les deux communautés durèrent trois jours et

se soldèrent par la victoire des Peul. A la fin des combats, Maya, le grand père de Sorry

Beldo Hooré inspecta les lieux et constata que tout le champ de bataille était jonché de

cadavres. Il poussa un cri et s‟exclama : „‟Tirga ‘’ qui signifie „‟quel massacre‟‟ ou „‟quelle

1- Kobadié : Village situé à 35 kilomètres de Niamey sur la route de Torodi (Tronçon Niamey-
Ouagadougou).

263
horreur‟‟. Selon notre informateur, Amadou Mamane, les séquelles de cette guerre sont

encore visibles : « Après des pluies importantes, les eaux de ruissellement drainent des os

des victimes de cette guerre jusqu’à la vallée, ‘’ Goroubi’’. Et quand l’eau de la vallée se

retire, on trouve ces morceaux d’os à la berge »1. Version confirmée par Koïnuga2, un

paysan du village de Kaareyele, dans le Bittinkodji.

Tirga était resté pendant longtemps un hameau de culture. Les populations s‟y

rendaient seulement pendant la saison des pluies pour mettre en valeur leurs terres. Pendant

la saison sèche, elles revenaient au village et y restaient jusqu‟à la prochaine campagne

agricole. C‟est avec l‟avènement de Sorry Beldo Hooré que ce hameau de culture

deviendra un village et abritera même un certain temps le siège de la capitale du

Bittinkodji. Après la mort du lettré musulman, la capitale sera transférée à Toulwaré puis à

Kareygorou. La raison c‟est que les populations ont déserté le village à cause du retour de

l‟insécurité après le décès de l‟érudit.

2- L’origine, la formation et l’œuvre de Sorry Beldo Hooré

Alfa Sorry3 Beldo Hooré4, de son vrai nom, Boureima Boukari est le fils de Boukari

Maya et de Houtman. Il serait né vers 17325 sur une île appelée Koorogoungou dans le

Bittinkodji. Le premier site du village se trouve sur une île non loin du village actuel de

Kareygoorou6. Il a été abandonné depuis longtemps suite aux différents débordements des

1 - Entretien avec Amadou Mamane à Tirga le 20/10/10.


2 - Entretien avec Koïnuga, paysan à Kaareyele le 21/10/10.
3- Sorry est un surnom donné généralement par les Peul aux jeunes garçons baptisés Boureima. Dans le cas
précis de Sorry Beldo Hooré, il signifie un rassembleur, en un mot quelqu‟un de bien.

4- Beldo Hooré : Littéralement Beldo signifie, bon et Hooré, la tête. Beldo Hooré signifie, le chanceux, „‟ le
porte- bonheur‟‟. En effet, le jour où Sorry Beldo Hooré est né, un groupe de pillards touareg a attaqué à
trois reprises le village mais sans succès. Cet évènement sans précédent dans l‟histoire du village est lié à la
naissance de ce garçon chanceux d‟où le surnom Beldo Hooré.

5- Nous avons obtenu sa date probable de naissance en faisant des recoupements. En effet, selon nos
informateurs Sorry Beldo Hooré serait mort, il y a 201 ans et il était âgé de 77 ans.

264
crues du fleuve qui ont inondé le village à plusieurs reprises. Après l‟abandon de ce site, la

majorité de la population de Koorogoungou est venue s‟installer à Kareygoorou. Le reste

de la population s‟est dispersé en direction de plusieurs villages. Il faut rappeler à ce

niveau que Sorry Beldo Hooré est issue de la famille aristocratique du Bittinkodji. Il a eu

pour premier maître, Alfa Boureima. Ce dernier est un alim originaire de Tombouctou qui

voulait effectuer son pèlerinage aux lieux saints de l‟islam. A l‟époque, à cause de

l‟importance de la distance à parcourir à pieds, les pèlerins effectuaient plusieurs escales

avant d‟atteindre la Mecque. C‟est ainsi qu‟Alfa Boureima de Tombouctou fit escale dans

le village natal de Sorry Beldo Hooré. Le père de ce dernier hébergea l‟étranger et lui

confia son garçon, Sorry. Selon Amadou Mamane :

« Alfa Boureima de Tombouctou fit le premier maître de Sorry Beldo Hooré. Il était
resté pendant plusieurs années sur l’île de Koorogoungou où il ouvrit une école
coranique. Parmi ses ‘’talibé’’, Sorry Beldo Hooré fut le plus brillant. Emerveillé
par l’intelligence du jeune apprenant, il attira l’attention des parents du jeune
garçon sur les qualités exceptionnelles de leur fils. Il leur conseilla de l’envoyer
dans le Gorgal (Macina) afin qu’il puisse approfondir ses études. Devenu vieux et
fatigué, Alfa Boureima renonça à son projet et retourna à Tombouctou où il
mourut »1.

Les parents de Sorry Beldo Hooré suivirent les conseils de l‟érudit de Tombouctou

et envoyèrent leur fils dans le Gorgal. Après plusieurs années d‟études dans le Macina,

Sorry revint au pays et s‟installa à Tirga où il ouvrit une école coranique pour diffuser le

savoir religieux. A cause de la sainteté de l‟homme, plusieurs populations vinrent

s‟installer sur le site. Voilà comment Tirga est devenu un village. L‟école créée par Sorry

Beldo Hooré était fréquentée par les enfants de Tirga mais aussi, ceux des villages

environnants et même lointains (Kobadié, Dandiré, Lamordé, Torodi…). Selon Boubacar

Soumana Djouldé :

6- Kareygoorou ; Village situé sur la rive droite du fleuve sur la route Niamey- Namaro- Farié à une
quinzaine de Kilomètres de la capitale.
1- Entretien avec Amadou Mamane à Tirga le 20/10/10.

265
« Mahamane Diobbo fréquenta cette école. Etant alim déjà, il s’y rendait pour
approfondir ses connaissances. Sorry Beldo mourut à Tirga vers 1809 à l’âge de
77 ans. Sa tombe y est encore visible. Elle est gardée par un de ses descendants, un
lettré musulman du nom d’Amadou Mamane. Le gardien est de la lignée de
l’aristocratie de Lamordé. C’est feu Président du Conseil Militaire Suprême, Seyni
Kountché qui a financé la construction du mur abritant la tombe de Sorry Beldo
Hooré. La clôture a deux portes : une à l’Est et l’autre à l’Ouest »1.

Après la mort de Sorry Beldo Hooré, le Bittinkodji n‟a malheureusement pas eu un lettré

musulman à la hauteur de celui-ci.

II-Les modibadjés à Goudel et à Soudouré

1- Les modibadjés à Goudel

Goudel est l‟un des villages de l‟Ouest du Niger touché dès l‟époque soŋey par

l‟islam :

« On note l’existence d’ilôts de peuplement de marabouts, les Sanay, venus dans la


région entre 1507 et 1509 avec l’Askia au moment où ce dernier guerroyait dans le
Dendi et le Borgou. Installés par l’Askia, ils habitent également les quartiers
Saney, de Zuzu, de Kouré, de Goudel et de Sandiré» (Idrissa, 1981 : 43).

Il faut signaler qu‟en dehors des Saney, le village de Goudel a accueilli une famille

d’ouléma modibadjé au XIXe siècle. Modibadjé est un mot composé de modibbo qui

signifie marabout et de badjé qui signifie écorce. Littéralement modibadjié signifie les

marabouts qui écrivent sur des écorces :

« Quand les autorités du Bittinkodji ont sollicité l’aide des modibadjé pour mettre
fin aux incursions touareg dans la zone, ces érudits ont écrit des versets du Coran
sur des écorces. Ils ont instruit les princes de cette principauté de les enterrer sur
le pourtour de leur territoire. Depuis lors, les habitants de Lamordé les désignent
sous l’appellation modibadjé c'est-à-dire les érudits qui écrivent sur des écorces
d’où l’origine de ce nom »2.

C‟est la toponymie qui nous a conduit sur cette piste de recherche. En effet, lors de nos

enquêtes, nous avons découvert deux quartiers portant le même nom :

1 - Entretien avec Boubacar Soumana Djouldé, imam de la mosquée de Kareygoorou le 12/07/2009.


2 - Entretien avec Shaykh Soumana Nouhou à Bongoula le 06/12/2007.

266
- le quartier modibadjé de Say.

- le quartier modibadjé de Bongoula, village peul situé au Nord de Tondikoiré à

16 km de Niamey sur la route de Tillabéri. C‟est cette identité de noms qui nous a intrigué

et pour lever le voile, nous nous sommes rendu sur le terrain pour interroger les anciens

des deux quartiers. Ces derniers ont confirmé l‟existence des liens de sang entre les

habitants des deux quartiers. Mais, qui sont ces modibadjé installés à Goudel au XIXe

siècle

Selon la tradition de cette famille, les modibadjé de Goudel et de Say ont la même

origine, étant tous des Peul originaires de la même région. Ceux de Goudel viennent d‟un

village appelé „’Manegou’’ (actuel Burkina-Faso). Selon la tradition locale, ce nom est

une déformation du mot mossi „’Miningou’’ qui veut dire les „‟habitués‟‟. Les modibadjé

sont arrivés dans l‟Ouest du Niger au XIXe siècle sur invitation des Bittinkoobé. En effet,

ces derniers après leur installation dans le Lamordé font régulièrement face à des

incursions Touareg. C‟est ainsi que les princes de Bittinkodji ont fait appel aux modibadjé

pour qu‟ils viennent leur faire des incantations afin que Dieu les épargne de ces agressions

répétées. Les ouléma modibadjé et leurs familles se sont installés d‟abord à Badouleré

(village situé à 15 km de Niamey sur la rive droite sur la route Niamey- Torodi). Ils ont

quitté ce site pour Settoré (non loin du premier site) puis à Ganguel (sur la route de

Torodi). Et c‟est de ce dernier village qu‟ils sont venus s‟installer à Goudel.

Selon Imam Idrissa Aboubacar :

«Le choix de Goudel serait lié au comportement des Bittinkoobé à l’égard d’Alfa
Mahaman Diobbo. En effet, Ahmadou Modi (grand père de Shaykh actuel de
Bongoula) n’ayant pas apprécié l’attitude des princes de Lamordé à l’égard d’un
grand alim comme Alfa Mahaman Diobbo quitta la terre de Bittinkodji pour
s’installer à Goudel. Il fut chaleureusement accueilli par le chef de Goudel de
l’époque »1.

1 - Entretien avec Imam Idrissa Aboubacar à Bongoula le 04/11/07.

267
Ahmadou Modi était venu à Goudel avec un autre alim. Il s‟agit de Soumana Kawouré,

son cousin. Les tombes de ces deux érudits se trouvent actuellement au milieu de la

concession „‟Windibéri ‘' à l‟entrée Est de Goudel à coté d‟un jujubier. Selon toujours

Imam Idrissa Aboubacar :

«Comme nos grands parents étaient des lettrés musulmans mais aussi des
éleveurs, quand la population de Goudel avait sensiblement augmenté et qu’il y
avait une certaine pression autour de la terre, le père du Shaykh quitta ce village
pour Koubia (non loin de Goudel) puis Soudouré (village natal de feu Diori
Hamani) avant de s’installer définitivement à Bongoula. Le Shaykh actuel est né à
Bongoula 10 ans après l’arrivée de son père sur ce site. Le Shaykh ayant 88 ans en
2007, on pourrait donc situer l’arrivée des Modibajé à Bongoula autour de
1909 »1.

2- La diffusion du savoir religieux à Goudel et à Soudouré

Les Modibadjé sont des lettrés musulmans. Arrivés à Goudel, ils ont ouvert des

écoles coraniques pour apprendre aux enfants du village le savoir religieux. En dehors des

enfants de Goudel, il y a ceux des villages environnants (Kossey, Gaba- Goura, Tondibia)

auxquels il faut ajouter ceux de Koné –Kaina et Koné-Béri. Et, durant leur séjour à Goudel,

les modibadjé n‟ont enseigné que le Coran. Goudel était un point d‟escale pour la plupart

des ouléma qui partaient à l‟époque à Say pour parfaire leurs connaissances.

Quand la population de Goudel a augmenté considérablement les modibadjé,

éleveurs vont quitter ce village. Ils ont séjourné à Koubia avant de s‟installer à Soudouré.

Le nom de cette localité est d‟origine peul. Soudouré est une déformation du mot peul

„‟Soudou- Hayré‟‟ autrement dit „‟le rocher qui ressemble à une maison‟‟. Cette roche est

encore visible à l‟entrée Ouest de la caserne militaire de Tondibia.

Arrivés à Soudouré, les modibadjé accompagnés de leurs talibé vont ouvrir une

école coranique :

1 - Entretien avec Imam Idrissa Aboubacar à Bongoula le 04/11/07.

268
« Aux anciens élèves sont venus s’ajouter ceux du village d’accueil et des villages
environnants, il s’agit de Tondibia, de Koubia, de Tondikoirey, de Gorou- Banda,
de Kareygoorou… Il y a à l’époque plusieurs douddales dans le village de
Soudouré. Mais avec la pression démographique, les modibadjé vont quitter ce
village pour s’installer définitivement à Bongoula »1.

Les modibadjé se seraient installés à Bongoula au début du XXe siècle vers 1909.

III - Le centre de Kounari

Le Kounari était un ancien royaume mais c‟est surtout au XVIIIe siècle qu‟il devint

un Etat puissant, sous l‟impulsion de Hambodéjo, le père de Guéladio. Après la mort de

son père, ce dernier accéda au trône. Mais, son avènement coïncida avec la formation d‟un

Etat islamique dans le Macina par Sékou Amadou. Ce dernier plaça le Kounari sous sa

tutelle et, c‟est le début de tension entre le roi de cet Etat et son suzerain.

1- La vie de Guéladio dans son pays natal

Pour comprendre l‟histoire de Kounari, un centre créé par Guéladio dans l‟Ouest du

Niger, il faut remonter au foyer initial pour voir les raisons du départ de l‟homme de son

pays natal. Guéladio est en effet né vers 1776 à Goundaka2 (capitale du Kounari) dans le

Macina. D‟après la tradition locale, il est le fils de Hambodédjo, fondateur de l‟Etat du

Kounari et de Bayé Boubou3. Après 18 ans de règne, Hambodédjo meurt et laisse le

pouvoir à son fils aîné, Guéladio qui accéda ainsi, au trône de Kounari :

1 - Entretien avec Shaykh Soumana Nouhou à Bongoula le 06/12/2007.

2- Goundaka est la capitale du Kounari. Selon Amadou Oumarou, c‟est après la conquête du Kounari par
Hambodédio, qu‟un habitant du Kounari de retour d‟un voyage posa la question suivante à ses
parents : « quand est-ce que ce pauvre peul a conquis notre pays ? ». Ces parents lui répondirent en ces
termes : « Gundu hala ga », c'est-à-dire, il faut gader cette question au fond de ton cœur et il ne faut plus
poser ce genre de question d‟où le nom Goundaka.
3 - Bayé Boubou : D‟après la tradition locale, la mère de Guéladio est la sœur du père de Sékou Amadou
(Amadou Boubou), donc elle est la tante de Sékou Amadou. Cette version de la tradition locale est
vraisemblable car avant de prendre la fuite, Guéladio confia sa mère trop vieille à Sékou Amadou malgré
leurs divergences profondes. Il dit à ses émissaires de dire à ce dernier de bien s‟occuper de sa tante.

269
« A notre connaissance, et d’après les écrits de certains chroniqueurs, Hama
Bodedjo Paté avait cinq enfants : Djeladjo, Ousmane, Boyo, Moumoussa et Hama.
Djeladjo était le plus âgé d’entre eux. Après la mort de leur père, au temps du
maître ‘’AHMED HAMDALLAHI (AHMADOU) à Kounari dans le petit village de
‘’Gandagga’’, Djeladjo, étant l’aîné de ses frères, il remplaça son père » (Hama,
1969 : 211).

Selon Hassane Baka, il resta seize ans à la tête du Kounari natal avant de

s‟exiler : «Guelajo Hombodejo Pâté est le chef de la migration des Ferobe au Niger. Il

était resté souverain du Kounari de 1804 à 1820» (Baka, 1992 : 42). C‟est au cours de la

quatrième année de son règne que sa renommée sera supplantée par celle d‟un alim, Sékou

Amadou qui a entrepris des conquêtes pour fonder un Etat musulman dans le Macina.

Aussi, le nouveau suzerain exigea à ce que tous les Ardo se convertissent à l‟islam. La

puissance de l‟armée de Sékou Amadou et surtout sa sainteté vont pousser plusieurs

souverains locaux du Macina à lui prêter allégeance.

Face à cette nouvelle donne politique, Guéladio convoqua ses conseillers pour

demander leur avis sur l‟attitude à adopter. Parmi les réactions, la plus pertinente fut celle

de son frère, Ousmane Hambodédjo1 :

« Je n’ai jamais eu peur d’un guerrier et je suis tout disposé à mourir pour
défendre mon frère et le renom de notre famille. Mais je conseille à mon frère de ne
pas s’opposer au marabout. C’est un foudre de guerre que Dieu envoie dans ce
pays. Il faut aller nous soumettre, non pas à lui, mais à Dieu, et déposer notre
soumission entre ses mains. Ainsi nous éviterons la guerre et garderons notre
commandement…. » (Ba et Daget 1955 : 43).

Malgré les conseils de son entourage, Guéladio, fier de ses origines (prince puis chef du

Kounari, conservateur), refuse de se soumettre à un autre roi surtout, un simple alim,

„‟noircisseur de planchettes‟, estimait-il. Il fait allusion à l‟encre noire qu‟utilisent les

érudits pour écrire sur des ardoises en planche. A la longue, la surface des planchettes

devient noire à cause de l‟encre. Mais, devant l‟insistance de ses conseillers et de ses

1 - Ousmane Hambodédjo est le petit frère de Guéladio ; il est aussi le principal chef de guerre de l‟armée de
Guéladio. Il a le même père que Guéladio mais sa mère est bambara ; elle s‟appelle Téné Diamonzon.

270
meilleurs amis, Guéladio se résolut à se rendre dans la capitale du Macina pour se

soumettre et professer la foi musulmane.

Mais en réalité, sa conversion n‟est que théorique car il ne veut pas au fond

renoncer à son titre de Ardo1. En plus, il ne prie pas régulièrement et consomme de l‟alcool

en cachette. Il resta ainsi dans le gouvernement de Diina par intérêt. Il espérait une

récompense sur le plan politique. En effet, il pensait que sa profession de foi amènerait

Sékou Amadou à lui confier un territoire plus large. Mais, grande fut sa déception quand

lors du découpage administratif, c‟est un autre souverain moins important que lui, Gouro

Maladou, que le grand conseil nomma „‟Amirou’’ avec la réalité du pouvoir. Ce

découpage administratif plaça Guéladio sous la tutelle de ce nouveau souverain. Irrité par

cette nomination, il entra en rébellion ouverte contre le gouvernement de la Diina. Pendant

sept ans, il résista contre le pouvoir de Sékou Amadou mais son armée fut vaincue au cours

d‟un combat décisif à Sio2. Au cours de cette bataille, son vaillant frère, Ousmane trouva la

mort.

a- L’exil de Guéladio

Après sa défaite, il quitta nuitamment Goundaka, la capitale du Kounari :

« Après avoir embrassé la religion musulmane et l’avoir reniée, après avoir vu


tomber ses meilleurs guerriers au cours des batailles sanglantes contre Cheikou
Amadou, et surtout la perte de son jeune frère, le brave Ousmane, Hambodédjo
Guéladjo, plein d’amertume s’expatria. Il quitta donc le Kounari, je le répète,
terriblement affligé. Suivi de tous les Sidibé, car aucun membre de la famille royale
ne voulut demeurer sur cette terre sous domination musulmane. Il traversa le
Djelgodji, l’Arbinda, le Liptako et vint camper dans la région de Say »
(Dionmansy, 1959 : 2).

1 -Ardo signifie,chef de migration.


2 - Sio, localité située à 7 kilomètres au Nord de Hamdallay.

271
Guéladio et sa suite arrivèrent dans la région de Say où Mahaman Diobbo les autorisa à

s‟installer sur le site qui portera son nom, „‟Wouro Guéladio1’’. La zone d‟influence du

nouveau souverain sera nommée, Kounari. C‟est une réserve de forêt dans laquelle se

trouvent des animaux féroces : « Méfiant, le chef spirituel de Say, après avoir converti

Guéladjo à l’islamisme, l’installa dans une forêt inextricable, marécageuse et infestée

d’éléphants agressifs » (Dionmansy, 1959 : 2). Guéladio Hambodedjo Pâté Yallé est donc

celui qui conduisit les Peul Ferobé de Kounari au Niger. Il faut souligner qu‟avant même

son arrivée dans la zone, il a envoyé un courrier pour informer les autorités de Gwandou.

Ces dernières saisissent à leur tour, Alfaga afin qu‟il autorise Guéladio et les siens à

s‟installer sur les terres comprises entre Torodi et Say afin de mettre fin aux incursions des

Gourmantché dans le Bittinkodji. Ainsi, le souverain et sa suite se fixèrent non loin de Say

et donnèrent au nouveau site le nom du Kounari, en souvenir à son pays natal. Selon Saka

Balogun l‟émirat de Kounari serait créé vers 1833: « Like the other emirates, Kunari was

established about 1833 by entering into an agreement with Gwandu » (Balogun, 1970 :

119- 120).Traduction: [Comme les autres émirats, Kounari avait été fondé vers 1833 avec

l‟accord de Gwandou].

b- L’installation de Guéladio à Wouro- Guéladio

Il faut d‟abord souligner que de son vivant, Guéladio eut 9 femmes et une

trentaine d‟enfants. La tradition locale retient les noms suivants :

- Les fils : Hamboy, Sidi2, Boureima, Poullo, Youssoufi, Diobbo, Amirou Bounti,

Mahaman, Issa, Ali, Harouna, Djafarou, Ilou, Hamza, Marou, Galo, Kebé, Yéro…

- Les filles : Fatouma, Aissa, Malaado, Haoua, Habsa, Oumou, Adama…

1- Wouro veut dire maison et peut signifier par extension village en peul ; Wouro- Guéladio signifie alors
le village de Guéladio. Le village porte ce nom parce que c‟est Guéladio qui l‟a créé.

2- Sidi nom que Guéladio donna à son enfant, c‟est pour rendre hommage au grand alim, Sidi Al Bakkay.
C‟est à ce dernier que Guéladio confia trois de ses enfants pour qu‟ils apprennent les études coraniques.

272
Parmi les garçons, il est à noter que Hamboy, Sidi et Boureima sont nés dans le Macina.

Guéladio va ainsi quitter Goundaka pour une autre terre d‟accueil. Outre sa famille, la

délégation est constituée des Hossoobe (hommes libres), des Sofaabe (garde- corps), des

Garsaabe (griots), des Wahilbe (forgerons), des Sekkebe (bûcherons), des Nyeybe

(cordonniers) et enfin les Rimaïbe (esclaves).

Après plusieurs péripéties, il arriva enfin à Say. C‟est dans cette ville que Guéladio

accepta de se convertir à l‟islam : il se fit raser et enturbanner par les autorités de Say.

Quand ses détracteurs lui reprochent ce changement d‟attitude de la part d‟un Ardo, il

rétorque : « Je peux accepter tous les modibbo du monde sauf Sékou Amadou ». Cette

réponse de Guéladio montre à quel point il hait Sékou Amadou, le suzerain qui a conquis

son territoire. Sans poser de conditions, il est allé s‟installer sur le nouveau site qui lui a

été indiqué par Mahaman Diobbo de Say. Selon Amadou Oumarou :

« Le choix du site octroyé à Guéladio n’est pas fortuit. A cause de l’insécurité qui
règne dans l’ensemble de l’Ouest du Niger à cette époque, les autorités de
Gwandou ont demandé à Alfaga de Say d’installer Guéladio à mi- chemin entre
Say et Torodi. Comme son armée dispose d’armes à feu, il pourra ainsi sécuriser
l’ensemble des territoires de la rive droite se trouvant sous tutelle de Gwandou »1.

Selon Dionmansy et la tradition locale, Guéladio a trouvé Mahaman Diobbo au pouvoir à

Say : « Après sa reconversion à l’islamisme par le marabout de Say, celui- ci réclama à

Guéladjo, en plus des cadeaux rituels, son magnifique cheval. Le nouveau converti, hautin

refusa de se séparer de coursier. Alfa Maman Diobbo ne lui tint pas grief » (Dionmansy,

1959 : 6). Wouro- Guéladio sera ainsi créé vers 1833, sur le site indiqué par les autorités de

Say. Guéladio va accomplir sa mission en mettant fin aux incursions des Gourmantché et

en chassant le troupeau d‟éléphants qui saccageaient les champs des paysans : « Les

habitants de Say et leur marabout furent surpris quand ils apprirent que Guéladjo tua le

1 - Entretien avec Amadou Oumarou à Guéladio le 29/12/10.

273
chef Gourmantché Ounteini et dispersa le troupeau d’éléphants qui terrorisaient le pays »

(Dionmansy, 1959 : 2).

Le village de Guéladio est situé à 45 km de Say, sur le tronçon Say- Kobadié

(l‟ancienne route caravanière Say- Tchantchargou- Torodi- Botou). Il se trouve dans la

zone soudanienne non loin d‟un des affluents de la rive droite du fleuve Niger, le Goroubi.

Il s‟agit territoire qui dispose encore d‟une végétation abondante et des terres fertiles.

Guéladio s‟est installé avec sa suite sur ce site et a toujours entretenu des relations

cordiales avec les autorités de Say. Le centre de Guéladio tire en effet, sa renommée de son

armée qui est la seule équipée d‟armes à feu à l‟époque dans la zone. Elle dispose aussi

d‟une cavalerie. Ce qui est important à souligner, c‟est que malgré son hostilité à l‟égard

de la religion musulmane, trois de ses fils ont tous étudié le Coran et sont des modibbo1, il

s‟agit de Hamboy, de Sidi et de Boureima. Lors du passage de Barth, son fils aîné,

Hamboy poursuivait ses études à Tombouctou : « The old chief even at the present time,

keeps up a continual intercourse with Timbuktu, where his eldest son was at the time

studying, and which place he did not leave until some time after my arrival » (Barth, 1865 :

183). Traduction: [Le vieux chef était, alors encore en relations continues avec

Tombouctou où son fils aîné 2 faisait ses études et il n‟avait pas quitté cette localité jusqu‟à

mon arrivée]. En plus de ses trois fils, le cortège des fugitifs comptait un nombre

important d‟érudits. Parmi ceux-ci, le plus célèbre est Amadou Alfaga. Après 40 ans de

règne sur le Kounari (Niger), Guéladio tomba malade ; il exprima le souhait de mourir

dans son pays natal, le Macina : « Guéladjo régna pendant dix ans à Goundaka et

quarante ans dans le petit Kounari » (Dionmansy, 1959 : 6). Conformément à ses vœux,

une délégation chargée de transporter le souverain malade fut constituée. Ce retour fut

facilité par la conquête du Macina par Elhadji Omar en 1862 : « En 1854, après avoir mis

1 - Modibbo signifie marabout en fulfuldé.


2 - Le fils aîné de Gueladio est Hamboy. Il fit d‟abord ses études dans le Masina avant d‟aller à Tombouctou
approfondir ses connaissances chez le célèbre érudit Kounta, El Bakkay.

274
à feu et à sang le Kaarta, en 1861 après avoir pris Ségou, EL- Hadji Omar saccagea

Hamdallahi en 1862. C’était vers cette époque qu’il envoya des émissaires à Guéladjo

pour l’inviter à venir prendre possession du Grand Kounari libéré » (Dionmansy, 1959 :

3). Mais, cet exode en sens inverse allait mal se passer car en cours de route, l‟état de santé

de Guéladio s‟aggrava, la délégation jugea utile de faire escale chez son oncle, Sala Pâté

qui se trouvait à Dori dans l‟espoir de lui trouver des produits pouvant améliorer son état

de santé. Malheureusement, il rendît l‟âme à Dori où il fut enterré : « Mais il mourut à

Dori avant d’arriver dans cette localité. Djeladjo mourut à l’âge de 86 ans » (Hama,

1969 : 215).

2- L’œuvre de Guéladio et d’Amadou Alfaga

a- L’œuvre de Guéladio dans son pays d’accueil

Le centre de Guéladio est beaucoup plus un centre militaire que religieux. Il faut

aussi souligner que l‟homme, chef de la migration, n‟est pas en soi un fervent musulman.

Mais, ce qui nous intéresse dans ce centre, c‟est le nombre important d’ouléma qui l‟ont

suivi dans sa fuite et la tentative de son fils et successeur, Hamboy de faire de Kounari, un

important centre d‟études islamiques. Selon Soumana Abdoulaye :

« Parmi les ouléma qui ont suivi Guéladio dans son exil, le plus célèbre est
Amadou Alfaga. En dehors de ce dernier, il est à rappeler que trois des enfants de
Guéladio sont des lettrés musulmans, il s’agit de Hamboy, de Sidi et Boureima
appelé aussi Poullo. Ils ont tous fait leurs études coraniques à Tomboucotu chez le
célèbre érudit kounta, Shaykh El Bakkay.C’est d’ailleurs avec l’avènement de
Hamboy que le centre militaire du Kounari va devenir, un centre d’études
islamiques »1.

L‟installation de Guéladio dans le Gourma va mettre fin aux incursions des

Gourmantché contre les villages situés le long du Goroubi. En effet, il disait lui- même

ceci après la création de Wouro- Guéladio : « Mi tegii lawol mabbe », autrement dit : „‟ Je

1 - Entretien avec Soumana Abdoulaye le 20/01/11 à Guéladio.

275
viens de couper leur route‟‟. Les heurts entre les Bittinkoobe et les Gourmantché restés

jusque là hostiles à l‟islam sont confirmés par Lem dans ce passage : «Ces Bitinkobe, déjà

fervents adeptes de l’Islam, plus nombreux, plus forts, imposèrent leur religion et

exercèrent pendant de longues années une lutte implacable contre les populations

fétichistes locales1 rebelles à l’Islam » (Lem, 1943 : 59). L‟armée de Guéladio disposant

d‟armes à feu a vite su contenir ces incursions et les Gourmantché, paniqués, se sont

repliés davantage vers le Burkina Faso actuel. Selon Saka Balogun, c‟est avec l‟armée de

Guéladio que la ville de Botou fut vaincue pour la première fois : « And Kunari traditions

claimed that Botou, the capital of the Gurmawa was conquered only when the gun-men of

Kunari were drafted there by Khalil » (Balogun, 1970 : 120).Traduction : [Ainsi, les

traditions de Kounari affirment que Botou, la capitale des Goumantché n‟a été conquise

que quand Khalil a envoyé là- bas, des hommes armés de fusils à partir du Kounari]. Cette

victoire intervenue entre 1833- 1834, et qui s‟est soldée par la mort du chef de Botou,

Bounwel, a permis de contenir les assauts des Gourmantché et de ramener la paix dans

cette partie de la rive droite du fleuve (Say, Kounari et Bittinkodji).

Modibbo Amadou Alfaga fut le premier à ouvrir une école coranique dans le

village de Wouro- Guéladio. Il fut aidé dans cette tâche par le fils aîné de Guéladio,

Hamboy. Au début, les nouveaux arrivants hésitaient à envoyer leurs enfants dans cette

école, mais avec le temps beaucoup des parents comprirent l‟utilité de l‟instruction de

leurs enfants et commencèrent à les y envoyer. Cette hésitation serait probablement due au

souvenir amer que les populations de Guéladio gardèrent du Kounari natal. L‟installation

de Guéladio aux abords du Goroubi permit de faire régner la paix dans la zone. A cause de

la sécurité, d‟autres communautés vinrent s‟installer dans le village. Il s‟agit des

1- Les populations fétichistes : Il s‟agit des Gourmantché.

276
Nommaabe1 du Bittinkodji et du Torodi. Malgré la puissance de son armée, il n‟y a jamais

eu le moindre désaccord entre Guéladio et les autorités de Say. Selon nos informateurs, de

nos jours encore, Say et cette localité entretiennent des relations cordiales. Barth souligne

que lors de son passage, Guéladio était âgé de 70 ans environ: « Mohamed Gailajo, at the

time of my visity was a man of about seventy years of age. » (Barth, 1965, vol3 : 182).

Traduction : [Mohammed Guéladio lors de ma visite était un homme âgé d‟environ 70

ans]. Si en 1854, il avait environ 70 ans, vers 1868, Guéladio serait âgé d‟environ 84 ans.

C‟est donc un souverain vieux et malade qui décida d‟effectuer un voyage aussi difficile et

périlleux.

b -L’œuvre d’Amadou Alfaga

Amadou Alfaga est un érudit faisant partie de la suite de Guéladio. Il est le premier

à ouvrir une école coranique à Wouro- Guéladio. Malgré l‟hostilité de certains dignitaires

de la cour, il a réussi tant bien que mal à rassembler quelques enfants du Kounari autour

d‟un même douddale :

« Amadou Alfaga est un érudit exemplaire très respecté par les populations du
Kounari. Comme Mahaman Diobbo, il prêche un islam tolérant, ce qui lui a valu la
sympathie des habitants de Wouro- Guéladio. Il est le premier imam de ce village.
Il est également le premier à ouvrir une école coranique. Les guerriers et les
principaux dignitaires de la cour ont encore en mémoire, le souvenir douloureux
du Macina. Mais, grâce à sa perspicacité, il est parvenu à convertir plusieurs
d’entre eux. Il va ainsi, de porte en porte interpeller les parents sur la nécessité
d’envoyer leurs enfants à l’école coranique. Il a réussi à réunir autour de lui, les
jeunes de tous les quartiers de Wouro- Guéladio. Il a entretenu des bonnes
relations avec les autorités religieuses de Say. Il a fait toutes ses prières de
vendredi dans cette ville. Mais, il meurt au moment où on assiste à une certaine
ferveur religieuse dans le village »2.

Amadou Alfaga meurt quelques années (la tradition locale reste muette sur le nombre

d‟années) après l‟installation de Guéladio à Wouro- Guéladio. L‟islam qui a commencé à

1 - Nommaabe, ce sont des Peul qui sont venus après s‟installer à Kounari sous la protection de Guéladio.
Ce dernier a accueilli les nouveaux arrivants et leur a donné un site d‟hébergement.
2- Entretien avec Amadou Oumarou forgeron à Guéladio le 29/12/2010.

277
se propager dans le Kounari va connaitre un coup de frein brusque avec la mort de cet

érudit. Il faudrait attendre, le règne de Hamboy pour qu‟on assiste à un renouveau

islamique dans cette localité.

3- Les successeurs de Guéladio

Après la mort de Guéladio, plusieurs de ses fils vont le succéder. Parmi ceux-ci,

deux nous intéressent particulièrement, il s‟agit de Hamboy et de Boureima Guéladio.

a-La transformation du centre militaire de Kounari en un centre d’études

islamiques secondaire par Hamboy1 (1868- 1886)

Hamboy accéda au trône de Guéladio après la mort de son père. Etant l‟aîné et le

plus sage de sa famille, son élection n‟a pas posé de problèmes. Il est un lettré musulman

qui fit ses premières études au Macina d‟abord avant d‟aller à Tombouctou approfondir ses

connaissances religieuses auprès du célèbre érudit Shaykh El Bakkay. Selon Barth au

moment où il était arrivé à Tombouctou, Hamboy se préparait à rentrer à Wouro-

Guéladio: « In order to convince the Sheik how sensible i was of the confidence which he

placed in me, i made a present of a blue cloth kaftan to Mohammed Boy, the son of the

chief Galaijo, who had studied with him for a year or two, and was now about to return

home by way of Hamda- Allahi » (Barth, 1965: 320). Traduction: [Afin de convaincre le

Shaykh combien j‟étais sensible à cette marque de confiance, j‟avais fait cadeau d‟un

caltan de drap bleu à Mohammed Boy, le fils du souverain Guéladio, qui avait étudié avec

lui pendant un ou deux, et était maintenant sur le point de rentrer au pays par la voie de

Hamdallay].

1- Hamboy : De son vrai nom Hamadou Guéladio, d‟après la tradition locale, le petit frère Guéladio, Boy
Hambodédio est stérile, il n‟a donc malheureusement pas eu d‟enfants. Pour le consoler, son grand frère,
Guéladio lui confie la garde de son fils aîné Hamadou. Les populations de Goundaka l‟appellent
affectueusement, Hamadou Boy (c'est-à-dire Hamadou le fils de Boy), d‟où le surnom Hamboy.

278
Hamboy est un érudit qui n‟aime pas la guerre parce que pour lui, elle n‟a aucun

caractère religieux : les gens font la guerre pour le butin et non pour défendre une cause

religieuse. Il critiquait toujours le comportement des chefs de guerre en ces

termes : « Konu mabbe hana ko diina non, ko nyaam te non, mi walaa hen ».

Traduction : « Leur guerre n’a aucun caractère religieux, les gens sont plutôt motivés

par le butin, je ne m’y engerai pas ». C‟est pourquoi, il va transformer le centre militaire

de Kounari en un centre d‟études islamiques. Sous le règne de Hamboy l‟islam va se

propager largement dans le Kounari :

« Hamboy est un souverain très courtois à l’égard de ses sujets. Même les
dignitaires les plus hostiles à la religion de Mohamed n’osent pas manifester leur
désapprobation en sa présence à cause de l’estime qu’ils ont pour lui. Il va mettre
à profit son charisme pour propager la religion musulmane dans le Kounari. Il se
déplace sur son cheval de village en village avec quelques uns de ses adeptes pour
prêcher. C’est ainsi que des villages comme Dandiré, Kobadié, Tchantchangou
seront touchés par l’islam. Dans le village de Wouro – Guéladio, il a interdit la
vente de la bière locale ainsi que toutes les pratiques contraires aux prescriptions
de l’islam »1.

Durant ses 18 années de règne, il fit régner la paix sur le Kounari et refusa de faire

la guerre. Sa préoccupation première en tant que religieux, est de faire régner la paix et

de répandre l‟islam dans la zone. Il s‟est surtout inspiré de l‟exemple des ouléma de

Say. Erudit de son état, il mit à profit ce temps de paix pour propager l‟islam dans le

centre de Kounari. Il voulut même construire une mosquée de vendredi à Wouro-

Guéladio. Pour ce faire, il fit appel aux autorités de Gwandou afin que ces dernières lui

envoient des maçons à cet effet. Malheureusement, il ne put pas réaliser cette mosquée

de son vivant car il trouva la mort au moment où le chantier était sur pieds. Les ruines de

la fondation de cette mosquée sont actuellement visibles à Winde2. Durant le règne de

Hamboy, l‟islam fut largement répandu dans le Kounari. Mais, il mourut vers 1886.

Selon Soumana Abdoulaye : « Hamboy est considéré comme un saint par la population

1 - Entretien avec Amadou Oumarou forgeron à Guéladio le 29/12/2010.


2 - Winde : l‟ancien site d‟un village est appelé Winde en peul et Koara- Zeno en Zarma.

279
de Kounari. De nos jours encore quand la pluie tarde à tomber ou quand elle s’avère

irrégulière, celle - ci organise des prières à côté de sa tombe pour implorer Dieu »1.

Hamboy eut sept garçons et deux filles : Abdoulaye (l‟aîné), Galo, Kebé, Boureima

(Sorry), Yéro, Hassane, Hamadité, Fatoumata et Bayé. La transformation du „‟fusil vers

la planchette‟‟ n‟est pas facile car la majorité des guerriers sont contre sa politique.

Après la mort du souverain, ce n‟est pas son petit frère direct, Sidi qui accéda au pouvoir

mais plutôt le deuxième frère, Boureima Guéladio. Qu‟est – ce qui explique cette

situation paradoxale ?

b- Le règne de Boureima Guéladio (1886- 1916)

Pour comprendre l‟accession de Boureima sur le trône du Kounari, il faut remonter à

la composition du collège électoral. Selon la tradition locale, ce dernier est en effet,

essentiellement composé par des esclaves de case. Ce sont ces derniers qui fabriquent les

armes et, ce sont eux qui les détiennent. Ils constituent donc la branche la mieux équipée

de l‟armée du Kounari. En plus, ils ont le droit de faire la guerre et d‟avoir leur part du

butin. Selon Soumana Abdoulaye :

« Les 18 années de paix que le Kounari a connues, sous le règne de Hamboy ont
appauvri les guerriers. C’est pourquoi, ils ont décidé de ne plus soutenir un prince
qui ne ferait pas la guerre. Ils décident alors de soumettre Sidi et son petit frère,
Boureima à un interrogatoire. Celui qui va répondre conformément à leurs attentes
sera placé sur le trône de Kounari. Le collège électoral constitué essentiellement
par des guerriers du Kounari fera connaître à la population celui sur qui ils ont
porté leur choix par des tirs en l’air des mousquets à l’intérieur de la concession
de l’heureux élu »2.

C‟est ainsi que Sidi, le grand frère fut le premier à être soumis à cet interrogatoire. Quand

la question suivante a été posée à Sidi : « Feras- tu la guerre ou vas – tu poursuivre la

politique de ton grand frère » ? Il a répondu en ces termes : « No mi modibbo mi wattaa

1 - Entretien avec Soumana Abdoulaye le 20/01/11 à Guéladio.


2- Entretien avec Soumana Abdoulaye le 20/01/11 à Guéladio.

280
konu, mi tokaŋ laawol mawnam » Autrement dit : « Je suis un modibbo, je ne ferai pas la

guerre et je poursuivrai la politique de mon grand frère ». Cette réponse a rendu

mécontent le collège électoral qui a quitté aussitôt la concession de Sidi.

Le collège électoral dans son ensemble va se diriger chez Boureima, le petit frère de

Sidi. La même question a été posée à ce dernier et il a répondu en ces termes : « Si on

kokKii kam laamu hannden, jaango enjahan konu ». Autrement dit : « Si vous me donnez

le pouvoir aujourd’hui, dès demain, on ira en guerre ». Après cette réponse, les guerriers

ont tiré ensemble des coups en l‟air à l‟intérieur de la concession de Boureima. La

population de Guéladio a compris aussitôt que c‟est Boureima qui a été élu et non Sidi. Ce

dernier déçu par le choix du collège électoral s‟est enfermé dans sa concession et a refusé

de sortir. Il va rendre l‟âme sept (7) ans après l‟accession de Boureima au trône. Sa tombe

se trouve actuellement à Winde.

Avec Boureima, les guerriers ont retrouvé leur sourire ; comme promis, il a engagé
aussitôt les hostilités dans le Gourma et dans le pays Gourunsi. L‟armée de Boureima a
participé activement à la grande bataille de Boumba de 1896. Avec l‟avènement de ce
passionné de la guerre, on assiste alors au retour en force de la religion traditionnelle et au
développement de la délinquance dans le Kounari, la vente du dorro1se développe un peu
partout. Les modibbo ont été délaissés par les nouvelles autorités et, l‟islam a chuté
considérablement dans le Kounari.
Sa participation aux évènements qui ont secoué l‟Ouest du Niger à la fin du XIXe siècle
s‟explique par son penchant pour la guerre. Il a participé aux premières hostilités engagées
par Bayéro et les Foutanké dans le Dallol : « Partis de Lontia, Ali Buri Ndiay et Bayero
Abul Hassan s’en furent au Kunari prendre contact avec Bureyma Galadio, au Fakara
avec Umar Bantaci chef de Dancandu Sillanke, à Kirtashi avec Dioffo. Ensemble, ils
brûlèrent Tondo Gerinji et Kudagande et se séparèrent » (Gado, 1979 : 459). Boureima
Guéladio a aussi pris part à la célèbre bataille de Boumba. Boubé Gado décrit les forces en
présence en ces termes :
« Si les premières coalitions, formées grâce à l’insistance de Bayero Abul Hassan,
se composaient du Kunari, du Kirtashi, du Fakara, de Bayero et des Futanke,

1 - Dorro : C‟est le nom donné par les Peul du Kounari à leur bière locale.

281
celles-ci comprenaient également le Kogori et le Namari dont les meilleurs
Wangaari étaient tombés héroïquement à Kollo.
Les troupes de Issa Korombé réunissaient les hommes de Wangunya, l’armée du
Kabi et celle du Zarmakoy de Dosso Alfa Atta » (Gado, 1979 : 462).

Peu de temps après la bataille de Boumba interviendra la conquête coloniale avec la


création du poste de Say en 1897. Comme toutes les localités du Niger, le centre de
Kounari va connaître son déclin avec l‟installation de l‟administration coloniale.
Au terme de cette étude, nous constatons que Kounari est le nom du pays natal

de Guéladio. C‟est la victoire du gouvernement de la Diina sur l‟armée de ce dernier qui

l‟a contraint à quitter son pays qu‟il aime tant pour s‟installer sur la rive droite du fleuve

Niger dans le Gourma. Avec son armée équipée d‟armes à feu, il va ramener la stabilité

dans cette partie de l‟Ouest du Niger. Ses fils et ses successeurs vont également poursuivre

cette politique de stabilisation de la zone. Parmi ses successeurs, Hamboy est celui dont le

règne a profondément marqué les populations du Kounari à cause de sa piété et de son

profond attachement à la paix. Jouissant d‟un charisme exceptionnel, il va mettre à profit la

stabilité retrouvée pour répandre l‟islam dans tous les villages placés sous sa tutelle. De

nos jours encore, quand les populations de Kounari font face à des difficultés rappelons- le,

des prières collectives sont organisées autour de sa tombe pour implorer la grâce de Dieu.

282
Chapitre XII : Bilan de l’œuvre religieuse des leaders religieux des centres d’études

islamiques à la fin du XIXe siècle

Depuis le début du XVIe siècle des ouléma ont œuvré pour l‟expansion de l‟islam

dans notre zone d‟étude. Après plusieurs siècles de contact avec la religion de Mohamed,

il s‟agit dans ce chapitre de dresser un bilan du processus d‟islamisation à la veille de

l‟occupation coloniale. Il sera aussi question d‟aborder l‟apport de l‟islam aux sociétés

vivant dans l‟Ouest du Niger.

I- La situation religieuse de la zone à la fin du XIXe siècle

Au terme de cette étude, nous constatons que tous les centres d‟études islamiques du

XIXe Siècle ont été créés et animés par des Peul à l‟exception de celui de Sinder. Alors

qu‟est- ce qui explique ce phénomène peul1 ? Pour le comprendre, il faut remonter à la

terre d‟origine de cette communauté, le Macina. En effet, après la chute de l‟Empire Soney

en 1591, l‟émiettement et l‟instabilité politique qui s‟en étaient suivis avaient provoqué

d‟intenses mouvements de populations. Au XVIIIe siècle, cette instabilité avait eu pour

conséquence, une désorganisation de l‟économie pastorale :

« Au cours du XVIIIe siècle, la crise de l’économie pastorale entraîne la


reconversion de nombreux Fulbe dans les métiers d’érudition. A la faveur de ce
mouvement, le nombre de lettrés augmente considérablement. Ces lettrés issus de
la crise de l’économie pastorale sont essentiellement des ruraux, à la différence des
lettrés urbains qu’ils considéraient comme corrompus. Certains d’entre eux
préféraient vivre à la campagne, loin des « lieux de perdition », organisant leur
communauté conformément aux lois de l’islam. D’autres en revanche parcouraient
les régions environnantes pour prêcher un islam plus pur » (Last rapporté par
Kane, 2003 : 31).

Ainsi, plusieurs groupes peul vont quitter le Macina pour s‟installer dans l‟Ouest du Niger.

Ils vont créer dans cette zone au XIXe siècle, des centres d‟études islamiques, lieux

1 - Pour plus de détails, lire Diallo Thierno (1972) et Hassane Baka (1992).

283
d‟apprentissage et de propagation du savoir religieux. Parmi ces centres, le plus important

reste incontestablement Say, rendu célèbre par la présence de Mahaman Diobbo. Les

ouléma, placés à la tête de ces centres ont œuvré chacun à sa façon au rayonnement de la

culture islamique dans notre zone d‟étude. A la fin du XIXe siècle, nous pouvons affirmer

que l‟islam a fait une progression sensible dans l‟Ouest du Niger.

Mais malgré tout, la religion traditionnelle reste dominante. Les localités dans

lesquelles les adeptes de la religion du terroir sont largement majoritaires sont : région de

Dosso (Gaya et Dogondoutchi), dans la région deTillabéri, les centres réputés de la religion

traditionnelle sont : Simiri, l‟Anzourou, Goruol, Botou. L‟Anzourou est le fief des

croyances ancestrales Soney et dans le canton du Goruol, le principal centre de cette

religion se trouve à Wanzarbé où ses adeptes sont encore nombreux. La communauté

Gourmantché est encore majoritairement adepte de la religion traditionnelle jusqu‟à

aujourd‟hui). Au niveau de toutes les autres communautés, on assiste progressivement à

une adhésion importante et volontaire des populations à l‟islam. Selon Paul Marty, le

nombre de musulmans dans le cercle de Niamey qui correspond à peu près à notre zone

d‟étude est très important au début du XXe siècle. Seule la subdivision de Dogondoutchi

compte un nombre important d‟adeptes de la religion traditionnelle (60 000

adeptes1) : « Par le cercle de Niamey, la colonie s’accote au Niger à l’Ouest. Habité

surtout par des sédentaires noirs et cultivateurs, c’est le cercle le plus riche et le plus

peuplé de la colonie. Il est islamisé dans son ensemble, sauf dans la région de

Dogondoutchi… » (Marty, 1931 : 346). Selon les statistiques fournies par le même auteur,

le nombre de musulmans dans le cercle de Niamey avoisine les 80% : « La population du

cercle de Niamey peut être évaluée en bloc à 310 000 habitants, appartenant à des groupes

ethniques divers (…) Le nombre de Musulmans est d’environ 239000 » (Marty, 1931 :

1 ANN- 1E7- TMN- Cercle de Niamey : rapports politiques trimestriels du 1er trimestre au quatrième
trimestre 1912 : 1er trimestre 3p, 2e trimestre 6p, 3e trimestre 4p, 4e trimestre 13 p.

284
351). Cette forte proportion des musulmans est le fruit d‟un long processus enclenché

depuis le XVIe siècle. L‟islam qui a mis du temps à s‟implanter dans l‟Ouest du Niger va

connaître une progression sensible au XIXe siècle. Ce processus va s‟accélérer au XXe

siècle malgré l‟hostilité de l‟administration coloniale.

Ces chiffres ne reflètent pas la réalité car ce sont des statistiques élaborées lors des

tournées de recensement. Beaucoup d‟adeptes de la religion traditionnelle se proclament

musulmans. Il y a aussi parmi les adeptes de la religion de Mohamed des pratiquants et

des non pratiquants. Ces derniers sont issus de familles musulmanes, ils portent des noms

musulmans mais ne s‟acquittent pas de leurs devoirs religieux. Généralement, lors des

tournées de recensement, tout ce monde est comptabilisé dans le groupe des musulmans.

Mais en réalité, même dans les zones les plus islamisées, la religion traditionnelle est restée

forte même aujourd‟hui. A Say, le plus grand centre d‟études islamiques de l‟Ouest du

Niger, où nous avons vécu de 1981à 1983, la ville dispose d‟un quartier, Goungo- Bon

dans lequel, les adeptes de la religion traditionnelle sont encore nombreux. Tous les

mercredi soirs, le Zima1 organise un Folley- Fori. Au septième mois de l‟année, le

Yenandi2 est organisé au bord du fleuve. Jusqu‟à notre départ de cette ville, les cérémonies

sont régulièrement organisées.

1- Zima : Prêtre de la religion traditionnelle.


2 - Yenandi : Rituel de la religion traditionnelle organisé le septième mois de l‟année lunaire. Il s‟agit d‟une
cérémonie organisée à l‟approche de la saison des pluies pour consulter les génies sur l‟issue de la campagne
agricole qui s‟annonce et sur les sacrifices éventuels à faire pour que cette campagne soit bonne.

285
Carte No 10 : Carte des religions dans l’Ouest du Niger à la fin du XIXe siècle

286
II- L’apport de l’islam aux sociétés de l’Ouest nigérien

1- L’apport de l’écriture

Comme partout ailleurs en Afrique, l‟islam a apporté aux populations converties

de l‟Ouest du Niger, l‟écriture : « L’Islam apporte l’écriture et une langue commune. Il

permet ainsi la création d’une administration et d’un corps de fonctionnaires »

(Triaud, 1973 : 14). Avant l‟introduction de l‟islam, les messages étaient transmis

oralement par le biais des messagers de la cour. Ces derniers avaient pour rôle de

parcourir le territoire du souverain pour apporter ses messages. Avec la religion de

Mohamed, il y avait eu l‟apparition d‟une nouvelle classe, celle de lettrés musulmans

qui maîtrisaient la langue arabe et qui étaient chargés de rédiger dans cette langue ou

dans les langues du terroir les diverses correspondances en utilisant l‟alphabet arabe :

ce sont des ajami. Les courriers étaient désormais cachetés et scellés. Cet apport de

l‟islam avait facilité les échanges surtout entre les ouléma de l‟époque. L‟école

coranique avait ainsi joué un rôle important dans la diffusion de la culture arabo-

musulmane dans notre zone d‟étude. En effet, c‟est dans cette école que les talibé

apprenaient à lire et à écrire l‟alphabet arabe : « Le point de départ de l’enseignement

classique est l’alphabet arabe puis le Qu’rān » (El Hamel, 2002 : 127). Après une

longue période d‟étude, la plupart des lettrés musulmans parviennent à lire des

documents en langue arabe mais aussi à écrire des correspondances dans leur langue

grâce à l‟emprunt des caractères arabes :

« La présence islamique en Afrique au sud du Sahara s’appuie sur l’enseignement


de l’écriture sacrée. Elle eut pour conséquence l’invention d’autres formes de
communication, telle que l’écriture dite « ajami », l’écriture des langues
jusqu’alors orales » (Moumouni, 2003 : 66).

Dans l‟ensemble, l‟apport de l‟écriture a été marginal car celle – ci est réservée seulement

au cercle restreint des érudits.

287
2- L’implication de l’islam dans l’organisation du pouvoir politique

En dehors de la langue et de l‟écriture, on assiste à l‟apparition d‟une nouvelle

organisation politique dans laquelle les lettrés musulmans jouent un rôle important. Aussi,

le retour en force de la religion de Mohamed au XIXe siècle a eu pour conséquence, la

conversion de plusieurs souverains de l‟Ouest du Niger qui ont abandonné le titre de

Zarmakoye ou Wonkoy pour adopter celui d‟Amirou. Le savoir islamique était un acquis

important dans les sociétés musulmanes du XIXe siècle. Il permet d‟accéder aux plus

hautes fonctions. Ainsi, de conseillers à la cour des souverains, les lettrés musulmans vont

se détacher de ces cours traditionnelles pour créer des centres d‟études islamiques au sein

desquels ils occupent les fonctions les plus élevées. Dans tous ces centres le pouvoir est

détenu par les ouléma et on distingue trois principales instances :

- Au sommet se trouve, le fondateur du centre d‟études islamiques, Lamido en fulfuldé ou

Amirou en zarma qui détient à la fois le pouvoir temporel et spirituel. Il nomme lui-même

les dignitaires de la cour et met fin à leur fonction. Dans tous les centres que nous avons

étudiés, la dévolution du pouvoir est héréditaire. L‟introduction de l‟islam n‟a pas changé

la nature de l‟Etat. L‟islam est opposé à la conception dynastique du pouvoir. Le

responsable de la Oumma islamique est choisi parmi le plus pieux et le plus savant. Or, ce

n‟est pas le cas. La dévolution du pouvoir est restée héréditaire. L‟exemple de Sokoto a

certainement fait tâche d‟huile dans les centres d‟études islamiques de l‟Ouest du Niger.

C‟est ainsi que grâce à leur savoir, des lettrés musulmans issus de familles modestes vont

accéder au pouvoir. Ils organisent et gèrent la communauté conformément aux principes de

l‟islam :

« A Say, comme au Macina et au Fouta, les Peulhs musulmans instaurèrent


l’organisation politico- religieuse qui donnait au chef de la communauté religieuse
le pouvoir canonique, administratif et judiciaire qu’il exerçait en s’appuyant sur la
législation coranique et certaines coutumes particulières du groupement ethnique
auquel était rattachée cette communauté. Les chefs almamy, amirou, titres qui sont
des adaptations, en même temps que des déformations phonétiques, des termes

288
arabes imâm et émir, étaient assistés dans leur administration par le conseil des
lettrés et des chefs de famille » (Lem, 1943 : 73- 74).

Dans tous les centres d‟études islamiques, le Conseil des lettrés jouent un rôle

moteur dans la gestion des affaires de la communauté. C‟est au sein de ce Conseil que sont

choisis généralement deux ouléma (en fonction de leurs capacités intellectuelles mais aussi

de leur intégrité morale), pour occuper les postes de cadi et d‟imam. Ainsi, après Lamido

ou Amirou vient, Alkali (cadi) qui est chargée des questions judiciaires et qui doit trancher

les litiges conformément à la loi coranique. La loi dans ces centres est régie par la Shari’a.

Plusieurs témoignages confirment l‟application de celle- ci dans les centres d‟études

islamiques :

« On consulta Taburet à tout propos. Une jolie peule de Saga, au teint clair, aux
attaches fines, a manqué à la réserve que les mœurs de sa tribu imposent, paraît- il,
aux jeunes filles et sa grossesse est déjà très apparente. Elle vient timidement
demander « médicaments ». Et comme on lui dit que son cas est incurable, que
notre religion nous défend de supprimer une existence, elle arrive le lendemain
avec sa mère. Celle- ci conte que dans son village on les tuerait toutes les deux à
coups de pierres, si elles rentraient ainsi, ou bien, par mesure de clémence, on les
laisserait aux fers jusqu’à mourir. La jeune fille était jolie ; beaucoup de ceux du
village l’ont demandé en mariage ; elle les a repoussés. Aussi, tous veulent se
venger et appliqueront, sans y rien adoucir, « les justes lois musulmanes » dans
toute leur rigueur. Elle n’a plus ni père, ni frère, ni défenseur. Le séducteur s’est
retiré : la coutume n’autorise pas la recherche de la paternité (…)
Et toutes deux, la mère, les larmes aux yeux, la fille, prostrée, implorent :
« Safarikoy, safarikoy! Docteur, docteur! » Je me demande quel serait dans ces
pays fanatiques, le devoir de conscience d’un médecin disposant du nécessaire, ce
qui n’était pas le cas (…) Je charge Digui de les pousser dehors le plus doucement
possible, avec une grosse charité qui leur permettra de gagner quelque village de
païens pitoyables » (Hourst, 1898 : 309 - 310).

Ce témoignage de Hourst, même s‟il contient des phrases pleines d‟ironie et parfois même

de mépris à l‟égard des lois de l‟islam prouve que la Shari’a était appliquée dans certaines

régions de notre zone d‟étude jusqu‟au début de l‟installation de l‟administration coloniale.

Mais, l‟application n‟était pas aussi rigide que le soulignait l‟auteur. Les dirigeants des

centres d‟études islamiques avaient toujours cherché une solution à l‟amiable pour régler

les problèmes de la communauté.

289
Un autre auteur, Balogun confirme l‟application de la Shari’a dans tous les centres

d‟études islamiques se trouvant dans la sphère d‟influence de Gwandou :

« Basically, therefore, the Emirs powers and positions derived from Gwandu which
delegated its authority to them. To this privilege of delegated authority were
attached various obligations namely, obedience the metropolitan Gwandu, payment
of certain dues in cash and kind, rendering of military service to the centre and
establishment of just and equitable rule based on the Shari’a in their respective
areas of authority » (Balogun, 1970 : 274 – 275).

Traduction: [En gros, les limites des pouvoirs des Emirs sont déterminées par Gwandou

qui leur a délégué son autorité. A cause de cette délégation de pouvoir, ils ont des

obligations diverses telles que l‟obéissance à l‟autorité de Gwandou, le payement des

impôts en espèces ou en nature, la coopération militaire et l‟instauration d‟une

gouvernance juste et équitable basée sur la Shari’a dans leurs zones d‟influence

respectives]. Mais, la latitude est laissée aux dirigeants des centres de trancher les litiges.

Seuls ceux n‟ayant été l‟objet d‟un consensus sont portés devant l‟émir de Gwandou qui

tranche en dernier ressort.

- Enfin l‟Imam qui dirige les prières et qui donne son point de vue sur des questions

religieuses. C‟est une grande responsabilité comme le souligne El Hamel Chouki :

« L’îmamat ( la charge d’imam) est une grande responsabilité religieuse qui ne


signifie pas seulement un titre donné à la personne qui dirige la prière publique
dans une mosquée mais représente un pouvoir moral et une fonction d’influence
considérable sur les musulmans ; la charge d’imam exercée par beaucoup de
lettrés, consiste également à faire les sermons de Vendredi devant des dizaines ou
des centaines de musulmans selon les régions et les mosquées, en recommandant
les bonnes actions et prohibant le répréhensible »(El Hamel, 2002 : 108).

Les centres d‟études islamiques sont tous dans la sphère d‟influence de Sokoto

mais ils jouissent d‟une large autonomie. Avant la chute de Tamkalla, le Lamido du centre

d‟études islamiques du Boboye était le représentant de Gwandou dans la zone. Mais

depuis la chute de cette ville en 1854, ce rôle est dévolu aux autorités de Say qui sont

chargés d‟introniser les autres Amirou de l‟Ouest du Niger. L‟investiture est faite

290
conformément aux principes de l‟islam. Avant cette cérémonie, la localité voulant

introniser son Amirou, dépêche une délégation auprès des autorités de Say pour les

informer officiellement. La date d‟investiture est arrêtée d‟un commun accord. Ainsi, les

autorités de Say ont des devoirs vis-à-vis du souverain qui doit être intronisé : « Il est du

devoir du souverain de Say de payer le Jelaba1, le turban et les deux boubous (dont l’un de

couleur noire et l’autre de couleur blanche).Cette cérémonie fait l’objet de tout d’un rituel

religieux » (Baka, 1992 : 86). Ainsi, les souverains des entités socio- politiques de Kouré,

de N‟Dounga, de Birni N‟Gaouré, de Torodi, du Bittinkodji sont intronisés par les autorités

de Say.

La justice aussi est toujours basée sur les lois de la religion musulmane et les autorités

de Gwandou veillent à l‟application de celles-ci dans les différents centres d‟études

islamiques de l‟Ouest du Niger qui sont sous tutelle. La justice est assurée rappelons- le,

par les Alkali (Cadis) qui jouent un rôle important dans la cour. Ils étaient chargés de

rendre la justice conformément à la Shari’a. C‟est quand le problème n‟était pas résolu au

niveau du Cadi, qu‟il est porté à Say ou à Gwandou.

3– Le développement du phénomène urbain

L‟islamisation a permis le brassage des populations et le développement du

phénomène urbain dans l‟Ouest du Niger. Tous les centres d‟études islamiques étaient des

lieux presque vides d‟hommes avant l‟installation des lettrés musulmans sur ces terres.

Mais, après l‟implantation des érudits sur les différents sites, les centres verront leur

population augmenter sensiblement : c‟est le cas au XVIe siècle de Kafi et de N‟Dounga

dont les sites étaient inoccupés mais, qui ont accueilli après l‟installation des lettrés

1- Jelaba : Mot d‟origine arabe qui désigne une sorte de gilet qu‟aimaient porter les souverains d‟orient.
C‟est la raison pour laquelle les nouveaux Amirou aimaient aussi porter ce gilet au dessus de leurs boubous.
Donc, c‟est l‟honneur que Say offrait aux nouveaux Amirou en leur donnant le jour de leur intronisation cette
Jelaba.

291
musulmans des flux migratoires considérables. Le processus d‟urbanisation va surtout

s‟accélérer au XIXe siècle avec le Jihad d‟Ousmane Dan Fodio et ses répercussions sur

l‟ensemble de l‟espace nigérien. Nous pouvons retenir à ce niveau deux exemples : Sinder

et Say.

Sinder, une réserve de terres fertiles est devenue après l‟installation de Tondo

Djalley sur le site, une ville. Lors du passage de Barth, les îles de Garou et de Sinder

étaient les plus importantes de la région et comptaient entre 16000 et 18000 habitants soit

environ 12000 habitants sur la seule ville de Sinder :

« Nous avons longtemps cherché vainement Sinder du regard, lorsque enfin, du


haut d’une nouvelle série d’éminences, nous découvrîmes une quantité
considérable de huttes s’étendant sur une ou deux îles et appartenant aux deux
villes insulaires de Garou et Sinder. L’une et l’autre s’élevaient à l’extrémité
méridionale de deux îles voisines, séparées seulement par un étroit canal ;
peuplées de Foulbés et de Sonrhaï vivant en commun, elles pouvaient renfermer
ensemble, de 16000 à 18000 habitants » (Barth, 1865 vol 4 : 179).

En plus de sa population, Sinder était le plus grand marché de céréales de la zone. Les

terres de Sinder étaient très fertiles et riches. En grande partie inondées pendant la période

des hautes eaux, ces terres recouvertes par des limons devenaient riches en humus après le

retrait de celles-ci. La production était alors abondante faisant ainsi de Sinder le grenier de

la région :

« Sinder est le plus grand marché aux céréales de toute la contrée, et on y trouve
en tout temps du millet en abondance ; pendant mon voyage, on y exportait de
grandes quantités de riz vers les provinces de Saberma et de Dendina. Malgré la
forte demande, le prix des céréales est très bas à Sinder : c’est ainsi que j’y achetai
une demi Sounnie (soit environ 200 livres) de blé, pour un morceau de coton teint
que j’avais acheté à Gando pour 1,050 coquillages, ou à peu près 20 Silbergros »
(Barth, 1865 vol 4 : 180).

La production de céréales sur les terres de Sinder et celles des îles environnantes était

tellement importante à l‟époque que l‟offre était toujours supérieure à la demande. Ainsi,

les prix étaient restés bas sur le marché tout au long du XIXe siècle.

292
En dehors de Sinder, on peut citer l‟exemple de Say qui n‟était qu‟un hameau (selon

la tradition locale) habité par un pêcheur, Albarka Toka et sa famille avant l‟arrivée de

Mahaman Diobbo. Mais après l‟installation du saint homme sur l‟île, Say va rapidement

devenir non seulement une ville mais aussi un carrefour sur le plan commercial et

religieux :

« En 1825, Diobo descendant le fleuve avec sa suite de talibés s’arrête en face de


Say, qui lui parut une région fertile. Say, malgré son existence vraisemblablement
ancienne comme habitat, n’était alors qu’un hameau sans importance au lieu de
passage du fleuve. Diobo en s’installant avec ses Peulh et ses Bitinkobé peut donc
être considéré comme le véritable fondateur du village de Say actuel, qui prit ou
reprit à partir de ce moment une réelle importance politique et commerciale »
(Lem, 1943 : 67).

C‟est surtout la renommée de saint homme de Mahaman Diobbo qui poussa plusieurs

communautés (peul, soηey, Kourté, wogo…), à venir s‟installer à Say ou dans les environs

immédiats. Ainsi, le site qui n‟était qu‟un hameau rappelons- le, avant l‟installation du

lettré musulman va voir sa population augmenter considérablement après l‟implantation

de l‟érudit et sa suite sur le lieu. C‟est ainsi, qu‟elle devient une ville d‟une grande

importance économique et religieuse dans l‟Ouest du Niger au XIXe siècle.

293
Conclusion générale

Contrairement à certaines zones de l‟espace nigérien où le premier contact avec

l‟islam remonte au VIIe siècle, l‟islam fut introduit dans notre zone d‟étude des siècles plus

tard. Ce retard s‟explique certainement par le fait que les grands axes du commerce

caravanier ne passaient pas par l‟Ouest du Niger. La zone manque aussi de grandes villes,

lieux par excellence des échanges où séjournaient les caravaniers musulmans venus du

Nord et porteurs du message divin. Contrairement à ces villes commerciales où l‟islam fut

introduit par des agents venus du Nord, dans notre zone d‟étude, c‟est un phénomène

provenant de l‟Ouest. Les deux courants qui ont joué un rôle dans le processus

d‟islamisation viennent tous de cette direction :

- Le plus ancien est celui de la phase d‟islamisation de l‟Empire soηey sous Askia

Mohamed au XVIe siècle ;

- Le second fut en relation avec le Jihad conduit par Ousman Dan Fodio au début du XIXe

siècle.

L‟islam avait donc essentiellement gagné notre zone d‟étude du côté Ouest. Au XVIe

siècle, cette religion avait été introduite d‟abord dans quelques villages où Askia Mohamed

avait installé des familles de lettrés musulmans : N‟Dounga, Kouré, Kafi… Avec cette

politique du grand Askia, l‟islam fit une progression sensible dans notre zone d‟étude.

Après la défaite de l‟empire soηey, l‟activité religieuse de ces ouléma avait

considérablement chuté. La religion de Mohamed avait régressé pas seulement dans

l‟Ouest du Niger mais aussi dans toute la sphère d‟influence de l‟Empire Soηey : « De

1591 à la fin du XVIIIe siècle, l’islam connut une longue léthargie dont il ne se réveillera

qu’à partir du XIXe siècle sous l’action des Peul » (Hama, 1978 : 64). Mahmoud Kâti

assimile cette défaite de l‟Empire Soηey à une malédiction :

« Ce qui causa la ruine de l’Etat du Songaï, ce qui poussa Dieu à y jeter la


désorganisation, ce qui amena sur les citoyens le châtiment dont ils se moquaient

294
jusque- là, ce fut l’inobservance des lois de Dieu, l’iniquité des esclaves, l’orgueil
et l’arrogance des grands. Au temps d’Ishâq, la ville de Gao avait atteint l’extrême
limite de l’immoralité ; les crimes les plus graves, les actes les plus désagréables à
Dieu s’y commettaient ouvertement et les pires turpitudes s’étalaient au grand jour.
C’était à tel point qu’on avait désigné un préposé aux adultères pour lequel on
avait confectionné un tambour spécial et devant lequel les intéressés se citaient
réciproquement. Il y avait encore d’autres choses dont le récit déshonorerait celui
qui aurait l’audace de le faire. Nous appartenons à Dieu : vers lui que nous devons
retourner » (Kâti, 1913 : 272).

Les lettrés musulmans qui viendront après la conquête marocaine dans la zone n‟ont pas pu

faire progresser l‟islam à cause de la résurgence de la religion traditionnelle. On parle de

stagnation de la religion de Mohamed, car même avec l‟arrivée d‟autres groupes de

musulmans, elle n‟a pas progressé dans l‟Ouest du Niger au cours de la période allant du

XVIIe au XVIIIe siècle. On assiste même à un recul de l‟islam dans cette zone au cours de

la seconde moitié du XVIIIe siècle. Cette situation est due à un retour en force de la

religion du terroir car les érudits de cette époque n‟ont ni le soutien, ni le charisme de leurs

prédécesseurs pour faire passer le message de Dieu. L‟arrivée de plusieurs autres groupes

de migrants (Soηey, Maouri, Goubé, Touareg, Kourfayawa, Wogo…) composés

essentiellement d‟adeptes des croyances ancestrales n‟a pas facilité la tâche aux lettrés

musulmans.

L‟islam se trouve ainsi largement supplanté par la religion traditionnelle. Cette

dernière est restée prépondérante dans la zone jusqu‟à la fin du XVIIIe siècle. Il faudra

attendre le renouveau islamique du XIXe siècle, pour assister à un retour en force de la

religion de Mohamed. Certains souverains (jusque-là adeptes de la religion traditionnelle)

acceptent pour la première fois de se convertir et portent dès lors, le titre d‟Amirou. Ce

renouveau islamique aura pour conséquence, l‟éclosion de plusieurs centres d‟études

islamiques dans l‟Ouest du Niger. C‟est avec ces centres, animés essentiellement par des

érudits peul que la religion de Mohamed va faire un progrès significatif dans cette zone.

295
A partir du XIXe siècle, on assiste rappelons le, à l‟éclosion de plusieurs centres

d‟études islamiques dirigés par des lettrés musulmans qui ont joué un rôle important dans

la diffusion de l‟islam dans cette partie de l‟espace nigérien. Parmi ces centres, Say reste

incontestablement le plus puissant. Ville créée au début du XIXe siècle par Alfa Mahaman

Diobbo, elle est devenue en peu de temps, le centre d‟études islamiques le plus important

de l‟Ouest du Niger. Un tel succès dans une entreprise religieuse en un temps aussi court

est un fait rare. Il faut reconnaître que ce succès est en grande partie lié à la personnalité

du fondateur de la ville qui, dans un contexte de crise, a su par son comportement

exemplaire, attirer de nombreux fidèles vers Say. Désintéressé par le bien matériel,

Mahaman Diobbo est un lettré musulman ayant un sens profond de justice et d‟équité. En

optant pour la conversion volontaire du fidèle, il a fait du coup de Say, un havre de paix, ce

qui va pousser des milliers de fidèles fuyant l‟insécurité à venir s‟y installer. Ces

successeurs vont poursuivre sa politique faisant ainsi de ce centre, le plus important de

l‟Ouest du Niger.

Contrairement à Say qui a brillé dans toute notre zone d‟étude à cause de l‟option

de ses dirigeants pour la non violence, le centre d‟études islamiques du Boboye a eu une

histoire mouvementée. Il était un modèle de réussite au début grâce à la politique

d‟apaisement et de rassemblement menée par les pères fondateurs (Ali Anna et Sambo).

Mais avec l‟avènement de Boubacar Louloudji, ce centre va basculer dans la violence et,

depuis lors les heurts sont fréquents dans le Dallol avec tout un cortège de malheurs.

C‟est l‟ambition démesurée de ce leader religieux qui veut contrôler toutes les terres de

cette vallée fossile qui va mettre le feu aux poudres. Ses successeurs vont

malheureusement poursuivre sa politique totalitaire, ce qui va envenimer la tension dans le

Boboye et fera de cette zone, l‟un des plus grands foyers d‟insécurité dans l‟Ouest du

Niger.

296
En dehors de ces deux grands centres d‟études islamiques, on note l‟existence de

plusieurs centres d‟études secondaires placés sous la coupe de Say : Tirga, Sinder,

Kounari, Goudel… Ces centres bien que relais de Say ont joué un rôle important dans

l‟islamisation de notre zone d‟étude. Parmi ces centres secondaires, Sinder est celui qui a

pleinement joué son rôle jusqu‟à l‟installation de l‟administration coloniale. Il a largement

contribué à la diffusion de l‟islam sur l‟île et ses environs.

Dans l‟ensemble, grâce à l‟action des responsables de ces centres d‟études islamiques,

l‟islam a fait un progrès considérable dans l‟Ouest du Niger. Seules quelques localités sont

restées fermées jusqu‟à la fin du XIXe siècle à la religion de Mohamed. Il s‟agit de

Dogondoutchi, de Simiri, de l‟Anzourou et de Botou. C‟est un processus qui s‟était

déroulé pacifiquement dans l‟ensemble des centres islamiques à l‟exception de celui du

Dallol où l‟avènement de Boubacar Louloudji mit fin à la cohabitation pacifique entre

Zarma et Peul. A cause de l‟insécurité née des heurts entre les deux communautés, le

centre d‟études islamiques du Boboye avait changé plusieurs fois de capitale : Garouré,

Tamkalla, Kollo, Bikim puis Garouré. Dans ce centre, l‟islam qui devait servir de ciment

pour renforcer l‟unité des différentes communautés vivant dans le Dallol avait

malheureusement été utilisé à des fins politiques. C‟est ce qui fut à la base de tous les

soubresauts que le Boboye avait connus.

La portée de l‟œuvre des lettrés musulmans serait certainement plus grande s‟il n‟y

avait pas eu cette insécurité quasi- permanente dans la seconde moitié du XIXe Siècle. Elle

avait été un facteur limitant dans le processus d‟islamisation dans l‟Ouest du Niger. En

effet, elle restreint le mouvement des ouléma qui sont les principaux agents d‟islamisation.

Elle diminuait aussi le mouvement des hommes surtout des enfants qui étaient

généralement envoyés dans les centres comme talibé.

297
Le poids des croyances ancestrales et l‟insécurité qui sévissait dans la zone seraient

des facteurs qui expliqueraient la lenteur dans la progression de l‟islam dans cette zone.

Mais malgré tout à la fin du XIXe siècle, l‟islam paraît en pleine expansion dans l‟Ouest

du Niger et la Qadriya était la principale confrérie dans cette zone. Les centres d‟études

islamiques étaient malgré la prédominance de la religion traditionnelle des carrefours, des

lieux d‟échanges où les gens venaient apprendre les préceptes du Coran et retournaient

dans leurs villages pour créer des écoles. Le long de la vallée du Niger par exemple, il y

avait toujours des échanges entre les ouléma mais aussi une connexion entre les centres et

plusieurs autres villages : Say- Boboye- Sinder- Garbou- Birniyel Dantchandou- Namari-

N‟Dounga- Kollo etc.

Au XIXe siècle, dans l‟ensemble de la zone Ouest du Niger, les musulmans

pratiquaient un islam Sunnite de rite malikite avec la Qadriya comme ordre confrérique.

Dans la plupart des cas, les populations qui se sont installées dans les centres créés par les

érudits avaient accepté volontairement d‟abandonner les croyances ancestrales pour se

convertir à la religion de Mohamed :

« Faits d’occupation du sol, faits religieux et faits politiques sont mêlés à tel point
qu’il ne peut être question de les dissocier. Les nouveaux arrivants qui prenaient
possession des terres placées sous l’autorité du marabout de Say étaient des
musulmans nouvellement, mais volontairement convertis. Ils n’ont donc pas
apporté avec eux des survivances des croyances relatives à leur terroir natal et
n’ont pas cherché à les adapter à leur nouveau terroir… Les religions
préislamiques ont définitivement perdu tout crédit dans ces populations d’origines
diverses. L’abandon de leur terroir d’origine a entraîné la rupture complète avec
les croyances qui s’y rattachaient » (Raulin cité par Idrissa, 1981 : 45- 46).

Si dans la ville de Say, la religion du terroir a perdu du terrain, dans le reste de notre zone

d‟étude, on note une survivance des croyances ancestrales. Il faut noter que la portée de

l‟œuvre des fondateurs des centres d‟études islamiques serait sans doute plus grande s‟il

n‟y avait pas eu, un autre facteur limitant, l‟installation de l‟administration coloniale.

298
SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE

299
A- Les Sources

I - Les Sources Orales

1- Enquêtes Orales

a – Liste des Informateurs

Nom et prénom de Age Statut ou Lieu de Date de

l’informateur fonction l’entretien l’entretien

Sita Akilou 90 ans Paysan Say 23/10/2007

Soumana Nouhou 65 ans Directeur de Say 23/10/2007

la Radio

Liptako

Abdoulsalam Soumaila 79 ans Imam de la Say 12/12/2007

mosquée de

Zooronay

Alfaizé Amadou Issa Cissé 64 ans Chef de Say 12/12/2007

canton de

Say

Entretien collectif Say 10/10/2007

Entretien collectif Say 25/11/2007

Seybou Hamidou 99 ans Chef de Niamey 22/11/2007

quartier

Yantala

Alzouma Bazi Cissé 77ans Infirmier à la Niamey 11/11/2007

retraite 13/11/2007

20/11/2007

16/12/2010

300
Soumana Abdourahamane 44 ans Chargé des Niamey 05/12/2009

affaires

culturelles à

l‟ambassade

des Etats-

Unis

Seyni Moumouni 45 ans Enseignant- Niamey 11/06/12

chercheur à

l‟IRSH

Moulaye Hassane 57 ans Enseignant- Niamey 10/12/12

chercheur à

l‟IRSH

Idrissa Aboubacar 55 ans Imam de la Bongoula 04/11/2007

mosquée de

Bongoula

Soumana Nouhou 80 ans Shaykh de Bongoula 06/12/2007

Bongoula

Mohamed Djingarey 69 ans Chef de Sawani 20/03/2011

Canton de

Sinder

Younoussa Sinder 50 ans Paysan Sawani 20/03/2011

Entretien collectif Sawani 21/03/2011

Djaffarou Ali 52 ans Paysan Sawani 26/07/2011

Amadou Oumarou 78 ans Forgeron Guéladio 29/12/2010

20/01/2011

301
Entretien collectif Guéladio 29/12/2010

Soumana Abdoulaye 75 ans Paysan Guéladio 20/01/2011

Amadou Tidjani 64 ans Alkali N‟Dounga 01/04/2011

Hassane Djibo 68 ans Planton à la N‟Dounga 03/04/2011

retraite

Entretien collectif N‟Dounga 03/04/2011

Hama Beidi Boubacar 68 ans Enseignant à Birni 16/01/11

la retraite N‟Gaouré

Entretien collectif Birniyel 08/10/2011

Alirou Adoulkadri 37 ans Paysan Birniyel 09/10/2011

Ismaila Amadou 56 ans Paysan Birniyel 09/10/2011

Maman Ahidjo 56 ans Ancien chef Birniyel 09/10/2011

de village

Oumarou Amadou 46 ans Imam de la Birniyel 09/10/2011

mosquée de

Birniyel

Bello Issa 64 ans Paysan Tchérindji 13/09/2011

Djibo Zakou 57 ans Paysan Tchérindji 13/09/2011

Mayaki Bonkano 83 ans Chef de Tchérindji 13/09/2011

village de

Tchérindji

Abdou Saley 71 ans Paysan Boumba 09/10/2011

Djibrilla Omar 52 ans Imam de la Boumba 09/10/2011

mosquée de

Boumba

302
Idrissa Daouda 60 ans Paysan Boumba 09/10/2011

Moussa Abdourahamane 55 ans Paysan Boumba 09/10/2011

Entretien collectif Boumba 09/10/2011

Bouré Djalo 76 ans Paysan Garbou 09/10/2011

Garba Salou 76 ans Chef de Garbou 09/10/2011

village de

Garbou

Garba Zoumari 66 ans Paysan Garbou 09/10/2011

Marou Issoufou 27 ans Chef de Neni 08/12/2007

village de

Neni

Boubaca Soumana Djouldé 81 ans Imam de la Kareygoorou 12/07/2009

mosquée de

Kareygoorou

Amadou Mamane 63 ans Imam de la Tirga 20/10/2010

mosquée de

Tirga

Koynouga Koko 65 ans Paysan Kareyel 21/10/2010

Garba Hassane 72 ans Chef de Koujé 09/10/2011

village de

Koujé

Adamou Seybou 61 ans Chef de Darey 13/09/2011

village de

Darey

Shaykh Djibo Amadou 77 ans Imam de la Kafi 23/10/2011

303
mosquée de

Kafi

Garba Maikido Djibo 61 ans Enseignant à Kouré 13/05/2012

la retraite

b- Sources Sonores de L’IRSH

Histoire du Dallol Boboye : Entretien avec Amadou Boyidjo le 29 /04/1968. Entretien

réalisé par Soumaila, agent de l‟ORTN.

Histoire des Peul du Dallol Boboye : Entretien avec Siddo Sayoma le 23/04/1969,

en zarma réalisé par Moussa Hamidou responsable de la

sonothèque de l‟IRSH à la retraite.

Histoire des Peul du Dallol Boboye en peul : Entretien réalisé par Moussa Hamidou

responsable de la sonothèque de l‟IRSH à la retraite.

Histoire de Say : Entretien avec Oumarou Diawando le 28/05/1973, réalisé par

Moussa Hamidou responsable de la sonothèque de l‟IRSH à la retraite.

Histoire de Guéladio : Entretien avec Hama Halidou 56 ans, à Guéladio.

(Anonyme).

Chants religieux : Entretien avec Alfa Agano en 1968, réalisé par Diouldé

Laya.

2 –Recueils publiés de Traditions Orales

CELTHO 1977, La tradition historique Peule, Niamey, CELTHO, 133p.

CHATELAIN 1921, L’exode des Djerma de l’Andiourou vers le Dallol Bosso, le Djigui et

le Fakara, pp 274-279.

304
DIALLO (M) 1977, La tradition historique Peule, Niamey, CELTHO, 126P.

DIONMANSY (S) 1959, Qu’est- ce qui attire les Peuls vers l’Est ? Niamey, 7P.
HAMA (B),

1967(a) Documents songhay/ documents haoussa, documents yemenite/ l’islam

dans l’Ouest africain/ documents libérien, Niamey, collections B. Hama, 75p.

1967(b) Histoire du Gobir et de Sokoto, Paris, Présence Africaine, 172p.

HAMA (B),

1969(a) Histoire traditionnelle des peul du Dallol Boboye, Niamey

CRDTO ,160 p.

1969(b) Recherches historiques : République du Niger : journal du 2 mars

1968 au 8 mai 1969, ]SM[, 437 p.

HAMA (B),

SD(a), L’Histoire d’un peuple : les « Zarma » République du Niger –Niamey-

IFAN, 2T (178p, 160 p).

SD(b), Recueil de textes historiques sur le Niger, Niamey, ]SM[, 171 p.

SD(c), L’Islam d’hier et l’Islam d’aujourd’hui, conditions de renaissance,

] SL [, ]SM[ , 83 p.

HAMBALI (M) 1972, A note on the History of Junju :A clarification of facts on Sheikh

Ahmed Baba and the role of Junju in the History of Hausaland,

University of Lagos, 23P.

LAYA (D),

1969(a), Traditions historiques des ethnies de la région de Dooso (Dosso),

Niamey, CRDTO, 117p.

1969(b), Exode des Zarmas, Niamey, CRDTO.

LAYA (D) SD, Say : " Les premiers venus, nos grands parents ont occupé les

terres qu’ils voulaient’’, Niamey, IRSH, 210 p.

305
LAYA (D) 1976, Traditions orales historiques des goles, Niamey, IRSH, Collection

Langues no2, 147p.

LAYA (D) 1991, Migrations et intégration politique dans le gurma oriental au XIXe

siècle : exemple de Folmongani "in Journal des africanistes, Paris,

CNRS, Tome I- fascicule 2, pp.65-90.

PERIE et SELLIER 1950, „‟Histoire du peuplement du cercle de Dosso‟‟ in Bulletin de

l’IFAN, tome 12 no 4, pp 1015 – 1075.

ROUCH (J) 1954, Les Songhay, Paris, PUF, 58P.

VIEILLARD (G) et MAHAMADOU (E) 1977, Récits Peul du Macina, du Kounari, du

Djilgodji et du Torodi (Mali, Haute-Volta,

Niger), Niamey, CELTHO, 142P.

II – Les Sources Ecrites

1- Les Manuscrits en langue Arabe et Ajami

BELLO (M) 1957, Infakaq al- Maysur fi tarikh bilad al- takrur, edited by C. E. J

Whriting, London, Luzac, 140p.

CUOQ (J.M) 1975, Recueil des sources arabes concernant l’Afrique occidentale du VIIIe

au XVIe siècle, Paris, CNRS, 490p.

DAN FODIO (A) 1963, Tazyîn Waraqãt, Edited and translated by HISKETT (M), Ibadan-

University Press, 144 p.

ES- SA‟DI (A. B. A) 1981, Tarikh Es- Soudan, Paris, Maisonneuve, 534P.

FODUYE (U) 1978, Bayān wūjūb al- hijra ‘a la’ L-Ibad, Edited and translated by Al-

MASRI, Oxford University Press.

KẶTI (M) 1913, Tarikh El – Fettach, Paris, Ernest Leroux, 361P.

VIOLA (N) 2004, Les manuscrits „‟Ajamî‟‟ de Niamey in : Islamic et sociétés au

sud du sahara, nº 17-18, pp 87-100.

306
2 –Les Sources d’Origine Coloniale

a – Récits d’explorateurs et conquérants militaires

BARTH (H) 1861, Voyages et découvertes dans l’Afrique septentrionale et centrale

pendant les années 1849 à 1855, Paris –A- Bohne, tome 3, 337 p. et

tome 4, 304 p.

BARTH (H) 1965, Travels and discoveries in north and central Africa being a journal of

an expedition, 1849-1855, Londres, Frank-Cass, volume three, 800p.

CASTERA (J) 1797, Voyage dans l’intérieur de l’Afrique en 1795, 1796 et 1797, tome1,

Paris, DENTU, 411P.

CHUDEAU (R) 1909, Missions au Sahara, Paris, Armand Colin, 320 p.

HOURST 1898, Sur le Niger et au pays des Touaregs, Paris, E. Plon, Nourrit et Cie, 479 p.

IRSH 1976, Histoire du cercle de Say (Haut- Sénégal et Niger). Niamey, BRO 189. 31p.

LABOURET (H) 1937, Monteil : explorateur et soldat, Paris- B- Levrault, 295p.

LABOURET (H) 1947, Histoire des Noirs d’Afrique, Paris, PUF, 127p.

LENFANT (C) 1903, Le Niger : voie ouverte à notre empire africain, Paris, Hachette,

252p.

MENIAUD (J) 1912, Haut- Sénégal- Niger- Soudan Français, Paris, Larose, pp 294-392.

MOLLIEN (G.T) 1967, L’Afrique occidentale en 1818 vue par un explorateur français,

Paris, Calman- Levy, 301p.

MONTEIL (P.L) 1890-1891-1892, De Saint-Louis à Tripoli par le Lac-Tchad : Voyage au

travers du Soudan et du Sahara- Paris, Felix- Alcan, 459

p.

MWABARA (S.N) 1815, The journal of a mission to the interior of Africa in the year

1805: together with others documents, official and private

relating to the same mission to wich is prefixed an account of

307
the life of Mungo Park, London, J Murray, 219p.

NATCHIGAL (G), 1876 Voyage en Afrique, Paris, Société de Géographie, 547p.

PARK (M) 1815, The journal of a mission to the interior of Africa, in the the year 1805:

together with other documents, official and private relating to the same

mission to wich is prefixed an account of the life of Mr Mungo

Park.London- J- Murray, 219p.

TOUTEE (G) 1899, Du Dahomé au Sahara : la nature et l’Homme, Paris, Armand –

Colin, Tome 2, 270 p.

VIARD (E) 1885, Explorations africaines au bas-Niger, Paris-Le-Guérir, 244p.

b- Monographies

ANN- 5.1.1- Monographie du cercle de Dosso par le capitaine LE LONG, 1909, 18 p.

ANN- 5.1.2- Cercle de Dosso. Subdivision de Gaya : notice sur les différentes races

peuplant le secteur de Gaya, anonyme, 1909, 4 p.

ANN- 5.1.2.bis- Monographie du secteur de Gaya par le lieutenant MARSAUD,

1909, 17 p.

ANN- 5.1.3- Histoire du peuplement : cercle de Dosso par Perié et Sellier, 1946,39p.

ANN- 5.1.4- Monographie de Gaya par Esperet, 1917.

ANN- 5.1.5- Monographie du secteur de Gaya par le lieutenant MARSAUD, 1913.

ANN- 5.1.6- Monographie du secteur de Dosso commencée en 1912, terminée le 20 février

1913 par le Capitaine MAHAUT, 28p.

ANN- 5.1.7- Monographie de la subdivision de Dosso, 1913, 20p.

ANN- 5.1.8 (1) - Monographie du secteur de Gaya : chapitre 1, par ESPERET, 1917, 12 p.

ANN- 5.1.8 (2)- Monographie de la subdivision de Gaya. Formation historique et

308
ethnique : chapitre 2, par ESPERET, 1917, 17 p.

ANN- 5.1.8 (3)- Formation politique et administrative : chapitre 3, par ESPERET

4 p.

ANN-5.1.8 (4)- Monographie de la subdivision de Gaya : chapitre 4, par ESPERET,

1917,11 p.

ANN- 5.18 (5)- Monographie de la subdivision de Gaya : chapitre 5, par ESPERET,

1917,12 p.

ANN- 5.1.8 (6) - Monographie de la subdivision de Gaya : chapitre 6, par ESPERET,

1917, 17 p.

ANN- 5.1.12- Monographie du cercle de Dosso, anonyme, SD, 8p.

ANN- 5.1.13- Histoire du peuplement du cercle de Dosso, par PERIE SELLIER, 1946, 39

p.

ANN- 5.1.14- Subdivision de Gaya : dictionnaire des villages, anonyme, 1946.

ANN- 5.2.1- Situation politique et administrative de Gaya par LOUBET, 1925, 2p.

ANN- 5.2.2- Commandement indigène, 1926, 5p, anonyme.

ANN- 9.1.2- Description de l‟Imanan ou l‟Imanen, anonyme, 1901, 2 p.

ANN- 9.1.3- Note sur Filingué, par le capitaine CORNU, 1901, 22 p.

ANN- 9.1.5- Liste des villages de la subdivision de Filingué, anonyme, 1940, 2 p.

ANN- 9.1.7- Monographie des cantons de la subdivision de Filingué par BRACHET, SD,

7 p.

ANN- 15.1.1- Monographie du cercle de Niamey, Anonyme, 1901, 113 p.

ANN- 15.1.2- Notice sur le cercle du Djerma et historique du cercle par le capitaine,

SALAMAN, 1903-1904.

ANN- 15.1.2.bis- Monographie du cercle de Niamey, BONTIQ, 1901, 113 p.

ANN- 15.1.3- Monographie du cercle de Niamey, par le lieutenant PY, 1941, 54 p.

309
ANN- 15.1.4- Note sur le canton de Boboye, anonyme, 1946, 14 p.

ANN- 15.1.5- Monographie de la subdivision centrale de Niamey, anonyme, 1947.

ANN- 15.1.6- Le cercle du Djerma : 1800-1900, par Michel SELLIER, 1948.

ANN- 15.1.8- Etude monographique sur la ville de Niamey, par Hama BOUBOU, 1955.

ANN- 15.1.9- Monographie de la subdivision centrale de Niamey, anonyme, 1955.

ANN- 15.1.10- Cercle de Niamey : Note sur l‟histoire du peuplement, anonyme, SD.

ANN- 15.1.14- Note sur le canton de Boboye, anonyme, 1946, 14 p.

ANN- 16.1.1- Notes sur les peuls et les Gourmantchés de la région de Say,

LOYZANCE.A, SD, 10 p.

ANN- 16.1.3- Monographie du cercle de Say, anonyme, 1954, 30 p.

ANN- 22.1.1- Monographie du cercle de Tillabéry par le capitaine BUCK, 1907, 50P.

ANN- 22.1.2- Monographie du secteur de Tillabéry plus un plan de monographie

régionale, 1913, 15p.

ANN- 22.3- Documents relatifs à la suppression de la Haute- Volta en 1932 et une étude

sur la subdivision de Téra et le canton de Botou, 1932-1933.

ANN- 22.1.4- Monographie du cercle de Tillabéry par Leca, 1941,43 p.

ANN- 22.1.5- Note sur le régime des terres et quelques coutumes dans le canton de

Kourtey par Séré de Rivières adjoint au commandant de cercle, 1943, 4p.

ANN- 22.1.6- Note sur l‟ancien canton de Sansané Haoussa par SERE DE RIVIERES

adjoint au commandant de cercle, 1943, 2p.

ANN- 22.1.8- Monographie du cercle de Tillabéry 1955, 58p.

ANN- 22.1.9- Les Kados de l‟Anzourou par Pierre CROS, stagiaire de l‟administration

coloniale en service à Tillabéry 1947.

ANN-22.1.10- Cercle de Tillabéri : subdivision de Djermaganda : coutimier juridique du

Djermaganda par J- PAUMELLE, 1947.

310
ANN- 22.1.11- Maman Askia, fils de ARDAM, empereur de Gao et ses successeurs

d‟après le Tarikh de Sinder sd.

ANN- 22.1.12- Connaitre les songhai par Georges FRADIER, rédacteur en chef de

l‟UNESCO, 1949, 3P.

ANN- 22.1.13- Histoire ou légende des songhai dans le pays, 19076, 6p.

ANN- 22- 1- 13- bis : Notice générale sur le cercle de Dounzou de Panet Lieutenant-

Colonel, 1905, 14p.

ANN-22.1.14- Le canton de Dessa par MALFETTES 1954, 55p.

ANN- 22.1.15- Monographie de Ouallam par le chef de subdivision E. DUFFORT, 1955,

25P.

c- Rapports Politiques

ANN- 1E1.4- Poste de Dosso : rapport politique, Anonyme, 1901.

ANN-1E1.5- Poste de Niamey. Remarques politiques : région ouest, anonyme, 1901.

ANN-1E1.7- Cercle du Djerma. Poste de Dosso : rapport annuel, anonyme, 1901.

ANN-1E1.9- Troisième Territoire Militaire : rapport sur la région ouest du 3ème territoire

par le commandant GOURAUD, 1901.

ANN-1 E-1-12- Territoire Militaire du Niger. Cercle de Dounzou : rapports politiques,

1901- 1907.

ANN-1E1.13- Cercle du Djerma. Secteur de Dosso : rapports politiques mensuels,

anonyme, 1902.

ANN-1E1.17- Troisième Territoire Militaire : rapport sur la situation politique 3ème

territoire, par le commandant GOURAUD, 1901.

ANN-1E1.24- Premier Territoire Militaire : rapport annuel, par le Lt-Colonel RONGET,

commandant du premier Territoire Miltaire, 1904.

311
ANN-1E1.26- Cercle du Djerma : rapports politiques mensuels, anonyme, 1904.

ANN-1E1.27- Cercle de Say : rapport politique, par LOUSTEAU, administrateur, 1904.

ANN-1E2.1- Région de Niamey : rapport politique et administratif, par le chef de

Bataillon, commandant de la région, 1905.

ANN-1E2.2- Région de Niamey : rapport politique de la région, anonyme, 1905.

ANN-1E2.3- Région de Niamey : rapports politiques mensuels, anonyme, 1906.

ANN-1E2.9- Cercle de Dosso : rapport du lieutenant HARBERER commandant le secteur

de Dosso sur la tournée exécutée du 09 mars au 22 avril 1905.

ANN-1 E2-13 bis- Territoire Militaire du Niger. Région de Niamey : rapports spéciaux,

anonyme, 1905- 1907.

ANN-1E2.19- Région de Niamey : rapports politiques d‟ensemble mensuels de la région,

anonyme, 1906.

ANN-1E2.20- Région de Niamey, rapports politiques et administratives trimestriels de la

région, Anonyme : 1er, 2e, 3e, 4e trimestres 1906.

ANN-1E2.21- Cercle du Djerma, rapport politique mensuel du cercle du Djerma pour les

mois de Janvier, février, mars, avril, anonyme, 1906.

ANN-1E3.15- Colonie du Dahomey et Dépendances. Cercle de Say : rapports d‟ensemble

des mois de février, mai, juin, août et décembre, anonyme, 1906.

ANN-1 E3-16- Colonie du Dahomey et Dépendance. Cercle de Say : rapports d‟ensemble

des mois de février, mai, juin, août, et décembre, anonyme, 1906.

ANN-1 E3-34- Territoire Militaire du Niger. Cercle de Niamey. Subdivision de Dosso.

Journal du poste de Dosso commencé le 27 janvier 1906 terminé le 3 avril

1908.

ANN-1 E4-2- Rapport du Capitaine SALAMAN, commandant le cercle du Djerma sur la

délimitation des cercles du Djerma et de Dounzou, 1907, 3p.

312
ANN- 1E4.3- Région de Niamey : rapports politiques et administratifs trimestriels et

rapport général sur la politique de la région, Anonyme, 1907.

ANN-1E4.4- Région de Niamey : rapports politiques mensuels de la région, anonyme :

Janvier, février, avril, mai, juillet, août, octobre, novembre 1907.

ANN-1E4.29- Territoire Militaire du Niger : situation politique mensuelle des territoires

du sud, anonyme, 1907.

ANN-1E4.30- Territoire Militaire du Niger : bulletins politiques mensuels du territoire des

mois de juin, juillet, septembre, octobre, novembre, décembre, anonyme,

1907.

ANN-1E4.35- Cercle de Say : registre des rapports périodiques, anonyme, 1907-1908.

ANN-1E4.36- Cercle de Dosso: cahier de rapports, Anonyme, 1907-1909.

ANN-1E5.2- Cercle de Dosso: rapports politiques mensuels de la région, anonyme, 1908.

ANN-1E5.4- Région de Niamey, rapports périodiques mensuels de la région, anonyme,

1908.

ANN-1E5.10- Cercle du Djerma : région de Say par le lieutenant PAUPELIN, SD.

ANN-1E5.17- Territoire Militaire : fragment de registre de rapports politiques des régions,

anonyme, 1909.

ANN-1E5.20- Cercle de Dosso : rapports politiques mensuels : mois de janvier à

décembre, anonyme, 1909.

ANN-1E5.26- Cercle de Tillabéri : rapport sur la politique du cercle pendant le mois de

novembre par le capitaine FIGARET commandant du cercle de Tillabéri,

1909.

ANN-1E5.29- Région de Niamey : rapports politiques mensuels des mois de janvier,

février, mars, avril, mai, anonyme, 1909.

ANN-1E6.4- Cercle de Tillabéry : rapport politique, du mois de juin, anonyme, 8 1910 p.

313
ANN-1 E6-5- Cercle de Tillabéry : rapport politique, anonyme, 1910, 1p.

ANN-1 E6-10- Cercle de Tillabéry : Etude d‟un manuel tactique pour le territoire du

Niger : rédigé par le lieutenant FOURCADE du poste de Tillabéry, 1910,

26p.

ANN-1 E6-11- Région de Niamey : manuel tactique de la région de Niamey, rédigé par le

lieutenant BERGER, 1910, 17p.

ANN-1 E6-12- Région de Niamey. Cercle de Dosso : rapport au sujet d‟un manuel tactique

du lieutenant SADOUX, 1910.

ANN-1E6.13- Cercle de Dosso : rapports politiques mensuels du cercle, anonyme, 1910.

ANN-1E6.19- Cercle de Niamey : rapports politiques mensuels du cercle, anonyme, 1911.

ANN-1E6.23- Territoire Militaire : rapports politiques d‟ensemble, anonyme, 1911.

ANN-1E7.5- Cercle de Niamey : rapports politiques trimestriels, 1er, 2è, 3è et 4è trimestres,

anonyme, 1912.

ANN-1E7.11- colonie du Niger : rapports politiques 2è trimestres, anonyme, 1912.

ANN-1E7.15- Cercle de Niamey : rapports politiques d‟ensemble, anonyme, 1913.

ANN-1E7.21- Territoire Militaire : rapports politiques d‟ensemble, anonyme, 1913.

ANN-1E7.23- Cercle de Niamey : secteur de Tillabéri : monographie du secteur,

Anonyme, 1913.

ANN-1E7.25- Cercle de Niamey : secteur de Gaya : rapports politiques 1er trimestre,

anonyme, 1914.

ANN-1E7.26- Cercle de Niamey : rapports politiques trimestriels du cercle, anonyme,

1914.

ANN-1E7.29- Cercle de Niamey : rapports politiques trimestriels du cercle, anonyme,

1914.

ANN-1E7.30- Cercle de Niamey : rapports politiques mensuels du cercle, anonyme, 1914.

314
ANN-1E7.31- Cercle de Niamey : rapport politique, anonyme, 1914.

ANN-1E7.38- Territoire Militaire : rapports politiques trimestriels, anonyme, 1914.

ANN-1 E7-47- Rapport du colonel VENEL sur la justice et l‟enseignement, anonyme,

1915, 7p.

ANN-1 E7-51- Territoire du Niger. Rapport politique du 1er trimestre, anonyme, 1915,

10p.

ANN-1 E7-58- Territoire Militaire du Niger. Cercle de Niamey : rapports politiques des 3e

et 4e trimestres 1916.

ANN-1 E7-59- Territoire Militaire du Niger. Cercle de Niamey : rapports politiques

des 1er et 2e trimestres, anonyme, 1916.

ANN-1 E7-68- Territoire Militaire du Niger. Cercle de Niamey : rapport du Capitaine

SADOUX sur les conditions dans lesquelles un détachement de la

compagnie peut être installé définitivement à Filingué, 1916, 4p.

ANN-1 E7-73- Territoire du Niger : rapports divers, anonyme, 1916.

ANN-1 E7-76 bis- Territoire Militaire du Niger : rapports politiques d‟ensemble 2e et 3e

trimestres, anonyme, 1916.

ANN-1 E8-4 Territoire Militaire du Niger. Secteur de Say, anonyme : rapport trimestriel :

3e trimestre 1917, situation politique pendant le 3e trimestre.

ANN-1 E8-5- Territoire Militaire du Niger. Cercle de Niamey, anonyme : rapport politique

du 4e trimestre 1917 du cercle de Niamey, 7p.

ANN-1 E8-12- Territoire Militaire du Niger. Rapports politiques d‟ensemble 1er trimestre,

anonyme, 1917, 14p.

ANN-1 E8-14-- Territoire Militaire du Niger. Rapport annuel, anonyme, 1917.

ANN-1 E8-15 bis2- Territoire Militaire du Niger : rapport politique, anonyme : 1er et

2e trimestres, anonyme, 1917.

315
ANN-1 E8-16 bis- Cercle de Say : organisation administrative du cercle de Say,

anonyme, 1917-1926.

ANN-1 E8-17- Territoire Militaire du Niger : rapport politique d‟ensemble, anonyme,

1918.

ANN-1 E8-18- Cercle de Say : rapport politique, 2e trimestre, anonyme, 1918.

ANN-1 E8-5- Cercle de Say : rapports trimestriels : 1er, 2e, 3e trimestres,

anonyme, 1918.

ANN-1 E10-18- Colonie du Niger. Cercle de Say : rapports trimestriels 1er, 2e, 3e,

4e trimestres, anonyme, 1926.

ANN-1 E10-21- Colonie du Niger. Cercle de Niamey : rapport politique annuel du

cercle de Niamey, anonyme, 1926, 10p.

ANN-1 E10-23- Colonie du Niger. Cercle de Dosso : rapport politique annuel, anonyme,

1926.

ANN-1 E10-31- Colonie du Niger. Cercle de Dosso. Politique indigène :

correspondance avec Dosso, anonyme, (1924- 25-26- 1933).

ANN-1 E10-32- Colonie du Niger. Cercle de Dosso : rapport politique annuel,

anonyme, 1927.

ANN-1 E10-33- Colonie du Niger : rapport politique annuel, anonyme, 1928, 37p.

ANN-1 E10-34- Colonie du Niger. Cercle de Niamey : rapport politique annuel du

cercle de Niamey, anonyme, 1927, 22p. Recensement de la partie ouest de

la subdivision, anonyme, 1927, 4p.

ANN- 5.2.4- Renseignements politiques : mois de Novembre, Avril et Décembre,

anonyme, 1944.

ANN- 5.5.1- Revue des évènements du deuxième trimestre trimestre, anonyme, 1947. 13p.

ANN- 5.5.2- Bulletin mensuel de renseignements mois d‟août, anonyme, 1948, 3p.

316
ANN- 5.5.3- Bulletin mensuel de renseignements extraits octobre 1950- février 1951,

anonyme, 8p.

ANN- 5.5.4- Bulletin mensuel confidentiel juillet, anonyme, 1951, 3p.

ANN-5.6.2- Liste des familles du canton de Dosso installées dans le cercle de Niamey,

anonyme, 1946,3p.

ANN-5.6.6- Rapport annuel sur l‟assistance médicale et le service de l‟enseignement,

anonyme, 1953, 10p.

ANN-5.7.1- Extrait de lettre adressée par le chef de Bataillon à l‟adjoint commandant le

poste de Dosso portant limites géographiques des commandements d‟Aouta et

de Baïro, 1901.

ANN-5.7.2- Renseignements in extenso de la correspondance départ 19 février 1900- 3

mars, anonyme, 1902.

ANN-5.7.3- Cahier de correspondances : commencé le 1er février 1908 et terminé le 30

décembre 1909, 520 lettres envoyées, anonyme.

ANN-5.7.4- Correspondance MARSAUD transmise au lieutenant Colonel commandant le

territoire (arrivée), Niamey, 1909.

ANN-5.7.5- Correspondance (arrivée) LE BLOND adressée au commandant de la région

de Niamey, 1909.

ANN-5.7.6- Dosso- correspondances, anonyme, 1916- 1924.

ANN-5.7.7- Dosso- arrivé, accusé de réception des tournées anonyme,, 1943.

ANN-5.7.8- Dosso : Télégrammes, lettres officielles, 1943.

ANN-5.8.1 Extrait registre d‟écrou de Gaya, anonyme, 1934.

ANN-5.8.1 bis- Essai de quelques coutumes Djerma- Goubé, anonyme, 1951- 1953.

ANN-5.8.2- Liste des villages et groupements Peulh de la subdivision de Gaya, anonyme,

1946.

317
ANN-5.8.2 Bis- La question de Koulou et du Sambéré et historique du Dendi, anonyme,

1946.

ANN- 22.2.1- Rapport du Capitaine BUCK, commandant du cercle de Tillabéry, sur la

situation politique et administrative du cercle pendant le mois de mars 1909,

2p.

ANN- 22.2.2- Rapport du Capitaine FIGARET commandant le cercle de Tillabéry sur la

politique du cercle pendant le mois de novembre 1909, 2p.

ANN- 22.2.3- Rapport politique du mois de juin du cercle de Tillabéry, anonyme, 1910,

10p.

ANN- 22.2.5- Rapport politique de la subdivision de Tillabéry, anonyme, 1927, 12p.

ANN- 22.2.6- Rapport politique de la subdivision de Tillabéry par Schmitt 1928, 19p.

ANN- 22.2.7- Rapport politique concernant l‟ouverture de la subdivision de Téra créée par

l‟arrêté local nº126 du 3 novembre 1933, anonyme, 13p.

ANN- 22.2.8- Bulletin de renseignements politiques des 2e, 3e et 4e trimestres du cercle de

Tillabéry, anonyme, 1931, 2p.

ANN- 22.2.9- Bulletin de renseignements politiques de la subdivision de Tillabéry,

anonyme, 1931, 2p.

ANN- 22.2.10- Bulletin de renseignements du 2e et 3e trimestre de la subdivision de Téra,

anonyme, 1931, 2p.

ANN- 22.1.11- Bulletin de renseignements des 1ers, 2e, et 3e trimestres 1932 et rapport

politique du 4e trimestre.

ANN- 22.2.12- Rapport politique du 1er trimestre 1933, anonyme, 2p.

ANN- 22.2.13- Bulletin de renseignements politiques des 2e et 3e trimestres du cercle de

Tillabéry, anonyme, 1933, 7p.

ANN- 22.2.14- Rapport politique annuel par le commandant du cercle GRABY, 1933, 20p.

318
ANN- 22.2.15- Rapport politique trimestriel d‟ensemble, situation politique pendant le 2e

trimestre 1937, anonyme, 4p.

ANN- 22.2.16- Bulletins mensuels de renseignements des mois d‟avril, septembre, juillet

et août 1944, 2p.

ANN- 22.2.17- Bulletin mensuel de renseignements du mois de décembre, 1946,

anonyme, 1p.

d - Rapports de Tournées

ANN-1 E1-7- 3e Territoire Militaire. Cercle du Djerma. Poste de Dosso : rapport annuel du

poste de Dosso en 11 parties et un plan d‟ensemble du poste de Dosso,

anonyme, 1901, 6p.

ANN-1 E1-9- 3e Territoire Militaire : rapport du commandant GOURAUD sur la région

Ouest du 3e Territoire Militaire, 1901, 24p.

ANN-1E1.17- Cercle du Djerma : secteur de Dosso : rapport de tournée dans le nord-ouest

du secteur, anonyme, du 06 au 15 mars, 1902.

ANN-1 E1-29- Colonie du Dahomey et Dépendance, cercle de Say : rapport annuel 1903

du cercle, commencé le 1er mars 1904, terminé le 31 mars 1904 par

l‟administrateur H- LOUSTEAU, 38p.

ANN-1E1.33- Territoire Militaire : rapports de tournée effectuée par le lieutenant

ARMERICH, commandant le 3è territoire militaire dans l‟intérieur du

territoire, 1904.

ANN-1E2.9- Cercle de Dosso : rapport sur la tournée exécutée du 09 mars au 22 avril par

le lieutenant HARBER, commandant le cercle, 1901.

ANN-1E3.1- Territoire Militaire du Niger. Cercle du Djerma. Secteur de Dosso : rapport

319
sur la tournée effectuée dans le canton de Kiota par le lieutenant

POMSARD, commandant le cercle, octobre, 1906.

ANN-1E3.9- Cercle de Djerma : rapport sur la tournée effectuée dans le sud du Djerma par

le capitaine SALAMAN, commandant le cercle, du 18 au 28 octobre 1906.

ANN-1E3.10- Territoire Militaire du Niger. Cercle de Djerma : rapport sur la tournée

effectuée dans le secteur de Sandiré et le canton de Matankari par le

lieutenant, commandant le cercle, 1906.

ANN-1E3.11-Territoire Militaire du Niger. Cercle de Djerma : rapport de tournée du

capitaine SALAMAN, du 16 juillet au 1er août 1906.

ANN-1E3.12- Région de Niamey. Cercle de Djerma : rapport de tournée administrative du

capitaine SALAMAN, du 25 novembre au per décembre 1906 dans le canton

de Birni.

ANN-1E4.8- Cercle de Djerma : rapport de tournée administrative du commandant du

cercle, du 5 au 20 avril 1907.

ANN-1E4-9- Territoire Militaire du Niger. Région de Niamey. Cercle du Djerma : rapport

sur les tournées effectuées du 27 au 30 janvier 1907, par le lieutenant

commandant le cercle du Djerma, 3p.

ANN-1E4.10- Territoire Militaire du Niger. Région de Niamey. Cercle de Djerma :

compte-rendu de la tournée du sous-lieutenant VIMARD, au commandant

de cercle, du 5 décembre au 15 janvier 1907.

ANN-1E5.9- Cercle du Djerma, région de Say : compte-rendu sur la tournée exécutée dans

la région de Say par le sergent MORLON, du 13 au 29 mai 1908.

ANN-1E5.31- Région de Niamey : tableau de renseignements se rapportant à la tournée du

chef de Bataillon RIVET, commandant de la région du 10 au 14 janvier

1909.

320
ANN-1E5.32- Région de Niamey : rapport sur la tournée d‟inspection dans les cercles du

Djerma et de Dosso du chef de Bataillon RIVET, du 14 janvier au 3 février

1909.

ANN-1E5.43- Cercle du Djerma : rapport sur une tournée administrative du commandant

du cercle du Djerma, du 5 au 20 avril 1909.

ANN-1E7.20- Cercle de Say : compte-rendu de la tournée dans les provinces de Youri et

de Lamordé par l‟administrateur, commandant du cercle, du 3 au 14 juin

1909.

ANN-1E7.32- Cercle de Niamey : rapport sur la tournée exécutée par le sous-lieutenant

TRUFFY, dans le cercle de Niamey, du 15 mars au 28 avril 1914.

ANN-1E7.33- Cercle de Niamey : rapport de tournée dans le cercle de l‟administrateur,

commandant du cercle, du 19 octobre au 19 décembre 1914.

ANN-1E7.40- Cercle de Dori : rapport sur la tournée effectuée dans le Yatacala par le

commis de 2ème classe des affaires indigènes, FLOIRAT, du 2 au 25 juin

1915.

ANN-1E7.43- Cercle de Dori : rapport sur la tournée effectuée dans le Liptako par le

commis de 2ème classe des affaires indigènes, FLOIRAT, mai 1915.

ANN-1 E10-38- Colonie du Niger. Cercle de Dosso : rapport de tournée effectuée

dans la subdivision de Dosso par l‟adjoint BLANCHIER en vue du

recensement de la partie Ouest de la subdivision.

ANN- 1E 17.83- Subdivision centrale de Niamey : rapports de tournées effectuées de 1934

à 1946 dans le canton de N‟Dounga par l‟administrateur BERGER.

ANN- 22.3.1- Extrait du rapport de tournée les limites Tillabéry- Dori par PRUDON,

1927, 3p.

ANN- 22.3.2- Rapport sur la tournée effectuée par M. PAMBRUM du 4 octobre au 21

321
octobre 1927, dans le canton de Diagourou, 2p.

ANN- 22.3.3- Rapport de tournée par M. PAMBRUM du 5 août au 6 septembre dans le

canton de Dargol en vue du recensement de la population, 1927, 2p.

ANN-22.3.5- Rapport de tournée effectué par l‟administrateur SCHMITT du 11 au 15

novembre 1928 dans la subdivision de Tillabéry.

ANN-22.3.9- Rapport de tournée effectuée par l‟administrateur SCHMITT à Sansané

Haoussa et Gothèye 1928.

ANN-22.3.11- Liste des tournées effectuées depuis le début de l‟année 1928 dans le cercle

de Tillabéry, anonyme.

e- Affaires Musulmanes

ANN-4E1.1- Territoire Militaire du Niger. Revue de la presse musulmane : compte-rendu

analytique. Direction des affaires musulmanes, 1907.

ANN-4E1.2- Territoire Militaire du Niger. Revue de la presse musulmane : compte-rendu

analytique. Direction des affaires musulmanes, 1908.

ANN-4E1.3- Colonie du Niger. Revue de la presse musulmane : compte-rendu

analytique. Direction des affaires musulmanes, 1909.

ANN-4E1.6- Colonie du Niger. Revue de la presse musulmane : compte-rendu

analytique. Direction des affaires musulmanes, 1910.

ANN-4E1.7- Colonie du Niger. Revue de la presse et des questions musulmanes : compte-

rendu analytique. Direction des affaires musulmanes, 1910.

ANN-4E1.8- Colonie du Niger : affaires musulmanes. Direction des affaires musulmanes,

1910.

ANN-4 E2-6- Colonie du Niger. Direction des affaires politiques et administratives :

322
affaires musulmanes 1910-1911.

ANN-4E2.11- Ministère des colonies : revue de presse et des questions musulmanes.

Direction des affaires musulmanes, 1914.

ANN-4E2.12- Colonie du Niger : revue de presse et des questions musulmanes. Direction

des affaires musulmanes, 1915.

ANN- 4 E2-14- Ministère des colonies, affaires musulmanes : revue de la presse

musulmane : compte- rendu analytique des mois de : avril, juillet, août,

octobre, décembre 1912.

ANN-4E2.15- Colonie du Niger : pèlerinage à la Mecque : circulaires, compte-rendus.

Direction des affaires musulmanes, SD.

ANN-4E2.16- Ministère des colonies : revue de presse et des questions musulmanes.

Direction des affaires musulmanes, 1915.

ANN- 4E2- 18- Colonie du Niger. Affaires musulmanes : correspondances diverses 1915-

1916.

ANN- 4E4-1- Ministère des colonies. Affaires musulmanes : revue de presse et des

questions musulmanes : compte-rendu analytique du 1er décembre 1916.

ANN-4E4-2- Ministère des colonies. Affaires musulmanes : procès verbal de la séance de

la commission interministérielle des affaires musulmanes du 8 juin 1916.

ANN-4E4-3- Ministère des colonies. Affaires musulmanes : procès verbal de la séance de

la commission interministérielle des affaires musulmanes du 10 juin 1916.

ANN-4E4-9- Territoire militaire du Niger. Cercle de Niamey : bulletins de renseignements

sur les marabouts.

ANN-4 E4-12- Ministère des colonies. Affaires musulmanes : revue de presse et des

questions musulmanes : compte- rendu analytique des mois de : janvier,

avril, mai 1918.

323
ANN-4E5-1- Ministère des colonies : revue de presse et des questions musulmanes :

compte- rendu analytique des mois de : mars, avril, mai, juin, juillet, octobre,

novembre 1919.

ANN-4E5- 2- Ministère des colonies. Affaires musulmanes : compte rendu analytique des

mois de : janvier, février, mars, avril, mai, juin, août, octobre, novembre,

décembre, 1920.

ANN-4E5- 3- Ministère des colonies. Affaires musulmanes : revue de presse et des

questions musulmanes : compte rendu analytique des mois d‟ avril, octobre,

novembre 1921.

ANN-4E7- 2- Ministère des colonies. Affaires musulmanes : revue de presse et des

questions musulmanes : compte rendu analytique des mois de : avril, mai,

juin, juillet, septembre, octobre, novembre, décembre 1922.

ANN-4E7- 2- Ministère des colonies. Affaires musulmanes : revue de presse et des

questions musulmanes : compte rendu analytique des mois de : janvier,

février, mars, juillet, septembre, octobre, novembre et décembre 1923.

ANN-4E8-1- Colonie du Niger. Institut musulman de Paris : correspondance relative aux

affaires musulmanes 1923.

ANN-4E8-2- Ministère des colonies. Affaires musulmanes : revue de presse et des

questions musulmanes : compte rendu analytique des mois de : mars, avril,

mai, juin, juillet, août, septembre, octobre, décembre 1924.

ANN-4E8--3- Ministère des colonies. Service des affaires musulmanes : revue de presse et

des questions musulmanes : compte rendu analytique du 15 janvier au 1er

septembre 1925.

ANN-4E9-3- Ministère des colonies: affaires musulmanes: revue de presse et des questions

musulmanes. Compte- rendu analytique du 15 janvier au 1er septembre 1925.

324
ANN-4E9-4- Ministère des colonies. Direction des affaires politiques, 1er bureau : note sur

la propagande révolutionnaire intéressant les pays d‟outre-mer, 1925.

ANN-4 E10-3- Ministère des colonies. Direction des affaires politiques : affaires

musulmanes, 1928.

ANN-4 E10-9- Colonie du Niger. Cercle de Tillabéri : marabouts et personnages influents,

1932- 1944.

ANN-4 E11-1- Ministère de la guerre- Etat- Major de l‟Armée- Afrique- Orient et

colonies : bulletins de renseignements sur les questions musulmanes de

janvier à décembre 1931.

ANN-4 E11-3- Ministère de la guerre- Etat- Major de l‟Armée- Afrique- Orient et

colonies : bulletins de renseignements sur les questions musulmanes de

janvier à décembre 1932.

ANN-4E-12-1- Colonie du Niger- Cercle de Dosso : marabouts et personnages influents

1932- 1944.

3- Les Archives du Nord Nigeria

a - Les Archives d’Arewa House (Kaduna)

PJS1/9/78- Rebates in the Sokoto Caliphate selected studies, 1903-1904.

PJS1/23/184- Africa vol 53 nº1- 1983. 7- Reflexions in the Economic interdependence of

the regions of Niger and Kano, 1983.

PJS1/46/HIST-15- What hope for traditional rulers in the governance of Nigeria?

Social and Economic rules of Hausa long distance traders in the Gold

Coast, 1903- 1970.

325
b - National Archives of Kaduna

SOK PROF 2/1

NAK- SOK – 7/1903- Report n0 1 OF 3 Ist March 1903 on Sokoto province, 1903.

NAK- SOK – 23/ 1903- Report 2/1903 of April 30, 1903 on Sokoto province, 1903.

NAK- SOK – 34/ 1903- Report n0 3 of 3 Ist May 1903 on Sokoto province, 1903.

NAK- SOK – 58/ 1903- Report n0 5 of Ist July 1903 on Sokoto province, 1903.

NAK- SOK – 129/ 1903- Report n0 8/ 1903 dealing with a tour during July, August

and part of September, 1903.

SOK PROF2/2

NAK- SOK – 51/ 1904- Sokoto province- report for January and February 1904.

NAK- SOK – 101-/ 1904- Sokoto report for March 1904.

SOK PROF 2/3

NAK- SOK –`190/ 1905- Report n0 23 on Sokoto province for the month of

February 1905.

NAK- SOK – 260/ 1905- Report n0 24 on Sokoto province report for months of

March and April 1905.

NAK- SOK – 315/ 1905- Report n0 25 on Sokoto province for months of May and

June 1905.

NAK- SOK – 401/ 1905- Report n0 22 for month of January 1905.

NAK- SOK – 575/1905- Report n0 26 on Sokoto province for months of July and

August 1905.

NAK- SOK – 756/ 1905- Report n0 27 on Sokoto province for months of

September and October 1905.

326
SOK PROF 2/4

NAK- SOK – 85/ 1906- Report n0 28 on Sokoto province for months of November

and December 1905.

NAK- SOK – 625/ 1906- Report n0 30 on Sokoto province for quarter June 30,

1906.

NAK- SOK – 758/ 1906- Report n0 29 on Sokoto province for quarter ending March

3 Ist 1906.

NAK- SOK – 977/ 1906- Report n0 31 on Sokoto province for quarter ending

September 30th 1906.

SOK PROF 2/5

NAK- SOK – 50/ 1907- Report n0 32 on Sokoto province for quarter ending

December 1906.

NAK- SOK – 86/ 1907- Annual report n0 3 on Sokoto province for the year ending

December 3 Ist 1906.

NAK- SOK – 343/ 1907- Report n0 33 on Sokoto province for quarter ending March

3 Ist 1907.

NAK- SOK – 610/ 1907- Report n0 34 on Sokoto province for quarter ending June

30th 1907.

SOK PROF 2/6

NAK- SOK – 39/ 1908- Annual report n0 4 on Sokoto province for the year ending

December 3 Ist, 1907.

NAK- SOK – 985/ 1908- Report n0 36 on Sokoto province for half year ending

June, 3 Ist 1908.

NAK- SOK – 1453/ 1908- Report n0 35 on Sokoto province for quarter ending 3 Ist

1907.

327
SOK PROF 2/7

NAK- SOK – 78/ 1909- Sokoto Division- Report n0 1 1909.

SOK PROF 2/10

NAK- SOK – 152P/ 1913- Sokoto province report (annual) 1912.

SOK PROF 2/11

NAK- SOK – 581/ 1914- Annual report Sokoto, Gandu and Argungu Divisions 1914.

SOK PROF 2/15

NAK- SOK – 555/ 1918- Annual report n0 14 for the Sokoto province for the year

ending 3 Ist, December 1917.

SOK PROF 2/19

NAK- SOK – 265/ 1922- Sokoto- Annual report for 1922.

SOK PROF 2/23

NAK- SOK – 66/ 1926- Gwandu- Argungu Boundary dispute 1926- 32.

328
BIBLIOGRAPHIE

329
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353
Table des cartes

No Titres pages
No 1 Lieux d‟enquêtes 16
No 2 Etat de l‟islamisation dans l‟Ouest du Niger à la fin du XVIe 68
siècle
No 3 Centres d‟études islamiques de l‟Ouest du Niger du XVIe au 87
XIXe siècle
No 4 Localisation du département de Birni N‟Gaouré ou Boboye dans 93
l‟Ouest du Niger
No 5 Les principaux villages historiques du Boboye 135
No 6 Localisation de Say dans l‟Ouest du Niger 151
No 7 Itinéraire de Mahaman Diobbo 159
No 8 Aire d‟influence de Mahaman Diobbo 208
No 9 Localisation du canton de Sinder 243
No 10 Les religions dans l‟Ouest du Niger à la fin du XIXe siècle 287

354
Table des photos et illustrations

No Titres Pages
No 1 La tombe de Boubacar Louloudji à Tamkalla 118
No 2 La tombe de Yacouba Nabamé à Argoungou 132
No 3 Issa Ko à Boumba 147
No 4 Arewa House 413
No 5 Bibliothèque Abdullahi Fodiyo à Sokoto 414
No 6 Tambours de guerre 415
No 7 Liste des souverains du Nord Nigeria ayant pris l‟étendard du 416
Jihad à Sokoto
No8 La tombe d‟Abdullahi Toga à Argoungou 417
No 9 Echantillons d‟armes de guerre des Kabbawa 418
No 10 Echantillons d‟étendard du Jihad 419

355
ANNEXES

356
ANNEXE 1 : CHANT RELIGIEUX DE MAHAMANE

DIOBBO

357
CHANT 1 : Urru faaba Appel au secours

Koy ma salli, salli boobo Dieu bénisse, de beaucoup de bénédictions

Ga Muhammadu nda sahaabey Mohamed et ses compagnons

Ha kaza haala kut‟ bu hu Ainsi que tous les porteurs de livres sacrés

Ay ga urru, urru boobo J‟appelle au secours, d‟un appel insistant

5 Ya Ilahi, urru faaba O Seigneur, porte- nous secours

Ay ga urru, faabakow ku J‟appelle au secours, le secoureur tarde

Faaba tamba wakti yoη ku Au secours ! C‟est assez d‟attente

Gaahamey beri jinde yoη ku Les corps se sont amaigris et les cous allongés

Borciney koy tuuri yoη ku Les nobles sont réduits à ramasser du bois

10 Ya Ilahi, urru faaba O Seigneur, porte- nous secours

Faaba tamba almaney ben Secours – nous vite, le bétail est décimé

Haw koyey naη zama haw ben Les bergers n‟en sont plus, faute de troupeau

Barikarey go kaaru heri ben Voici les cavaliers mais, point de monture

Iri ga jirbi farmi mana ben On est contraint à dormir en saison de culture

15 Ya Ilahi, urru faaba O Seigneur, porte – nous secours

Wande kooga kurηe na fay L‟époux a divorcé l‟épouse maigre

Kurηe kooga wande na a fay L‟épouse a divorcé l‟époux maigre

Bagna laala na nga koy fay Le mauvais esclave a renié son maître

Zamana diina mo na koy fay Et la religion, aujourd‟hui, s‟est écartée de voie de Dieu

20 Ya Ilahi, urru faaba O Seigneur, porte – nous secours

358
Wande henna kurηe wonga L‟épouse vertueuse est repoussée par le mari

Ize henna baaba wonga L‟enfant vertueux est repoussé par le père

Kayne henna beere wonga Le cadet vertueux est repoussé par l‟aîné

Borcino mo haawi wonga Et le noble est repoussé par l‟honneur

25 Ya Ilahi, urru faaba O Seigneur, porte – nous secours

Zati warga juuwu na ben L‟embonpoint est emporté par la faim

Zanka kayney wakti ni ben La jeunesse est emporté par l‟âge

Seeku zeeney ciiti ni ben Les vieillards sont emportés par la mort

Ya Ilahi, urru faaba O Seigneur, porte – nous secours

30 Borciney ye Bagna yon ra Les nobles se sont confondus aux esclaves

Arwasey ye arkusey‟ra Les jeunes se sont confondus aux vieillards

Alborey ye woyborey ra Les hommes se sont confondus aux femmes

Alfagey ye jaahiley ra Les savants se confondus aux ignorants

Ya Ilahi, urru faaba O Seigneur, porte – nous secours

35 Taali kaη i te, i dirgana ko Le mal qu‟ils font, ils l‟oublient aussitôt

Gomni kaη Ni te, i dirgana ko Le bien que Tu fais, ils l‟oublient aussitôt

Baani kaη Ni te, i dirgana ko La bonté dont Tu fais montre, ils l‟oublient aussitôt

Adunnia zumbu windi ra ko La fin du monde se profile déjà dans les familles

Ya Ilahi, urru faaba O Seigneur, porte – nous secours

40 Ya Ilahi, tuubi tuubi O Seigneur nous nous repentons

359
Marsan wo ya iri ga tuubi Maintenant nous nous repentons

Day ma yaafa kullu wambi Pardonne- nous tous nos péchés

Ay ma yaafa day ma jaabi Je formule des vœux, exauce- les

Ya Ilahi, urru faaba O Seigneur, porte – nous secours

45 Marsa wo ya hayna na ciindi Maintenant il ne reste plus grand- chose

Hundi joote fo ka cindi On n‟a de crainte que pour le salut

Nuuna joote fo ka cindi On n‟a de crainte que l‟enfer

Adunnia baayoη mana cindi Il ne reste plus grand – chose du monde

Iri biney ra, urru faaba Dans nos cœurs, porte – nous secours

50 Hundi joote fo ka cindi Toute âme retournera à Dieu

Gaabi kulu dak ye ka koy ko Tout pouvoir retournera à Dieu

Jinay kulu dak ye ka koy do Toute chose retournera à Dieu

Binay kulu dak ye ka koy do Les propos discourtois nous les cessons

Ya Ilahi, urru faaba O Seigneur, porte – nous secours

55 Lawzu laala iri na naη ne Nous clamions : que vaut un tel

Iri ga lawzu may ti waane Ici et là nul n‟a rien à dire

Ne nda ne wo boro si ci ne Personne ne peut nous en imposer

Hundi kulu dak wone ka si ne Aucune âme ne peut nous en imposer

Iri na wo naη, tun ka faaba De telles attitudes nous les cessons, porte – nous secours

60 Lawzu laala iri na feetu Les propos discourtois nous les écartons

Iri ga lawzu iri si koy tu Nous clamions : nous refusons de répondre

360
Kaadi ceeyoη ba nda sawtu En plus des terres nous commandons aux hommes

Kala ma gurjay zaara kortu Au mépris de toute légalité

Iri na wo naη, tun ka faaba De telles attitudes nous les cessons, porte – nous secours

65 Lawzu laala iri na barray Les propos discourtois, nous nous en gardons

Iri ga lawzu iri ga labu may Nous clamions: ces terres là sont à nous

Laabu banda iri ga boro may En plus des terres nous commandons aux hommes

Koonu- Koonu sariya mana may Au mépris de toute légalité

Iri na wo naη, tun ka faaba De telles attitudes nous les cessons, porte- nous secours

70 Lawzu laala iri na barray Les propos discourtois nous les écartons

Iri ga lawzu waane ba ni Nous clamions : un tel t‟est supérieur

ηda baaba waane ba ni De mère et de père il t‟est supérieur

Wojhu kulu ga a ga ba ni En toute chose il t‟est supérieur

Iri na wo waη, tun ka faaba De telles attitudes nous les cessions, porte – nous secours

75 Ay ga ci wor se, wor ma wo bay Je vous le dis, écoutez bien

Sillubaawey, Maamudu izey Silloubé, descendants de Mamoudou

Kurtabankey, Waakara izey Kourté, descendants de Wâkara

Sirfikundey, Alhadji izey Sirfi- Koundé, descendants de Al Hadji

Ya I filla fi nasaaba Tel que dit dans la généalogie

80 Cafari asiley, Soni Ali izey Les mécréants de souche, descendants de Soni Ali

Ha kaza ya igandazayzey De même que les Igandawey

Cindi mo har gurbatayzey D‟aucuns ajoutent les Gourmantché

361
Ha kaza yorbotayzey De même que les Yoruba

Woy ka saw- saw bi‟ sawa aba Ceux – là se sont écartés de la Voie

85 Hawsa bi tik Soni Ali izey La rive gauche est animiste par les descendants de Soni Ali

Gurma casu ra igandawayzey Le long de la rive droite aussi, par les Igandawey

Gurma ziji ra gurbatayzey Les terres plus éloignées également, par les Gourmantché

Gurma sarkuw yorbotayzey Et la partie Est par les Yoruba

Ya i sintin, hala dumo ba Ainsi se sont- ils installés avant de se multiplier

90 Senni wo ne wangu banda Cette Voie qui s‟est frayée par la guerre

Kaη a zumbu bangu banda Après sa révélation au- delà des mers

Melle- koy boη tuubi senda Le chef de Melle s‟y est converti difficilement

Melle tuubi fuuta banda Mellé s‟est converti à la suite du Fouta

Iri ma tuubi, asili tuuba Convertissons- nous de la meilleure manière

95 Asili tuubi fil magaribi Tel que cela se fit à l‟Ouest

Tooru- dunkey jin ka jaabi Avec le Toro qui se convertit tôt

Zamana banda Silla jaabi Bien après ce fut Sylla

Silla banda gibla jaabi Après Sylla le levant se convertit

Wangu ye yoη Borno tuuba Mais le Bornou ne se convertit que par la guerre

100 Ukuba ce day Toro jaabi A l‟appel d‟Oqba, le Fouta- toro se convertit

Melle kulu duk ka ka jaabi Toute la région de Mellé se convertit

Gibla kulu duk ka ka jaabi Tout le levant se convertit

Bambarankey zanji jaabi Les Bambara refusèrent de se convertir

Cafari yoη no, i wongu tuba Ce sont des mécréants, ils refusèrent la Foi

362
105 Ukuba tangam bamba kayri Oqba combattit et défit Bamba

Bamba banda Gulbi kayri Après Bamba Gulbi tomba

Gulbi banda Koyri kayri Après Gulbi Koyri tomba

Koyri banda Jaaja kayri Après Koyri Djâdja tomba

Diina yulwa zamana Ukuba Et la Foi prospéra du temps d‟Oqba

110 Oqba banda fatara fo ka Après Oqba vint une période

Fuuta cindo zamana na i ka Certains du Fouta apostasièrent

Melle cindo zamana na i ka Certains de Melle apostasièrent

Gibla cindo zamana na i ka Certains du Gibla apostasièrent

Diina riihun baada Ukuba religion relâcha après Oqba

115 Ukuba banda Woyyu kaaru Après Oqba, Woyyu enfourcha

Daatu zankey ma i kaaru Les gens de Dâtou apprirent

Tooru melley ma i kaaru Les fétichistes de Melle apprirent sa venue

I koy ka gaayi maliku Bamba Ils coururent voir le roi de Bamba

120 Cindi yoη koy koyri here ga Certains partirent vers Koyri

Cindi yoη koy kelsi here ga D‟autres partirent vers Kelsi

Cindi yoη koy Jaaja here ga D‟autres partirent vers Jaaja

Maliku Bamba bu a na tuba Le roi de Bamba mourut sans s‟être converti

125 Woyyu zamana ay nda zor no Nous étions ensemble du temps de Woyyu

Daatu zamana ay nda wor no Nous étions ensemble du temps de Daatu

363
Iri dumo lansaaru dumo no Nous sommes de la communauté ansâr

Hay wa wo naη wor ma tuuba Cessez ces mauvaises attitudes et repentez- vous

130 Zama soηaare da ga laala Parce que les Soηey sont redoutables

A sabbu gande iri ga laala On nous croit redoutables

Jine borey do iri ma laala Par nos ancêtres nous ne sommes point redoutables

Marsan binde iri ga laala Mais à présent nous sommes redoutables

Taarik iri se iri ma tuuba Retrace – nous l‟histoire afin qu‟on se convertisse

135 Iri se te koy sonko tooηe Nous ne serons pas chef pour éviter les provocations

Iri si ciiti sonku tooηe Nous ne rendons pas la justice pour éviter les provocations

Iri si bolηay sonku tooηe Nous ne serons pas marchand pour éviter les provocations

Iri si heri fay sonku tooηe Nous ne nous partageons pas pour éviter les provocations

Say fa waazu iri ma tuba Uniquement le prêche afin de nous convertir

140 Ay salaη ya wor ga seede J‟ai dit, et vous êtes témoin

Da iri ga boori Koy ga seede Si nous oeuvrons du bien, Dieu est témoin

Da iri si ga boori Koy ga seede Si nous oeuvrons du mal, Dieu est témoin

Alciyooma jama seede Au Jour Dernier les gens témoigneront

Zaari din ra goy ga bamba Ce Jour- là nos oeuvres nous distinguerons

145 Alciyooma do iri ga jaaje Nous serons tous au Jugement Dernier

Jama hinza no jaaje Trois groups s‟y retrouveront

Yeeji- Kaarey kulu jaaje Les taureaux de race y seront

Yaawore arey mo ga jaaje Les taurillons y seront

Mali beery kulu ma bamba Et on distinguera les chameaux porteurs

364
150 Hay wa lakkal senni wo se Prêtez attention à mon propos

Da wor ta ciiti iri taw or se Nous acceptons vos jugements

Da iri ta ciiti wor si ta iri se Vous contestez nos jugements

Wor ga zici dan hini ka si iri se Vous nous croyez faibles

Kibru ganda baada tuuba Par orgueil ; et ce après profession de foi

155 Deene senni manti hanga Le propos n‟est pas signe de Foi

Dumi sahiihi manti hanga L‟ascendance noble n‟est pas signe de Foi

Amuru goy yoη manti hanga Accomplir ce qui est prescrit, c‟est cela la Foi

Naayu naη yoη day ti hanga Renoncer à l‟interdit, c‟est cela la Foi

Woy ka sintin inda baaba Ainsi l‟avaient fait nos prédécesseurs

Hanga kaη ra zulmu duumi Ceux dont la Foi est d‟injustice mêlée

Hanga kaη ra kibru duumi Ceux dont la Foi est d‟orgueil mêlé

Hanga kaη ra ujubu duumi Ceux dont la Foi est de fierté mêlée

Woy ka mulsu bi- sawaaba Ceux – là sont des perdants

160 Da wor ga bay da addiina fooma Si vous saviez la Voie de la Foie

Manti ya no wor ga goy nda Vous n‟agiriez point de la sorte

Borcinizey wanji fonda Les nobles refusent la Voie

Kaη ga fooma diina ganda Eux qui se vantent de Foi

Gaahamey kulu farhu baaba Bien qu‟ayant une ascendance modèle

165 Da ni ga fooma nasabu fooma Si tu te vantes de ta naissance

365
Da ni ga fooma gomni fooma Si tu te vantes de ta générosité

Da ni ga fooma gaabi fooma Si tu te vantes de ta force

Da ni ga fooma ibaada fooma Si tu te vantes de ta Foi

Alciyooma do a ga bamba Le Jugement Dernier Tranchera

170 Iri ga talfi baaba – beri Nous nous confions à notre père vertueux

Ha kaza ya beere- beeri Ainsi qu‟à notre aîné vertueux

Iri ga talfi inna – beeri Nous nous confions à notre mère vertueuse

Ha kaza ya kayne- beeri Ainsi qu‟à notre cadet vertueux

Ay ga kay ne, horayo ba. J‟arrête- là, c‟est assez de reproches.

Composé par Alfa Mahaman Diobbo

Rapporté par Alfa Agano

Traduction : Soumana Abdourahame chargé des affaires culturelles à l’ambassade

des Etats – Unis au Niger.

366
ANNEXE 2 : Chant religieux d’Ousmane Dan Fodio

367
„’Gimmul SĖKHO OTHMANO.

GIMMUL SĖKHO OTHMANO SONG OF SHEIKH OTHMAN

ALLÁHO lámido dum essalato burdo fuk- GOD, the lord, he excels all in superi-

Ka rity:

Domáda yá A‟hmedu Jenido lesde fuk- He is greater than you, A‟hmed (Moham-

Ka med); his light illumines the whole earth.

Alláho gettaini omóje omojίnde neïmmo I praise the Lord God, who sent his

fukka blessing (mercy ?)

Neloimo A‟hmedu hinne kúbdo takélle He sent A‟hmed to all his reatures.

fukka

Annóro makko yokám wóni ásseli tákeli His light shines over all his creatures:

fukka:

Annóro hakkillo non annóro gide fukka: the light of intelligence, as well as that

of sight, all comprising:

Annñro Imáni Mumenίye toháute fukka; the splendor of the Imam of the Faithful

Reaches every where;

Annóro yίmbe Wiláya ka ánnaba ko fuk- all splendor of the Weli (holy men)

ka and of the prophets;

Nange he leuru he móbgel jenatódi fuk- and when sun and moon unite all that is

Ka, splendid,

Fandáki ússuru jellimmádo fukka. Their light does not reach His resplendence.

Alláho burnerί I‟brahim tákele fukka. God blessed Abraham among the whole

Of his creatures.

Bolίdel wolwίde Músa der togéfe fukka. Moses obtained eloquence among man-

368
Kind.

Ahñkki I‟sa bosémbido roibo róho fukka. To Jesus was given strength and spirit.

Amñbda mágriki bñluki non boyίde fuk- Thou hast obtained a sight of Him (of God);

Ka thou hast obtained eloquence and authority.

Alláho kamsñdi A‟damu der togéfe fuk- God has distinguished Adam Among all

ka Mankind.

Nan súbtedί Núhu I‟brahίma woddu fuk- Thus Noah and Abraham were distinguished

ka in all their dealings;

Kuréshe Háshimo derbalejo makko fukka. Kuresh and Hashem in their dwellings.

Wolláhe ansúbtida Alla fukka. By God thou hast been distinguished over

All God‟s creatures.

Toggéfo Alla bedó bébelés hekalfinima All the creatures of God, in heaven and

On earth, bless thee.

Toggéfo Alla bedó bébélés hetammihi- all the creatures of God, in heaven and on

ma: earth, praise thee:

Toggéfo Alla bedó bébélés bebé chappe- all the creatures of God, in heaven and

Nίma: on earth, salue thee :

Toggéfo Alla bedó bébélés hedótania: all the creatures of God, in heaven and

On earth, do homage to thee:

Kaunay halfenίma awesίle tákele fukka: all that is blessed in creation is blessed

Through thee:

Subábe der talékelle fú ίdemá gamίdemá all those who have been distinguished

bechúbba: among the creatures, have been distin-

guished on thy account:

Libábe der takélle fú gam gaigumá be- all that has been created, has been created

369
lίba. Through thy grace.

Ajéjiam ojúdiam gardoumi dótoma no- On account of thy blessing have I come

némbo: to thee:

Gam nómbo hajá mererrétadúm tomá. For such a purpose have I addressed thee.

Gam derje mábe (mada) deum turoye May God hear my prayer through thy

dwaίjima. grace.

Chant tiré de l‟ouvrage de Barth, Travels and discoveries

Pp 636- 637 (APPENDIX III).

Traduction

Dieu, le Seigneur, Il dépasse tout en supériorité

Lui, Mohamed (SAW) est plus grand que vous. Sa lumière illumine la terre entière.

Je loue Dieu, le Seigneur qui l‟a envoyé sa bénédiction.

Il a envoyé Ahmed (Mohamed SAW) pour toutes les créatures.

Sa lumière brille au dessus de toutes les créatures.

La lumière de l‟intelligence aussi bien que celle de la vision globale.

La splendeur de l‟Imam de tous les fidèles englobe tous les horizons ;

Toute la splendeur des Wali et des prophètes ;

Et quand le soleil et la lune s‟unissent, tout cela est splendide

Mais ne peut pas atteindre sa splendeur.

Dieu a béni Abraham parmi toutes ses créatures

Moise a obtenu l‟éloquence au dessus de tout

On a donné l‟esprit et la force à Jésus

Vous avez obtenu de Dieu une vision, vous avez obtenu l‟éloquence et l‟autorité

370
Dieu a distingué, Adam des autres créatures

Ainsi se distinguèrent Noé et Abraham des autres par leurs exploits

Comme les Qoraich et les Hachim se distinguent dans leurs demeures

Par la grâce de Dieu, vous avez été élevés au dessus de toutes les créatures de Dieu.

Toutes les créatures de Dieu, à l‟au-delà comme sur terre vous louent

Toutes les créatures de Dieu, à l‟au-delà comme sur terre vous rendent hommage

Tout ce qui est béni dans la création est béni par vous

Tous ceux qui ont été élevés parmi les créatures, l‟ont été grâce à vous

Tout ce qui a été créé l‟a été grâce à vous

Je m‟adresse à vous pour cela

Que Dieu entende ma prière à travers votre bénédiction

Traduction : Moussa Yacouba inspecteur de l’enseignement moyen à Dosso.

371
ANNEXE 3 : Tarikh anonyme sur les relations entre Gwandou et

Argoungou

372
373
374
Source : catalogue of Islamic manuscripts at IRSH : P378.

375
Traduction

‘’Tarihîn Abinda Ya Gudana Tsakanin Gwandu Da Argungu A

Takaitse’’

‘’Condensé de l’histoire des relations entre Gwandou et

Argoungou’’

Au nom d‟Allah, le Clément, le Miséricordieux. Que la paix et le salut

soient sur le Prophète.

Après le décès du Shaykh Ousmane1- que Dieu ait pitié de lui - il ya environ six

mois, Mallam Abdoulaye quitta Bodinga 2 pour Gwandou. En ce moment, les Kabbawa

de Kalambayna et leur chef, Dan Baywa violèrent le pacte et attaquèrent Gwandou.

Ce qui poussa le Sarkin Musulmi Bello à venir à Gwandou pour appuyer l‟armée

d‟Abdoulaye (c‟était leur première rencontre depuis la mort du Shaykh Ousmane).

Ils livrèrent ensemble bataille contre Kalambayna. Ils détruisirent la ville et tuèrent

le chef Dan Bayna. Cette guerre fut le plus grand évènement qu‟a connu le

Gwandou.

Après la mort d‟Abdoulaye, Mohamed, son fils aîné lui succéda au trône.

Sous son règne, il sollicita l‟aide du Sarkin Musulmi Bello et ensemble, ils

livrèrent bataille contre Argoungou. Ils assiégèrent la ville d‟Argoungou pendant des

jours, ils détruisirent les cultures des plateaux et des plaines mais ne sont pas

rentrés dans la ville. Et le Sarkin musulmi rebroussa chemin. L‟Emir de Gwandou,

Mohamed attaqua sans cesse cette ville jusqu‟à ce que cette situation exaspéra les

gens de Kabi car la faim sévissait à Argoungou. En ce moment, Karari Dan Hudi

1 - Il s‟agit du Cheikh Usman Dan Fodio


2 - Localité située dans l‟Etat de Sokoto

376
était leur chef. Quand la situation atteignit son paroxysme, il envoya des émissaires

auprès du Sarkin Gwandou pour demander, un apaisement dans leurs relations

(Sûlhu). L‟Emir du Gwandou donna son accord mais à l‟unique condition que

Karari soit exécuté ou arrêté ou condamné à l‟exil. Le consensus se fît sur la

dernière option. Il quitta Argoungou, mais Mohamed demanda à son petit frère,

Abdoulkadri de le poursuivre. Il l‟atteignit dans la brousse où il lui livra bataille et

parvint à le tuer. Il arrêta sa suite, son fils et sa femme. Un de ses fils, Nabani1

parvint à s‟échapper. En ce moment, Mohamed plaça sur le trône son représentant

(Hakîmi), Banlaaba et ses collaborateurs parmi lesquels Kunduda et Lamni. Et la

paix revint. Les représentants de Mohamed envoyaient régulièrement du poisson et

du riz à Gwandou. En plus, ils vaquèrent à d‟autres occupations notamment les

constructions des maisons et autres. Ils restèrent ainsi jusqu‟à la mort de Mohamed.

Son petit frère, Mallam Halilou hérita du trône. Les gens de Kabi observèrent ainsi

la situation. Mais exaspérés, ils firent appel à Nabani, fils de Karari, en exil à

Goudali. Ils le nommèrent Sarki. Ils violèrent ainsi le pacte et les hostilités

reprirent jusqu‟au décès de Mallam Halilou. Et, Hadaru hérita du trône. C‟est sous

son règne que le Sarki de Kabi, Maïnassara trouva la mort. Après ce combat,

Hadarou livra bataille contre Karakara et trouva la mort au cours de ce combat.

Après sa mort, son successeur a renouvelé le pacte [ ].

Depuis le temps où Mallam Abdoulaye livra bataille contre le Dendi puis le

Borgou et même la capitale „‟îllo‟‟, il plaça ces territoires sous sa tutelle. Après la

capitale se révolta, Mohamed livra bataille contre la capitale et triompha.

1 Nabani : Il s‟agit de Nabamé.

377
L‟origine des relations entre Gwandou et „‟îllo‟‟, c‟est le mariage de la fille

du chef de cette localité par Mohamed, Sarkin Gwandou.

Certaines localités de Say et du Liptako étaient sous la tutelle de

Gwandou. Chaque année, le Sarkin Gwandou envoyait ses émissaires dans ces

localités. Et, cette situation dura jusqu‟à la rupture de leurs relations.

Traduction : Salaou Alassane arabisant au Département des Manuscrits Arabes et

Ajami (IRSH).

378
ANNEXE IV : TEXTE EN FULFULDE SUR BOUBACAR

LOULOUDJI

379
ANNEXE 4

380
Traduction : Diouldé Laya

381
ANNEXE V : RECITS PEUL SUR LA BROUILLE ENTRE

GUELADIO ET SEKOU AMADOU

382
ANNNEXE V

Selon la tradition locale, le Kounari était effectivement une province sous l‟autorité du

royaume du Macina. Mais, Guéladio va se brouiller avec son suzerain suite à une sanction

infligée à une femme peul conformément à la loi coranique. Les raisons de cette brouille

sont évoquées par cette tradition du Kounari recueillie par Mohammadou Eldridge. Il s‟agit

d‟un récit en langue peul intitulé :

GUELAGJO E SEKU HAMADU

« 1. On wakti jamanu Haamadu Lobbo Aysa. Kanko ummini Diina ley Hamdallahi.

Leydi ndi fuu rewi, faa Gelaajo Hamboɗeejo Paate Hammadu

nyaana, Hammadu yelle firti baya,

2. Ko wadi ko mo firti non, nyannde wootere mo iwi Kunaari mo wari Hamdallahi

faa be kewri e julde laya. Nyannde nden naatugol mabbe e wuro Hamadallaahi, be tawi

pullo debbo ana fiyee e ley sakoro Hamdallaahi, Deftere fiyi mo. Mo lamndi, kanko

Gelaajo, ko ɗum woni. Be mbii mo Diina fiyi oo; gortudo Diina fuu fiyetee. Mo wii:

‘’Accee mo! ‘’ Mo wii piyoo’o debbo dori: ‘’Accu! So wanaa non mi yuwete ! ‘’

Mo jabaay, mo wii: Seeku wii’’. Gelaajo yuuki mo. Mo wii :’’So ɗum woni Diina, mi yalti

e Diina hannden !’’ Gelaajo yahi jippoyi jippune mum, kanko e yimbe makko fuu, fa

jemma wari.

3. Seeku nani golle ko mo waɗi ko, hawrini Hamdallahi fuu. Mo wii:

‘’Joonin Gelaadjo kay yalti e Diina. Jooni ko woni dabare mum. So weeti, so Alla jabi, so

en njahi fummere en tillike fummunde, miɗo nodda Gelaajo mi sarda e makko. So mi libi

mo, mi watta mo lebbi tati e jamɗe. So lebbi tati timmi, mi yaltina mo, mi lamndo mo. So

mo rewti e golle makko kiiɗɗe, mi watta mo lebbi jeeney. So mo timmini lebbi jeenay ɗin,

383
mi yaltina mo, mi lamndo mo. So mo rewti e golle makko kiiɗɗe faa han, jooni mi tawi

jonni kay mo firti Diina tan, Deftere Alla wari mo [….] ’’ »

Traduction

GUELADJO CONTRE SEKOU AHMADOU

« 1. Un jour d‟autrefois, c‟était au temps où Sékou Ahmadou Lobbo Aïssa faisait

lever la religion dans Hamdallay, tout le pays lui obéissait. Un de ces jours- là donc,

Guélâdjo Hambodédjo Pâté Hammadou Yelle Nyanna dénoua les liens de l‟obéissance.

Voici comment.

2. Une fois il quitta son Kounari et vint à Hamdallaï pour la fête des sacrifices. Or,

comme il faisait son entrée dans la cité de Hamdallay, il trouva une femme peul qu‟on

fouettait sur la place du marché. C‟était par ordre du livre. Il demanda, lui Guélâdjo, ce

qu‟il y avait. On lui dit : „‟c‟est la religion qui ordonne ce châtiment. Tous ceux qui

enfreignent la loi seront fouettés.‟‟ Il dit : „‟Relâchez- la ! On ne bat une femme libre ! Toi,

arrête ou je te perce de ma lance !

Celui qui la frappait des cordes refusa et dit : c‟est Sékou qui me l‟a ordonné.‟‟ Guéladjo le

tua et s‟écria : „‟ Si c‟est cela la religion, je la quitte aujourd‟hui même !‟‟ Puis il alla

mettre pied à terre dans l‟enclos où il avait coutume de descendre, lui et tous ses gens. La

nuit vint.

3. Sékou fut informé de ce qu‟il avait fait. Il réunit tous les croyants de Hamdallay et

leur dit :‟‟ Maintenant voilà que Guélâdjo est sorti de la religion. Voici ce que nous allons

faire. Dès qu‟il fera jour, si Dieu le veut, après la prière de l‟aube, dès que nous aurons fini

de prier, je ferai venir Guélâdjo. Je l‟interrogerai sur la religion. Si je le convaincs

d‟impiété, je le ferai sortir. Si je l‟interroge encore et s‟il reste endurci, je le remettrai aux

fers pour six mois. Je l‟interrogerai de nouveau, et s‟il persiste dans sa vieille impiété, neuf

384
mois de fers ! Si au bout de ce temps il n‟est pas converti, alors j‟aurai vu que c‟est

vraiment un païen et qu‟il mérite la mort, selon le livre de Dieu […..].‟‟ »

Récits tirés de l’ouvrage de Mohammadou Eldridge pp72-73.

NB. Mohammadou Eldidge lui a tirés ces textes des manuscrits de Gilbert Vieillard

conservés à l’institut Fondamental d’Afrique Noire de L’université de Dakar dans le

fond Vieillard.

385
ANNEXE VI : Quelques folios du Tarikh deSinder

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400
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402
403
{……..}

404
Traduction

Il s‟agit d‟un manuscrit (63 folios) dont les folios 2 à 15 sont consacrés à l‟historique des

migrations des populations de Sinder depuis Bourra jusqu‟à leur installation définitive sur

le site actuel. La traduction de ces folios donne la version ci- après : [Les populations de

Sinder étaient originaires de Bourra1. Elles avaient quitté ce village en 1813

(correspondant à l‟an 1229 de l‟hégire), pour s‟installer sur le site actuel de Sinder. Une

partie de la population avait suivi Alfa Mahaman Diobbo lorsqu‟il avait quitté l‟île de Neni

pour continuer sa descente du fleuve vers le sud.

La famille aristocratique de Sinder descend de l‟Askia Ishiak, fils de l‟Askia Daoud, fils de

l‟Askia Elhadj Mohamed, fils d‟Aboubacar et, ce sont des Mamar Touré. Mais pour ce qui

est de leur ancêtre, il se nomme Djalley fils de Souri, fils de Alkaleye, fils de Bamam, fils

de Foudi, fils de Sidikou, fils de Sambeye, fils de Askia Ishiak, fils de Askia Daoud, fils de

Askia Mohamed fils de Babacar Touré. Pour ce qui de Djalley Souri, il quitta Wanzarbé2

pour Yatakala3 où il séjourna quelques années avant de s‟installer à Bourra où il séjourna

pendant longtemps. Il épousa une fille (une princesse) de cette localité du nom de Sena

Hama Zangou. De cette union, ils eurent huit (8) enfants : Tondo, Almadane, Saouda,

Abdoullahi, Zindiko, Sahi, Aboubacar et Sanda. Djalley a vécu pendant longtemps dans ce

village avec ses enfants. Il mourut dans ce village et y laissa ses 8 enfants.

Un jour, une armée Touareg attaqua Bourra et pilla le village. Mais, les guerriers de

cette localité ripostèrent et les pourchassèrent. A la tête de l‟armée du village se trouvait

Baguine. Ce dernier continua à pourchasser les Touareg pendant plusieurs jours et croisa

un jour cette armée. Baguine et ses hommes furent vaincus et contraints de se replier. Les

1 - Bourra- Village situé près d‟Ansongo dans le nord du Mali actuel. A ne pas confondre avec le village de
Bourra du département de Téra, situé à 145 km au sud- ouest de Niamey. Bourra signifie dans la langue
Soŋey cendres, car le village est souvent sujet à des incendies.
2 - Wanzarbé: Village Soninké situé à 70 kilomètres au nord-ouest de Téra.

3 - Yatakala : Capitale du canton du Goruol.

405
Touareg ayant déjà franchi les limites du territoire de Bourra, son chef de guerre a jugé

utile de rebrousser chemin avec ses hommes. Mais l‟un des fils de Djalley, Tondo était

sorti avec ses hommes à la recherche du butin. Il avait croisé sur son chemin, Baguine et

ses soldats qui l‟avaient conseillé de rebrousser chemin avec eux car les Touareg avaient

déjà franchi les limites de leur territoire avec le butin. Toutefois Tondo refusa et lui

répondit : « La mort est meilleure que le retour au village les mains vides ». Il avait

instruit Baguine de repartir avec lui à la recherche des Touareg aux confins de leur

territoire. Et quand les Touareg les avaient aperçus, ils avaient tracé une sorte de ligne

rouge sur le sol et demandèrent à l‟armée de Tondo de ne pas dépasser ce trait. Mais,

Tondo et ses hommes avaient marché sur le trait. Les Touareg tracèrent une seconde fois

un trait et une troisième fois mais Tondo et ses hommes refusèrent toujours d‟obtempérer,

ils avaient dépassé tous les traits tracés par les Touareg et s‟étaient retrouvés en face d‟eux.

Ce défi avait poussé les Touareg à réagir avec une rare violence. Ils massacrèrent l‟armée

de Tondo. Ce dernier perdit ses hommes et fut lui-même blessé à plusieurs endroits de son

corps. Les Touareg l‟avaient emporté avec eux et étaient rentrés avec lui dans leur

campement. Ils l‟avaient conduit devant les deux hautes personnalités du campement : le

souverain et le cadi. Quand ces derniers virent Tondo, ils l‟avaient reconnu et dirent ceci

à leurs hommes : « Pourquoi aviez- vous tué ces hommes » ? Ils étaient issus d‟une

communauté avec laquelle nous avions scellé un pacte de non agression. Le chef avait

demandé au cadi du nom d‟Aboubacar d‟amener Tondo avec lui. Il le conduisit chez lui et

se mit à le soigner de ses blessures jusqu‟à ce que Dieu l‟aida à le guérir complètement.

Tondo était resté chez l‟érudit quelques années (3ou 4 ou 5 ans ou plus). Il apprit

l‟intégralité du Coran auprès de cet alim. Mais, la nouvelle parvenue à Bourra faisait état

de la mort de Tondo et de tous ses hommes lors du combat. Puis la population eut une

406
autre nouvelle qui démentait la première : elle confirmait que Tondo était vivant et qu‟il

n‟avait pas été tué.

Après ses études coraniques auprès de ce lettré musulman touareg, Tondo exprima

son désir de rentrer à la maison. Il fit part à son maître de son inquiétude au sujet de sa

communauté : « Les Touareg dérangent beaucoup ma communauté dans leur lieu

d‟habitation actuelle». L‟érudit le conseilla de quitter Bourra avec ses parents et de migrer

vers l‟Est. Mais avant, il devra aller à Neni- Goungou où il trouverait, un „‟cousin‟‟ à lui

du nom de Shaykh Mahaman Diobbo. Le Cadi dit ceci à Tondo : « Ce dernier est un grand

Shaykh, il faut aller le voir et tu diras que c‟est moi, Aboubacar qui t‟ai conseillé de venir

vers lui et que je lui demande aussi de prier pour moi afin que Dieu m‟accorde la victoire

permanente sur mes adversaires ». Il quitta ainsi, son maître (avec sa bénédiction bien sûr)

et partit pour Sinder en compagnie des siens. Après il alla à Neni- Goungou1 trouver

Shaykh Mahaman Diobbo. Ce dernier donna à Tondo une gourde ‘’koulba’’ ou ‘’Zollo’’ et

après pria pour lui. Mahaman Diobbo demanda àTondo de jeter la gourde dans le fleuve.

L‟érudit le conseilla de jeter la gourde dans l‟eau aux confins du territoire soŋey en amont.

Il lui dit aussi ceci : « Cette gourde ne dépassera aucun village ou ville sans que ses

populations ne sortent pour vous suivre. Là où elle s‟accroche, c‟est le site que Dieu vous a

choisi pour vous installer ».

Après Tondo décida de regagner son village. Mais son séjour fut très long, ce qui

poussa son frère, Zindiko à quitter Bourra pour aller à sa recherche. Les deux frères se

croisèrent dans le village de Kandadji, ils se saluèrent et Tondo informa Zindiko du motif

de son voyage. Ils revinrent ensemble à Bourra. Arrivé au village, Tondo fit venir tous ses

frères pour les informer de sa rencontre avec Mahaman Diobbo, de la gourde qu‟il lui

avait donnée, de l‟usage qu‟il devait en faire et du conseil que l‟alim lui avait prodigué.

1 - Il s‟agit de Neni- Goungou, une île située non loin de Tillabéri. Il y a deux Neni- Goungou, le deuxième
se trouve en face du village de Goudel à Niamey.

407
Quatre de ses frères répondirent favorablement à sa demande. Il s‟agit de Zindiko,

Abdoullahi, Saouda et Aboubacar (Bokar). Les trois autres refusèrent, ce sont : Almadane,

Sahi et Sanda.

Après cette réunion, Tondo partit avec la gourde jusqu‟aux confins du pays soŋey et

la jeta dans le fleuve. Il revint et demanda à ses frères et aux familles qui sont d‟accord

avec lui de se préparer pour le voyage. Quatre grandes familles l‟ont suivi dans cette

émigration. A ces familles sont venues s‟ajouter d‟autres qui n‟ont pas une grande

renommée. Ces quatre grandes familles sont : la famille Marou Goundji, la famille Youni,

la famille Koysa, la famille Besse auxquelles il ajouter la famille Toura (une autre grande

famille venue tardivement rejoindre le groupe). Au total, il y a eu quatorze familles de

Bourra qui l‟ont suivi jusqu‟à l‟île de Sinder dans laquelle elles vivent présentement.

Quand l‟information du voyage est parvenue au niveau de la population de l‟île, plusieurs

autres familles l‟ont suivi. Des populations des contrées voisines sont aussi venues étoffer

le groupe des migrants. Toutes ces personnes sont rentrées dans des pirogues et quand elles

sont arrivées au niveau d‟Ayorou, les gens de cette localité ont empêché aux migrants de

continuer leur chemin vers l‟Est en leur posant plusieurs questions. Mais, Tondo et ses

hommes ont répondu à toutes les questions. Il a saisi la même occasion pour informer les

gens d‟Ayorou que lui et sa communauté désirent émigrer afin de sauver la religion de

Dieu. Et quand les habitants de cette localité ont entendu cette parole, ils ont libéré la voie

à Tondo et ses hommes. Ces derniers ont suivi la voie du fleuve jusqu‟à l‟île de Wissili. Ils

y ont trouvé, un savant du nom de Zaydi et ils se sont entendus avec lui pour qu‟ils

émigrent ensemble car Tondo a promis à ce lettré musulman l‟imamat et le poste de cadi.

Tondo et l‟érudit ont convenu de cet arrangement. Zaydi et ses hommes ont émigré avec

eux jusqu‟à l‟île de Sinder. Et c‟est comme cela que Tondo et les gens qui sont avec lui se

408
sont installés définitivement sur le site. Et depuis ce jour, Tondo et sa suite sont reconnus

comme étant des gens de Sinder.

Concernant les groupes qui ont émigré avec Tondo, leur nombre est indéterminé.

Leur arrivée à Sinder date de 1813 (1229 de l‟hégire). La première réalisation qu‟ils ont eu

à faire après leur installation à Sinder, c‟est la construction d‟une mosquée. Après, Tondo

prit ses quatre frères et les chefs de familles pour aller à la rencontre du Shaykh Mahaman

Diobbo pour l‟informer qu‟il est venu avec une forte communauté qu‟il a laissée dans l‟île

de Sinder. Après cela, le Shaykh Mahaman Diobbo a pris Tondo et les gens qui sont avec

lui pour les conduire chez Amirou Kourté nommé Sido fils de Yoro. Il est le propriétaire

des terres de Sinder. Puis le Shaykh Mahaman Diobbo présenta Tondo et ses hommes au

propriétaire foncier en disant ceci :

« Tondo est un homme honnête, un homme de bien qui est venu chercher auprès de votre

autorité une place dans laquelle il va vivre, lui et ses hommes ».

Amirou Kourté a répondu au Shaykh Mahaman Diobbo en disant :

« Je donne à Tondo tout l‟espace connu sous le nom de Alhoumbouro- Tchiré : de Koïzey-

Tondo jusqu’à l’île de Toula- Foulé, les habitants de Sinder peuvent cultiver ces terres

moyennant le payement d‟une dîme annuelle ».

Tondo et les siens ont accepté cette condition posée par Amirou Kourté puis ils sont restés

quelque temps avec Mahaman Diobbo à Say. Tondo a exprimé une inquiétude à

Mahaman Diobbo par rapport à l‟attitude d‟une de ses communautés (celle des Turawiyune

ou gens de Toura). Ils sont selon lui en grand nombre, ils ont une grande renommée et sont

craints par les gens. Il a demandé au Shaykh de prier pour eux pour qu‟ils ne s‟entendent

jamais sur une chose même entre deux frères ou deux amis. Grâce à la prière du Shaykh,

cette communauté est restée toujours divisée jusqu‟à ce jour. En même temps, Tondo a

informé le Shaykh qu‟au sein toujours de sa suite, il y a trois autres classes sociales

409
pauvres : ce sont tous des Bellah. Et le Shaykh Mahaman Diobbo a répondu en ces

termes : « Les pauvres qui sont avec toi, tous ceux qui sont libres, resteront libres mais les

Bellah ainsi que les tambourinaires restent les serviteurs de l‟autorité sous le drapeau ».

Après, Tondo a demandé à Mahaman Diobbo de prier pour la population de Sinder afin

qu‟elle soit dynamique dans la recherche du savoir et qu‟elle s‟adonne à la production, à

l‟agriculture et que Dieu bénisse ses terres. Après cette prière, le Shaykh a demandé à

Tondo et ses compagnons de retourner à Sinder pour y vivre tout en lui prodiguant des

sages conseils dans le cadre des relations qu‟il devrait avoir avec sa communauté.

Tondo et ses compagnons sont revenus dans leur île pour y habiter. Il est resté au

pouvoir pendant 17 ans (1813- 1830). Il mourut en 1830 (1250 de l‟hégire) en laissant

derrière lui sept enfants qui sont : Mohamed, Tahirou, Ali, Balo, Nana, Oumou, Barou-

Wandé. Sentant sa mort proche, Tondo a fait venir ses quatre frères et leur a demandé de

garder des relations cordiales avec les enfants du Shaykh Mahamane Diobbo : « Chaque

fois qu‟ils se présentent sur cette île, donnez leur tout ce qui est en votre pouvoir comme

aumône ». Et cette pratique continue jusqu‟à présent entre la population de Sinder et les

descendants de Mahamane Diobbo. Tondo demanda également à ses frères d‟honorer les

enfants du savant Aboubacar, chaque fois qu‟ils viennent leur rendre visite et de leur céder

la direction de la prière et le jugement. Cette pratique aussi est restée dans les mœurs. Les

frères de Tondo et leurs descendants ont respecté à la lettre les dernières volontés du

fondateur du centre d‟études islamiques de Sinder. Mais, sous le règne d’Amirou Oumarou

Djibrilla surnommé Kodio le pacte sera rompu entre les gens de Sinder et les descendants

du savant Aboubacar].

Traduction : Salaou Alassane arabisant au Département des Manuscrits Arabes et

Ajami (IRSH).

410
ANNEXE VII : Quelques images du Nord Nigeria

411
Photo no 4 : Arewa House

Photo d‟Arewa House : un des centres de documentation les plus importants du Nord

Nigeria : Photo prise à Kaduna le 06/08/10

412
Photo no 5 : Bibliothèque Abdullahi Fodiyo à Sokoto

Photo de bibliothèque centrale de l‟Universié Shaykh Ousmane Dan Fodio de Sokoto.


Photo prise à Sokoto le lundi 16 août 2010.

413
Photo no 6: Tambours de guerre

Images d‟échantillons de tambours de guerre (Tambari) à Wazir Janeidu House.


Photo prise à Sokoto le 16/08/10.

414
Photo no 7 : Liste des souvrerains du Nord Nigeria ayant pris l’étendard du
Jihad à Sokoto.

Photo prise à Sokoto le 16/08/10

415
Photo no 8 : La tombe d’Abdullahi Toga à Argoungou

La tombe d‟Abdullahi Toga à Argoungou.


Photo prise à Kanta Meseum à Argoungou le 17/08/10

416
Photo no 9 : Echantillons d’armes de guerre des Kabbawa

Photo prise à Kanta Meseum à Argoungou le 17/08/10

417
Photo no 10 : Echantillons d‟étendards du Jihad

Photo prise à Waziri Janaidu House de Sokoto le 05/08/10.

418
INDEX GENERAL

419
Index

Abdoulaye Fodio 6, 10, 23, 24, 31, 106, 112,122 125

Ahmed Baba 76, 77, 308

Agano 176, 182, 187, 195, 196, 199, 307, 369

Alfa Adamou 154, 164, 165, 169, 170, 171, 187

Alfa Sambo 94, 95, 96, 98, 100

Alfaga 110, 175, 199, 259, 260, 261, 275, 276, 277, 278, 279, 280

Alfaizé 18, 26, 180, 213, 214, 218, 224, 225, 234, 239, 252, 303

Ali Anna 8, 17, 18, 49, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75, 89, 94, 113, 117, 120, 130, 143, 144,

146, 299

Ali Bori N‟Diaye 139, 142

Alim 1, 54, 58, 71, 89, 94, 96, 100, 103, 104, 116, 149, 154, 157, 165, 166, 167, 170, 171,

172, 173, 174, 176, 177, 184, 185, 186, 197, 200, 218, 243, 246, 247, 248, 268,

270, 271, 273, 409, 410

Alkali 61, 62, 63, 64, 154, 160, 292, 294, 305

Alzouma Bazi Cissé 13, 110, 152, 153, 168, 170, 175, 177, 180, 182, 190, 193, 216, 230,

235, 236, 238, 239, 303

Ahmadou Sékou 26, 139

Amirou 2, 133, 172, 173, 175, 177, 184, 185, 213, 215, 222, 224, 226, 247, 248, 249, 250,

251, 252, 254, 255, 256, 257, 258, 259, 260, 264, 274, 275, 291, 292, 293, 294,

298, 412, 413

420
Barma 154, 162, 221

Barth 25, 36, 37, 39, 51, 120, 215, 219, 223, 263, 265, 267, 281, 296, 328, 358

Bikim 82, 121, 122, 124, 125, 127, 286

Birni N‟Gaouré 6, 7, 18, 71, 72, 77, 82, 87, 90, 91, 92, 95, 103, 134, 135, 171, 210, 280,

291

Birniyel 105,106, 287, 291

Boboye 7, 8, 14, 17, 18, 19, 25, 30, 32, 35, 67, 68, 70, 71, 72, 82, 83, 84, 85, 86, 91, 96,

97, 105, 106, 107, 111, 112, 113, 115, 116, 117, 118, 119, 121, 122, 127, 130,

135, 171, 210, 218, 279, 285, 286, 287, 293, 294, 299

Bolonguièye 153, 154

Boumba 81, 108, 121, 130, 131, 132, 136, 165, 270, 291

Boubacar Louloudji 5, 6, 7, 8, 12, 17, 18, 31, 32, 47, 54, 72, 81,82, 86, 87, 88, 89, 90, 91,

92, 93, 94, 95, 96, 97, 98, 99, 100, 101, 102, 103, 104, 105, 106, 109,

110, 111, 112, 113, 121, 125, 133, 135, 150, 151, 153, 154, 159, 171,

285, 286

Boureima Guéladio 269, 270

Bourra 159, 169, 170, 229, 230, 232, 234, 235, 242, 248, 393, 394, 395, 396

Centres d‟études islamiques 1, 2, 3, 5, 6, 7, 8, 9, 12, 13, 14, 15, 18, 19, 20, 25, 26, 27, 28,

30,31, 34, 46, 49, 50, 51, 52, 55, 61, 64, 66, 71, 79, 81,

82, 86, 91, 92, 105, 108, 113, 117, 121, 122, 127, 133,

134, 135, 138, 139, 157, 158, 159, 160, 161, 165, 166, 167,

170, 171, 176, 199, 201, 202, 203, 204, 205, 206, 209, 210,

212, 213, 214, 216, 217, 218, 219, 221, 222, 225, 227, 229, 230,

232, 233, 234, 236, 239, 250, 251, 252, 264, 268, 272, 274, 277,

421
278, 279, 280, 284, 285, 286, 287, 398

Chants religieux 14, 142, 173, 174, 177, 178, 180, 181, 182, 183, 184, 185, 186, 187, 191,

192, 194, 201, 213, 345

Dallol 1, 7, 8, 17, 18, 19, 32, 35, 38, 39, 41, 42, 43, 44, 47, 48, 61, 67, 68, 69, 70, 71, 72,

73, 76, 81, 82, 83, 84, 86, 87, 88, 90, 91, 92, 95, 96, 97, 99, 100, 102, 103, 104, 105,

109, 111, 112, 113, 114, 115, 116, 118, 119, 120, 121, 122, 124, 125, 127, 130, 131,

132, 133, 135,150, 151, 153, 171, 172, 210, 220, 230, 251, 252, 270, 285, 286,

293, 294

Darey 72, 73, 82, 87, 88, 272

Dendi 1, 35, 40, 64, 66, 73, 77, 112, 113, 119, 131, 138, 152, 169, 171, 193, 210, 214, 218,

255, 281, 307, 323

Dosso 21, 29, 38, 47, 50, 51, 52, 53, 54, 55, 68, 84, 97, 99, 117, 118, 131, 132, 227,

270, 273, 294, 295, 297, 298, 300, 301, 302, 303, 305, 306, 307, 308, 310, 314

Douddales 2, 3, 72, 86, 108, 165, 174, 223, 224, 257, 266

Elhadji Mamoudou 3, 50, 51, 52

Emir 2, 99, 100, 112, 112, 132, 133, 203, 207, 208, 211, 212, 213, 222, 278, 279

Emirat 2, 6, 7, 61, 91, 99, 134, 150, 199, 207, 208, 209, 210, 212, 213, 222, 261

Erudit 3, 17, 29, 37, 48, 53, 55, 58, 60, 62, 70, 71, 72, 73, 74, 75, 76, 78, 81, 88, 90, 92,

93, 96, 98, 102, 103, 104, 106, 113, 139, 142, 143, 144, 145, 146,150, 151, 153,

154, 155, 156, 157, 158, 159, 160, 161, 163, 166, 170, 171, 172, 173, 174, 176, 170,

181, 183, 185, 186, 193, 194, 197, 203, 221, 222, 223, 224, 227, 229, 230, 232, 233,

234, 235, 237, 239, 251, 253, 254, 255, 256, 259, 263, 264, 266, 267, 272, 280, 282,

284, 287, 394, 395, 396

422
F

Farakoy 52, 53, 54, 97

Fleuve Niger 35, 37, 55, 57, 61, 83, 144, 151, 169, 217, 229, 230, 263, 271

Garbou 107, 287, 292

Guéladio 14, 150, 229, 258, 259, 260, 261, 262, 263, 264, 265, 266, 267, 268, 269, 270,

271, 290, 293

Goudel 9, 103, 144, 145, 146, 149, 161, 208, 229, 252, 255, 256, 257, 286, 395

Gourma 6, 24, 36, 102, 142, 143, 169, 171, 210, 217, 218, 222, 240, 241, 244, 245, 264,

270, 271

Gwandou 6, 7, 21, 25, 61, 91, 98, 99, 100, 108, 109, 111, 112, 113, 114, 115, 117, 118,

119, 120,121, 134, 141, 143,150, 161, 197, 199, 194, 200, 201, 203, 206, 207,

208, 209, 210, 211, 212, 213, 215, 219, 246, 261, 262, 268, 279, 280, 360, 364

365, 366

Hamboy 14, 229, 261, 263, 264, 265, 266, 267, 268, 269, 271

Haoussa 4, 23, 36, 39, 41, 42, 43, 48, 49, 50, 54, 63, 69, 71, 74, 112, 134, 135, 141, 169

170, 179, 182, 190, 201, 206, 216, 218, 219, 220, 240, 243, 245, 246, 248,

Ile 21, 22, 26, 35, 36, 37, 56, 57, 58, 59, 60, 61,62,102, 121, 122, 124, 125, 127, 142, 143,

144, 145, 146, 149, 151, 153, 154, 157, 159, 160, 161, 162, 169, 170, 177, 185, 204,

423
216, 221, 225, 229, 230, 232, 233, 234, 235, 236, 237, 238, 239, 240, 241, 242, 243,

244, 245, 246, 247, 248, 253, 254, 281, 282, 286, 393, 395, 396, 397, 398,

Imam 51, 52, 53, 54, 55, 70, 105, 106, 108, 122, 134, 158, 163, 164, 165, 167, 168, 185,

202, 204, 224, 232, 243, 255, 256, 257, 266, 278, 279, 289, 290, 291 292

Islam 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 12, 13, 18, 22, 23, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 39,

40, 49, 50, 51, 52, 53, 54, 55, 56, 57, 59, 60, 61, 62, 63,64, 66, 67, 72, 76, 77, 78, 92,

95, 96, 98, 99, 106, 109, 111, 112, 113, 114, 138, 139, 141, 142, 145, 146, 153, 154,

160, 161, 162, 163, 166, 167, 168, 169, 174, 175, 176, 178, 179, 182, 188, 193, 194,

199, 209, 211, 216, 221, 226, 229, 235, 238, 239, 242, 243, 254, 255, 259, 262, 264,

265, 266, 267, 270, 271, 272, 273, 274, 276, 277, 278, 280, 283, 284, 285, 286, 287

Issa korombé 119, 130, 131, 132, 136, 270

Jihad 4, 6, 23, 24, 30, 32, 59, 61, 63, 86, 90, 92, 94, 95, 97, 98, 109, 133, 138, 139, 144,

158, 159, 161, 176, 182, 189, 191, 194, 199, 209, 221, 256, 281, 283,

Kabbawa 120, 131, 206, 207, 212, 364, 405

Kabi 7, 82, 92, 106, 107, 117, 118, 119, 120, 121, 123, 130, 131, 141, 206, 209, 210, 218,

270, 364, 365

Kafi 3, 23, 34, 50, 51, 52, 53, 54, 55, 57, 62, 70, 97, 99, 100, 280, 283, 292

Khamed Elhadji 44, 75

Kollo 29, 63, 64, 82, 84, 122, 124, 127, 270, 286

Kounari 6, 9, 14, 25, 35, 47, 130, 147, 150, 208, 229, 256, 258, 256, 259, 260, 261, 263,

264, 265, 266, 267, 268, 269, 270, 271, 286, 371, 372

Kourfey 43, 132

Kourfayawa 39, 43, 152, 284

424
Kouré 3, 34, 50, 61, 62, 63, 78, 105, 122, 208, 255, 280, 283, 292

Kourté 40, 154, 162, 165, 169, 170, 208, 222, 223, 235, 236, 240, 244, 282, 349, 297

Lamido 68, 99, 107, 112, 113, 114, 115, 116, 117, 118, 120, 121, 122, 124, 125, 127, 133,

135, 171, 208, 277, 278, 279

L‟Ouest du Niger 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 11, 12, 20, 25, 27, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 39, 40,

44, 45, 48, 49, 50, 52, 55, 56, 58, 60, 61, 64, 65, 66, 67, 78, 79, 82, 85,

90, 91 104, 122, 134, 135, 138, 139, 140, 141, 149, 154, 160, 161, 166,

171, 172, 190, 191, 193, 197, 201, 208, 209, 210, 211, 212, 214, 216,

217, 220, 221, 223, 224, 227, 230, 252, 255, 256, 258, 262, 270, 271, 272,

273, 274, 275, 276,277, 279, 280, 282, 283, 284, 285, 286, 287

Mahaman Diobbo 9, 12, 13, 14, 81, 102, 103, 104, 114, 115,122, 138, 139, 141,

142, 143, 144, 145, 146, 147, 148, 150, 151, 152, 153, 154, 155, 156, 157,

158, 159, 160, 161, 162,163, 164, 166, 167, 169, 170, 171, 172, 173, 174,

176, 177, 178, 179, 181, 183, 184, 185, 186, 189, 191, 193, 194, 196,

197, 198, 199, 200, 203, 204, 210, 211, 212, 214, 215, 216, 217, 220, 221,

222, 223, 224, 227, 235, 237, 256, 260, 262, 266, 273, 282, 285, 354, 393,

395, 397, 398

Modibbo 22, 173, 181, 185, 197, 198, 201, 204, 211, 216

Mohamed Bello 6, 23, 24,104, 111, 117, 207

Nabamé 119,

N‟Dounga 3, 34, 50, 55, 56, 57, 58, 59, 60, 61, 62, 77, 149, 208, 210, 280, 283, 287, 290,

425
291, 310

Neni 22, 102, 103, 142, 143, 144, 145, 146, 151, 155, 159, 161, 177, 178, 179, 185, 232,

246, 292, 393, 395

Ouléma 1, 3, 6, 22, 29, 48,48, 51,52, 53, 55, 56, 57, 58, 60, 77, 90, 102, 103, 139, 146,

154, 158, 163,165, 166, 168, 175, 197, 200, 203, 204, 205, 209, 214, 224, 225,

226, 233, 243, 252, 255, 256, 257, 264, 268, 272, 273, 276, 277, 278, 283, 286,

287

Peul 1, 2, 4, 7, 8, 13, 17, 18, 19, 20, 23, 27, 31, 38, 39, 40, 41, 43, 44, 45, 46,47, 48, 49,

67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 77, 82, 86, 87, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 97, 107, 108,

109, 111,112, 114, 115, 117, 118, 119, 120, 121, 123, 124, 125, 127, 128, 129, 132,

141, 142, 145, 146, 152, 153, 154, 155, 156, 157, 173, 179, 210, 214, 216, 220, 222,

227, 246, 248, 252, 255, 256, 257, 261, 272, 273, 277, 278, 282, 283, 284, 286

Saney 3, 34, 55, 56, 54, 57, 58, 59, 60, 61, 62, 63 , 64, 78, 96, 149, 255

Say 1, 2, 4, 5, 6, 9, 13, 14, 17,19, 20, 22, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 35, 43, 45, 77, 81, 103,

104, 115, 122, 129, 130, 133, 137, 138, 139, 140, 141, 143, 144, 145, 146, 147, 149,

150, 151, 152, 153, 154, 155, 156, 157, 159, 160, 161, 162, 163, 164, 165, 166, 167

168, 169, 170, 171, 172, 176, 179, 181, 182, 183, 184, 185, 186, 191, 193, 194,

197, 198, 199, 200, 201, 202, 203, 204, 205, 206, 208, 210, 211, 212, 213, 214, 215,

216, 217, 218, 219, 220, 221, 222, 223, 224, 225, 226, 227, 233, 237, 238, 242, 243,

244, 248, 251, 252, 255, 256, 257, 260, 261, 262, 263, 265, 266, 268, 271, 273, 274,

277, 279, 280, 281, 282, 285, 286, 287, 289

426
Shaykh Ousmane Dan Fodio 10, 23, 24, 90, 101, 191, 206, 212

Siddo Sayoma 18, 94

Sinder 9, 20, 21, 22, 25, 35, 77, 142, 149, 159, 170, 171, 208, 229, 230, 231, 232, 233,

231, 232, 233, 234, 235, 236, 237, 238, 239, 240, 241, 242, 243, 244, 245, 246, 247,

248, 249, 250, 251, 252, 272, 281, 282, 286, 287, 290

Sokoto 1, 2, 4, 6, 10, 20, 23, 30, 38, 61, 101, 129, 1130, 131, 132, 133, 141, 143, 150, 176,

179, 197, 198, 200, 202, 203, 205, 206, 207, 208, 209, 210, 211, 212, 213,214,

216,219, 225, 230, 277, 279

Sorry Beldo Hooré 46, 142, 143, 144, 158, 159, 160, 252, 253, 254, 255

Soumana Abdourahamane 174, 179, 181, 186, 290

Talibé 2, 88, 89, 90, 102, 144, 149, 159, 165, 174, 182, 201, 202, 205, 214, 223, 239, 242,

251, 254, 257, 282, 286

Tamkalla 7, 8, 25, 39, 82, 104, 105, 106, 107, 110, 111, 115, 116, 117 ,118, 120, 121, 127,

132, 141, 151, 201, 210, 212, 219, 279, 286

Tombouctou 25, 36, 40, 43, 56, 64, 73, 74, 179, 216, 219, 233, 254, 263, 267

Tondo 130, 159, 169, 170, 229, 230, 232, 234, 235, 236, 237, 238, 239, 240, 247, 250,

251, 270, 281, 393, 394, 395, 396, 397, 398

Waa zi 3, 34, 51, 52, 53, 54, 55, 56, 62

Wangari 57, 59

Wonkoy 60, 277

Wouro – Guéladio 13, 260, 261, 262, 263, 264, 265 266, 267, 268, 270

Zarma 7, 19, 39, 40, 41, 43, 44 , 48, 51, 56, 57, 61, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 81, 82,83, 86,

89, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 97, 98, 99, 100, 103, 104, 105, 109, 111, 112, 113,

427
114, 115, 116, 117, 118, 119, 120, 122, 124, 127, 128, 129, 130, 131, 132,133,

136, 141 142, 143,146, 152, 154, 155, 173, 174, 179, 194, 210, 214, 222, 227, 240,

278, 287

Zarmaganda 39, 41, 44, 102, 142, 202, 227

Zarmakoye 55, 63, 99, 117, 131, 132, 271, 278

Zarmatarey 26, 31, 39, 41, 169, 216, 217

Zarma – Soηey 39, 40, 41, 48, 49, 141, 154, 166

428
TABLE DES MATIERES
Table des matières

Introduction générale………………………………………………………………… 1 - 33

Première partie : L’islam dans l’Ouest du Niger du XVIe au XVIIIe siècle…………34 -87

Introduction……………………………………………………………………………35

Chapitre I : Aperçu géographique et historique……………………………………..35 - 52

I- Aperçu géographique…………………………………………………….36- 40

1- Le fleuve Niger et ses îles……………………………………………37- 39

a- Le fleuve Niger…………………………………………………..37- 38

b- Les îles ………………………………………………………….38 - 39

2- Les Dallols………………………………………………………. …39- 40

II- Peuplement de la zone et structures sociales………………………….40- 52

1- Les Gourmantché………………………………………………… .41

2- Le groupe Zarma - Soηey………………………………………….41 -42

3- Les populations haoussa………………………………………….42 -44

4- Les Touareg…………………………………………………………45

5- Les Peul ……………………………………………………………..45- 49

6- Les relations entre les différents peuples……………………….… 49 - 50

7- Les structures sociales………………………………………………51 – 52

Chapitre II : Etude de trois anciens centres d’études islamiques de l’Ouest du Niger53- 68

Introduction........................................................................................53

I- Kafi, un ancien centre d’études islamiques…………………………….53- 58

1 – Les origines du fondateur de Kafi…………………………………..54- 55

2- L’œuvre d’Oumarou et de ses successeurs…………………………..55- 57

3- La situation religieuse dans la zone à la fin du XVIe siècle…………..58

II- Etude du cas du centre d’études islamiques de N’Dounga Saney…58 - 64


1- Le peuplement de l’île …………………………………………………. 59

a- Les origines des Saney de N’Dounga………………………………..59- 60

b- L’occupation de l’île par les Saney et les Zarma Kogori……………60 - 61

2- Les Saney de N’Dounga……………………………………………….. 61 - 62

3- L’activité religieuse des Saney sur l’île de N’Dounga…………………62-64

III- Le centre d’études islamiques de Kouré Saney………………………64- 67

1 – Les origines des Saney de Kouré………………………………….65

2- L’installation des Saney à Kouré……………………………………65 - 66

3- L’œuvre religieuse des Saney………………………………………..66- 67

Chapitre III : L’évolution de l’islam dans l’Ouest du Niger du XVIIe au XVIIIe siècle-

69- 84

I- Le retrait des résistants soηey dans le Dendi et le passage d’Ali Anna dans le

Dallol……………………………………………………………………………69 - 70

1- Le retrait des résistants soηey dans le Dendi……………………….69– 70

2- Le passage d’Ali Anna dans le Dallol………………………………70

II- Le retour d’Ali Anna dans le Dallol………………………………...…..71 - 76

1 – La création du village de Garouré……………..………………….71- 74

2- La création du centre d’études islamiques des Garouré

par Ali Anna……………………………………………………….74- 75

3- L’œuvre de Sambo Ali Anna……………………………………..75- 76

III – La fondation de Kwama dans le Dendi et l’arrivée des musulmans

touareg Kel Essuk dans le Taghazar………………………………….76 -79

1 – La fondation de Kwama par Ahmed Baba……………………………76-78

2- L’arrivée des Touareg Kel Essuk dans le Taghazar……………………78- 79


a - L’origine de Khamed Elhadji…………………………………………..78 - 79

c- L’œuvre de Khamed Elhadji………………………………………79

IV- Etude des centres d’études islamiques………………………………………80 - 84

1- Les conditions de création des centres……………………………………80

2- Le fonctionnement des centres d’études islamiques……………………..81 – 83

3- Le choix des sites d’accueil…………………………………………….83 - 84

Conclusion de la première partie…………………………………….85- 86

Deuxième partie : Le centre d’études islamiques du Birni N’Gaouré........…..88- 147

Introduction…………………………………………………….89

Chapitre IV : Boubacar Loudoudji et son œuvre ………………………………….90- 107

I- Situation géographique et économique………………………..........90- 93

II- Le règne de Boubacar Louloudji…………………………………….94- 99

1- Les origines de Boubacar Louloudji…………………………… 94- 95

2- L’enfance et la formation religieuse de Boubacar Louloudji…….95- 99

a- L’enfance………………………………………………………..95- 98

b- La formation religieuse…………………………………………98 - 99

III– La dérive totalitaire de Boubacar Louloudji……………………….99- 107

1- Les démêlés entre l’homme et les Zarma :

les causes du conflit …………………………………………….99- 103

2- Le déroulement du conflit……………………………………...104- 107

IV-La prise de Garouré et l’exil de Boubacar Louloudji…………................107- 113

1- La prise de Garouré………………………………………………107 - 108

2- L’exil de Boubacar Louloudji……………………………………..108- 113

V- L’œuvre religieuse de Boubacar Louloudji : la création


des centres d’études secondaires……………………….............113- 118

1- Le centre d’études islamiques secondaire

de Birniyel de Mamadi Diobbo……………………………...113 -114

2- Le centre de Garbou…………………………………………115

3- Le centre de Boumba………………………………………...116 -118

Chapitre V : L’œuvre d’Aboulhassane, fils et successeur de Boubacar Louloudji ...119-

136

I- Le règne d’Aboulhassane ……………………………………...119-125

1- Le choix De l’homme……………………………………..119- 121

2- La reprise des hostilités dans le Dallol……………………..121- 125

II- La chute de Tamkalla et la succession d’Aboulhassane……...125 -136

1- La chute de Tamkalla………………………………....125 -130

2- Lessuccesseurs d’Aboulhassane………………………130- 136

Chapitre VI- Le rétablissement du pouvoir peul dans le Dallol…………………….137-145

I – La reconquête de Dallol par Bayéro Aboulhassane……………………..137-140

1- L’exil de Bayéro………………………………………………………137-139

2- La rencontre entre Bayéro et les Foutanké……………………………139-140

II- La bataille de Boumba……………………………………………………...141-143

1- La défaite des Zarma…………………………………………………141- 142

2- Le Dallol après la défaite des Zarma………………………………..142 - 143

III - L’organisation politique et administrative du centre d’études islamiques de Birni

N’Gaouré………………………………………………………………… 143-145

1- L’organisation politique………………………………………………..143 -145


2- L’organisation administrative………………………………………….145

Conclusion de la deuxième partie…………………………………….146

Troisième partie : Le centre d’études islamiques de Say……………………...148- 241

Introduction………………………………………………………….149

Chapitre VII : Historique du centre d’études islamiques de Say…………………150-172

I – L’installation de Mahaman Diobbo à Say………………………….150-160

1- Situation géographique et humaine…………………………….150- 152

2- Le départ de Mahaman Diobbo de son pays natal…………….152- 155

3- Le départ de Néni et l’installation à Say………………………155 -160

II- La date de la création de la ville de Say et l’occupation du site…….160-165

1- La date de la création de la ville…………………………………..160- 162

2- L’occupation du site……………………………………………..162-165

III- Mahaman Diobbo : l’homme, l’environnement social et intellectuel….165-171

1- L’origine sociale de Mahaman Diobbo……………………………166

2- Les versions des différents auteurs sur ses origines……………….166-169

3- La construction du personnage……………………………………169- 170

4- Mahaman Diobbo, apôtre de la non violence…………………….170-171

IV – L’organisation du centre d’études islamiques…………………………171-183

1- L’installation de l’érudit à Say…………………………………….171-172

2- Les institutions du centre d’études islamiques de Say……………..172-179

a- L’organisation religieuse……………………………………….172-177

b- L’organisation économique………………………………….....177-179

3- Mahaman Diobbo, homme de paix et médiateur………………….180-183

Chapitre VIII : L’œuvre littéraire et philosophique de Mahaman Diobbo…………184-207


I- Les chants religieux……………………………………………185-193

1- L’importance de la poésie dans la culture islamique………..185-187

a- La place de la poésie en Arabie au temps du prophète…185-186

b- La place de la poésie en Afrique musulmane…………..186-187

2 – La place de la poésie dans le centre d’études

islamiques de Say………………………………………….187-192

a- Les chants d’assistance morale…………………………..188- 189

b- Les chants de méditation……………………………….. 189- 192

3- La chaîne de transmission des chants religieux………………………192- 193

II – La portée des chants religieux……………………………………….193-210

1 –Les chants comme outil de conversion……………………193 -194

2- La portée littéraire des chants religieux……………...............194- 196

3- La portée philosophique des chants religieux………………..196-197

a- L’exhortation du fidèle au travail………………………….197- 199

b- L’exhortation du fidèle à la modération………………......199 - 202

4 – La portée sociale des chants religieux………………………..202 -206

Chapitre IX : L’œuvre des successeurs de Mahaman Diobbo……………………208-238

I- Le successeur d’Alfa Mahaman Diobbo……………………….208 -216

1- Le choix de Boubacar……………………………………………..208-210

2- L’œuvre de Boubacar…………………………………………….210- 213

II - Les successeurs de Boubacar………..……………………………214 – 217

1- Le choix d’Abdourahamane……………………………………….214

2- Les autres Alfaizé et le début de la fin d’une époque…………….215 - 217

III- Les rapports entre Say et le monde musulman……………………..217-227


1 – Les rapports entre Say, Gwandou et Sokoto……………………217-224

2- Les rapports entre Say et le reste du monde musulman………….224 -226

IV- Contribution de Say à l’islamisation de l’Ouest nigérien…………..........227 -238

1- Say, centre politique………………………………………………….227-228

2– Say, centre économique et nœud caravanier…………………………..228- 232

3– Say, centre de diffusion de l’islam …………….....................................232- 235

a- Say, terre d’accueil………………………………………………...232-234

b- Say, un important centre d’enseignement…………………………234-235

4- La réaction de Say face à la colonisation…………………………………236- 238

Conclusion de la troisième partie……………………………..238

Quatrième partie : Les centres d’études islamiques secondaires et état de

l’islamisation de la zone à la fin du XIXe siècle……………239-294

Introduction………………………………………………………….….240

Chapitre X : Le centre d’études islamiques secondaire de Sinder………………. ..242 -262

I- Les origines du fondateur du centre d’études islamiques secondaire de

Sinder……………………………………………………………..……...243- 248

1- Histoire du peuplement selon la tradition orale……………………243

2- Le tarikh de Sinder………………………………………………......243-245

3- Synthèse de l’histoire du peuplement selon le tarikh de Sinder……..245- 247

4- Recoupement entre le tarikh de Sinder et la tradition locale…………247 -248

II- L’œuvre des successeurs de Tondo Djalley………………………………248-253

1- L’œuvre de Zindiko Djalley et de ses successeurs…………………...249- 250

2- Tahirou Tondo, le grand érudit……………………………………….250-253

III- Les règnes d’Oumarou Djibrilla et d’ Attikou Mahamadou……………..254- 262


1- Le règne d’Oumarou Djibrilla et la crise au sein de

l’instance judiciaire……………………………………………254-255

2-Attikou Mahamadou et la conquête coloniale…………………………255- 262

Chapitre XI : Les centres d’études islamiques secondaires de Tirga, Goudel et

Kounari……………………………….263-282

I- Le centre d’études islamiques secondaire de Tirga…………………….263-266

1- Historique du village………………………………………………...263-264

2- L’origine, la formation et l’œuvre de Sorry Beldo Hooré…………..264-266

II- Les modibadjés à Goudel et à Soudouré………………..……………..266- 269

1- Les modibadjés de Goudel…………………………………………266-268

2- La diffusion du savoir religieux à Goudel et à Soudouré…………268- 269

III- Le centre de Kounari…………………………………………………….269-282

1- La vie de Guéladio dans son pays natal……………………............269- 271

a- L’exil de Guéladio……………………………………………...271-272

b- L’installation de Guéladio à Wouro- Guéladio…………………272-275

2-L’œuvre de Guéladio et d’Amadou Alfaga…………….......................275-278

a- L’œuvre de Guéladio dans son pays d’accueil………………….....275- 277

b- L’œuvre d’Amadou Alfaga……………………………………..... .277 - 278

3 – Les successeurs de Guéladio………………………………………278 - 282

a- La transformation du centre militaire de Kounari

en centre d’études islamiques par Hamboy………………278-280

b- Le règne de Boureima Guéladio………………………………….280-282

Chapitre XII : Bilan de l’œuvre des leaders religieux des centres

d’études islamiques……………………………………………283-293

I- La situation religieuse de la zone à la fin du XIXe siècle…………...283-286


II- L’apport de l’islam aux sociétés de l’Ouest nigérien……………….287-293

1- L’apport de l’écriture……………………………………………287

2- L’implication de l’islam dans l’organisation du

pouvoir politique ……………………………………………. 288- 291

3- Le développement du phénomène urbain………………… …291- 293

Conclusion générale………………………………………….294- 298

Sources et Bibliographie………………………………………………………….299-355

A – Les sources…………………………………………………………………….300-328

I- Les sources orales………………………………………………………300 -306

1- Enquêtes orales……………………………………………………..300- 304

a- Liste des informateurs………………………………………….300- 304

b- Sources sonores de l’IRSH…………………………………… .304

2 – Recueils publiés de traditions orales………………………………304- 306

II- Les sources écrites……………………………………………………....306- 328

1- Les manuscrits en langue arabe et ajami……………………………..306

2- Les sources d’origine coloniale……………………………………...307- 325

a- Récits d’explorateurs et conquérants militaires………………....307- 308

b- Monographies…………………………………………………….308-311

c- Rapports politiques………………………………………………311- 319

d- Rapports de tournées…………………………………………......319-322

e- Affaires musulmanes………………………………………….....322- 325

3 – Les archives du nord Nigeria…………………………………………......325-328

a- Les archives d’Arewa House………………………………….. ..325-326

b- National Archives of Kaduna……………………………………326- 328


Bibliographie…………………………………………………….....................329-355

I- Outils de travail…………………………………………………………330- 331

II- Etudes et ouvrages généraux……………………………………………331-342

III- Etudes et ouvrages spécialisés………………………………………….343- 353

Site Web……………….. ………………………………………………353

Table des cartes………………………………………………………..354

Table des photos et illustrations……………………………………...355

Annexes…………………………………………………………………………….356- 419

Annexe I : Chant religieux de Mahamane Diobbo…………………………………357-366

Annexe II: Chant religieux d’Ousmane Dan Fodio………………………………....367-371

Annexe III : Tarikh anonyme sur les relations entre Gwandou et Argoungou……..372- 378

Annexe IV : Texte en fulfulde sur Boubacar Loudoudji …………………………...379-381

Annexe V : Récits sur la brouille entre Guéladio et Sékou Amadou……………. …382-385

Annexe VI : Quelques folios du tarikh de Sinder……………………………… ….386- 410

Annexe VII : Quelques images du nord Nigeria……………………………………411- 418

Index général………………………………………………………………………..419- 428

Table des matières…………………………………………………………………429- 439

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