Travail de fin d’étude – Master 2 en droit public
Le statut du couple
de même sexe dans
l’Union européenne
Analyse critique au regard des principes tirés de l’interdiction des
discriminations, de la citoyenneté européenne et de la liberté de
circulation des personnes
Par Jérémie Haldermans
Année académique 2013 – 2014
Table des matières
Introduction............................................................................................................................................. 3
Les dis i i atio s fo d es su l o ie tatio se uelle da s le do ai e de l e ploi ..................... 5
I.
A.
A a t l adoptio de la Di e ti e
B.
Depuis l adoptio de la Di e ti e
/
................................................................................... 5
/
................................................................................ 11
1.
Du côté du Conseil de l Eu ope ............................................................................................. 11
2.
Du ôt de l U io eu op e
e ............................................................................................ 21
Conclusion ......................................................................................................................................... 33
II.
Couples de même sexe et liberté de circulation ........................................................................... 35
A.
Les e t a es à l a
B.
La Directive 2004/38 et les couples de même sexe .................................................................. 41
C.
s au
a iage ............................................................................................. 36
1.
L o igi e du p o l
e : le Règlement 1612/68. ................................................................... 41
2.
Une occasion manquée : la Directive 2004/38. .................................................................... 43
3.
Une tâche incombant désormais à chaque État membre. .................................................... 50
Reconnaissance des statuts civils .............................................................................................. 51
Conclusion ......................................................................................................................................... 55
Bibliographie.......................................................................................................................................... 57
2|Page
Introduction
La premier arrêt rendu par la Cour de justice en matière de droits des homosexuels
l a t da s l affai e Lisa Jacqueline Grant contre South West Trains, le 17 février 1998. Les
questions soumises à titre préjudiciel à la Cour furent soulevées dans le cadre d'un litige
opposant Mme. Grant à son employeur, South-West Trains Ltd, au sujet du régime
p u iai e a t pa e de ie , se a t l a a tage de la g atuit des t a spo ts au
o joi t a i de ses e plo s ai si u au oha ita t de se e oppos
ais efusant le
fi e d u tel a a tage au oha ita t de
e se e. Dans les faits pourtant, rien ne
semble différencier les situations dans lesquelles se trouvent deux concubins de sexe opposé
et deu o u i s de
e se e, si e est leu o ie tatio se uelle. Voici donc ce qui
constituera l o jet de la présente étude : les dis i i atio s di ig es à l e o t e des
homosexuels, non pas pris isolément, mais bien o sid s au sei d u ouple.
Alors que la cause homosexuelle en Europe débuta initialement par les
revendications de personnes homosexuelles en faveur de la reconnaissance de
l ho ose ualit o
e a a t isti ue hu ai e dig e de p ote tio 1 – revendications qui
furent portées devant la Cou eu op e e des d oits de l ho
e2 – cette lutte semble
aujou d hui s t e te due à u e de a de de reconnaissance juridique des couples de
e se e su la ase d u t aite e t galitai e a e les ouples de se e oppos se
trouvant dans une situation comparable. Ces nouvelles revendications sont adressées autant
à la Cou eu op e e des d oits de l ho
e u à la Cou de justi e de l U io eu op e e.
Ai si, e so t les aleu s d galit et le p i ipe de o -discrimination qui sont
i o u s au soutie de l ou e tu e du a iage au ouples de même sexe – do t l a t
Shalk and Kopf constitue la manifestation la plus récente – et qui sous-tendent la prétention
des ouples ho ose uels à l o t oi des
es a a tages p ofessio els ue les ouples
hétérosexuels – do t l a t Grant précité illustre les prémisses. L a al se de ette « nouvelle
vague » de revendications à travers la jurisprudence des organes de Strasbourg et des
juridictions communautaires permettra de faire apparaitre en filigrane la consistance
actuelle du statut du couple de
e se e au sei de l U io eu op e e, dont tous les
États membres sont également parties à la Convention européenne de sauvegarde des
d oits de l ho
e et des li e t s fo da e tales.
Le présent travail sera divisé en deux parties principales. Dans un premier temps,
nous et a e o s l olutio du statut des ouples de
e se e da s le do ai e de
l e ploi au t a e s de la ju isp ude e de la Cou de justi e, a a t et ap s l adoptio de la
Directive 2000/78. Les arguments que la Cour de justice tirait de la jurisprudence des
organes de Strasbourg pou justifie sa p e i e s ie d a t e la ati e rendront
gale e t oppo tu e l a al se de l olutio de la p ote tio o se tie au ouples de
1
Voy. P. JOHNSON, Homosexuality and the Court of Human Rights, Routledge, Abingdon, 2013, pp. 41 – 61.
Voy. E. B‘IBO“IA et A. WEYEMBE‘GH, « Le t a sse ualis e et l ho ose ualit da s la ju isp ude e des
organes de contrôle de la Convention européenne des droits de l'homme et des juridictions communautaires »,
Revue de d oit de l’ULB, 1999, pp. 135 – 149.
2
3|Page
même sexe sous les dispositions de la Convention. L tude des d isio s e dues pa les
deux systèmes européens de protection des droits fondamentaux permettra également de
mettre en lumière les spécificités et influences réciproques de ces deux systèmes.
La seconde partie de ce travail sera consacrée à une problématique latente au sein de
l U io eu op e e, sulta t de la disparité de degré de reconnaissance juridique octroyée
aux couples de même sexe selon les États membres. En effet, la division toujours plus nette
de l U io e deux « blocs » – l u se la t a a e da s u e te da e p og essiste et de
plus e plus fa o a le au u io s ho ose uelles, et l aut e, plus o se ateu et
défavorables à donner un statut juridique à de telles unions – entraine un différentiel de
reconnaissance juridique des couples de même sexe entre États membres. Cette situation
peut potentiellement générer des effets négatifs sur la liberté de circulation des personnes
homosexuelles, do t je e p opose d tudie t ois a ifestatio s o
tes.
4|Page
I.
Les discriminations fondées sur l’orientation sexuelle dans le
domaine de l’emploi
A. Avant l’adoption de la Directive 2000/78
Revenons-en à l affai e Grant. A a t l adoptio de la Directive
/ , lo d e
ju idi ue o
u autai e
tait d pou u d i st u e t p op e o da a t les
dis i i atio s fo d es su l o ie tatio se uelle e ta t ue telles ; la seule façon pour une
p ati ue telle ue elle d ite da s l affai e Grant de tomber sous l e pi e du d oit
o
u autai e tait do pa le p is e de l i te di tio des dis i i atio s fo d es su le
se e e
ati e de
u atio telle ue o sa e pa l a ie a ti le
du T ait CE
(désormais article 157 TFUE). Tel tait do l e jeu du litige : déterminer si la portée de
l a ti le
pou ait t e te due pou ou i les dis i i atio s fo d es su l o ie tatio
sexuelle.
Au regard des avancées de la jurisprudence en matière de discrimination fondée sur
le sexe, il y avait tout lieu de penser que la Cour passerait le pas. En effet, la saga Defrenne
avait pe is à la Cou d affi e l effet di e t, auta t e ti al u ho izo tal 3, de l a ti le
,
ainsi que de classer le principe de non discrimination en raison du sexe parmi les droits
fondamentaux de la personne do t la Cou est te ue d assu e le espe t4. Plus récemment,
l arrêt P. contre S. et Cornwall County Council du 30 avril 19965 a ait t l o asio pou la
Cour de mettre ces principes en pratique. Étant amenée à se prononcer sur le licenciement
d u t a sse uel e aiso de so ha ge e t de se e à l au e des dispositions de la
Directive 76/207/CEE6, la Cou s appu a su sa ju isp ude e a t ieu e afi de fai e u e
i te p tatio e te si e de l i te di tio de dis i i atio fondée sur le sexe contenue dans
cette Directive. Elle conclut ainsi que la Directive, en tant que simple expression du principe
d galit , et au u du d oit fo da e tal de e pas t e dis i i e aiso de so se e,
a ait gale e t o atio à s appli uer aux discriminations qui trouvent leur origine dans la
conversion sexuelle, lesquelles constituent bien des discriminations fondées sur le sexe au
sens de la Directive7.
Cette interprétation évolutive du principe de non-discrimination en raison du sexe
a d ailleu s pas
happ à l A o at G
al El e da s l affai e Grant. Dans ses
o lusio s, il fait e a ue ue, e jugea t de la so te da s l affai e P. contre S., la Cour a
3
C.J.C.E., 8 avril 1976, Defrenne II, C-43/75, Rec., 1976, I, p. 455, §§ 23 et 39.
C.J.C.E., 15 juin 1978, Defrenne III, C-149/77, Rec., 1978, I, p. 1365, §§ 26 et 27.
5
C.J.C.E., 30 avril 1996, P. / S., C-13/94, Rec., 1996, I, p. 2143.
6
Di e ti e /
/CEE du Co seil, du f ie
, elati e à la ise e œu e du p i ipe de l' galit de
traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion
professionnelles, et les conditions de travail, J.O.U.E., n° L 39 du 14 février 1976, p. 40.
7
C.J.C.E., P. / S., op. cit., §§ 18 à 21.
4
5|Page
« interprété le principe communautaire d'égalité de traitement d'une manière qui rend le principe
apte à régler les cas de discrimination fondés sur le sexe qui se posent dans les conditions de la société
8
actuelle ».
Il p o ise do l e te sio de e aiso e e t à l affai e e ause et o lut u un
tel avantage, réservé par un employeur au cohabitant de sexe opposé de ses employés mais
dénié au cohabitant de même sexe, « implique une discrimination fondée sur le sexe,
relevant de l'article 119 du traité9 ».
La Cour ne suivra toutefois pas ce raisonnement. La prise de distance la plus
considérable par rapport à l a t u elle a ait e du deu a s plus tôt da s l affai e P.
contre S. se matérialise dans son premier argument :
« [d]ès lors que la condition fixée par le règlement de l'entreprise s'applique de la même manière aux
travailleurs de sexe féminin qu'à ceux de sexe masculin, elle ne saurait être considérée comme constituant une
10
discrimination directement fondée sur le sexe ».
En effet, en suivant une telle logique, il aurait pu être dit des discriminations fondées
sur le ha ge e t de se e u elles ne constituaient pas des discriminations fondées sur le
se e puis u u ho
e ou u e fe
e t a sse uel le au ait su i le
e t aite e t11.
La Cour déclare ensuite que les relations stables entre deux personnes du même sexe
ne peuvent être assimilées aux relations entre personnes mariées ou aux relations stables
hors mariage entre personnes de sexe opposé12. Pour parvenir à cette conclusion, elle se
fo de su l tat du d oit o
u autai e13 et des États membres14, mais surtout sur la
ju isp ude e de la Cou eu op e e des d oits de l homme. Les juridictions de Strasbourg
o t en effet jamais admis que les relations homosexuelles puissent relever du droit au
respect de la vie familiale, p ot g pa l a ti le de la CEDH, ni qu u t aite e t fa o a le
réservé aux couples mariés et aux cohabitants de sexe opposé par rapport à des cohabitants
de
e se e e o stituait u e dis i i atio o t ai e à l a ti le
CEDH 15 ; de même, la
Cou eu op e e des d oits de l ho
e interprète l a ti le
CEDH e e se s u il e ise
que le mariage traditionnel entre deux personnes de sexe biologique différent, et non le
mariage entre personne de même sexe16.
Enfin, afin de justifier l appa e te i oh e e de so aiso e e t a e la solutio
d gag e da s l a t P. contre S., la Cour prend soin d e li ite la po t e :
8
Co lusio s de l A o at g
al, septe
e
, Grant, Rec., I-623, § 15.
Ibid., § 26.
10
C.J.C.E., 17 février 1998, Grant, C-249/96, Rec., 1998, I, p. 621, § 28.
11
U e pa tie de la do t i e a ait d ailleu s f li it la Cou de e pas s t e fo d e su u e telle o pa aiso
« symétrique » da s l affai e P. contre S. ; voy. notamment R. WINTEMUTE, « Recognising New Kinds of Direct
Sex Discrimination: Transsexualism, Sexual Orientation and Dress Codes », Modern Law Review, Vol. 60, No. 3,
1997, p. 351.
12
C.J.C.E., Grant, op. cit., § 35.
13
Ibid., § 31.
14
Ibid., § 32.
15
Ibid., § 33 et jurisprudence citée.
16
Ibid., § 34 et jurisprudence citée.
9
6|Page
« [u]n tel raisonnement, qui conduit à considérer que ces discriminations doivent être interdites au
même titre que les discriminations fondées sur l'appartenance d'une personne à un sexe déterminé, auxquelles
elles sont très étroitement liées, est limité au cas de la conversion sexuelle d'un travailleur et ne s'applique
17
donc pas aux différences de traitement fondées sur l'orientation sexuelle d'une personne ».
Le raisonnement dégagé dans l arrêt Grant sembla par la suite voué à devenir la
o e puis ue la Cou le o fi a da s l affai e D et Su de o t e Co seil de l’U io
européenne18. Dans cette affaire, un fonctionnaire du Conseil, de nationalité suédoise,
introduisit un recours e a ulatio o t e u e d isio lui efusa t le
fi e d u e
allo atio de fo e au otif ue le pa te a iat e egist
u il a ait o t a t e “u de a e
un partenaire de même sexe ne pouvait être assimilé à un mariage au sens du Statut de la
fonction publique.
Le Tribunal de première instance rejeta le recours et la Cour saisie sur pourvoi, sans
surprise, confirma cette décision. Les arguments mobilisés étaient en tous points identiques
à ceux développés dans l a t Grant : l a ti le
de la CEDH ne vise que « le mariage
traditionnel entre personnes de sexe biologique différent » et ie e pe et, e l tat
a tuel du d oit o
u autai e, d assi ile les elatio s sta les e t e pe so es de
e
19
sexe aux relations entre personnes mariées ; les relations homosexuelles durables ne
el e t pas du d oit au espe t de la ie fa iliale p ot g pa l a ti le CEDH20 ; et, enfin,
dès lors que les dispositions statutaires en cause « s appli ue t de la même manière aux
fonctionnaires de sexe féminin et à ceux de sexe masculin, elles ne sauraient être
considérées comme génératrices d'une discrimination directement fondée sur le sexe21 » au
se s de l a ti le
du t ait .
Voi i do
l tat de la ju isp ude e de la Cou de justi e e matière de
dis i i atio s fo d es su l o ie tatio se uelle da s le do ai e de l e ploi a a t
l adoptio de la Di e ti e
/ . Cette prise de position de la Cour a été grandement
22
critiquée en doctrine et ie
u elle soit e effet t s iti ua le à certains égards, il
convient néanmoins de lui reconnaitre une certaine « logique de système ». Il est indéniable
u u e e te sio de la ju isp ude e P. contre S. aux discriminations fondées sur
l o ie tatio se uelle au ait t p f a le pou la p ote tion des droits individuels de Mme.
Grant et de M. D. ainsi que leur partenaire respectif ; je pense néanmoins que cette
extension aurait fini par montrer ses limites, inhérentes à la construction intellectuelle qui
vise à assimiler de façon artificielle dis i i atio s e aiso de l o ie tatio se uelle et
discriminations fondées sur le sexe.
17
Ibid., § 42.
C.J.C.E., 31 mai 2001, D et Suède c. Conseil, aff. jointes C-122/99 P et 125/99 P, Rec., 2001, I, p. 4319.
19
T.P.I., 28 janvier 1999, D c. Conseil, T-264/97, http://curia.europa.eu/juris/, § 28.
20
Ibid., § 39.
21
Ibid., § 43.
22
Vo ., ota
e t, E. B‘IBO“IA et A. WEYEMBE‘GH, « Le t a sse ualis e et l ho ose ualit da s la
jurisprudence des organes de contrôle de la Convention européenne des droits de l'homme et des juridictions
communautaires », op. cit., pp. 152 et 153.
18
7|Page
Parmi les critiques les plus débattues, on retrouve celle du « mauvais choix du
comparateur 23 ». Cette critique – qui revient de façon récurrente lo s u il s agit de
e ualifie u e dis i i atio fo d e su l o ie tatio se uelle e dis i i atio fo d e su
le sexe24 – consiste à soutenir que, dans le test de comparabilité des situations, le juge
o
et u e e eu lo s u il o pa e u ouple ho ose uel à u aut e ouple homosexuel
mais de sexes opposés. Selon les tenants de cette critique, le juge aurait dû changer, pour
op e sa o pa aiso , u i ue e t le se e de l e plo
do de Mme. Grant et de M. D.)
et non le sexe de leur partenaire. De la sorte, il aurait abouti à la o lusio u u ouple
h t ose uel au ait eu d oit à l a a tage o test la g atuit des t a spo ts pou la
compagne de Mme. G a t ou l allo atio de fo e pour M. D.) et aurait été obligé de
o state l e iste e d u e dis i i atio e aiso du sexe de Mme. Grant et de M. D.
Ce aiso e e t, ie u a a t le mérite de faire tomber les discriminations en
aiso de l o ie tatio se uelle sous le oup de l i te di tio des dis i i atio s fo d es su
le sexe, est cependant fallacieux à plusieurs égards.
Premièrement, parce que les tenants de cette critique invoquent généralement la
essit de o se e toutes les do
es d u e situatio i ha g es, sauf pou e ui est
du it e p ot g e l o u e e le se e , afi d op e le test de comparabilité. Ainsi,
toujou s selo eu , seul le se e de l e plo de ait t e ha g et o elui de so
partenaire, sans quoi la situation ne serait pas comparable25. Mais ceci revient à nier que
l o ie tatio se uelle d u i di idu o stitue justement une donnée dont il doit être tenu
o pte afi d op e le test de o pa a ilit . Ainsi, si un homme homosexuel avait été
traité de façon différente que Mme. Grant, il aurait pu être conclu que Mme. Grant subissait
une discrimination en raison de son sexe (on pourrait imaginer une pratique dans une
e t ep ise, ou au sei de l a
e, ui ise ait à li e ie tous les ho
es ho ose uels tout
en tolérant les femmes lesbiennes, ou inversement) ; le fait u u ouple hétérosexuel
au ait pas essuyé pareil efus est pas de atu e à d o t e l e iste e d u e
discrimination fondée sur le sexe de Mme. Grant, mais bien une discrimination fondée sur
so o ie tatio se uelle, la uelle e to ait à l po ue pas da s le ha p d appli atio du
droit communautaire.
Deuxièmement, un tel raisonnement peut être démonté a contrario et pa l a su de.
Imaginons une femme X mariée à qui une allocation de foyer serait refusée, non plus parce
u elle est ho ose uelle ais ie pa e u elle est u e fe
e. Le juge, pou app ie
l e iste e d u e dis i i atio fo d e su le se e, ha ge a ide
e t le se e de so
23
Voy., notamment, Ibid., p. 151.
Pou u e tude o pl te du hoi du o pa ateu e
ati e de dis i i atio fo d e su l o ie tatio
sexuelle dans deux affaires anglaises, voy. R. WINTEMUTE, « Sex discrimination in MacDonald and Pearce : Why
the Law Lords Chose the Wrong Comparators » in KINGS COLLEGE LAW JOURNAL, 2003, Vol. 14, No. 2, pp. 267
– 281.
25
Ainsi, R. Wintemute écrit que « [y]et for a valid sex discrimination analysis, the comparison must change only
the sex of the complaining individual, and must hold all other circumstances constant. Otherwise a change in
some other circumstance (such as the complaining individual's qualifications, their choice of job or the sex of
their partner) could hide the sex discrimination » (R. WINTEMUTE, « Recognising New Kinds of Direct Sex
Dis i i atio … », op. cit., p. 347).
24
8|Page
mari e
e te ps ue le sie lo s u il op e a le test de o pa a ilit . “a s ela, il
pourrait être soutenu (non sans une certaine mauvaise foi) que Mme. X, si elle était un
ho
e, au ait pu se a ie a e u aut e ho
e et au ait do pas eu d oit à ette
allocation de foyer.
Le problème provient en réalité du fait que ce raisonnement tente de réduire les
dis i i atio s e aiso de l o ie tatio se uelle à e u elles e so t pas, à sa oi une
« simple » discrimination fondée sur le sexe. Ceci était appa u à l A o at g
al El e lors
de la da tio de ses o lusio s da s l affai e Grant. Il tenta de le contourner de la façon
suivante :
« [l]e fait que le point 8 des Ticket Regulations ne mentionne pas un sexe déterminé en tant que
critère de la discrimination, mais pose un critère plus abstrait (« sexe opposé »), est selon nous indifférent,
étant donné que le point décisif, ainsi qu'il a été constaté dans l'affaire P. contre S., est de savoir si la
discrimination est opérée, exclusivement ou essentiellement, sur la base du sexe, et qu'il ne saurait à l'opposé
26
être décisif que la discrimination soit opérée, en droit ou en fait, sur la base d'un sexe déterminé ».
Ai si les dis i i atio s fo d es su l o ie tatio se uelle
a e t du e
o jo tio de it es, à sa oi le se e de l i di idu, ais gale e t le se e des pe so es
par qui il se sent naturellement attiré. Or, réduire une discrimination « intersectionnelle27 » à
un seul de ses critères de discrimination peut aboutir à des résultats indésirables.
D a o d pa e ue t aite es dis i i atio s o
e des dis i i atio s fo d es su
le sexe ne représenterait pas la « réalité sociologique » du vécu des personnes concernées.
En effet, celles- i so t dis i i es e ta t u ho ose uels et o pas pou leu
appa te a e à l u ou l aut e se e. Bie ue l i pa t sulta t d u e i ad uatio e t e u
phénomène social et une solution juridique ne doit pas être sous-estimé, nous pourrions
nous en accommoder si cette solution était apte à répondre de façon satisfaisante à
l e se le des p o l es d u
e ge e su e a t da s le ha p so ial. Or force est de
constater que ce n au ait pas t le as en toutes circonstances.
Le d tou pa l i te di tio des dis i i atio s fo d es sur le sexe était une solution
satisfaisante pour les discriminations trouvant leur réel fondement dans la conversion
se uelle d un individu. En effet,
« lorsqu'une personne est licenciée au motif qu'elle a l'intention de subir ou qu'elle a subi une
conversion sexuelle, elle fait l'objet d'un traitement défavorable par rapport aux personnes du sexe auquel elle
28
était réputée appartenir avant cette opération ».
Par cette « tournure magique », la Cou aura donc aucune difficulté à condamner,
su la ase de l i te di tio des discriminations fondées sur le sexe, toutes les
dis i i atio s ui t ou e t elle e t leu fo de e t da s le t a sse ualis e d u e
personne.
26
Co lusio s de l A o at g
al, Grant, op. cit., § 25.
Pour une illustration du concept de « discrimination intersectionnelle » au travers de la jurisprudence
anglaise, voy. S. HANNETT, « Equality at the Intersection : The Legislative and Judicial Failure to Tackle Multiple
Discrimination » in Oxford Journal of Legal Studies, Vol. 23, No. 1, 2003, pp. 65 – 86.
28
C.J.C.E., P. / S., op. cit., § 21.
27
9|Page
On ne peut, à mon sens, pas en dire autant des discriminations en raison de
l o ie tatio se uelle. En effet, celles- i e pou aie t t e app he d es pa l i te di tio
des discriminations fondées sur le sexe que par le biais du critère du « sexe opposé », tel que
p opos pa l A ocat général Elmer. Ai si, le passage pa l i te di tio des dis i i atio s
fo d es su le se e au ait t plei e e t effi a e ue pou les ho ose uels o sid s
au sei d’u ouple, dans les cas où ceux- i se se aie t us oi s ie t ait s u u ouple
hétérosexuel se trouvant dans une situation analogue. Mais u e au ait-il été des
discriminations, non plus à l e o t e d u couple homosexuel – tel le efus d u e allo atio
de foyer ou le refus de la gratuité des transports pour le cohabitant de même sexe – mais
bien subies par une personne homosexuelle prise individuellement – tel un licenciement ou
u efus d embauche à la connaissance de son homosexualité ? La Cour aurait été privée du
critère du « sexe opposé » et, à moins de faire prendre à sa jurisprudence une tournure
alambiquée (discrimination en raison du sexe de son éventuel partenaire ?), aurait
difficilement pu étendre son raisonnement à ces situations.
Le fait est u u e dis i i atio fondée sur une conjonction de critères – à savoir le
se e d u e pe so e ais gale e t le sexe des personnes par qui elle se sent attirée –
peut difficilement être réduite à u seul d e t e eu . Les discriminations en raison de
l o ie tatio se uelle so t, en quelques sortes, irréductibles aux discriminations fondées sur
le sexe. La seule faço d app he de plei e e t es dis i i atio s passe pa la
atio
du
ou eau it e p ot g qui les combine : l’o ie tatio sexuelle. Le geste de
« délestage » de la Cou e e s le l gislateu eu op e s e t ou e d s lo s d auta t plus
justifié :
« [i]l y a lieu, cependant, d'observer que le traité d'Amsterdam modifiant le traité sur l'Union
européenne, les traités instituant les Communautés européennes et certains actes connexes, signé le 2 octobre
1997, a prévu d'ajouter au traité CE un article 6 A qui, après l'entrée en vigueur dudit traité, permettra au
Conseil de prendre, dans certaines conditions (vote à l'unanimité sur proposition de la Commission et après
consultation du Parlement européen), les mesures nécessaires à l'élimination de différentes formes de
29
discriminations, et notamment de celles fondées sur l'orientation sexuelle ».
De même, dans D contre Conseil, le T i u al s en remettra au Conseil pour
« apporter au statut, en sa qualité de législateur, les modifications permettant d'admettre à l'avenir
les fonctionnaires se trouvant dans la situation du requérant au bénéfice de l'allocation de foyer du chef de leur
30
partenaire ».
Bie u il soit eg etta le ue M e. G a t et M. D. aie t pu trouvé devant la Cour
de justi e u e de à la dis i i atio do t ils faisaie t l o jet, je pe se ue est l o d e
ju idi ue de l Union tout entier qui a fini par en sortir renforcé. Il est en effet, à mon sens,
beaucoup plus protecteur pour les personnes homosexuelles de pouvoir invoquer la stricte
29
30
C.J.C.E., Grant, op. cit., § 48.
T.P.I., D c. Conseil, T-264/97, op. cit., § 32.
10 | P a g e
appli atio d u e o
juge31.
e plutôt ue de de oi s e
e ett e à l i e ti it
l
e te du
B. Depuis l’adoption de la Directive 2000/78
Quel est l tat a tuel de la p ote tio des ouples de
e se e e
d e ploi et uelles o t t les a a es sig ifi ati es afi d pa e i ?
ati e
1. Du côté du Conseil de l’Europe
Nous a o s eu l o asio de poi te , da s la section précédente, la façon dont la
Cou de justi e se et a hait de i e l i te p tatio
ue les o ga es de “t as ou g
donnaient des article 8, 12 et 14 de la Convention afi de e pas te d e l i te di tio des
discriminations fondées sur le sexe aux discriminations en raison de l o ie tatio se uelle en
ati e d e ploi32. Or cette interprétation a connu des développements substantiels ces
dernières années33, de telle a i e u il se ait aujou d hui ie a du d t ou e le oi d e
a gu e t sus epti le d appu e u aiso e e t tel que celui développé par la Cour de
justi e da s l affai e Grant.
a) Articles 8 et 12 CEDH
Co e a t l a ti le CEDH, les organes de Strasbourg ont longuement refusé de
reconnaitre aux couples de même sexe, même de longue durée, le droit au respect de leur
vie familiale tel que protégé pa l a ti le
de la Co e tio . Ai si, du te ps où la
Commission jouait encore un rôle de filtrage des requêtes, celle-ci déclarait
s st ati ue e t i e e a le toute e u te ui te tait d i o ue le
fi e de ette
protection pour un couple de même sexe :
« [e]n dépit de l'évolution contemporaine des mentalités vis-à-vis de l'homosexualité, la Commission
estime que les relations des requérants ne relèvent pas du droit au respect de la vie familiale protégé par
34
l'article 8 ».
Les ouples de
e se e
taie t do ad is à i o ue ue le d oit au espe t de
35
leur vie privée lo s u il s agissait de la p ote tio o sa e pa l a ti le CEDH mais ne
31
A la suite de l a t P contre S., certains commentateurs avaient cependant placé de grands espoirs sur les
possi ilit s u off aie t u e i te p tatio la ge de la dis i i atio fo d e su le se e, e pa ti ulie pou
app he de les dis i i atio s fo d es su l o ie tatio se uelle. Mais l a t Grant a déçu ces espoirs (voy.
notamment C. BARNARD, « Kyte Flying or a New Constitutional Approach? », in A. DA“HWOOD et “. O LEA‘Y
(éds), The Principle of Equal Treatment in EC Law, Sweet & Maxwell, Londres, 1997, pp. 72 et s.).
32
C.J.C.E., Grant, op. cit., §§ 33 et 34.
33
A ce sujet, voy. J. M. SCHERPE, « The Legal Recognition of Same-Sex Couples in Europe and the Role of the
European Court of Human Rights », The Equal Rights Review, vol. 10, n° 1, 2013, pp. 83 et s.
34
Commiss. Eur. D.H., déc. du 3 mai 1983, X. et Y. c. Royaume-Uni, n° 9369/81, D.R. 32, p. 220. Voy. également
Commiss. Eur. D.H., déc. du 14 mai 1986, S. c. Royaume-Uni, n° 11716/85, D.R. 47, p. 274 et Commiss. Eur. D.H.,
Kerkhoven et Hinke c. Pays-Bas, déc. du 19 mai 1992, n° 15666/89.
35
Le d oit au espe t de la ie p i e a ait d jà pe is d e g a ge des a a es o -négligeables en matière
de droit des homosexuels, considérés de façon individuelle. Ainsi, la Cour avait déjà jugé contraire au respect
de la vie privée la pénalisation des relations homosexuelles (voy. Cour eur. D.H., arrêt du 22 octobre 1981,
Dudgeon c. Royaume-Uni, n° 7525/76 ; voy. également Cour eur. D.H., arrêt du 26 octobre 1988, Norris c.
11 | P a g e
constituaient pas une « famille » au sens de ce même article. Même la i o sta e u u
couple de lesbiennes vivait avec un enfant conçu par insémination artificielle ne convainquit
pas la Co
issio de l e iste e d une vie familiale digne de protection36.
A la suite de l e t e e
igueu du P oto ole ° , e
e tu duquel la Cour
eu op e e des d oits de l ho
e est de e ue l u i ue o ga e de o t ôle de la CEDH, la
Cour confirma la isio de la Co
issio ua t à l article 8 de la Convention.
Ai si, da s l affai e Mata Estevez, un homosexuel contesta le refus des autorités
espag oles de lui e se u e pe sio de su ie ap s la o t de so o joi t au otif u ils
taie t pas a i s. Il soute ait u il faisait l o jet d u e dis i i ation dans son droit au
respect de sa vie familiale et de sa vie privée puisque des personnes, également non mariées
ais de se e oppos , s taie t ues o t o e u e pe sio de su i a t à la o t de leu
o joi t a e ui elles i aie t a itale e t ais ui taie t da s l i possi ilit de se
a ie e aiso de l i te di tio du di o ce avant 1981. La Cour, dans la stricte lignée des
décisions de la Commission, se contenta de rappeler que
« d ap s la ju isp ude e o sta te des o ga es de la Co e tio , des elatio s ho ose uelles
durables entre deux hommes ne relèvent pas du droit au espe t de la ie fa iliale p ot g pa l a ti le de la
Convention … . La Cou esti e ue alg l olutio o stat e da s plusieu s Etats eu op e s te da t à la
e o aissa e l gale et ju idi ue des u io s de fait sta les e t e ho ose uels, il s agit là d u do ai e da s
le uel les Etats o t a ta ts, e l a se e d u d ominateur commun amplemant partagé, jouissent encore
d u e g a de a ge d app iatio …). En conséquence, la liaison du requérant avec son partenaire,
aujou d hui d d , e el e pas de l a ti le da s la esu e où ette dispositio p ot ge le d oit au respect
37
de la vie familiale ».
En ce qui concerne l a ti le
CEDH, la Cou eu op e e des d oits de l ho
e
avait, de la même façon que pour le droit au respect de la vie familiale, toujours refusé de
e o ait e u il avait vocation à protéger de la même façon le droit de se marier pour les
couples de sexe opposé ainsi que les couples de même sexe. La Cou a ait d auta t plus de
aiso s de se e le
fi e de l a ti le
CEDH au ouples h t ose uels ue sa
formulation faisait – et fait toujours – explicitement référence aux couples de sexe différent :
« A partir de l'âge nubile, l'homme et la femme ont le droit de se marier et de fonder une famille selon
les lois nationales régissant l'exercice de ce droit ».
Ai si, est e
fi e de l a ti le
ati e de t a sse ualisme que la Cour refusa pour la première fois le
au ouples de
e se e biologique. Da s l affai e Rees, un
Irlande, n° 8225/78 et Cour eur. D.H., arrêt du 22 avril 1993, Modinos c. Chypre, °
/ . C est gale e t
pou la p ote tio de leu ie p i e ue la Cou o da e a l i te di tio l gale et g
ale faite aux
homosexuels de servir dans les forces armées (Cour eur. D.H., arrêt du 27 septembre 1999, Smith et Grady c.
Royaume-Uni, n°s 33985/96 et 33986/96 . Mais lo s u il s agit d assu e la p ote tio des ho ose uels e ta t
ue ouple, le d oit au espe t de la ie p i e s a e sou e t i suffisa t et l i possi ilit de e e di ue le
espe t de leu ie fa iliale s e t ou e d s lo s p o l ati ue. Ai si, l e pulsio d u pa te ai e ho ose uel
du pa s où il i ait a e so o joi t et u e fa t o çu pa i s i atio a tifi ielle a pas été jugée
constituer une violation de leur vie privée (Commiss. Eur. D.H., déc. du 3 mai 1983, X. et Y. c. Royaume-Uni, n°
9369/81, D.R. 32, p. 220).
36
Commiss. Eur. D.H., déc. du 3 mai 1983, X. et Y. c. Royaume-Uni, n° 9369/81, D.R. 32, p. 220.
37
Cour eur. D.H., déc. du 10 mai 2001, Mata Estevez c. Espagne, n° 56501/00.
12 | P a g e
transsexuel prétendait que le refus des autorités britanniques de modifier le sexe qui
apparaissait sur son acte de naissance constituait une entrave à son droit de se marier
puis u il tait e p h de se a ie a e des pe so es du
e se e ue elui ui figu ait
sur cet acte, mais opposé au sexe acquis suite à une conversion chirurgicale et hormonale
complète. La Cour écarta ce grief :
« [a]u eu de la Cou , e ga a tissa t le d oit de se a ie l a ti le
a t.
ise le a iage
traditionnel entre deux personnes de sexe biologique différent. Son libellé le confirme: il en ressort que le but
38
poursuivi consiste essentiellement à protéger le mariage en tant que fondement de la famille ».
Cette positio de la Cou ua t à l i te p tatio de l a ti le
esta i ha g e
39
pendant 16ans . U p e ie poi t d i fle io appa ut cependant dans la jurisprudence le
11 juillet 2002. A cette date, la Cour rendit les deux arrêts qui marquèrent son revirement en
matière de droit des transsexuels à obtenir modification du sexe figurant sur leur acte de
naissance. Ainsi, dans les arrêts Christine Goodwin contre Royaume-Uni 40 et I. contre
Royaume-Uni41, la Cou o stata e fi l e iste e d u o se sus eu op e e la ati e et
d la a le efus de odifi atio de l tat i il o t ai e à l a ti le CEDH. Mais la Cour se
prononça également su l a ti le CEDH :
« Réexaminant la situation en 2002, la Cour observe que par l'article 12 se trouve garanti le droit
fondamental, pour un homme et une femme, de se marier et de fonder une famille. Toutefois, le second aspect
n'est pas une condition du premier, et l'incapacité pour un couple de concevoir ou d'élever un enfant ne saurait
4243
en soi passer pour le priver du droit visé par la première branche de la disposition en cause
».
Bien que le « réexamen » de l a ti le par la Cour e se d pa tisse pas de l id e ue
cette disposition ne protège que le mariage entre un homme et une femme, la Cour montre
néanmoins une certaine propension à accepter une interprétation évolutive de la notion de
mariage. Ainsi, la Cour abandonne la notion de « sexe biologique différent » comme
o ditio du a iage et ad et u u ouple se t ou a t da s l i apa it de p o e puisse
bénéficier du droit de se marier. De plus, la Cour se laisse également aller à constater que
« le libellé de l'article 9 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne adoptée
récemment s'écarte – et cela ne peut être que délibéré – de celui de l'article 12 de la Convention en ce qu'il
4445
exclut la référence à l'homme et à la femme
».
Ce constat, nous le retrouverons 8 ans plus tard, mais formulé de façon bien moins
i o s ue te, da s l affai e Schalk & Kopf contre Autriche. Cet arrêt, bien que débouchant
sur une issue défavorable pour les requérants, incarne e tai e e t l a a e
38
Cour eur. D.H., arrêt du 10 octobre 1986, Rees c. Royaume-Uni, n° 9532/81, § 49.
Voy. Cour eur. D.H., arrêt du 30 juillet 1998, Cossey c. Royaume-Uni, n° 10843/84, § 43 et Cour eur. D.H., arrêt
du 27 septembre 1990, Sheffield et Horsham c. Royaume-Uni, n°s 22985/93 et 23390/94, §§ 66 à 68.
40
Cour eur. D.H., arrêt du 11 juillet 2002, Christine Goodwin c. Royaume-Uni, n° 28957/95, § 93.
41
Cour eur. D.H., arrêt du 11 juillet 2002, I. c. Royaume-Uni, n° 25680/94, § 73.
42
Cour eur. D.H., Christine Goodwin c. Royaume-Uni, op. cit., § 98.
43
Cour eur. D.H., I. c. Royaume-Uni, op. cit., § 78.
44
Cour eur. D.H., Christine Goodwin c. Royaume-Uni, op. cit., § 100 in fine.
45
Cour eur. D.H., I. c. Royaume-Uni, op. cit., § 80 in fine.
39
13 | P a g e
jurisprudentielle la plus significative en matière de droit des homosexuels de ces dernières
années.
Les deu e u a ts p te daie t ue l a se e de toute e o aissa e ju idi ue
de leu elatio iolait l a ti le
ai si ue les a ti les et
o i s de la Convention.
L Aut i he a a t entre-temps adopté un statut juridique pour les couples homosexuels sous
la fo e d u pa te a iat e egist , la Cou se et a ha de i e l a se e de o se sus
eu op e et la a ge atio ale d i te p tatio des État e
es afi de onclure que
l a ti le
o ligeait pas l Aut i he à ou i le a iage au ouples ho ose uels 46 et que la
atio d u statut ju idi ue p op e au ouples ho ose uels ui e o espo d pas e
tous points au mariage ne violait pas les articles 8 et 14 combinés47.
Le
ita le appo t de et a t est u il e e sa d u
e f o t la ju isp ude e
a t ieu e elati e à l a ti le 12 et à l a ti le 8 CEDH. Ainsi, concernant le droit de se marier,
et au d tou d u e ou elle f e e à l a ti le de la Cha te eu op e e des d oits
fo da e tau , do t la Cou appelle u elle a
e
e t t e due ju idi ue e t
48
contraignante par le Traité de Lisbonne :
« [d]ès lors, prenant en compte l'article 9 de la Charte, la Cour ne considère plus que le droit de se
marier consacré par l'article 12 de la Convention doive en toutes circonstances se limiter au mariage entre
49
deux personnes de sexe opposé ».
Qua t à l a ti le
CEDH, la Cou o
e e pa appele que la relation
u e t etie e t deu pe so es de
e se e el e ie , o fo
e t à sa
50
jurisprudence antérieure, de leur « vie privée » au sens de cette disposition . Elle constate
ensuite que, depuis son arrêt Mata Estevez, l'attitude de la société envers les couples
homosexuels a connu une évolution rapide dans de nombreux Etats membres51 :
« [e]u égard à cette évolution, la Cour considère qu'il est artificiel de continuer à considérer que, au
contraire d'un couple hétérosexuel, un couple homosexuel ne saurait connaître une « vie familiale » aux fins de
l'article 8. En conséquence, la relation qu'entretiennent les requérants, un couple homosexuel cohabitant de
fait de manière stable, relève de la notion de « vie familiale » au même titre que celle d'un couple hétérosexuel
52
se trouvant dans la même situation ».
La conception que se faisait la Cour des notions de « mariage » et de « vie familiale »
a donc évolué au fil de sa jurisprudence pour englober, dans une certaine mesure, les
relations entre partenaires de même sexe. Il e se ait do plus aujou d hui e isagea le
que la Cour de justice se retranche derrière la jurisprudence de la Cour européenne des
d oits de l ho
e pou affi e ue « des relations homosexuelles durables ne relèvent pas
46
Cour eur. D.H., arrêt du 24 juin 2010, Schalk et Kopf c. Autriche, n° 30141/04, §§ 62 et 63.
Ibid., §§ 104 à 110.
48
Ibid., § 60.
49
Ibid., § 61.
50
Ibid., § 90.
51
Ibid., § 93.
52
Ibid., § . Cette positio a d ailleu s t
affi
e da s deu a ts post ieurs, dont un rendu en Grande
Chambre (voy. Cour eur. D.H., arrêt du 22 juillet 2010, P.B. et J.S. c. Autriche, n° 18984/02, §§ 27 – 30 et Cour
eur. D.H. (GC), arrêt du 19 février 2013, X et autres c. Autriche, n° 19010/07, § 95).
47
14 | P a g e
du droit au respect de la vie familiale protégé par l'article 8 de la convention53 » ou encore
ue l a ti le
de la Co e tio e ise ue « le mariage traditionnel entre deux personnes
de sexe biologique différent54 ».
b) Article 14 CEDH
Il nous reste dès lors à passer en revue la jurisprudence de la Cour européenne des
droits de l ho
e elati e à l a ti le
CEDH afi de d te i e s il pou ait toujou s t e
affirmé par la Cour de justice que
« des dispositions nationales assurant, à des fins de protection de la famille, un traitement plus
favorable aux personnes mariées et aux personnes de sexe opposé cohabitant comme mari et femme qu'aux
personnes de même sexe ayant des relations durables ne sont pas contraires à l'article 14 de la convention qui
55
prohibe notamment les discriminations fondées sur le sexe » ;
ou e o e, u u e diff e e de t aite e t e t e u ouple h t ose uel a i et u
couple homosexuel ayant contracté un partenariat enregistré ne saurait constituer une
discrimination puisque, au vu de la grande disparité des législations au sein des États
membres,
« la situation d'un fonctionnaire ayant fait enregistrer un partenariat en Suède ne saurait être tenue
56
pour comparable, aux fins de l'application du statut, à celle d'un fonctionnaire marié ».
Concernant les avantages réservés aux personnes de sexe opposé cohabitant par
rapport aux personnes de même sexe, il est vrai que la Commission, du temps où cet organe
existait encore, admettait que ces différences de traitement puissent être justifiées par
l o je tif l giti e de p ote tio de la ie fa iliale, le bénéfi e de la uelle
tait e o u
u au ouples h t ose uels. Ces différences de traitement ne passaient dès lors jamais le
stade de la recevabilité.
Ainsi, la Commission refusa de considérer comme discriminatoire et contraire à
l a ti le la possi ilit pou le pa te ai e oha ita t de ep e d e p io itai e e t le ail de
son partenaire défunt de sexe opposé alors que cet avantage légal était refusé aux
partenaires de même sexe57. Le même raisonnement fut par la suite étendu à des situations
dans lesquelles u e esu e d e pulsio , faisant suite à un refus de prolongation de permis
de séjour, tait p ise à l e o t e de l u des pa te ai es d u
ouple ho ose uel
entretenant une relation stable alo s ue les gles d i
ig atio p o aie t l o t oi d u
permis de séjour pour les couples hétérosexuels se trouvant dans une situation identique58.
Ap s l e t e e igueu du P oto ole ° , la Cou o
e ça dans un premier
temps par reprendre à son compte le raisonnement de la Commission. Ai si, da s l affai e
53
C.J.C.E., Grant, op. cit., § 33.
Ibid., § 34.
55
Ibid., § 33.
56
C.J.C.E., D et Suède c. Conseil, op. cit., § 51.
57
Commiss. Eur. D.H., déc. du 14 mai 1986, S. c. Royaume-Uni, n° 11716/85, D.R. 47, p. 274.
58
Commiss. Eur. D.H., déc. du 9 octobre 1989, C et L.M. c. Royaume-Uni, n° 14753/89, non publiée ; Commiss.
Eur. D.H., déc. du 10 février 1990, B. c. Royaume-Uni, n° 16106/90, D.R. 64, p. 284.
54
15 | P a g e
Mata Estevez précitée, la Cour reconnut que la relation du requérant avec son défunt
partenaire relevait ie de sa ie p i e au se s de l a ti le CEDH ais elle refusa de
constater, da s le efus d u e pe sio de su ie, l e iste e d u e i g e e dis i i atoi e
en violation des articles 8 et 14 combinés. En effet, la Cour déclara que, si ingérence il y
avait, celle-ci était justifiée par le but légitime poursuivi, à savoir la protection de la vie
familiale « traditionnelle » et que la différence de traitement constatée pouvait être
o sid e o
e ele a t de la a ge d app iatio de l Etat59.
“i ette ju isp ude e o ut u
e i e e t, est pa l effet o i
des
conclusions tirées de deux arrêts centraux rendus en 1999.
Dans l affai e Salgueiro Da Silva Mouta contre Portugal premièrement, la Cour dut se
p o o e su l aspe t dis i i atoi e de l o t oi de l auto it pa e tale e lusi e su u
enfant à sa mère en raison de l ho ose ualit du p e. La Cou se saisit de ette o asio
afi d affi e pou la p e i e fois de faço e pli ite ue l o ie tatio se uelle o stituait
ie u
it e p ot g pa l i te di tio des dis i i atio o te ue da s l a ti le
de la
Convention :
« [l]a Cou e peut d s lo s ue o lu e u il a eu u e diff e e de t aite e t e t e le e u a t
et la
e de M., ui eposait su l o ie tatio se uelle du e u a t, otio ui est ou e te, à e pas
60
doute , pa l a ti le de la Co e tion ».
Cette affi atio
a ait ie de fondamentalement surprenant, puisque la
fo ulatio de l a ti le
e laissa ja ais au u doute su la a a t e ou e t de la liste de
it es p ot g s u il o tie t ; et a t fut a oi s pou la Cou l o asio de révéler
ces différences de traitement – qui avaient jusque là toujours été appréhendées comme des
différences de traitement fondées sur le sexe par la Commission61 – pou e u elles étaient
ai e t, à sa oi des diff e es de t aite e t fo d es su l o ie tatio se uelle.
La
ea
e, la Cou e dit gale e t so a t da s l affai e Smith et Grady
contre Royaume-Uni. La Cou dut se pe he su la o fo it a e l a ti le , lu seul et e
o i aiso a e l a ti le
, d u e esu e de
o atio p ise à l e o t e de deux
membres des forces armées suite à la mise au jour de leur homosexualité. La Cour en profita
do pou fo ge so p op e aiso e e t à l ga d d u t pe d affai es ui e passait
normalement pas le cap de la recevabilité puisque la Commission les déclarait
systématiquement irrecevable 62 . La Cour estima que les requérants avaient subi une
ingérence particulièrement grave dans leur droit à la vie privée63 et que cette ingérence ne
pou ait t e justifi e et, pa ta t, iolait l a ti le CEDH64.
Mais, en plus de mettre un terme à cette forme de « ségrégation » au sein des forces
armées – du oi s lo s u elle est ise e œu e pa des
thodes aussi « agressives » que
59
Cour eur. D.H., Mata Estevez c. Espagne, op. cit.
Cour eur. D.H., arrêt du 21 décembre 1999, Salgueiro Da Silva Mouta c. Portugal, n° 33290/96, § 28.
61
Voy. Commiss. Eur. D.H., S. c. Royaume-Uni, op. cit. ; Commiss. Eur. D.H, C et L.M. c. Royaume-Uni, op. cit. ;
Commiss. Eur. D.H., B. c. Royaume-Uni, op. cit.
62
Voy. Commiss. Eur. D.H., déc. du 12 octobre 1983, B. c. Royaume-Uni, n° 9237/81, D.R. 34, p. 73.
63
Cour eur. D.H., Smith et Grady c. Royaume-Uni, op. cit., §§ 90 – 93.
64
Ibid., §§ 94 – 112.
60
16 | P a g e
celles en cause – cet arrêt comporte une autre avancée majeure puisque la Cour y déclare
pou la p e i e fois, s agissa t spécifiquement des i g e es do t l u i ue oti atio est
l o ie tatio se uelle des i t ess s :
« [c]onsidérant qu'un aspect des plus intimes de la vie privée était en jeu, des raisons particulièrement
65
graves devaient justifier l'ingérence ».
Pa ette fo ule, la Cou l e l o ie tatio se uelle au rang de « critère suspect66 »
d i g e e et de dis i i atio , en présence duquel les États voient leur marge
d app iatio fortement réduite et pour la justification duquel le test de proportionnalité
s e t ou e o s ue
e t renforcé. De la so te, le it e de l o ie tatio se uelle ejoi t
67
ceux du sexe et de la nationalité68 sur la liste des « critères suspects »69.
C est, à o se s, les a a es e g a g es da s les a ts Salgueiro et Smith &
Grady qui rendront possible le revirement de jurisprudence opéré par la Cour dans son arrêt
Karner de 2003. Dans cette affaire, la Cour se trouva à nouveau confrontée à une législation
pe etta t la ep ise d u ail d i
eu le au « compagnon de vie » du cohabitant défunt,
cette notion étant interprétée par les juridictions autrichiennes o
e e s appli ua t
u au pa te ai es de se e oppos et pas au pa te ai es de
e se e. La Cour commença
pa e o ait e l e iste e d u e diff e e de t aite e t da s la jouissa e du d oit au
espe t du do i ile ga a ti pa l a ti le
CEDH, fo d e précisément su l o ie tatio
70
sexuelle de partenaire survivant . Au stade de l e a e de la justification de cette
différence de traitement, la Cour réaffirma la nécessité pour les différences de traitement
fo d es su l o ie tatio se uelle d t e justifi es pa des aiso s pa ti uli e e t g a es71.
La Cou s appu a su ette
essit de p o de à u o t ôle de p opo tio alit e fo
65
Ibid., § 90.
Sur la notion de « critère suspect de discrimination », voy. J. GERARDS, « The Discrimination Grounds of
Article 14 of the European Convention on Human Rights », Human Rights Law Review, vol. 13, n° 1, 2013, p. 99.
67
Ai si, la Cou a ait d jà affi
, da s l affai e A dulaziz, Cabales et Blkandali c. Royaume-Uni, que « les États
contractants jouissent d'une certaine "marge d'appréciation" pour déterminer si et dans quelle mesure des
différences entre des situations à d'autres égards analogues justifient des traitements dissemblables, mais son
étendue varie selon les circonstances, les domaines et le contexte. Or quant au problème en jeu, on peut
relever que la progression vers l'égalité des sexes constitue aujourd'hui un objectif important des États
membres du Conseil de l'Europe. Partant, seules des raisons très fortes pourraient amener à estimer
compatible avec la Convention une distinction fondée sur le sexe » (Cour eur. D.H., arrêt du 28 mai 1985,
Abdulaziz, Cabales et Blkandali c. Royaume-Uni, n°s 9214/80, 9473/81 et 9474/81, § 78).
68
En matière de atio alit , la Cou a ait d jà eu l o asio d affi e ue « les Etats contractants jouissent
d u e e tai e a ge d app iatio pou d te i e si et da s uelle esu e des diff e es e t e des
situatio s à d aut es ga ds a alogues justifie t des distinctions de traitement. Toutefois, seules des
considérations très fortes peuvent amener la Cour à estimer compatible avec la Convention une différence de
traitement exclusivement fondée sur la nationalité » (Cour eur. D.H., arrêt du 16 septembre 1996, Gaygusuz c.
Autriche, n° 17371/90, § 42).
69
Le caractère « suspect » du it e de l o ie tatio se uelle est aujou d hui solide e t ta li da s la
jurisprudence de la Cour. Voy., notamment, Cour eur. D.H. (GC), arrêt du 22 janvier 2008, E.B. c. France, n°
43546/02, § 91 ; Cour eur. D.H., arrêt du 2 mars 2010, Kozak c. Pologne, n° 13102/02, § 92 ; Cour eur. D.H.,
arrêt du 9 janvier 2003, L. et V. c. Autriche, n°s 39392/98 et 39829/98, § 45 ; Cour eur. D.H., arrêt du 9 janvier
2003, S.L. c. Autriche, n° 45330/99, § 37.
70
Cour eur. D.H., arrêt du 24 juillet 2003, Karner c. Autriche, n° 40016/98, § 33.
71
Ibid., § 37.
66
17 | P a g e
afi de p e d e ses dista es a e la d isio
Estevez72 :
e due deu a s plus tôt da s l affai e Mata
« [l]e but consistant à protéger la famille au sens traditionnel du terme est assez abstrait et une
grande variété de mesures concrètes peuvent être utilisées pour le réaliser. Lorsque la marge d'appréciation
laissée aux Etats est étroite, dans le cas par exemple d'une différence de traitement fondée sur le sexe ou
l'orientation sexuelle, non seulement le principe de proportionnalité exige que la mesure retenue soit
normalement de nature à permettre la réalisation du but recherché mais il oblige aussi à démontrer qu'il était
nécessaire, pour atteindre ce but, d'exclure certaines personnes – en l'espèce les individus vivant une relation
homosexuelle – du champ d'application de la mesure dont il s'agit – en l'espèce l'article 14 de la loi sur les
loyers. La Cour constate que le Gouvernement n'a pas présenté d'arguments qui permettraient d'aboutir à une
73
telle conclusion ».
La Cour conclut dès lors à la violation des articles 8 et 14 combinés. Cette solution fut
d ailleu s o fi
e pa la Cou da s so a t Kozak contre Pologne de 201074. Il semblerait
donc u il e puisse plus être affirmé, comme la Cour de justice le fit dans son arrêt Grant,
que des avantages reconnus aux couples hétérosexuels mais systématiquement déniés aux
couples de même sexe à des fins de protection de la vie familiale « traditionnelle », ne
constituent pas une discrimination o t ai e à l a ti le de la Co e tio .
De même, la Cour semble avoir admis que les couples homosexuels se trouvaient
dans une situation comparable à celle de couples hétérosexuels. Ai si, da s l affai e Burden
contre Royaume-Uni, la Cou t aça u e ette lig e de d a atio e t e, d u e pa t, les
ouples a i s ou a a t o lu u pa te a iat e egist et, d aut e pa t, les ouples i
mariés, ni partenaires civils :
« il e peut a oi d a alogie e t e, d u ôt , u ouple a i ou e pa te a iat i il et, de l aut e,
un couple hétérosexuel ou homosexuel dont les deux membres ont choisi de vivre ensemble sans devenir des
75
époux ou des partenaires civils ».
Afin de parvenir à une telle conclusion, la Cour dut procéder préalablement à une
comparaison des deux institutions. Ainsi, elle constata que le Civil Partnership Act avait été voté
en Angleterre afin de servir les mêmes fonctions que le mariage pour les couples homosexuels76
et que ces deux institutions partageaient les mêmes éléments essentiels, à savoir
« l e iste e d u e gage e t pu li , ui a de pai a e u e se
77
d o d e o t a tuel ».
le de d oits et d o ligatio s
E p o da t de la so te à u app o he e t e t e l i stitutio du a iage et elle
du partenariat enregistré, la Cour entendait avant tout démontrer que la situation des
personnes qui y recouraient différait grandement de la situation des requérantes – deux
sœu s a a t fait le hoi de i e e se le – qui estimaient subir une discrimination en ce
72
Ibid., § 40.
Ibid., § 41.
74
Cour eur. D.H., arrêt du 2 mars 2010, Kozak c. Pologne, n° 13102/02, en particulier les §§ 98 et 99.
75
Cour eur. D.H. (GC), arrêt du 29 avril 2008, Burden c. Royaume-Uni, n° 13378/05, § 65.
76
Ibid., § 64.
77
Ibid., § 65.
73
18 | P a g e
u elles e pou aie t p te d e au
es a a tages fis au u u ouple a i ou u
partenariat civil. Mais, ce faisant, la Cour a également mis sur un même pied d galit es
deux institutions et a admis que les personnes qui y recouraient se trouvaient dans une
situation comparable, à tout le oi s d u poi t de ue o o i ue.
La Cour e ejeta d ailleu s pas e o stat et le affi a uel ues ois plus ta d
dans une affaire similaire, cette fois de façon plus explicite :
« the Grand Chamber equated civil partnerships between homosexual couples with marriage … on
the basis that in both situations the parties had undertaken public and binding obligations towards each
78
other ».
La Cour refusa cependant de transposer cette solution au cas de l adoptio pa les
couples homosexuels en partenariat civil. Da s l affai e Gas et Dubois contre France, deux
f a çaises p te daie t t e i ti es d u e dis i i atio e e ue seuls les ouples a i s
fi iaie t de la possi ilit d adopte l e fa t d u des o joi ts a e pa tage de l auto it
parentale, sans que cette possibilité ne soit offerte aux couples homosexuels « pacsés »,
pou ui l adoptio p i e la
e iologi ue de so auto it pa e tale. La Cour prit comme
a gu e t le fait u u ouple h t ose uel o
a i e pou ait o plus
fi ie de
ette adoptio et u au u e o ligatio
i o ait à la F a e d ou i le a iage au
ouples ho ose uels afi de d ie l e iste e de toute dis imination, directe ou
indirecte79. Il o ie t toutefois de e a ue ue et a t au a d so ais plus u u e
po t e li it e e F a e depuis l adoptio de la loi su le a iage pou tous et la fa ult
donnée aux couples homose uels de se a ie . L adoption par les conjoints de même sexe
el e do d so ais du gi e g
al de l adoptio et l adoptio ho opa e tale e se a
dès lors plus soumise à un régime distinct, du moins lorsque les parents adoptifs auront fait
le choix de se marier.
Dans une affaire plus récente et aux faits relativement similaires, la Cour jugea
néanmoins dis i i atoi e l i possi ilit , pour un couple de même sexe, non marié et
a a t pas o lu de pa te a iat e egist , d adopte l e fa t de l u d eu a e pa tage
de l auto ité parentale alors que cette faculté était offerte à un couple, également non
marié, mais de sexe opposé. Ainsi, e
ati e d adoptio simple, ie ue la Cou ait pas
o sid
u u ouple « pacsé » de même sexe se trouvait dans une situation comparable à
un couple marié de sexe opposé, elle jugea néanmoins que couples homosexuels et
hétérosexuels non mariés se trouvaient quant à eux dans une situation comparable :
« [l]a Cou o se e u au u e des pa ties a a e ue la loi disti gue les ouples ho ose uels des
couples hétérosexuels non mariés par un statut juridique particulier analogue à celui qui différencie les
p e ie s et les se o ds des ouples a i s. D ailleurs, le Gouvernement ne conteste pas que la situation des
couples hétérosexuels non mariés soit comparable à celle des couples homosexuels, concédant que, en termes
de personnes, les couples homosexuels et les couples hétérosexuels sont en théorie tout aussi aptes ou inaptes
les u s ue les aut es à l adoptio e g
al et à l adoptio opa e tale e pa ti ulie . La Cour constate que la
situatio des e u a ts, d si eu d ta li u lie ju idi ue e t e le p e ie et le deu i e d e t e eu , est
78
79
Cour eur. D.H., déc. du 4 novembre 2008, Courten c. Royaume-Uni, n° 4479/06.
Cour eur. D.H., arrêt. du 15 mars 2012, Gas et Dubois c. France, n° 25951/07, §§ 67 – 71.
19 | P a g e
comparable à elle d u
80
l aut e ».
ouple h t ose uel do t l u des
e
es au ait souhait adopte l e fa t de
De même, concernant le besoin de se voir reconnaitre un statut juridique protecteur,
la Cour déclara dans son arrêt Schalk et Kopf que
« la Cour se fonde sur la prémisse selon laquelle les couples homosexuels sont, tout comme les
couples hétérosexuels, capables de s'engager dans des relations stables. Les requérants se trouvent donc dans
une situation comparable à celle d'un couple hétérosexuel pour ce qui est de leur besoin de reconnaissance
81
juridique et de protection de leur relation ».
E
su , uel est aujou d hui l tat de la ju isp ude e du Co seil de l Eu ope e
matière de couples homosexuels et en quoi a-t-elle ha g depuis l arrêt Grant de la Cour de
justice ? Tout d a o d, la Cou a o sid a le e t e u la faço do t elle i te p tait les
notions de « mariage » et de « vie familiale » afin de les étendre, dans une certaine mesure,
aux relations stables entre partenaires de m e se e. Ai si, ie ue la Cou ait pas jug
u e istait u e o ligatio pou les États d ou i le a iage au ouples de
e se e,
l a ti le
p ot ge néanmoins le droit des homosexuels de se marier dans les États qui ont
procédé à une telle ouverture. De même, les relations stables entre partenaires de même
sexe sont désormais réputées constituer une « vie familiale » au même titre que les relations
sta les e t e pe so es de se e oppos . Ce i a pe is d te d e o sid a le e t la
protection confér e pa l a ti le CEDH aux couples de même sexe, qui, en plus de la
protection « individuelle » de leur domicile et de leur vie privée, se voient désormais
e o ait e le
fi e d u e p ote tio s atta ha t elle e t à leu statut de ouple.
Quant aux différences de traitements entre couples hétérosexuels et couples
homosexuels, celles-ci ne devraient plus pouvoir échapper aussi facilement à l i te di tio
des dis i i atio s o sa e pa l a ti le CEDH. En effet, la Cour semble avoir admis que
couples de même sexe et couples de sexe opposé se trouvaient, pour un nombre toujours
croissant de domaines, dans une situation comparable. E plus d a oi assoupli le test de
comparabilité, la Cour a également renforcé le test de proportionnalité auquel sont
sou ises les justifi atio s a a es pa les États. Ai si, e disti gua t l o ie tatio se uelle
du sexe et en élevant ce critère au rang de « critère protégé », la Cour a considérablement
est ei t la a ge d app iatio do t disposaie t les États afin de justifier de telles
différences de traitement. Ceci a permis de bannir le recours à la protection de la « vie
familiale traditionnelle » comme justification objective à la réservation de certains avantages
aux seuls couples hétérosexuels, au détriment des couples de même sexe. Les domaines
dans lesquels la Cour accepte encore que les États établissent des différences de traitement
entre couples homosexuels et couples hétérosexuels sur la base de leur marge nationale
d app iatio so t d ailleu s e o sta te g essio à la esu e de l a a e e t du
« consensus européen » en sens contraire ; si bien ue l a s au a iage lui-même, ainsi
que l adoption dans une certaine mesure, semblent constituer les derniers îlots de
80
81
Cour eur. D.H. (GC), arrêt. du 19 février 2013, X et autres c. Autriche, n° 19010/07, § 112 (nous soulignons).
Cour eur. D.H., Schalk et Kopf c. Autriche, op. cit., § 99 (nous soulignons).
20 | P a g e
résistance. Mais, même dans ces do ai es, do t l a age so i tal p ofo d justifie
l e iste e d u e g a de a ge d a tio laiss e au États d o ati ue e t lus, des oi
s l e t pour dénoncer la contradictions avec des valeurs fondamentales supérieures du
maintien de régimes distincts pour les couples hétérosexuels et les couples homosexuels82.
Il est donc évident que la Cour de justice ne trouverait plus dans la jurisprudence des
juridictions de Strasbourg relative aux articles 8, 12 et 14 de la Convention une justification
aux conclusions tirées dans les arrêts Grant et D et Suède contre Conseil. Mais d aut es
aiso s s oppose aie t gale e t à e ue la Cou de justi e e de de os jou s u a t du
même crû, des raisons qui trouvent leur origine dans son propre système juridique et non
plus da s elui du Co seil de l Eu ope.
2. Du côté de l’Union européenne
a) Évolutions législatives
Nous a o s eu l o asio de oi ue la Cour tout comme le Tribunal renvoyèrent
tous deux la balle au législateur compétent afin de remédier aux situations qui donnèrent
lieu aux affaires Grant et D contre Conseil.
Brièvement, concernant le “tatut des fo tio ai es de l U io eu op e e83 ; avant
e ue le T i u al e e de sa d isio da s l affai e D contre Conseil, le Conseil adopta
un Règlement84 odifia t le “tatut des fo tio ai es afi d i s e u a ti le 1er bis
aujou d hui de e u l a ti le e quinquies) garantissant aux fonctionnaires l'égalité de
traitement sans référence, notamment, à leur orientation sexuelle. Mais e est u e
200485 ue le Co seil odifia e fi l a ti le p e ie de l a e e VII du “tatut afi d i s e
u pa ag aphe . te da t le d oit à l allo atio de fo e au ouples homosexuels pouvant
produire des documents offi iels d u État e
e attestant de leur engagement dans un
« partenariat enregistré non matrimonial ». Bien que cette insertion ne fasse nulle part
explicitement référence aux couples homosexuels, la façon dont elle est rédigée ne laisse
toutefois aucun doute sur ses véritables destinataires. Ainsi, l e lusio de so ha p
d appli atio des pa te ai es a a t u e tai lie de pa e t 86 ainsi que ceux ayant accès
au mariage civil87 permet de conclure que les personnes concernées sont les couples
82
Ai si, pou u e iti ue, e t e su l i t t sup ieu de l e fa t, de la positio adopt e pa la Cou EDH
da s l affai e Gas et Dubois, o . l opi io disside te du juge Villige ; de même, pour une argumentation
ju idi ue e fa eu de l ou e tu e du mariage aux couples de même sexe, voy. E. BRIBOSIA, I. RORIVE et L. VAN
DEN EYNDE, « Same-Sex Marriage: Building an Argument before the European Court of Human Rights in Light
of the U.S. Experience », Burkley Journal of International Law, à paraître.
83
Règlement n° 31 (C.E.E) 11 (C.E.E.A.) fixant le statut des fonctionnaires et le régime applicable aux autres
agents de la Communauté économique européenne et de la Communauté européenne de l'énergie atomique,
J.O. n° P 45 du 14 juin 1962, p. 1385.
84
Règlement (CE, CECA, Euratom) n° 781/98 du Conseil du 7 avril 1998 modifiant le statut des fonctionnaires
des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres agents de ces Communautés en
matière d'égalité de traitement, J.O. n° L 113 du 15 avril 1998, p. 4.
85
Règlement (CE, Euratom) n° 723/2004 du Conseil du 22 mars 2004 modifiant le statut des fonctionnaires des
Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres agents de ces Communautés, J.O. n° L
124 du 27 avril 2004, p. 1.
86
er
Art. 1 , § , , iii, de l a e e VII du “tatut.
87
er
Art. 1 , § , , i , de l a e e VII du “tatut.
21 | P a g e
ho ose uels do t l État d o igi e a pas ou e t le a iage aux couples de même sexe et
ui o t pas eu d aut e hoi pou offi ialise leu u io
ue de s e gage da s u
partenariat enregistré.
Il est intéressant de constater que le Tribunal de la fonction publique a tenu à
« apporter aux règles statutaires éte da t le d oit à l allo atio de fo e au fo tio ai es
enregistrés comme partenaires stables non matrimoniaux, y compris de même sexe, une
interprétation de nature à garantir aux règles susmentionnées une meilleure effectivité, de
sorte que le droit e uestio e este pas th o i ue ou illusoi e ais s a e o et et
effectif88 ». Ai si, o e a t la o ditio elati e à l i possi ilit pou les pa te ai es
e egist s d a oi a s au a iage i il da s leu État e
e d o igi e, le T i u al a jugé
ue ette o ditio
tait e plie lo s u u
elgo- a o ai
a ait pas p ofit de la
l gislatio elge fa o a le au a iage ho ose uel et a ait o lu a e so pa te ai e de
e se e u u e oha itatio l gale de peu de fai e l o jet de pou suites pénales au
Ma o , do t la loi p ale i i i e toujou s l ho ose ualit 89.
Qua t à l adoptio de la di e ti e
/ , celle-ci fut rendue possible par le Traité
d A ste da
ui i s a l a ti le
TFUE (ancien article 13 CE) dans le droit primaire
européen :
« 1. Sans préjudice des autres dispositions des traités et dans les limites des compétences que ceux-ci
confèrent à l'Union, le Conseil, statuant à l'unanimité conformément à une procédure législative spéciale, et
après approbation du Parlement européen, peut prendre les mesures nécessaires en vue de combattre toute
discrimination fondée sur le sexe, la race ou l'origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l'âge
ou l'orientation sexuelle ».
Si cette disposition fut insérée dans le trait , est a a t tout pou dote l U io
eu op e e d u
o e d a tio o t e les discriminations raciales dont la montée de la
xénophobie en Europe faisait redouter une recrudescence90. Co t ai e e t à l a ti le
TFUE – do t le ha p d appli atio fut d ailleu s te du pa le
e T ait d A ste da au
do ai e de l e ploi e g
al – l a ti le
TFUE e fo ule au u e i te di tio
directement applicable des discriminations fondées sur les critères énumérés mais consiste
uniquement en une base de o p te e ou elle pou le l gislateu eu op e . C est do la
Directive 2000/4391, qui établit une interdiction des discriminations fondées sur la race et
su l o igi e eth i ue, ui fut la p e i e à t e adopt e su ette ou elle ase ju idi ue.
Peu de temps après, ce fut au tour de la Directive 2000/7892 d t e adopt e su la
ase de l a ti le TFUE. Cette Directive, dite Directive « Emploi », a u ha p d appli atio
à la fois plus étendu et plus restreint que la Directive « Race ». Plus étendu car elle couvre
88
T.F.P., 14 octobre 2010, W c. Commission, F-86/09, non publié, § 43.
Ibid., §§ 53 – 55.
90
e
P. CRAIG et G. DE BURCA, EU Law : Text, Cases and Materials, 5 éd., Oxford University Press, Oxford, 2011,
pp. 867 et 868.
91
Di e ti e
/ /CE du Co seil du
jui
elati e à la ise e œu e du p i ipe de l' galit de
traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique, J.O. n° L 180 du 19 juillet 2000, p.
22.
92
Directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de
l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, J.O. n° L 303 du 12 décembre 2000, p. 16.
89
22 | P a g e
cinq critères de discrimination : e plus de l o ie tatio se uelle, so t gale e t ou e ts la
eligio ou les o i tio s, l ha di ap et l âge a ti le er). Plus est ei t a elle e s appli ue
u au dis i i atio s su le a h du travail : les o ditio s d a s à l e ploi, l a s à la
fo atio p ofessio elle, les o ditio s de t a ail et l affiliatio ou l e gage e t da s des
o ga isatio s d e plo eu s ou de t a ailleu s (article 3). Sont toutefois exclus de son champ
d appli atio les versements effectués dans le cadre de régimes publics tels que les régimes
de sécurité sociale (article 3, §3). Cette exclusion est reprise au considérant n° 13. En son
considérant n° 22, la Directive p ise gale e t u elle est sa s p judi e des lois
nationales relatives à l'état civil et des prestations qui en dépendent. La Di e ti e s appli ue
à toutes personnes, tant du secteur public que du secteur privé (article 3, § 1er) et prohibe
autant les discriminations directes que les discriminations indirectes (article 2). Cette
dernière distinction est fondamentale puisque le régime des justifications admissibles varie
selon que la discrimination est directe ou indirecte : alors que les premières ne pourront être
justifiées que sur la base des exceptions expressément prévues par la Directive, les secondes
peuvent être « objectivement justifiées par un objectif légitime » (article 2, §2, b, i). Il y a
également lieu de relever que la Directive laisse la possibilité aux États de prendre toutes
mesures nécessaires, dans une société démocratique, « à la sécurité publique, à la défense
de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé et à la
protection des droits et libertés d'autrui » (article 2, §5). Ces circonstances constituent dès
lors autant de justifications supplémentaires, tant en ce qui concerne les discriminations
directes que les discriminations indirectes93.
b) Évolutions jurisprudentielles
La Directive « Emploi » a t à l o igi e d u o
e d jà assez o s ue t d a ts
de la Cou de justi e, p i ipale e t e
ati e de dis i i atio s fo d es su l âge. Les
autres critères de discrimination ont cependant donné lieu à une masse moins importante
de jurisprudence. E
e ui o e e le
it e de l o ie tatio se uelle plus
particulièrement, la Directive a toutefois permis à la Cour de se prononcer sur la question
des différences de traitement fondées sur le « statut marital ». Ces différences de traitement
prennent pla e lo s ue, au sei d u État ui a pas ou e t le a iage au ouples de
e
sexe, un avantage professionnel est réservé au personnel marié. Cette circonstance génère
en effet automatiquement une différence de traitement entre le personnel hétérosexuel,
qui lui seul à la possibilité de se marier, et le personnel homosexuel qui, bien que pouvant se
trouver dans une relation stable o pa a le à elle d u couple marié et officialisée dans un
pa te a iat e egist , a epe da t pas ette fa ult et e peut do p te d e à l o t oi
de l a a tage afférent.
93
Ce i fut d ailleu s e pli ite e t appel pa la Cou da s l a t u elle a
e
e t e du da s l affai e
Hay : « [p]ar ailleurs, dans la mesure où la discrimination opérée est directe, elle peut être justifiée non pas par
u «o je tif l giti e», au se s de l’a ti le 2, paragraphe 2, sous b), de celle-ci, cette disposition ne concernant
ue les dis i i atio s i di e tes, ais seule e t pa l’u des otifs vis s à l’a ti le 2, pa ag aphe 5, de ladite
di e tive, à savoi la s u it pu li ue, la d fe se de l’o d e et la prévention des infractions pénales, la
p ote tio de la sa t et la p ote tio des d oits et des li e t s d’aut ui » (C.J.U.E., 12 décembre 2013, Hay, C267/12, non encore publié, § 45).
23 | P a g e
Cette p o l ati ue tait d jà appa e te, ie ue de faço i di e te, da s l affai e
Grant. E effet, l a a tage de la g atuit des t a spo ts tait se
au o joi ts du
personnel marié. Le fait que le même avantage était également octroyé au concubin, mais
uniquement de sexe opposé (le « common law opposite sex spouse »), relégua cependant la
différence de traitement fondée sur le statut marital au second plan, derrière la différence
de t aite e t fo d e su le it e plus ide t de l o ie tatio se uelle. Cette même
problématique se trouvait également au œu de l affai e D contre Conseil puisqu était
o e e e l esp e u e allo atio de fo e do t l o t oi tait se
au fo tionnaires
européens mariés mais dénié à un fonctionnaire homosexuel engagé dans un partenariat
enregistré. A la suite de l adoptio de la Di e ti e, la Cou fut amenée à se pencher sur cette
problématique par le biais de trois affaires consécutives qui lui parvinrent par voie
p judi ielle, et ui fu e t l o asio d ta li e ue ous pou io s d so ais appele la
« filière Maruko – Römer – Hay ».
A a t de passe à l a al se de es a ts, il est intéressant de constater que le
Tribunal de première instance eut déjà à se prononcer, dans un tout autre contexte, sur la
uestio d u e diff e e de t aite e t fo d e su le statut a ital, et ce avant même que
la Cou e e de so a t da s l affai e Maruko. Ai si, da s l affai e Gualtieri c. Commission,
une experte italienne détachée auprès des services de la Commission contesta le taux de son
indemnité journalière de détachement, qui avait été revu à la baisse dû à la proximité du
domicile de son mari avec son lieu de travail. Mme. Gualtieri invoqua notamme t l e iste e
d u e uptu e du p i ipe d galit de t aite e t fo d e su so statut a ital pa appo t
aux concubins qui, pouvant se trouver dans une situation identique à celle de Mme Gualtieri
et son conjoint, ne se voient toutefois jamais appliquer le taux réduit. Le Tribunal se
retrancha derrière le caractère non comparable du mariage et du concubinage afin de
fute l e iste e de toute discrimination :
« C est à juste tit e ue la Co
issio a o sid
ue la e u a te, au o e t de la de a de de
d ta he e t, a ait pas fait l o jet d u e dis i i atio pa appo t à u END li atai e, da s la esu e où
le statut juridique matrimonial de la requérante, elui de fe
e a i e, tait disti t de elui d u e pe so e
célibataire. Il sulte e effet d u e ju isp ude e o sta te ue le a iage est e p i ipe pas o pa a le
au o u i age ou à d aut es situatio s de fait, a l u e des a a t isti ues esse tielles du a iage est u il
94 95
e des o ligatio s ju idi ues sp ifi ues, diff e tes de elles de i po te uel aut e statut » .
Cette affaire prendra une tournure intéressante lorsque Mme. Gualtieri se pourvut
devant la Cour de justice. En effet, lorsque la Cour fut saisie de ce pourvoi, elle venait de
rendre son arrêt en Grande Chambre da s l affai e Maruko quelques mois plus tôt.
94
T.P.I., 10 septembre 2008, Gualtieri c. Commission, T-284/06, Rec., 2008, II, p. 170 , § 31 (nous soulignons).
Co e a t u e pe sio d o pheli p ue pa le “tatut et ui tait gale e t sou ise à la o ditio ue le
père et la mère furent mariés, le Tribunal avait cependant jugé dès 2003 que le critère du statut marital
constituait une discrimination envers les concubins qui se trouvaient dans une situation comparable à celle
d u ouple a i à la o t de l u des o joi ts, puis ue, da s les deu as, le pa te ai e su i a t pe dait
une personne légalement tenue de o t i ue à l e t etie de l e fa t T.P.I., a t du
ja ie
, C/
Commission, T-307/00, disponible sur http://curia.europa.eu/, §§ 48 –
. Il appa aît do pas lai e e t e
quoi des concubins se trouveraient, en ce qui concerne leurs dépenses de logement, dans une situation
telle e t diff e te de elle d u ouple a i .
95
24 | P a g e
Lo s u elle e dit so a t p es ue deu a s plus ta d, la Cour prendra cependant soin de
ne pas mentionner les conclusio s ti es à l o asio de l a t Maruko alors que ces deux
affaires partagent indéniablement la problématique commune de la différence de
traitement fondée sur le statut marital. Ainsi, elle se contenta de confirmer les conclusions
du Tribunal sur le caractère non comparable entre le mariage et le concubinage96. Le malaise
est toutefois palpable lorsque la Cour déclare, dans un obiter dictum pour le moins
expéditif :
« [i]l importe en outre de relever que, ni devant le Tribunal ni devant la Cour, la re u a te a
spécifiquement allégué un traitement différencié des personnes mariées par rapport aux personnes cohabitant
97
da s le ad e d u pa te a iat e egist
».
Il semblerait donc que la g a de e eu de M e. Gualtie i fut de i o ue , à tit e
de co pa aiso , ue la situatio de o u i s ais de a oi pas pe s à elle de
partenaires enregistrés qui, eux non plus, ne se seraient pas vu appliquer le taux réduit
d i de it jou ali e. Ceci aurait en effet obligé la Cour à se poser la question de la
transposition des préceptes d gag s da s l affai e Maruko à la présente affaire et aurait
peut-être abouti sur une issue toute différente pour Mme. Gualtieri.
Passo s d so ais à l a al se de l affai e Maruko à proprement parler. La Cour fut
saisie pa le t i u al ad i ist atif de Mu i h d u e uestio p judi ielle po ta t su
l i te p tatio de la Di e ti e
/ . Elle tait appel e à se p o o e su la o fo it
avec cet instrument de d oit eu op e d u e o e tio olle ti e p ise da s le se teu des
th ât es alle a ds p o a t le e se e t d u e pe sio de su ie au o joi t su i a t du
personnel artistique. M. Maruko, dont le partenaire de même sexe venait de décéder,
demanda à bénéficier de cette allocation, ce qui lui fut refusé par le Fonds de pension des
théâtres allemands (VddB au otif ue ses statuts e p o aie t l o t oi d u tel
fi e
u au o joi t marié survivant et non au partenaire de vie survivant.
Premièrement, la Cour se posa la question de savoir si une telle prestation rentrait
da s le ha p d appli atio de la Di e ti e
/ . Ainsi fallait-il déterminer si cette
prestation de survie constituait bien une rémunération et non un versement de sécurité
sociale. Pou e fai e, la Cou t a sposa toute sa ju isp ude e elati e à l a ti le 57 TFUE
(ancien article 141 CE)98 dans le cadre de la Directive 2000/78. Ainsi, la circonstance que la
pe sio soit pa e au o joi t su i a t de l e plo et o à l e ployé lui-même est sans
i po ta e du o e t u elle est pa e e aiso de la elatio de t a ail ui u it
l e plo , ce qui nécessite de satisfaire aux trois conditions dégagées par la Cour dans
l a t Beune99 :
96
C.J.U.E., 15 avril 2010, Gualtieri c. Commission, C-485/08 P, Rec., 2010, I, p. 3009, §§ 70 – 76.
Ibid., § 77.
98
A ce sujet, voy. notamment P. CRAIG et G. DE BURCA, EU Law : Text, Cases and Materials, op. cit., pp. 860 –
867.
99
C.J.C.E., 28 septembre 1994, Beune, C-7/93, Rec., 1994, I, p. 4471, § 45. Pour une analyse complète de ce que
la Cour considère comme « rémunération » au se s de l a ti le
TFUE, o . P. C‘AIG et G. DE BU‘CA, EU
Law : Text, Cases and Materials, op. cit., pp. 860 – 867.
97
25 | P a g e
« si la pension n'intéresse qu'une catégorie particulière de travailleurs, si elle est directement fonction
100
du temps de service accompli et si son montant est calculé sur la base du dernier traitement ».
Ainsi, bien que ce régime de pension soit obligatoire dans une certaine mesure, le fait
u il e o stitue u u suppl e t au
gi e atio al g
al, u il soit fi a
e lusi e e t pa les e plo eu s et les e plo s du se teu o e
et u il soit desti
uniquement au personnel artistique employé dans un des théâtres exploités en Allemagne
i di ue ie u il i t esse ue ette at go ie pa ti uli e de t a ailleu s101. De plus, le
montant de cette pension étant calculé e fo tio de la du e d affiliatio et du o ta t
total des cotisations payées, cette prestation découle bien de la relation de travail du
partenaire de vie de M. Maruko et constitue donc bien une rémunération102.
Restait à déterminer la portée du considérant n° 22 de la Directive. La Cour estima
u il e s agissait de ie de plus u u si ple appel de e ue la ati e de l tat i il
demeurait une compétence des États membres mais que ce considérant ne dispensait en
ie les États e
es, da s l e e ice de cette compétence, de respecter les dispositions
relatives au principe de non-discrimination et ne saurait en aucun cas être interprété comme
e lua t les a a tages o t o s su la ase du statut a ital du ha p d appli atio de la
Directive 2000/78103.
Pou e ui est, da s u deu i e te ps, de la iolatio de l i te di tio des
dis i i atio s fo d es su l o ie tatio se uelle telle ue o sa e pa les a ti les er et 2
de la Directive, la Cour laisse le soin à la juridiction de renvoi de déterminer si les époux
survivants et les partenaires de vie survivants se trouvaient dans une situation comparable
au regard de cette prestation de survie104. Elle note tout de même que, de la propre analyse
de la juridiction de renvoi, les rapprochements substantiels opérés par le législateur
allemand entre le régime juridique du mariage et celui du partenariat enregistré depuis
plusieurs années semblent placer ces personnes dans une situation comparable105.
Mais la Cour acheva son raisonnement par une conclusion qui dépassa les espérances
de M. Maruko lui-même :
« [à] supposer que la juridiction de renvoi décide que les époux survivants et les partenaires de vie
survivants sont dans une situation comparable pour ce qui concerne cette même prestation de survie, une
réglementation telle que celle en cause au principal doit en conséquence être considérée comme constitutive
d'une discrimination directe fondée sur l'orientation sexuelle, au sens des articles 1er et 2, paragraphe 2, sous
106
a), de la directive 2000/78 ».
Alors que M. Maruko et la Commission107, ai si ue l A o at g
al lui-même dans
108
ses conclusions , esti aie t ue l usage du seul it e du statut a ital o
e o ditio
100
C.J.U.E., 1er avril 2008, Maruko (GC), C-267/06, Rec., 2008, I, p. 1757, § 48.
Ibid., §§ 49 – 53.
102
Ibid., §§ 54 – 57.
103
Ibid., §§ 59 – 60.
104
Ibid., § 72.
105
Ibid., §§ 67 – 69.
106
Ibib., § 72 (nous soulignons).
107
Ibid., § 63.
101
26 | P a g e
à l o t oi d u e pe sio de su ie o stituait u e dis i i atio indirecte fondée sur
l o ie tatio se uelle e e s les partenaires civils homosexuels survivants, la Cour retint,
sans réellement s e e pli ue , l e iste e d u e dis i i atio directe fondée sur
l o ie tatio se uelle. Le choix de cette qualification, loin de ne susciter que des débats
d he
euti ue ju idi ue, e po te gale e t de g a des onséquences pratiques
puis u il rend les différences de traitement fondées sur le statut marital quasiment
impossibles à justifier109. En adoptant cette position, la Cour semble donc envoyer un signal
fo t au États e
es, ui s appa e te à u e
ita le o da atio
o ale des
avantages réservés aux couples mariés : le critère du statut marital, loin de ne constituer
uu
it e e appa e e eut e ais ui i dui ait u d sa a tage ollat al pou les
ho ose uels, est assi il au it e de l o ie tatio se uelle lui-même et son usage doit
être proscrit de la même façon, sa s ue les États e
es aie t la possi ilit de s e
justifier.
Cette app o he p ag ati ue de la Cou , ui et l a e t su le lie su sta tiel u u
critère de distinction peut partager avec un critère prohibé, contraste avec ses arrêts
a t ieu s, e p u ts d u e tai fo alis e et d u e e tai e ti e e à ti e t op ite des
liens directs entre un critère non mentionné dans la Directive et un critère u elle p ohi e
explicitement.
Ai si, da s l affaire K.B., une condition de statut marital empêchait un transsexuel de
d sig e so pa te ai e o
e
fi iai e d u e pe sio de su ie puis u il lui tait
impossible de se marier avec une personne du même sexe que celui figurant sur son acte de
naissance. Les faits taie t do se la les à eu de l affai e Maruko, la seule différence
résidant dans la circonstance que le critère du statut marital ne désavantageait plus une
personne homosexuelle mais bien une personne transsexuelle. Ainsi la Cour aurait-elle pu
o state ue l usage du it e du statut a ital o stituait u e dis i i atio di e te
fondée sur la conversion sexuelle, que la Cour avait elle-même assimilée à une
discrimination fondée sur le sexe dans son arrêt P. / S. 8 ans plus tôt. Au lieu de cela, la Cour
efusa de o state l e iste e d u e dis i i atio di e te o t ai e à l a ti le 141 CE
aujou d hui
TFUE 110 et préféra procéder par voie détournée : plutôt que de condamner
l usage du statut a ital o
e tel, elle préféra rappeler aux États membres leur obligation,
récemment dégagée par la Cour EDH, de permettre au t a sse uels d a de à e statut
108
Co lusio s de l A o at g
al, septe
e
, Maruko, Rec., I-1760, § 102.
A oi s d i agi e u e ploi pou le uel u e a a t isti ue li e au statut a ital o stitue ait u e
er
« exigence professionnelle essentielle et déterminante » au se s de l a t. , § , Dir. 2000/78.
110
C.J.C.E., 7 janvier 2004, K.B., C-117/01, Rec.,
, I, p.
, §§
et . Il est d ailleu s i t essa t de
o state ue la Cou e ou t à des a gu e ts u elle a ait p is le soi d ite da s l affai e P. / S. : « [e]n
l'occurrence, une telle exigence (le statut marital) ne peut pas, par elle-même, être regardée comme
discriminatoire en fonction du sexe et, partant, comme contraire à l'article 141 CE ou à la directive 75/117,
puisque le fait que le demandeur soit un homme ou une femme est indifférent au regard de l'allocation de la
pension de réversion » (§ 29).
109
27 | P a g e
marital en rendant possible la modification du sexe figurant sur leur acte de naissance 111. Ce
est ue pa e iais ue la Cou a i a à la o lusio s ue
« [u]ne législation, telle que celle en cause au principal, qui, en violation de la CEDH, empêche un
couple tel que K. B. et R. de remplir la condition de mariage nécessaire pour que l'un d'entre eux puisse
bénéficier d'un élément de la rémunération de l'autre, doit être considérée comme étant, en principe,
incompatible avec les exigences de l'article 141 CE ».
U e aiso pou e pli ue la ti e e de la Cou d assi ile u e diff e e de
traitement fondée sur le statut marital à une différence de traitement fondée directement
sur la conversion sexuelle peut possiblement être trouvée dans la circonstance que cette
diff e e de t aite e t
est elle-même condamnable que par assimilation
jurisprudentielle avec une différence de traitement fondée sur le sexe. La Cour aura peutêtre estimé que le lien entre « statut marital » et « sexe » via la conversion sexuelle était
trop distendu pour conclure ue l usage du p e ie a outisse à u e dis i i ation directe
fondée sur le second. Nous au io s do u e p eu e suppl e tai e de e u u
it e de
discrimination est mieux protégé lorsque son usage est directement prohibé dans un
instrument normatif ue lo s u il e l est ue de faço d i e pa assimilation avec un
aut e it e p ohi . Ai si, la Cou a-t-elle pas eu à invoquer la jurisprudence de la Cour
eu op e e des d oits de l ho
e pou o da e le it e du statut a ital da s l affai e
Maruko puis u elle a pu di e te e t se fo de su l i te di tio des dis i i atio s fo d es
su l o ie tatio se uelle o te ue da s la Di e ti e
/ .
De
e, da s l affai e Schnorbus, la Cour estima que la loi du Land de Hesse
p o a t u e p f e e da s l a s à la fo atio p ofessio elle pour les personnes
a a t a o pli leu se i e ilitai e o ligatoi e e o stituait u u e discrimination
indirecte, au sens de la Directive 76/207/CEE112, e e s les fe
es ui
taie t pas
113
soumises à cette obligation . Elle jugea néanmoins que cette discrimination pouvait être
justifiée par la prise en considération du retard pris dans le déroulement de leurs études par
les candidats qui ont été soumis à l'obligation de service militaire114.
Il semblerait dès lors que la propension de la Cour à assimiler des critères de
distinction non explicitement prohibés par les instruments anti-discrimination à des critères
pour lesquelles une telle prohibition est explicitement énoncée soit, à ce jour, limitée au
statut a ital lo s ue l usage de e it e d sa antage des personnes homosexuelles.
E fi , il est i t essa t d app ie le o t aste saisissant entre le raisonnement suivi
pa la Cou de justi e da s l affai e Maruko et celui adopté par la Cour européenne des
111
C.J.C.E., K.B., op. cit., § 33.
Di e ti e /
/CEE du Co seil, du f ie
, elati e à la ise e œu e du p i ipe de l' galit de
traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion
professionnelles, et les conditions de travail, J.O.C.E. n° L 39 du 14 février 1976, p. 40 ; aujou d hui efo due
dans la Directive 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet
elati e à la ise e œu e
du principe de l'égalité des chances et de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d'emploi
et de travail, J.O.C.E. n° L 204 du 26 juillet 2006, p. 23.
113
C.J.C.E., 7 décembre 2000, Schnorbus, C-79/99, Rec., 2000, I, p. 10997, §§ 35 – 39.
114
Ibid., § 44.
112
28 | P a g e
d oits de l ho
e da s l affai e Gas et Dubois115. En effet, la première jugea ue l usage du
it e du statut a ital pou fo de l o t oi d u e pe sio de su ie o stituait u e
discrimination directe e aiso de l o ie tatio se uelle ta dis ue la se o de estima que
l usage de e
e it e pou
fi ie de l adoptio si ple a e pa tage de l auto it
parentale ne constituait ni une discrimination directe, ni une discrimination indirecte. Bien
que cette comparaison puisse pousser à penser que la Cour de justice soit extrêmement
la iste da s sa olo t à o state l e iste e d u e dis i i atio fo d e su l o ie tatio
se uelle alo s ue la Cou eu op e e des d oits de l ho
e se le elu te à e fai e de
même, il y a toutefois lieu de constater que les faits de ces deux affaires étaient
extrêmement différents (matière des pensions de survie d u e pa t, ati e de l adoptio
d aut e pa t). Ai si, o
e ous a o s eu l o asio de l e pose plus tôt, e
ati e
d a a tages do t la atu e est plus pat i oniale et pou les uels la a ge d app iatio
laissée aux États est moindre, la Cour EDH semble également avoir imposé l galit e t e
conjoints mariés et partenaires civils.
L affai e Römer fut l o asio pou la Cou de justi e de o fi e ais gale e t de
précise les o lusio s d gag es à l o asio de l affai e Maruko. Les faits sont semblables
à eu a a t do
lieu à l a t Maruko : M. ‘ö e , lo s u il t a aillait o
e e plo
ad i ist atif atta h à la ille de Ha ou g, a ait de a d à
fi ie d u
ajuste e t
du calcul de sa pensio
o pl e tai e lo s u il s tait engagé dans un partenariat
enregistré avec son partenaire de même sexe. Ce réajustement lui fut cependant refusé au
otif u il tait se
au conjoints mariés.
Après avoir jugé que cette pension complémentaire rentrait bien dans le champ
d appli atio de la Di e ti e
/ 116, la Cou passa à l e a e de l e iste e d u e
dis i i atio fo d e su l o ie tation sexuelle. A ce stade, la Cour reprit le raisonnement
d elopp da s l a t Maruko et le précisa quelque peu. Elle précisa ainsi que les situations
dans lesquelles se trouvaient les couples mariés et les partenaires civils, bien que devant
être comparables, e de aie t pas pou auta t t e identiques 117 . Il s agit d s lo s
d effe tue u e o pa aiso des situatio s
« fondée sur une analyse focalisée sur les droits et obligations des époux mariés et des partenaires de
ie e egist s, tels u ils résultent des dispositions internes applicables, qui sont pertinents compte tenu de
l o jet et des o ditio s d o t oi de la p estatio e ause au p i ipal, et o pas o siste à
ifie si le d oit
national a opéré une assimilation juridique générale et complète du partenariat de vie enregistré au
118
mariage ».
Nous retrouvons ici, comme ligne cardinale de la comparaison entre mariage et
partenariat enregistré, les « droit et obligations » qui émanent de ces deux institutions, ce
ui est pas sa s appele la
thode e plo e pa la Cou EDH da s l affai e Burden afin
115
A ce propos, voy. E. BRIBOSIA et I. RORIVE, « Chronique du d oit de l galit et de la o dis i i atio »,
Jou al eu op e des d oits de l’ho
e, n° 2, 2013, p. 334.
116
C.J.U.E., 10 mai 2011, Römer, C-147/08, Rec., 2011, I, p. 3591, §§ 29 – 36.
117
Ibid., § 42.
118
Ibid. § 43.
29 | P a g e
de hisse pou et pa te ai es i ils su u pied d galit 119. Après avoir réinsisté sur le
rapprochement juridique que le législateur allemand a opéré, au fil des années, entre
mariage et partenariat enregistré, la Cour laissa à nouveau le soin à la juridiction de renvoi
de statue su l e iste e d u e dis i i atio di e te ais, ou eaut pa appo t à l a t
Maruko, en lui balisant le travail : la Di e ti e e s oppose ait à la l gislatio e ause ue si
«–
da s l État e
e o e , le a iage est se
à des pe so es de se es diff e ts et
coexiste avec un partenariat de vie tel que celui prévu par le LPartG, qui est réservé à des personnes de même
sexe, et
–
une discrimination directe e iste e aiso de l o ie tatio se uelle du fait ue, e d oit
national, ledit partenaire de vie se trouve dans une situatio ju idi ue et fa tuelle o pa a le à elle d u e
pe so e a i e e e ui o e e ladite pe sio . L app iatio de la o pa a ilit el e de la o p te e
de la juridiction de renvoi et doit être focalisée sur les droits et obligations respectifs des époux et des
pe so es e gag es da s u pa te a iat de ie, tels u ils so t gis da s le ad e des i stitutio s
o espo da tes, ui so t pe ti e ts o pte te u de l o jet et des o ditio s d o t oi de la p estatio e
120
question ».
Ainsi la Cour confirme-t-elle u u e diff e e de t aite e t fo d e su le statut
marital constituerait bien une discrimination directe pour le cas où les époux et les
partenaires de vie se trouveraient dans une situation comparable au regard de la pension
disputée. Elle confirme également que cette discrimination directe, conformément à ce que
la Di e ti e p es it, e pou ait su i au u e justifi atio puis u elle e prit même pas la
peine de répondre à la question de la juridiction de renvoi, qui voulait savoir si « la
p ote tio du a iage, i s ite à l a ti le , pa ag aphe , de la Loi fo da e tale, pou ait
justifie u e dis i i atio di e te e aiso de l o ie tation sexuelle121 ». Voila peut-être la
o fi atio ta di e de e ue la Cou de justi e a ie p is e o pte l olutio de la
ju isp ude e du Co seil de l Eu ope elati e au a a tages se s au ouples a i s et
de ce que ceux-ci ne pourront plus être justifiés par la protection du mariage traditionnel,
conformément à la jurisprudence Karner122.
Mais les alises pos es pa la Cou da s l a t Römer soulèvent une nouvelle
question. La Cour semble en effet exiger que, pour que mariage et partenariat enregistré
puissent être comparables, ils doivent être exclusivement réservés aux couples de sexe
opposé et aux couples de même sexe, respectivement. Ceci est compréhensible pour le
premier, puisque, dans les États ayant ouvert le mariage aux couples de même sexe, ceux-ci
e pou aie t se e e di ue d u e dis i i atio s ils hoisissaie t
a oi s de
contracter un partenariat enregistré. Mais, pour le second, cette exigence parait plus
surprenante. La circonstance que le partenariat enregistré soit également accessible à
d aut es at go ies de pe so es ue des ouples ho ose uels o
e est le as de la
cohabitation légale en Belgique ou en France, avant même que le mariage homosexuel ne
soit voté) devrait-elle a outi à l « incomparabilité » des situations dans lesquelles se
119
Cour eur. D.H. (GC), Burden c. Royaume-Uni, op. cit., § 65.
C.J.U.E., Römer, C-147/08, op. cit., § 52 (nous soulignons).
121
Ibid., § 37, in fine.
122
Cour eur. D.H., Karner c. Autriche, op. cit., § 41.
120
30 | P a g e
trouvent époux et partenaires civils entretenant une relation stable? En fin de compte, les
arrêts Maruko et Römer ne sont-ils pas des juge e ts d esp e do t les o lusio s doi e t
t e li it es au as de l Alle ag e, ui a o çu le pa te a iat e egist sp ifi ue e t
pour les homosexuels et qui a aligné son régime juridique sur celui du mariage ? Quel degré
de comparabilité est réellement exigé entre le mariage et la partenariat enregistré afin de
o lu e à l e iste e de situatio s o pa a les ? La Cour ne fit le clair sur ces
i te ogatio s ue e
e t, da s l affai e Hay du 12 décembre 2013.
Mais a a t de passe à l e pos de ette affai e, il est intéressant de noter que la
Cour profita de ce que la juridiction de renvoi posa une question sur le moment à partir
du uel M. Ma uko de ait se oi e o ait e le d oit à l galit de t aite e t a ec les
p estatai es a i s pou o fi e l e iste e d u principe général de non-discrimination
e fo tio de l’o ie tatio sexuelle dont la Directive 2000/78 ne serait ue l e p essio 123.
Cette affi atio
est e ie su p e a te puis u elle s i s it dans la continuité des arrêts
124
Mangold et Kücükdeveci125 en ce qui concerne les dis i i atio s fo d es su l âge, ai si
ue l a t Defrenne III126 pour les discriminations fondées sur le sexe. Toutefois, comme
pour ces arrêts, la Cour prit le soin de préciser que, pour que ce principe s appli ue, encore
fallait-il que celui- i se situe da s le ha p d appli atio du d oit de l U io , e ui e fut le
as u à la suite de l adoptio de la Di e ti e
/ . M. Ma uko e pou ait d s lo s
p te d e à l galité de traitement avec les prestataires mariés que pour la période
post ieu e à l e pi atio du d lai de t a spositio de la Di e ti e
/ 127.
Passo s d so ais à l e a e du
e t arrêt Hay de la Cour de justice. M. Frédéric
Hay, employé au Crédit agricole, s tait « pacsé » en France avec son partenaire de même
sexe. Lo s u il de a da l o t oi des jou s de o g s sp iau et de la p i e de a iage
accordés aux travailleurs salariés qui se marient, conformément à la convention collective
nationale du Crédit agricole, le bénéfice de ces avantages lui fut refusé au motif que la
convention collective ne les a o dait u e cas de mariage et non de « PACS ». Bien que le
Cour de cassation française, par sa question préjudicielle, te ta d i pose la ualification de
discrimination indirecte et de a da si u e telle dis i i atio se t ou ait e l esp e
justifi e, la Cou de justi e p o da tout de
e à l e a e d u e discrimination directe
128
fo d e su l o ie tatio se uelle .
Après avoir une nouvelle fois o lu u u tel a a tage e t ait da s le ha p
d appli atio de la Di e ti e
/ 129, la Cour procéda elle-même au test de comparabilité.
« Il ressort de la décision de renvoi et du dossier soumis à la Cour que les personnes de même sexe
peu e t o lu e u PAC“ pou o ga ise leu ie o
u e, e s e gagea t, da s le ad e de ette ie
commune, à une aide matérielle et à une assistance réciproques. Le PAC“, ui doit fai e l o jet d u e
123
C.J.U.E., Römer, C-147/08, op. cit., § 59.
C.J.C.E., 22 novembre 2005, Mangold, C-144/04, Rec., I, 2005, p. 9981, § 75.
125
C.J.U.E., 19 janvier 2010, Kücükdeveci, C-555/07, Rec., I, 2010, p. 365, §§ 20 et 21.
126
C.J.C.E., 15 juin 1978, Defrenne III, C-149/77, Rec., 1978, I, p. 1365, §§ 26 et 27
127
C.J.U.E., Römer, C-147/08, op. cit., §§ 60 – 62.
128
C.J.U.E., 12 décembre 2013, Hay, C-267/12, non encore publié, §§ 22 – 24.
129
Ibid., § 28.
124
31 | P a g e
d la atio o joi te et d u e egist e e t aup s du g effe du t i u al d i sta e da s le esso t du uel les
pe so es o e es fi e t leu side e o
u e, o stitue, o
e le a iage, u e fo e d u io civile
du droit français, qui place le couple dans un cadre juridique précis instituant des droits et des obligations
ip o ues et à l ga d des tie s. Si le PACS est également ouvert aux personnes de sexe différent, et
nonobstant des différences globales qui peuvent exister entre le régime du mariage et celui du PACS, ce
de ie o stituait la seule possi ilit u off ait le d oit f a çais, à la date des faits au p i ipal, au ouples de
130
même sexe pour donner un statut juridique à leur couple qui soit certain et opposable aux tiers ».
Il apparaît donc que, en matière de rémunération et de condition de travail, la
comparabilité des situatio s est t i utai e de l e iste e d u e o ligatio d’aide at ielle
de d’assista e ip o ue entre les partenaires, similaires à celle qui lie des époux. Sont par
contre dépourvus de pertinence le mode de rupture ou les obligations réciproques en
matière de droit patrimonial, de droit successoral et de droit de la filiation131.
De plus, ce qui impo te elle e t pou p o de à ette o pa aiso
est pas ue
le partenariat enregistré soit réservé exclusivement aux couples de même sexe, mais bien
u il o stitue pour ces couples la seule alternative au mariage afin de se voir reconnaître un
statut juridique. La Cou i sista fo te e t puis u elle affi a plus loi da s l a t ue
« [l]a circonstance que le PACS, à la différence du partenariat de vie enregistré en cause dans les
affai es a a t do
lieu au a ts p it s Ma uko et ‘ö e , est pas réservé aux couples homosexuels est
132
dépourvue de pertinence ».
Ces d eloppe e ts so t do t s assu a ts au u de e ue l a t Römer pouvait
laisser présager. Ceci signifie par exemple u u pa te a iat e egist du
e t pe ue
celui qui existe en Belgique sous la forme du régime de la cohabitation légale aurait placé –
e o sid a t ue la Belgi ue ait pas ou e t le a iage au ouples ho ose uels e
– les couples homosexuels dans une situation comparable aux couples mariés, sans
o sid atio de so a essi ilit pa d aut es ue les couples de même sexe unis par une
relation affective. Les différences globales qui peuvent exister entre mariage et cohabitation
légale auraient été sans incidence sur ce constat puisque ces régimes comportent tous deux
une obligation identique de contribution aux charges du ménage (articles 221 et 1477 du
Cciv.), sig e de l e iste e d u e aide at ielle et d une assistance réciproque. Il semblerait
donc que la plupart des statuts légaux rendus accessibles aux couples de même sexe parmi
les États e
es de l U io e plisse t les o ditio s
ises pa la Cou de justi e afin de
placer ces couples dans une situation comparable à celle des couples hétérosexuels mariés
au ega d d a a tages en matière de rémunération et de condition de travail.
La Cour jugea donc que les situations des couples hétérosexuels mariés et des
couples homosexuels « pacsés » étaient comparables 133 et, rappelant sa jurisprudence
antérieure, o lut à l e iste e d u e dis i i atio di e te fo d e su l o ie tatio
sexuelle, sans cette fois en laisser le soin à la juridiction de renvoi134.
130
Ibid., § 36 (nous soulignons).
Ibid., § 39.
132
Ibid., § 43.
133
Ibid., § 37.
134
Ibid., § 41.
131
32 | P a g e
Cette volonté de la Cour de procéder elle-même au test de comparabilité et de
o lu e à l e iste e d u e dis i i atio di e te peut e tai e e t s e pli ue pa la
crai te u elle e t ete ait ue la Cour de cassation e s alig e su la ju isp ude e
e te
du Conseil constitutionnel français, qui venait de juger que couples pacsés et couples mariés
e se t ou aie t pas da s u e situatio o pa a le e e ui o e e le e se e t d u e
pension de réversion135. Le fait que le juge de renvoi ait également tenté de forcer la main
de la Cour sur la qualification de la dis i i atio e ause est probablement pas non plus
sans lien avec cette façon de procéder.
Conclusion
Ce hapit e a t l o asio de et a e l olutio du statut des ouples
homosexuels dans la jurisprudence de deux juridictions européennes que sont la Cour
eu op e e des d oits de l ho
e et la Cou de justi e de l U io eu op e e.
Au sei de la p e i e, l olutio de la ju isp ude e e s u e plus g a de
protection des couples de même sexe sous les dispositions de la Convention a été le fruit
d u p o essus e dog e, t ou a t so fo de e t da s u e p ise e o pte p ude te et
progressive par la Cour de l olutio de la so i t et des revendications de ces couples en
fa eu d une plus grande reconnaissance juridique. La suite logique de cette évolution
semble être, à court ou moyen terme, la reconnaissance du caractère discriminatoire de
l i te di tio du a iage ho ose uel136.
Pour la seconde, l olutio de la ju isp ude e e s u e eilleu e p ote tio des
couples homosexuels contre les discriminations da s le do ai e de l e ploi a dû t e i iti e
par l adoptio d u ou el i st u e t l gislatif, ellee e due possi le pa l adjo tio
d u e nouvelle base juridique dans les traités. Cette
essit peut sa s doute s e pli ue
par le caractère « fermé » du système de protection communautaire contre les
discriminations, fondé sur une liste limitative de critères, ainsi que par le peu d a age
fonctionnel de la lutte contre les discriminations dans les compétences originelles de
l U io ,
ui
tait o igi ai e e t app he d e
ue
o
e u
outil pou
137
l a o plisse e t d u e eilleu e i t g atio
o o i ue . Mais ces débuts hésitants ont
été les p
isses d u s st e a outi de p ote tio o t e les dis i i atio s fo d es su
l o ie tatio se uelle e
ati e d e ploi, hapeaut pa la Di e ti e
/ . Cette
Di e ti e se le d ailleu s a oi délié la Cour de sa frilosité première puisque la façon dont
135
« le législateur a, dans l'exercice de la compétence que lui reconnaît l'article 34 de la Constitution, défini
trois régimes de vie de couple qui soumettent les personnes à des droits et obligations différents ; que la
différence de traitement quant au bénéfice de la pension de réversion entre les couples mariés et ceux qui
vivent en concubinage ou sont unis par un pacte civil de solidarité ne méconnaît pas le principe d'égalité »
(Conseil constitutionnel français, décision n° 2011-155 QPR du 29 juillet 2011, Journal officiel du 30 juillet 2011,
p. 13048, § 8).
136
“u e sujet, je e peu ue e o e à la
e te tude d E. B‘IBO“IA, I. ‘O‘IVE et L. VAN DEN EYNDE,
« Same-Sex Marriage: Building an Argument before the European Court of Human Rights in Light of the U.S.
Experience », op. cit.
137
e
P. CRAIG et G. DE BURCA, EU Law : Text, Cases and Materials, 5 éd., Oxford University Press, Oxford, 2011,
p. 858.
33 | P a g e
elle a adressé la problématique des discriminations fondées sur le statut marital a dépassé
les espérances.
Le do ai e de l e ploi se le do
d so ais ie p ot g
o t e les
dis i i atio s fo d es su l o ie tatio se uelles et des situatio s telles que celles qui ont
donné lieu aux affaires Grant et D contre Conseil ne paraissent plus pouvoir se reproduire
sans être sanctionnées par la Cour de justice, désormais outillée par la Directive 2000/78
pour lutter contre ces discriminations. Bie ue le ha p d appli atio de ette Di e ti e
soit li it au do ai e de l e ploi au se s st i t, de o
eu États e
es o t
olo tai e e t te du le ha p d appli atio de leu s esu es de t a spositio atio ales
pour les faire coïncider avec celui de la Directive 2000/43138.
Mais u e est-il une fois que nous nous trouvons en dehors du ha p d appli atio
de la Directive 2000/78 ? La seconde partie de ce travail sera consacrée à une autre
problématique à laquelle les couples de même sexe se trouvent confrontés : la perte de leur
statut juridique et des droits y afférents résultant du différentiel entre États membres quant
au degré de reconnaissance juridique conféré aux couples homosexuels et les incidences que
cette situation comporte du point de vue de la liberté de circulation de ces personnes.
138
“u u tat des lieu des t a spositio s da s les diff e ts États e
es à l a
e
, o . Eu opea
Union Agency for Fundamental Rights, Homophobie, t a spho ie et dis i i atio fo d e su l’o ie tatio
sexuelle et l’ide tit de ge e, 2010, disponible sur http://fra.europa.eu pp. 21 et s.
34 | P a g e
II.
Couples de même sexe et liberté de circulation
“i le do ai e de l e ploi se le d so ais ie p ot g o t e les dis i i atio s
fo d es su l orientation sexuelle, il demeure néanmoins que, en dehors du champ
d appli atio de la Di e ti e
/ , la pote tialit d assiste à de telles discriminations
da s d aut es do ai es este prégnante. Le s st e d i te di tio des dis i i atio s e
droit de l U io a t fo d « couche par couche », par adjonctions successives de critères
p ot g s. Le ha p d appli atio sp ifi ue de ha ue i st u e t a ti-discrimination est
do à l o igi e d u s st e o el , do t le i eau de p ote tio diff e selo le critère
protégé en cause. E deho s du ha p d appli atio de es i st u e ts, il e iste ie u
p i ipe g
al d galit de t aite e t, d gag pa la Cou à l o asio de l affai e Defrenne
III et réaffirmé à de nombreuses reprises dans sa jurisprudence récente139 ; de plus, la Charte
des droits fondamentaux, à laquelle le Traité de Lisbonne a donné valeur juridique
équivalente à celle des traités140, prévoit une interdiction générique des discriminations
fondées sur une liste ouverte de critères, dont l o ie tatio se uelle141. L u o
e l aut e
e peu e t epe da t t e i o u s ue da s le ha p d appli atio des t ait s. C est
pou uoi je e p opose d a al se t ois sou es pote tielles de dis i i atio s fo d es su
l o ie tatio se uelle e o ita t du ha p d appli atio de la Di e ti e
/ afin de
d o t e u elles peu e t a oi s t e i t g es da s le ha p d appli atio des
traités et sanctionnées en raison des conséquences plus ou moins directes que ces
discriminations emportent sur la liberté de circulation des personnes concernées.
L id e d app he de les dis i i atio s fo d es su l o ie tatio se uelle pa le
p is e de la li e t de i ulatio
est d ailleu s pas eu e. Da s l affai e D et Suède déjà, le
e u a t a ait te t d invoquer, devant la Cour, l e t a e à sa li e t de i ulatio ue
constituait la non-reconnaissance par la Commission du partenariat enregistré conclu en
Suède :
« D soutient, en outre, que, en privant les partenaires enregistrés en vertu des dispositions législatives
en vigueur dans certains États membres du bénéfice des droits afférents à leur statut national, une décision
telle que la décision litigieuse constitue une discrimination selon la nationalité assortie d'une entrave à
142
l'exercice de la liberté de circulation des travailleurs ».
La Cou de justi e e ipa toutefois d u
o e d i e e a ilit et appo ta do
143
aucune réponse sur le fond à ce moyen . Les a al stes so t d ailleu s de plus e plus
nombreux à considérer que le combat des couples homosexuels pour plus de
reconnaissance juridique ne passera pas uniquement par la voie du droit de la non-
139
Récemment, voy. les arrêts Mangold, Kücükdeveci et Römer, précités.
er
Art. 6, §1 , TUE.
141
Art. 21 de la Charte.
142
C.J.C.E., D et Suède c. Conseil, op. cit., § 53.
143
Ibid., §§ 54 – 57.
140
35 | P a g e
discrimination mais prendra également la forme de contestations sur la base du principe de
li e i ulatio des ito e s, ui se t ou e au œu de la o st u tio eu op e e 144.
Dans un premier temps, je compte aborder la problématique des règles de droit
international privé adoptées au sein des États membres ayant ouvert le mariage aux
personnes de même sexe qui, dans certains cas, pourraient néanmoins constituer une
e t a e au a iage d u
ouple de
e se e lo s ue l u des pa te ai es est u
esso tissa t d u État e
e auto isa t pas le a iage ho osexuel.
E suite, j e pose ai e uoi le l gislateu eu op e , e omettant délibérément toute
référence aux couples de même sexe dans les notions de « conjoint » et de « partenaires
enregistrés » lo s de l adoptio de la Di e ti e
/ , s est fait o pli e de la mise en
pla e d u e situatio da s la uelle les États e
es pou aie t li e e t d ie , à des
esso tissa ts d États tie s, la fa ult de
fi ie d u eg oupe e t fa ilial a e leu
conjoint ou partenaire enregistré, citoyen européen de même sexe.
E fi , j a o de ai la p o l ati ue li e à l i possi ilit , pou u ouple ho ose uel,
non plus de se marier ou de séjourner dans un État membre, mais bien de se voir
reconnaitre, par un État membre dans lequel ils auront usé de leur liberté de circulation, le
statut a ital u ils o t aupa a a t a uis au sei d u aut e État e
e.
A. Les entraves à l’accès au mariage
Il e se a pas i i uestio de te te de d o t e e uoi le efus d u e ajo it
d États e
es de ga a ti l a s au mariage pour les couples de même sexe constituerait
ou e o stitue ait pas u e dis i i atio fo d e su l o ie tatio se uelle 145. Il s agi a
plutôt de mettre en lumière les difficultés qui risquent de surgir au sein des États membres
qui ont passé le pas et ouvert le mariage aux couples de même sexe.
Quelle est l o igi e du p o l e ? E
ati e de a iage, il e iste à ce jour aucun
instrument européen de détermination du d oit appli a le, o
e est pas exemple le cas
da s d aut es do ai es tou ha t au droit de la famille, tels que le divorce 146 ou les
obligations alimentaires147. Les États membres demeurent donc compétents pour édicter
des règles de droit international privé applicables aux mariages contractés sur leur territoire,
ta t ue l U io
a pas us de sa o p te e da s e do ai e su la ase de l a ti le ,
§3 du TFUE. Ce i d oule
essai e e t du p i ipe d att i utio , affi
à l a ti le du
TUE, et du fait ue l a ti le TFUE o e u e « compétence partagée » au se s de l a ti le
144
e
K. LENAERTS et P. VAN NUFFEL, European Union Law, 3 éd., Sweet & Maxwell, Londres, 2011, p. 170, § 7060.
145
Sur ce sujet, voy. plutôt E. BRIBOSIA, I. RORIVE et L. VAN DEN EYNDE, « Same-Sex Marriage: Building an
Argument before the European Court of Human Rights in Light of the U.S. Experience », Burkley Journal of
International Law, à paraître.
146
Règlement 1259/2010 du Conseil du 20 décembre 2010 (dit « Règlement Rome III » etta t e œu e u e
coopération renforcée dans le domaine de la loi applicable au divorce et à la séparation de corps, JO L 343 du
29 décembre 2010 p. 10.
147
Règlement 4/2009 du Conseil du 18 décembre 2008 (dit « Règlement Bruxelles III ») relatif à la compétence,
la loi appli a le, la e o aissa e et l e utio des d isio s et la oop atio e
ati e d o ligatio s
alimentaires, JO L 7 du 10 janvier 2009, p. 1.
36 | P a g e
5 TFUE, ue les États e
es peu e t o ti ue d e e e da s la esu e où l'U io e l a
pas d jà fait, o fo
e t à e ue p es it l a ti le du TFUE.
La plupa t des s st es ju idi ues au sei s de l U io p oie t le
e ge e de
régime de droit international privé en matière de mariage. Les ressortissants étrangers sont
g
ale e t sou is, pou pou oi o t a te a iage su le te itoi e d u État e
e,
148
aux conditions de fonds u ils au aie t dû e pli da s leu État d o igi e . On voit donc se
profiler le problème : u esso tissa t t a ge do t l État d o igi e e pe et pas le
mariage homosexuel se verra empêché de contracter mariage avec une personne de même
sexe dans un État membre qui autorise pourtant le mariage homosexuel pour ses nationaux.
Ce i pou ait a outi à la
atio d u « club fermé » de ressortissants admis à contracter
un mariage homosexuel dans tous les États qui le permettent, alors que les ressortissants
d États auto isa t pas le a iage ho ose uel se aient privés de e d oit, où u ils side t.
Ainsi, lorsque la Belgique ouvrit la mariage aux couples de même sexe en 2003, les
conditions de mariage étaient soumises à la loi régissant le statut personnel des époux, à
savoir la loi du pays dont ils avaient la nationalité (ancien article 3 du Cciv.). La circulaire du 8
mai 2003 relative à la loi ouvrant le mariage aux couples homosexuels ne permettait aucun
doute à ce propos :
« [e]n présence de deux futurs époux possédant la même nationalité, la loi applicable pour déterminer
les conditions de fond du mariage est leur loi nationale commune. Si les futurs époux sont de nationalité
différente, chacun d'eux devra répondre aux conditions imposées par sa propre loi nationale.
L'ouverture du mariage aux personnes du même sexe implique que la Belgique instaure une institution
juridique qui n'existe pas encore comme telle dans les autres pays, à l'exception toutefois des Pays-Bas qui,
selon les informations du Département, sont les seuls à connaître la même institution.
Dès lors, dans l'immédiat, seuls des ressortissants des Pays-Bas et des citoyens belges pourront, en
principe, contracter un tel mariage
149
».
Mais, se rendant compte du potentiel discriminatoire de ce régime, le ministre de la
Justice prit rapidement le contrepied de la position défendue dans la circulaire antérieure
dans une nouvelle circulaire150 :
« [l]e droit belge ayant ouvert le mariage aux personnes de même sexe, il me paraît qu'une disposition
de droit étranger relative au sexe des époux, interdisant le mariage de personnes de même sexe, doit être
considérée comme discriminatoire et contraire à notre ordre public international.
Dès lors, j'estime que l'application d'une disposition de droit étranger doit être écartée si cette
disposition prohibe le mariage de personnes de même sexe, lorsque l'une d'elles a la nationalité d'un Etat ou a
151
sa résidence habituelle sur le territoire d'un Etat dont le droit autorise un tel mariage ».
148
A ce sujet, voy. P. WAUTELET, «Private international law aspects of same-sex marriages and partnerships in
Europe – Divided we stand? », à paraître.
149
Circulaire relative à la loi du 13 février 2003 ouvrant le mariage à des personnes de même sexe et modifiant
certaines dispositions du Code civil, M.B., 16 mai 2003 (nous soulignons).
150
P. WAUTELET, F. COLLIENNE et S. PFEIFF, « Actualités de droit familial international » in Droit des familles,
Bruxelles, Anthemis, 2007, p. 300.
37 | P a g e
Ce est ue pa ap s ue le l gislateu elge a ta e e i e e t de position, dans
e ui o stitue aujou d hui l a ti le du Code de d oit i te atio al p i 152. La Belgique a
do fait le o hoi afi d ite de dis i i e les ouples ho ose uels do t l u des
partenaires ne serait pas de nationalité belge. Ce choix a été suivi par la plupart des pays qui
ont autorisé le mariage homosexuel par la suite. Cependant, avec la division toujours plus
nette de l U io e deu « blocs », l u se la t a a e da s u e te da e p og essiste et
de plus e plus fa o a le au u io s ho ose uelles, et l aut e, plus o se ateu et
défavorables à donner un statut juridique à de telles unions, il se pourrait que les nouveaux
États membres ouvrant le mariage aux homosexuels, afin de ne pas exacerber les tensions
a e les États e
es efusa t d e fai e de
me, optent pour des règles de DIP
si ilai es à elles ui figu aie t à l o igi e da s la loi elge. Il se pourrait également que les
États membres réfractaires exigent la conclusion de traités bilatéraux avec les autres États
membres afin de définir des règles de DIP applicables en cas de mariages de leurs
ressortissants respectifs sur leur territoire réciproque.
U e e ple d u e telle o e tio e iste d ailleu s déjà entre deux États membres
de l U io . Ai si, la Convention franco-polonaise relative à la loi applicable, la compétence et
l’exe uatu da s le d oit des pe so es et de la fa ille153, signée à Varsovie en 1967, prévoitelle des règles de conflit de lois en matière de mariage. A la signature de cette convention en
1967, les Hautes Pa ties o t a ta tes a aie t e tai e e t pas da s l id e de p e i les
a iages ho ose uels de leu s atio au à l t a ger mais entendaient simplement mettre
e œu e u e e tai e oop ation judiciaire pa l di tio de gles de DIP o
u es e
matière de droit de la famille. Il e p he ue, e so a ti le , ette Co e tio p oit
que
« . …
2. Les conditions de fond du mariage sont celles de la loi de la Haute Partie contractante dont les
époux ont la nationalité.
. “i l u des pou à la atio alit d u e Haute Pa tie o t a ta te et le se o d elle de l aut e, les
o ditio s p ues à l ali a o isse t pou ha u à la loi de l État do t il a la atio alit ».
151
Circulaire remplaçant la circulaire du 8 mai 2003 relative à la loi du 13 février 2003 ouvrant le mariage à des
personnes de même sexe et modifiant certaines dispositions du Code civil, M.B., 27 janvier 2004 (nous
soulignons).
152
L a ti le
dispose de la so te : « [s]ous se e de l a ti le , les o ditio s de alidit du a iage sont
gies, pou ha u des pou , pa le d oit de l Etat do t il a la atio alit au o e t de la l atio du
mariage.
L appli atio d u e dispositio du d oit d sig e e tu de l ali a e est a t e si ette dispositio p ohi e
le mariage de pe so es de
e se e, lo s ue l u e d elles a la atio alit d u Etat ou a sa side e
ha ituelle su le te itoi e d u Etat do t le d oit pe et u tel a iage (nous soulignons)».
153
Convention entre la République française et la République populaire de Pologne relative à la loi applicable,
la o p te e et l e e uatu da s le d oit des pe so es et de la fa ille, sig e à Va so ie le a il
et
publiée, conformément au Décret n°69-176 du 13 février 1969, au JORF du 22 février 1969.
38 | P a g e
Bie ue le l gislateu f a çais se soit i spi de la loi elge lo s de l adoptio de la loi
sur le mariage pour tous et ait opté pour une règle de DIP similaire154, cette Convention
réinsère donc une exception pour les ressortissants polonais, ce qui aurait pour conséquence
que ces personnes se verraient refuser le droit de se marier en France avec leur partenaire
de même sexe aussi longtemps que la loi polo aise auto ise pas le a iage ho ose uel.
A o se s, de telles gles de DIP, u elles soie t di e te e t i s es da s la loi
atio ale des États e
es, ou u elles soie t o lues sous la fo e de o e tio s
bilatérales, devraient être tenues pour contraire au o ligatio s ui s i pose t au États
membres en vertu des traités européens. E effet, alo s u u esso tissa t polo ais
hétérosexuel aurait la possibilité de se marier en France avec une personne de sexe opposé,
la Convention franco-polo aise le p i e ait de e d oit s il tait ho ose uel et e isageait de
se marier avec une personne du même sexe. De même, alors que deux nationaux français de
e se e o t d so ais le d oit de se a ie e F a e, il suffi ait ue l u d eu soit de
atio alit polo aise afi
u ils soie t p i s de e d oit. De telles règles sont donc
constitutives à la fois de discriminations fondées sur la nationalité et sur l o ie tatio
sexuelle des personnes concernées. O , es dis i i atio s, ie u elles e t e t da s le
ha p d appli atio d au u i st u e t a ti-discrimination spécifique de droit européen,
esso tisse t tout de
e du ha p d appli atio des t ait s pa le iais de la liberté de
i ulatio des ito e s de l U io a ti le
TFUE , à l e e i e de la uelle elles o stitue t
une entrave.
Co sid o s do
le as d u
esso tissa t polo ais e t ete a t u e elatio
homosexuelle avec un national français. Ils auraient choisi de résider en France et, à la fin de
la
e
, ils au aie t oulu p ofite de l adoptio de la loi su la a iage pou tous afi
de se marier dans une commune française. Le Maire de leur commune aurait donc dû les
i fo e de l i possi ilit de l e leu u io e aiso de la Co e tio f a opolonaise précitée.
Procédons en nous focalisant sur la discrimination en raison de la nationalité dans un
premier temps. A cet égard, il est jurisprudence constante que tout citoyen européen est
admis à se prévaloir du principe de non-discrimination en raison de la nationalité consacré
pa l a ti le 18 TFUE dans toutes les situations relevant du domaine d'application ratione
materiae du droit communautaire155. Parmi ces situations, on trouve notamment celles
relevant de l'exercice de la liberté de circuler et de séjourner sur le territoire des États
membres, telle que conférée par l'article 21 TFUE, sous réserve des limitations et des
conditions prévues par les traités et par les dispositions prises pour leur application 156.
154
Art. 202-1 du Code civil français : « Les qualités et conditions requises pour pouvoir contracter mariage sont
régies,
pour
chacun
des
époux,
par
sa
loi
personnelle.
Toutefois, deux personnes de même sexe peuvent contracter mariage lorsque, pour au moins l'une d'elles, soit
sa loi personnelle, soit la loi de l'Etat sur le territoire duquel elle a son domicile ou sa résidence le permet ».
155
C.J.C.E., 12 mai 1998, Martinez Sala, C-85/96, Rec., 1998, I, p. 2691, § 63; C.J.C.E., 20 septembre 2001,
Grzelczyk, C-184/99, Rec., 2001, I, p. 6193, § 32.
156
C.J.C.E., 24 novembre 1998, Bickel et Franz, C-274/96, Rec., 1998, I, p. 7637, §§ 15 et 16 ; C.J.C.E., Grzelczyk,
op. cit, § 33 ; C.J.C.E., 13 avril 2010, Bressol, C- 73/08, Rec., 2010, I, p. 2735, § 31.
39 | P a g e
Le droit pour tout citoyen européen de circuler et de séjourner librement sur le
territoire des États membres trouve désormais une expression uniformisée dans la directive
2004/38157. E so a ti le , ette di e ti e affi e d ailleu s ue « tout ito e de
l U io ui s jou e su le te itoi e de l État e
e d a ueil e e tu de la p se te
directive bénéficie de l galit de t aite e t a e les esso tissa ts de et État membre dans
le do ai e d appli atio du t ait » (nous soulignons).
Or ne pourrait-il pas t e affi
u u e dis i i atio da s le d oit d a de à
l i stitutio du a iage o stitue ait u e e t a e pou les ho ose uels polo ais d use de
leu li e t de i ulatio pou s ta li e F a e ? De même, cette circonstance ne
pousserait-elle pas un couple homosexuel dans pareille situatio à s ta li da s u pa s où
ils pourront réellement consacrer leur relation amoureuse dans les liens du mariage sans
être discriminés sur la base de leur nationalité ou de leur orientation sexuelle ? Considérant
de plus la volonté répétée de la Cour de justi e de p se e l effet utile des dispositio s de
la Directive 2004/38 158 , il pourrait à mon sens être affirmé que ces discriminations
constituent des entraves à la liberté de circulation d u e at go ie de citoyens européens, à
savoir les homosexuels polonais.
Comment pourrait-il e t e aut e e t d s lo s ue la Cou a d jà jug da s l affai e
Bressol que les articles 18 et 21 TFUE, tels que concrétisés par la Directive 2004/38,
s opposaie t à u e gle e tatio atio ale fi a t u e o dition de résidence (et donc
i di e te e t u e o ditio de atio alit à l i s iptio da s les u sus
di au et
159
paramédicaux ; ette o lusio doit s i pose de la
e faço à l ga d d u e
réglementation internationale fixant indirectement une condition de nationalité (ou une
condition de « non-nationalité » e l o u e e afi d a de à l i stitutio du a iage.
U e o ditio d a s au a iage fo d e su la atio alit se le e effet o stitue u e
e t a e à la li e t de i ulatio d u e g a it au oi s ui ale te à u e o ditio d a s
à la formation professionnelle fondée sur la nationalité, la seule différence résidant dans le
type de personnes affectées : les étudiants étrangers dans un cas, les homosexuels polonais
da s l aut e.
Or, les entraves à la liberté de circulation des citoyens européens devraient être
considérées comme toutes également inadmissibles, sans que puisse être acceptée aucune
hiérarchisation parmi eux sur la base de leur « statut secondaire » d tudia t, de t a ailleur,
ou tout aut e statut, do t au u e peut p e d e l as e da t su le statut de ito e de
l U io ui a o atio à t e, des p op es œu de la Cou , le statut fo da e tal des
ressortissants des États membres160.
157
Directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au droit des
citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le
territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) n° 1612/68 et abrogeant les directives
64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et
93/96/CEE, JO L 158 du 30 avril 2004, p. 77.
158
C.J.C.E., 25 juillet 2008, Metock e.a., C-127/08, Rec., 2008, I, p. 6241, § 84 ; C.J.U.E., 7 octobre 2010, Lassal,
C-162/09, Rec., 2010, I, p. 9217, § 31.
159
C.J.C.E., Bressol, op. cit, dispositif.
160
C.J.C.E., Grzelczyk, op. cit, § 31.
40 | P a g e
L a al se de e as fi tif est gale e t i t essa te e e u elle pe et de ett e
e œu e le p i ipe de o -dis i i atio e aiso de l o ie tatio se uelle, o plus su
la base de la Directive 2000/78 – dont nous exorbitons manifestement du champ
d appli atio – mais bien sur la base du pri ipe g
al d galit de t aite e t ai si ue pa
le iais de l a ti le
de la Cha te des d oits fo da e tau . Il est ai ue l u o
e
l aut e
essite t de e t e da s le ha p d appli atio du d oit de l U io afi de pou oi
être invoqués 161 . Néanmoins, si on considère que cette discrimination en raison de
l o ie tatio se uelle o stitue ie u e e t a e à la li e t de i ulatio des pe so es
concernées, il est possible, de la même façon que pour la discrimination fondée sur la
nationalité, de la atta he au ha p d appli atio des t ait s pa le iais de l a ti le
TFUE. Il est d ailleu s pas i utile de appele ue le o sid a t ° de la di e ti e
2004/38, ui et e œu e la li e t de i ulatio des ito e s de l U io , précise d ailleu s
que
« [l]a présente directive respecte les droits et libertés fondamentaux et observe les principes qui sont
e o us ota
e t pa la Cha te des d oits fo da e tau de l U io eu op e e; e e tu du p i ipe de
l'interdiction des discriminatio s ui figu e, les États e
es de aie t ett e e œu e la p se te
directive sa s fai e, e t e les
fi iai es de ette de i e, de dis i i atio fo d e ota
e t su […]
l o ie tatio se uelle ».
B. La Directive 2004/38 et les couples de même sexe
1. L’origine du problème : le Règlement 1612/68162.
Les conceptions nationales de ce qui constitue ou ne constitue pas « la famille »
peuvent également avoir une influence sur les droits que certains instruments européens
reconnaissent aux personnes sur la base de leur « statut familial ». Ceci se fait
particulièrement ressentir dans le domaine des « droits migratoires dérivés » que les
esso tissa ts d États tie s peu e t se oi e o ait e su la ase de la elatio
u ils
entretiennent avec des citoyens européens. Ai si, l e e ple le plus a ie peut t e trouvé
dans le Règlement 1612/68 relatif à la libre circulation des travailleurs163. Cette Directive
p o ait, e so a ti le , u d oit de s jou su le te itoi e de l État e
e où était
employé un esso tissa t d u État e
e pou
« a) son conjoint et leurs descendants de moins de vingt et un ans ou à charge;
161
Pour le principe général, voy. notamment C.J.U.E., Römer, op. cit, § 60 ; concernant la Charte des droits
fondamentaux, voy. C.J.U.E., 8 novembre 2012, Iida, C-40/11, non encore publié, § 78 ; C.J.U.E., 15 novembre
2011, Dereci e.a., C-256/11, Rec., I, 2011, p. 11315, § 71. Plus récemment, voy. également C.J.U.E., 26 février
2013, Åkerberg Fransson, C-617/10, non encore publié, §§ 16 et s.
162
Règlement (CEE) n° 1612/68 du Conseil, du 15 octobre 1968, relatif à la libre circulation des travailleurs à
l'intérieur de la Communauté, J.O.C.E. n° L 257 du 19 octobre 1968, p. 2 ; aujou d hui e pla pa le
Règlement (UE) n° 492/2011 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2011 relatif à la libre circulation
des t a ailleu s à l i t ieu de l U io Te te p se ta t de l'i t t pou l'EEE, J.O.U.E. n° L 141 du 27 mai
2011, p. 1.
163
M. BELL, « We are Family ? … », op. cit., pp. 335 et s.
41 | P a g e
b) les ascendants de ce travailleur et de son conjoint qui sont à sa charge ».
Cette conception de la famille est donc extrêmement restrictive et principalement
fondée sur le « cercle marital traditionnel » à savoir un père, une mère et les enfants issus de
leu u io . Le l gislateu eu op e
a ait do
ulle e t e isag l olutio ju idi ue et
so iale ue o ait ait l Eu ope au ou s des décennies qui suivirent, qui vit apparaitre une
e e di atio toujou s plus p essa te de e o aissa e ju idi ue de la pa t d u it s
familiales constituées en dehors du cadre du mariage, dont les relations entre personnes de
même sexe. Cette revendication prit parfois la forme de contestations judiciaires de cette
absence totale de reconnaissance dans les textes législatifs européens. E t oig e l affai e
Reed dans laquelle une ressortissante britannique employée aux Pays-Bas contestait
l i possi ilit de se fai e ejoi d e pa so pa te ai e a e ui elle
tait pas a iée. Elle
te ta d i o ue l olutio so iale afi d i lu e le pa te ai e o -marié dans la notion de
« conjoint » au sens du Règlement 1612/68164. La Cour refusa cependant de découpler la
notion de « conjoint » du mariage :
« l'interprétation donnée par la Cour à une disposition de ce règlement a des conséquences dans tous
les États membres et qu'une interprétation de notions juridiques fondée sur l'évolution de la société doit se
faire par un examen de la situation dans l'ensemble de la Communauté, et non pas de celle d'un seul État
membre
…
[e]n l'absence de toute indication d'une évolution sociale d'ordre général qui justifierait une
interprétation extensive, et en l'absence de toute indication contraire dans le règlement, il faut constater que,
165
en utilisant le mot « conjoint », l'article 10 du règlement vise seulement un rapport fondé sur le mariage ».
La Cour parvint néanmoins à reconnaitre un droit de résidence au partenaire de
M e. ‘eed pa le iais de l galit de t aite e t fa e au « avantages sociaux ». La Cour
remarqua que les nationaux des Pays-Bas a aie t l oppo tu it de se fai e ejoi d e pa
leurs partenaires non-mariés et, considérant ceci comme un « avantage social » au sens de
l a ti le , § du ‘ gle e t, esti a ue ette oppo tu it de ait t e étendue à tous les
travailleurs migrants de l U io . Malg l issue heu euse de ette affai e pou M e. ‘eed,
cet arrêt forgea la jurisprudence de la Cour pour les années à venir. C est d ailleu s ette
même conception étriquée de la notion de mariage qui empêcha la Cour de reconnaitre
l e iste e d u e dis i i atio da s l affai e D et Suède c. Conseil166.
Il est intéressant de comparer la solution p i il gi e da s l affai e Reed avec les
o lusio s ti es pa la Cou da s l affai e Diatta167 . Dans cette affaire, une femme
sénégalaise entendait se prévaloir de son mariage avec son mari français afin de se voir
e o ait e u d oit d a s au te itoi e e e tu de l a ti le
du ‘ gle e t
/ . Les
164
C.J.C.E., 17 avril 1986, Reed, C-59/85, Rec., 1986, I, p. 1283, § 9.
Ibid., §§ 13 – 15.
166
C.J.C.E., D et Suède c. Conseil, op. cit., § 34.
167
Voy. H.U. JESSURUN OLIVEIRA, « Freedom of movement of spouses and registered partners in the European
Union », in Private law in the international arena – From national conflict rules towards harmonization and
unification. Liber amicorum Kurt Siehr, TMC Asser Press, La Haye, 2000, p. 530.
165
42 | P a g e
autorités françaises lui contestaient ce droit au motif que le couple était en instance de
divorce et ne vivait plus ensemble. La Cour estima que ce droit devait toutefois lui être
reconnu au motif que
« [c]ompte tenu du contexte et des finalités poursuivies par cette disposition, celle-ci ne saurait être
168
interprétée de façon restrictive ».
Il appa ait d s lo s a e d auta t plus de la t ue l l e t d te i a t da s la
définition du « conjoint » est ie l i stitutio ju idi ue du a iage – fût-elle vide de tout
contenu – plutôt que la réalité sociologique des relations familiales.
Dû à l appa e te f ilosit de la Cou fa e à l id e d a te u e olutio du o se sus
eu op e su es uestio s d li ates, est le l gislateu ui te ta de p e d e les hoses e
main. Ai si la Co
issio essa a à plusieu s ep ises d a e de le ‘ gle e t
/ , et
notamment son article 10, afin de prendre en compte la situation des partenaires nonmariés. Aucune de ces initiatives ne parvint malheureusement à son terme 169, si ie u en
, à l o asio de l affai e Baumbast, l A o at g
al Geelhoed ti ait encore le constat
suivant :
« [l]e règlement no 1612/68 date d'une époque où les relations familiales présentaient encore un
certain caractère de stabilité. La législation sociale des années 50 et 60 - et donc le règlement - prévoit des
dispositions en faveur de la famille traditionnelle, dans laquelle l'homme gagne sa vie et la femme veille au
ménage et aux enfants. Bien entendu, cette famille traditionnelle existe toujours, mais ce modèle est beaucoup
moins dominant dans la société occidentale. Les rapports familiaux et les formes de vie en commun sont
170
devenus moins stables et plus divers ».
2. Une occasion manquée : la Directive 2004/38.
Une véritable occasion de remédier aux la u es du ‘ gle e t
/ et d i t g e
les évolutions sociales quant à la définition de la « famille » dans un instrument de droit
européen se présenta au début des années 2000. L e te sio de la li e t de i ulatio audelà de la simple catégorie des « travailleurs » par une série de Directives171 dans le courant
des années 90 eut une influence considérable sur la jurisprudence de la Cour de justice, qui
it l a e t su le statut u i ue de « ito e de l U io » des migrants plutôt que de les
différencier selon la nature de leur activité économique172. Ai si, da s l affai e Grzelczyk, la
Cour jugea pour la première fois que
« le statut de citoyen de l'Union a vocation à être le statut fondamental des ressortissants des États
membres permettant à ceux parmi ces derniers qui se trouvent dans la même situation d'obtenir,
168
C.J.C.E., 13 février 1985, Diatta, C-267/83, Rec., 1985, I, p. 567, § 17.
Voy. H.U. JESSURUN OLIVEIRA, « F eedo of o e e t of spouses … », op. cit., pp. 535 et s.
170
Co lusio s de l A o at g
al, septe
e
, Baumbast et R, Rec., I-7094, § 23.
171
Directive 90/364/CEE du Conseil, du 28 juin 1990, relative au droit de séjour J.O.C.E. n° L 180 du 13 juillet
1990, p. 26 ; Directive 90/365/CEE du Conseil, du 28 juin 1990, relative au droit de séjour des travailleurs
salariés et non salariés ayant cessé leur activité professionnelle J.O.C.E. n° L 180 du 13 juillet 1990, p. 28 ;
Directive 93/96/CEE du Conseil, du 29 octobre 1993, relative au droit de séjour des étudiants, J.O.C.E. n° L 317
du 18 décembre 1993, p. 59.
172
M. BELL, « Holding Back the Tide? Cross-Border Recognition of Same-Sex Partnerships within the European
Union », in European Review of Private Law, 2004, n° 5, pp. 619 et 620.
169
43 | P a g e
indépendamment de leur nationalité et sans préjudice des exceptions expressément prévues à cet égard, le
173
même traitement juridique ».
La Commission profita donc de ce ue le T ait d A ste da a ait inséré une
référence à « l espa e de li e t , de s u it et de justi e » dans le traité174 et du débat que
cela avait suscité afi d i t odui e en 2001 une proposition de Directive dont la vocation
tait de o solide l e se ble des instruments consacrant la liberté de circulation des
pe so es au sei d u i st u e t u i ue175, qui vit le jour sous la forme de la Directive
2004/38 relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de
circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres.
La Di e ti e
/
o stitue u e a a e e e u elle e o ait pou la p e i e
fois, à côté de la famille « traditionnelle » fondée sur le mariage, mais dans une certaine
mesure seulement, d aut es t pes de st u tu es fa iliales. Cette Directive représente
a oi s u e d eptio e e u elle e fait au u e e t f e e, da s la d fi itio de
ces structures familiales, aux couples de même sexe, et ce malgré les tentatives du
Parlement européen de les y intégrer. Afin de déterminer qui peut revendiquer le droit de
eg oupe e t fa ilial a e u ito e de l U io , la Di e ti e disti gue t ois at go ies de
partenaires : le conjoint, le partenaire enregistré et le partenaire non-marié. L adjo tio ,
dans la Directive, des « partenaires enregistrés » est une victoire du Parlement européen,
puisque cette catégo ie de ig a ts appa aissait à l o igi e pas dans la proposition de la
Commission 176 . Dans les trois cas, le Parlement européen proposa également un
amendement afin que ces notions soient suivies de la spécification « quel que soit son sexe,
conformément à la législation nationale d'application en la matière 177 ». Selon le Parlement,
« [l]a législation de l'Union européenne relative à la libre circulation doit refléter et respecter la
diversité des relations familiales qui existent dans la société d'aujourd'hui, que ce soit le mariage, un
partenariat enregistré ou un partenariat hors mariage. Fondé sur l'égalité et le traitement équitable, le droit
178
fondamental à une vie familiale ne devrait pas dépendre du choix des individus de conclure un mariage »
173
C.J.C.E., Grzelczyk, op. cit, § 31 (nous soulignons).
er
Article 1 , §5 du T ait d A ste da , ui a do
aissa e à e ui o stitue aujou d hui l e se le du
Titre V du TFUE.
175
Commission, Proposition de Directive du Parlement européen et du Conseil du 25 mai 2001 relative au droit
des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire
des États membres, COM (2001) 257.
176
Art. 2, §2, COM (2001) 257, op. cit. ; voy. également M. BELL, « We are Family ? Same-sex Partners and EU
Migration Law », in Maastricht Journal of European and Comparative Law, 2002, n° 4, pp. 344 et s.
177
Résolution législative du Parlement européen du 11 février 2003 sur la proposition de directive du
Parlement européen et du Conseil relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de
circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres COM (2001) 257.
178
Amendements 14, 15 et 16, Rapport de la Commission des libertés et des droits des citoyens, de la justice et
des affaires intérieures sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative au droit
des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire
des États membres, PE 319.328.
174
44 | P a g e
Chaque fois, la Commission refusa ces amendements179 et le Co seil s alig a su
cette position180. P o do s at go ie pa at go ie afi d e pose les aiso s i o u es pa
la Co
issio ai si ue les o s ue es ue l a se e de f e e au ouples de
e
se e au o t su l appli atio de la Di e ti e.
a) Le conjoint
La Directive 2004/38 ne donne don a s au te itoi e de l U io u au « conjoint »
du
ito e eu op e , sa s au u e aut e p isio a ti le , § , . Pour rejeter
l a e de e t p opos pa le Pa le e t, la Co
issio p it a gu e t de ce que seuls deux
États e
es a aie t à l po ue ouvert le mariage aux couples de même sexe (les Pays-Bas
et la Belgique). Elle se fo da e out e su l a t D et Suède c Conseil pour justifier que la
notion de mariage, dans sa conception communément admise, désignait une union entre
deux personnes de sexe différent181. Il y a toutefois lieu de remarquer que cette affirmation
fut énoncée par la Cour dans le contexte particulier de savoir si un partenariat enregistré
pouvait ou non être assimilé à un mariage en droit suédois. La question ici était tout autre
puis u il s agissait de o f e au a iage ho ose uel, tel u il est d so ais auto is e
Belgique et aux Pays-Bas, une reconnaissance dans les autres États membres. En refusant
l a e de e t p opos pa le Pa le e t, la Co
issio et le Co seil o t donc créé une
disti tio au sei des a iages o lus da s l U io : les mariages entre personnes de sexe
oppos , e o us da s l e ti et de l U io , et les a iages e t e ouples de
e se e,
182
dont la validité est confinée à la sphère nationale ou, du moins, entre les États qui auront
ouvert le mariage aux couples homosexuels.
La Commission, rappelant la jurisprudence Reed, laissa cependant la porte ouverte à
la p ise e o pte de l olutio futu e de la so i t fa e à la uestio du mariage
homosexuel :
« [l]a Cou a aussi dit pou d oit u'u e i te p tatio de otio s ju idi ues fo d e su l olutio de
la société et ayant des conséquences dans tous les États membres, doit se faire par un examen de la situation
dans l'ensemble de la Communauté [re oi à l a t ‘eed o is]. La Co
issio p f e do li ite la
proposition à une notion de conjoint s'entendant, en principe, comme conjoint de sexe différent, sauf
183
évolution future ».
Or il semblerait que, en cours de route, entre 2004 et 2008, la Commission ait pris
a te d u e telle olutio so iale. E t oig e so appo t de
su l appli atio de la
Directive 2004/38, dans lequel la Commission semble considérer que la prise en compte des
179
Commission, Proposition modifiée de Directive du Parlement européen et du Conseil du 15 avril 2003
relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leur famille de circuler et de séjourner librement
sur le territoire des États membres, COM (2003) 199, pp. 11 et 12.
180
Position commune (CE) No 6/2004 arrêtée par le Conseil le 5 décembre 2003 en vue de l'adoption de la
directive 2004/. . ./CE du Parlement européen et du Conseil du . . . relative au droit des citoyens de l'Union et
des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres,
modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE,
73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE, p. 28.
181
C.J.C.E., D et Suède c. Conseil, op. cit., § 34.
182
M. BELL, « Holdi g Ba k the Tide? … », op. cit., p. 621.
183
Commission, op. cit., p. 11.
45 | P a g e
ouples de
e se e da s les l gislatio s atio ales o stitue t l u i ue faço de
transposer correctement la Directive 2004/38184. La uestio du a iage ho ose uel a
pourtant pas connu de grandes avancées durant cette période185. Il est donc pour le moins
su p e a t d assiste à u e telle p ise de positio de la Co
issio , elle ui, 5 ans
auparavant, bloquait encore toutes te tati es du Pa le e t e ue d i s e une référence
explicite aux couples de même sexe dans la Directives 2004/38. Il semblerait également que
e e i e e t e o stitue pas u u e p titio de p i ipes puis ue la Co
issio a p is les
de a ts es de i es a
es afi de s assu e ue les de ie s États e
es
al it a ts
ne dénient pas le statut de « conjoint » au partenaire de même sexe marié à un citoyen de
l U io . J e eu pou p eu e la récent bras de fer entre la Commission et la République de
Malte, à l issue du uel Malte a a ept de odifie sa l gislatio de t a spositio , o sa s
que la Commission ait préala le e t dû e ou i à des e a es d i itie u e a tio e
manquement à son encontre 186 . De même, en 2010, Viviane Reding, au nom de la
Commission, apporta la réponse suivante à un Parlementaire européen estimant que la prise
en compte des couples homosexuels dans la transposition de la Directive 2004/38
ressortissait à la compétence de chaque État membre :
« The Commission cannot support the viewpoint expressed by the Honourable Member that the
statement given by the Vice-President responsible for Justice, Fundamental Rights and Citizenship at the
Parliament on 7 September
o fli ts ith the p i iple of u it i di e sit .
It is for the Member States to decide whether or not they provide in their internal legal order for
same-sex unions, including marriage. The EU cannot adopt substantive legislation in this area.
Without prejudice to national legislation on family law, discrimination based on sexual orientation in
the implementation of EC law by the Member States is prohibited by Article 21 of the Charter of Fundamental
Rights.
Member States implement Union law, for example, when applying the provisions on free movement
to Union citizens and their family members wishing to move from one Member State to another.
Under EC law on free movement, family members can accompany Union citizens having exercised
their right to freedom of movement or residence, irrespective of the sexual orientation of the persons involved.
The exercise by EU citizens of their rights to free movement and residence, as provided by EC law, has to be
complied with by Member States and does not require that the Member States provide in their internal legal
187
order for same-sex unions » .
184
‘appo t de la Co
issio au Pa le e t eu op e et au Co seil du d e
e
su l appli atio de la
directive 2004/38/CE relative au droit des ito e s de l U io et des e
es de leu s fa illes de i ule et
de séjourner librement sur le territoire des États membres, COM (2008) 840, p. 5.
185
Notoi e e t, l Espag e a ou e t le a iage au ouples de
e se e e
et le ‘o au e-Uni, la
République Tchèque et la Hongrie ont adopté une forme de « partenariat enregistré » respectivement en 2004,
2006 et 2007.
186
Source : http://www.timesofmalta.com/articles/view/20110410/local/malta-discriminating-against-samesex-couples-commission.359131.
187
Réponse donnée par Mme Reding au nom de la Commission à une question parlementaire de M. Oreste
er
Rossi le 1 décembre 2010, J.O.U.E. n° C 243 E du 20 août 2011 (nous soulignons).
46 | P a g e
b) Le partenaire enregistré
En ce qui concerne les partenariats enregistrés, la Directive 2004/38 compte, au titre
de membre de la famille, le
« partenaire avec lequel le citoyen de l'Union a contracté un partenariat enregistré, sur la base de la
législation d'un État membre, si, conformément à la législation de l'État membre d'accueil, les partenariats
enregistrés sont équivalents au mariage, et dans le respect des conditions prévues par la législation pertinente
de l'État membre d'accueil » (article 2, §2, b).
Cette formulation restrictive, qui soumet à la volonté des États membres la liberté de
circulation des partenaires enregistrés selon que la législation nationale les assimile ou non
aux couples mariés, fut le seul o p o is t ou e t e le Pa le e t d u ôt et la
Co
issio et le Co seil de l aut e afi d i t g e la at go ie des pa te a iats e registrés
dans la Directive 2004/38. L a se e totale de f e e au ouples de
e se e se fait à
nouveau remarquer. L a gu e t i o u fut u u e o ligatio de e o aissa e au ait
heurté le d oit de la fa ille des États e
es a a t pas à e jou prévu de « partenariat
enregistré » da s leu l gislatio atio ale et se ait à l o igi e d u e pote tielle situatio de
« discrimination à rebours » dans laquelle des ressortissants étrangers se verraient
reconnaitre plus de droits que les propres nationaux de ces États membres188.
Encore une fois, cette justification semble assez faible et devrait tomber face aux
développements récents de la jurisprudence.
P e i e e t, il
a lieu de o state u u e e o aissa e o ligatoi e des
partenariats enregistrés da s le ad e de l appli atio de la Di e ti e
/
au ait eu
ue t s peu d i ide e su le d oit de la fa ille des États e
es, puis ue ette Di e ti e
o e e a a t tout le d oit d e t e et de side e ai si ue le d oit de t a aille su le
te itoi e des États e
es. De tels d oits i te f e t ue t s peu, oi e pas du tout a e
le droit de la famille au sein des États membres.
Ensuite, dans sa jurisprudence, la Cour a montré une certaine propension à accepter
ue la alisatio effe ti e de la li e t de i ulatio des ito e s de l U io puisse a oi
des conséquences mineures dans des domaines ressortissant normalement à la compétence
des États membres. Ainsi, dès 2003, da s l affai e Garcia Avello, la Cour a estimé que la
alisatio effe ti e de la li e t de i ulatio d u esso tissa t espag ol pou ait e t ai e
une obligation pour la Belgique de déroger à ses règles de DIP en matières de nom des
personnes :
« [s]i, en l'état actuel du droit communautaire, les règles régissant le nom d'une personne relèvent de
la compétence des États membres, ces derniers doivent néanmoins, dans l'exercice de cette compétence,
respecter le droit communautaire (…) et, en particulier, les dispositions du traité relatives à la liberté reconnue
à tout citoyen de l'Union de circuler et de séjourner sur le territoire des Etats membres
189
».
188
Commission, op. cit., pp. 11 et 12 ; voy. également Conseil, op. cit., p. 28.
C.J.C.E., 2 octobre 2003, Garcia Avello, C-148/02, Rec., 2003, I, p. 11613, § 25; voy. également C.J.C.E., 14
octobre 2008, Grunkin Paul, C-353/06, Rec., 20098, I, p. 7639, §§ 23 et s.
189
47 | P a g e
Plus
e
e t, et da s le ad e de l appli atio de la Di e ti e
/ , la Cou a
jugé que la liberté de circulation empêchait les États e
es d ajoute des o ditio s à
l e t e et au s jou de esso tissa ts de pa s tie s lo s ue es o ditio s o stitue t des
e t a es à la li e t de i ulatio des ito e s de l U io 190. Reconnaitre une compétence
totalement exclusive aux États membres dans ces matières « aurait pour effet que la liberté
de i ulatio des ito e s de l U io da s u État e
e do t ils o t pas la atio alit
a ie ait d u État e
e à l aut e », ce qui serait « i o ilia le a e l o je tif […] d u
marché intérieu a a t is pa l a olitio e t e États e
es des o sta les à la li e
191
circulation des personnes ».
Il semblerait donc que le législateur communautaire puisse régir ces matières par
oie d i ide e lo s u il he he à o
tise les d oits ga a tis par les traités, et
notamment la liberté de circulation. Ces o sid atio s de aie t pou oi s appli ue au cas
des partenaires enregistrés, y compris ceux de même sexe : dès lors que la non
reconnaissance des partenariats enregistrés empêcherait des cito e s de l U io de se fai e
ejoi d e pa leu pa te ai e esso tissa t d u État tie s et o stitue ait e ela u e e t a e
à leur liberté de circulation, les États membres ne devraient pas être autorisés à ajouter la
o ditio de l h t ose ualit i à invoquer les conséquences mineures que cela aurait sur
leu d oit de la fa ille afi d happe à l o ligatio de e o aissa e ui leu i o e ait.
Enfin, l a gu e t de la « discrimination à rebours » fait l effet d u e au aise lague
lo s ue l o considère la discrimination – et cette fois pas « à rebours » – qui en résulte
pour les partenaires enregistrés. Et comment pourrait-o e pas poi te l o asio
a u e
de promouvoir la reconnaissance juridique des couples homosexuels par les États encore
récalcitrant, qui auraient dû faire face à une situation dans laquelle leurs nationaux se
seraient vus reconnaitre moins de droits que les couples homosexuels en provenance
d aut es États e
es192 ?
Au lieu de cela, la reconnaissance des partenariats enregistrés est soumise à la
condition que la législation de l'État membre d'accueil assimile partenariat enregistré et
mariage. Encore faut-il s e te d e su la fo e ue ette « assimilation » devra prendre193.
Conformément à la jurisprudence Hay, l a e t devrait être mis sur les similarités plutôt que
sur les différences entre ces institutions, de façon à ce que tous les États membres qui ont
adopté un type de partenariat enregistré rentrent da s le ha p d appli atio de la
Directive 2004/38. La solution qui a été privilégiée aura donc comme conséquence de
s i de le te itoi e de l U io e deu zo es : une dont les États membres reconnaissent les
partenariats enregistrés et dans laquelle les partenaires pourront librement entrer et
s jou e , l aut e do t les États ne connaissent ni ne reconnaissent l i stitutio du
190
C.J.C.E., 25 juillet 2008, Metock e.a., C-127/08, Rec., 2008, I, p. 6241, §§ 60 et s.
Ibid., §§ 67 et 68.
192
M. BELL, « Holdi g Ba k the Tide? … », op. cit., pp. 623 et 624.
193
J. GUTH, « Whe is a Pa t e ot a Pa t e ? Co eptualisatio s of fa il i EU F ee Mo e e t La », in
Journal of Social Welfare and Family Law, 2011, n° 33, p. 196.
191
48 | P a g e
partenariat enregistré, dans laquelle les partenaires se verront dénier leur droit à la libre
circulation194.
c) Le partenaire non-marié
Dans le cas des partenaires non-mariés aussi, alors que le Parlement proposa de
sp ifie u ils de aie t s e te d e sa s o sid atio do
e au se e des pa te ai es, la
Commission et le Conseil refusèrent. De ce refus a résulté la disposition dont la formulation
garantit le moins fermement les droits de ses destinataires :
« “a s p judi e d u d oit pe so el à la li e i ulatio et au s jou de l i t ess , l'État e
d'accueil favorise, conformément à sa législation nationale, l'entrée et le séjour des personnes suivantes:
e
a …
b) le partenaire avec lequel le citoyen de l'Union a une relation durable, dûment attestée.
L'État membre d'accueil entreprend un examen approfondi de la situation personnelle et motive tout
refus d'entrée ou de séjour visant ces personnes » (article 3, §2, b).
D ap s les te es employés, il semblerait que cette disposition ne garantisse pas
réellement un droit d e t e et de side e pou les pa te ai es o
a i s da s u État
membre mais uniquement le droit à ce que leur requête soit sérieusement prise en compte
et u u efus soit dûment motivé195. Le seul effet concret de cette disposition est donc
d atta he des o t ai tes p o du ales au de a des de eg oupe e t fa ilial des
partenaires non mariés. Il ne faut cependant pas en négliger les effets bénéfiques. Ainsi, le
demandeu
fi ie a de tout l a se al des p i ipes de d oit ad i ist atif, tels ue le d oit
d t e e te du ou le d oit à u e ou s effe tif. De plus, l o ligatio d e a i er les requêtes
devrait empêcher les États membres de prévoir une politique générale de refoulement des
partenaires non mariés. Enfin, ne devrait pas constituer un motif valable de refus la seule
circonstance que la relation durable invoquée dans la demande est une relation entre
personne de même sexe. Il ne faut en effet pas oublier que le considérant n° 31 exhorte les
États membres à faire application de la Directive 2004/38 « sans faire, entre les bénéficiaires
de ette de i e, de dis i i atio fo d e ota
e t su […] l o ie tatio se uelle ».
Il demeure néanmoins que les États membres restent entièrement maîtres de fixer
les o ditio s de e u ils esti e t o stitue u e « relation durable » et u ils so t a priori
li es de
la e les p eu es at ielles u ils esti e t
essai es afin d en attester. Ces
o ditio s so t o p he si les puis u elles doi e t pe ett e au États e
es de se
prémunir contre toute utilisation abusive de cette disposition. Dans certains cas cependant,
l e ige e de fou i des p eu es at ielles pou aie t p iver des partenaires de même
sexe entretenant une relation sincère de bénéficier du regroupement familial, notamment
lorsque le couple vivait préalablement dans une région où ils risquaient des persécutions en
194
195
M. BELL, « Holdi g Ba k the Tide? … », op. cit., p. 624.
Ibid., p. 625.
49 | P a g e
raison de leur homosexualité, les empêchant de vivre pleinement leur relation au grand jour
et rendant dès lors l e ige e d e atteste d auta t plus difficile à satisfaire196.
3. Une tâche incombant désormais à chaque État membre.
La Directive 2004/38 ne comble donc que de façon très partielle les lacunes du
‘ gle e t
/ . Bie u elle p e e e o pte d aut es st u tu es fa iliales ue les
relations centrées sur la mariage, elle sou et l effe ti it du statut u elles o f e t au
bon vouloir des États membres. De plus, toute référence aux couples homosexuels a été
délibérément omise des différentes catégories de relations familiales que la Directive
énonce. Ceci apparait comme une véritable aberration 10 ans plus tard, à une époque ou le
Traité de Lisbonne a, d u
e f o t, le le p i ipe de o dis i i atio au a g de
« valeur fondatrice » de l U io a ti le TUE et fait du o at o t e les dis i i atio s
u o je tif de l U io a ti le TFUE u elle doit s effo e de ett e e œu e da s toutes
ses politiques et actions (article 10 TFEU).
De même, le Traité de Lisbonne a conféré aux droits énoncés par la Charte des droits
fondamentaux, parmi lesquels figure le principe de non-discrimination (article 21 de la
Charte), une valeur juridique équivalente à celle des traités (article 6 TUE). Ce principe
s i pose gale e t au États e
es lo s u ils ette t e œu e le d oit de l U io
(article 51 de la Charte). Il est également utile de rappeler que la Cour a toujours reconnu
l i po ta e « d assu e la p ote tio de la ie fa iliale des esso tissa ts des États
e
es afi d li i e les o sta les à l e e i e des li e t s fo da e tales ga a ties pa
le traité197 » et la
essit d i te p te es li e t s « à la lumière de l'exigence du respect
de la vie familiale prévu à l'article 8 de la CEDH, ce respect faisant partie des droits
fondamentaux qui, selon une jurisprudence constante, sont reconnus par le droit
communautaire198 » – protection de la vie familiale do t la Cou EDH ie t d te d e la
po t e au elatio s sta les e t e pa te ai es de
e se e da s l a t Schalk and Kopf.
A et ga d, u e e ple e ou agea t peut t e poi t du ôt de l Italie. Le T i u al
de Reggio Emilia a récemment fait une application exemplaire de la Directive 2004/38, dont
les juridictions des États membres de aie t s i spi e 199. A l o igi e de ette affai e se
t ou ait le efus de l Offi e des t a ge s de délivrer une carte de résidence au conjoint de
atio alit u ugua e e d u atio al italie au otif u ils taie t de
e se e et ue le
terme « conjoint » au sens de la Directive 2004/38 ne recouvrait pas les mariages
homosexuels. Le juge italie esti a u u équilibre devait être trouvé entre la compétence
nationale en matière de reconnaissance des statuts civils et la compétence exclusive
européenne en matière de liberté de circulation et que cet équilibre devait être conforme
aux droits fondamentaux des personnes concernées, notamment le droit au respect de leur
vie familiale tel que découlant des articles 8 CEDH et 9 de la Charte, ainsi que leur droit à
196
J. GUTH, « Whe is a Pa t e ot a Pa t e ? … », op. cit., pp. 198 et 199.
C.J.C.E., Metock e.a., op. cit, § 56 et jurisprudence citée.
198
C.J.C.E., 17 septembre 2002, Baumbast et R, C-413/99, Rec., 2002, I, p. 7091, § 72.
199
U
su
de e juge e t a t fait pa l Eu opea Net o k of Legal E pe t i the No -Discrimination Field,
Italy 2012 - Country report on measures to combat discrimination, 2013, disponible sur http://www.nondiscrimination.net.
197
50 | P a g e
l galit de t aite e t tel ue ga a ti pa les a ti les
CEDH et
de la Cha te. Il ordonna
do
u u e carte de résidence fut octroyée au ressortissant uruguayen. Le juge italien fit
donc une application parfaite de la Directive 2004/38 puisque, tout en reconnaissant la
o p te e sou e ai e de l Italie e
ati e de e o aissa e des statuts i ils, il pointa
a oi s la
essit pou les auto it s italie es d e e e ette o p te e de a i e
à espe te les o ligatio s ui s i pose t à eu e e tu des t ait s, do t le p i ipe de o dis i i atio et la li e t de i ulatio des ito e s de l Union.
Il apparait dès lors que e ui a pas pu t e a o pli lo s de l’ la o atio de la
Directive 2004/38 a été relayé aux États membres, à qui il incombera désormais de ne pas
discriminer les couples de même sexe dans l’appli atio u ils e fe o t. Le revirement de
positio de la Co
issio est d ailleu s o sig e, puis ue les États f a tai es semblent
devoir faire l o jet d a tio s e
a ue e t de sa pa t. Dans le cas des conjoints de même
sexe, l galit de t aite ent semble donc être assurée. Elle de ait l t e gale e t pou les
États qui choisissent de reconnaitre les statuts des partenaires enregistrés et des partenaires
non mariés, puis u ils ne pourraient exclure les couples homosexuels du bénéfice de ces
statuts sa s iole l a ti le
de la Charte des droits fondamentaux. Un risque subsiste
cependant que les États les plus récalcitrants envers toute reconnaissance juridique des
relations homosexuelles préfèrent dénier tout droit à ces catégories de personnes plutôt
que de devoir les reconnaitre de la même façon aux couples de sexe opposé et aux couples
de même sexe. Il s agit là de la o s ue e du ti aille e t do t a t p is le l gislateu
européen entre la nécessité de prendre en compte les évolutions sociales et légales en cours
dans certains États membres et la volonté de respecter ceux parmi les États qui refusent que
cette évolution soit consacrée en droit européen.
C. Reconnaissance des statuts civils
Il me reste à aborder une dernière difficulté à laquelle les couples de même sexe
pourraient être confrontés : la non-reconnaissance, par un État membre, du statut civil des
conjoints de même sexe, acquis dans un autre État membre200. Il se pourrait en effet que
deux personnes de même sexe ayant contracté mariage dans un État membre le permettant
se déplacent pa ap s da s u État e
e a a t pas ou e t le a iage e t e pe so es
de même sexe et refusant de leur en reconnaitre les effets. Cette situation aurait entre
autres pour effet de priver les conjoints de tous les avantages que la législation nationale de
l État e
e d a ueil atta he au statut de ouple a i puis u u tel statut leu se ait
dénié. Le même type de problème pourrait se poser dans le cas de partenaires enregistrés,
dont il pourrait par exemple être requis qu ils reforment un partenariat enregistré selon les
modalités e uises pa la l gislatio de l État membre d a ueil. En définitive, la grande
disparité des législations nationales relatives à ces institutions juridiques résulte en une
200
Pou u e pos de l tat des lieu de ette p o l ati ue, o . Eu opea U io Age
fo Fu da e tal
Rights, Homophobie, transphobie et dis i i atio fo d e su l’o ie tatio sexuelle et l’ide tit de ge e da s
les États e
es de l’U io eu op e e, 2011, disponible sur http://fra.europa.eu, pp. 29 – 33.
51 | P a g e
incertitude quant à la question de savoir comment ces mariages ou ces partenariats
enregistrés seront traités entre États membres.
Cette p o l ati ue a ait pas
happ au auto it s elges au o e t de
l adoptio de la loi auto isa t le a iage ho ose uel. Ai si, da s sa irculaire explicative
accompagnant le loi de 2003, le ministre de la Justice fit à l po ue cette mise en garde :
« La Belgique, comme cela a déjà été mentionné plus haut, en ouvrant le mariage aux personnes de
même sexe, instaure une institution juridique encore inconnue comme telle dans d'autres pays.
Il n'est donc pas exclu que de tels mariages ne soient pas reconnus dans certains pays.
Des situations apparaîtront ainsi où certains mariages seront parfaitement valables en Belgique, et, où,
en même temps, aucun effet ne leur sera reconnu à l'étranger.
Il est donc extrêmement important que l'officier de l'état civil attire l'attention des intéressés sur les
inconvénients possibles de ces mariages à l'étranger. Il est de l'intérêt des futurs époux de se faire dûment
conseiller sur leur statut juridique dans l'hypothèse où ils s'établiraient à l'étranger, ou dans le cas où ils y
201
auraient déjà ou acquerraient par la suite des intérêts patrimoniaux ou autres ».
Cette problématique a également suscité de nombreux débats dans la sphère
eu op e e, si ie
ue
, lorsque la Belgique devint le second État membre à
autoriser le mariage homosexuel, la Commission chargea le R seau E.U. d’expe ts
indépendants en matière de droits fondamentaux de rendre un avis sur la question de savoir
si les aut es États e
es pou aie t i o ue le o ept d ordre public international afin
de refuser de reconnaitre un mariage homosexuel conclu aux Pays-Bas ou en Belgique202. Les
réponses apportées par les différents experts varièrent et ne contribuèrent pas à clarifier le
débat203.
Le problème subsiste jus u à e jou . A e la di isio toujou s plus a u e des États
membres en deux « blocs », l u eg oupa t les États e
es ou e ts à l id e de o f e
u e tai statut au ouples ho ose uels, oi e de leu pe ett e l a s au a iage, et
l aut e asse la t eu ui so t fe e e t oppos s, il de ie t epe da t de plus e plus
u ge t d e die . Ce p o l e est d ailleurs pas isolé au cas des actes civils relatifs au
a iage ais tou he l e se le des do u e ts pu li s et des a tes i ils d li s pa des
États membres lo s ue les i di idus he he t à s e p aloi da s u aut e État e
e
que celui qui les a délivré. “i ie u e
, la Co
issio pu lia u li e e t, dans le
cadre du Programme de Stockholm, afin de lancer une réflexion quant aux moyens de
201
Circulaire relative à la loi du 13 février 2003 ouvrant le mariage à des personnes de même sexe et modifiant
certaines dispositions du Code civil, M.B., 16 mai 2003 (nous soulignons).
202
‘ seau E.U. d e pe ts i d pe da ts e
ati e de d oits fo da e tau , « Avis sur la possibilité de la
reconnaissance, par chaque Etat membre, du mariage homosexuel ouvert aux Pays-Bas et en Belgique et le rôle
de l e eptio d o d e pu li i te atio al du d oit i te atio al p i de ha ue Etat e
e ».
203
M. BELL, « Holdi g Ba k the Tide? … », op. cit., p. 627.
52 | P a g e
remédier à ce problème, dont les manifestations peuvent avoir des conséquences néfastes
sur la liberté de ci ulatio des ito e s de l U io 204.
Ainsi la Commission commence-t-elle pa appele u elle e o pte ulle e t
proposer une législation visant à harmoniser les règles matérielles de droit de la famille
pa i tous les États e
es, e pou uoi l U io européenne ne serait nullement
o p te te e l tat a tuel des t ait s205. La Commission ne pourrait dès lors pas proposer
l la o atio de gles at ielles o
u es elati es au o ditio s d a s du a iage.
Quelles sont les solutions envisageables préconisées par la Commission qui retiennent notre
attention ?
La Commission propose premièrement la reconnaissance de plein droit des statuts
civils. Cette solution vise donc à inciter les États membres à prendre des mesures de
reconnaissance automatique des statuts civils octroyés dans les autres États membres. Cette
solution présente l a a tage de pou oi t e ise e œu e « sans harmonisation des règles
existantes et laisserait subsister les systèmes juridiques des États membres206 ». Ses chances
de réussite sont toutefois tributaires de la bonne volonté des États membres de prendre les
esu es atio ales
essai es à la ise e œu e de ette e o aissa e auto ati ue.
Ceci peut ne pas poser trop de problèmes dans certaines matières peu sujettes à conflits
idéologiques, telle que le nom des personnes. Ce i pou ait epe da t s a e eau oup
plus problématique dans le cas du mariage. Il appa ait e effet pas lai e e t o
e t
les États do t il a fallu fo e la ai afi u ils e o aisse t les a iages entre couples de
e se e pou l appli atio de la Di e ti e
/ a epte aie t d te d e e p i ipe de
e o aissa e auto ati ue à l e se le des effets du a iage.
Il est toutefois intéressant de constater que la Cour semble avoir commencé de paver
la route de la reconnaissance de plein droit des statuts civils. Ainsi, dans ses arrêts
Konstantinidis et Dafeki, la Cour a reconnu, dans une certaine mesure, une obligation
incombant aux États membres de reconnaitre des effets aux statuts civils acquis par les
i di idus da s d aut es États e
es, au o de leu li e t de i ulatio . Ainsi, dans
l affai e Konstantinidis, un ressortissant grec travaillant en Allemagne se vit reconnaitre le
droit de demander le changement de la graphie de son nom dans les egist es d tat civil
allemands afin que celui-ci corresponde mieux à la prononciation grecque de son nom, tel
que transcrit dans les registres grecs207. De
e, da s l affai e Dafeki, une ressortissante
grecque se vit e o ait e le d oit d oppose u e modification de sa date de naissance sur
les egist es d tat i il g e s au i stitutio s alle a des o p te tes e
ati e de
sécurité sociale afin de pouvoir demander le bénéfice de sa pension de retraite :
« il convient de relever que l'exercice des droits découlant de la libre circulation des travailleurs n'est
pas possible sans la présentation de documents relatifs à l'état des personnes, qui sont généralement délivrés
204
Livre vert de la Commission du 14 décembre 2010, « Moins de démarches administratives pour les citoyens:
P o ou oi la li e i ulatio des do u e ts pu li s et la e o aissa e des effets des a tes d tat i il »,
COM (2010) 747.
205
Ibid., p. 13.
206
Ibid., p. 14.
207
C.J.C.E., 30 mars 1993, Konstantinidis, C-168/91, Rec., 1993, I, p. 1191.
53 | P a g e
par l'État d'origine du travailleur. Il s'ensuit que les autorités administratives et judiciaires d'un État membre
sont tenues de respecter les certificats et actes analogues relatifs à l'état des personnes qui émanent des
autorités compétentes des autres États membres, à moins que leur exactitude ne soit sérieusement ébranlée
208
par des indices concrets se rapportant au cas individuel en cause ».
Il e s agi ait e fi de o pte de ie d aut e ue d u e e te sio du p i ipe de
e o aissa e utuelle, tel ue d gag pa la Cou da s l a t Cassis de Dijon dans le
cadre de la libre circulation des marchandises, aux statuts civils, dont la non reconnaissance
peut engendrer des restrictions similaires à la liberté de circulation, non plus des
marchandises, mais bien des personnes cette fois.
La Commission propose également de parvenir à une telle reconnaissance par
l ha o isatio des gles de o flits de lois209. Cette solution nécessiterait donc de légiférer
au niveau de l U io su la ase de la compétence en matière de « coopération judiciaire
dans les matières civiles ayant une incidence transfrontière » (article 81 TFUE). Cette base
juridique pourrait en effet être utilisée dans les domaines où la reconnaissance automatique
e suffi ait pas afi d u ifie les gles de o flit de lois de faço à e ue le statut civil des
pe so es soit gi pa la loi de l État e
e a e ui elles p se te t les lie s de
atta he e t les plus fo ts, do l État e
e da s le uel ils o t a uis e statut. L U io
a d ailleu s d jà fait usage de ette compétence dans des ati es elati es à l tat i il.
Ainsi le Règlement 2201/2003 prévoit-il qu « aucune procédure n'est requise pour la mise à
jour des actes d'état civil d'un État membre sur la base d'une décision rendue dans un autre
État membre en matière de divorce, de séparation de corps ou d'annulation du mariage210 ».
Sans entrer dans les détails de cette approche, qui relève de la matière du droit
i te atio al p i et est do pas l o jet de e t a ail, j ai e ais toutefois fai e pa t de a
perplexité quant aux chances de pa e i à l adoptio d un instrument juridique relatif à la
reconnaissance des statuts civils en matière de mariage dans un avenir proche. En effet,
l a ti le , § du TFEU p oit u e p o du e l gislati e sp iale sp ifi ue e t pou les
esu es elati es au d oit de la fa ille,
essita t l u a i it au sei du Co seil. U e
clause passerelle est prévue afin de repasser à la procédure législative ordinaire mais cette
d isio e ui e gale e t d t e p ise à l u a i it du Co seil a ticle 81, §3, al. 3). De
plus, e as d utilisatio de ette passe elle, les Pa le e ts atio au se t ou e t i estis
d u d oit de eto i di iduel article 81, §3, al.3). Je ape çois do pas o
e t le
o se sus
essai e pou ait t e t ou afi d adopte u i st u e t l gislatif i pli ua t
la e o aissa e des a iages ho ose uels alo s u u e ajo it d États e
es a pas
encore ouvert le mariage aux couples de
e se e et u u e i o it
est même
viscéralement opposée.
208
C.J.C.E., 2 décembre 1997, Dafeki, C-336/94, Rec., 1997, I, p. 6761, § 19 (nous soulignons).
Livre vert de la Commission du 14 décembre 2010, op. cit., p. 15.
210
Art. 21, §2 du Règlement 2201/2003 du Conseil du 27 novembre 2003 relatif à la compétence, la
reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale
abrogeant le règlement (CE) no 1347/2000, J.O.C.E. n° L 338 du 23 décembre 2003, p. 1.
209
54 | P a g e
Conclusion
Nous avons vu, dans la première partie de ce travail, que la jurisprudence de la Cour
de justi e de l U io eu op e e, dou l e de elle de la Cou eu op e e des d oits de
l ho
e, a aie t o t i u à la
atio d u « statut européen » des couples de même
se e. Mais, au sei de e ui de eu e de la a ge atio ale d app iatio des États, il
su siste pou ha ue État e
e u e a ge de a œu e afi d di te u « statut
national » pour ces couples. L te due de e statut peut a ie d u État e
e à l aut e,
en fonction du degré de reconnaissance juridique octroyé aux couples de même sexe. Ceci
est particulièrement prégnant en e ui o e e l a s à l i stitutio du a iage pour les
couples homosexuels, matière qui ressortit à la compétence exclusive des États membres
da s l o d e ju idi ue o
u autai e et pou la uelle les États dispose t d u e la ge a ge
d app iatio au sei du Co seil de l Eu ope. Nous soutenons néanmoi s ue l e e i e de
ette o p te e pa les États e
es de l U io eu op e e e peut se fai e au
d t i e t de la li e i ulatio des pe so es, p i ipe ui se t ou e au œu
e de
l i t g atio eu op e e.
Ainsi, en ce qui concerne la détermination de la loi applicable aux conditions de fond
pou a de à l i stitutio du a iage, les États e
es ui o t ou e t le a iage au
ouples de
e se e e de aie t pas t e auto is s à efuse le a iage d u
ressortissa t d u aut e État e
e a e so pa te ai e de
e se e e le sou etta t
aux conditions prévues par sa loi atio ale. La Cou de justi e se le d ailleu s a oi p is
conscience du danger que peuvent représenter les règles de DIP pour la liberté de
circulation. En effet, en matière de nom des personnes, ui o stitue, à l i sta du a iage,
u l e t de l tat i il, la Cou a d jà e o u l o ligatio des États e
es de d oge
à l appli atio de leu s gles de DIP afi de e pas e t a e la li e té de circulation des
citoyens européens211. Des limitation similaires devraient encadrer les règles de DIP en
matière de mariage.
De même, les conceptions propres à chaque État membre de ce qui constitue un
« conjoint » ou un « partenaire enregistré » ne devraient pas entraver la faculté des citoyens
européens de jouir des droits que leur confère la Directive 2004/38 en matière de
eg oupe e t fa ilial lo s ue e statut a t a uis l gale e t au sei d u aut e État
membre. L appli atio o -discriminatoire du droit communautaire ne peut en effet pas
être mise en péril par une appropriation étatique des concepts directeurs des instruments
législatifs européens. Après des débuts hésitants au stade de sa confection, la Commission
semble désormais résolue à s assurer que les États membres garantiront aux conjoints de
même sexe le plein effet de la Directive 2004/38 dans son application. Une incertitude
demeure néanmoins dans le cas des partenaires enregistrés et des partenaires non-mariés,
pou les uels les États e
es dispose t d u e e tai e a ge de a œu e.
Enfin, il convient de se joindre à la réflexion initiée par la Commission quant aux
o e s à ett e e œu e afi de pa e i , à terme, à une reconnaissance automatique des
211
C.J.C.E., 2 octobre 2003, Garcia Avello, op. cit, § 25 ; voy. également C.J.C.E., 14 octobre 2008, Grunkin Paul,
op. cit., §§ 23 et s.
55 | P a g e
a tes de l tat i il au sei de l U io eu op e e. La perte du statut juridique acquis dans
u État e
e et des d oits aff e ts lo s du passage d u e frontière intra-européenne
o stitue i d ia le e t u i ita t gatif à l e e i e pa les ito e s eu op e s de leu
liberté de circulation. Ainsi,
« [l]a continuité et la permanence de la situation d'état civil de tout citoyen européen qui exerce son
droit à la libre circulation devraient pouvoir lui être garanties. En décidant de franchir la f o ti e d u État
membre pour aller vivre, travailler, étudier dans un autre État membre, la situation juridique acquise par le
citoyen dans le premier État membre (…) ne devrait pas être remise en cause par les autorités du deuxième
État membre, dans la mesure où une telle remise en cause constituerait un obstacle et une source de difficultés
212
objectives à l'exercice des droits du citoyen ».
212
Livre vert de la Commission du 14 décembre 2010, « Moins de démarches administratives pour les citoyens:
P o ou oi la li e i ulatio des do u e ts pu li s et la e o aissa e des effets des a tes d tat i il »,
COM (2010) 747, p. 11.
56 | P a g e
Bibliographie
A. Législation
1. Union européenne
a) Traités
T ait su le fo tio
e e t de l U io eu op e
T ait su l U io eu op e
e;
e;
Cha te des d oits fo da e tau de l U io eu op e
e.
b) Directives
Di e ti e /
/CEE du Co seil, du f ie
, elati e à la ise e œu e du p i ipe
de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à
la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail, J.O.C.E. n° L 39
du 14 février 1976, p. 40 ;
Directive 90/364/CEE du Conseil, du 28 juin 1990, relative au droit de séjour J.O.C.E. n° L 180
du 13 juillet 1990, p. 26 ; Directive 90/365/CEE du Conseil, du 28 juin 1990, relative au droit
de séjour des travailleurs salariés et non salariés ayant cessé leur activité professionnelle
J.O.C.E. n° L 180 du 13 juillet 1990, p. 28 ;
Directive 93/96/CEE du Conseil, du 29 octobre 1993, relative au droit de séjour des
étudiants, J.O.C.E. n° L 317 du 18 décembre 1993, p. 59 ;
Di e ti e
/ /CE du Co seil du
jui
elati e à la ise e œu e du p i ipe de
l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique,
J.OC.E.. n° L 180 du 19 juillet 2000, p. 22 ;
Directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général
en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, J.OC.E. n° L 303 du 12
décembre 2000, p. 16 ;
Directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au
droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de
séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE)
n° 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE,
73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE, J.O.C.E. n°
L 158 du 30 avril 2004, p. 77 ;
Directive 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2006 relative à la
ise e œu e du p i ipe de l'égalité des chances et de l'égalité de traitement entre
hommes et femmes en matière d'emploi et de travail, J.O.C.E. n° L 204 du 26 juillet 2006, p.
23.
57 | P a g e
c) Règlements
Règlement n° 31 (C.E.E) 11 (C.E.E.A.) fixant le statut des fonctionnaires et le régime
applicable aux autres agents de la Communauté économique européenne et de la
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Règlement (CEE) n° 1612/68 du Conseil, du 15 octobre 1968, relatif à la libre circulation des
travailleurs à l'intérieur de la Communauté, J.O.C.E. n° L 257 du 19 octobre 1968, p. 2 ;
Règlement (CE, CECA, Euratom) n° 781/98 du Conseil du 7 avril 1998 modifiant le statut des
fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres
agents de ces Communautés en matière d'égalité de traitement, J.O.C.E. n° L 113 du 15 avril
1998, p. 4 ;
Règlement 2201/2003 du Conseil du 27 novembre 2003 relatif à la compétence, la
reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de
responsabilité parentale abrogeant le règlement (CE) no 1347/2000, J.O.C.E. n° L 338 du 23
décembre 2003, p. 1 ;
Règlement (CE, Euratom) n° 723/2004 du Conseil du 22 mars 2004 modifiant le statut des
fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres
agents de ces Communautés, J.O.C.E. n° L 124 du 27 avril 2004, p. 1 ;
Règlement 4/2009 du Conseil du 18 décembre 2008 (dit « Règlement Bruxelles III ») relatif à
la o p te e, la loi appli a le, la e o aissa e et l e utio des d isio s et la
oop atio e
ati e d o ligatio s ali e tai es, J.O.U.E. n° L 7 du 10 janvier 2009, p. 1 ;
Règlement (UE) n° 492/2011 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2011 relatif à la
li e i ulatio des t a ailleu s à l i t ieu de l U io Te te p se ta t de l'i t t pou
l'EEE, J.O.U.E. n° L 141 du 27 mai 2011, p. 1.
2. Conventions internationales
Convention entre la République française et la République populaire de Pologne relative à la
loi appli a le, la o p te e et l e e uatu da s le d oit des pe so es et de la fa ille,
signée à Varsovie le 5 avril 1967 et publiée, conformément au Décret n°69-176 du 13 février
1969, au JORF du 22 février 1969.
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a) Cour de justice
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C.J.C.E., 13 février 1985, Diatta, C-267/83, Rec., 1985, I, p. 567;
58 | P a g e
C.J.C.E., 17 avril 1986, Reed, C-59/85, Rec., 1986, I, p. 1283;
C.J.C.E., 30 mars 1993, Konstantinidis, C-168/91, Rec., 1993, I, p. 1191 ;
C.J.C.E., 28 septembre 1994, Beune, C-7/93, Rec., 1994, I, p. 4471 ;
C.J.C.E., 30 avril 1996, P. / S., C-13/94, Rec., 1996, I, p. 2143 ;
C.J.C.E., 2 décembre 1997, Dafeki, C-336/94, Rec., 1997, I, p. 6761 ;
C.J.C.E., 17 février 1998, Grant, C-249/96, Rec., 1998, I, p. 621 ;
C.J.C.E., 12 mai 1998, Martinez Sala, C-85/96, Rec., 1998, I, p. 2691;
C.J.C.E., 24 novembre 1998, Bickel et Franz, C-274/96, Rec., 1998, I, p. 7637 ;
C.J.C.E., 7 décembre 2000, Schnorbus, C-79/99, Rec., 2000, I, p. 10997 ;
C.J.C.E., 31 mai 2001, D et Suède c. Conseil, aff. jointes C-122/99 P et 125/99 P, Rec., 2001, I,
p. 4319 ;
C.J.C.E., 20 septembre 2001, Grzelczyk, C-184/99, Rec., 2001, I, p. 6193;
C.J.C.E., 17 septembre 2002, Baumbast et R, C-413/99, Rec., 2002, I, p. 7091 ;
C.J.C.E., 2 octobre 2003, Garcia Avello, C-148/02, Rec., 2003, I, p. 11613;
C.J.C.E., 22 novembre 2005, Mangold, C-144/04, Rec., I, 2005, p. 9981;
C.J.U.E., 1er avril 2008, Maruko (GC), C-267/06, Rec., 2008, I, p. 1757 ;
C.J.C.E., 25 juillet 2008, Metock e.a., C-127/08, Rec., 2008, I, p. 6241 ;
C.J.C.E., 14 octobre 2008, Grunkin Paul, C-353/06, Rec., 20098, I, p. 7639 ;
C.J.U.E., 19 janvier 2010, Kücükdeveci, C-555/07, Rec., I, 2010, p. 365 ;
C.J.C.E., 13 avril 2010, Bressol, C- 73/08, Rec., 2010, I, p. 2735 ;
C.J.U.E., 15 avril 2010, Gualtieri c. Commission, C-485/08 P, Rec., 2010, I, p. 3009 ;
C.J.U.E., 7 octobre 2010, Lassal, C-162/09, Rec., 2010, I, p. 9217 ;
C.J.U.E., 10 mai 2011, Römer, C-147/08, Rec., 2011, I, p. 3591 ;
C.J.U.E., 15 novembre 2011, Dereci e.a., C-256/11, Rec., I, 2011, p. 11315 ;
59 | P a g e
C.J.U.E., 8 novembre 2012, Iida, C-40/11, non encore publié ;
C.J.U.E., 26 février 2013, Åkerberg Fransson, C-617/10, non encore publié ;
C.J.U.E., 12 décembre 2013, Hay, C-267/12, non encore publié.
b) Tribunal
T.P.I., 28 janvier 1999, D c. Conseil, T-264/97 ;
T.P.I., arrêt du 30 janvier 2003, C / Commission, T-307/00 ;
T.P.I., 10 septembre 2008, Gualtieri c. Commission, T-284/06, Rec., 2008, II, p. 170.
c) Tribunal de la fonction publique
T.F.P., 14 octobre 2010, W c. Commission, F-86/09, non publié.
2. Conseil de l’Europe
a) Commission
Commiss. Eur. D.H., déc. du 3 mai 1983, X. et Y. c. Royaume-Uni, n° 9369/81, D.R. 32, p. 220 ;
Commiss. Eur. D.H., déc. du 12 octobre 1983, B. c. Royaume-Uni, n° 9237/81, D.R. 34, p. 73 ;
Commiss. Eur. D.H., déc. du 14 mai 1986, S. c. Royaume-Uni, n° 11716/85, D.R. 47, p. 274 ;
Commiss. Eur. D.H., déc. du 9 octobre 1989, C et L.M. c. Royaume-Uni, n° 14753/89 ;
Commiss. Eur. D.H., déc. du 10 février 1990, B. c. Royaume-Uni, n° 16106/90, D.R. 64, p. 284 ;
Commiss. Eur. D.H., Kerkhoven et Hinke c. Pays-Bas, déc. du 19 mai 1992, n° 15666/89.
b) Cour européenne des droits de l’homme
Cour eur. D.H., arrêt du 22 octobre 1981, Dudgeon c. Royaume-Uni, n° 7525/76 ;
Cour eur. D.H., arrêt du 10 octobre 1986, Rees c. Royaume-Uni, n° 9532/81, § 49 ;
Cour eur. D.H., arrêt du 26 octobre 1988, Norris c. Irlande, n° 8225/78 ;
Cour eur. D.H., arrêt du 27 septembre 1990, Sheffield et Horsham c. Royaume-Uni, n°s
22985/93 et 23390/94 ;
Cour eur. D.H., arrêt du 22 avril 1993, Modinos c. Chypre, n° 15070/89 ;
Cour eur. D.H., arrêt du 16 septembre 1996, Gaygusuz c. Autriche, n° 17371/90 ;
Cour eur. D.H., arrêt du 30 juillet 1998, Cossey c. Royaume-Uni, n° 10843/84 ;
60 | P a g e
Cour eur. D.H., arrêt du 27 septembre 1999, Smith et Grady c. Royaume-Uni, n°s
33985/96 et 33986/96 ;
Cour eur. D.H., arrêt du 21 décembre 1999, Salgueiro Da Silva Mouta c. Portugal, n°
33290/96 ;
Cour eur. D.H., déc. du 10 mai 2001, Mata Estevez c. Espagne, n° 56501/00 ;
Cour eur. D.H., arrêt du 11 juillet 2002, I. c. Royaume-Uni, n° 25680/94 ;
Cour eur. D.H., arrêt du 11 juillet 2002, Christine Goodwin c. Royaume-Uni, n° 28957/95 ;
Cour eur. D.H., arrêt du 9 janvier 2003, L. et V. c. Autriche, n°s 39392/98 et 39829/98 ;
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Cour eur. D.H. (GC), arrêt du 22 janvier 2008, E.B. c. France, n° 43546/02 ;
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European Union Agency for Fundamental Rights, Homophobie, transphobie et discrimination
fondée sur l’o ie tatio sexuelle et l’ide tit de ge e da s les États e
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des effets des a tes d tat i il », COM (2010) 747 ;
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intérieures sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative au
droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner
librement sur le territoire des États membres, PE 319.328 ;
Rapport de la Commission au Parlement européen et au Conseil du 10 décembre 2008 sur
l appli atio de la di e ti e
/ /CE elati e au d oit des ito e s de l U io et des
membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États
membres, COM (2008) 840 ;
‘ seau E.U. d e pe ts i d pe da ts e
ati e de d oits fo da e tau , « Avis sur la
possibilité de la reconnaissance, par chaque Etat membre, du mariage homosexuel ouvert
aux Pays-Bas et e Belgi ue et le ôle de l e eptio d o d e pu li international du droit
international privé de chaque Etat membre ».
4. Divers
Circulaire relative à la loi du 13 février 2003 ouvrant le mariage à des personnes de même
sexe et modifiant certaines dispositions du Code civil, M.B., 16 mai 2003 ;
Circulaire remplaçant la circulaire du 8 mai 2003 relative à la loi du 13 février 2003 ouvrant le
mariage à des personnes de même sexe et modifiant certaines dispositions du Code civil,
M.B., 27 janvier 2004 ;
Position commune (CE) No 6/2004 arrêtée par le Conseil le 5 décembre 2003 en vue de
l'adoption de la directive 2004/. . ./CE du Parlement européen et du Conseil du . . . relative
au droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner
librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et
abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE,
75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE ;
63 | P a g e
Proposition modifiée de Directive du Parlement européen et du Conseil du 15 avril 2003
relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leur famille de circuler et de
séjourner librement sur le territoire des États membres, COM (2003) 199 ;
Proposition de Directive du Parlement européen et du Conseil du 25 mai 2001 relative au
droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner
librement sur le territoire des États membres, COM (2001) 257 ;
Réponse donnée par Mme Reding au nom de la Commission à une question parlementaire
de M. Oreste Rossi le 1er décembre 2010, J.O.U.E. n° C 243 E du 20 août 2011 ;
Résolution législative du Parlement européen du 11 février 2003 sur la proposition de
directive du Parlement européen et du Conseil relative au droit des citoyens de l'Union et
des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États
membres COM (2001) 257.
64 | P a g e