Academia.eduAcademia.edu

Rezé – Saint-Lupien. Fouille programmée (2009)

2020, ADLFI. Archéologie de la France - Informations. une revue Gallia

ADLFI. Archéologie de la France Informations une revue Gallia Pays de la Loire | 2009 Rezé – Saint-Lupien Fouille programmée (2009) Rémy Arthuis, David Guitton, Martial Monteil, Jimmy Mouchard et Ophélie de Peretti Édition électronique URL : http://journals.openedition.org/adlfi/36713 ISSN : 2114-0502 Éditeur Ministère de la Culture Référence électronique Ophélie de Peretti, Rémy Arthuis, David Guitton, Martial Monteil et Jimmy Mouchard, « Rezé – SaintLupien » [notice archéologique], ADLFI. Archéologie de la France - Informations [En ligne], Pays de la Loire, mis en ligne le 20 septembre 2020, consulté le 15 décembre 2020. URL : http:// journals.openedition.org/adlfi/36713 Ce document a été généré automatiquement le 15 décembre 2020. © ministère de la Culture et de la Communication, CNRS Rezé – Saint-Lupien Rezé – Saint-Lupien Fouille programmée (2009) Rémy Arthuis, David Guitton, Martial Monteil, Jimmy Mouchard et Ophélie de Peretti 1 Inscrite dans la continuité des fouilles menées dans les années 1980, puis à la fin des années 1990 et début 2000, la question du lien entre la ville antique de Ratiatum et le fleuve Loire fait l’objet d’un programme pluriannuel depuis 2005. Pour le mener à bien, une équipe de recherche pluri-institutionnelle et pluridisciplinaire a été réunie. La fouille programmée annuelle accueille par ailleurs, depuis son origine, un chantier école universitaire destiné en priorité aux étudiants nantais du Master Pro II « les métiers de l’archéologie ». 2 L’année 2009 correspond à une année transitoire, dont les objectifs avaient été exposés en 2008 : • Poursuite et achèvement de la fouille des zones 6, 7, 9 et 10, au sud-est, sans ouverture mécanique complémentaire. • Ouverture d’une nouvelle fenêtre extensive immédiatement à l’ouest de la chapelle avec pour objectif de reconnaître la suite de l’aménagement de berge monumental et de confirmer ou d’infirmer la présence de constructions en caissons au débouché d’une rue nord-sud identifiée dans le quartier, à l’exemple du dispositif reconnu plus à l’est en 2008. Cette fenêtre constitue une surface de 700 m2, en incluant les paliers de sécurité nécessaires. En parallèle, une ouverture mécanique ponctuelle a été mise en œuvre entre les caissons situés à l’est et le mur identifié en 2005-2006, de manière à en compléter le plan (195 m 2). • Réalisation, vers l’ouest, de deux ou trois nouveaux sondages carottés (entreprise Fondasol) destinés à alimenter encore le dossier propre à la dynamique fluviale. Le cadre naturel 3 L’agglomération antique occupe l’extrémité nord d’un versant de la vallée de la Loire qui descend en pente douce, passant, dans l’emprise de la ville, de 20 m à 4,50 m NGF environ. Ce plateau est incisé par quelques vallons occupés par des cours d’eau permanents (à l’exemple de la Jaguère à l’ouest), intermittents ou dont le parcours a été effacé progressivement par l’urbanisation récente. ADLFI. Archéologie de la France - Informations , Pays de la Loire 1 Rezé – Saint-Lupien 4 Le sous-sol est majoritairement constitué de micaschiste et, dans une moindre mesure, de gneiss avec quelques bandes d’emprise limitée de granite pegmatique. Sur le site, subsistent de place en place des placages de limon jaunâtre à verdâtre, le plus souvent d’épaisseur réduite. À l’évidence, ces niveaux, issus pour l’essentiel de la désagrégation du substrat sous-jacent, mais plus ou moins redistribués, ont subi une forte troncature liée à la mise en place des constructions d’époque romaine (arasement), mais aussi sans doute à un phénomène de lessivage ancien favorisé par la pente naturelle. 5 Les cotes altimétriques disponibles à l’échelle du site permettent de restituer une pente douce entre la zone 6 au sud et le secteur 11 de la zone 4 au nord, qui passe de 9,10 m à 4,50 m sur une distance d’environ 73 m, soit une déclivité moyenne de 6,3 %. Au droit du mur de berge en pierres sèches, et donc à la limite entre le versant et la plaine alluviale, le substrat accuse une nette rupture de pente, d’ailleurs utilisée et rectifiée pour l’aménagement du mur, dont on peut estimer la hauteur à 2 m-2,50 m environ. Suit une longue terrasse rocheuse que la lecture des carottages permet de restituer sur 100 m de long environ, qui suit une pente douce oscillant entre 7 % et 16 % avant de plonger brutalement passé la route de Pornic, annonçant ainsi le lit profond de la Loire. La mise en évidence de cette terrasse n’est pas sans conséquence sur le fonctionnement du cours d’eau situé devant la ville antique. Elle définit en effet un espace qui peut être considéré comme propice à la mise en place d’une zone d’échouage et de déchargement de marchandises, compte tenu de l’éloignement du chenal principal et, donc, de l’absence de courants violents. À l’inverse, cette zone portuaire sera plus facilement ensablée pour peu que la charge transportée par le fleuve augmente (progradation sableuse). 6 Les sondages carottés réalisés en 2009 confirment cette analyse et montrent également que l’on ne trouvera pas, entre la route de Pornic et le site de Saint-Lupien, une sédimentation contemporaine de l’activité portuaire antique pouvant nous informer sur le fonctionnement global de la Loire durant cette période. Pour comprendre l’activité du fleuve antique au droit du port de Saint-Lupien, il est désormais nécessaire de rechercher une sédimentation analysable (fines organiques), dans une dépression latérale, préservée de l’érosion ligérienne. A priori, la vallée du ruisseau de la Jaguère, à l’embouchure avec la Loire, pourrait s’avérer appropriée à cet exercice. Le port antique de Ratiatum 7 La situation locale du quartier de Saint-Lupien en fait donc un lieu propice à la mise en place d’un port, même si les contraintes altimétriques de la terrasse naturelle au contact avec le bas du versant interdisent a priori son accès à des navires de fort tonnage. On ne peut toutefois exclure l’existence de chenaux profonds d’accès et on se doit aussi de souligner qu’une partie de l’analyse reste suspendue à une meilleure restitution du parcours du fleuve et de sa dynamique (hauteur moyenne des eaux, impact des marées, etc.). 8 Les découvertes faites en 2009 de pieux, au contact du substrat, renvoient à celles déjà faites en 2008 et semblent confirmer, sous réserve d’investigations complémentaires, l’existence d’aménagements en bordure de fleuve antérieurs à la mise en place des constructions monumentales des années 50-70 de notre ère. C’est en effet à cette période, et à l’aplomb de la rupture de pente évoquée plus haut et préalablement ADLFI. Archéologie de la France - Informations , Pays de la Loire 2 Rezé – Saint-Lupien rectifiée, qu’un long mur de pierre sèche est mis en œuvre parallèlement à la vallée de la Loire. 9 L’ensemble de cet aménagement de berge est désormais reconnu sur plus de 90 m de long. Il présente un caractère monumental affirmé, marqué par un mur épais qui s’élargit au contact d’au moins deux des voies d’accès perpendiculaires au fleuve. En effet, dans la fenêtre ouverte en 2008 et de part et d’autre du débouché d’une rue nordsud, deux imposantes constructions de forme quadrangulaire ont été édifiées en débordant vers le nord par rapport à l’axe du mur de berge reconnu à l’ouest en 2003 puis en 2005-2006. La découverte d’une longue poutre en chêne et la mise en évidence de trous d’ancrage de poutres verticales permettent de restituer une construction mixte (pierre sèche et bois), subdivisée en plusieurs caissons. 10 En 2009, l’ampleur des caissons situés à l’est a pu être mieux évaluée tandis qu’un système similaire a été reconnu à l’ouest au débouché d’une seconde rue. 11 Le cas de Rezé trouve ainsi des points de comparaison éclairants avec d’autres sites localisés en bordure de fleuve et témoignant d’un même procédé universel d’aménagement de berge antique (Aizier, Les Mureaux, Bourges, Besançon, etc.). On a là un aménagement de berge multifonctionnel (limite urbaine, mur de terrasse, digue, éventuellement quai, etc.). Dans le cas présent, le mur est conservé au maximum sur 1,30 m de hauteur. Sa restitution en élévation reste délicate et, en fonction des choix, pouvait atteindre quelques mètres de haut, dans le cas d’une unique terrasse, et un peu moins dans le cas de terrasses successives en espaliers. 12 C’est durant la première moitié du IIIe s. de notre ère que le mur de berge monumental de Rezé subit quelques modifications ponctuelles et, surtout, que la pente naturelle est alors équipée d’un « dallage » fait de dalles et blocs de micaschiste, véritable radier et empierrement qui s’étend, suivant une déclivité régulière, depuis la base du mur sur plusieurs mètres de long vers le nord. Cette rampe, faisant sans guère de doute également office de cale d’échouage, connaît plusieurs réfections par le biais de remblais faits de matériaux triés, qui ont pu être progressivement déposés jusque dans le courant du Ve s. de notre ère. À un moment donné, le mur lui-même est d’ailleurs abattu et ses matériaux déversés au-devant, son arase contribuant désormais au reprofilage de la rampe. 13 Même s’il convient encore de rester prudent, cette rampe artificielle pourrait avoir été mise en œuvre en lien avec des modifications du régime du fleuve, à une échelle locale ou plus large, si l’on en juge par le fait que ces séquences de remblaiement sont surmontées au nord par d’épais dépôts d’alluvions, majoritairement sableuses, qui témoignent d’un ensablement du secteur. Ce dernier paraît avoir été assez rapide (environ 200 à 250 ans ?) ; en effet, ces alluvions sont incisées, au-devant de l’ancien mur par une boire, elle-même progressivement comblée par des vases datés par 14C du haut Moyen Âge. On ne peut être plus précis à ce stade dans la mesure où les dates 14C obtenues dans les dépôts limoneux ou argileux qui s’intercalent entre les sables sont vraisemblablement vieillies par un « effet réservoir » qui nécessite la mise en place de courbes de calibration. ADLFI. Archéologie de la France - Informations , Pays de la Loire 3 Rezé – Saint-Lupien Le quartier antique de Saint-Lupien 14 Dans la continuité des fouilles menées entre les années 1980 et 2003, les données acquises entre 2005 et 2009 ont considérablement enrichi le dossier de l’évolution urbaine du quartier qui se développe sur le bas du versant. 15 L’étude de la large fenêtre ouverte au sud, centrée sur les espaces de circulation et les entrepôts, a ainsi révélé les traces d’une première occupation, qui apparaît essentiellement sous la forme de fossés. Le fossé principal, transformé en dépotoir, est antérieur aux années 20-30 de notre ère et son tracé est repris ultérieurement par la rue nord-sud dont le débouché au travers de l’aménagement de berge a été étudié en 2008. Ce fait suggère qu’une partie au moins des linéaments mis au jour pourrait correspondre à un premier tracé de la trame urbaine, datable de l’époque augustéenne ou du début de l’époque tibérienne. En tout état de cause, les vestiges bâtis et les mobiliers recueillis paraissent exclure toute urbanisation réelle avant les années 20-50 de notre ère. 16 Une première phase d’urbanisation, datée précisément de ces années 20-50 de notre ère, est caractérisée par la mise en place probable de la rue est-ouest qui sert d’épine dorsale au quartier (la fouille n’en est toutefois pas encore achevée) ainsi que d’au moins une rue nord-sud. En parallèle, les parcelles sont partiellement loties, sous la forme de constructions en matériaux légers édifiées sur solins de micaschiste. Dans le même temps, ou peu avant, le long de la rue, des foyers associés à des trous d’ancrage de poteau matérialisent des activités de forge, dont le détail demande encore à être étudié et comparé. 17 Dans les années 50-100, et alors qu’une partie du bâti antérieur subsiste, de nouveaux bâtiments sont construits. Les plus complets présentent des plans rectangulaires de grande surface et pourraient être assimilés à des entrepôts, là encore édifiés en matériaux périssables sur solins de micaschiste. La rue est-ouest, équipée d’un portique au nord, et la rue nord-sud sont désormais assurément présentes. La coïncidence de date, peu ou prou, avec la mise en œuvre de l’aménagement de berge n’est sans doute pas fortuite. 18 L’ensemble du quartier, tout au moins au nord de l’artère est-ouest, est ensuite radicalement réaménagé dans le courant des années 100-150. Des entrepôts occupent désormais tout l’espace bâti et sont caractérisés par des murs dont les parements à moellons de granite sont liés au mortier. Une partie d’entre eux a été figée par la mise en valeur de la portion de site fouillée dans les années 1980. S’y ajoute, dans la zone 1, un vaste four dont l’interprétation reste encore provisoire (séchoir/fumoir ?) et qui est en quelque sorte miraculé dans la mesure où, du fait des labours modernes et contemporains, les sols fonctionnant avec cette phase de réaménagement ont quasiment tous disparu. 19 Il est possible que les thermes situés en partie sous la chapelle Saint-Lupien, et dont la poursuite vers le sud a été reconnue en 2009, apparaissent durant cette phase. 20 La première moitié du IIIe s. de notre ère signe l’abandon progressif du quartier, dans le même temps où le mur de berge est réaménagé et équipé d’une rampe artificielle. Le quartier des entrepôts est déserté selon toute vraisemblance passé le milieu du IIIe s. de notre ère, bien que quelques rares tessons signalent une fréquentation des lieux jusque dans le courant du Ve s. de notre ère. La part liée à l’arasement des vestiges devra toutefois être ici évaluée plus précisément à la lumière des données acquises lors de la ADLFI. Archéologie de la France - Informations , Pays de la Loire 4 Rezé – Saint-Lupien fouille préventive menée plus à l’ouest en 2006 où la stratigraphie, mieux conservée, s’étendait jusque dans le courant du haut Moyen Âge. Quoi qu’il en soit, l’existence d’un hiatus doit aussi être pondérée par les données acquises au droit de la chapelle SaintLupien. 21 Il nous semble qu’il serait tout à fait préjudiciable de ne pas exploiter dans son intégralité les espaces acquis par la ville de Rezé en vue de recherches programmées sur le quartier Saint-Lupien. Plus de 5 000 m2 n’ont encore fait l’objet d’aucune investigation archéologique, à cela s’ajoute la découverte d’un bâtiment public thermal qui semble fort bien conservé (mur conservé sur plus de 2,50 m de haut), qui doit s’implanter partiellement sur l’aménagement de berge. C’est pourquoi, nous avons amorcé un nouveau un programme à trois ans qui débutera en 2010. Fig. 1 – Plan des aménagements de berge 2e moitié du Ier s. – IIIe s. de notre ère. DAO : J. Mouchard (université de Nantes). ADLFI. Archéologie de la France - Informations , Pays de la Loire 5 Rezé – Saint-Lupien Fig. 2 – Plan du quartier Saint-Lupien dans le courant du IIe s. de notre ère et restitution du cours de la Loire DAO : R. Arthuis (Inrap). Fig. 3 – Plan du quartier des entrepôts dans le courant du IIe s. de notre ère DAO : M. Monteil (université de Nantes). ADLFI. Archéologie de la France - Informations , Pays de la Loire 6 Rezé – Saint-Lupien INDEX Année de l'opération : 2009 nature https://ark.frantiq.fr/ark:/26678/crtSrWQs2w2KV chronologie https://ark.frantiq.fr/ark:/26678/pcrtxT02uJOogm, https://ark.frantiq.fr/ark:/ 26678/pcrtof7EHNsS2e, https://ark.frantiq.fr/ark:/26678/pcrtZTmusVUU24 lieux https://ark.frantiq.fr/ark:/26678/pcrtSEeAipsBlD, https://ark.frantiq.fr/ark:/26678/ pcrteSpGJhXdyI, https://ark.frantiq.fr/ark:/26678/pcrt838rXVo1E0, https://ark.frantiq.fr/ark:/ 26678/pcrtr6IcaSZhYt AUTEURS RÉMY ARTHUIS Inrap DAVID GUITTON Inrap MARTIAL MONTEIL Université de Nantes JIMMY MOUCHARD Université de Nantes OPHÉLIE DE PERETTI Ville de Rezé ADLFI. Archéologie de la France - Informations , Pays de la Loire 7