T21-C3
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Si le monde fonctionnait selon les théories libérales, c’est-à-dire si les facteurs de production ne franchissaient pas
les frontières, alors les FMN n’existeraient pas. Pourtant, on voit bien l’inverse se produire. Dès lors :
Qu’est-ce qui pousse une entreprise à étendre son activité à l’étranger ? Pourquoi ne se contente-t-elle pas
d’exporter ? Quels effets ont ces mouvements internationaux de k sur le pays d’accueil, d’origine ou sur le CI ?
Une firme multinationale est une entreprise qui développe son activité de production dans au moins un autre
pays que son pays d’origine. Une entreprise est dite multinationale à partir du moment où elle contrôle au moins
10% du capital d’une entreprise qui produit dans une autre pays, quelle que soit sa taille.
Le terme de FTN, employé par l’ONU, met l’accent sur deux choses :
- Le constat que lorsque les firmes étendent leur activité à l’étranger, elles ne perdent pas leur nationalité.
- Le fait que les entreprises ne se contentent pas d'être présentes dans plusieurs pays, elles passent à travers
leurs frontières pour optimiser les bénéfices de leurs activités, elles passent en quelque sorte « à travers »
les États, sans pour autant faire disparaître le rôle de ces derniers dans l'économie. Ici, les FTN désignent
donc les firmes nationales qui opèrent dans plusieurs pays.
Wladimir ANDREFF (Les multinationales globales, 1993) distingue, lui, trois types de FMN :
- Les mini-multinationales : elles sont présentes dans un petit nombre de pays. Leur production y est
destinée aux marchés locaux (ce sont des filiales relais/clones).
- Les multinationales banales : elles délocalisent une partie de leur Y pour avoir accès à de nouveaux
marchés, ou simplement pour baisser leurs coûts de Y (économies d’échelle ou accès matières premières).
Ce sont des filiales ateliers dont la production est destinée au marché mondial.
- Les multinationales globales : le marché auquel elles s’adressent est mondial. Elles n’hésitent pas à mettre
en concurrence les territoires.
Une FMN est souvent le cœur d’un ensemble plus vaste : un groupe multinational dont la composition dépasse la
maison-mère et ses filiales puisqu’elle inclut aussi des sous-traitants (indépendants de la FMN), ainsi que des
réseaux d’alliances pour la production de certains biens (alors que concurrence sur le marché global).
Selon la CNUCED (2019), il y a environ 100k FTN dans le monde (contre 35k au début des années 1990) et environ
1 million de filiales employant près de 80 millions de personnes. En tout, ces FTN représente 11% du PIB mondial
(8300M) et sont à l’origine de 2/3 du CI, dont la ½ correspond à du commerce intrafirme. Pour l’essentiel, les FTN
ont pour origine des PDEM même si les FTN des pays émergeants se développement rapidement.
Ex : Au début du XXIème siècle, il n’y avait qu’une entreprise chinoise dans le Top 500 des CA mondiaux.
Aujourd’hui, il y a plus d’entreprises chinoises qu’américaines (124 contre 121).
Depuis 1995, la CNUCED utilise un indice de transnationalité pour évaluer le degré de multinationalisation des
firmes. La transnationalité des firmes résulte de plusieurs indicateurs composites :
- Achat d’une firme à l’étranger/Actifs totaux de la firme
- Emploi à l’étranger/emploi total de la firme
- Vente à l’étranger/Ventes totales de la firme
On parlera d’IDE horizontal si l’objectif de la FMN est de répliquer dans une filiale le processus de production de la
maison mère et d’un IDE vertical si la FMN fragmente sa GVC pour localiser différentes tâches en différents lieux à
l’aide de filiales installées à l’étranger, de façon à exploiter pleinement les avantages comparatifs de chaque pays.
Les décisions d’investissement verticaux contribuent très largement à la forte croissance des IDE mondiaux,
notamment vers les PED, et sont principalement guidés par les différences de coûts de production. Au contraire,
les IDE horizontaux ciblent principalement la proximité de la demande et donc les PDEM.
Note : Entre 1982 et 2015, le PIB mondial a été multiplié par 6, les X de B&S par 10, les stock d’IDE sortants par 40.
Avant même la révolution industrielle, les compagnies de navigation forment des premières formes de FMN, même
si leur production est principalement liée à l’exploitation de produits primaires et à leur transport.
A cette période, le contexte est encore celui de la DIT traditionnelle. Celle-ci se caractérise notamment par
l’exploitation de matières premières dans les pays exploités. Les IDE se dirigent donc surtout vers les pays non-
industrialisés offrant un cadre institutionnel favorable.
Données : En 1914, les firmes multinationales anglaises représentent encore 50% du stock d’IDE mondial, contre
20% pour les USA, 10% pour la France, et 10% pour l’Allemagne. Les 4 pays représentent donc 80% du stock.
55% du stock d’IDE est alors à destination des secteurs agricoles ou miniers, 20% à destination de la sidérurgie
(chemin de fer), 15% à destination des produits manufacturés, 10% à destination des services.
Jusque vers 1850, les échanges internationaux étaient concentrés entre les mains de grandes familles (Rothschild,
Baring, Hope), de grandes entreprises et d’institutions. Mais petit à petit, l’essor des banques de dépôts a permis à
de très nombreux petits épargnants de s’insérer dans le marché international des capitaux.
En 1902, la Grande-Bretagne envoyait environ 30% de ses investissements à l’étranger à l’intérieur de son empire
et 70% vers des pays politiquement indépendants comme les USA.
De manière surprenante, les petits épargnants français avaient, eux, alors plus tendance à se tourner vers l’étranger
dans des pays émergents tels que la Russie (¼ des capitaux français à l’étranger), la Turquie ou encore les pays
d’Amérique latine. Moins de 10% était investi dans les colonies. L’espoir est souvent que les grands pays avec une
grande population mais une industrie peu développée devienne un marché de consommation important à l’avenir.
D’ailleurs, les I se concentraient dans la métallurgie, l’acier, le fer, les mines, le textile et l’habillement.
Pb : En 1918, les 2/3 des avoirs français à l’étranger de 1914 étaient perdus.
Pourquoi ne pas avoir investi en France ? Le faible rendement des I en France était dû, selon les libéraux, à une g
trop molle, à la stagnation démographique, au taux d’S trop élevé, et à la rareté des opportunités intéressantes.
Par ailleurs, pour l’Etat français, l’enjeu était aussi géopolitique : casser l’alliance entre les Russes et les Allemands.
Ainsi, un accord secret d’alliance militaire est signé par le tsar en 1893. Pour convaincre les épargnants d’investir
en Russie, le levier principal était le contrôle de l’introduction des valeurs étrangères à la Bourse de Paris, l’impôt,
mais surtout la corruption des journalistes, d’autant plus élevée que la situation russe se dégradait.
2) Les FMN de 1914 à 1945
Malgré le contexte peu favorable au commerce, l’essor des FMN se poursuit (le stock d’IDE mondial double),
notamment celui des FMN américaines. Avant la 2GM, le stock d’IDE américain représente 30% du stock mondial,
contre 40% pour le RU. Plus globalement, la part des firmes européennes dans le stock d’IDE décline alors que les
firmes nord-américaines consolident leurs positions (industries électriques, automobiles, pneumatiques, etc.)
Dans les années 1920, les stratégies de marché se développent. Elles visent à pénétrer les marchés étrangers en
contournant les barrières douanières, à contrer les difficultés de transport de certains produits industriels fragiles
ou à bénéficier de l’avantage de la production à proximité immédiate de certains marchés de consommation.
Ex : Ford s’implante en Europe, en Australie et en Amérique Latine.
Mais le contrôle de l’approvisionnement en matières premières reste une préoccupation plus marquée.
Ex : La Standard Oil s’installe en Amérique latine, Dunlop installe des plantations d’hévéas dans les pays tropicaux.
D’ailleurs, 66% du stock mondial d’IDE se situe alors dans les PED en 1938.
Dans les années 1950-1960, la stratégie de marché devient dominante et les filiales relais s’implantent dans les
PDEM. Si 155 filiales étrangères sont créées ou acquises par des sociétés mères étrangères en moyenne chaque
année entre 1946 et 1958, ce rythme est multiplié par 4 en moyenne entre 1959 et 1967 selon P. VERLEY (1994).
Dans les années 1960, 2/3 des IDE vont du Nord vers le Nord, contre 1/3 avant la 2GM.
Cependant, dans les années 1950-1960, le taux de croissance des IDE est plus faible que celui du commerce
mondial, le commerce international de produits finis restant le moyen privilégié par lequel s’exprime la concurrence
entre les firmes. L’expansion des FMN provient surtout des firmes américaines (52% des IDE en 1960) qui vont
notamment partir à la conquête de la « forteresse Europe », craignant que la construction européenne ne pousse
à l’érection de barrières douanières à l’extérieur du marché commun. Cet essor est aussi favorisé par la stabilité
hégémonique des USA et la création d’institutions supranationales (FMI, GATT).
A partir des années 1970, le taux de croissance des IDE s’aligne sur celui du commerce mondial : 5% de hausse
annuelle moyenne. Avec la naissance des NPI va se développer dès les années 1970 la stratégie de rationalisation
des coûts de production, d’où un développement des IDE Nord-Sud. Les FMN développement des filiales ateliers
dans les pays émergents pour y profiter des coûts du L moins élevés et de contraintes juridiques et fiscales moins
fortes. Cette stratégie pousse à la délocalisation des activités intensives en L peu qualifié des PDEM vers les PED.
Cette stratégie entre dans le cadre du cycle de vie du produit de VERNON (1966). Généralement, seuls certains
segments de production sont délocalisés vers les pays émergents dans des filiales ateliers.
Si la production se prête à la DIPP, c’est seulement en raison du coût désormais très bas du transport de
marchandises et de la baisse des coûts de coordination des activités entre plusieurs lieux de production,
consécutives aux NTIC. Les firmes développent alors une approche modulaire de la production qui ressemble
désormais à un jeu de lego (S. BERGER). Les mêmes composants peuvent alors être utilisés selon différents schémas
dans la production de finis variés, ce qui favorise l’innovation et l’invention de nouvelles combinaisons de pièces.
Si cette logique ne favorise pas a priori le développement du CI (les IDE formant des substituts aux X), la DIPP
engendre au contraire l’essor d’un commerce intrafirme de produits semi-finis qui dynamise les échanges mondiaux
de marchandises. De la conception des produits à leur commercialisation, les GVC contrôlées par les FMN sont ainsi
à l’origine de 80% des échanges internationaux.
Après une accélération temporaire des IDE dans les années 2000 (près de 17% de la FBCF contre 2% auparavant),
puis le nouveau pic atteint en 2007 (13,6%), les flux d’IDE ont ralenti après 2008 et ceux à destination des PDEM
sont même en diminution depuis 2016. Le stock d’IDE mondial reste cependant élevé (plus de $37.000M en 2019,
dont près de 2/3 dans les pays de l’OCDE selon l’OCDE).
C) Les causes de la multinationalisation des firmes
John H. DUNNING (International Production and the Multinational Enterprise, 1981) propose une approche
globale des facteurs explicatifs de l’investissement direct à l’étranger dans laquelle apparaissent des éléments
comme la concurrence imparfaite, les avantages comparatifs et l’internalisation des coûts de transaction. Cette
approche, dite « éclectique » fait de la multinationalisation le résultat d'une combinaison de trois éléments
interdépendants appelée le paradigme OLI (Ownership, Localisation, Internalisation) :
• L’avantage à la localisation est l'existence d'un avantage à produire dans plusieurs pays plutôt que
d'exporter à partir d'une production dans le seul pays d'origine pour plusieurs raisons :
> Une présence physique est nécessaire dans les industries de services.
> Dans le cadre de la DIPP, les différences des prix et des salaires jouent un rôle important.
> La délocalisation peut également répondre à une volonté de s'affranchir d'entraves au commerce (frais
de transport des produits, protectionnisme commercial du pays d'accueil).
> Pour permettre une meilleure adaptation au marché (connaissance du consommateur local,
ajustement aux normes locales, meilleure connaissance des concurrents locaux).
• L’avantage à l'internalisation réside dans la possibilité de réduire les coûts associés aux transactions entre
sociétés indépendantes (liés à la passation des contrats commerciaux et à la garantie de la qualité). Il s’agit
d’acquérir une entreprise cliente ou fournisseur parce que les coûts de transaction sont supérieurs aux
coûts d’organisation (COASE, La théorie de la firme, 1937). L’internalisation assure un meilleur contrôle sur
l'utilisation des technologies, notamment si l'environnement juridique dans le pays d'accueil n'offre pas des
garanties jugées suffisantes en matière de protection de la propriété intellectuelle.
CCL : Le paradigme OLI envisage plusieurs situations dans lesquelles une entreprise peut se trouver :
- Si une firme réunit simultanément les trois types d’avantages (spécifique, à la localisation et à
l’internalisation), l’IDE comme mode de pénétration du marché étranger est choisie.
- S’il n’y a pas d’avantage à la localisation mais un avantage spécifique et un avantage à l’internalisation, la
firme se contente d’exporter et d’établir son propre réseau de vente.
- Si la firme ne possède qu’un avantage spécifique, elle effectue alors une vente de licence auprès d’une
entreprise locale et lui laisse le soin d’exploiter le marché de son pays.
2) La diversité des stratégies des FTN :
Les raisons qui peuvent pousser une firme à localiser au moins une partie de sa production à l’étranger sont donc
multiples. El MOUHOUB MOUHOUD, (Mondialisation et délocalisation des entreprises, 2008) propose une
typologie des stratégies de localisation des firmes.
Type de
délocalisation Déterminants et impacts Exemples
Du fait de la concurrence internationale, Lafuma : 1/3 de la production est resté en
Délocalisation nécessité de retrouver de la France, le reste a été délocalisé dès 1986 en
défensive compétitivité prix (question de survie), Tunisie, au Maroc puis en Hongrie et Chine.
en maintenant cependant les activités
de conception et de R&D dans le pays
d’origine.
Délocalisation de la production dans les Habillement, chaussure, jouet : les marques
Comportement de pays à bas salaires et vente dans les pays délocalisent (ou sous-traite) la production
marge d’origine mais sans répercuter toute la dans les pays à plus faibles coûts de
baisse des coûts de production. En production.
maintenant les prix au même niveau, la
firme pour ainsi augmenter les marges.
Les équipementiers automobiles suivent les
Délocalisation Les fournisseurs suivent leurs clients qui constructeurs comme Valéo qui suit Seat et
induites, forcées ou délocalisent Volkswagen en Slovaquie.
d’accompagnement
FOCUS :
En 1967, Rossignol rachète Dynastar, un an avant les Jeux olympiques de Grenoble. Succès techniques, succès
commerciaux, succès sportifs, c’est l’âge d’or du ski made in France. C’est aussi l’époque où l’usine Dynastar
s’installe à Sallanches.
En septembre 2020, la direction de Rossignol a présenté en septembre son projet aux salariés : 61 suppressions de
postes dans l’usine de Sallanches sur 124 au total, et 31 sur deux autres de ses sites en Isère. Une partie de sa
production devrait partir à Artés, petite ville espagnole à côté de Barcelone
La direction avance que « la concurrence s’intensifie et la compétitivité devient un critère déterminant ». Pour
justifier le transfert d’une partie de la production en Espagne, le groupe explique, enfin, qu’il veut confier à
l’Espagne les gros volumes, et à Sallanches les skis « à forte valeur ajoutée de petite série ».
L’enquête réalisée par Suzanne BERGER et son équipe auprès de 500 firmes d’Amérique du Nord d’Europe et d’Asie
entre 1999 et 2004 (Made in monde, 2006) montre que pour s’adapter aux mutations de l’économie mondiale, ces
firmes adoptent différentes stratégies. Des firmes produisant le même bien ne font pas forcément les mêmes choix
de production (Dell choisit la voie de la sous-traitance pendant que Samsung fait le choix de garder le contrôle du
processus de production). Sous-traiter ou pas, délocaliser ou non, S. BERGER montre que ces choix sont devenus
de plus en plus cruciaux avec l’ouverture croissante des nations et avec les avancées technologiques de la 3ème RI.
Jusque dans les années 1980, la production d’une industrie s’apparente à une maquette d’avion : chaque pièce
est conçue pour une fonction et un emplacement précis et aucune ne peut être utilisée dans la production d’un
autre bien. Cette organisation de la Y poussait les industries du XX à l’intégration verticale : la maîtrise de toute la
filière de production permet d’assurer l’ajustement entre fournisseurs et clients tout au long de la chaîne de Y.
Ex : en 1949, Ford possède des mines de charbon, des bois, ses propres voies ferrées, des plantations d’hévéas au
Brésil, son usine de fabrication de peinture, ses propres navires, son usine électrique, ses pompiers, son central
téléphonique, ses hôpitaux, son école professionnelle,…
Avec les NTIC, la production devient modulaire comme un jeu de Lego. Les mêmes pièces vont pouvoir être
utilisées dans différentes configurations de production pour produire des biens différents. Cette modularisation de
la production facilite la fragmentation des processus de production et sa répartition aux quatre coins de la planète.
Le recours à la sous-traitance s’accentue à toutes les étapes de la production (recherche, élaboration d’un nouveau
produit, son design, sa fabrication, sa promotion), la FMN ne conserve que les activités où elle est la meilleure. Par
exemple l’ipod combine des composants déjà fabriqués et utilisés pour la production d’autres biens : disque dur
Toshiba, lecteur Nidec, processeur ARM, interface USB, mémoire flash Sharp, … ainsi la modularisation libère en
partie l’entreprise des contraintes liées au temps de développement et aux coûts des investissements.
Mais ce choix de la fragmentation n’a rien de systématique : les firmes américaines sont habituées à établir des
liens contractuels de marché qui facilitent le recours à la sous-traitance alors que la plupart des firmes japonaises
préfèrent garder le contrôle du processus de production, opérant dans un monde de relations humaines plus
pérennes, basées sur la collaboration dans le temps long, d’où la réticence à fragmenter leur activité.
Selon BERGER, l’organisation la plus performante varie selon le contexte : en période de stabilité et de diffusion
technologique, c’est la fragmentation qui permet d’être plus efficace. En revanche, en période d’innovation
radicale, la collaboration étroite tout au long de la chaîne création-production-vente est plus efficace.
Ex : D’autres modèles résistent à la tentation de la délocalisation : c’est le cas des districts industriels dans le nord
de l’Italie organisés en communautés de PME très spécialisées et complémentaires entre elles. Elles n’hésitent pas
à coopérer entre elles, à se coordonner pour répondre à de grosses commandes. Grâce à cette coopération et grâce
à une main-d’œuvre qualifiée et souple, elles atteignent un haut degré de productivité et de qualité. En
conséquence, elles résistent aux délocalisations. C’est même le contraire qui se produit puisque des travailleurs
chinois s’installent en nombre dans ces districts industriels.
Selon BERGER, la course aux bas salaires est une stratégie perdante à MLT car elle débouche sur « une jungle
concurrentielle où les victoires sont dérisoires ». Pourquoi ?
- Les écarts de coût du travail se réduisent avec la hausse rapide des salaires dans les pays émergents et la
mise en place progressive d’un Etat social. Les firmes doivent donc en permanence délocaliser vers de
nouvelles régions toujours plus concurrentielles (ex : Nike de la Corée du Sud vers bébés tigres).
- Les gains par unité produite sont souvent très faibles car les w ne représentent qu’une partie souvent
minime des coûts de production (3% à 4% du prix du produit chargé sur le bateau en provenance d’un PED).
- Une main d’œuvre bon marché ne suffit pas toujours à compenser un fort différentiel de productivité
entre la main d’œuvre des PED et celle des pays avancés. Ainsi le coût unitaire du travail (valeur mo/unité
produite), peut être importante dans les pays à bas w (ouvriers sans expérience à former et surveiller,
machines en panne, …). Si bien que les écarts salariaux entre pays avancés et PED sont souvent bien plus
élevés que les écarts de coûts du travail.
4) Les coûts cachés d’une délocalisation vers les pays à bas salaires :
Au-delà de la moindre efficacité de la main-d’œuvre, les firmes sous-estiment, voire ignorent, de nombreux coûts
souvent associés à la délocalisation vers des pays à bas salaires :
- La hausse des coûts de gestion de la chaîne d’approvisionnement (soit des importations en provenance
des fournisseurs habituels, soit un approvisionnement local de moindre qualité).
- Faible qualité des infrastructures. Les FMN sont parfois obligées de construire elles-mêmes des voies
d’accès et des lignes électriques pour se relier aux réseaux principaux.
Ex : En Inde, les routes sont encombrées, les pannes électriques fréquentes, les droits peu clairs, …
- Faible qualité des organisations (bureaucratie locale lente et corrompue, brevets mal protégés, justice
complexe et arbitraire pour le respect des contrats…). La corruption rend les coûts de production
imprévisible ; les firmes préfèrent le cadre plus stable des règles de droit.
- Risques politiques dans les régimes autoritaires/démocraties balbutiantes (conflits internes, guérillera…).
Quand une firme prend en compte l’ensemble de ces coûts, elle peut renoncer à une délocalisation/implantation
dans un pays à main d’œuvre bon marché. La mauvaise évaluation de ces coûts, ou leur montée inattendue, conduit
de plus en plus d’entreprise à revenir en arrière en relocalisant au moins en partie leur production, non pas par
patriotisme mais par calcul économique, d’autant plus que les Etats des pays avancés facilitent ce choix par le
versement d’une subvention à la relocalisation. Cependant, si les exemples de relocalisation se multiplient, le poids
qu’elles représentent dans l’ensemble des IDE reste marginal et ne concerne que les secteurs dans lesquels
l’automatisation est possible (les emplois créés sont réduits et pas forcément dans la même région que celles où
les emplois avaient été détruits par la délocalisation.
2. Volonté de contrôler des barrières tarifaires douces (normes techniques, sanitaires). S’implanter dans un
pays permet d’avoir plus facilement accès à l’information des marchés locaux que d’y exporter.
- Stabilité politique et macroéconomique du pays. C’est le critère numéro 1 selon les enquêtes de la
CNUCED. Selon ALESINA et PEROTTI, la stabilité politique peut aussi bien découler d’un Etat fort (capable
de mettre en place des politiques macroéconomiques pertinentes) que d’un Etat démocratique. A l’inverse,
SEN et RODRIK estime que c’est dans la démocratie que la stabilité est la plus forte.
- La fiscalité. Les différences d’impositions entre les territoires jouent un rôle important.
Ex : En Irlande, la taxation est d’environ 12,5% contre 20% en moyenne en Europe.
- Faibles règlementations (du L, du k, …) mais cadre protecteur minimal : la garantie du droit de propriété
(bâtiments, propriété intellectuelle, …). ACEMOGLU expose une corrélation très forte entre PIB/hab et
degré de protection.
Ex : En Corée du Sud, le PIB/hab est de $12.000. En Corée du Nord, le PIB/hab est de $1100.
- Possibilité d’utiliser des ressources rares : avantage à la localisation (DUNNING), à savoir des ressources
naturelles, de la main d’œuvre qualifiée, des centres de R&D → logiques d’agglomération.
D) Les conséquences de la multinationalisation des firmes
1) Conséquences sur le CI
Selon R. MUNDELL (1957), le capital se déplace des PDEM vers les PED où il est mieux rémunéré (car le rendement
factoriel est plus important que dans les PDEM, hypothèse des rendements d’échelle constant). A priori, baisse X.
En réalité, il faut distinguer les filiales relais et les filiales ateliers. L’impact de la multinationalisation des firmes
dépend de la nature des IDE :
- Filiales relais : l’IDE remplace, au moins en partie, l’exportation, même si dans ce cas-là le CI peut être
simulée par deux canaux :
> Echanges filiales – maison mère
> L’IDE va stimuler les entreprises et la consommation locales. Or, les sous-traitants alors stimulés
peuvent être amenés à augmenter leurs M en biens intermédiaires → hausse CI.
- Filiales ateliers : le CI est stimulé par les filiales installées à l’étrangers.
Selon la théorie de K. KOJIMA (‘Businesses versus Macroeconomic Approach of direct foreign investment”,
1983), il y a une complémentarité entre CI/IDE.
Les FMN semblent entretenir un lien particulier avec le territoire d’origine. Elles peuvent en effet y observer
l’évolution des goûts des consommateurs, percevoir les évolutions chez les concurrents, … La maison mère devient
le phare de l’entreprise.
Au-delà des territoires d’origine, les FMN mettent en concurrence les territoires susceptibles de les accueillir. Dans
cette concurrence, certains territoires sont plus favorisés que d’autres, soit du fait de l’existence préliminaire de
matières premières, soit d’entreprises. Mais l’Etat peut tenter de pallier le retard de ses territoires par certaines
mesures. Pour MOUHOUB MOUHOUD, ces mesures sont le plus efficace quand elles sont destinées aux territoires
et non aux entreprises. Toutefois, cela ne va pas sans inconvénient :
- Accroissement des inégalités entre territoires : les métropoles s’enrichissent plus vite que les territoires
périphériques, ce qui conduit au développement d’îlots de croissance connectés entre eux.
- La course à celui qui proposera la règlementation la plus faible se fait au détriment des services publics, des
travailleurs, de l’environnement, …
FOCUS : Laurent DAVEZIES, Le nouvel égoïsme territorial, le grand malaise des nations, 2015
Depuis les années 1980, l’inexorable augmentation des disparités productives a été compensée par une
progression encore plus nette des mécanismes de redistribution du revenu entre les territoires dans les pays
occidentaux. Cela s’est traduit, dans la plupart des pays industriels, par une augmentation plus rapide des dépenses
publiques et sociales du PIB, mais aussi par des déficits chroniques et l’augmentation des dettes publiques.
Le keynésianisme territorial se résumait alors ainsi : redistribuer des revenus vers des territoires pauvres ayant
une forte propension à consommer leur revenus, pour stimuler la conso et, derrière, la Y de la région riche.
Ex : Dans tous les fims se passant dans le Sud de l’Italie dans les années 1960 et 1970 apparaissent à l’écran des Fiat
(fabriquées à Turin) et des Vespa (fabriquées dans la région de Pise).
Toutefois, la redistribution des revenus ne permettait de stimuler la croissance et le développement social que tant
que le marché intérieur était protégé. Avec l’ouverture des frontières et l’expansion du CI, ce modèle s’effondre.
Ex : Le groupe Fiat, qui détenait 70% des parts du marché automobile italien en 1980 est aujourd’hui passé sous la
barre des 30%. Dans les films apparaissent désormais toutes sortes de voitures et motos du monde entier.
Ainsi, alors que les régions riches avaient hier besoin des régions pauvres, et même les subventionnaient (via les
budgets publics et sociaux) pour qu’elles consomment leurs produits, aujourd’hui leurs marchés se sont élargis
au monde et leur conquête suppose notamment une réduction des coûts de production (PO compris).
« Avec trente ans de retard, les inégalités interrégionales de revenu, qui se réduisaient dans la plupart des pays
industriels depuis un demi-siècle, vont recommencer à croitre ».
3) Conséquences sur l’emploi
Les économistes distinguent deux effets de l’IDE sur le volume de l’emploi dans les pays investisseurs :
- Un effet substitution : si l’IDE réplique l’activité domestique (IDE horizontal), il diminue la g et l’emploi dans
le pays d’origine. En effet, une baisse des w dans le pays investi incitera la FMN a substituer du L étranger
au L domestique, la FMN élargissant son activité à l’étranger aux dépens de l’activité domestique.
- Un effet revenu : il permet de compenser l’impact négatif de l’effet substitution. En effet, l’implantation à
l’étranger donne accès à de nouveaux marchés ou à de nouveaux facteurs, ce qui peut augmenter les ventes
de la FMN, y compris celles des unités localisées dans le pays de la maison-mère.
Les études existantes montrent l’impact négligeables mais grandissant des délocalisations sur l’emploi :
- Le département du L américain a montré qu’entre 1999 et 2003, les licenciements dus aux délocalisations
vers l’étranger n’ont représenté qu’environ 1% des licenciements.
- Une étude du Conseil d’Analyse Economique (Désindustrialisation, délocalisations, 2005) estime que :
> Les restructurations d’entreprises s’étant produites en Europe entre le 1er janvier 2002 et le 15 juillet
2004 concernent 1456 entreprises et ont entrainé la suppression de 780.394 emplois, ce qui correspond
à 0,42% des 192 millions d’emplois européens. Ramené à 1 an, on obtient un taux de 0,17%. Chaque
année, c’est donc 0.17% des emplois européens qui disparaissent dans des restructurations.
> Mais les délocalisations ne représentent que 4,74% des emplois supprimés pour restructuration. En
termes d’emploi, cela correspond donc en deux an et demi à 36 977 suppressions, donc 0,019% de la
totalité des emplois européens. Rapporté à 1 an, on obtient un taux de 0,0076%. Chaque année, c’est
donc 0,0076% des emplois européens qui disparaissent dans des délocalisations.
> Au niveau de la France, les 8 000 suppressions d’emplois survenus en 2001 suite à des fermetures
d’unités de productions correspondent à 0,032% des 25 millions d’emplois français.
Conclusion :
L’impact macroéconomique des délocalisations sur l’emploi est donc très faible à l’échelle nationale mais
l’impact local peut être très fort (désindustrialisation rapide dans le nord de la France par exemple), jusqu’à
engendrer des fractures territoriales aux effets socio-politiques grandissants (DAVEZIES).
Ces effets de fragmentation sont d’autant plus inquiétants que de plus en plus d’économistes, comme KRUGMAN
en 2007, considèrent que la mondialisations a un impact croissant sur le nombre, la nature et la rémunération des
emplois dans les pays avancés :
- Lila DEMMOU montre que de 2000 à 2007, la concurrence commerciale internationale est responsable de
28% des emplois industriels perdus en France pendant cette période.
- Selon David AUTOR et alii (“The China syndrome”, 2013), l’intensification de la concurrence chinoise
pourrait expliquer ¼ de la baisse de l’emploi manufacturier qui a été observée entre 1990 et 2007 dans
l’ensemble des USA.
Cependant, à l’échelle mondiale, le bilan en emploi de la multinationalisation des entreprises semble positif :
- D’abord parce que les FMN créent des emplois dans les pays où elles s’implantent, notamment les PED
mais pas seulement. En France, ¼ de l’emploi industriel dépend de k étrangers.
- De plus, les délocalisations peuvent permettre à l’entreprise de renforcer sa compétitivité et de sauver des
emplois (ex : entreprises allemandes dans les années 2000 vers les pays de l’est).
- Par ailleurs, le consommateur des PDEM est souvent le grand gagnant de la DIPP puisque son pouvoir
d’achat augmente et sa consommation se diversifie, rendant possible l’essor d’activités nouvelles dans les
loisirs, la culture, la santé notamment.
- Enfin, les FMN accélèrent le développement économique des pays émergents : par la distribution de
salaires plus élevés que la moyenne, par les transferts de technologie et de savoir-faire, les PED deviennent
plus riches. Ils importent des biens et services de plus en plus nombreux et sophistiqués en provenance des
pays avancés où les emplois qualifiés sont boostés et de mieux en mieux rémunérés (TGV fr en Corée).
Annexes :
« Nous ne vivons pas la fin de l’industrie, mais l’accouchement d’une nouvelle forme de société industrielle », la
société hyper-industrielle. Or, cette société est marquée par une transformation des géographies.
1) Du monde en strates au monde en archipel : la vitesse quasi-instantanée de circulation des nouvelles idées dans
le monde ne permet plus la protection des innovations/activités par la géographie. Le monde devient alors à la fois
plus homogène (synchronisme des innovations) et plus divisé (monde en pôle et réseaux connectés entre eux).
Aujourd’hui, les principales caractéristiques de notre monde depuis 1980 sont les suivantes.
- La géographie des niveaux technologiques n’est plus hiérarchisée par zones concentriques. Les
technologies de pointe sont disponibles de manière synchrone sur tous les continents.
- Les divergences ne se manifestent plus entre pays mais au sein des pays, où certains pôles se détachent.
- Le synchronisme des innovations est la règle, mais ses effets se manifestent surtout au sein du réseau des
pôles, seuls capables d’offrir l’infrastructure matérielle et intellectuelle nécessaire.
Aujourd’hui, toutes les chaînes de production s’enracinent et se croisent dans des pôles qu’elles contribuent à
renforcer. Le monde hyper-industriel est donc marqué par ces deux phénomènes : fragmentation & polarisation.
La mondialisation fondée sur ces GVC exacerbe les logiques de dégroupage. Celles-ci désignent la dissociation des
activités physiques et des activités informationnelles. Souvent organisationnelles, elles peut également être
spatiales (ex : centres d’appel délocalisés). Désormais, les GVC nécessaires à l’élaboration d’un B/S sont
fragmentées en une succession d’étapes parfois très limitées, géographiquement dispersées et mettant en jeu de
multiples entreprises, fournisseurs et prestataires de services. Les firmes qui contrôlent ces chaînes optimisent pour
chaque étape le choix du fournisseur et du lieu de production.
Attention : tous les B&S ne se prêtent pas au même type de fragmentation. Ainsi, les secteurs comme l’automobile
ont des GVC majoritairement continentales, tandis que l’agroalimentaire ou le ciment se prêtent mal à une
fragmentation planétaire. Les réseaux les plus vastes et les plus fragmentés sont ceux des produits technologiques
hautement modulaires (ordinateurs, électronique, smartphones).
CCL : Après 20 ans de forte croissance, le commerce mondial croît désormais moins vite que le PIB et s’est stabilisé
autour de 30% de ce dernier. La tendance à l’intégration financière s’est renversée. Les IDE ont atteint leur
maximum historique en 2006. Cependant, plutôt que de parler de démondialisation, il faut parler de
régionalisation avec la création d’un « Factory America/Asia/Europe ».
3) GVC, polarisation : les stratégies de localisation des firmes interfèrent avec les autres firmes. Elles s’appuient sur
l’existence d’infrastructures, de pools de ressources, de marchés locaux du L et des services.
Des forces d’agglomération tendent de ce fait à rapprocher les entreprises pour deux raisons principales :
- La présence de grands marchés de D et des avantages liés à la proximité des clients (couplage par l’aval).
- La présence de fournisseurs nombreux et en compétition (couplage par l’amont).
Plus les échanges sont fluides, plus les forces d’agglomération sont puissantes. On parle de polarisation des
chaines de valeur régionales.
Néanmoins, étant donné que c’est également le rôle de la mondialisation de mettre en concurrence les fournisseurs
et d’accéder à des clients au-delà des marchés locaux, il y a aujourd’hui d’autres forces d’agglomération :
- La flexibilité (capacité de reconfiguration rapide de la chaine d’activité)
- La circulation fluide des connaissances (notamment la facilité de déplacement)
- L’attractivité de certains lieux (le choix des personnes de vivre dans certains lieux).
Patrick ARTUS, Discipliner la finance, 2019
1) Des années 1980 jusqu’à la crise de 2008-09, l’évolution de l’économie mondiale a été marquée par la
globalisation des économies réelles, une segmentation des chaines de valeur (GVC) conduisant à la production de
biens et services éclatée à travers différents pays dans le monde, suivant leurs avantages comparatifs.
Ex : Des années 1980 à la crise de 2008, le commerce mondial a progressé en moyenne 2 fois plus vite que la
production mondiale tandis que depuis 2008, il progresse moins vite que celle-ci.
En général, les entreprises y conservent la partie aval de la GVC (assemblage final, pièces complexes) ainsi que la
partie R&D. Pour le reste, les GVC peuvent être inter-entreprise (entre entreprises ou sous-traitants) ou internes
aux entreprises. Mais la segmentation des processus de production conduit aussi à l'intégration des économies.
Ex : En 1985, 73% des pièces et composants utilisés en Thaïlande y sont également produits. En 2000, ils ne sont
plus que 51%, le reste venant de Chine, de Malaisie, de Singapour, du Japon (15%), des US (6%), d’Europe (10%) …
Depuis 1980, le poids des importations depuis les pays émergents a triplé, passant de 2 à 6% du PIB en moyenne.
NB : Le montant moyen des droits de douane est passé de 11% dans les années 1990 à 6/7% dans les années 2010.
A l’inverse de ce que l’on pourrait penser, la globalisation a profité de manière très inégale aux pays émergents.
Certes, la proportion de la population en dessous du seuil de pauvreté y a reculé depuis le milieu des années 1990
grâce au transfert des investissements et des emplois peu qualifiés des pays de l'OCDE. Mais la hausse du niveau
de vie a conduit à une hausse des inégalités (due notamment au poids de l’éducation qui avantage les plus qualifiés).
Ex : La proportion de personne en dessous du seuil de pauvreté est presque nulle en Chine, en Asie et en Amérique
latine. Toutefois, ces résultats sont à nuancer car cette part de la population représente encore 40% en Afrique et
21% en Inde. Par ailleurs, la part du revenu national captée par les 1% d’individus au revenu le plus élevé est
aujourd’hui de 28% en Amérique latine, 22% en Inde, 20% en Afrique et de 14% en Chine ; contre 7% en France.
2) Avec la crise de 2008 le processus de globalisation prend fin au profit d'une forme de régionalisation, c'est à
dire un modèle de production auprès de l'acheteur final, avec pour conséquence le freinage du commerce mondial.
Ce phénomène s'explique par :
- Une volonté des pays d’accroître le contenu local des produits vendus dans le pays pour bénéficier des
emplois et de la valeur ajoutée de ces produits.
- Une augmentation des coûts de production dans les pays émergents, notamment des salaires.
Ex : Entre 1998 et 2018, le coût salarial unitaire (w corrigé par la productivité) a augmenté de 270% dans
les pays émergeants alors qu’il a augmenté seulement de 20% dans les pays de l’OCDE.
- La fragilité des chaînes de valeur segmentées et leur vulnérabilité face aux pannes/catastrophes naturelles.
- Le retour du protectionnisme engagé par les USA.
Ce recul de la globalisation n’est pas inédit. Entre 1870 et 1914, les migrations massives provoquent un manque
de main d’œuvre, conduisant à une réduction des revenus des propriétaires des terres agricoles, qui exigent des
droits de douane protecteurs plus élevés sur les produits agricoles. Dans les pays d’immigration, le w a aussi baissé
en raison de l’abondance de la main d’œuvre, conduisant progressivement à un arrêt de l’immigration.
Dans le nouveau modèle qui s’annonce, la production peut être localisée dans des pays pauvres à revenu faible, à
condition qu’ils représentent des marchés de consommation importants. Ces productions ne sont donc plus
destinées à être exportées mais à être consommées par le pays dans lequel elles sont produites. L'efficacité
productive globale se trouve alors réduite puisque l'approche par les avantages comparatifs ne s'applique plus. En
revanche la situation des pays à revenu faible se trouve améliorée puisque les flux de k des pays émergeants servent
de plus en plus à financer l’installation de la Y auprès de l’acheteur final.
Auteurs Ouvrages Dates
Ronald COASE La théorie de la firme 1937
John H. DUNNING International Production and the Multinational Enterprise 1981
Wladimir ANDREFF Les multinationales globales 1993
Suzanne BERGER Notre première mondialisation 2003
Made in Monde 2006
El MOUHOUB Mondialisation et délocalisation des entreprises 2008
MOUHOUD
Laurent DAVEZIES Le nouvel égoïsme territorial, le grand malaise des nations 2015
Quelques citations :
« La capital n’a pas de patrie », Karl MARX, Friedrich ENGELS, Manifeste du Parti Communiste, 1848.
« Le made in Ford se substitue au made in USA », Robert REICH, L’économie mondialisée, 1993.
« La mondialisation ne se réduit pas à une compétition avec les pays à bas salaires. Elle exacerbe aussi la
compétition entre pays riches, et augmente les inégalités. », Daniel COHEN, Richesse du monde, Pauvreté des
Nations, 1994.
« La mondialisation est une vérité globale, et un mensonge local », Patrick ARTUS, Marie-Paule VIRARD, On
comprend mieux le monde à travers l’économie, 2008.