Eloquent
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Toute
personne peut s'approprier les principes et techniques de cet art et les
appliquer dans divers contextes de la vie, lui permettant ainsi de
toucher aussi bien son interlocuteur que son auditoire »
DENISE DUTIL 1
Chapitre 1
Qu’est-ce que l’art oratoire ?
– Parce que lorsque vous parlez à un public, c’est un peu comme si vous
parliez à un ami. Vous êtes proche de lui, vous élevez un peu la voix pour
vous faire entendre mais vous préservez la proximité et la connivence.
1. Denise Dutil est diplômée en diction de l’École supérieure d’élocution française de Mon-
tréal. Dans le cadre de divers projets de théâtre forum, elle a encadré des enfants, des
jeunes et des adultes au niveau de la rédaction, de l’interprétation et de la mise en scène
de saynètes interactives.
26 QUAND PRENDRE LA PAROLE DEVIENT FACILE
Quant au trac, il fait partie de toute situation orale. Les acteurs et les
orateurs vous le diront : ils ont le trac et pour y faire face, chacun a sa
méthode : travail respiratoire, concentration, mots clés, répétition... Le trac,
vous apprendrez à l’apprivoiser et à vous en faire un ami. Démystifier sa
peur, c’est d’abord accepter de ne pas être parfait, donc de faire des
erreurs.
Tout ce qui est essentiel dans l’art oratoire est contenu dans cette citation.
Votre présence, votre tenue corporelle, votre voix et le contenu de votre
discours vous permettront de séduire l’auditoire, de l’émouvoir et de le
convaincre.
Bien dire, déclamer, avoir une bonne élocution, une bonne éloquence et
être volubile, telles sont les qualités à développer. Un orateur est aussi
quelqu’un capable d’éloquence et de charisme. L’éloquence permet de
s’exprimer de façon claire pour chercher à émouvoir l’interlocuteur ou
l’auditoire et le toucher dans son for intérieur.
Pour y arriver, vous devrez trouver les arguments pour convaincre, les
exposer de façon précise et selon un ordre défini. Votre éloquence vous
amènera à choisir et à ordonner les mots de votre discours. Pour cela,
vous devrez nécessairement articuler et prononcer chaque syllabe de
façon à ce que l’auditoire entende chaque mot et comprenne le sens de
votre propos.
L’orateur est le plus souvent debout face à son public. Il renforce ainsi
l’impact de son discours par sa tenue corporelle, sa verticalité et les gestes
qui l’accompagnent. Le corps accompagne le discours et lui donne
l’énergie nécessaire. Pour un orateur, il est important de ressentir les mots
prononcés à travers son corps.
Si au lieu de parler debout vous devez faire votre présentation assis der-
rière une table, sachez que vous risquez de perdre en force et en pré-
sence. Afin d’éviter cet écueil, pensez à votre verticalité en vous tenant
droit, sans vous appuyer contre le dossier de votre chaise ni sur vos avant-
bras. Dans cette position, vous donnerez alors une image dynamique et
maîtrisée (cf. « La verticalité » dans « Le code non verbal ou le langage
du corps », 3e partie, chapitre 7, p. 169).
Pour terminer ce premier chapitre, sachez qu’il existe d’autres mots pour
exprimer l’art de parler. Ainsi nous trouvons dans les dictionnaires de la
langue française :
– le causeur : un bavard qui aime discuter ;
– le conférencier : il prononce un discours en public ;
– le débatteur : un orateur habile, à l’aise dans les débats publics ;
– le déclamateur : un orateur au style « ampoulé » ;
– le discoureur : il aime à discourir, surtout à propos de choses vaines,
c’est un homme qui parle de façon plutôt agréable, mais sans beaucoup
de solidité ;
– le harangueur : il parle beaucoup, fait des réprimandes sur toutes
choses ;
– le prédicateur : une personne qui prêche ;
– le tribun : un orateur populaire qui sait défendre une idée avec
éloquence.
QU’EST-CE QUE L’ART ORATOIRE ? 29
- Osez.
Chapitre 3
La mise en scène de théâtre
est utile à l’orateur
Cyril Le Grix
J’ai commencé à faire du théâtre à 11 ans au théâtre Montansier à Ver-
sailles où je prenais des cours. Cette activité m’a très vite passionné et
c’est à cette période que je suis monté pour la première fois sur la scène
d’un théâtre, face à un public. Je jouais le personnage de Faënor, le roi
des elfes, dans Bilbo le hobbit, d’après l’œuvre de J. R. R. Tolkien. Comme
j’étais déjà grand pour mon âge, le théâtre m’avait trouvé un costume
exceptionnel : le costume du Bourgeois gentilhomme de la Comédie-Fran-
çaise, un costume en velours bleu ciel dont j’étais très fier.
78 QUAND PRENDRE LA PAROLE DEVIENT FACILE
Dès la sortie du cours Florent, j’ai monté mes premières pièces. J’ai
commencé par mettre en scène Le fanatisme ou Mahomet le prophète de
Voltaire dans lequel je jouais Zopire, l’un des deux premiers rôles. J’ai
toujours été attiré par la mise en scène et lorsque je jouais dans les pièces
dont j’étais aussi le metteur en scène, je passais plus de temps à faire
répéter les autres comédiens et à penser à la mise en scène qu’à travailler
et à apprendre mes rôles. Jouer et mettre en scène sont deux choses très
opposées qui ne font pas appel aux mêmes facultés. Ce fut très enrichis-
sant pour moi de le comprendre dès le début. Cette première expérience
m’a permis de me tester dans ce travail de mise en scène et de direction
d’acteurs. Elle m’a également permis de rencontrer Jean-Luc Jenner, le
directeur du Théâtre du Nord-Ouest à Paris, qui m’a confié mes premières
mises en scène professionnelles : ce fut tout d’abord deux pièces de Mari-
vaux, L’héritier de village et Les Sincères. Ensuite j’ai monté Jeanne et
ses juges de Thierry Maulnier puis Timon d’Athènes de Shakespeare et
cette année Dom Juan de Molière, que nous avons repris au mois de
septembre au théâtre Mouffetard.
Philippe Fossé
Vous parlez de mise en en scène et de direction d’acteurs, quelle diffé-
rence faites-vous ?
Cyril Le Grix
Le terme de mise en scène est un terme impropre, car il définit très par-
tiellement le travail du metteur en scène, surtout depuis la création de
cette fonction à la fin du XIXe siècle. Voltaire, au XVIIIe siècle, est le premier
à commencer à y réfléchir. Cela allait de pair avec la recherche d’un jeu
plus « psychologique », plus naturel, moins formel. Il a cherché à faire
évoluer le jeu des comédiens car il ne supportait pas la déclamation. Il
LA MISE EN SCÈNE DE THÉÂTRE EST UTILE À L’ORATEUR 79
s’est battu également pour faire disparaître les spectateurs installés sur la
scène autour des acteurs. Le théâtre était alors un divertissement mondain
où le public n’hésitait pas à interpeller les acteurs ou à discuter ; pendant
les représentations la salle restait allumée, la notion de « quatrième mur » 1
était inconnue. Il y a eu, de la part de Voltaire, une vraie réflexion sur l’art
théâtral en général et sur la mise en scène en particulier. On a tendance
à l’oublier car l’œuvre dramatique de Voltaire est tombée en complète
désuétude.
Philippe Fossé
En fait la mise en scène n’existait pas réellement et c’était un comédien
de la troupe qui prenait en charge les placements des autres comédiens.
On ne pouvait pas encore parler réellement de mise en scène.
Cyril Le Grix
Jusqu’à la fin du XIXe siècle, quand l’auteur montait une pièce de son vivant,
il la mettait le plus souvent en scène, et quand il ne le pouvait pas, c’était
le directeur du théâtre qui s’en chargeait. Quand il s’agissait d’une pièce
du répertoire classique, le plus souvent, le comédien principal faisait la
mise en scène. Mais là encore, il s’agissait principalement de « mises en
place » et d’indications des déplacements de chaque acteur. La mise en
scène n’était alors qu’une approche technicienne, oserais-je dire. Au début
du XXe siècle, lorsque la lumière électrique, c’est-à-dire les projecteurs, a
fait son apparition dans les théâtres, le metteur en scène a pu créer de la
lumière et il a fallu attendre les années 1950 pour que la fonction de créa-
teur lumières apparaisse.
Philippe Fossé
Votre rôle de metteur en scène, c’est de donner votre interprétation du
texte pour ensuite diriger les comédiens et les amener à exprimer ce que
vous voulez dire.
Cyril Le Grix
Oui, c’est avant tout une rencontre avec un auteur, avec le texte de sa
pièce, avec une pensée et une réflexion philosophique. Mais c’est le texte
qui est déterminant et amène le metteur en scène, s’il est vraiment « tra-
versé » par ce texte, à s’impliquer et à donner une couleur personnelle à
sa mise en scène. En tant que metteur en scène, je suis un traducteur
puisque mon rôle est de donner corps à un texte, d’offrir de la chair à des
mots. La forme théâtrale est une forme différente de l’écrit, même quand
l’écrit a été pensé pour l’oralité. Truffaut disait « traduire, c’est trahir » en
parlant de l’adaptation cinématographique.
• Repérez et soulignez les mots importants appelés « mots clés », car ils
vous permettront de retrouver l’idée principale, ou « idée-force », dans
chaque phrase ou dans chaque paragraphe.
• Écrivez ces mots clés sur une autre feuille dans l’ordre de la lecture.
C’est à partir de ces mots que vous allez pouvoir construire votre diapo-
rama ou votre « conduite ».
Mais en plus de ces images reçues par les auditeurs, il y a les projections
d’images ou de textes utilisés pendant votre intervention et dont le rôle est
précis, à savoir : présenter et renforcer les différentes parties de votre
propos. Mais en aucune manière la projection d’images ne doit prendre
COMMENT CONSTRUIRE DES SUPPORTS VISUELS EFFICACES ? 187
• 5 minutes pour susciter l’intérêt par une phase d’accroche, forte, positive
et dynamique : ce sera la phase d’intérêt pour le récepteur.
• Par ailleurs, vous ne devez pas développer plus d’une idée par diapo-
sitive car il y a un risque de déperdition du message. N’oubliez pas ! Le
visuel projeté doit aider l’auditoire à comprendre votre propos.
• Utilisez plutôt les minuscules car elles sont proches de l’écriture et donc
plus faciles à lire. En effet, la lecture est plus rapide et plus englobante,
et certains caractères auront des « corps élevés » qui se détacheront du
texte, par exemple : d, f, g, h, l, p, q, t, y.
• Les majuscules obligent le lecteur à déchiffrer les mots lettre par lettre
et pour certaines lettres, l’absence d’accent demande un temps d’adapta-
tion à l’auditoire. Ainsi, il est plus facile de lire : « Améliorer la sécurité
des salariés spécialisés » plutôt que « AMELIORER LA SECURITE DES SALA-
RIES SPECIALISES ».
En revanche, vous pouvez utiliser les majuscules pour les titres. Mais
ceux-ci doivent être accentués. Écrivez SÉCURITÉ et non SECURITE (...)
Livrable 6
Le travail de l’articulation
Articuler signifie séparer les syllabes afin que l’auditeur entende chacune
d’elles et de ce fait comprenne parfaitement ce que l’orateur dit. Il n’est
rien de plus désagréable pour l’auditeur de ne comprendre qu’un mot sur
deux. Très vite celui-ci va « décrocher », ne plus écouter, s’ennuyer,
s’évader et... partir.
En effet, pour être audible dans cet exercice, vous serez amené à exagérer
le mouvement des lèvres. Si vous répétez cet exercice plusieurs fois, les
muscles des lèvres, appelés muscles labial supérieur et labial inférieur,
mémoriseront les mouvements exagérés que vous leur avez demandés
et les reproduiront sans que vous soyez obligé de passer par l’exagération
précédente.
Vous pouvez également utiliser des textes des grands auteurs tels que
Molière, La Fontaine, Baudelaire, Boileau ou Shakespeare. Lisez-les en
exagérant l’articulation afin de faire travailler les muscles labiaux.
Voici quelques extraits du texte L’art poétique de Nicolas Boileau dit Boi-
leau-Despréaux (1636-1711). Ce très beau texte de 1674 est en alexan-
drins, ce qui vous permettra de vous appuyer sur le rythme.