Christophe Cosinus 1
Christophe Cosinus 1
Christophe Cosinus 1
L’idée fixe du
Savant Cosinus
ère
(1 Partie)
1899
édité par la
bibliothèque numérique romande
www.ebooks-bnr.com
Table des matières
Préface ...................................................................................... 3
Ier Chant. .................................................................................. 4
L’enfance de Zéphyrin ................................................................. 5
Comme quoi Cosinus devint un grand savant. .......................... 9
Une distraction de Cosinus. ...................................................... 13
IIe Chant. ................................................................................ 17
Le docteur Cosinus a mal aux dents ......................................... 18
Cosinus commet une méprise arithmétique. ............................ 22
Terribles conséquences de la méprise de Cosinus. ................... 27
Cosinus myriapode. .................................................................. 31
Mme Belazor reçoit une douche. ................................................ 35
Chocs en retour. ........................................................................ 39
La gaffe de Cosinus. .................................................................. 43
IIIe Chant. ............................................................................... 47
Cosinus fait ses préparatifs de départ. ..................................... 48
Go head !.................................................................................... 52
Cosinus manque son premier départ. ...................................... 56
Cosinus médite un deuxième départ. ........................................ 60
Ce livre numérique.................................................................. 64
Préface
–3–
Ier Chant.
–4–
L’enfance de Zéphyrin
–5–
Consultée à son sujet, une somnambule extralucide, phré-
nologue assermentée près des cours et tribunaux, pédicure de
nombreuses têtes couronnées, lui découvrit la bosse du mouve-
ment perpétuel. D’où elle conclut qu’il serait un grand voyageur
ou un grand mathématicien, à moins qu’il ne fût affligé de la
danse de Saint-Gui.
–6–
À deux ans, il était déjà de première force sur l’addition,
opération arithmétique dont il avait, de sa propre initiative, dé-
couvert des applications culinaires fort ingénieuses, mais pour
lesquelles la cuisinière, esprit borné, n’avait malheureusement
pas toute l’admiration qu’elles méritaient.
–7–
Sur les bancs du collège, Zéphyrin absorbé comme doivent
l’être tous les grands génies, appliqua avec persévérance un sys-
tème de son invention pour la multiplication des taches d’encre.
Encore un système qui ne reçut pas l’approbation de madame sa
mère !
–8–
Comme quoi Cosinus devint un grand savant.
–9–
Or, ces multiplications étant généralement suivies de divi-
sions, M. Brioché père se faisait un devoir d’appliquer à son fils
la règle des compensations proportionnelles, la seule opération
arithmétique pour laquelle Zéphyrin ne se soit jamais senti la
moindre disposition naturelle ou acquise.
– 10 –
Aussi, dans le cours de ses études, le jeune Zéphyrin obtint-
il de brillants succès scientifiques ! « Sic itur ad astra », lui di-
sait chaque année le président avec le même à-propos. — Oui,
m’sieu », répondait invariablement Zéphyrin qui n’avait rien
compris à cette citation classique et littéraire.
– 11 –
Puis, par la suite des temps, sous le nom du docteur Cosi-
nus, il devint un monsieur excessivement savant, mais aussi dis-
trait que chauve et qui ne manquait jamais, lorsqu’il faisait son
cours à l’École des tabacs et télégraphes, de prendre son mou-
choir pour le torchon, et réciproquement.
– 12 –
Une distraction de Cosinus.
– 13 –
Ces dames ayant préféré attendre, à dix heures et demie, la
seconde parente est envoyée en reconnaissance : « Mon cousin
Zéphyrin !… — Quoi ? – Il est temps de partir ! — Eh bien ! mais
partez toujours, je vous dis que… + b2 x y2… vous ne serez pas
au pont Neuf… égale zéro… que je vous aurai déjà rattrapées. »
– 14 –
À minuit trente-cinq, Zéphyrin plie soigneusement le tor-
chon sur une chaise, tout en se parlant à lui-même : « D’où je
tire évidemment, dit-il, la valeur de l’angle A. »
– 15 –
À trois heures et demie, le docteur découvre la valeur de x,
l’inconnue cherchée ; ce qui lui cause une joie sans mélange. –
Nous prions les esprits superficiels de s’abstenir de toute ré-
flexion sur la valeur de x, et de ne point prétendre que Zéphyrin
a beaucoup travaillé pour peu de chose.
– 16 –
IIe Chant.
– 17 –
Le docteur Cosinus a mal aux dents
– 18 –
Ayant établi certains axiomes servant de base à quelques
calculs simples, Cosinus découvre que cette douleur lancinante
est vraisemblablement causée par un mal de dents.
Sphéroïde, qui est un esprit curieux, cherche évidemment à
comprendre des actions qui lui semblent mystérieuses.
– 19 –
Du côté dentiste : Qu’est-ce, Hippolyte ? — Mos-sieu ! c’est
M’sieu Brioché qui demande à mossieu si mossieu peut le rece-
voir ce matin. — Réponds-lui que c’est impossible… Que je suis
trop occupé… Que j’ai 72 clients qui attendent… Qu’il vienne ce
soir à 2 h. 52. »
– 20 –
En effet à 7 h. 33, le docteur attendait encore. Il est vrai
qu’il ne s’ennuyait pas, absorbé qu’il était dans la lecture des
hauts faits de son cousin Agénor Fenouillard et de son illustre
famille, ce livre que tout dentiste qui se respecte doit avoir dans
son salon pour faire patienter les clients les plus grincheux.
– 21 –
Cosinus commet une méprise arithmétique.
– 22 –
— Prenez donc ce fauteuil, madame, je vous en prie, dit ai-
mablement Cosinus… Et maintenant en quoi puis-je vous être
utile ?
— Monsieur, on m’a beaucoup parlé de vous, dit
Mme Belazor qui prend Cosinus pour le dentiste : j’ai recours à
votre habileté. J’ai là une vieille racine que je voudrais faire ex-
traire…
– 23 –
— Une extraction de racine, s’exclame Zéphyrin ! Mais c’est
ma spécialité, ça ! Dès ma plus tendre enfance, j’extrayais, par
plaisir, toutes les racines de mes camarades ! et j’ose dire que
j’ai acquis dans ce genre d’opérations une habileté extraordi-
naire. Je ne me vante pas, madame, je constate !… Par quel pro-
cédé désirez-vous que j’opère ?
– 24 –
— Mais, monsieur, par celui qui me fera le moins de mal.
— Oh ! madame, riposte plaisamment Zéphyrin, j’opère
toujours sans douleur ! Mais, puisque vous me laissez le choix,
nous allons, si vous le voulez bien, employer des tables de loga-
rithmes.
– 25 –
Mme Belazor n’attend pas la suite de l’explication et
s’échappe en proie à une violente terreur, persuadée qu’elle est
que l’illustre dentiste Max (Hilaire) est devenu parfaitement
fou.
C’est ainsi que, dans notre monde sublunaire, se font les
réputations et s’accréditent les légendes.
– 26 –
Terribles conséquences de la méprise de Cosinus.
– 27 –
Remarquez, je vous prie, ci-dessus, ces trois élégants per-
sonnages. Ce sont les trois agents Picpus, Mitouflet et Landre-
mol qui, rendus méconnaissables par d’habiles déguisements, se
dirigent en toute hâte vers le domicile du dentiste Max (Hilaire),
afin de le mettre hors d’état de nuire.
– 28 –
… est aussitôt considéré par ledit Picpus comme fou fu-
rieux, et mis dans l’impossibilité de faire un mouvement. — On
ne dira pas, remarque spirituellement Mitouflet, que le particu-
lier n’est pas bien ficelé ! Max (Hilaire) comprend de moins en
moins : mettez-vous à sa place !
– 29 –
Et voilà comment l’illustre Max (Hilaire), dentiste breveté,
expert assermenté et officier d’Académie, fut enfermé dans un
cabanon d’aliénés, catégorie des agités pour avoir commis
l’imprudence de faire attendre jusqu’à 8 heures dans son salon,
un mathématicien auquel il avait donné rendez-vous pour
2 h. 52.
– 30 –
Cosinus myriapode.
– 31 –
« Comment ! se disait Zéphyrin, mon cousin Fenouillard a
fait le tour du monde, et moi, le docteur Brioché, je n’ai jamais
quitté mon cabinet ! C’est inadmissible ! » Et Zéphyrin s’essuya
le pied gauche.
– 32 –
Après quoi, creusant toujours son idée et de plus en plus
absorbé, il réintégra son pied droit dans le bain pour s’essuyer le
pied gauche.
– 33 –
« Scholastique, ma fille, vous qui n’avez pas d’idées pré-
conçues, voudriez-vous, pour l’amour du ciel, me dire combien
j’ai de pieds ? »
– 34 –
Mme Belazor reçoit une douche.
– 35 –
Au moment où elle écrivait la relation des derniers événe-
ments en l’agrémentant de quelques réflexions philosophiques
et personnelles, une goutte d’eau tomba sur son papier. Remon-
tant des effets aux causes, Mme Belazor leva aussitôt son nez
aquilin vers le Zénith (c’est le plafond).
– 36 –
L’averse étant devenue torrent, Mme Belazor, qui est veuve
d’un pharmacien, cherche à déterminer la nature du liquide.
Elle lui trouve un goût singulier qu’elle qualifie de « sui gene-
ris », comme l’eût fait son époux lui-même.
– 37 –
Là, pénétrant, malgré Scholastique, dans la pièce où Zé-
phyrin se livre à ses exercices hydrauliques, Mme Belazor de-
meure pétrifiée, telle Mme Loth pendant l’incendie de Sodome :
« Ciel ! s’écrie-t-elle, le dentiste !!! »
– 38 –
Chocs en retour.
– 39 –
Or, fâcheuse coïncidence, le sympathique Blanc-Mitron,
pâtissier de son état, qui portait « une timbale soignée à la dame
du cinquième », s’efface et souhaite d’être plat comme limande
afin de mieux laisser passer le torrent.
– 40 –
… et une séparation violente de Blanc-Mitron et de sa tim-
bale ; qui se mettent aussitôt l’un et l’autre à descendre vers le
rez-de-chaussée, avec un mouvement uniformément accéléré,
au lieu de se rapprocher du grenier d’un mouvement lent mais
uniforme.
– 41 –
À ce moment aussi se présentait le chien Sphéroïde, qui re-
venait de faire sa petite promenade quotidienne et apéritive. Il
n’hésita pas une seconde à faire un sort aux quenelles et aux fi-
lets de soles. Tant il est vrai que le malheur de l’un cause sou-
vent le bonheur de l’autre.
– 42 –
La gaffe de Cosinus.
– 43 –
20 D’amener l’intervention du concierge soucieux du bon
renom de son immeuble et qui associe ses efforts à ceux de Mi-
touflet pour expulser Blanc Mitron « manu militari », si j’ose
m’exprimer ainsi, étant donné que le pied d’un concierge n’a
rien de commun avec une main militaire.
– 44 –
Mais dont au second abord il détermine facilement la na-
ture capillaire : « Madame ! dit aimablement Cosinus à Mme Be-
lazor, ne serait-ce point votre propriété que cet appendice que je
n’hésite pas à qualifier de capital parce qu’on lui porte
d’ordinaire un vif intérêt ? »
Mais Mme Belazor n’ayant pas paru saisir tout le sel de cette
attique plaisanterie et ayant pris immédiatement un air de di-
gnité méprisante et offensée, Cosinus reste très embarrassé de
sa trouvaille. Tel un phoque qui aurait trouvé une bicyclette !
– 45 –
Alors Cosinus-Phoque se décide à mettre dans sa poche,
avec son mouchoir par-dessus, la luxuriante chevelure de sa
voisine, afin de s’en faire faire un oreiller de crin. Après quoi, de
plus en plus décidé à suivre les traces de Fenouillard, il se hâte
d’aller faire ses préparatifs de départ pour le bout du monde.
– 46 –
IIIe Chant.
– 47 –
Cosinus fait ses préparatifs de départ.
– 48 –
Ses emplettes faites, Zéphyrin soudoie le citoyen Chapou-
gnac pour véhiculer la cargaison. Cosinus, profitant de la cir-
constance pour étudier dans les ouvrages spéciaux la meilleure
manière d’introduire chez les peuples sauvages les théories hu-
manitaires, se voit dresser procès-verbal par un membre de la
Société protectrice des animaux, pour contravention à la loi
Grammont.
– 49 –
Enfin, grâce à l’énergie et aux biceps du citoyen Chapou-
gnac, tous les colis sont arrivés à bon port.
— Voici, mon ami, dit Zéphyrin aimable, les 3 francs con-
venus !
— Éxcugez, borgeois, mais ch’est chinque francs.
— Il y a évidemment de votre part, enfant de l’Auvergne,
erreur d’interprétation, et vous sortez des conditions préalables
du problème.
– 50 –
Seulement, quand on bat en retraite, la prudence com-
mande de dégager sa ligne de retraite. C’est pour avoir négligé
ce précepte élémentaire de stratégie que lui, Zéphyrin, s’expose
aux yeux du subalterne Chapougnac dans une attitude familière
et peu digne de sa haute situation scientifique et sociale.
– 51 –
Go head !
– 52 –
Cosinus. — C’est bien ce soir que part pour New-York le
paquebot Labrador ?
L’employé (gracieux). — Oui !
Cosinus. — Puis-je prendre mon billet directement pour
cette ville transatlantique ?
L’employé (toujours gracieux). — Oui !… (un silence)…
C’est 750 francs.
– 53 –
« Merci, monsieur ! » a répondu Cosinus. Puis il est aussi-
tôt allé faire enregistrer ses bagages pour lesquels le préposé à
l’enregistrement, non moins gracieux que son collègue des bil-
lets, lui demande 453 francs d’excédent. Cosinus pense alors
qu’il serait bon de faire quelques économies et, en guise de
pourboire, fait à l’homme d’équipe un geste noble, amical et
protecteur.
– 54 –
Pendant que ses bagages subissent la redoutable épreuve
du fourgon, Cosinus tente de s’insinuer dans un compartiment.
Mais au moment d’y pénétrer, il se sent appréhendé par une
casquette blanche.
— « Hé ! là-bas ! dit sévèrement ce fonctionnaire, c’est
donc pour tuer le temps en chemin de fer que vous emportez
tant d’armes offensives et défensives ? Avez-vous une autorisa-
tion ? »
– 55 –
Cosinus manque son premier départ.
– 56 –
— Rendre mes armes !! viens donc les prendre !! » hurle
Cosinus furieux et qui connaît l’histoire de Léonidas.
Malheureusement, un agent, qui de sa vie n’a entendu par-
ler de ce héros prend pour une menace le geste spartiate de Zé-
phyrin, et vient lui intimer l’ordre d’« obtempérer » sous peine
d’amende, pour cause de rébellion.
– 57 –
… et je déclare que ni l’arbitraire d’une administration cor-
rompue que l’Europe ne nous envie pas, ni les violences de pré-
toriens en délire ne m’empêcheront de remonter dans mon
compartiment et de poursuivre le cours d…
– 58 –
Cosinus, meurtri, noirci, abruti, mais toujours décidé à
donner suite à ses projets, regagne son logis en cherchant, sans
y parvenir, à s’expliquer la disparition du train, dont il avait
quelques instants auparavant constaté la présence et
l’immobilité.
– 59 –
Cosinus médite un deuxième départ.
– 60 –
À l’aspect de son image, Zéphyrin formule cette opinion
qu’il serait peut-être bon que par des ablutions méthodiques il
rendît à sa figure ses charmes habituels ! C’est pourquoi il prie
Scholastique de lui servir un bain de pieds.
– 61 –
Tout à coup Zéphyrin pousse le rugissement bien connu de
la tigresse à qui l’on vient d’arracher une dent de sagesse, ce qui
fait aussitôt disparaître toute trace d’ironie sur les lèvres coral-
lines de Scholastique, et cause à Sphéroïde une émotion intense.
C’est qu’il vient de songer à son fusil cintré pour tirer dans
les coins, à ses chaussettes-parapluie et autres bagages, qui doi-
vent être partis tout seuls, et il écrit à la Compagnie d’avoir à ar-
rêter leur course vagabonde. Sphéroïde se conduit en intrigant
vulgaire et sans scrupules.
– 62 –
Rassurés, Sphéroïde et Cosinus se mettent au lit,
s’endorment avec le calme d’âmes candides et pures et rêvent
que la Compagnie, pleine d’égards et d’attention pour les voya-
geurs, leur renvoie leurs précieux bagages et leur offre gracieu-
sement une indemnité de 35 000 fr. 75, accompagnée d’un os à
moelle.
– 63 –
Ce livre numérique
https://ebooks-bnr.com/
en décembre 2016.
— Élaboration :
Ont participé à l’édition, aux corrections, aux conversions
et à la publication de ce livre numérique : Pierre B., Sylvie,
Françoise.
— Sources :
Ce livre numérique est réalisé principalement d’après :
Christophe, L’Idée fixe du Docteur Cosinus, Paris, Armand Co-
lin, 1899. D’autres éditions ont été consultées en vue de
l’établissement du présent texte. La maquette de première page
a été réalisée par Pierre B.
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Ce livre numérique – basé sur un texte libre de droit – est à
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