Mouvement des stylos rouges
Le mouvement des Stylos Rouges est un groupe autonome de défense des intérêts du personnel de l'éducation français créé en 2018. Il s'agit d'un collectif de militants issus des métiers de l'éducation. Marqué par ses exigences sociales, sur les revalorisations salariales, il assume cependant diverses prises de position en faveur d'un enseignement traditionnel, du besoin nécessaire de sanctions et du respect de la loi sur la laïcité dans les écoles.
Création du collectif
[modifier | modifier le code]Début , durant les premières semaines du mouvement des Gilets jaunes, un collectif des « stylos rouges » se constitue sur un groupe Facebook privé. Il est composé de 25 000 enseignants des écoles, des collèges et des lycées[1]. Le groupe prend rapidement de l'ampleur en rassemblant près de 60 000 professeurs en 4 semaines[2], et en compte près de 74 000 en , près de 76 000 membres en .
Rapidement, les membres se rassemblent en groupes locaux d'académies, calquant ainsi l'organisation géographique de l'Éducation nationale.
Un manifeste est écrit de manière collaborative dès et soumis au vote. Un slogan en trois termes est choisi : « Salaires, moyens, respect ».
La presse nationale s'intéresse de près au mouvement[1],[3], et couvre les actions locales comme nationales : manifestation devant le ministère de l'Éducation nationale[4], envahissement de la pyramide du Louvre[5], construction de murs de livres devant les accès des rectorats et des inspections académiques[6],[7],[8].
D'autres groupes Stylos rouges apparaissent dans certains pays francophones, notamment celui du Burkina Faso qui rassemble 62 900 membres en .
Revendications
[modifier | modifier le code]La principale revendication des Stylos Rouges, se fondant sur des études internationales (OCDE) qui établissent le déclassement professionnel et salarial des différents corps de professeurs en France, porte sur un rattrapage massif des salaires afin de compenser la perte de pouvoir d'achat due à l'inflation. Le collectif alerte aussi sur les causes de l'épuisement professionnel face à des conditions de travail souvent très dégradées et dénonce le manque de soutien de la hiérarchie de l'Éducation nationale ainsi que le « prof-bashing ». En cela, le mouvement des Stylos rouges reprend les problématiques soulevées par le hashtag #Pasdevague qui était très présent sur les réseaux sociaux en - avec plus de 40 000 témoignages de professeurs sur le manque de réactivité de l'institution face aux violences scolaires et à la culture du silence dans les établissements scolaires français[9].
Dès le , le ministre de l'Éducation nationale rencontre des représentants de ce mouvement en affirmant à propos des salaires des professeurs : « Je suis d'accord avec le diagnostic posé par les Stylos rouges […] Je n'ai aucun problème avec cela »[2].
Actions
[modifier | modifier le code]2019
[modifier | modifier le code]Le mouvement des Stylos rouges est à l'origine de l'appel à la grève des examens en signe de protestation contre la réforme du lycée et du baccalauréat dans la loi pour une école de la confiance, dite loi Blanquer. Le collectif est reçu à deux reprises au ministère de l'Éducation nationale et obtient des engagements sur l'augmentation des salaires des professeurs et agents du ministère de l'Éducation[10].
Très impliqués contre la réforme des retraites dès l'automne 2019[11], les membres du mouvement continuent à échanger via Facebook et Twitter et à proposer des solutions aux décideurs publics et aux citoyens.
2020
[modifier | modifier le code]Le caractère numérique et donc à distance de l'engagement de ses membres trouve une résonance durant la pandémie de Covid-19 à partir de . En recueillant des milliers de témoignages et en se basant sur une revue de presse journalière, le collectif élabore une « carte Covid » des Stylos Rouges permettant de recenser les établissements impactés par la crise sanitaire[12].
Le , le collectif dépose une pétition[13] pour une augmentation de 20 % des salaires sur le site de l'Assemblée nationale et recueille plus de 15 450 signatures authentifiées via FranceConnect, ce qui en fait la 4e pétition la plus signée de manière authentifiée de l'histoire de l'Assemblée nationale[réf. nécessaire]. Cette pétition est cependant classée sans suite par la commission des Affaires culturelles et de l'Éducation le .
2021
[modifier | modifier le code]En , ils sont les premiers à constater la circulation active du virus dans les écoles (clusters) et à demander dans la presse « la mise en place d'une protection sanitaire ambitieuse dans les lieux d'apprentissage » afin de maintenir les classes ouvertes[14].
En , le mouvement décide d'engager ses membres à porter plainte contre le ministre de l'Éducation nationale pour mise en danger de la vie d'autrui lors de la crise sanitaire. La plainte est déposée par Me Jean-Baptiste Soufron devant la Cour de justice de la République, ce dont la presse nationale se fait l'écho[15],[16],[17].
À la rentrée scolaire de , le groupe établit une nouvelle carte collaborative[18] illustrant la pénurie de personnel dans l'Éducation Nationale, annonçant la crise Omicron qui aggrave la situation scolaire en .
2022
[modifier | modifier le code]Lors de la campagne présidentielle de 2022, un état des lieux de l'Éducation[19] est dressé par les Stylos Rouges qui décident d'interpeller tous les candidats à l'élection dans le but de connaître et de diffuser leur positionnement vis-à-vis des principales revendications du collectif. Le sujet des salaires entre de plain-pied dans la campagne électorale avec la proposition d'Anne Hidalgo de doubler les salaires des enseignants.
En , les Stylos Rouges se mobilisent autour d'une tribune rassemblant 2 700 employés de l'éducation, parue dans Le Journal du dimanche en réponse à l'action d'Emmanuel Macron- et de Jean-Michel Blanquer depuis [20].
2023
[modifier | modifier le code]En , les Stylos Rouges appellent à la grève illimitée pour dénoncer la réforme des retraites du gouvernement Élisabeth Borne. Ils rejoignent l'intersyndicale unitaire.
Le , paraît École. Le crépuscule du savoir chez Michalon, co-écrit par deux des porte-paroles du mouvement[21].
En , le mouvement des Stylos Rouges met en lumière l'incapacité du ministre de l'Éducation Pap Ndiaye à juguler l'hémorragie de démissions dans l'Éducation nationale : 143 703 démissions en quatre ans, soit 17 % du corps enseignant en France[22],[23].
2024
[modifier | modifier le code]Après trois ministres nommés en six mois à l'Éducation, les Stylos rouges dénoncent "l'incohérence de la politique éducative[24] du président Macron et ses contradictions permanentes", ainsi que les mensonges avérés[25] et propos déplacés de la ministre Amélie Oudéa-Castéra sur le système public d'éducation, confirmant la parole des personnels de terrain sur la maltraitance institutionnelle à l'œuvre dans l'Éducation nationale[26].
En , ils apportent leur soutien aux actions et aux professeurs qui dénoncent la vétusté des lycées et la dégradation des conditions de travail des professeurs comme des conditions d'études des élèves (comme à Cachan[27], ou à Sevran[28]).
Ils rejoignent en l'intersyndicale contre le "Choc des savoirs". Malgré un vote négatif à l'unanimité du Conseil supérieur de l'éducation[29], des arrêtés, publiés au Journal Officiel dans la nuit du 16 au 17 mars 2024, généralisent sans aucune expérimentation préalable les groupes de niveaux pour l'enseignement des mathématiques et du français en collège sur l'ensemble des heures de cours sur l'ensemble du territoire national[30]. Le mouvement des Stylos rouges appelle à la grève le 19 mars 2024[31].
Selon les administrateurs du groupe, les 4 milliards attribués dans le cadre du Service national universel (SNU) et les uniformes sont inutiles et doivent aller aux salaires et aux moyens (locaux et heures d'enseignement), dans une logique de respect des personnels de terrain et des élèves et d'amélioration de l'enseignement public en France[32].
Publications
[modifier | modifier le code]École. Le crépuscule du savoir paraît en chez Michalon[21]. Co-écrit par Nicolas Gliere et Arnaud Fabre, deux des porte-paroles du mouvement, ce livre dresse un bilan sans concession du système éducatif et formule des propositions simples, chiffrées et applicables immédiatement. Voici les plus emblématiques, spécifiques au mouvement des Stylos rouges :
- augmentation de 1 000 euros nets par mois du salaire de chaque professeur. Coût : environ 10 milliards par an ;
- retour de tous les chefs d'établissement et de tous les inspecteurs devant les classes, à raison de 4 à 6 h par semaine pour le personnel de direction et d'un mi-temps devant les élèves pour les inspecteurs. Économies : environ 3,5 milliards sur cinq ans ;
- reprise en main de la discipline dans les classes : aucun élève perturbateur ne doit rester dans l'impunité ;
- réforme complète de la formation des professeurs: le pédagogisme a échoué. Il faut revenir aux fondamentaux et à des méthodes d'enseignement traditionnelles qui ont prouvé leur efficacité.
- augmentation massive du nombre d'heures de cours en français et en mathématiques et création d'une classe supplémentaire entre le CM2 et la 6e pour les élèves qui en ont besoin afin d'augmenter leur niveau de connaissances et de leur en donner le temps.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- « Après les «gilets jaunes» et les «gyros bleus», les enseignants se constituent «stylos rouges» » , Le Figaro, (consulté le )
- Caroline Beyer, « Jean-Michel Blanquer compréhensif face à la grogne des «stylos rouges» » , Le Figaro, (consulté le )
- Mathilde Damgé, « Mouvement des « stylos rouges » : pourquoi les profs se mobilisent sur le point d’indice », Le Monde, (lire en ligne , consulté le )
- Julie Szmul, « 200 "stylos rouges" en colère réunis à Paris devant le ministère de l'Éducation » , sur France bleu, (consulté le )
- Nicolas Le Jean, « Boulonnais : Les enseignants Stylos rouges se structurent et appellent à l’action jeudi », La Voix du Nord, (lire en ligne , consulté le )
- « Social - Les enseignants édifient devant le rectorat de Clermont-Ferrand « un mur de livres rendus inutiles par les réformes successives » » , La Montagne, (consulté le )
- Pierre-Manuel Réault, « Périgueux : un mur de livres devant l'inspection d'académie » , sur Sud Ouest, (consulté le )
- V. M., « Les profs ont érigé un mur de livres devant le rectorat de Nice contre la réforme des retraites » , Nice-Matin, (consulté le )
- « #PasDeVague : des enseignants nous expliquent pourquoi ils ont témoigné », sur France Inter, (consulté le ).
- Héloïse de Neuville, « Blanquer annonce aux stylos rouges une augmentation des profs » , Challenges, (consulté le )
- « VIDEO. Éducation : "Cette réforme des retraites, c'est une déclaration de guerre", selon le collectif des "sty » , sur France Info, (consulté le )
- « CARTE COVID des STYLOS ROUGES - Etablissements touchés par le Coronavirus (carte participative non exhaustive) », sur Google My Maps (consulté le )
- « Pour une augmentation substantielle (20%) des salaires des enseignants français - Pour une augmentation substantielle (20%) des salaires des enseignants français - Plateforme des pétitions de l’Assemblée nationale », sur petitions.assemblee-nationale.fr (consulté le )
- « Combien d'écoles touchées par le Covid 19 ? » , sur Café pédagogique, (consulté le )
- franceinfo avec AFP, « Covid-19 : un collectif d'enseignants porte plainte contre Jean-Michel Blanquer pour "mise en danger de la vie », sur francetvinfo.fr, (consulté le ).
- FRANCE 24, « Covid-19 : un collectif d'enseignants porte plainte pour "mise en danger de la vie d'autrui" », sur france24.com, (consulté le ).
- « Covid-19 dans les écoles : le collectif d’enseignants des « Stylos rouges » décide de porter plainte contre Jean-Michel Blanquer », sur Atlantico, (consulté le ).
- « Etablissements en manque d'agent », sur Google My Maps (consulté le )
- « E.N. DU XXIe SIECLE », sur Google My Maps (consulté le )
- « TRIBUNE. 2.700 acteurs de l'éducation et des médecins dénoncent le bilan de Macron et de Blanquer à l'école » , Le Journal du dimanche, (consulté le )
- Nicolas Glière et Arnaud Fabre, École, le crépuscule du savoir, Éditions Michalon, , 240 p. (ISBN 978-2-347-00242-8, lire en ligne)
- Lilia Ben Hamouda, « Au secours ! Les profs font leur valise ! » , sur Café pédagogique, (consulté le )
- Article rédigé par Léa Prati, « INFOGRAPHIES. Rentrée scolaire : dans quelles disciplines et académies manque-t-il le plus d'enseignants ? » , sur France Info, (consulté le )
- « Groupes de niveau: Belloubet assure qu’elle n’a pas “exprimé de désaccord” avec Attal », sur BFMTV (consulté le )
- Virgile Guilhamet, « Polémique Amélie Oudéa-Castéra : "Le mensonge n'a jamais été une bonne arme de communication", analyse un spécialiste » , La Dépêche du midi, (consulté le )
- « Enquête sur la maltraitance des personnels de l'Education nationale », sur Les stylos rouges SALAIRES / MOYENS / RESPECT (consulté le )
- Toky Nirhy-Lanto, « Lycée de Cachan : des tensions éclatent alors que les professeurs et les élèves dénoncent la vétusté de l'établissement » , sur France 3 Paris Île-de-France, (consulté le )
- Charlotte Lesage, « Lycée délabré à Sevran: quatre professeurs entendus par leur direction après une vidéo Tiktok virale » , sur BFMTV, (consulté le )
- « "Choc des savoirs" : le CSE rejette à l’unanimité le projet de texte... », sur AEF info (consulté le )
- Arrêté du 15 mars 2024 modifiant l'arrêté du 19 mai 2015 relatif à l'organisation des enseignements dans les classes de collège (lire en ligne)
- « Grève du 19 mars : près de 9 % d’enseignants en grève, la mobilisation particulièrement suivie dans les collèges », Le Monde, (lire en ligne , consulté le )
- « Le véritable observatoire des salaires », sur Les stylos rouges SALAIRES / MOYENS / RESPECT (consulté le )
Annexes
[modifier | modifier le code]Liens externes
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