Les chroniques de Meadow Haven
Par Mélodie Grimoire
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À propos de ce livre électronique
À PROPOS DE L'AUTRICE
Mélodie Grimoire explore dès son adolescence la capacité à tisser des liens intimes entre les mots et les émotions. Avec son premier ouvrage, "Les chroniques de Meadow Haven", elle magnifie la richesse des paysages et des sentiments, offrant ainsi une immersion captivante dans le monde de la littérature.
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Avis sur Les chroniques de Meadow Haven
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Aperçu du livre
Les chroniques de Meadow Haven - Mélodie Grimoire
L’émeraude et le jaspe rouge
Le paysage défilait à toute vitesse. Aedan aurait voulu crier au conducteur de faire demi-tour, mais il n’avait guère le choix : le voilà à nouveau contraint de passer des vacances à Meadow Haven, village perdu dans les Green Mountains, dans le Vermont. Ses grands-parents y habitaient depuis toujours et comme chaque été, ses parents avaient insisté pour qu’il leur rende visite. Ce n’était pas qu’il n’appréciait pas leur compagnie, loin de là, mais il ne pouvait pas s’empêcher d’être terriblement frustré en pensant qu’il allait rester un mois dans ce trou perdu au lieu d’aller en Californie avec tous ses amis, de l’autre côté du pays. Tous avaient longuement cotisé pour pouvoir s’offrir ce voyage et louer une maison de plage. Lorsque ses parents lui avaient imposé ce séjour dans les montagnes, Aedan avait tenté de contester, d’y échapper, mais sa mère l’avait sévèrement menacé : s’il refusait de passer du temps avec ses grands-parents, elle n’accepterait pas de financer ses études de natation. Le chantage était radical, mais pour le moins efficace. Aedan rêvait de devenir nageur professionnel depuis qu’il était enfant. Dans l’eau, il se sentait à sa place et parfois beaucoup mieux que sur la terre ferme. Il soupira longuement. Le chauffeur lui adressa un regard dans le rétroviseur.
— On arrive, mon garçon. Dis donc, il n’y a pas un chat ici !
— Je ne vous le fais pas dire…
La voiture s’arrêta et en inspirant, il comprit qu’il avait quitté la ville pour de bon. L’air était frais, pur. Aedan en était presque incommodé. Le chauffeur prit sa valise dans le coffre et la déposa. Le jeune homme paya sa course puis regarda le chauffeur regagner son véhicule. Il aurait pu pleurer comme un enfant qu’on venait d’abandonner au milieu de nulle part. Après avoir rassemblé toute sa bonne volonté, il entra dans le village. Rien ne semblait avoir bougé depuis l’année précédente : les mêmes briques recouvertes de lichen, la même fontaine en face de la petite boulangerie. Ses grands-parents, Arnold et Georgia, habitaient davantage dans les hauteurs. Après un parcours d’une vingtaine de minutes, il arriva à destination. Il ne fut pas surpris d’apercevoir Georgia devant la porte. Le jeune homme sourit, attendri. Elle portait son éternel tablier à carreaux rouge et blanc.
— Oh, Aedan, te voilà ! s’exclama-t-elle.
Elle accourut vers lui et l’enlaça.
— Mon chéri, tu as tellement grandi !
Elle le serrait comme si elle ne l’avait pas vu depuis des siècles. Arnold sortit à son tour de la maison.
— Aedan ! Dis donc, tu ressembles de plus en plus à ton père !
Georgia haussa un sourcil.
— Quoi ? Je trouve qu’il ressemble davantage à notre fille !
— À Joyce ? Mais pas du tout, regarde-moi cette expression qu’il a sur le visage, c’est du Edward tout craché !
Ce débat stérile pouvait durer jusqu’au dîner ! Ils finirent par entrer. À l’intérieur, tout était pureté, simplicité : il y avait là juste le nécessaire pour vivre correctement. Pas de décorations superflues, juste quelques fleurs fraîchement cueillies et placées dans un joli vase transparent sur la table où ils allaient déguster le dîner. Aedan monta sa valise à l’étage. Son éternelle petite chambre l’attendait, fraîche et propre. En regardant autour de lui, il se laissa tomber sur le lit. Il était vrai qu’il s’ennuyait ferme ici, mais il ne pouvait s’empêcher d’être terriblement touché par les petites attentions que pouvaient avoir ses grands-parents à son égard : il savait très bien que son grand-père avait pris le temps de poncer les meubles avant qu’il vienne, que sa grand-mère avait chassé hors de la maison le moindre grain de poussière qu’il pouvait y avoir. Tout cela pour l’accueillir convenablement.
— Aedan, nous allons souper ! cria Georgia.
— J’arrive !
Il dévala les escaliers. Georgia avait entre les mains ses plus belles assiettes en porcelaine.
— Laisse grand-mère, je vais le faire.
— Non chéri, tu dois être fatigué, assieds-toi.
— J’insiste.
Georgia ne pouvait que céder. Alors, avec un petit sourire, elle lui tendit les assiettes et il mit la table. S’il la laissait agir ainsi, il n’allait rien faire du séjour à part dormir et manger, et cela le gênait terriblement. Avant de commencer à dîner, ils prièrent. C’est à cet instant-là qu’Aedan se rappela qu’il allait devoir se rendre à la messe tous les dimanches. Une épreuve ultime pour ne pas s’endormir sur un banc ! Comme d’habitude, le repas était exquis. Une soupe à l’oignon, accompagnée d’une immense tranche de lard.
— C’est vraiment délicieux, je pense que je vais prendre cinq kilos ici !
— Et tu en as besoin, poussin, tu es bien trop maigre ! Que manges-tu donc chez toi ?
— Eh bien… Comme papa et maman travaillent beaucoup, je me prépare souvent des sandwichs ou de la salade.
Georgia semblait atterrée, ce qui amusa grandement Aedan. Il savait qu’elle avait certaines idées très arrêtées et le fait qu’une femme se doit de cuisiner pour sa famille en faisait partie ! Ils discutèrent ensuite des résultats scolaires d’Aedan, de son quotidien et des autres membres de la famille éparpillés aux quatre coins des États-Unis. Et Arnold, bien que de nature peu bavarde, prit part activement à la conversation. Après ce repas copieux, Aedan alla faire un brin de toilette et monta dans sa chambre. Ici, pas de télévision avant d’aller se coucher. Par la fenêtre, il observa le spectacle qui s’offrait à lui : un tapis d’étoiles plus scintillantes les unes que les autres. Une petite fumée blanche vint troubler ce tableau : Arnold, qui fumait sa pipe, paisiblement assis dans son rocking-chair devant la maison. Dans son enfance, Aedan avait souvent voulu s’asseoir sur ses genoux à ces moments-là. Mais Georgia le lui interdisait fermement, prenant pour excuse qu’il allait respirer la fumée du tabac. Au fond, Aedan avait toujours su qu’elle voulait surtout que ce petit instant appartienne à Arnold et à lui seul. C’était comme cela : chacun, à un moment ou un autre, avait besoin de se retrouver avec lui-même. Très vite, la fatigue gagna Aedan. Il s’assoupit alors, bercé par le chant d’un hibou.
Si la grasse matinée faisait partie des habitudes du jeune homme, il dut faire une exception le lendemain matin. Un coq qu’il imaginait vigoureux et coloré poussa son premier chant. Très vite, ce fut un véritable ballet : l’un répondait à l’autre et d’autres volailles se joignaient à ce concert. Mais de toute façon, il allait devoir s’habituer. Dormir jusque tard dans la matinée était mal vu dans le coin : signe de paresse et de non-éducation ! Aedan bondit alors hors de son lit et descendit. L’odeur du café dans la cuisine le ravit.
— Bien dormi chéri ? demanda Georgia.
— Oui, merci !
— Je vais au marché ce matin, tu m’y accompagnes ?
— Bien sûr.
Toute sortie était une occasion de fuir l’ennui ! Enthousiaste, Aedan dévora son petit-déjeuner et suivit sa grand-mère jusqu’au fameux marché. Mais très vite, son espoir d’y trouver une quelconque distraction fana. Il n’y avait là que des fruits et légumes. À quoi s’attendait-il de toute façon ? À de l’or, des cracheurs de feu et des chevaux ? Nous étions à Meadow Haven après tout ! À chaque passant, Georgia s’arrêtait pour prendre connaissance des derniers ragots du village et pour annoncer l’arrivée d’Aedan, comme chaque année.
— Oh, mais c’est le petit Aedan ! Mais c’est bientôt un homme, dis donc ! s’exclama madame Worth, une voisine.
— N’exagérons rien, c’est encore un enfant ! rétorqua Georgia.
Aedan balança la tête en riant. Elle refusait catégoriquement de le voir grandir.
— Grand-mère, j’ai dix-huit ans.
— Déjà ? Le temps passe si vite !
Ils poursuivirent alors leurs petites emplettes, tandis que le soleil battait son plein.
« Venez voir mes pierres, venez voir mes pierres aux extraordinaires vertus ! »
Une voix féminine attira l’attention d’Aedan. Une jeune femme, placée un peu à l’écart, vendait des pierres semi-précieuses. Il y en avait pour tous les goûts : du quartz rose, du cristal de roche, de l’amazonite… Fasciné par cette nouveauté, Aedan s’approcha en observant la marchandise. Les pierres étaient plus magnifiques et attirantes les unes que les autres. Ces choses-là ne l’avaient jamais vraiment intéressé, mais il avait noté que plusieurs de ses amies du lycée appréciaient ce genre de pierres.
— Bonjour jeune homme !
Il leva les yeux vers la vendeuse. Tout à coup, tout disparu autour de lui. Il n’y avait qu’elle,