Academia.eduAcademia.edu

Pratiques pédagogiques et Internet

1999, HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe)

Cet article tente d'esquisser une typologie des diverses ressources disponibles sur Internet, de montrer leur organisation et leur utilisation, et en abordant d'un point de vue didactique les pratiques en classe qui peuvent en découler. Cela nous conduit à établir qu'il est indispensable de repenser ces pratiques pédagogiques, selon les nouvelles possibilités didactiques d'utilisation d'Internet.

Pratiques pédagogiques et Internet Cyril Masselot MTI@SHS, Université de Franche-Comté - EA 372 (Paris X Nanterre) cyril.masselot@univ-fcomte.fr RÉSUMÉ. L'utilisation d'Internet, et plus généralement des Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication, prend de l'importance dans le milieu éducatif. Cet article tente d'esquisser une typologie des diverses ressources disponibles sur Internet, de montrer leur organisation et leur utilisation, et en abordant d'un point de vue didactique les pratiques en classe qui peuvent en découler. Cela nous conduit à établir qu'il est indispensable de repenser ces pratiques pédagogiques, selon les nouvelles possibilités didactiques d'utilisation d'Internet. MOTS-CLÉS : NTIC, TICE, didactique, pratiques pédagogiques, lecture - écriture, Internet Introduction L'utilisation d'Internet, et plus généralement des Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication (sans s’appesantir sur le terme de "nouveauté"), commence à prendre de l'importance dans le milieu éducatif, comme l'indique la nouvelle appellation « Technologies de l'Information et de la Communication pour l'Enseignement », TICE. La quantité d'information qui transite sur le Net sur le large sujet de l'éducation ne cesse de croître, le nombre de sites Web, de ressources pédagogiques, de listes de diffusion thématiques tend à prouver que ce media devient indispensable pour l'éducation, et l'autoformation. La recherche n'est pas étrangère à cet engouement, ni la "démocratisation" d'Internet, accélérée par les médias, dopée par les intérêts financiers des milieux informatiques et de technique de réseau (fournisseurs d'accès, opérateurs de télécommunication). Il en résulte une augmentation constante du nombre d'utilisateurs d'Internet, ainsi qu'une intensification de la circulation sur le Net d'informations, de ressources, ou d'échanges liés aux nombreux domaines de l'éducation, ce qui nous amène à constater une diversification des pratiques pédagogiques du Net. En se cantonnant aux domaines de la lecture et de l’écriture, de l’enseignement du français langue maternelle et langue étrangère en milieu éducatif, il s'agira ici d'esquisser une typologie de ces diverses ressources disponibles ou en gestation (en tests), de montrer leur organisation et leur utilisation, et en abordant d'un point de vue didactique les pratiques en classe qui peuvent en découler. Dans ce but, nous nous intéresserons à l’intégration de ce dispositif “émergé”, et non plus émergeant, dans les pratiques pédagogiques actuelles. Il est à noter que les lecteurs habitués à régulièrement naviguer sur Internet auront une impression de “déjà-vu” ; cependant, les liens avec le monde de l’éducation sont en construction, et se renforcent chaque jour : c’est ce que cet article veut démontrer, en effectuant une photographie ponctuelle des ressources et possibilités réelles de création de nouveaux outils au service de pratiques didactiques innovantes. 1 Internet : web, mail,… et ensuite ? Internet n’est avant tout qu’un réseau de réseaux d’ordinateurs, lorsqu’on regarde l’aspect technique du phénomène. Des “tuyaux”, comme on aime à le dire, les relient entre eux, et ils sont de plus en plus gros, performants, sûrs. Il n’en n’est pas de même du contenu qui court dans ces tuyaux. Même si certains articles alarmistes prétendent que le réseau (le “Net”) est arrivé à saturation, alourdi de trop nombreux connectés, les réactions et évolutions techniques sont rapides, tant l’impact économique produit par ce marché mondial aux répercussions quasi instantanées ne peut souffrir la moindre faiblesse. Dans le monde éducatif, la tendance actuelle est de déplorer la pauvreté de l’activité liant le monde scolaire aux méthodes actuelles de communication. Il est vrai que le nombre d’enseignants utilisant le réseau reste insuffisant ; il est vrai aussi que très peu d’entre eux ont recours aux outils informatiques. Les infrastructures sont en constant développement, mais les équipements et les formations sont victimes des contraintes budgétaires nationales, et des lourdeurs administratives trop répandues. Il n’est d’ailleurs pas rare d’entendre les plaintes des intéressés (enseignants, chercheurs..), et il n’est pas bon représenter les instances ministérielles lors de rencontres sur ce sujet. Le constat peut cependant être tempéré : il suffit d’effectuer quelques recherches sur le réseau, en utilisant des mots-clés du type “école”, “pédagogie”, “didactique”, pour obtenir de nombreux liens pointant sur des sites Web1, des forums, des archives de messages (type “mail”2 ou “news”), etc. Il y a donc matière à travailler. Il est facile, lorsqu’on on est intéressé par ces thèmes, et qu’on est toujours “branché” sur Internet pour y trouver de nouvelles ressources, de croire que tout le monde est connecté, et à accès à cette photocopieuse mondiale, animée, en couleurs et interactive. Il faut tout de même garder en mémoire que seuls certains privilégiés sont concernés, la grande masse des citoyens, et des acteurs du monde éducatif, restent sur les trottoirs qui bordent ces fameuses “autoroutes de l’information”. Des ressources existants bel et bien, notre propos va s’orienter sur les diverses possibilités d’utilisation du réseau ; précisons ici que de manière générale, la majorité de nos concitoyens pensent qu’Internet, c’est la possibilité de voir des sites jolis, voire intéressants (partie Web), et de pouvoir envoyer des messages électroniques à qui on désire. On peut même imaginer mieux : ainsi, lors des “Rencontres des Cultures Urbaines” à la Villette, en 1998, au cyber-café, un enfant de 12 ans m’a demandé 1 A tel point que les portails les plus courants possèdent des entrées de rubrique du type “Enseignement et formation”. Yahoo France donne par exemple environ 250 catégories, pour plus de 2500 sites répertoriés contenant le mot “école” (http://www.yahoo.fr). 2 Les emprunts de ce type sont légions dans le jargon d’Internet ; malgré les réticences de beaucoup d’entre nous, on finit par être obligé d’appeler un “courriel”, un “mail”… comment envoyer un message au monde entier. Réel besoin de communiquer ? Magie de l’informatique, qui permet de tout réaliser, même d’être omniscient, omniprésent, et entendu de tous ? Ce n’est pas la première fois qu’il est possible de constater la mythologie et l’idéologie religieuse sous-tendue par certains utilisateurs d’Internet, voire savamment entretenues par le discours ambiant (“avec Internet on peut tout faire“). Certes, grâce à Internet, on peut consulter et créer des sites basés sur le langage HTML3, on peut aussi envoyer des messages électroniques. En réalité, on peut échanger des fichiers informatiques, textes ou images, en envoyer comme en recevoir. Toute la communication entre deux ordinateurs est fondée sur ce principe. Il est alors possible de laisser libre court à l’imagination, afin de créer toutes les méthodes de communication nécessaires, en les traduisant pour les adapter à ce principe. C’est pourquoi on peut utiliser Internet avec d’autres outils, comme les news, le chat, l’IRC, la publication interactive de base de données, la visioconférence et l’EAD, les mondes virtuels… Cette liste n’est certainement pas exhaustive ; à l’heure où ces lignes seront lues, il est sûr que de nouveaux modes opératoires seront apparus. Ces diverses ressources offrent des intérêts et des utilisations multiples dans la champ qui nous intéresse, que nous allons tenter de présenter dans les lignes qui suivent. 2. Sites Web liés à l’éducation Nous pouvons rencontrer sur Internet toute sorte de sites Web, ayant un rapport plus ou moins lointain avec l’éducation (ou la formation), nous n’allons donc pas évoquer seulement les sites à visée éducative. Il n’est pas toujours aisé de séparer le grain de l’ivraie dans les résultats de recherche procurés par les portails (moteur de recherche comme Yahoo ou Altavista). La méthode même de référencement des sites se basant en grande partie sur les motsclés indiqués par les auteurs des pages Web, nous ne sommes jamais à l’abri d’une usurpation de termes, et donc de visiter un site qui n’a que très peu de relation avec nos préoccupations… En recoupant des messages visant un large public, et les liens rencontrés au gré des visites, pointant vers d’autres sites, on finit par obtenir une image des types de pages existantes. Dominique Wolton [WOL 99] dégage « quatre catégories » qui constituent « l’offre organisée par des institutions » qu’on peut rencontrer sur Internet : les services, les loisirs, l’information-événement, les informations-connaissance. Nous pourrons constater que les divers types de sites Webs qui suivent peuvent entrer dans cette catégorisation, voire même appartenir à un binôme, les limites n’étant pas toujours claires, tant dans la construction que dans le contenu des rubriques choisies. 3 HyperText Markup Language 2.1. Sites de classe ou de projets La plupart ont un caractère officiel, et présentent l'établissement et ses projets. Ils ne sont pas toujours centrés sur une classe ou un projet précis, mais peuvent héberger des sites dédiés (à une classe par exemple)4. L'animation de ces sites centraux dépend beaucoup de celle des sites qui la composent. Les sites de classes ou de projets comportent en général divers niveaux (plusieurs rubriques comportant plusieurs branches), et sont plus liés à des projets pédagogiques précis (du type journal d’école, présentation d’échanges, etc.), avec souvent des animations dues à un travail de classe coopératif (voire multi-classes, ou interclasses, dans un même établissement, ou avec d'autres établissements, du même pays ou non, ce qui peut donner lieu à d'intéressants échanges linguistiques). Il est également possible d’y trouver, comme sur d’autres types de sites du monde éducatifs, des cours entiers publiés, ainsi mis à la disposition d’un large public, ce qui entraîne des possibilités intéressantes pour l’Enseignement à Distance (EAD), pour qui les banques de cours et de références contextuelles sont une mine quasiment inépuisable sur le net. Qui dit cours, dit révisions, et, dans les méthodes classiques, exercices : on peut trouver tout cela aussi, selon l’habitude qui consiste à tout d’abord répliquer avec un nouvel outil ce que l’on faisait avec l’ancien. 2.2. Sites intermédiaires : le cas des enseignants Il existe cependant des sites intermédiaires : ce sont ceux d'enseignants (personnels, cf. note précédente), où l'on peut trouver à la fois des informations personnelles, et des hébergements de classe ou de projets pédagogiques, comme précédemment. Ces cas sont souvent dus à des “mordus” de l’informatique en général, et d’Internet en particulier, confrontés à des problèmes administratifs et techniques qui ne permettent pas un hébergement officiel. Il est possible de trouver ces sites hébergés sur des serveurs gratuits (dont l’hébergement est gratuit, mais qui ne fournissent pas l’accès - qui reste le domaine des “providers” - à Internet) comme "altern.org" par exemple (avant les problèmes rencontrés par ce serveur), ou “mulimania.org”. C'est ici une étape qui sert à l'enseignant à prouver l'intérêt de ce travail, ainsi que sa faisabilité, afin d'obtenir ensuite les autorisations et crédits nécessaires à l'inscription de ces réalisations dans un projet pédagogique reconnu et donc financé par l'administration scolaire. Ces techniques, très répandues dans les années 94 à 97, tendent à disparaître, les institutions commençant à intégrer Internet comme un outil pédagogique à part entière (au même titre qu'un manuel, ou que l'utilisation d'un 4 Il est de plus en plus rare de trouver le site d’une classe hébergé sur les pages personnelles d’un enseignant, mais ne nous leurons pas, cela arrive encore. ordinateur pour du traitement de texte). Précisons une fois encore que ce ne sont que les prémices d’une activité promise à une véritable expansion. 2.3. Sites universitaires Sur les sites universitaires, on retrouve la structure pyramidale décrite plus haut : l'université dispose d'un domaine, donc d'un ou plusieurs serveurs ; un premier héberge officiellement le site de l'université, d'autres ceux des Unités de Formation et de Recherche ou composantes, d'autres encore ceux de laboratoires, centres ou projets spécifiques. L’information y est souvent difficile à organiser, donc à trouver. Les universitaires utilisant le réseau depuis déjà un certain temps, des parades ont été élaborées, en particulier en hébergeant des sites dédiés à des projets spécifiques au sein même des laboratoires de recherche. L’indexation est alors à la charge des administrateurs et/ou concepteurs de site. Il n’est donc pas rare de disposer d’informations plus intéressantes sur un site délocalisé, que sur celui de l’université qui organise le domaine. Loin d’être une limite, cela permet d’alléger les ressources communes pour les besoins internes ; cependant, une réflexion sur la référenciation interne à chacune de ces institutions (cela est valable pour les administrations, cf. cidessous) favoriserait un accès plus immédiat, donc plus efficace.5 En guise de contre-exemple, on pourra citer ici le cas de l'Université Paris-8 à St Denis (http://www.univ-paris8.fr/), où il est très simple de trouver le département hypermédias, puisqu’il suffit de cliquer sur la rubrique “UFR-Composantes”, et de dérouler la liste qui s’affiche alors pour trouver un lien direct qui pointe sur le site (hébergé par le domaine général) “http://hypermédia.univ-paris8.fr/”. Un outil de recherche disponible dès le sommaire (page d’accueil) permet en outre de trouver des références précises, ou un enseignant-chercheur particulier. 2.4. Sites “officiels” Les sites "officiels", des gouvernements, ou organismes comme les CRDP et le CNDP, les ambassades, le CNED, etc., sont nombreux sur la “toile”. Ils ont connus assez rapidement (en un ou deux ans) un essor considérable : l’accessibilité et la qualité des informations s’est améliorée, les structures ont été repensées, tant au niveau cognitif que didactique. A l’heure actuelle, ils gagneraient à être plus connus du grand public comme des acteurs du monde éducatif, car ils se sont peu à peu imposés comme des éléments incontournables de nos réflexions pédagogiques. Nous citerons ici à titre d’exemple : 5 Ce même problème se pose pour d’autres pays, comme les Etats-Unis, l’Espagne ou l’Allemagne. - http://www.educasource.education.fr/ (« explore et commente des ressources électroniques, sélectionnées pour leur intérêt dans l'enseignement. », extrait de la page d'accueil du site) - http://www.educnet.education.fr/ (« Site des acteurs du multimédia », titre donné sur la page d'accueil du site) - http://www.cndp.fr/ (qui pointe aussi sur les sites des CRDP et CDDP) - http://www.infobourg.qc.ca/ (Site de l'Infobourg, « la page du monde de l'éducation ») - http://www.io.rtsq.qc.ca/ (Réseau de télématique scolaire québécois) 2.5. Sites du monde de l’éducation D’autres sites du monde de l'éducation sont disponibles sur le Net : organismes divers, associatifs par exemple, comme l’EPI (association Enseignement Public et Informatique, http://www.epi.asso.fr/), des éditeurs de logiciels spécialisés (Club PoM Logiciels, http://www.clubpom.fr/). Il ne faut pas oublier l'autoformation, ainsi que des recherches diverses (en connexion avec d'autres sites appartenant aux catégories décrites ci-dessus), en particulier sur les NTIC, TICE, ou NTE. Quelques exemples : - http://services.worldnet.net/atena/, « Technologies éducatives et nouveaux apprentissages » - http://cursus.edu/, Thot, où nous trouvons des nouvelles régulières sur la formation à distance (source de renseignements fort bien organisée). 2.6. Ressources disponibles En effectuant un tour d’horizon de ces sites, on peut avoir accès aux types de ressources suivantes6 : - présentation de l'établissement, de la classe, de la structure, d'un ou plusieurs projets (navigation entres divers niveaux de présentation) - cours publiés (en ligne), et leur corollaire, les exercices (révisions) “classiques” ou, plus rarement, enrichis des possibilités de navigation propres à Internet (ouverture sur des banques multimédia, etc.). Il existe même certains sites, technique plus élaborés, utilisant la visioconférence pour diffuser des cours, nous y reviendrons tout à l’heure. - liste de liens (choix du ou des auteurs, classés thématiquement la plupart du temps), pointant sur tout type de sites. La présence d’une bibliographie classique est rare, voire exceptionnelle. - adresses de contact, "classique" et électronique 6 Certains sujets seront développés par la suite. - possibilité de téléchargement : de textes (officiels, de réflexion, de journaux…) ; d'images (fixes ou animées, banques d'images mises à disposition) et/ou de sons ; de démos de logiciels éducatifs, ou de versions complètes. - forum : échanges d'opinions ou d'informations sur des sujets précis, classés et organisés comme tels, avec possibilité de réponse(s), et d'archivage. - FAQ : en français, "Foire Aux Questions" (en anglais : "Frequently Asked Questions"), il s'agit d'une liste de questions (trop) régulièrement évoquées, auxquelles on apporte une fois pour toutes (?) les réponses appropriées. Ce procédé est surtout utilisé pour les dépannages (malheureusement nombreux) de logiciels ou matériels qui "plantent" ("pourquoi ça imprime pas ?", "comment on fait pour… ?"). Mais cette technique commence à être utilisée aussi pour servir de "réservoir" aux trucs et astuces utiles lorsqu'on utilise une technique nouvelle (visioconférence par exemple), ou pour créer des pages HTML en deux minutes, ou encore pour guider les internautes béotiens dans leurs recherches et navigations. - commandes par "formulaires" (tag <FORM action…>) : il s'agit ici de remplir un formulaire sur une page HTML, avec ses noms et adresses, et autres informations nécessaires (n° de carte bleue éventuellement) pour commander un article, ouvrage, matériel ou logiciel, ou simplement demander un renseignement précis. - bases de données sur divers sujets : répertoires de noms, de ressources (cf. la base de ressources du CNDP, très bien organisée), des catalogues divers, des liens classés thématiquement… - gestion de listes de diffusion : certains sites proposent d’envoyer régulièrement un mail d’information sur l’activité de l’association par exemple, les mises à jour d’un didacticiel, etc. - développement interactif du site : exemples de journaux en ligne, auxquels s'ajoutent textes et images proposés par les utilisateurs du site (la mise en page finale fait souvent à nouveau intervenir les auteurs du site). Le nombre de ressources disponibles sur le site s'augmente au fur et à mesure des différents ajouts : l'enrichissement du site dépend de l'engouement des utilisateurs-auteurs (passage à un état actif, de création, assez intéressant). - travail interactif à l'aide d'un site : génération automatique de textes (cf. JP. Balpe à Paris 8, http://hypermedia.univ-paris8.fr/), utilisation sur Internet d'une version spécifique d'un logiciel préexistant, adapté au protocole TCP/IP (le logiciel DidaText7 sera prochainement réécrit, réutilisant la séquence didactique qui lui sert de support, afin que ce logiciel soit adapté aux technologies réseau). Cette possibilité reste encore marginale, demandant de lourds développements techniques, qui font appel à une programmation importante. Les structures réseaux nécessaires à ces "services" ne sont pour l'instant pas les plus répandues. L'objectif est donc de tenter le pari de programmer des sites véritablement interactifs, mais nécessitant le moins de ressources techniques possibles (réseaux de faible débit, ordinateurs et navigateurs même anciens, etc.). 7 © CRDP de Franche-Comté, Université de Franche-Comté (CRESLEF), Cyril Masselot Nous n’avons pas précisé jusqu’alors que ces différents types de sites, ces diverses ressources, ne sont pas limitées, dans le domaine de la francophonie, à l’enseignement du français langue maternelle ou langue étrangère : pour chacune de ces rubriques, existent des types de toute sorte, et des ressources de tous genres. Citons cependant un site entièrement dédié au Français Langue Etrangère (http://www.fle.fr), en plusieurs langues bien entendu, muni d’un guide qu’on peut recevoir gratuitement, et qui surtout liste les sites intéressants dans le domaine. On trouve des sites intégrant la dimension Français Langue Maternelle comme entrée de rubrique, mais un site comme “www.flm.fr” n’existe pas (encore !) sur le Net. 2.7. La toile s’agrandit Nous l’avons vu, sont disponibles sur Internet de multiples ressources à visée pédagogique, ainsi qu’un grand nombre d’informations. L’organisation et la recherche de ces informations tend à s’améliorer au fil du temps, les rendant ainsi encore plus accessibles au grand public. Chacun sait qu’il ne suffit pas qu’un livre existe pour qu’il soit présent dans une bibliothèque, mais qu’il ne suffit pas non plus qu’il soit physiquement présent dans cette bibliothèque pour que nous y ayons accès, d’où les méthodes de référencement, de recherches, de “méta-” publication, c’est-àdire de diffusion de catalogues et répertoires, voire de publicité sur l’existence d’un nouveau produit. Même si cela reste encore un tant soit peu chaotique sur Internet, une vision diachronique donne l’impression que l’image de ce qui existe, de ce qui est disponible, dont nous parlions en introduction, gagne en netteté, et que peu à peu certains sites s’imposent comme des références incontournables. Leur qualité n’y est pas étrangère, de par leur contenu, leur organisation, leur archivage, leur animation régulière (refontes graphiques, amélioration des rubriques disponibles, etc.). Mais leur attrait n’est en rien étranger aux succès rencontrés par leurs auteurs. Ainsi, le site du département Hypermédias de l’université de Paris 8 gagne autant en publicité par sa conception, que par les chercheurs qu’on peut y rencontrer par leurs écrits et participation ; que les responsables de ce site ne s’en offusquent pas, mais si la renommée de l’un est liée à l’autre, cela s’entend dans les deux sens… Nous arrivons donc à un premier constat : il y a des sites “incontournables”, d’autres qui peuvent attendre d’être découverts, mais qui méritent certainement le détour, si l’on veut se faire une idée précise de la question. Se pose alors le problème du temps nécessaire à la consultation, à l’ingurgitation de cette masse d’informations. Dans un travail de recherche, il n’est pas rare de se confier à des sites dits de référence, et de se laisser guider par leurs conseils (leur liste de liens par exemple), au lieu de partir à l’aveuglette dans les méandres de la toile, au hasard des rebonds et zappings, pendant lequel on éprouve rapidement une sensation de vacuité, et d’inefficacité totale. Une chose est certaine : les ressources mentionnées plus haut vont continuer à foisonner, pour notre grand bien, puisque les possibilités pédagogiques vont du même coup se multiplier. La structuration du réseau se renforcera logiquement, sans quoi publier de l’information s’avère inutile. 3. Le courrier électronique Une pratique largement répandue sur le Net est l’utilisation de la partie “mail”, le courrier électronique, ou mél. Certains enseignants se sont emparés de cet outil, réinvestissant ainsi les techniques mises en place avec d’autres outils comme le courrier classique, le fax, ou encore le Minitel. On trouve alors l’organisation de correspondance entre classes, ou entre élèves. Certaines sont organisées thématiquement et font l’objet d’une publication d’un journal de classe(s), éventuellement publié par la suite sur un site dédié à la ou aux classe(s), comme nous l’avons évoqué plus haut. Cela permet aux élèves de découvrir virtuellement d’autres horizons, par le contact avec d’autres cultures, de pratiquer une langue étrangère s’il s’agit de pays différents. C’est une pratique à l’heure actuelle encouragée par un grand nombre d’enseignants, et possède l’avantage, outre le fait de communiquer, d’écrire, de lire, d’organiser sa pensée, et encore d’imaginer d’autres utilisations du Net pour les réseaux émergeants ainsi.8 Il est vrai que cet empressement à vouloir correspondre par mail à tout crin semble cacher un flou pédagogique, et plusieurs chercheurs s’interrogent sur le statut linguistique, sémiologique, et didactique de cette communication. Ainsi Maryvonne Masselot-Girard, lors du colloque “Multimédia et Construction des Savoirs” pose les questions suivantes : « Dès lors que l’enjeu est celui de la connaissance, sommes-nous encore dans une logique de communication ? Où se trame la communication, où se joue la connaissance, comment s’articulentelles l’une à l’autre ? » Tout en précisant que cette piste reste à explorer, elle pose que la relation aux apprentissages devient nodal, et que « la question des trajets (…) comme lieu de la production du sens devient celle de la construction des connaissances ». Cette conception inaugure une nouvelle attitude “méta-”, de réflexion sur nos propres pratiques, et permettra d’en élaborer de plus pertinentes. Pour l’instant, des enseignants trouvent qu’il est préférable d’avancer avec le peu que l’on possède et maîtrise, et que développer des actions particulières viendra en son temps. Par exemple, on peut assister, lors des échanges décrits plus haut, et une fois le contact établi, à une volonté de pérennisation de l’activité de “communication” menée, par l’organisation d’un voyage d’étude, une publication partenariale, voire l’élaboration de produits communs. Cela concerne autant les élèves que les 8 Certaines recherches universitaires sont menées à l’heure actuelle sur ce thème : comment les réseaux techniques (Internet) sont fonction / et / favorisent les réseaux humains (thème par exemple d’un programme pluriformation du centre MTI@SHS, Université de Franche-Comté). enseignants, qui ont ainsi la possibilité de partager des expériences avec d’autres personnes, sur le Net, et d’en découvrir. Un complément fort intéressant du mail est la liste de diffusion, principe qui permet d’envoyer un message à une seule adresse, gérée par un serveur et un logiciel spécifiques, qui s’occupent ensuite de rediffuser ce message à tous les abonnés à ce service (la plupart du temps gratuit). Il en existe beaucoup sur divers sujets ; dans le domaine de l’éducation, il est possible de citer un ensemble de listes qui génèrent un flot de messages conséquent : - LISTECOLFR <listecolfr@cru.fr>, - RESCOL-FR <rescol-fr@cru.fr> - EDUFRANCAIS <edufrancais@cru.fr> - EDU_PROJETS <edu_projets@rtsq.grics.qc.ca>, - EDU-RESSOURCES <edu-ressources@rtsq.grics.qc.ca>, - H-FRANCAIS <h-francais@h-net.msu.edu> Ces listes sont accessibles par le Comité réseau des universités, où il est possible de trouver une liste de listes, détaillée à l’adresse suivante : http://www.cru.fr/listes/pedagogie.html Les sujets sont aussi divers que « l’échange d'informations francophones, pédagogiques, éducatives et récréatives entre les enseignants et tous les amis de la langue française » (edufrancais), ou « Utilisation d'Internet à des fins éducatives » (edu-ressources) ou encore « Projets en télématique scolaire » (edu-projets). L’intérêt est donc d’être tenu informé de colloques, séminaires, recherches, publication…, de tout ce qui fait la recherche de pratiques pédagogiques innovantes avec l’appui des outils informatiques et de réseau, sans avoir à chercher l’information constamment, puisqu’elle tombe directement dans la boîte aux lettres électroniques de l’abonné. Il est très courant de voir passer des messages, sur ce genre de listes, demandant des contacts pour un échange de correspondance, qui s’établira par la suite en direct. Avec les “news”, ou forums, ce sont des systèmes qui favorisent une communication en plusieurs temps : des contacts s'établissent souvent par rencontre après lecture d’un message sur une liste de diffusion ou sur un forum, puis se suivent par mails directs entre deux ou plusieurs correspondants. 4. Forum de “news”, Usenet Cette technique est proche du mail : il s’agit d'envoyer des messages, mais à un site dédié, qui est chargé d’organiser les messages par thèmes, de tenir une base de données à jour, et de transmettre les nouveaux messages à d’autres serveurs de news, relais disposés un peu partout dans le monde et donc facilement accessibles. Il n’est pas rare de voir des universités organiser leurs propres serveurs-relais (puisque ces ordinateurs jouent les deux rôles : serveur pour accepter les nouveaux messages et les transmettre, client pour en récupérer d’autres afin de les publier rapidement pour une meilleure accessibilité). D’un usage encore restreint en classe, on y rencontre cependant le même genre de messages que sur les listes de diffusion évoquées plus haut : proposition de correspondance, annonces de colloque, séminaires, parutions de produits ou d’articles… Les thèmes sont organisés en groupes, à la manière d’une rubrique d’un site qui serait exclusivement consacrée à la communication, d’où l’ajout régulier du terme “forum”. Il est d’ailleurs de plus en plus difficile, pour l’internaute débutant, de faire la différence entre un mail “classique”, une liste de diffusion, un forum ou groupe de news, ou encore un forum installé sur un site web : il est vrai que la plupart des ces ressources fonctionnent de la même manière : - identification de l’émetteur - identification de l’objet du message, du domaine d’intervention : nom de la liste de diffusion derrière laquelle se cache une définition, nom du forum ou groupe de news, qui lui aussi cache une description liée au contenu, thème choisi dans le forum - identification du lieu d’échange de l’information : de point à point (d’individu à individu dans le cas du mail), d’un individu à un ensemble d’abonnés (listes de diffusion), d’un individu à d’autres personnes (news), dont l’acte de lecture sera basé sur un volontariat récurrent, comme si on écrivait un article sur une affiche posée dans la rue : pour le lire, il faut le regarder, on ne le reçoit pas à la maison sans effort ; et pourtant, l’information est là, disponible pour qui la désire. On retrouve presque la même notion d’intention dans le cas d’un forum publié sur un site web : il faut se connecter au site, accéder au forum, lire les messages, éventuellement y répondre… - définition du contenu du message : la politesse et la courtoisie sont-elles encore de mise dans le contenu de nos mails ? Selon les diverses techniques évoquées, il existe des règles plus ou moins définies : sociales, afin de rester dans un cadre “correct”, ou établies à la manière d’un règlement intérieur (cf. La “NetEtiquette”, qui régit les contenus des messages transitant par les forums de news). On arrive alors à un point intéressant : il existe des “modérateurs”, la plupart du temps, afin de surveiller les messages relayés par les listes de diffusion, news ou forums, et d’éliminer ceux qui ne répondent pas au règlement précédemment mis en place. Les recherches menées, entre autres, par J. Anis9 dans ce domaine, permettront de comprendre l’usage du français dans les textes électroniques, et les pratiques sociales qui en découlent. Voici quelques forums de news en français (qu’on peut trouver dans le dossier “fr”) : fr.annonce.seminaires, fr.education.divers, fr.education.medias, be.education. 9 Cf. La communication écrite en “ temps réel ” sur Internet : pratiques linguistiques des “ communautés virtuelles ”, dans ce même ouvrage. 5. Chat, IRC et ICQ D’autres utilisations du réseau sont possibles. Le chat en est un exemple, dans la panoplie des applications partagées, qui pourrait avoir des utilisations éducatives au même titre que l’échange de courrier électronique. Il s’agit ici de communiquer, en temps réel (cf. de nouveau l’article de J. Anis dans ce même ouvrage), soit de point à point, soit avec un certain nombre d’interlocuteurs (chat vient de l’anglais “to chat”, causer, bavarder). Là encore, nombreuses sont les techniques employées, avec divers logiciels, ou directement sur des sites dédiés à ces pratiques. Sans nous étendre sur les procédés usités, ce qui peut retenir notre attention est que ces outils peuvent être employés dans le monde éducatif au même titre que les autres systèmes de communication, avec l’avantage d’être immédiat (ou presque), et surtout d’être en relation directe avec son ou ses interlocuteurs. Certes, il s’agit d’un fausse présence, mais il reste vrai que deux personnes dialoguant par chat sont physiquement chacune devant un ordinateur, les yeux courant de l’écran au clavier, au même instant. Ce qui n’est pas la finalité initiale d’un courrier électronique, même si des méthodes de prise de rendez-vous sont envisageables dans les zones du monde où coïncident les heures de veille… Ce système permet de mieux s’expliquer sur un point précis, par retouches, précisions ou corrections immédiates sur le discours engagé. A la manière des messageries en direct du Minitel, on pourrait presque comparer cette méthode à une sorte de téléphone sourd et utilisant l’écrit et ses codes. De plus en plus utilisé dans le monde du travail, pour des raisons économiques évidentes (coût très inférieur au téléphone, temps gagné), peut être d’un grand recours aux enseignants, dans leurs pratiques quotidiennes. Hélas, les échanges auxquels on assiste sur le Net sont souvent de qualité médiocre. A la manière des news, il serait profitable à tous d’établir des canaux spécifiques à nos besoins (les “channels” de l’IRC, Internet Related Chat, fonctionnent à peu près comme une CB sur Internet, avec des canaux réservés à des thèmes très peu respectés, même si encore une fois il existe des administrateurs). Il n’en reste pas moins vrai que ce sont des outils qui permettent une pratique de l’écriture immédiate et spontanée non négligeables, et qui commence à être utilisés en formation (lutte contre l’illettrisme, actions d’alphabétisation), mais surtout avec un public adulte ou adolescent. Des initiatives plus nombreuses dans ce domaine seraient bénéfiques à l’enseignement du français avec des élèves plus jeunes, sans aucun doute. 6. Catalogues de ressources Ce point sera assez court : nous avons déjà évoqué plus haut (dans la partie réservée aux sites) l'existence de catalogues, de bases de données regroupant tout type d’information, sur la partie web d’Internet. les moteurs de recherche sont d’ailleurs basés sur ce principe ; nous avions aussi donné l’exemple du CNDP, ou d’autres sites regroupant également des banques d’informations sur des produits et sites éducatifs. Il existe une autre manière d’avoir accès à ces ressources, le FTP, “File Transfert Protocol”, qui prend tout son intérêt lorsqu’on veut mettre à disposition d’un large public des documents ou produits, avec un dispositif résistants et sécurisable (plus aisément que le web) ; il s’avérera utile aussi pour pouvoir récupérer toute sorte de documents ou produits, mises à jour de logiciels, démos… C’est un système souvent plus rapide que le web, plus robuste, puisqu’il n’utilise pratiquement aucune ressource graphique : cela nous permet d’accéder aux dossiers d’un serveur, comme si nous étions en train de chercher un fichier sur notre propre machine, le temps de connexion et de recherche en plus. Cette ressource sera donc plutôt un outil pour l’outil, et excepté dans une formation aux utilisations des outils propres à Internet, et elle ne possède pas de façon immédiatement visible un intérêt dans une séquence didactique. 7. Visioconférence Dispositif qui provoque toujours l’admiration, la visioconférence fait partie des objets magiques au même titre que la boule de cristal : comment un ordinateur, qui en soi-même est déjà source d’étonnement et de crainte pour beaucoup d’entre nous, tant il est capable du pire comme du meilleur, comment cette électronique mécanisée peut-elle jouer à la télévision, être à la fois moniteur et caméra ? Parce que la visioconférence, c’est ça : un ordinateur équipé d’une caméra et de la carte d’acquisition adéquate, une carte son et des baffles, et les logiciels de connexion-communication. Le chaudron est en place, le livre des incantations aussi, la magie peut opérer, à condition de posséder une connexion Internet, ou RNIS10. Quand on a trouvé notre correspondant, sur Internet (il existe des sites spécialisés à l’accès à la visioconférence), ou par téléphone, il est alors possible de le voir, et de lui parler. Cela commence à être répandu maintenant. Pourtant, concentrés sur l’aspect ludique du phénomène, on oublie trop souvent de préciser que c’est un outil extrêmement utile pour un véritable travail : tout comme le chat permet une conversation immédiate, donc plus plaisante que le mail, la visioconférence permet de voir et d’entendre son correspondant, tout en étant vu et entendu bien entendu dans les mêmes conditions. C’est le téléphone mais en mieux, le visiophone à la portée de tous. D’où les mêmes intérêts que pour le chat de tout à l’heure : coûts diminués pour un meilleur service, possibilité d’organiser des réunions, séminaires, conférences en réseau, ce qui ouvre les portes au télétravail, et à de nouveaux outils pour l’Enseignement à Distance. Allons plus loin : ces avantages pédagogiques ne s’arrêtent pas simplement à se voir et à s’entendre : dans la gamme des outils souvent disponibles avec la visioconférence, vont par exemple des tableaux blancs : logiciels spécifiques, ils nous 10 Réseau Numéris. offrent un espace plus ou moins grands (du type 5 pages A4), blanches au départ (vierges), où un certain nombre de personnes (certains logiciels vont jusqu’à 35 personnes en même temps) peuvent écrire, dessiner, coller ce qu’ils veulent : textes, images, en couleurs ou non, sons, etc. Imaginons un tableau traditionnel (noir !), où tous les élèves de la classe pourraient écrire, ou entourer le mot qu’ils ne saisissent pas, ou encore s’expliquer les uns aux autres telle carte ou tel schéma… L’idée est ici novatrice, du côté technique s’entend : que plusieurs personnes puissent travailler en même temps sur le même document est une pratique courante dans le monde “physique”, même s’il n’est pas toujours évident de pouvoir gribouiller les matières de travail. Il manquait simplement une transposition informatique et réseau ; il manquait surtout un dispositif partagé qui permette un accès simultané mais organisé, ce qui reste dur à mettre en place avec un tableau et des craies. Voilà ce que dit le Monde des 28 et 29-12-97 sur ce sujet dans un article intitulé « Internet à visage découvert » : «… Panorama de la visioconférence. Longtemps de qualité médiocre, objet de techniques hybrides, affaire de spécialistes ou de pionniers, l'évolution tend à une meilleure qualité et à une simplification des logiciels, ce qui permet à un plus grand nombre de s'en emparer pour des applications commerciales, éducatives, ludiques ou artistiques. Le principe, CU-SeeMe, n'a pas changé depuis les débuts de la visioconférence sur le Net, il s'agit de se connecter sur serveur spécialisé, réflecteur, par un simple numéro. Ces systèmes restent bien souvent entre les mains d'universités ou de sociétés d'informatique, les forums accueillants des particuliers équipés sont les nouveaux cafés. Pour que les dérapages ne soient pas trop fréquents sur ces sites, des modérateurs excluent les indésirables alors que les réflecteurs hébergeant exclusivement des forums à contenu sexuel se multiplient. Côté service public c'est l'éducation qui profitera le plus de ces évolutions. Équipement nécessaire : CD-ROM à 720 F (informations : euro-info@whitepine.fr) mini caméra entre 900 et 1500 F, microphone à 200 F. Sites de téléchargement de logiciels de démonstration : http://www.cuseeme.com http://www.wpine.com ftp://gated.cornell.edu/pub/video http://www.vocaltec.com http://www.microsoft.com/netmeeting Sites affichant des listes de réflecteurs : http://ccwf.cc.utexas.edu/cgi-bin/cgiwrap/streak/scan http://www.indstate.edu/msattler/sci-tech/comp/CU-SeeMe/ exemple d'application artistique http://www.flash.net/~spilth/cudiary.html » 8. Mondes virtuels Philippe Quéau ([QUE 97]), dans « Le Virtuel, Vertus et Vertiges » définit ainsi ce thème : « Un monde virtuel est une base de données graphiques interactives, explorable et visualisable en temps réel sous forme d’images de synthèse tridimensionnelles de façon à donner le sentiment d’un immersion dans l’image. » Très utilisé dans les jeux11 (très à la mode), cette technologie laisse cependant transparaître des possibilités en enseignement qui ne sont pas inintéressantes. Lors du séminaire du Gremm, se déroulant à l'INA, a été présenté une expérience intéressante, à laquelle participe la société CRYO (réalisateurs du "Deuxième Monde" de Canal Plus) et l’IUFM de Paris, d’un projet bien avancé à l'heure actuelle d'une université virtuelle. Un hall d’entrée accueille les visiteurs, représentés par leur photo ou l’image qu’ils se sont choisie ou créée. Des salles de cours (avec ou sans enseignant) sont immédiatement accessibles, ainsi qu’une bibliothèque, dans laquelle on peut trouver tout matériel de recherche nécessaire. Il y a la possibilité de rencontrer d'autres personnes, de leur parler par "chat" (le tout fonctionne en protocole TCP/IP) ou de leur envoyer un mél, de télécharger des cours, des extraits d'ouvrages ou de textes divers (comptes-rendus, fiches de lecture, corrigés…) ; l’utilisateur a la faculté d'envoyer des fichiers, comme pour rendre des exercices, ou des devoirs. La visioconférence transmet l’image de la caméra, avec tous les degrés de fidélité que cela peut entraîner ; l’idée est ici que chacun peut être l’autre, on a le loisir de se cacher à nouveau derrière un anonymat calculé et réconfortant, comme dans les mails, chats, ou news. Sur le statut en lui-même de ces mondes virtuels, la plupart des recherches tendent à préconiser une extrême attention aux développements de produits dits éducatifs, où ni les contenus ni les espaces de communication ne répondraient à des impératifs didactiques et pédagogiques. P. Quéau donne le ton : « Les mondes virtuels sont des outils de langage et de formalisation. Ce sont aussi de caissons expérimentaux. Ils peuvent en partie répondre à nos besoins. Mais leurs dangers potentiels doivent être soulignés. ils peuvent accélérer le processus de schizophrénisation des esprits. » Comme ces diverses technologies peuvent se compléter, il est indéniable qu’elles seront fortes utiles à l’enseignement. P. Quéau (et d’autres chercheurs) attirent l’attention sur les développements de produits spécifiques qui entraîneront des pratiques tant éducatives que sociales qui peuvent s’avérer désastreuses, comme très favorables à la construction du sens du monde. 11 Un exemple de Multi-user Dungeon (MUD) : http://www.chez.com/cbouffin/ABouffin/ Pascal Jablonka, de l’IUFM de Paris [JAB 98], présente ce même projet : « La connectivité et les mondes virtuels manquaient. La technologie SCOL de CRYO Networks permet la mise en relation au travers d’Internet dans un univers virtuel tridimensionnel. Les différents partenaires peuvent se déplacer, se voir, s’écrire, se parler, partager et piloter des hypermédias à distance sur réseau “faible bande”. » A l'heure actuelle, cette technologie nécessite encore du bon matériel informatique (processeur récent, RAM conséquente, carte vidéo et son, modem rapide) et des infrastructures réseaux adéquates. Cela présuppose aussi de la part des intervenants un bon maniement des outils informatiques. Ajoutons encore que l’émergence de ces techniques reste le domaine réservé de quelques équipes : les coûts de développement, les savoir-faire, ne permettent pas à un enseignant, équipé d’un micro-ordinateur “standard”, de développer de tels produits, à l’inverse des sites webs, pour lesquels il existe beaucoup de logiciels pratiques, gratuits, et simples d’utilisation. Conclusion L'utilisation du Net ne fait que progresser, Internet devient grand public, et la technologie nécessaire, contraignante, est en constante amélioration : le passage à la fibre optique, l'accès au numérique par câble coaxial, les offres en téléphonie haut débit, vont se stabiliser. Nous aurons ainsi un pannel de choix, pendant que le marché de la connectivité Internet trouvera ses gammes de public, et son équilibre techniquebesoins-prix. Les modélisations didactiques des ressources évoquées sont donc aussi soumises aux contraintes financières commerciales : se posent les problèmes des équipements, matériels et logiciels, ainsi qu'humains (informaticiens - attention à la pénurie de l'an 2000 -, techniciens réseau, ressources humaines en informatique appliquée aux Sciences Humaines et Sociales, à la Didactique, aux pratiques pédagogiques…). Il faut espérer que le monde éducatif pourra tirer son épingle de cette pelote de fils, comme le laisse heureusement présager les efforts d'équipement (en ordinateurs, réseaux et connexion RNIS, logiciels…) dans les établissements publics. Il faut maintenant que l'utilisation des possibilités d'Internet dans le monde éducatif passe à un autre stade, que les réflexions engagées sur ce thème soient poursuivies, enrichies, et peu importe si le même message est distillé plusieurs fois sous des formes et des noms différents : pour qu'une information soit pertinente, ne dit-on pas en théorie de la communication, qu'il faut qu'elle soit redondante ? Un constat tangible est que les mentalités évoluent ; en deux ans (96 - 97), les institutions ont "fait le saut", le pari Internet entend-on parfois : un prochain plan IPT, "Internet Pour Tous", serait-il prévu ? Et sera-t-il accompagné de la formation théorique adéquate, en didactique ? Sur son site, Jean Heutte12 déclare : « Dans le pire des cas, cette mode des didacticiels a débouché sur des batteries automatisées d'exercices directement calqués sur les manuels scolaires qui ne comportent généralement aucune trace d'intelligence artificielle. » C'est le regret qu'on éprouve souvent en testant un produit, logiciel, CD-ROM, ou site internet : quel intérêt de mettre en œuvre des méthodes traditionnelles qui sont souvent contestables en l'état ? Le but serait plutôt de profiter de ces "nouvelles" technologies pour inventer de nouvelles procédures. A l'instar d'opérations renommées d'apprentissage de l'utilisation d'outils comme la télévision (ou plus globalement l'image, cf. le programme Télécole, CRESLEF, sur le Territoire de Belfort, 90), le magnétoscope, ou le Minitel, à l'école, on ne peut que vouloir favoriser les pratiques pédagogiques que nous avons pu brièvement présenter ici, ainsi qu'espérer, dans un avenir proche, assister par exemple à la formation des futurs enseignants aux diverses manipulations possibles de ces outils dans les IUFM. Cet univers, dans sa dimension éducative, ne serait rien sans les acteurs de terrain. Encore faut-il que ces derniers aient un accès facilité, voire privilégié, à ces informations, et qu’ils soient en mesure de créer leurs propres séquences didactiques utilisant leurs propres ressources numériques. (cf. B. OLLIVIER, [OLL 99] : « le système éducatif change de fonction : il s’agit à l’heure actuelle de transmettre des capacités à accéder et traiter des informations, et à en produire, de manière autonome. ») L'ordinateur n'est qu'un outil au service des besoins éducatifs, et non une fin en soi ; ce fait n'est plus remis en cause. On peut dans le même ordre d'idée poser qu'Internet n'est après tout qu'un outil, aussi peu "terminé" soit-il, puisque c'est là sa vocation ; dans la partie multimédia d'Internet, le Web - la toile -, tous les cheminements sont possibles, même si certains passages sont hiérarchisés, organisés : c'est cette ouverture, cette fausse structuration, qui permet de repenser le fonctionnement de séquences didactiques avec cet outil. Le tour d'horizon des possibilités existantes a montré la diversité actuelle des expériences présentes sur le Net, et donne à croire qu'il faut : - favoriser d'un point de vue institutionnel la création de nouvelles pratiques pédagogiques (complémentaires) prenant en compte les nouvelles possibilités didactiques de l'utilisation d'Internet. - inciter l'utilisation des produits existants, ainsi que le développement d'autres projets. Michel MOREAU [MOR 99], sous-direction des Technologies Éducatives et TIC, lors du colloque "Multimédia et Construction des Savoirs", Besançon, mai 99, a déclaré : « (..) Sur 1,4 millions d'abonnés, 40% se connectent moins d'une fois par mois ». Il reste donc du chemin à parcourir. 12 http://netia59.ac-lille.fr/cybermomes/hyperpeda : « Ecole, savoirs et hypermédia » - répondre aux besoins d'une "société de l'information" émergeante où la formation du citoyen est primordiale, dans toutes ses dimensions : savoir s'informer, informer ses contemporains, en un échange constant et normal de points de vue, sont des atouts indéniables, de civilisation et de pacification. L'objectif n'est pas d'institutionnaliser "administrativement" l'utilisation d'Internet dans l’Éducation Nationale. Il s'agirait plutôt d'aider les enseignants de tous niveaux, à s'approprier les mêmes techniques que leurs élèves, et à développer les méthodologies didactiques nécessaires pour créer leurs propres pratiques, afin de détourner ces outils de leurs usages premiers au profit d'un apprentissage citoyen de la lecture du monde. Bibliographie [JAB 98] Jablonka Pascal, « L’intégration réciproque des technologies de communication et des moteurs didactiques peut-elle changer l’acte pédagogique ? », Actes du quatrième colloque Hypermédias et Apprentissages, Poitiers, 15, 16 et 17 octobre 1998, Éditions INRP et EPI, Paris, p. 321-326 [QUE 97] Quéau Philippe, Le Virtuel, Vertus et Vertiges, Champ Vallon - INA, collection Milieux, PUF, Paris, 1997. [MAS 99] Masselot-Girard Maryvonne, CRESLEF, « Lire, interpréter, évaluer : des lecteurs-acteurs », Actes du colloque Multimédia et construction des savoirs, Besançon, 25, 26, 27 et 28 mai 1999, à paraître. [MOR 99] Moreau Michel , sous-direction des Technologies Éducatives et TIC, titre à définir, Actes du colloque Multimédia et construction des savoirs, Besançon, 25, 26, 27 et 28 mai 1999, à paraître. [OLL 99] Ollivier B., INRP, « La transmission des savoirs et la médiation éducative à l'heure du multimédia », Actes du colloque Multimédia et construction des savoirs, Besançon, 25, 26, 27 et 28 mai 1999, à paraître. [WOL 99] Wolton Dominique, Internet et après ?, Flammarion, Paris, 1999.