La vieille la regardait d’un œil fixe ; puis son visage mou se fondit doucement dans un sourire de pitié attendrie.
— Pauvre chère, murmura-t-elle, vous avez pleuré ; ne niez pas, je le vois à vos yeux. Soyez donc forte, acceptez la vie… Voyons, laissez-moi arranger la petite affaire en question.
Renée se leva, torturant ses doigts, faisant craquer ses gants. Et elle resta debout, toute secouée par une cruelle lutte intérieure. Elle ouvrait les lèvres, pour accepter peut-être, lorsqu’un léger coup de sonnette retentit dans la pièce voisine. Mme Sidonie sortit vivement, en entrebâillant une porte qui laissa voir une double rangée de pianos. La jeune femme entendit ensuite un pas d’homme et le bruit étouffé d’une conversation à voix basse. Machinalement, elle alla examiner de plus près la tache jaunâtre dont les matelas avaient barré le mur. Cette tache l’inquiétait, la gênait. Oubliant tout, Maxime, les cinquante mille francs, M. de Saffré, elle revint devant le lit, songeuse : ce lit était bien mieux à l’endroit où il se trouvait auparavant ; il y avait des femmes qui manquaient vraiment de goût ; pour sûr, quand on était couché, on devait avoir la lumière dans les yeux. Et elle vit vaguement se lever, au fond de son souvenir, l’image de l’inconnu du quai Saint-Paul, son roman en deux rendez-vous, cet amour de hasard qu’elle avait goûté là, à cette autre place. Il n’en restait que cette usure du papier peint. Alors cette chambre l’emplit de malaise, et elle s’impatienta de ce bourdonnement de voix qui continuait, dans la pièce voisine.
Quand Mme Sidonie revint, ouvrant et fermant la porte avec précaution, elle fit des signes répétés du bout des