Special Issue by Jeremy Mercier
L’expression « hiérarchie des normes » fait sans aucun doute partie des fétiches des juristes. In... more L’expression « hiérarchie des normes » fait sans aucun doute partie des fétiches des juristes. Introduite par la science du droit et indissolublement liée à Kelsen, l’expression est, depuis, passée dans le langage ordinaire des juristes au point que certains en sont venus à croire qu’elle désigne une réalité objective, une sorte de nature du droit voire d’essence de la juridicité. Or, comme les textes dans ce volume permettent de le montrer, l’expression « hiérarchie des normes » est bien plus ambiguë qu’on ne le croit et les usages qui peuvent en être faits sont très divers. Elle est en effet susceptible d’être utilisée pour désigner une théorie de l’ordre juridique mais peut aussi servir comme argument dans un processus de justification.
Les contributions ici réunies soulignent la grande difficulté méthodologique à laquelle tout juriste doit faire face lorsqu’il est confronté au concept de hiérarchie des normes : faire la part entre l’usage descriptif ou cognitif et l’usage argumentatif ou justificatif de l’idée que les normes juridiques s’inscrivent dans une hiérarchie et qu’elles sont précisément juridiques non parce qu’elles réaffirment une quelconque hiérarchie de valeurs mais parce que leurs auteurs parviennent à établir qu’ils n’en sont que les acteurs, au sens de Hobbes : leurs paroles ne sont pas l’expression de leur volonté mais celle d’une entité qui les dépassent. Et ainsi fonctionne un système juridique : par imputation successive d’une volonté à un autre que soi dont on affirme qu’il nous est supérieur et que nous lui devons obéissance.
Réunissant quelques uns des meilleurs spécialistes de la théorie générale du droit, ce volume espère fournir quelques clefs de compréhension de la construction d’un ordre juridique.
En dépit de la littérature relativement abondante à son sujet, quelle que soit la langue dans laq... more En dépit de la littérature relativement abondante à son sujet, quelle que soit la langue dans laquelle on pratique la théorie du droit (laquelle, pour le bonheur du plus grand nombre, ne se limite pas à l’anglais), le réalisme scandinave reste assez mal connu. On n’en retient bien souvent que quelques bribes : lutte contre la métaphysique, empirisme, démystification, idéologie des juges, faits, fictions, prédictions… On ne manque pas non plus de rappeler quelques critiques, plus ou moins sévères, qui lui ont été adressées dans le passé (dont certaines ne manquaient d’ailleurs pas d’humour). Les contributions que rassemble ce volume mettent toutes l’accent sur la dimension épistémologique du programme des réalistes scandinaves au travers de ses principaux protagonistes que furent Hägerström, Olivecrona et Ross.
L’enjeu, rappelons-le, était de contester tant la théorie positiviste des sources du droit que la conception jusnaturaliste classique faisant du droit positif le prolongement d’une morale propre à la nature humaine. Cette critique des sources constitue le point de départ de toutes les réflexions des réalistes et demeure une constante chez eux. C’est en cherchant à comprendre notre propre compréhension du droit qu’ils en viennent à explorer la dimension socio-psychologique et linguistique du phénomène juridique. Ce faisant, ils se distinguaient des autres juristes qui se réclamaient, à la même époque, du réalisme (aux États-Unis ou en France).
Si le succès du mouvement peut sembler limité, il n’en demeure pas moins qu’ils ont su provoquer des changements profonds dans la façon d’aborder la science du droit et ils continuent encore de nourrir une réflexion sur les conditions de possibilité d’une telle science.
Papers by Jeremy Mercier
A la suite des affaires Nymphomaniac, La Vie d'Adèle, Antichrist, Love, SAW 3D Chapitre final, Ci... more A la suite des affaires Nymphomaniac, La Vie d'Adèle, Antichrist, Love, SAW 3D Chapitre final, Cinquante Nuances de Grey, Bang Gang : une histoire d'amour moderne, Les Huit Salopards et Salafistes, l'affaire Sausage Party a mis en évidence un élément central dans le raisonnement du juge administratif : l'argumentation sur les images et sur le sens de leur contenu, impliquant un affinement progressif de son contrôle théorique de l'effet produit sur le spectateur. Le contentieux relatif au système de classification des oeuvres cinématographiques ne serait-il toutefois pas le révélateur des pouvoirs du juge en matière d'appréciation de l'administration relativement à la matérialité des scènes concernées et à leur qualification juridique ?
International Journal for the Semiotics of Law - Revue internationale de Sémiotique juridique, 2015
ABSTRACT
International Journal for the Semiotics of Law - Revue internationale de Sémiotique juridique, 2013
Après avoir été poursuivi pour diffamation par Patrick Buisson, ex-conseiller du président Nicola... more Après avoir été poursuivi pour diffamation par Patrick Buisson, ex-conseiller du président Nicolas Sarkozy, dans l'affaire des sondages de l'Elysée, l'universitaire Alain Garrigou était assigné en justice par Fiducial, la première entreprise française de conseil fiscal, et son dirigeant, Christian Latouche, pour avoir notamment signalé que celui-ci avait des « affinités idéologiques avec l’extrême droite ». Tandis que la 17ème Chambre du Tribunal de Grande Instance de Paris jugea qu'une telle plainte était abusive et constituait une « procédure bâillon » visant à intimider et faire taire toute critique, la Cour d'Appel a rejeté ce moyen. Pot de terre contre pot de fer ? Une telle interprétation pose la question décisive de l'avenir de la liberté d'expression face aux intérêts politico-financiers pouvant, surtout en période électorale, donner lieu à des plaintes abusives. Les juges judiciaires n'auraient-il pas intérêt à se munir, en plus du législateur, d'une jurisprudence « anti-procédure bâillon » dite anti-slapp, permettant d'éviter de telles intimidations sur les auteurs de propos d'intérêt général pour la démocratie ?
Analisi e Diritto 2011 - Marcial Pons - Madrid, Barcelona, Buenos Aires, 2011
In questo contributo mi propongo di analizzare schematicamente le principali tesi sostenute da Fr... more In questo contributo mi propongo di analizzare schematicamente le principali tesi sostenute da Francisco Laporta nel capitolo undici del suo libro intitolato "Imperio de la ley y globalización"; mi soffermerò, in particolare, su tre punti: il primo concerne l'esistenza del cosiddetto diritto globale (p. 245) ed i suoi possibili fondamenti; il secondo riguarda l'omissione della costruzione di un spazio normativo comune; il terzo e ultimo punto verte sull'idea di limitare le derive della globalizzazione attraverso l'istituzione di diverse entità sopranazionali e/o federali. Cercherò altresì di formulare alcune critiche sostanziali che siano guidate, per quanto possibile, dal principio di avalutatività, fondamento di una teoria del diritto descrittiva 1 .
Translations by Jeremy Mercier
Résumé de l'auteur (MB) : " ‘Néoconstitutionnalisme’ est assurément le nouveau nom pour une famil... more Résumé de l'auteur (MB) : " ‘Néoconstitutionnalisme’ est assurément le nouveau nom pour une famille de théories du droit bien connues: un nom jusqu'à maintenant utilisé seulement au sein de la théorie du droit du monde latin. Mais contrairement à une critique récente de Riccardo Guastini, et conformément à une plus large analyse de ce mouvement dans mon dernier livre, Manuale di filosofia del diritto (2011), le néoconstitutionnalisme existe effectivement – exactement comme le droit naturel, le positivisme juridique ou encore le réalisme juridique existent. Dans cette contribution, en fait, trois thèmes centraux du néoconstitutionnalisme sont examinés – la connexion droit-morale, la distinction règle-principes et le balancement ou pondération – afin d’en fournir une meilleure théorie positiviste. Ainsi, je reconnais une connexion contigente mais théoriquement essentielle entre le droit et la morale; j’admets une distinction quasiment radicale entre les règles et les principes juridiques, et je fournis une théorie du balancement (ou pondération) positiviste, réaliste et axiologiquement pluraliste."
Book Reviews by Jeremy Mercier
International Journal for the Semiotics of Law - Revue internationale de Sémiotique juridique, Feb 27, 2015
Les juges créent-ils du droit ? Eros Roberto Grau, avocat, ancien professeur à la prestigieuse Fa... more Les juges créent-ils du droit ? Eros Roberto Grau, avocat, ancien professeur à la prestigieuse Faculté de droit de l’Université de São Paulo et ancien membre (Ministro) de la Cour suprême brésilienne (STF) de 2004 à 2010, aurait sans aucun doute pu faire un livre inaccessible sur cette question, tant son parcours, ses forts engagements et ses réflexions prolifiques l’y autorisent.Sa biographie est en particulier disponible en brésilien sur le site de la Cour suprême brésilienne (http://www.stf.jus.br/portal/ministro/verMinistro.asp?periodo=stf&id=40) et sur son site personnel (http://erosgrau.com/). Mais le présent ouvrage édité par Carlos Miguel Herrera, « texte de combat » (p. 9) selon son préfacier Antoine Jeammaud, est une invitation à mieux découvrir l’approche critique du droit défendue par l’auteur sous l’angle d’une théorie réaliste de l’interprétation aussi habile qu’originale. Classiquement, selon cette dernière, on ne le sait que trop bien, le droit n’est pas à considérer c ...
Revue Droit et Société : http://ds.hypotheses.org/572, Feb 3, 2015
eds.), Social and Political Foundations of Constitutions, New York : Cambridge University Press, ... more eds.), Social and Political Foundations of Constitutions, New York : Cambridge University Press, 2013, 672 p. Compte rendu par Jérémy Mercier (Centre de Théorie et Analyse du Droit [CTAD], Université Paris-Ouest Nanterre-La Défense).
Revue "Droit et Société", 2013/3, n°85, pp. 765-768
Lu pour vous Droit et Société 85/2013 765 peu compréhensible de ne pas se prendre au sérieux to... more Lu pour vous Droit et Société 85/2013 765 peu compréhensible de ne pas se prendre au sérieux tout en le restant, elles montrent ensuite combien, au-delà de l'humour potache auquel il donne lieu, ce thème interpelle, dérange, fait rire et ne laisse pas indifférent. CHÉROT Jean-Yves et FRYDMAN Benoît (dir.), La science du droit dans la globalisation, Bruxelles : Bruylant, coll. « Penser le droit », 2012, 302 p. Compte rendu par Jérémy MERCIER (centre de Théorie et Analyse du Droit [CTAD], Université Paris-Ouest Nanterre-La Défense). 1. Jean-Louis HALPÉRIN, Profils des mondialisations du droit, Paris : Dalloz, 2009.
International Journal for the Semiotics of Law - Revue internationale de Sémiotique juridique - September 2013, Volume 26, Issue 3, pp 721-730, Sep 2013
La Vie des Idées, May 14, 2010
Selon le philosophe du droit Riccardo Guastini, le droit n'est pas un ensemble hiérarchisé de nor... more Selon le philosophe du droit Riccardo Guastini, le droit n'est pas un ensemble hiérarchisé de normes mais un langage, utilisé ou manipulé par de nombreux interprètes. C'est en analysant ce langage que l'on peut modifier les perspectives sur le pouvoir du droit et des juges, notamment constitutionnels. Recensé : Riccardo Guastini, Leçons de théorie constitutionnelle, traduit de l'italien et présenté par Véronique Champeil-Desplats, Paris, Dalloz, collection « Rivages du droit », 2010, 269 pages, 28 euros.
Revue Droit et Société, n°74/2010, 2010
Books by Jeremy Mercier
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Special Issue by Jeremy Mercier
Les contributions ici réunies soulignent la grande difficulté méthodologique à laquelle tout juriste doit faire face lorsqu’il est confronté au concept de hiérarchie des normes : faire la part entre l’usage descriptif ou cognitif et l’usage argumentatif ou justificatif de l’idée que les normes juridiques s’inscrivent dans une hiérarchie et qu’elles sont précisément juridiques non parce qu’elles réaffirment une quelconque hiérarchie de valeurs mais parce que leurs auteurs parviennent à établir qu’ils n’en sont que les acteurs, au sens de Hobbes : leurs paroles ne sont pas l’expression de leur volonté mais celle d’une entité qui les dépassent. Et ainsi fonctionne un système juridique : par imputation successive d’une volonté à un autre que soi dont on affirme qu’il nous est supérieur et que nous lui devons obéissance.
Réunissant quelques uns des meilleurs spécialistes de la théorie générale du droit, ce volume espère fournir quelques clefs de compréhension de la construction d’un ordre juridique.
L’enjeu, rappelons-le, était de contester tant la théorie positiviste des sources du droit que la conception jusnaturaliste classique faisant du droit positif le prolongement d’une morale propre à la nature humaine. Cette critique des sources constitue le point de départ de toutes les réflexions des réalistes et demeure une constante chez eux. C’est en cherchant à comprendre notre propre compréhension du droit qu’ils en viennent à explorer la dimension socio-psychologique et linguistique du phénomène juridique. Ce faisant, ils se distinguaient des autres juristes qui se réclamaient, à la même époque, du réalisme (aux États-Unis ou en France).
Si le succès du mouvement peut sembler limité, il n’en demeure pas moins qu’ils ont su provoquer des changements profonds dans la façon d’aborder la science du droit et ils continuent encore de nourrir une réflexion sur les conditions de possibilité d’une telle science.
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Les contributions ici réunies soulignent la grande difficulté méthodologique à laquelle tout juriste doit faire face lorsqu’il est confronté au concept de hiérarchie des normes : faire la part entre l’usage descriptif ou cognitif et l’usage argumentatif ou justificatif de l’idée que les normes juridiques s’inscrivent dans une hiérarchie et qu’elles sont précisément juridiques non parce qu’elles réaffirment une quelconque hiérarchie de valeurs mais parce que leurs auteurs parviennent à établir qu’ils n’en sont que les acteurs, au sens de Hobbes : leurs paroles ne sont pas l’expression de leur volonté mais celle d’une entité qui les dépassent. Et ainsi fonctionne un système juridique : par imputation successive d’une volonté à un autre que soi dont on affirme qu’il nous est supérieur et que nous lui devons obéissance.
Réunissant quelques uns des meilleurs spécialistes de la théorie générale du droit, ce volume espère fournir quelques clefs de compréhension de la construction d’un ordre juridique.
L’enjeu, rappelons-le, était de contester tant la théorie positiviste des sources du droit que la conception jusnaturaliste classique faisant du droit positif le prolongement d’une morale propre à la nature humaine. Cette critique des sources constitue le point de départ de toutes les réflexions des réalistes et demeure une constante chez eux. C’est en cherchant à comprendre notre propre compréhension du droit qu’ils en viennent à explorer la dimension socio-psychologique et linguistique du phénomène juridique. Ce faisant, ils se distinguaient des autres juristes qui se réclamaient, à la même époque, du réalisme (aux États-Unis ou en France).
Si le succès du mouvement peut sembler limité, il n’en demeure pas moins qu’ils ont su provoquer des changements profonds dans la façon d’aborder la science du droit et ils continuent encore de nourrir une réflexion sur les conditions de possibilité d’une telle science.