Cours N 1 Criminologie
Cours N 1 Criminologie
Cours N 1 Criminologie
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Cours n° 1/ Criminologie : Notion et domaine
Pr. Khalid ATMANI
Le problème des crimes est aussi ancien que l'existence des groupes sociaux
structurés, en d'autres termes, que l'existence des hommes sur la terre. "Là où il
n'y a ni morale, ni règle, il n'y a, par conséquent, non plus de crimes" (O.
KENBERG). Le crime est, depuis toujours, un problème qui ressortit à la morale
d'une part, et au droit pénal d'autre part. Il s’ensuit que, traditionnellement,
seules les études philosophiques et les études juridiques traitaient du problème
des crimes.
Les sciences de l'homme ont évolué beaucoup plus lentement que les sciences
de la nature. La philosophie et l'histoire ont donné progressivement naissance à
la psychologie, à la sociologie, à l'anthropologie, à la science politique et enfin à
la criminologie.
Ce 1er cours constitue une introduction à la criminologie. Son objectif est
double :
- Primo : dire ce qu’est la criminologie
- Secondo : évoquer son domaine
I- Définition de la criminologie
A coté du noyau dur que constituent le droit pénal et ses différentes
branches, se sont développées des disciplines issues de la spécialisation, sur le
terrain de l’analyse criminelle, d’un certain nombre de sciences dont le champ
est plus vaste. La criminologie s’attache ainsi à l’analyse des facteurs
susceptibles de conduire à des comportements déviants ou criminels. Elle
s’intéresse tout particulièrement à la recherche des facteurs les plus divers
pouvant tenir à la personnalité même de l’auteur des faits ou au contexte (social,
économique, culturel ou géographique) dans lequel il se trouve. Pour mieux
appréhender l’extrême complexité du phénomène criminel, la criminologie se
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nourrit des apports des sciences les plus diverses (médecine, psychiatrie,
psychologie, sociologie, biologie, génétique…etc.)
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endogènes (hérédité, age, troubles psychologiques) et les facteurs
exogènes (causes tenantes au milieu familial, social, économique) que
l’on retrouve dans la personnalité de chacun des délinquants.
• Autre apport essentiel de la criminologie est l’étude de la personnalité du
criminel. En effet, pour les criminologues « l’homme passe avant l’acte »
tandis que pour les juristes pénalistes « l’acte passe avant l’homme ».
• Le but des criminologues est certes de parvenir à appréhender le
phénomène délinquant, mais pour y parvenir il faut utiliser certaines
méthodes. Les criminologues suivent certaines approches, concepts,
règles (Voir le cours N°4).
• La criminologie est une science interdisciplinaire : CAD, il est au
croisement des sciences de l’homme. Cette affirmation est exacte, dans la
mesure où, au moment de sa naissance, de son émergence du milieu des
sciences humaines et sociales, toute nouvelle synthèse se construit des
matériaux des plus anciennes disciplines. Toute science est donc de
carrefour, à ses débuts. C'est ainsi que la criminologie naissante se
nourrissait des éléments provenant de la psychologie, de la sociologie, de
la science policière et du droit pénal qui ont traité le phénomène criminel,
non pas en lui-même, mais comme un aspect de leur objet propre.
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1- La science du comportement criminel :
Dite également « Anthropologie criminelle », dont le père fondateur est
Lombroso, médecin légiste et médecin spécialiste des malades mentaux et qui a
occupé ce poste dans l’armée italienne.
C’est la science qui prend la personne du criminel comme objet de son étude.
Il analyse les comportements qui peuvent conduire à la commission d’une
infraction. Il s’intéresse à l’étude des caractéristiques physiologiques et
psychiques et les facteurs héréditaires du criminel, pour expliquer les causes de
l’infraction.
2- La sociologie criminelle :
Elle s’intéresse à l’étude des facteurs exogènes de crime, et l’influence de
l’environnement dans lequel vit le criminel, c’est-à-dire des circonstances
sociales, économiques et professionnelles de l’individu, il s’agit de la société, y
compris le milieu familial, la situation économique et culturelle et
l’environnement social du criminel d’une manière générale.
3- La psychologie criminelle :
La psychologie criminelle s’intéresse au sens large à l’intention, consciente,
inconsciente, subconsciente du criminel, aux motifs d’interaction, etc….
Il s’agit d’analyser les aptitudes mentales de l’auteur d’une infraction ou les
séquelles qu’il a pu laisser sur sa victime.
Il a fallu attendre Freud pour y ajouter une approche psychologique à l’étude
criminologique. On peut y voir ce qu’est la psychologie criminelle, l’interaction
psychologique, l’intervention psychanalytique, psychologie de l’enfant,
psychologie sociale.
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§2- La Criminologie et les sciences criminelles empiriques
La criminologie n’est qu’une science criminelle parmi d’autres :
1- Criminologie et criminalistique
2- Criminologie et pénologie
3- Criminologie et politique criminelle
1- Criminalistique :
Elle regroupe l’ensemble des procédés résultant de l’application des
connaissances scientifiques, à l’établissement de la preuve des infractions et de
l’identité de l’auteur.
Ainsi d’après la définition de criminalistique apparaît comme un outil
indispensable pour l’enquêteur dans l’établissement de la preuve alors que la
procédure pénale va s’intéresser aux règles qui régissent l’admission de la
preuve. La criminalistique s’intéresse à la mise en oeuvre de ces procédés.
L’utilité de cette science est importante, elle est considérée, en effet, comme
un soutien et un support du droit pénal. La criminalistique comprend
essentiellement :
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2- Pénologie ou science pénitentiaire :
Cette science a pour objet l’étude de l’exécution individualisée des peines
infligées par le juge aux auteurs d’infractions pénales. Elle consiste à déterminer
concrètement les mesures permettant, d’une part, de rétablir l’ordre public et
protéger la victime et, d’autre part, de sanctionner l’auteur de l’infraction tout en
favorisant sa réinsertion sociale et professionnelle afin de prévenir sa récidive.
On réalité, il existe des liens étroits entre la criminologie et la pénologie à tel
point qu’à la fin du 19ème siècle on les assimilait. De nos jours encore la
pénologie fait partie de la criminologie aux USA, en Egypte. Certes, en raison
des liens forts qui existent entre infraction et sanction. Sans la criminologie, la
pénologie n’a plus de sens et vice versa. En d’autres termes, la criminologie et la
pénologie participent en étroite collaboration à la lutte et la prévention du crime.
3- Politique criminelle :
Les contours de la politique criminelle sont particulièrement difficiles à
préciser. Entendue au sens étroit, la notion de politique criminelle est synonyme
de politique pénale. Elle a, ainsi, été définie par FEUERBACH comme
« l’ensemble des procédés répressifs par lesquels l’Etat réagit contre le crime ».
D’autres, tels Marc ANCEL notamment, ont défini plus largement la politique
criminelle, comme couvrant non seulement le système de répression mais
également la prévention. A vrai dire, l’étendue de la politique criminelle peut
encore varier jusqu’à se fondre plus au moins complètement dans « la politique
sociale ».
Une politique criminelle apparaît, ainsi, comme une réflexion sur le
phénomène criminel et sur les moyens à mettre en œuvre, afin d’apporter une
réponse pragmatique aux comportements de délinquance et de déviance. Elle est
donc une stratégie étatique, élaborée à partir de choix idéologiques pour lutter
contre tous les problèmes posés par la prévention et la répression du crime.
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Certes, le droit pénal constitue l’un de ces procédés, mais il n’est nullement
exclusif. Aujourd’hui, une politique criminelle est appelée à s’enrichir
d’avantage des sciences criminologiques.
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Mais l'interprétation à tirer des données ainsi dégagées doit demeurer
circonscrite à l'échelle de la société globale. Elle permet de mettre en lumière les
rapports qui existent entre la criminalité et les phénomènes démographiques,
économiques, culturels, sanitaires, politiques. Elle ne permet pas d'en déduire
des conséquences sur le plan des cas particuliers. Le fait d'être marié ou
célibataire doit être apprécié par rapport à l'ensemble des données recueillies sur
le plan individuel.
§2- Le criminel ou si l'on préfère l'auteur de l'acte délictueux doit être étudié
individuellement. Il est d'usage à cet égard d'opposer dans une terminologie
rigoureuse les méthodes cliniques et les méthodes expérimentales. En
criminologie, l'on se contente généralement de ranger sous le terme de méthodes
cliniques l'ensemble des méthodes d'approche individuelle. Étymologiquement,
la clinique c'est l'examen du malade couché dans son lit. Mais, déjà, en
médecine, ce sens étymologique a été étendu à tout examen du malade. On
distingue, toutefois, de cet examen direct les examens de laboratoire d'ordre
biologique ou chimique, par exemple. Par analogie, on devrait dire qu'en
psychologie l'examen clinique est constitué par l'interview du sujet, tandis que
les tests sont des examens de laboratoire. De fait, on a opposé pendant
longtemps les méthodes de la psychologie clinique à celles de la psychologie
expérimentale au détriment de l'unité de la psychologie. Finalement une
tendance s'est manifestée qui réunit sous le nom de méthodes cliniques toutes
celles qui permettent la connaissance des cas individuels. La criminologie a
donc pris comme point de départ ce qui a constitué le terme d'une évolution en
psychologie.
Les méthodes cliniques peuvent être utilisées dans le cadre, soit d'une
approche transversale, soit d'une approche longitudinale. La première a pour
objet de mettre en lumière les caractéristiques d'un sujet à un moment donné,
tandis que la deuxième consiste à le suivre dans son évolution et à l'étudier à des
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dates différentes. Les travaux de M. et Mme GLUECK aux États-Unis et de M.
FRET en Suisse permettent de suivre des délinquants juvéniles et
d'individualiser ceux qui récidivent ou ne récidivent pas.
§3- Le crime ou si l'on préfère l'acte délictueux doit être étudié en l'isolant
dans la vie ou la carrière criminelle envisagée. Il doit être considéré comme un
épisode qui a un commencement, un développement et une fin. Il s'agit d'une
approche très fine, très nuancée qui repose sur le témoignage du sujet ainsi que
sur celui des autres acteurs du drame. Elle exige l'étude des documents
judiciaires et policiers, elle doit tendre à saisir objectivement la subjectivité. Elle
constitue l'approche criminologique par excellence, celle où l'on s'efforce
d'appréhender la convergence des facteurs et des mécanismes biologiques,
sociaux, psychologiques qui conduisent au passage à l'acte.
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