Academia.eduAcademia.edu

Processus d'élaboration d'une stratégie de communication multimédia

LA COMMUNICATION POUR LE DÉVELOPPEMENT MANUEL 1 Atelier régional bilingue Les méthodologies d'élaboration et de mise en œuvre des stratégies sectorielles de communication multimédias et des politiques nationales de communication pour le développement Niamey, Niger, 1-5 avril 2002 Guide méthodologique d’élaboration d’une stratégie de communication multimédia LA COMMUNICATION POUR LE DÉVELOPPEMENT MANUEL 1 Atelier régional bilingue Les méthodologies d'élaboration et de mise en œuvre des stratégies sectorielles de communication multimédias et des politiques nationales de communication pour le développement Niamey, Niger, 1-5 avril 2002 Guide méthodologique d’élaboration d’une stratégie de communication multimédia Groupe de la communication pour le développement Service de la vulgarisation, de l’éducation et de la communication Division de la recherche, de la vulgarisation et de la formation Département du développement durable ORGANISATION DES NATIONS UNIES POUR L’ALIMENTATION ET L’AGRICULTURE Rome, 2002 Les appellations employées dans cette publication et la présentation des données qui y figurent n’impliquent de la part de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture aucune prise de position quant au statut juridique des pays, territoires, villes ou zones ou de leurs autorités, ni quant au tracé de leurs frontières ou limites. Tous droits réservés. Les informations ci-après peuvent être reproduites ou diffusées à des fins éducatives et non commerciales sans autorisation préalable du détenteur des droits d’auteur à condition que la source des informations soit clairement indiquée. Ces informations ne peuvent toutefois pas être reproduites pour la revente ou d’autres fins commerciales sans l’autorisation écrite du détenteur des droits d’auteur. Les demandes d’autorisation devront être adressées au Chef du Service des publications, Division de l’information, FAO, Viale delle Terme di Caracalla, 00100 Rome, Italie ou, par courrier électronique, à copyright@fao.org © FAO 2002 TABLE DES MATIÈRES Abréviations v Avant propos vii Préface ix Introduction 1 1. 2. Processus d’élaboration d’une stratégie de communication multimédia 1.1 Modèles de planification d’une stratégie de communication pour le développement 1.2 Processus générique de planification d’une stratégie de communication pour le développement Application du processus d’élaboration d’une stratégie de communication multimédia 2.1 Analyse de la situation 2.1.1 Les domaines d’investigation 2.1.2 Les méthodes et techniques d’investigation 2.2 Elaboration de la stratégie 2.2.1 Le cadre stratégique 2.2.2 Volet opérationnel de la stratégie 2.3 Validation de la stratégie 2.3.1 Le document de stratégie 2.3.2 Le processus de validation 2.4 Aperçu général de la planification et de la mise en œuvre de la communication: considérations pratiques 2.4.1 Eléments majeurs de la planification de la communication 2.4.2 Principaux aspects et étapes de la mise en œuvre d’une activité de communication 2.4.3 Les principaux médias du développement rural 5 8 11 15 15 15 16 19 20 25 31 31 32 32 32 34 36 Annexes A1- Cadre de planification d’une stratégie IEC A2- Cadre de suivi-évaluation d’une stratégie de communication A3- Plan de travail 39 40 41 41 Bibliographie indicative 43 iii Liste des encadrés Encadré 1. Le concept de développement Encadré 2. Le concept de communication Encadré 3. La communication pour le développement Encadré 4. Cas d’un projet de communication au Burundi Encadré 5. La notion de stratégie de communication Encadré 6. Processus de planification et de mise en œuvre d’une stratégie de communication pour le développement Encadré 7. Classification des méthodes de recherche Encadré 8. Fiche de synthèse de l’analyse de la situation Encadré 9. Analyse du problème de communication Encadré 10. Critères de sélection des canaux et médias Encadré 11. Le suivi et l’évaluation Encadré 12. Processus de conception et de réalisation d’une évaluation iv 2 2 3 3 8 12 17 17 19 25 27 31 ABRÉVIATIONS AED AIDSCOM AIF CAP FAO FNUAP Healthcom IEC IOV IST JHU/CCP PNUD UNICEF Academy for Educational Development AIDS Communication Agence Intergouvernementale de la Francophonie Connaissances, Attitudes et Pratiques Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture Fonds des Nations Unies pour la Population Health Communication Information, Education et Communication Indicateurs Objectivement Vérifiables Infections Sexuellement Transmissibles The Johns Hopkins University/Center for Communications Programs Programme des Nations Unies pour le Développement Fonds des Nations Unies pour l’Enfance v AVANT PROPOS Le Service de la vulgarisation, de l’éducation et de la communication de la FAO (SDRE), en organisant à Niamey au Niger, un atelier régional sur les méthodologies de définition et de mise en œuvre des politiques nationales et des stratégies sectorielles de communication pour le développement, a visé deux objectifs majeurs: renforcer l’impact de ses interventions au sein de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et rendre disponibles les méthodologies élaborées et éprouvées sur le terrain dans le domaine des politiques et des stratégies de communication. En effet, c’est au sein des pays membres de la CEDEAO que la plupart des expériences que la FAO a menées se sont déroulées: Mali, Guinée Bissau, CapVert, Burkina Faso et Niger; il nous a semblé tout à fait logique de sensibiliser les autres pays de cette aire géographique, riche de 15 pays et de 230 000 000 d’habitants et ce, afin de répondre à des demandes de plus en plus nombreuses en vue de se doter de politiques nationales de communication. Les autres pays membres ont ainsi pu être informés des avancées et des contraintes vécues par ceux qui ont déjà initié l’exercice; ils en ont tiré les leçons qui s’imposent pour réussir l’élaboration de leurs politiques de communication ou de leurs stratégies de communication multimédias dans le cadre des projets et programmes de développement. Après dix ans d’appui aux pays membres d’Afrique francophone et lusophone, le transfert des expériences menées et des leçons apprises s’avérait utile, voire indispensable; cette initiative s’inscrit dans les missions du Service de la vulgarisation, de l’éducation et de la communication: le renforcement des capacités techniques nationales. En rendant disponibles le savoir et le savoir-faire nécessaires pour la définition et la mise en œuvre des politiques nationales et des stratégies sectorielles de communication pour le développement, la FAO apporte sa modeste contribution à travers les différents manuels et les études de cas (au Mali, en Guinée Bissau, au Burkina et au Niger) issus de l’atelier de Niamey; c’est aussi une contribution aux cadres des institutions gouvernementales et non gouvernementales afin qu’ils puissent mieux concevoir des politiques et des stratégies de communication notamment au service du développement rural durable et de la sécurité alimentaire. Ester Zulberti Chef, Service de la vulgarisation, de l’éducation et de la communication vii PRÉFACE Aujourd’hui, il est courrant d’entendre évoquer la nécessité d’élaborer une stratégie de communication; les décideurs, les planificateurs, les responsables des projets et des programmes de développement sont conscients de l’importance de planifier leur stratégie de communication et de la mettre en œuvre. Mais comment? Avec qui? Et selon quelles méthodologies? Le constat général dans les projets et programmes de développement est que l’on trouve des plans médias en lieu et place de véritables stratégies de communication; ceux-ci sont le fait de journalistes, d’hommes et de femmes de bonne volonté qui croient en la communication et qui voudraient contribuer à mettre les médias du développement rural et les outils de communication de proximité au service des communautés; les étapes méthodologiques qui sont parfois rigides dans l’élaboration d’une stratégie de communication, telle que l’identification des groupes cibles avant le choix des supports, médias et outils, n’est pas toujours respectée; où encore, l’achat d’équipements et de matériels audiovisuels est fait dès le lancement du projet, sans au préalable avoir analysé les acteurs (groupes cibles), et les activités de communication qui déterminent les choix des équipements; c’est parce que je souhaite documenter les visites intervillageoises par des photos que je vais acheter un appareil photo et non l’acquérir pour me demander ensuite ce que je veux en faire. La stratégie de communication ne consiste pas non plus à faire de l’«agitation» médiatique: une banderolle pour l’inauraguration de l’atelier d’un projet, une couverture de l’évènement par la radio et la télévision, une interview du responsable du projet ou du programme de terrain et le tour est joué: c’est oublier que la planification et la mise en œuvre de la communication requierent une masse critique de temps, de ressources financières et humaines et d’activités continues et variées, multimédias. Il est important de souligner qu’en dépit de l’utilisation croissante dans plusieurs pays du mot «communication» pour désigner les activités de presse et de relations publiques d’une société ou d’un établissement, les concepts de communication dans le contexte du développement pourraient se résumer par la définition suivante:«la communication pour le développement c’est l’utilisation du processus de communication, des techniques et des médias pour aider les gens à prendre conscience de leur situation et des options à leur disposition pour toute action de changement, à résoudre le conflit social et à travailler vers un consensus, à aider les gens à planifier l’action de changement et développement durable, à aider les populations à saisir les connaissances et les ix qualifications en vue d’améliorer leur condition et celle de leur communauté, et améliorer l’efficacité des établissements publics. Les activités de communication doivent être programmées dans le cadre d’une stratégie globale qui prenne en compte la recherche, la définition d’objectifs dans: l’identification des publics, la conception des messages adaptés, le choix des canaux de diffusion, le suivi et la rétro-information. Les approches multimédias qui utilisent de façon combinée différents canaux de communication qui se renforcent mutuellement donnent les meilleurs résultats». Les stratégies de communication multimédia viennent en appui à la réalisation des objectifs et activités des projets et programmes de développement. Il s’agit de traduire en termes de communication les activités et actions qui sont susceptibles de lever tout ou partie des contraintes identifiées pendant l’analyse de la mise en œuvre des activités d’un programme ou projet de développement. La stratégie de communication reste sectorielle et est nécessaire pour tout projet ou programme de développement. Elle doit être élaborée pendant la phase de formulation des projets ou programmes, dans tous les cas, elle doit susciter, accompagner la concertation et le dialogue entre tous les partenaires et acteurs du programme ou du projet. Cette stratégie doit se baser sur la méthodologie de l’approche participative et indiquer par ailleurs les outils de communication les plus appropriés pour sa réalisation. Les approches sont différentes dans le domaine de l’élaboration des stratégies de communication à tel point qu’on se demande parfois si nous sommes en présence d’une impossibilité de systématiser et de faire une diachronie des propositions existantes devant aboutir à une recherche d’homologie de structures et partant à une approche holistique de la question. Le Professeur Hugues Koné, Docteur d’Etat en Sciences de l’Information et de la Communication, ancien Directeur du Centre de recherche en communication (CERCOM) de l’Université nationale de Côte d’Ivoire, Communicateur de renom et pionnier du Conseil Africain pour l’enseignement de la Communication, ne renonce pas à la rigueur scientifique qui a assis sa réputation. Dans la consultation qu’il a conduit pour la FAO dans le cadre de ce guide méthodologique pour l’élaboration d’une stratégie de communication multimédia, il écrit: «que de nos jours, la conception des stratégies de communication efficaces se fait selon une démarche alliant rigueur, professionnalisme, travail d’équipe, participation et créativité». Koné, dans un premier temps, nous accorde sur les concepts de base suivants: développement, communication, et communication pour le développement. Il préfère faire appel aux expériences accumulées sur le terrain en Afrique, en Amérique Latine, en Asie et ailleurs, y compris dans les pays développés et dans des secteurs et dommaines de développement variés tels que, la santé, la santé de la reproduction, la nutrition, l’environnement, l’agricuture et l’élevage pour examiner successivement dans ce guide: • le processus d’élaboration d’une stratégie de communication multimédia, x • • • la manière de mettre en application ledit processus, la structure d’un document de stratégie de communication multimédia, les considérations pratiques liées à la planification et à la mise en œuvre de la communication. Ce guide a fait preuve d’un discernement peu commun et d’une perspicacité en présentant ce qui existe de meilleur dans le domaine des méthodologies d’élaboration des stratégies de communication multimédia. Jean-Pierre Ilboudo Superviseur technique des projets de définition des politiques de communication en Afrique Francophone et Lusophone xi INTRODUCTION Depuis leur accession à la souveraineté nationale, les pays en développement en général et ceux du continent africain en particulier ont entrepris de nombreuses opérations de développement et de modernisation, souvent avec l'appui de la communauté internationale pour améliorer la qualité de vie des populations. Malheureusement, les résultats obtenus sont plutôt en deçà des espérances comme en témoignent le niveau des principaux indicateurs de développement de ces pays, le niveau et la qualité de vie de la population ainsi que de nombreux rapports faisant autorité (Banque Mondiale, PNUD, FNUAP, etc.). Parmi les nombreuses raisons avancées pour expliquer cette situation, on peut citer l'existence d'un déficit de communication entre les décideurs ou acteurs du développement et les populations bénéficiaires: en effet, dans de nombreux cas, les populations ont développé des comportements de résistance plus ou moins directs face à des interventions qui leur «tombaient dessus» sans que leurs préoccupations, leurs besoins, leur vision, leur participation et leur point de vue aient été sollicités d'une part, sans que les motivations des acteurs du développement leur aient été clarifiées au préalable d'autre part. On a pu ainsi établir que la communication était un facteur essentiel dans le processus de développement même si la manière de l'utiliser à bon escient n'était pas encore maîtrisée. Aujourd'hui, grâce à l'expérience accumulée sur le terrain en Afrique, en Amérique Latine, en Asie et ailleurs, y compris dans les pays développés, on en sait beaucoup plus sur les stratégies de communication pour promouvoir le développement et sur les méthodologies à suivre pour leur élaboration. Une lecture panoramique rapide permet de constater que cette expérience a été acquise dans plusieurs domaines du développement notamment: • la santé: santé en général, santé de la reproduction, planification familiale, santé de l'enfant, IST/VIH-SIDA, nutrition, paludisme, soins de santé primaire, vaccination et hygiène par exemple; • la population: population en général, genre, collecte de données, liens population et développement, vie familiale; • l'environnement: pollution, environnement urbain, désertification/déforestation, protection de la faune, phénomènes environnementaux planétaires (effet de serre, par exemple); • l'agriculture et l'élevage: modernisation de l'agriculture, vulgarisation de nouvelles variétés, vaccination du bétail, développement rural, hydraulique; • autres: éducation et alphabétisation, toxicomanie et tabagisme, éradication de la pauvreté, prévention des catastrophes, sécurité routière; 1 Avant de présenter le processus d'ensemble d'élaboration d'une stratégie de communication multimédia puis de préciser la méthodologie à suivre pour son élaboration, il convient de s'accorder sur la définition des concepts de base suivants: développement, communication et communication pour le développement. Encadré n° 1: Le concept de développement De manière synthétique, le développement peut être défini comme un long processus de changement d'ordre quantitatif et qualitatif intervenant dans une société au plan politique, économique, social, culturel et scientifique et menant vers un bien-être individuel et collectif. Est dit humain durable le développement qui permet de satisfaire les besoins des générations actuelles sans compromettre la satisfaction de ceux des générations futures et qui est centré sur l'homme (développement de l'homme par l'homme et pour l'homme, de tout l'homme et de tous les hommes) et sur la planète (sauvegarde de l'équilibre écologique). Le développement humain implique trois conditions essentielles: vivre longtemps et en bonne santé, acquérir un savoir et avoir accès aux ressources nécessaires pour jouir d'un niveau de vie convenable. Encadré n° 2 : Le concept de communication La communication est un processus dynamique au cours duquel un émetteur et un récepteur échangent et partagent des informations, des idées, des opinions, des sentiments ou des réactions. Elle peut se faire au niveau de l'une des sphères suivantes: • personne à personne (deux personnes en interaction) ou groupe (une personne ou plusieurs s’adressent à un groupe): c'est la communication interpersonnelle; • organisation (dans un cadre institutionnel): l'émetteur peut représenter l'institution du fait de sa fonction: c'est la communication institutionnelle ou organisationnelle; • masse (les récepteurs constituent un ensemble disparate et dispersé): c'est la communication de masse. Le processus de communication implique: • des participants (émetteur/récepteur), chacun avec ses motivations et ses capacités; • des messages: séquences de signes assemblés selon des règles connues et véhiculant une signification; • des canaux: voies par lesquelles passe un message depuis sa production par l’émetteur jusqu’à sa réception. On peut utiliser dans un canal donné un média (moyen ou support utilisé pour véhiculer le message en lui donnant une forme); • un effet ou impact: résultat de l'acte de communication; • le feedback: rétroaction du récepteur vers l'émetteur en réaction au message; • un contexte: environnement physique, psychologique, politique et socio-culturel dans lequel se déroule la situation de communication. le schéma de base de la communication Canal Récepteur(s) Emetteur Message Bruit Feedback 2 Encadré n° 3 : La communication pour le développement Elle consiste en l'utilisation de façon planifiée et organisée des techniques et des moyens de communication (médiatiques et non médiatiques) pour promouvoir le développement, à travers un changement d'attitude et/ou de comportement, en diffusant l'information nécessaire et en suscitant la participation active et consciente de tous les acteurs, y compris des bénéficiaires au processus. Pour mettre en œuvre une communication pour le développement, l'on doit concevoir des stratégies à partir d'une bonne connaissance du contexte ou milieu, mobiliser des ressources, élaborer des messages appropriés et en organiser la circulation vers ou entre les personnes concernées (cibles, bénéficiaires, acteurs, participants) à travers des canaux et gérer ce processus pour obtenir un impact dans le sens du développement. Encadré n° 4: Cas d'un projet de communication au Burundi Le Ministère de la communication met en œuvre depuis 1988 un projet IEC en matière de population et planification familiale avec l'appui du FNUAP et la collaboration d'autres ministères (Santé, Action sociale et Promotion féminine, Planification du développement, etc.). Ce projet vise à accroître l’usage de la contraception, jusqu’alors très peu répandue malgré la disponibilité des services cliniques. Objectifs du projet - Amener la population à prendre conscience de la poussée démographique et de ses conséquences sur le bien-être individuel et familial et sur le développement humain durable - Contribuer à l'augmentation du taux de prévalence contraceptive à 35 % au moins. Cible du projet - Primaire: population, notamment rurale, hommes et femmes mariés, femmes et hommes en âge de procréer, jeunes non scolarisés et déscolarisés de plus de 12 ans. - Secondaire: agents de sensibilisation, membres des comités IEC provinciaux et communaux, leaders d'opinion, décideurs politiques et religieux, autorités administratives. Canaux et supports de communication - Utilisation des canaux institutionnels tels que le système éducatif et les ministères ayant du personnel de terrain - Utilisation des mass-media (presse écrite, télévision, radio) - Exploitation des canaux socio-traditionnels (chanson, ikembe, inanga, théâtre, etc.) pour toucher les analphabètes - Organisation de conférences, séminaires, journées, colloques, etc. pour toucher les décideurs, les fonctionnaires et les intellectuels. Nous allons examiner successivement: - le processus d'élaboration d'une stratégie de communication multimédia; - la manière de mettre en application ledit processus; - la structure d'un document de stratégie de communication multimédia; - les considérations pratiques liées à la planification et à la mise en œuvre de la communication. 3 1. PROCESSUS D'ÉLABORATION D'UNE STRATÉGIE DE COMMUNICATION MULTIMÉDIA De nos jours la conception de stratégies de communication efficaces se fait selon une démarche alliant rigueur, professionnalisme, travail d'équipe, participation et créativité. Cette démarche respecte les principes d'une bonne planification soit: • avoir une pensée organisée; • lier les activités et les ressources aux résultats escomptés; • déterminer des indicateurs de performance et des moyens de vérification; • répartir les responsabilités et communiquer de manière concise et sans ambiguïté; • s'adapter à une situation en évolution et évaluer les risques. Par ailleurs, l'élaboration des stratégies doit s'inspirer de l'expérience acquise en matière de communication pour le développement. • Les programmes de développement doivent comprendre dès le départ un volet communication avec des objectifs bien définis car il leur vient en appui. Les objectifs de communication doivent être réalistes, précis, mesurables et comporter un délai d'exécution. • L'étude et la segmentation de l'audience ou de la communauté cible sont cruciales car le changement est attendu au niveau de personnes ou de groupes, et les opinions, les attitudes et comportements, les styles de vie et la réaction aux messages diffèrent d'un groupe à l'autre. De ce point de vue, la recherche socio-culturelle peut être exploitée pour développer des actions de communication culturellement adaptées au milieu concerné. • La recherche doit être présente à toutes les phases critiques du processus de planification, d'exécution et d'évaluation d'une intervention de communication. A la phase de la planification, elle fournit les informations nécessaires aux choix stratégiques. Pendant l'exécution, on l'utilise pour développer des messages et du matériel appropriés aux cibles visées (connaissance de l'auditoire, prétest) et éventuellement pour résoudre des problèmes inattendus (recherche opérationnelle). Enfin, elle permet de suivre et d'évaluer l'intervention. • Les approches multimédias sont les plus efficaces: la communication ne se réduit pas aux médias, si puissants soient-ils; elle utilise d'autres canaux de communication formels et informels, y compris interpersonnels. • Les messages doivent être clairs, simples, spécifiques, faciles à comprendre et répétés souvent. En outre, ils doivent être cohérents et coordonnés même s'ils proviennent de différentes sources: ministères de l'agriculture, de la santé, de 5 la promotion de la femme, de l'environnement, de la jeunesse, ONG... Enfin, ils doivent provenir d'une source crédible aux yeux de la cible. • L'approche participative (implication des parties prenantes, y compris les bénéficiaires) doit être privilégiée autant que possible car il faut «parler avec» les populations et non «parler aux» populations (communication de haut en bas). • L'approche genre doit être intégrée à toutes les étapes de la conception et de la mise en œuvre d'une intervention de communication: prise en considération des préoccupations et participation effective des deux sexes, respect de l'équilibre ou de l'équité entre les sexes, rejet des stéréotypes de type sexiste, etc. Enfin, il est important de noter que la communication pour le développement vise le changement (ou l'adoption) de comportement par une population cible et, à plus long terme, le changement social. De ce point de vue, le changement de comportement durable est un processus plus ou moins long qui dépend, outre de la communication, de facteurs tels que la disponibilité, l'accessibilité et la qualité des services, le contexte socio-culturel et politique, le niveau d'instruction et le statut socio-économique. Il suppose souvent, en Afrique, un minimum de changement social compte tenu de l'emprise des relations et des structures sociales sur l'individu. Il passe par des étapes qu'on peut schématiser comme suit: Processus du changement de comportement: auditoires et stratégies de communication possibles Auditoire non informé Auditoire conscient, concerné, informé Auditoire motivé à changer L'auditoire essaie le nouveau comportement L'auditoire soutient le nouveau comportement * Provoquer la prise de conscience * Recommander une solution * Identifier les obstacles et les bénéfices du changement de comportement * Fournir l'information logistique * Se servir des groupes communautaires pour conseiller et motiver * Fournir l'information sur son usage correct * Encourager son usage continu en mettant l'accent sur les bénéfices * Réduire les obstacles par la résolution des problèmes * Renforcer les compétences par des tests de comportement * Assistance sociale * Rappeler les bénéfices du nouveau comportement * Vérifier que l’auditoire s’approprie ce nouveau comportement *Assistance sociale Source : BM, 1999 : 16 6 Il existe bien une relation entre communication et changement de comportement comme l'indiquent les deux figures suivantes. Figure 1 : Pourcentage de femmes et d’hommes utilisant les contraceptifs modernes selon le nombre de canaux de communication les ayant touchés (PCS, Kenya, 1994 ; N = 4 459) (Le taux de prévalence national pour les contraceptifs modernes est de 20,4 %) Canaux : Radio Théâtre radiophonique Matériel imprimé Agent de DBC Figure 2 : Pourcentage de femmes et d’hommes utilisant les contraceptifs modernes selon le nombre d’étapes de changement de comportement parcourues (idem, 1994) Etapes du changement : Connaissance Attitude En parle à des amis En parle avec le conjoint Conjoint approuve Plaidoyer Avant de présenter la méthodologie d'élaboration de stratégies de communication pour le développement, la notion de stratégie de communication ainsi que quelques modèles seront rappelés. 7 Encadré n° 5: La notion de stratégie de communication En communication pour le développement, la stratégie est un plan-cadre comprenant une combinaison d’interventions de communication capables de susciter les changements nécessaires en matière de connaissances, d’opinions, d’attitudes, de croyances ou de comportements au niveau de la population visée en vue de résoudre un problème de développement, selon un calendrier donné (souvent à moyen terme) et compte tenu des ressources disponibles. Elle constitue un engagement et une boussole permettant de mobiliser et d’orienter les actions et les énergies des différents partenaires. La stratégie de communication diffère • d'une politique de communication, document écrit qui fixe les finalités, les grandes lignes directrices et les standards devant guider l'utilisation et l'organisation de la communication pour atteindre les buts de développement que se donne un Etat ou une institution. Aujourd'hui, plusieurs pays africains se sont dotés d'une politique nationale de communication pour le développement; • d'une campagne de communication qui est un ensemble coordonné d'activités de communication médiatiques et non médiatiques menées de manière intensive sur une période relativement courte et dans un espace donné en vue d'atteindre des effets précis (exemple: campagne de lutte contre les feux de brousse en début de saison sèche). Elle nécessite une stratégie propre qui peut découler d'une stratégie de communication d'ensemble. 1.1 MODÈLES DE PLANIFICATION D'UNE STRATÉGIE DE COMMUNICATION POUR LE DÉVELOPPEMENT Il existe des dizaines de modèles dans la littérature parmi lesquels on peut citer: • le modèle «5» de Healthcom /l'AED (Academy for Educational Development) 1- Faire l'évaluation initiale 2- Planifier 3- Préparer le matériel 4- Mettre en œuvre 5- Evaluer • le «Processus P» de JHU/CCP 1- Analyse 2- Conception de la stratégie 3- Développement de messages et de matériel 4- Gestion, mise en œuvre et suivi 5- Evaluation d'impact • le modèle de AIDSCOM (communication en matière de SIDA): 1- Evaluation/Planification: recherche; stratégie; pretest; plan final 2- Intervention: production; distribution 3- Suivi: audit du processus; évaluation des produits; évaluation d'impact 8 • le processus en 11 étapes de Sylvie Cohen (FNUAP, 1993) 1- Identifier les objectifs de communication et ceux du programme 2- Sélectionner les groupes d'auditoires, par ordre de priorité 3- Identifier les changements souhaités pour chaque cible 4- Identifier les facteurs du milieu favorables ou défavorables aux changements souhaités 5- Déterminer les types d'activités d'IEC nécessaires pour provoquer les changements 6- Exposer les grandes lignes de messages clés et des stratégies de message 7- Déterminer la gamme des canaux de communication 8- Identifier des stratégies d'organisation et de gestion (y compris suivi et évaluation) 9- Calculer le montant des ressources nécessaires pour mener les activités 10- Prévoir des délais réalistes pour les actions à mener ainsi que leur chronologie 11- Examiner la stratégie, l'adapter et la faire adopter • le «cadre A» de planification en Plaidoyer de JHU/CCP: 1- Analyse 2- Stratégie 3- Mobilisation 4- Action 5- Evaluation 6- Continuité 9 • le modèle de l'approche participative communautaire de la FAO (1995) PHASES ETAPES 1- Information/Connaissance 2- Sensibilisation Prise de conscience I- PROGRAMMATION DES ACTIONS 3- Identification des problèmes/ Recherche de solutions 4- Organisation et programmation 5- Formation thématique II- REALISATION ET GESTION DU PROGRAMME 6- Evaluation des actions en cours III- SUIVI-EVALUATION DU PROGRAMME 7- Suivi-évaluation IV- AUTO-PROMOTION 8- Retour à la phase de programmation Une analyse comparative de ces différents modèles fait apparaître des points communs dans la mesure où l'on retrouve partout au moins les deux grandes phases suivantes: • analyse de la situation (phase préliminaire); • plan ou stratégie de communication (phase de conception et de préparation de la mise en œuvre). 10 1.2 LE PROCESSUS GÉNÉRIQUE DE PLANIFICATION D'UNE STRATÉGIE DE COMMUNICATION POUR LE DEVELOPPEMENT Le processus de planification d'une stratégie de communication est déterminé par les étapes d'élaboration et de mise en œuvre des stratégies de communication. On peut le résumer dans la figure ci-après. Figure 3: Le processus de planification et de mise en œuvre de la communication RECHERCHE (perception du public, canaux de communication, etc.) PLAN (conception du message, choix des canaux, etc.) MISE AU POINT DU MATÉRIEL TESTS PRÉLIMINAIRES ET ADAPTATION SUIVI ÉVALUATION ET ADAPTATION MISE EN OEUVRE De manière plus détaillée, le processus peut être représenté comme suit. 11 Encadré n° 6: processus de planification et de mise en œuvre d'une stratégie de communication pour le développement 0 - Mener les recherches préliminaires ou formatives nécessaires en vue d'effectuer une analyse de la situation rigoureuse et systématique 1- Identifier, définir, sélectionner et clarifier le(s) problème(s) de développement puis les problèmes que la communication peut résoudre à partir de l’analyse de la situation 2 - Définir le but et les objectifs de communication 3 - Sélectionner et analyser les groupes cibles à toucher 4- Déterminer les approches de communication les plus appropriées 5 - Elaborer les messages clés 6 - Sélectionner les canaux et les supports de communication 7 - Planifier le volet opérationnel de la stratégie * cadre institutionnel : coordination, partenaires, médias, structures d’appui technique * plans et documents connexes: production du matériel d'IEC, formation, planning des activités, suivi et évaluation, budget 8 - Valider la stratégie 9 - Développer les messages et le matériel de communication (esquisses, pré-test et finalisation) 10 - Exécuter la stratégie * mise en place et renforcement des structures * mobilisation des ressources nécessaires * production/reproduction du matériel de communication * réalisation des activités 11 - Faire le suivi et l’évaluation puis la révision de la stratégie 12 En ce qui concerne la phase de planification proprement dite - sur laquelle se concentre le présent document - la figure 4 ci-dessous en donne un aperçu. Figure 4: Le processus de planification d'une stratégie de communication pour le développement ANALYSE DE LA SITUATION • Problème(s) de développement • Contexte de l'intervention et programme existant • Parties prenantes • Ressources en matière de communication PROBLEMES DE COMMUNICATION ?? NON OUI ELABORATION DE LA STRATEGIE I- CADRE STRATEGIQUE • Objectifs de communication • Groupes cibles • Types d'approches • Messages clés • Canaux et supports de communication II- VOLET OPERATIONNEL DE LA STRATEGIE • Cadre institutionnel • Plans connexes: production, formation et renforcement des capacités • Planning des activités • Plan de suivi-évaluation • Budgétisation VALIDATION DE LA STRATEGIE • L'analyse de la situation permet d'identifier le problème en matière de développement ainsi que les questions de communication qui lui sont liées. Elle permet également d'identifier les forces et les faiblesses, les atouts et opportunités d'une part, les obstacles et contraintes d'autre part dont il faudra tenir compte lors de la planification puis de l'exécution de la stratégie ainsi que les risques et postulats sur lesquels cette stratégie est fondée. 13 • Grâce à des messages appropriés, véhiculés vers les cibles concernées par des canaux adéquats, la communication favorise les changements nécessaires à la résolution des problèmes de développement. • Le volet opérationnel de la stratégie prévoit le plan d'exécution ainsi que les éléments nécessaires à la mise en œuvre de la stratégie: cadre institutionnel, production du matériel de communication, formation des ressources humaines, renforcement des capacités institutionnelles (si nécessaire), suivi-évaluation, budget et calendrier d'exécution. 14 2. APPLICATION DU PROCESSUS D'ÉLABORATION D'UNE STRATÉGIE DE COMMUNICATION MULTIMÉDIA 2.1- ANALYSE DE LA SITUATION Toute stratégie de communication doit être originale, pertinente, adaptée et réaliste. Pour cela, elle doit s'appuyer sur une bonne analyse de la situation car c'est elle qui permet de comprendre le problème de développement que l'on veut résoudre, les solutions possibles, le contexte, les parties prenantes concernées, les ressources existantes en matière de communication ainsi que les opportunités dont on dispose pour le résoudre et les contraintes à prendre en compte. 2.1.1- Les domaines d’ investigation Explorer le(s) problème(s) de développement à résoudre • • • • • • Nature exacte, manifestations, importance et acuité, énoncé Causes immédiates et causes lointaines: comportementales, économiques, socio-culturelles, politiques ou autres (manque de structures appropriées, mauvaise qualité des services…) Conséquences du problème et personnes touchées ou pouvant l'être: enfants, femmes enceintes, travailleurs… Justification de son choix: urgence, vulnérabilité, politique nationale... Ce qui a déjà été entrepris pour faire face au problème, résultats obtenus, contraintes, leçons apprises Informations manquantes sur le problème et comment les obtenir. Exemple de problème énoncé: La malnutrition infantile est élevée en milieu rural comme l'atteste le taux relevé par la dernière enquête nutritionnelle. Elle est à la base de 30 % de la mortalité infantile et provient essentiellement du fait que les parents ne donnent pas à leurs enfants une alimentation équilibrée. Etudier le contexte de l'intervention • Contexte national ou d'ensemble: physique, économique, politique, administratif, légal, démographique, social et culturel. • Programme de développement existant: politiques et/ou plans de développement, de population, d'éducation, de santé, agricole, etc.; législation, déclarations politiques, stratégies, activités et expériences antérieures, organisation et ressources disponibles. • Politique nationale de communication pour le développement existante. 15 Analyser les parties prenantes possibles • Parties prenantes institutionnelles: - identification des organismes et groupements publics, privés ou associatifs pouvant être impliqués dans la planification et l'exécution de la stratégie comme ressources ou bénéficiaires - description de leur mission, ressources, expérience, durabilité, localisation, motivation, etc. • Cible potentielle: - caractéristiques démographiques, socio-culturelles, socio-écono miques; statuts et rôles, etc. - connaissances, croyances, attitudes, représentations sociales ou mentales et pratiques liées au problème, besoins et attentes - habitudes de communication. Evaluer les ressources disponibles en matière de communication • • • Mass-media existants: couverture, accès, coût, programmes, efficacité, etc. Autres médias: médias de groupe, traditionnels, nouveaux médias, etc. Autres canaux, lieux et réseaux de communication, langues de communication. Attention! A chaque niveau il convient de: • prendre en compte les spécificités liées au genre; • faire ressortir les forces et faiblesses, les atouts ou opportunités et obstacles et contraintes, susceptibles d'influencer l'exploitation de la communication. - Comme atouts ou opportunités, on peut citer: la disponibilité des services, d'un équipement approprié, des médias ou du personnel de terrain, la volonté politique, le dynamisme des ONG ou des associations traditionnelles, l'existence d'un programme de développement financé, des attitudes favorables au sein de la population, l'existence d'une politique nationale de communication pour le développement, etc. - Comme obstacles et contraintes, on peut trouver: le faible taux d'alphabétisation, des valeurs défavorables au sein de la population, un accès difficile aux médias modernes pour la majorité des membres de la population cible, un personnel mal formé ou peu motivé, des moyens financiers limités, l'absence d'une politique nationale de communication pour le développement, etc. L'analyse de la situation s'appuie sur la recherche formative pour collecter et analyser des données existantes (dite secondaires) ou de nouvelles données (dites primaires). 2.1.2- Les méthodes et techniques d’investigation en communication La gamme de méthodes et de techniques de recherche en matière de communication pour le développement est large, chacune ayant ses forces et ses faiblesses (voir tableau 2 en page 37). Aussi, les combine-t-on souvent, dans un souci de triangulation. 16 Encadré n° 7 : classification des méthodes de recherche Méthodes Caractéristiques Méthodes quantitatives Méthodes qualitatives Information recherchée Combien - Nombre de personnes, de fois, durée, etc. - Tendances statistiques Comment, pourquoi - Exploration, diversité, complexité, particularités - Explication approfondie Méthodes/ techniques (exemples) - Recensement - Enquête ou sondage - Tests quantitatifs - Analyse statistique - Mesure des attitudes - Observation - Entretien individuel approfondi - Discussion de groupe dirigée («focus group») - Analyse de contenu qualitative ou sémiologique - MARP - Représentativité - Objectivité - Standardisation - Possibilité d’analyse des facteurs - Mesure du niveau de départ - Coût modéré, nécessite peu de matériel - Plus accessible à des non professionnels - Rapidité - Analyse en profondeur - Utile pour la conception des messages Avantages Inconvénients - Coût élevé, matériel nécessaire (ordinateur…) - Long - Nécessité de recourir à des spécialistes - Résultats assez superficiels - Source de nombreux biais, surtout au plan de l’interprétation - Généralisation des résultats limitée Encadré n° 8: Fiche de synthèse de l’analyse de la situation * Problème(s) de développement à résoudre: énoncé, personnes touchées, justification de son/leur choix (urgence, vulnérabilité, politique nationale...) * Causes et déterminants du problème: comportementaux, économiques, politiques, socio-culturels, divers * Conséquences du problème * Solutions possibles du problème (dont la communication) * Synthèse du contexte de l’intervention: atouts et opportunités, contraintes et obstacles * Qui est intéressé et peut contribuer à le résoudre (parties prenantes) * Connaissances, attitudes et pratiques des cibles possibles de la communication: besoins, habitudes de communication ou d’apprentissage; facteurs favorables ou défavorables au changement * Ressources de communication existantes: atouts et opportunités, contraintes et obstacles * Recherches complémentaires nécessaires: informations manquantes, sources possibles, méthodologie recommandée 17 Tableau 1: panorama des méthodes et techniques de recherche en communication MÉTHODES INFORMATIONS COÛT DURÉE PERSONNEL OBSERVATIONS Revue documentaire Données secondaires Modéré Semaines Spécialistes: Sociologues, démographes… Evite les duplications, Montre les zones d’ombre Observation Faits concrets: comportement, mesures, obstacles à l'exécution de tâches… Modéré Résultats rapides Observateurs formés, spécialistes en sciences sociales, épidémiologie, etc. Fiable pour connaître les comportements effectifs mais aspects éthiques Etude du milieu/ Profil ethnographique/ Etude socioculturelle Caractéristiques d'ensemble du milieu, monographie Selon la taille et la complexité du milieu Variable (en mois ou rapide) Socioanthropologues, informateurs, assistants Détermine les éléments naturels et socioculturels. Utile pour concevoir des programmes idoines Enquête CAP Etat des CAP dans la population et ses caractéristiques Elevé 3-9 mois Spécialistes : sociologues, statisticiens… Enquêteurs, superviseurs Mesure l’état initial, permet de segmenter la cible et d’évaluer les changements de CAP Entretien individuel approfondi Emotions, logique, réactions, attitudes, préjugés, opinions Modéré 4-8 semaines Sociologues, Interviewers formés Saisit les expressions personnelles et leur signification Discussion de groupe dirigée Opinions, attitudes pratiques, langage, réactions Modéré 4-6 semaines Sociologues, animateurs formés Les gens s’expriment parmi leurs pairs Test sociométrique Réseaux de communication et d’influence Modéré Rapide Psychosociologues Applicable à des petites entités Recherche opérationnelle Données utiles pour la prise de décision Variable Quelques semaines ou mois Chercheurs, enquêteurs Utile pour résoudre des problèmes concrets au cours de l’exécution Méthode Accélérée de Recherche Participative (MARP) Données pour la planification, le suivi et l’évaluation Modéré Rapide Spécialistes, Enquêteurs, Bénéficiaires Utilisation de plusieurs techniques pour des résultats rapides. Participation possible 18 2.2- ÉLABORATION DE LA STRATÉGIE Une fois la situation analysée, il convient de se poser la question fondamentale suivante: les activités de communication sont-elles vraiment nécessaires et peuvent-elles contribuer à résoudre le problème? En effet, ce n'est que si le problème est dû à un manque de connaissances, à des attitudes, des croyances négatives, à un manque de savoir-faire que la communication a un rôle-clé à jouer. Par contre, si le problème relève d'autres facteurs (accessibilité des produits ou des services, pouvoir d'achat, motivation du personnel par exemple), la communication sera alors inefficace. Il faut ensuite sélectionner les problèmes de communication selon des critères comme l’urgence, l’importance, la vulnérabilité, les personnes touchées, la disponibilité des moyens financiers adéquats, etc. L'encadré n° 9 indique la manière de mener l'analyse d'un problème de communication. Le passage de l'analyse de la situation à la stratégie se fait souvent au cours d'un atelier qui permet le partage du savoir entre les partenaires concernés (les résultats des études sont commentés, discutés et enrichis par les participants qui disposent alors d'un savoir minimum commun qu'ils pourront exploiter tout au long du processus de planification) puis l'identification, la sélection et l'analyse des problèmes de communication. Encadré n° 9 : Analyse du problème de communication 1- Quel est le comportement actuel ? Quel est le comportement souhaité? Il y a un problème lorsqu’il existe un écart entre ce qui est et ce qui est souhaité Exemple - Comportement actuel : les mères sèvrent brutalement leur bébé avant l'âge d'un an - Comportement souhaité : les mères doivent sevrer progressivement leur bébé 2- Qu’est-ce qui explique l’écart entre comportement actuel et comportement souhaité? Est-ce un problème dû au manque de connaissances, d’information ? Ou est-il plutôt lié à des attitudes, des croyances, des valeurs ? Est-il dû à l'existence de certaines pratiques ou à un manque de compétence ? Autre ? 3- Quel est le problème prioritaire? Exemples de critères: degré d’urgence, importance de la population concernée, politique nationale, financement disponible, vulnérabilité 4- Qui est touché par le problème? Exemples: adolescentes, femmes en âge de procréer, travailleurs saisonniers, camionneurs, agriculteurs, parents, etc. 5- Qui peut influencer ceux qui sont touchés? Exemples : médecins, enseignants, leaders communautaires, élus locaux… 6- Quelles sont les solutions possibles du point de vue de la communication Exemples: information, éducation nutritionnelle, conseil, formation, plaidoyer, approche participative communautaire 7- Quelles sont les informations non disponibles à l’heure actuelle et qu’il faut collecter? Exemple: niveau initial des connaissances, attitudes et pratiques au sein de la population avant l'intervention 19 2.2.1- Le cadre stratégique Il comporte les éléments de base suivants (voir tableau en annexe): • objectifs de communication • cibles • types d'approches • messages clés ou idées de messages • canaux et supports de communication. Définir et formuler les objectifs de communication Un objectif de communication est la description du résultat final attendu d'une intervention de communication en terme de changement ou de résultat vérifiable au niveau d'un groupe cible donné. Il doit être SMART: • Spécifique • Mesurable • Approprié • Réaliste • situé dans le Temps. L'objectif doit être positionné comme suit: OBJECTIF POLITIQUE (BUT) D'ici 2015, réaliser la sécurité alimentaire dans le pays OBJECTIF DU PROGRAMME D'ici 2010, accroître de 30% la production alimentaire par habitant OBJECTIF DE COMMUNICATION D'ici 5 ans, amener 70% des paysans à accepter les nouvelles semences à haut rendement 20 Tout objectif de communication devrait viser une étape du processus de changement/adoption de comportement chez l'homme (voir ci-dessous). Etapes du changement de comportement 0 - Exposition 1 - Connaissance 2 - Adhésion/Approbation CONTEXTE 3 - Décision FACTEURS PERSONNELS 4 - Exécution/Action 5 - Promotion du comportement Sélectionner les groupes cibles Une fois les objectifs fixés, il convient de sélectionner les composantes de la population que les activités de communication doivent toucher soit parce ce qu'elles sont directement affectées par le problème à résoudre soit parce qu'elles jouent un rôle important dans sa résolution ou sa persistance. Appelés groupes cibles, audiences ou bénéficiaires, on les répartit en deux catégories: • les cibles primaires, celles qui doivent adopter une opinion, une attitude ou un comportement (exemple: ruraux qui doivent lutter contre les feux de brousse); • les cibles secondaires, celles qui peuvent amener les précédentes à adopter le comportement désiré ou à changer (exemple: leaders communautaires et agents de terrain qui font en sorte d'amener les ruraux à renoncer aux feux de brousse). Il est important de procéder à une sélection des cibles prioritaires pour ne pas disperser inutilement les efforts. • Cibles primaires: personnes les plus touchées par le problème; groupe susceptible de profiter le plus du changement de comportement; groupe qui pourrait mieux réagir au comportement promu par exemple. • Cibles secondaires: ceux qui pourraient le mieux reprendre le message diffusé en tant qu'allié; ceux qui pourraient le mieux influencer les cibles primaires pour les amener à prendre connaissance du message et à réagir dans le sens souhaité. 21 Pour maximiser l'efficacité des activités de communication, on procède à la segmentation de la population et à l'affinement des cibles, à partir des données disponibles telles que le sexe, le statut social, le style de vie, la situation professionnelle et l'état de leurs connaissances, attitudes et pratiques par rapport au problème de développement à résoudre. Exemple d'affinement de cibles: • 1er niveau: les ruraux • 2ème niveau: les ruraux de la zone de savane • 3ème niveau: les jeunes ruraux de la zone de savane. Déterminer les types d'approches les plus appropriées pour chaque cible Il s'agit d'énumérer les méthodes ou approches propres ou connexes à la communication que l'on estime appropriées pour toucher chaque cible et provoquer les changements attendus. Il s'agit par exemple: • de l'approche participative communautaire • de la communication interpersonnelle • du conseil • de l'éducation (éducation à la vie familiale, éducation sexuelle, éducation nutritionnelle; éducation par le divertissement, éducation par les pairs…) • de l'information • du marketing social • de la mobilisation sociale • du plaidoyer • de la formation • de l'alphabétisation fonctionnelle, etc. Elaborer les messages clés destinés aux groupes cibles On formule les thèmes ou idées de messages qu'on veut adresser à telle ou telle cible pour provoquer l'effet recherché. Les messages doivent découler de façon logique des objectifs de communication fixés et des changements souhaités au niveau de chaque cible, tout en tenant compte de ses connaissances, attitudes et/ou pratiques vis-à-vis du problème à résoudre. En attendant de développer les messages définitifs au cours de l'étape de la production du matériel de communication (voir phase d'exécution de la stratégie), on détermine ici les thèmes de message. Dans le cas des stratégies plus spécifiques et plus restreintes (par opposition aux stratégies d'ensemble ou nationales), on peut aller plus loin en déterminant également la tonalité de chaque message voire la source qui devrait l'émettre. Au plan du contenu, le message comporte certains des éléments suivants: • le quoi et le pourquoi: quel est le changement attendu et quel est l'intérêt pour la cible de réaliser ce changement; • le où, le quand et le comment: où aller, à quel moment et que faut-il faire ou savoir pour réaliser le comportement; • la garantie et l'appui: ce qui donne crédibilité au message. Exemple: Les feux de brousse appauvrissent le sol ce qui à la longue réduit les récoltes. Pour éviter cela, on peut utiliser les feux de brousse précoces comme c'est le cas dans le pays voisin. 22 Au plan de la tonalité, il s'agit de choisir l'orientation (ou appel) qui sera donnée à chaque message pour accroître ses chances d'influencer la cible visée. Généralement, le choix est fondé sur ce que l'on sait des caractéristiques de la cible et des leçons apprises. Il se fait entre (ou combine) les appels suivants: • message émotionnel (appel aux émotions telles que l'amour, la peur, l'anxiété, la sécurité, etc.) vs message rationnel (appel à l'argumentation logique, aux preuves); • message positif (on montre qu'il y a une solution ou une issue favorable possible au danger) vs message négatif (on présente une situation sombre et menaçante au cas où la cible ne suivrait pas l'action recommandée); • appel au groupe ou à la masse (appel à la pression du groupe) vs appel individualisé (appel à des arguments personnalisés); • message humoristique (l'humour rend le message plaisant tout en permettant de faire passer un contenu sérieux) vs message sérieux (rigueur, sans fioritures); • message à point de vue unique (unilatéral) vs message à plusieurs points de vue (sous forme de débat ou de confrontation d'idées); • message à conclusion définitive (il contient la conclusion que l'on veut faire passer) vs message à conclusion ouverte (on laisse la cible tirer sa propre conclusion et se faire son opinion); • message répétitif (on prévoit que le message soit répété plusieurs fois) vs message unique (message émis une fois). Exemples de tonalité de message: Peur: Le SIDA tue! Raison: Le VIH détruit le système immunitaire et l'organisme ne peut plus se défendre contre les maladies courantes. Positif: Les feux de brousse appauvrissent les sols. En les faisant en début de saison sèche, on protège mieux le sol. Négatif: En continuant de faire les feux de brousse, le sol deviendra improductif à la longue. A la masse: Tous les couples utilisent une méthode contraceptive, pourquoi pas vous ? Individualisé: Pour ceux qui veulent attendre un bon moment avant de faire un autre enfant, il y a des méthodes qui peuvent les aider. Conclusion définitive: Face aux risques du SIDA, il faut se protéger. Conclusion ouverte: Face aux risques du SIDA, plusieurs solutions existent. Enfin, on peut désigner la source qui crédibilisera le message aux yeux de la cible: expert, autorité politique, morale ou religieuse, pair, agent de développement, etc. Il faut donc connaître les critères de crédibilité dans le milieu de l'intervention. 23 Choisir les canaux et supports de communication En communication pour le développement, les types de canaux exploités pour véhiculer le message de la source vers la cible ultime sont les suivants. • Le canal institutionnel: structures publiques et privées reconnues telles que le système politico-administratif, le système éducatif, les réseaux des agents de développement, les ONG, etc. • Le canal «média» ou médiatique: organes médiatiques et nouvelles technologies de la communication tels que la télévision, la radio, la presse écrite, l'affichage et Internet. • Le canal socio-traditionnel ou socio-culturel: leaders d'opinion (chefs coutumiers, notables, cadres, intellectuels, etc.) et autres réseaux informels (voisinage, regroupements divers), moyens, formes et moments privilégiés de communication traditionnels, populaires et interpersonnels (travaux champêtres, veillées, causeries, baptêmes, marchés, mariages, funérailles, déplacements, etc.) • Le canal commercial: systèmes de commercialisation de produits courants tels que les boutiques, librairies, kiosques, pharmacies, etc. Pour chaque cible, on détermine le canal (les canaux) appropriés et on précise les médias et/ou supports à utiliser pour qu'il fonctionne. Le support de communication est l'instrument sur lequel le message est fixé pour être transmis ou, en publicité, un organe de communication spécifique (titre de journal par exemple): bande ou cassette audio, film, cassette vidéo, affiche, brochure, magazine, timbre, calendrier, exposition, panneau, banderole, gadgets (sacs, porte-clés, casquettes, tee-shirts, pagnes…), boîte à images, flip-chart, flanellographe, planche murale, mannequin, diapositive, tableau, jeu, diagramme, pièce de théâtre, CD-Rom, disquette, etc. Avantages et inconvénients de chaque canal de communication CANAL AVANTAGES INCONVENIENTS Institutionnel - Existence d'un réseau d'agents sur le terrain - Bonne organisation, structuré - Caractère formel et obligatoire car hiérarchisé - Risque d’une connotation politique et de rejet - Possible lourdeur bureaucratique - Mobilité des acteurs Médiatique - Touche une grande partie de la population - Est attrayant et plaît au public - Pénètre les endroits les plus enclavés - Dispose d'une gamme variée de supports - Difficulté de ciblage - Coûts relativement élevés à l'équipement et à la production - Nécessité d’avoir des spécialistes Commercial - «Agressif» (techniques commerciales) - Est organisé et présent sur le terrain - Nécessite un pouvoir d’achat - A le souci de la rentabilité Socio-traditionnel ou socio-culturel - Correspond aux valeurs et à la logique de la communauté et maîtrisé en son sein - Peu coûteux dans ses supports - Difficile à connaître et à contrôler - Peut être manipulé par les leaders - Peut paraître désuet pour certaines personnes 24 Encadré n° 10: Critères de sélection des canaux et médias Pour choisir les canaux appropriés, on utilise des critères tels que: - couverture géographique: le canal doit couvrir au mieux la zone où réside la cible visée; - adéquation à la cible (accès, préférence, degré de familiarité): ainsi la presse écrite concerne une audience alphabétisée; - crédibilité: le canal choisi doit être crédible et digne de confiance; - coût: prise en compte du coût d’acquisition ou de fabrication du matériel, des frais d’entretien et de fonctionnement (frais d’électricité, de piles, de carburant…); - impact (engagement, attraction, attention, mémorisation, etc.): si le canal ou support exerce un attrait sur la cible, il y a de fortes chances que le message soit vu ou entendu; - participation: certains moyens favorisent la participation de la cible plus que d'autres, aussi bien dans la réception du message que dans son élaboration. On dispose ainsi des éléments qui permettront d'élaborer par la suite un plan médias, à savoir la sélection des médias et canaux ainsi que leur agencement dans un esprit de complémentarité multimédias. 2.2.2- Volet opérationnel de la stratégie Il s'agit de déterminer les éléments nécessaires à la mise à l'œuvre de la stratégie, à sa gestion et à son évaluation: cadre institutionnel, plans de production, de renforcement des capacités, de travail, de suivi-évaluation et budget notamment. 25 Le cadre institutionnel de la stratégie de communication A ce niveau, l'on doit concevoir un cadre institutionnel capable d'assurer avec efficacité la mise en œuvre de la stratégie: • choix de l'institution qui assurera le leadership et la coordination et de celles qui interviendront dans l'exécution des activités; • détermination des mécanismes de fonctionnement du cadre institutionnel. Le cadre institutionnel doit être formalisé par un document officiel (décret, arrêté, note, règlement ou document de projet) permettant aux parties prenantes de collaborer et de coordonner leurs interventions sur des bases claires. Les plans connexes: production et renforcement des capacités Plan de production du matériel de communication La production de matériel ou supports de communication est une activité relativement complexe qui nécessite des ressources souvent importantes et implique plusieurs partenaires: spécialistes du contenu (en genre, en agriculture, en santé, en environnement…), experts en communication, agences conseils, membres des groupes cibles visés, techniciens de la production et artistes, professionnels des médias et communicateurs traditionnels, chercheurs, centres de production et de reproduction du matériel, futurs utilisateurs du matériel, etc. Il faut donc mettre en place des mécanismes permettant d'assurer la participation de tous ou du plus grand nombre: c'est ainsi que des ateliers de conception de matériel et de formation des acteurs sont souvent organisés et un plan de production élaboré. Celui-ci liste les tâches liées au développement du matériel, la méthodologie de production, les délais nécessaires pour exécuter chaque tâche, les ressources (humaines, techniques et financières) pour réaliser chaque support et la répartition des responsabilités. Le développement du matériel passe généralement par les étapes suivantes: 1. conception du matériel (formulation des messages propres à chaque support ou activité); 2. réalisation des ébauches ou prémaquettes; 3. prétest des ébauches avec des membres du groupe cible; 4. élaboration de la version finale ou maquettes; 5. reproduction des maquettes. Plan de renforcement des capacités L'exécution de la stratégie peut exiger la mise en place d'une infrastructure, d'équipements et de ressources humaines appropriées: dans ce cas, il faut le prévoir et décrire l'équipement nécessaire ainsi que les profils, les compétences et les effectifs du personnel. Il peut s'avérer nécessaire de programmer la formation des acteurs qui seront impliqués dans l'exécution de la stratégie afin de les doter des connaissances, attitudes et compétences nécessaires à l'accomplissement efficace de leur rôle pour la réussite de la stratégie. C'est le cas des cadres du niveau central ou intermédiaire, du personnel de terrain, des bénéficiaires, des professionnels des médias, des communicateurs traditionnels ou des artistes et créateurs. On peut pour cela élaborer un plan de formation faisant ressortir les besoins de formation, les publics concernés, les buts ou objectifs généraux, les grandes lignes du contenu, les responsables, la durée et les ressources nécessaires. 26 Le planning des activités Le planning des activités consiste à identifier et détailler les activités, la période et éventuellement le lieu où elles se dérouleront, les ressources, la personne ou organisme qui sera le responsable de leur exécution et les résultats attendus. On peut alors élaborer un des outils suivants: • chronogramme ou liste des activités classées par ordre chronologique avec indication de leur déroulement et leur articulation dans le temps, sous la forme d'un diagramme de Gantt par exemple; • plan de travail faisant apparaître en plus le lieu, les responsables et éventuellement les produits attendus. Dans le cas des campagnes de communication, on élabore un plan de campagne plus détaillé; • plan de gestion qui en plus des éléments contenus, dans le plan de travail, indique les ressources nécessaires à la mise en œuvre de la stratégie. Les catégories d'activité les plus courantes sont les suivantes: • • • • • • • • recherche formative planification de la stratégie mise en place des capacités institutionnelles formation des acteurs ou animateurs critiques développement du matériel de communication et prétest lancement des activités de communication déroulement des activités de communication suivi et évaluation de la stratégie. Encadré n° 11: Le suivi et l'évaluation Le suivi (monitoring) consiste à surveiller et analyser de façon régulière, périodique ou continue le déroulement des activités prévues dans le plan de travail pour : · s’assurer que le plan élaboré est exécuté comme prévu, détecter les écarts éventuels et identifier les difficultés rencontrées et percevoir les contraintes et opportunités non prévues afin de fournir à temps les apports nécessaires et d’effectuer les corrections qui s’imposent ; · vérifier que les ressources et les activités permettent d’obtenir les résultats escomptés. Ex.: vérifier que les microprogrammes de radio sont diffusés selon le rythme prévu. L’évaluation consiste à mesurer, à un moment donné, les réalisations d’une intervention et à les comparer avec les prévisions en vue de déterminer si les objectifs ont été atteints : elle permet donc d’apprécier l’utilité, l’efficacité et l’efficience des activités, bref la performance, et si possible de les expliquer. Les résultats peuvent permettre de corriger l’intervention pendant son déroulement ou d’en tirer les leçons et les conséquences à son achèvement. Elle peut se faire se faire au début de l’intervention (‘ante’), à un moment précis de son déroulement (intermédiaire) ou à la fin (terminale, ‘post’). Par ailleurs, elle peut être interne (faite par des personnes ayant participé à tout ou partie de l'intervention), externe (confiée à des spécialistes extérieurs à l'intervention), conjointe ou participative (mixte). Exemple: voir si les activités de communication ont permis de porter à 70 % le nombre des paysans qui acceptent d'utiliser les nouvelles semences comme prévu. 27 Le plan de suivi-évaluation de la stratégie Au stade de la planification, le suivi et l'évaluation d'une stratégie de communication peuvent faire l'objet d'un plan détaillé (voir le tableau en annexe) ou apparaître dans la matrice du cadre logique du programme de développement: cette matrice fait ressortir la logique interne d'un programme ou projet à travers une hiérarchisation de ses objectifs (en lignes) et la détermination des éléments nécessaires à son suivi et à son évaluation (indicateurs objectivement vérifiables ou IOV, moyens de vérification, risques et postulats) en colonnes. Elle indique clairement la cohérence entre les activités de communication et le programme de développement auquel elles s'appliquent. Il existe plusieurs modèles de cadres logiques à travers le monde dont celui présenté ci-après. Matrice du cadre logique HIÉRARCHIE DES OBJECTIFS IOV MOYENS DE VÉRIFICATION But Ex. : Améliorer le bien-être des populations Objectif général Ex.: Contribuer à l'amélioration du statut et des conditions des femmes Objectifs de communication Exemples : 1- Amener les hommes à reconnaître la nécessité de l'amélioration du statut et des conditions des femmes 2Activités Exemples 1.1- Elaboration d'un plan de communication pour la promotion de la femme 1.2- Développement de messages 2.1- Etc. Commentaires • Le but correspond à la raison d'être de l'intervention, l'objectif général indique comment la communication permet d'atteindre le but tandis que l'objectif de communication représente le résultat attendu en terme de changement en termes de connaissances, attitudes et comportements. • La définition des indicateurs objectivement vérifiables et des moyens de vérification figure plus loin. • Les risques représentent les évolutions qui pourraient compromettre l'atteinte des objectifs (des troubles politiques par exemple) et les postulats sont les hypothèses majeures prises en compte pour fixer les objectifs (durabilité du financement du programme de développement par exemple). Ce qui fait l'objet du suivi-évaluation D'une manière générale, le suivi-évaluation peut porter sur le processus et les produits, sur les résultats et l'impact et sur le volet financier. En communication pour le développement, quatre questions essentielles viennent à l'esprit: • la stratégie a-t-elle été développée selon les normes et est-elle pertinente? 28 RISQUES ET POSTULAS • • • les messages parviennent-ils ou sont-ils parvenus aux cibles visées? les cibles visées changent-elles ou ont-elles changé au niveau des connaissances, des croyances et des attitudes? le comportement des cibles visées a-t-il changé ou est-il en train de changer conformément aux prévisions? 1) L'évaluation du processus et des produits permet de répondre à la question suivante: comment cela s'est-il passé? Les enseignements permettront d'améliorer le processus en cours ou la conception d'interventions similaires à l'avenir. L’évaluation porte généralement sur les aspects ci-dessous. • Conception de l'intervention: la démarche suivie et la stratégie retenue étaient-elles pertinentes, appropriées et conformes aux normes? Le cadre institutionnel a-t-il fonctionné comme prévu? Quels sont les progrès faits dans le sens de la durabilité? • Activités: les activités programmées se sont-elles déroulées conformément aux prévisions (par rapport à la nature des activités, au temps d'exécution et aux produits attendus)? Sinon, quelles sont les causes des écarts? Qu'at-on fait pour remédier aux difficultés identifiées? • Ressources (intrants): personnel, flux financiers, flux d'informations, matières et appui technique du point de vue de la quantité, de la qualité, de l'opportunité; • Produits issus directement des activités du programme aussi bien quantitatifs que qualitatifs; leur utilisation est nécessaire pour atteindre les résultats visés par la stratégie. On peut ainsi s'intéresser à des éléments tels que séminaires et ateliers tenus, personnes formées, matériel produit, personnes touchées, etc. 2) L'évaluation des résultats et de l'impact consiste à apprécier les effets obtenus grâce aux activités et aux produits en termes de changements au niveau de la population cible, du programme de développement concerné et de l'environnement. • Evaluation des résultats: l'on s'intéresse aux progrès réalisés par rapport aux objectifs de l'intervention et à ses conséquences en termes de connaissances, attitudes et pratiques; • Evaluation de l'impact: il s'agit des changements qui affectent le programme de développement ou son environnement suite aux résultats obtenus par la mise en œuvre de la stratégie de communication tels que le nombre de consultations ou de vaccinations pendant ou après la campagne, le nombre d'hectares reboisés et le taux de scolarisation des filles. Les indicateurs de suivi-évaluation Un indicateur est une valeur qui caractérise la nature du changement et permet d'en saisir l'ampleur ou la qualité et de porter un jugement par rapport à des préoccupations liées à la pertinence, l'impact, l'efficacité ou l'efficience d'une intervention. Il peut être quantitatif ou qualitatif. Il doit être objectivement vérifiable. 1) Catégories courantes d'indicateurs en communication pour le développement 1- Nombre de messages et de matériel de communication produit, par type, pendant une période donnée 2- Nombre de messages et de matériel de communication diffusé, par type, pendant une période donnée 29 3- Pourcentage des membres de la cible touchés par les messages 4- Pourcentage des membres de la cible qui comprennent correctement un message donné 5- Pourcentage des membres de la cible qui expriment des connaissances, des attitudes et des croyances ayant fait l'objet des messages 6- Pourcentage des membres de la cible ayant acquis les compétences développées par les messages 7- Pourcentage des membres de la cible qui discutent des messages avec d'autres catégories de personnes 8- Pourcentage des membres de la cible qui adoptent le comportement recommandé par les messages 9- Evolution de l'ampleur du problème de développement (taux de prévalence par exemple). 2) Exemples d'indicateurs de processus et de produits • Nombre de causeries animées • Nombre d'agents formés appliquant correctement la technique du conseil • Matériel produit répondant aux normes de qualité requises • Nombre d'émissions réalisées • Diffusion des messages effectuée dans les délais prévus • Pourcentage de la cible exposé aux messages 3) Exemples d'indicateurs de résultats ou d'impact • Pourcentage de la cible favorable à la planification familiale pour les jeunes • Pourcentage de la cible utilisant correctement la technique de semis • Adoption d'une législation favorable à l'accès des femmes aux emplois supérieurs • Taux de couverture vaccinale • Taux de reboisement. Les moyens de vérification Il s'agit des sources de vérification (supports contenant les informations) et des méthodes et techniques nécessaires pour obtenir les informations. 1) Exemples de sources de vérification • Rapports internes, rapports annuels d'institutions, rapports d'étude ou de recherche, rapports épidémiologiques… • Statistiques disponibles dans les services, les programmes ou les institutions; recensements généraux de la population • Médias (par analyse de contenu) • Textes: lois, décrets, arrêtés, directives, programmes, protocoles, etc. • Bordereaux de livraison... 2) Exemples de méthodes et techniques de suivi-évaluation • Collecte de statistiques; revue de documents • Analyse de contenu des supports et moyens de communication; contrôle régulier du matériel à des points de distribution types; «tracking» des médias/press book • Visite de terrain; réunions, rencontres, séminaires périodiques • Discussion de groupe dirigée; enquête par questionnaire auprès d'un échantillon; panel; entretien individuel ou de groupe, observation. 30 Dans tous les cas, une combinaison de moyens de vérification, dans le cadre d'un dispositif de recherche, donne des résultats plus fiables. Par ailleurs, il importe de noter que le suivi et l'évaluation des projets financés par des bailleurs de fonds respectent des directives spécifiques. Encadré n° 12: Processus de conception et de réalisation d'une évaluation 1- Déterminer les contours de l’évaluation, notamment ses objectifs et les dimensions du programme à évaluer en fonction des objectifs de départ : stratégie adoptée, processus/produits, résultats/impact. 2- Concevoir le plan de suivi-évaluation : IOV, moyens de vérification et plan de la recherche et ressources nécessaires. 3- Elaborer et tester les instruments de l’évaluation. 4- Préparer l’évaluation au plan matériel, administratif et psychologique : vérifier le matériel nécessaire, accomplir les formalités administratives et faire le repérage des lieux, formation de l’équipe d’évaluation. 5- Collecter les données. 6- Analyser les données et les interpréter. 7- Documenter les résultats et les diffuser sous une forme appropriée. 8- Procéder ou faire procéder à l’exploitation des résultats (si l’on en a le mandat). La budgétisation de la stratégie Pour évaluer le coût de la stratégie, il faut inventorier les activités et les ressources nécessaires pour les exécuter et évaluer toutes les catégories de dépenses: • activités de recherche et de suivi-évaluation (salaires/honoraires, frais de déplacement, fournitures, traitement et analyse des données, publication des rapports, ateliers de restitution des résultats, etc.); • formation (honoraires, matériel de formation, frais d'organisation, prise en charge des participants, transport, etc.); • production et diffusion de matériel (atelier de conception, honoraires/salaires des techniciens, droits d'auteur, cachets d'artistes, déplacements fongibles, frais de reproduction, frais de distribution et de diffusion, etc.); • activités de communication sur le terrain (équipement, déplacement, salaires, frais de terrain, coût des événements spéciaux tels que conférence de presse, journées portes ouvertes); etc. Le budget devrait être réparti annuellement si cela est nécessaire ou possible. 2.3- VALIDATION DE LA STRATÉGIE 2.3.1- Le document de stratégie Le document de stratégie devrait faire apparaître les points suivants: • Contexte, justification, méthodologie d'élaboration et résumé de l'analyse de la situation: problème(s) de développement, synthèse des résultats de la recherche • Problèmes de communication, comportement à promouvoir 31 • • • • • • • Cadre stratégique: objectifs de la communication, cibles, messages, canaux Description des activités majeures découlant de la stratégie Cadre institutionnel Activités connexes: renforcement des capacités et production de matériel Suivi et évaluation Budget et sources de financement Annexes - Plan de formation - Plan de production - Plan de suivi-évaluation et/ou matrice du cadre logique - Plan de travail ou de gestion - Budget détaillé - Description des postes 2.3.2- Le processus de validation de la stratégie Une fois la stratégie élaborée et son volet opérationnel conçu, il convient de les soumettre pour validation. Le processus de validation implique l'ensemble des acteurs institutionnels ayant un rôle majeur dans la mise en œuvre, les partenaires au développement et les autorités compétentes (gouvernement dans le cas d'une stratégie nationale). La validation peut se faire au cours d'un atelier puis être formalisée par un acte officiel (décret, arrêté, note par exemple). La stratégie peut alors bénéficier d'un financement, être diffusée et sa mise en œuvre peut commencer. 2.4- APERÇU GÉNÉRAL DE LA PLANIFICATION ET DE LA MISE EN ŒUVRE DE LA COMMUNICATION: CONSIDÉRATIONS PRATIQUES Les conseils ci-dessous sont destinés aux personnes chargées de planifier et d'élaborer des projets de développement et qui, après avoir pris connaissance des directives, aimeraient recevoir un complément d'information sur les activités de planification et de mise en œuvre d'activités de communication ainsi que sur les avantages et les inconvénients des différents médias. 2.4.1- Eléments majeurs de planification de la communication Analyse de situation et recherche en matière de communication Si l'on ne comprend pas bien comment la population qui sera touchée par le projet perçoit ses propres problèmes et les options de développement proposées, si l'on ne saisit pas ses aspirations, sa façon d'obtenir et d'échanger des informations, quels médias et quels contacts personnels lui paraissent les plus crédibles, aucune activité de communication ne peut réussir. Ces informations peuvent être disponibles dès le stade d'élaboration du projet; sinon il faut les rechercher. Ces informations détermineront bon nombre de caractéristiques du plan de communication, notamment le type de message, le média et les canaux à utiliser, comment et à quel moment. Les recherches détermineront également les obstacles que rencontre le changement d'attitude et de comportement face à ces innovations. 32 Les planificateurs du développement s’inquiètent souvent quand ils entendent parler d'études CAP et de recherche de ce type, car ils doivent envisager une opération de plusieurs mois, alors qu'ils sont soumis à de fortes contraintes de délais quant à la mise en oeuvre du projet, même si la hâte risque d'aboutir à un projet mal conçu. Cependant, dans la réalité quotidienne, des enquêtes assez rapides sur des échantillons, soigneusement choisis pour représenter les couches de population touchées par le projet, fournissent en général des données suffisantes pour pouvoir démarrer. Le cadre institutionnel Le cadre institutionnel de la communication pour le développement est un facteur à examiner attentivement. Il s'agit en effet d'un domaine d'activité où se mêlent plusieurs disciplines: • science, car la communication utilise largement les sciences sociales et celles du comportement, la psychologie et la théorie de diffusion; • art, car la communication tire profit des talents et des aptitudes intervenant dans les médias; • enfin métier, car la communication se sert d'équipements et de moyens techniques très variés. Il n'existe donc pas un type d'organisation valable pour toutes les situations, d'autant plus que la communication pour le développement doit toucher tous les secteurs concernés par le développement rural pour utiliser pleinement son potentiel. Les ministères de l'information ont certainement les infrastructures de diffusion nécessaires, mais ils ne disposent pas toujours du personnel requis pour la communication appliquée au développement, tandis que le contraire peut être vrai dans le cas des ministères de l'agriculture. L'idée de créer des services de communication pour le développement au niveau national n'est pas encore admise. Pourtant, pour de nombreux pays, il serait logique d'institutionnaliser la communication dans la lutte contre le sousdéveloppement, peut-être sous la forme d'un département de la communication sociale rattaché soit à la présidence ou au cabinet du Premier ministre, soit relevant d'un ministère chargé du développement rural. Dans le cas de grands projets de développement, il est souvent rentable de créer une unité de communication spéciale faisant partie du projet lui-même. L'expérience a montré que l'investissement en faveur de l'élément communication atteint, si celui-ci est bien organisé et efficace, généralement de 8 à 15 pour cent du budget total d'un grand projet. Le cadre institutionnel de projets plus petits, pour lesquels la création de leur propre unité de communication n'est pas justifiée, demande plus de réflexion. Il peut être possible de regrouper plusieurs projets du même secteur, voire de secteurs différents s'ils travaillent tous avec les mêmes populations rurales, et ainsi de créer une unité de communication qui les desserve tous. Dans certains pays, les ministères techniques (par exemple de l'agriculture, de la santé, des affaires sociales) sont en effet dotés d'unités d'information ou de communication qui peuvent fournir des intrants en communication aux projets de développement rural. Mais ces unités peuvent avoir besoin d'être renforcées sur 33 le plan des ressources humaines et matérielles, d'être orientées lors de la conception ou nécessiter la formation de personnel pour pouvoir apporter une contribution efficace au projet. L'assistance à ces unités peut prendre la forme de projets de communication proprement dits du type mentionné précédemment. Inventaire des ressources en communication Une partie essentielle de la planification de la communication consiste à établir un inventaire de toutes les ressources en communication disponibles du point de vue de la quantité, de la qualité et de l'impact. Si l'on découvre des faiblesses, on fait une estimation des apports nécessaires afin de porter ces ressources au niveau requis pour satisfaire les besoins. Dans un pays en développement, les ressources sont parfois insuffisantes pour effectuer une recherche socioculturelle et des études CAP. Pourtant, et à condition de choisir une bonne méthodologie adaptée aux besoins spécifiques, de telles activités ont souvent été menées à bien par des agents de terrain des pouvoirs publics, par des étudiants en sciences sociales, par des employés d'agences de marketing et de publicité ou par des agents d'ONG choisis pour leur aptitude à ce genre de travail. Normalement, une orientation et une brève formation sont nécessaires. En général, l'interprétation des résultats obtenus sur le terrain se révèle plus difficile que la collecte d'informations elle-même. Cette partie de la recherche peut exiger le concours de spécialistes. Les conditions climatiques et l'environnement technique Les conditions climatiques dans lesquelles les activités de communication doivent se dérouler influencent fortement le plan de communication. Ainsi, lorsque les déplacements dans la zone du projet sont sérieusement restreints par la saison des pluies plusieurs mois par an, les mass-media (par exemple la radio) jouent probablement un plus grand rôle que les projections audiovisuelles pour groupes. De même, si la température ambiante atteint régulièrement 40°C, il peut être difficile d'utiliser des caméras vidéo, sauf au crépuscule ou pendant la saison fraîche; il ne sera peut-être pas possible de réaliser les films nécessaires au projet. L'environnement technique est tout aussi important. Par exemple, il n'est pas très pratique d'utiliser un matériel audiovisuel qui exige des travaux de laboratoire impossibles à réaliser dans le pays. Le matériel perfectionné, dont l'entretien ne peut être assuré sur place, peut poser des problèmes. Il faut tenir compte de ces facteurs pour établir le plan de communication. Le type de communication recherchée Le plan de communication sera influencé par le type de support en communication qui sera le plus utilisé par le projet. Rappelons que la communication pour le développement englobe plusieurs types d'activité, notamment la communication pour l'approche participative pour la mobilisation, pour la mise en œuvre plus aisée du projet et pour la formation à la base. Ces activités sont menées à bien grâce à des médias différents, utilisant chacun une approche spécifique. 2.4.2- Principaux aspects et étapes de la mise en œuvre d’une activité de communication 1. L'idéal serait d'avoir entamé un processus de communication dans la perspective d'obtenir la participation de la population à la planification des 34 actions de développement dans la zone du projet avant que le plan du projet de développement rural ne soit définitivement arrêté. Un accord devrait ainsi être conclu sur les actions à mener en une série d'étapes bien définies. En cette première phase, on peut faire appel à des moyens audiovisuels tels que les enregistrements et les réécoutes vidéo pour aider les agriculteurs à se considérer comme partenaires et preneurs de décision dans le choix, l'organisation et la réalisation d'activités de développement. Cependant, des personnes dotées d'une grande sensibilité peuvent obtenir les mêmes résultats uniquement par des contacts personnels, si elles sont prêtes à passer du temps à écouter la population rurale et à essayer de comprendre sa vision de l'avenir. 2. Après avoir déterminé ensemble les actions de développement, il convient d’identifier les groupes sociaux qui participeront à des actions. Ces groupes sont les groupes cible; chacun joue un rôle différent et il sera atteint par des messages différents et suivant des voies différentes. 3. Des objectifs à atteindre sont fixés pour chaque groupe en ce qui concerne les attitudes et les comportements (par exemple, une meilleure compréhension du rôle et une plus large utilisation des engrais par les petits agriculteurs; une participative positive et active des enseignants qui doivent parler de nutrition végétale et d'emploi des engrais à leurs élèves; une promotion plus active des engrais de la part des chefs de communautés). 4. Analyses d'audience effectuées à l'aide de techniques comme les études CAP et les interviews de groupe. Des discussions sont menées avec des groupes cible, par exemple les femmes rurales en âge de procréer, les agents de santé ruraux ou les agriculteurs qui pratiquent les cultures de subsistance dans certaines zones où les conditions sont similaires. Ces discussions, qui doivent regrouper entre 6 et 12 personnes à la fois, sont «focalisées» sur un sujet déterminé par les chercheurs qui utilisent un guide bien préparé, mais ensuite le débat est libre et aussi large que possible. 5. Un plan de communication est établi pour chaque groupe cible qui identifie les voies à suivre, les matériels à produire, par qui et à quel moment. 6. Conception du message. Concevoir un message, c'est décider, sur la base de l'étude du public cible, comment présenter ce message à un public donné de la meilleure façon, en tenant compte des préoccupations et de la sensibilité particulière de ce public. Par exemple, s'il est apparu dans une zone particulière que les agricultrices se préoccupent surtout d'assurer la nourriture de leur famille entre deux récoltes, un message sur un thème agricole tel que le semis de riz en lignes plutôt qu'à la volée doit souligner que la récolte sera ainsi plus abondante. Dans un autre contexte, la préoccupation principale peut être d'obtenir un revenu supplémentaire en espèces; le message devra alors insister sur cet aspect. 7. La production de matériels et les tests. Les matériels devraient toujours être produits sous une forme «préliminaire» et testés sur de petits groupes représentatifs des groupes cibles. Ces tests préliminaires, suivis d'une modification des matériels en cas de besoin, sont souvent négligés, en partie parce qu'ils passent pour prendre beaucoup de temps (ce qui n'est pas 35 toujours vrai), et en partie parce que les producteurs manquent parfois d'humilité pour soumettre leur travail aux critiques de leur public, ou de souplesse pour le modifier ou le refaire si le public cible ne le comprend pas ou ne l'apprécie pas. 8. Formation des agents de terrain à l'utilisation des matériels et aux techniques de communication interpersonnelle. 9. Mise en œuvre du plan de communication grâce à la production et l'utilisation des matériels. 10. Suivi et évaluation continus en liaison avec la mise en œuvre. Même si les tests préliminaires ont été effectués régulièrement, le suivi et l'évaluation continus peuvent révéler que les activités de communication n'ont pas le résultat désiré et qu'il existe des malentendus. 11. L'information obtenue grâce au suivi est utilisée en retour pour la mise en œuvre. En d'autres termes, le type de message et les matériels sont revus, plusieurs fois, si nécessaire, afin de répondre correctement aux besoins révélés par le suivi et l'évaluation continus, et cela jusqu'à ce que le travail de communication ait été compris et apprécié. Dans le jargon des communicateurs, ce processus se nomme «évaluation formative». 12. Une évaluation finale ou récapitulative de l'impact obtenu et des problèmes rencontrés est effectuée à la fin de chaque activité de communication, afin que les leçons ainsi apprises puissent être incorporées dans l'activité courante. 2.4.3- Les principaux médias du développement rural Aucun média n'est en soi meilleur que les autres. Les circonstances et les exigences de chaque projet de développement déterminent le média à utiliser. Les sondages qui tentent de définir quels sont les médias accessibles à la population, ceux qui sont crédibles, ceux qui sont réellement disponibles, ceux qui pourraient être vraiment mis en place influent largement sur le choix. Pourtant, il faut se rappeler qu'un message présenté sous une forme légèrement différente et arrivant par des voies différentes est celui qui a l'impact le plus fort et contribue le plus à changer les comportements. En conséquence, les approches multimédias sont habituellement les plus efficaces. Par ailleurs, la plupart des gens ont besoin d'un interlocuteur direct, qui sache plus de choses ou ait plus d'expérience qu'eux-mêmes, avant de formuler leur propre jugement et tenter une innovation. En effet, toute information reçue doit être assimilée et évaluée selon son utilité et sa pertinence par rapport aux problèmes particuliers du destinataire avant qu'elle n'agisse sur lui. L'entretien direct est un élément essentiel de ce processus. 36 Avantages et inconvénients des différents médias Audience (portée) Fiabilité Interactivité Souplesse d’utilisation xx x x xx xx xx xx 2. Contes proverbes devinettes - x xx x xx x xx xx 3. Marionnettes + xx x x xx xx xx xx 4. Chants - xx xx x xx xx xx xx Facilité d’expression Facilité d’assimilation - Adaptabilité Crédibilité 1. Théâtre Rapidité Coût Principaux médias traditionnels pour le développement x Coût Crédibilité Facilité d’assimilation Audience (portée) Fiabilité Interactivité Souplesse d’utilisation Rapidité Adaptabilité Facilité d’expression Principaux médias modernes pour le développement 1. Radiodiffusion + xx xx xx xx x xx xx xx xx 2. Télévision + xx x xx xx x x x x x 3. Vidéo + xx x x x x xx x x x 4. Cassettes audio - x xx x xx x xx x x x 5. Diapositives - x x x x x xx x x x 6. Imprimés (journaux, affiches, panneaux, tee-shirts) - x x 7. Cinéma ++ x xx x x 8. Tableau à feuilles mobiles + xx xx xx xx xx xx xx xx xx 9. NTIC + xx x xx xx xx xx xx xx -- -- = faible x = bon xx = très bon xx xx - = peu coûteux + = coûteux ++ = très coûteux 37 ANNEXES 1- CADRE DE PLANIFICATION DE LA STRATÉGIE EN IEC 2- CADRE DE SUIVI-ÉVALUATION D'UNE STRATÉGIE DE COMMUNICATION 3- PLAN DE TRAVAIL 39 Cadre de planification de la stratégie d'IEC Problème de développement: Problème de communication: OBJECTIFS DE COMMUNICATION GROUPES CIBLES APPROCHES MESSAGES CLÉS CANAUX ET SUPPORTS 40 Cadre de suivi-évaluation d'une stratégie de communication OBJECTIFS/ACTIVITÉS INDICATEURS MÉTHODES DE SUIVI-EVALUATION LIEU/PÉRIODE RESPONSABLE COUT/RESSOURCES 41 Plan de travail OBJECTIFS/ACTIVITÉS RESPONSABLES 1 2 3 4 5 PÉRIODE 7 6 8 9 10 11 12 RÉSULTATS ATTENDUS/ OBSERVATIONS 42 BIBLIOGRAPHIE INDICATIVE Y. AHADE, 1987, Les persuadeurs du village: communicateurs, informateurs et éducateurs populaires dans les projets de développement national en Afrique, Nairobi, 50 pages. J. AUBEL, 1994, Guide pour des études utilisant les discussions de groupe, Genève: BIT, 64 pages S. BALIT, J.-P. ILBOUDO, 1996, Towards National Communications Policies for Development in Africa, FAO, Rome. G. BESSETTE, C.V. RAJASUNDERAM, 1996, La communication participative pour le développement, Ottawa: CRDI. J. Y. CLAVREUL et J.-P. ILBOUDO, 1998, Comment concevoir et réaliser les supports de communication de proximité, manuel à l'usage des responsables de communication, de l'animation, de la formation et de la vulgarisation des projets de développement, Rome. S. COHEN, 1994, Elaboration des stratégies d'information, d'éducation et de communication (IEC) pour les programmes de population, New York: FNUAP, 62 pages B. GUEYE, K. S. FREUDENBERGER, 1991, Introduction à la méthode accélérée de recherche participative (MARP), London: IIED. IREP, 1988, Mesurer l'efficacité de la publicité, Paris: Editions de l'Organisation, 154 p. H. KONE, J. H. SY, 1995, La communication pour le développement durable en Afrique, Abidjan: PUCI, 469 pages M. Le NET, 1993, Communication publique. Pratique des campagnes d'information, Paris: La Documentation Française, 185 pages P. T. PIOTROW et al, 1997 , Health Communication, Westport/London: Praeger, 307 pages F. QUERRE, 1990, Les mille et un mondes. Manuel de radio rurale, Rome: FAO. 43 M. R. RASMUSON et al, 1988, La communication pour la survie de l'enfant, Washington: AED, pp. 73-84 P. W. YOON, 1993, Directives pour enquêtes de base et appréciations d'impacts, Genève: BIT, 135 pages FAO, 1995, Approche participative, communication et gestion des ressources forestières en Afrique sahélienne. Bilan et perspectives, Rome: FAO 107 pages UNICEF, 1993, Guide de l'UNICEF pour le suivi et l'évaluation, New York: UNICEF, 156 pages FAO, 1998, La communication pour le développement rural. Instructions et directives à l'intention des planificateurs du développement et des élaborateurs de projets, Rome: FAO. Cadre de communication sur le VIH/SIDA, Genève: ONUSIDA/PennState, 2000, 112 pages Rapport sur le développement humain, New York: PNUD (annuel) 44 TC/D/Y4333F/1/11.02/3500