Bases de physiologie de l’effort
Bases de physiologie de l’effort
Bases de physiologie de l’effort
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EMC
DOI: 10.1016/S1283-0887(24)47293-9
Résumé
L’adaptation cardiorespiratoire à l’effort est un processus complexe qui permet à l’organisme de s’ajuster aux changements d’état physique
et de fournir aux muscles l’oxygène nécessaire à son fonctionnement. Par l’action coordonnée du cœur et de la respiration, nous aborderons
les principaux mécanismes physiologiques qui sous-tendent ces adaptations à l’effort et expliquerons comment ces mécanismes sont
affectés par l’intensité, la durée et le type d’effort.
Au niveau macroscopique, le muscle est constitué d’un ensemble de myofibrilles, elles-mêmes constituées de filaments d’actine et de
myosine ( Fig. 1 (/student/content/book/51-s2.0-S1283088724472939#fig0005) ). Pour que la contraction se crée, la tête du filament de myosine se
fixe à l’actine puis se courbe, glissant le long du filament d’actine avant de se détacher. Sur le filament de myosine, de nombreuses têtes se
fixent alternativement à l’actine, ce qui produit un raccourcissement de l’ensemble du sarcomère qui correspond à l’unité fondamentale du
muscle [4 5] . C’est le début de la contraction musculaire. La répétition de ce phénomène dans l’ensemble des myofibrilles constituant le
muscle va induire un raccourcissement complet du muscle appelé contraction musculaire.
Figure 1
Constitution du muscle strié squelettique : du muscle (ici le biceps) à l’unité fonctionnelle contractile : le sarcomère (7) présentant une
succession de filaments d’actine (en bleu) et de myosine (en rouge). 1. Tendon ; 2. muscle ; 3. artère, veine et nerf ; 4. fascicule
musculaire (faisceau de cellules) ; 5. fibre musculaire (cellule musculaire) ; 6. myofibrille.
La fixation de la myosine à l’actine suivie de sa courbure nécessite l’hydrolyse d’une molécule présente dans le milieu : l’adénosine
triphosphate (ATP). L’hydrolyse de l’ATP transforme l’énergie métabolique en énergie mécanique, et l’ATP se dégrade en adénosine
diphosphate (ADP) et un ion phosphate (Pi), libéré dans le milieu. Sans ATP, la tête de myosine ne peut se détacher, et la phase
« contractée » est maintenue. La quantité d’ATP présente dans le muscle permet une contraction musculaire de 1 à 2 secondes. Pour que la
contraction puisse perdurer, la production de Pi doit se renouveler, afin de reformer de l’ATP. Pour cela, plusieurs processus se mettent en
action par le biais des différentes filières énergétiques que nous aborderons dans la partie suivante.
Cette durée du maintien de la contraction musculaire, et surtout son intensité, varie en fonction de paramètres intrinsèques au muscle,
c’est-à-dire sa constitution. En effet, le muscle est composé de milliers de fibres musculaires qui présentent des caractéristiques différentes.
Cette typologie musculaire se décompose en trois grandes familles (que nous ne développerons pas en détail) :
• les fibres dites lentes, de type I, adaptées aux efforts longs (plusieurs minutes) ;
• les fibres dites rapides, de type IIx, adaptées aux efforts très rapides (quelques secondes) ;
[6]
• les fibres dites intermédiaires de type IIa .
La répartition de ces fibres diffère entre les muscles de l’organisme et en fonction de l’entraînement. Par exemple, le diaphragme, essentiel
à la respiration [7] , ou encore les muscles posturaux possèdent un plus grand nombre de fibres lentes. À l’inverse, le triceps brachial
possède, lui, une majorité de fibres rapides.
Enfin, pour que la contraction musculaire perdure longtemps lors d’un effort, il faut qu’il y ait un apport constant d’énergie. L’oxygène est la
principale source de renouvellement de cette énergie. Le transport de l’oxygène et son utilisation au sein du muscle conditionnent la
pérennité du mouvement. L’oxygène est transporté sous forme dissoute dans le sang via les vaisseaux sanguins, à partir des poumons vers
le cœur, puis vers les muscles ou autres organes consommateurs. En effet, tout organe du corps consomme de l’oxygène pour fonctionner.
On considère ainsi qu’au repos le métabolisme de base consomme 3,5 ml d’oxygène, par minute et par kilogramme de poids de corps, soit
près de 350 l d’oxygène par jour pour un individu de 70 kg ! Plus l’effort augmente, plus les muscles sont actifs et plus ils consomment de
[8]
l’ATP .
Le meilleur moyen d’évaluer la fonction musculaire lors d’un effort est de mesurer la consommation maximale d’oxygène que peut produire
un individu lors d’un exercice dit incrémental. L’évaluation la plus couramment utilisée est la mesure à la bouche de la calorimétrie
respiratoire indirecte appelée VO 2 max. Cet examen permet d’observer l’adaptation cardiaque via un électrocardiogramme, l’adaptation
respiratoire par la mesure de la ventilation pulmonaire immédiate et l’adaptation musculaire par la mesure des échanges gazeux
(consommation d’O 2 et production de CO 2 ). Cette épreuve permet également de déterminer la puissance maximale aérobie (PMA) du sujet
et se réalise généralement sur ergocycle ou sur tapis de marche [9] .
• anaérobie alactique, pour les efforts intenses mais très brefs (quelques secondes) ;
• anaérobie lactique, pour les efforts très intenses (environ 1 minute) ;
• aérobie, pour des efforts modérés et longs.
Filière aérobie
Pour des efforts qui durent de plusieurs minutes à plusieurs heures, le métabolisme aérobie va permettre de fournir une grande quantité
d’ATP via l’oxydation des glucides et des lipides dans le cytosol et dans la mitochondrie périmusculaire. Son délai pour maximiser son effet
est relativement long, environ 3 minutes pour l’oxydation des glucides et 30 minutes pour l’oxydation des lipides. L’oxydation complète des
réserves en glucides et glycogène va être un facteur limitant pour un effort proche de 70 % de PMA. Cet effort sera cependant maintenu
pendant 1 h à 1 h 30. L’oxydation des lipides permet théoriquement de fournir un effort de faible puissance (30 % de PMA) pendant plusieurs
jours. Cette oxydation des substrats entraîne une production de résidus : du CO 2 et de l’eau [1 6 9] .
Cette filière énergétique est sollicitée pour toutes les activités de la vie quotidienne (marche, travail léger). Il est à noter qu’au début de tout
effort toutes les filières énergétiques sont sollicitées et vont ainsi créer une dépense énergétique, alors que la filière aérobie n’est pas
optimale. Cette dépense initiale, qu’on peut appeler « dette en oxygène », engendre les déchets métaboliques devant êtres éliminés (CO 2 ,
lactates, radicaux libres…). En fin d’effort, le système aérobie contribue à l’élimination de ces déchets, se traduisant par une ventilation
importante (essoufflement), et permet, par remboursement de la dette en oxygène, un retour à l’état de repos [9 10] .
Tout d’abord, il est intéressant de rappeler que la consommation maximale d’oxygène (VO 2 max) correspond au produit du débit cardiaque
et de la différence artérioveineuse en oxygène [11] . Autrement dit, la consommation maximale d’oxygène dépend des capacités de
transport et d’extraction de l’oxygène dans les tissus périphériques. Par ailleurs, le débit cardiaque dépend lui-aussi de deux facteurs : la
fréquence cardiaque (FC) et le volume d’éjection systolique (VES). Cette définition de la VO 2 max peut se traduire par l’équation suivante, qui
illustre le principe de Fick [12] :
Dans cette partie, nous nous focaliserons principalement sur la fonction cardiaque, et plus précisément sur l’évolution du débit cardiaque et
de ses déterminants à l’effort.
Ce paramètre est facilement mesurable. Il peut notamment être déterminé par le pouls (à l’artère radiale ou carotide, par exemple), par le
biais d’un cardiofréquencemètre ou d’un électrocardiogramme. Il est préférable de mesurer la FC de repos le matin au réveil. En effet, la FC
prise avant un exercice ne reflétera pas la véritable FC de repos. Le système nerveux autonome et, plus précisément, le système nerveux
sympathique et la glande médullosurrénale vont libérer des hormones (catécholamines : adrénaline et noradrénaline) qui vont augmenter
la FC en réponse anticipée à l’effort qui va suivre.
Au cours d’un exercice incrémental jusqu’à épuisement (épreuve de VO 2 max), nous pouvons observer une relation linéaire entre la FC et
l’intensité de l’effort. Plus l’intensité de l’effort augmente, plus la FC sera élevée.
Comme décrit précédemment, la FC est sous l’influence du système nerveux autonome. Elle dépend du rythme imposé par le nœud sinusal
(situé dans l’oreillette droite). Ce nœud sinusal est innervé par des terminaisons nerveuses sympathiques et parasympathiques qui vont,
respectivement, augmenter ou diminuer la fréquence cardiaque. Au repos, le système nerveux parasympathique est prédominant, ce qui
limite la fréquence cardiaque à environ 60-80 bpm pour des sujets sains. Les sujets très entraînés et les athlètes de haut niveau peuvent
descendre en dessous des 40 bpm. Lors des premières minutes de l’effort, la FC augmente grâce à la levée de l’inhibition parasympathique,
puis, dans un second temps, la FC s’accélère via une augmentation de l’activité sympathique. La FC maximale peut s’élever jusqu’à 3 fois la
valeur de repos, soit environ 210 bpm.
Il est également possible d’estimer la FC maximale à partir d’équations mathématiques. L’âge est le principal facteur influençant la FC, et
on estime que celle-ci diminue d’environ 1 bpm chaque année (entre 0,7 et 0,9 bpm, plus précisément). L’équation la plus démocratisée et
utilisée est celle d’Astrand et Rhyming (1954) [11] :
Néanmoins, cette formule présente plusieurs limites. En effet, cette équation n’est pas valable chez les sujets très entraînés, chez les
personnes atteintes de pathologies cardiaques ou encore sous bétabloquants. D’autres équations ont vu le jour afin d’obtenir un résultat
plus précis, mais nous ne détaillerons pas davantage ces calculs dans cet article [13 14] .
Le VES est moins facilement mesurable que la FC de manière non invasive. Il est généralement évalué à partir d’imageries médicales
comme une échocardiographie ou une imagerie par résonance magnétique [15] .
À la différence de la fréquence cardiaque, qui augmente de façon linéaire avec l’augmentation de l’intensité d’exercice, le VES atteint son
maximum autour de 40-60 % des capacités maximales du sujet, soit 40-60 % de sa VO 2 max. Au-delà de ces valeurs, le VES reste
relativement stable jusqu’à la fin de l’effort. Au repos, les individus actifs ont un VES équivalent à 50-70 ml et pouvant aller jusqu’à 120 ml à
l’exercice maximal. Le VES des athlètes très entraînés varie entre 80 et 110 ml, et entre 160 et 200 ml au maximum de l’effort. Par ailleurs, il
est important de noter que le VES peut également osciller selon l’âge, le sexe et la position du corps [16 17] .
L’augmentation du VES à l’exercice s’explique généralement par deux mécanismes. Le premier est lié à l’augmentation du retour veineux
induisant un remplissage de sang plus important dans les ventricules. Cela fait appel à la loi de Frank-Starling, qui stipule qu’un étirement
plus important de la paroi des ventricules va permettre de développer une plus grande force de contraction ventriculaire et ainsi une
meilleure éjection du sang.
Le second processus est l’augmentation de la force de contraction myocardique, qui peut provenir d’un stimulus nerveux et/ou d’une
concentration plus élevée en catécholamines induisant un VES plus important.
L’augmentation du VES serait d’abord (ou pour des faibles niveaux d’intensité) due à une augmentation du VTD, donc à un meilleur
remplissage des ventricules, faisant écho à la loi de Frank-Starling. Puis, dans un second temps (pour des niveaux d’intensité plus élevés), le
VTD atteignant une valeur seuil, l’augmentation du VES proviendrait davantage d’une meilleure contractilité du myocarde, illustrée par une
meilleure vidange des ventricules ( Fig. 3 (/student/content/book/51-s2.0-S1283088724472939#fig0015) ).
Figure 3
Évolution des volumes télédiastoliques et télésystoliques avec l’augmentation croissante de l’intensité d’exercice. VES : volume
d’éjection systolique ; VTDVG : volume télédiastolique du ventricule gauche ; VTSVG : volume télésystolique du ventricule gauche ; P max
: puissance maximale.
Débit cardiaque
Le débit cardiaque augmente de façon proportionnelle avec l’intensité de l’exercice. Autrement dit, plus la puissance de travail est élevée,
plus le débit cardiaque sera important. Cette augmentation du débit cardiaque s’explique par l’augmentation concomitante de la FC et du
VES jusqu’à 40-60 % de la VO 2 max du sujet sain, puis essentiellement par l’accélération de la FC jusqu’au maximum de l’effort ( Fig. 4
(/student/content/book/51-s2.0-S1283088724472939#fig0020) ).
Figure 4
Évolution du débit cardiaque, de la fréquence cardiaque et du volume d’éjection systolique avec l’augmentation progressive de
l’intensité d’exercice. Qc : débit cardiaque ; FC max : fréquence cardiaque maximale ; VES : volume d’éjection systolique ; P max : puissance
maximale.
Le débit cardiaque est d’environ 5 l/min au repos chez le sujet sain. Il peut atteindre 3 à 6 fois la valeur de repos lorsque le sujet est à la
puissance maximale de travail. L’élévation du débit cardiaque permet d’assurer l’augmentation des besoins en oxygène par les muscles
actifs [9] .
Système veineux
À l’effort, le retour veineux est augmenté, ce qui permet d’apporter plus de sang au cœur et ainsi de contribuer à l’application de la loi
Frank-Starling. En d’autres termes, une quantité de sang plus importante parvient au cœur, les ventricules accueillent un plus grand volume
et une plus grande pression de sang, ce qui favorise une meilleure éjection du sang dans le système artériel.
Le retour veineux dépend principalement du volume sanguin, du tonus veineux et des « pompes » musculaire et respiratoire. La pompe
musculaire illustre la contraction des muscles actifs qui compriment les veines qui les entourent. Ces différents facteurs favorisent le retour
veineux.
Système artériel
À l’exercice, le débit sanguin est plus élevé, ce qui conduit à une hausse de la quantité de sang éjectée dans les artères, mais encore faut-il
qu’elle arrive à alimenter les organes qui en ont (le plus) besoin. Dans ce sens, des variations de pression artérielle permettent localement
de diminuer le débit sanguin par vasoconstriction des organes inactifs (foie, viscères, rein…), afin de favoriser les organes ayant un besoin
accru en oxygène (muscles squelettiques, cerveau). La pression artérielle moyenne dépend à la fois du débit cardiaque et des résistances
périphériques totales. Avec l’augmentation de l’intensité d’exercice, l’activation du système nerveux sympathique va entraîner une
vasodilatation locale des muscles actifs et une vasoconstriction générale. La vasodilatation diminue les résistances à l’écoulement du sang.
En pratique, on mesure lors des efforts des variations de pression artérielle systolique (PAS) et diastolique (PAD). Plus précisément, la PAS
augmente de manière significative, alors que la PAD reste faiblement impactée. De ce fait, l’augmentation de la pression artérielle moyenne
est liée essentiellement à l’augmentation de la pression artérielle systolique [1] .
Adaptations ventilatoires
Le but de la ventilation pulmonaire est d’amener l’oxygène présent dans l’air ambiant jusqu’aux alvéoles, où il va diffuser dans le sang, et
d’éliminer le CO 2 présent dans l’alvéole vers l’extérieur du corps (CO 2 issu de la respiration cellulaire et plus particulièrement, dans notre
cas, de l’exercice musculaire). Afin de détailler l’évolution de la ventilation au cours de l’effort, il convient avant tout de définir le
fonctionnement neuromusculaire du système respiratoire ainsi que les différents volumes pulmonaires mobilisables au cours de l’exercice
[8] .
On peut définir trois volumes pulmonaires mobilisables volontairement et automatiquement : le volume courant, appelé VT (volume tidal ),
ainsi que les volumes de réserve inspiratoire (VRI) et expiratoire (VRE), balayés lors d’efforts ventilatoires maximaux ( Fig. 5
(/student/content/book/51-s2.0-S1283088724472939#fig0025) ). Au repos, en fin d’expiration lente, le système thoracopulmonaire est en équilibre
dans une zone en bas du VT et en haut du VRE, appelée capacité résiduelle fonctionnelle (CRF). En respiration calme, seul le volume courant
est utilisé, soit environ 500 ml. Au cours d’un effort, pour assurer les échanges gazeux, les autres volumes seront mis à contribution dans des
proportions variables en fonction de l’intensité de l’exercice. Le volume d’air ventilé peut alors être multiplié par 6 ou 7 (jusqu’à 3,5 l par
cycle), nous reviendrons dessus dans la partie sur l’adaptation ventilatoire à l’effort [8 9] .
Figure 5
Évolution de la ventilation au cours d’un exercice dynamique d’intensité croissante. CPT : capacité pulmonaire totale ; VRI : volume de
réserve inspiratoire ; VT : volume courant ; CRF : capacité résiduelle fonctionnelle ; VRE : volume de réserve expiratoire ; VR : volume
résiduel ; I : inspiration ; E : expiration.
Muscles respiratoires
Au repos, seule l’inspiration est active. Le diaphragme est le seul muscle inspiratoire participant activement lors de la respiration calme. En
simplifiant, sa contraction le fait descendre vers l’abdomen et crée une dépression dans le thorax, permettant ainsi une entrée d’air dans les
poumons. Les muscles intercostaux externes sont adjuvants au travail inspiratoire, ils permettent de rigidifier le thorax et d’élever les côtes.
Lors des efforts, ou en situation pathologique, les muscles dits accessoires de l’inspiration peuvent intervenir. Ce sont, au niveau du cou, les
scalènes et le sterno-cléido-occipito-mastoïdien (SCOM) et, au niveau des épaules, le petit pectoral. Leur contraction permet d’augmenter le
volume thoracique [8] .
Contrairement à l’inspiration, l’expiration est un phénomène passif. Le relâchement du diaphragme permet un retour du système élastique
thoracopulmonaire à une position dite de repos (à la CRF). Cependant, lors d’efforts soutenus, le besoin d’accélérer et/ou d’augmenter
l’expiration implique les muscles expirateurs accessoires que sont les intercostaux internes, les grands droits de l’abdomen et les obliques
internes. Leur contraction permet, pour les premiers, un abaissement des côtes et, pour les muscles abdominaux, une compression de
l’abdomen, ce qui refoule le diaphragme vers le haut [8] .
Au repos, un abaissement du diaphragme de 1 cm est suffisant pour assurer la mobilisation du volume courant. À l’effort ou de manière
volontaire, les inspirations et expirations peuvent amener celui-ci à agrandir son excursion jusqu’à 10 cm [18 19] . L’activation des muscles
accessoires va permettre d’augmenter le volume de la cage thoracique. Conjointement, la bronchomotricté joue un rôle sur l’augmentation
des débits inspiratoires et expiratoires. Trois éléments permettent un contrôle de la ventilation : les centres de contrôle, les récepteurs et les
effecteurs.
Contrôle de la ventilation
Le tronc cérébral est responsable de la périodicité automatique de la respiration. Cependant, le cortex peut prendre le dessus lorsqu’une
ventilation volontaire est nécessaire.
Lors de la respiration automatique, c’est le tronc cérébral qui est responsable de l’inspiration et de l’expiration, via le centre respiratoire
bulbaire . L’inspiration est stimulée périodiquement et automatiquement, la zone expiratoire est silencieuse lors de la respiration calme et
devient active en cas d’exercices physiques. Un centre apneustique aurait un rôle excitateur de la zone inspiratoire. Enfin, un centre
pneumotaxique permettrait un contrôle fin de la fréquence respiratoire en limitant le temps inspiratoire [10] .
L’inspiration et l’expiration sont régulées en fonction de la variation de concentration d’ions et de molécules au contact de récepteurs
spécifiques. Des récepteurs centraux, sensibles aux variations de l’acidité du milieu (ions H+ issus de la respiration cellulaire en lien avec la
contraction musculaire) [20] , sont présents dans le cerveau, au contact du liquide céphalorachidien. D’autres récepteurs, plus
périphériques, présents au niveau des carotides et de la crosse de l’aorte, sont sensibles aux variations de pression partielle en O 2 , en CO 2
et au pH sanguin. Dans le poumon, des récepteurs sensibles à l’étirement ou à l’irritation informent les centres respiratoires de la condition
locale. Enfin, des récepteurs présents au niveau des nerfs, muscles et articulations informent sur la nécessité de stimuler la ventilation lors
des mouvements [9] .
Cependant, pendant la respiration automatique, il est possible, via le cortex moteur, de prendre volontairement le contrôle de la ventilation
en réalisant consciemment une hyperventilation ou une apnée.
Contrôle de la bronchomotricité
Comme les vaisseaux sanguins périalvéolaires, les bronches sont soumises à la traction radiale du poumon. Ainsi, passivement, leur calibre
augmente lorsque le poumon se distant, ce qui diminue leur résistance à l’écoulement de l’air. Au contraire, leur diamètre se réduit et peut
même se fermer à très bas volume pulmonaire, augmentant les résistances [8 9] .
L’augmentation ou la diminution du calibre des bronches et donc de leur résistance peut être modifié automatiquement par une
bronchodilatation ou une bronchoconstriction. La contraction ou la relaxation des fibres musculaires lisses sur la paroi des bronches est
sous le contrôle du système nerveux autonome parasympathique via le nerf vague. L’inspiration va étirer les mécanorécepteurs et participer
à la bronchodilatation par inhibition du tonus musculaire. Toute irritation des voies aériennes (froid, fumée, corps étrangers) va conduire à
une stimulation rapide du système parasympathique et conduire à une bronchoconstriction. De même, une diminution de la pression en CO
dans les alvéoles va engendrer une action directe sur le muscles lisses des bronchioles et entraîner une bronchoconstriction [10] .
2
Cependant, pour bien analyser l’évolution de la ventilation, une épreuve d’effort incrémentale de type VO 2 max permet de distinguer une
phase de transition de la ventilation. Cette phase de changement de statut ventilatoire reflète un besoin métabolique accru en O 2 et
l’utilisation de la filière métabolique anaérobie lactique pour fournir le surplus d’énergie nécessaire. Cette zone d’accroissement brutal de la
ventilation est appelée seuil ventilatoire ou, plus exactement, premier seuil ventilatoire (SV1). À partir de là, la ventilation ne va cesser de
s’accroître de manière exponentielle pour fournir de l’O 2 et éliminer le CO 2 . En parallèle, les lactates vont s’accumuler dans le muscle et
acidifier le sang par l’accumulation d’ions H + .
Les mécanismes qui régulent l’adaptation ventilatoire à l’effort avant l’atteinte du premier seuil sont encore débattus. Classiquement, trois
modèles sont défendus :
• selon Wasserman et al. (1982), l’augmentation de la ventilation serait stimulée via les voies humorales des chémorécepteurs pulmonaires
sensibles aux variations de pression en CO 2 [21] ;
• selon Eldridge et al. (1981), l’adaptation serait d’ordre neurologique, liée à l’activité motrice des muscles périphériques [22] ;
• enfin, selon Caiozzo et al. (1982), la ventilation serait stimulée par l’action simultanée des voies humorales et nerveuses périphériques [23]
.
Plus mécaniquement, la ventilation pulmonaire est le fruit de la fréquence respiratoire et du volume courant. Lors des efforts avec
augmentation progressive de l’intensité, on peut noter, avant SV1, que la ventilation est essentiellement assurée par une augmentation du
volume courant et, pour une moindre part, de la fréquence respiratoire ( Fig. 6 (/student/content/book/51-s2.0-S1283088724472939#fig0030) ). Cette
augmentation graduelle permet de passer d’une ventilation moyenne au repos de 7,5 l d’air par minute (500 ml x 15 cycles) à une ventilation
de fin d’effort maximal égale à plus de 120 l/min (3,5 l x 35 cycles). En fin d’effort, pour des puissances au-delà de SV1, l’adaptation
ventilatoire met en évidence une hyperventilation liée à une forte augmentation de la fréquence respiratoire [9] .
Figure 6
Évolution de la ventilation à l’effort croissant chez le patient souffrant de bronchopneumopathie chronique obstructive représentant
l’évolution du volume courant et de la fréquence respiratoire au cours de l’effort. CPT : capacité pulmonaire totale ; VRI : volume de
réserve inspiratoire ; VT : volume courant ; CRF : capacité résiduelle fonctionnelle ; VRE : volume de réserve expiratoire ; VR : volume
résiduel ; I : inspiration ; E : expiration.
L’augmentation du volume courant au cours de l’effort est en grande partie due à la diminution du VRI par la mise en jeu des muscles
[24]
inspirateurs accessoires . Cet accroissement du volume courant dans des valeurs se rapprochant de la capacité pulmonaire totale
permet d’augmenter la traction radiale du poumon, améliorant ainsi la ventilation au sein des alvéoles. Dans une moindre mesure, le
volume courant s’accroît aussi en augmentant le recrutement dans le VRE grâce à la mise en jeu des muscles expiratoires. À SV1,
l’accroissement de la ventilation ne va pas induire dans la même mesure une élévation de la consommation d’O 2 mais va plutôt participer
à l’élimination d’une production accrue de CO 2 . Après passage du SV1, l’hyperventilation par l’augmentation de la fréquence respiratoire
va être la stratégie la moins coûteuse. De plus, la mise en jeu importante des muscles expiratoires va induire une diminution de la part de la
ventilation dans le VRE, avec un maintien de l’augmentation de la ventilation dans le VRI. En fin d’exercice, la consommation d’O 2 atteint
un plateau, et la forte amplitude ventilatoire est nécessaire pour l’élimination du CO 2 . À ce moment, l’accumulation des déchets, l’acidose
métabolique, l’hyperventilation et la sensation de fatigue vont conduire à l’arrêt de l’exercice [9 24] .
Cette hyperinflation est majorée à l’effort. Le débit ventilatoire expiré (VE) est dirigé par la production du CO 2 (VCO 2 ), conséquence de
l’augmentation du métabolisme durant l’exercice [20] . Or la vidange pulmonaire étant ralentie dans la BPCO, la ventilation se fait alors à
haute vitesse (tachypnée) et à petits VT, avec une expiration incomplète et un piégeage d’air plus important ne participant pas aux
échanges gazeux (augmentation des espaces morts = VD). Ce phénomène temporaire est appelé hyperinflation dynamique [25] ( Fig. 6
(/student/content/book/51-s2.0-S1283088724472939#fig0030) ).
Lors des efforts importants, les patients BPCO ont donc une respiration proche de leur capacité pulmonaire totale. Cela est majoré par les
déformations de la cage thoracique qui accompagnent l’hyperinflation statique et placent les muscles inspiratoires en position raccourcie.
Les muscles sont en incapacité fonctionnelle, alors qu’ils doivent faire face à une tension élastique et un seuil inspiratoire augmentés (pour
surmonter la PEPi) [26] . Cette incapacité d’adaptation supplémentaire a un impact sur la capacité d’adaptation ventilatoire à l’effort.
La différence entre le volume pulmonaire en fin d’inspiration et la capacité pulmonaire totale (c’est-à-dire la réserve inspiratoire) dicte en
grande partie la relation entre la commande neurale inspiratoire et la réponse associée de la mécanique musculaire du système
respiratoire, ce qui définit le degré de dyspnée ressenti tout au long de l’exercice [27 28] . En d’autres termes, la diminution dynamique du
volume de réserve inspiratoire fournit des informations sur l’étendue de la dissociation neuroventilatoire du système respiratoire et est
fortement corrélée à l’intensité de la dyspnée [26] . Plus l’hyperinflation statique au repos est importante au départ, et plus le temps
d’exercice est court avant que le volume courant n’atteigne un plateau et que la dyspnée ne s’accroisse brusquement. Elle conduit alors à
une augmentation de la commande respiratoire non suivie d’une augmentation des volumes courants et donc une dissociation
neuroventilatoire sévère [25] . Certains auteurs ne parlent plus d’augmentation du coût respiratoire mais « d’effort inspiratoire non
satisfait » [29] .
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