Histoyre Du Mechique

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Journal de la Société des

Américanistes

Histoyre du Mechique, manuscrit français inédit du XVIe siècle


Ed. de Jonghe

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de Jonghe Ed. Histoyre du Mechique, manuscrit français inédit du XVIe siècle. In: Journal de la Société des Américanistes.
Nouvelle Série. Tome 2, 1905. pp. 1-41;

doi : https://doi.org/10.3406/jsa.1905.3549

https://www.persee.fr/doc/jsa_0037-9174_1905_num_2_1_3549

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HISTOYRE DU. MECHIQUE

MANUSCRIT FRANÇAIS INÉDIT DU XVP SIÈCLE


PUBLIÉ
Par M. Edouard de JONCHE
Docteur en Philosophie et Lettres,
Membre de la Société des Américanistes.

INTRODUCTION,

On s'attendrait à trouver, sous ce titre, des annales ou


chroniques de tribus mexicaines, des listes et généalogies de leurs soi-
disant rois et .seigneurs,' la durée de leur règne respectif, leurs
guerres, t etc. Mais tel n'est pas exactement le contenu dès pages que
nous publions ici, et probablement pour la première fois. En réalité,
elles nous renseignent simplement sur les origines de trois tribus
importantes, sur le calendrier mexicain, sur des mythes cosmogo-
niques variés, et finalement sur la biographie du héros pacificateur
Quetzalcouatir
Il:y a donc un certain désaccord entre le titre et lé contenu du
livre/ A quoi" tient ce désaccord? Jetons, pour nous en rendre
compte, un regard sur le manuscrit français, n° 19031 de la
Bibliothèque Nationale de Paris. Celui-ci, rédigé sur papier au xvie siècle
qui'
et contenant 88 feuillets (290/207 mm.), est" un autographe
porte en deux endroits (f. 1 et 79) [la signature d1 André Thévet. Il
se compose de deux parties bien, distinctes : la première (f. Г-78)'
comprend des - fragments d'une ъ traduction française de Y Historié
general y natural de las Iňdias de Gonzalo Fernandez de Oviedo
y Valdes1. Une inspection rapide du livre XV (f. l-12)4m'a
convaincu que la traduction de Thévet est généralement fidèle et même
littérale. C'est là seconde partie. dû manuscrit que nous donnons,

1: Valladolid, 1557, in-fol. Rééditée en 4 vol.in-fol. 1851-1855, par la Real


Academia de la Historia de Madrid.
Société des Américanistes de Paris. 1
2 ' SOCIÉTÉ DES AMÉRICAN1STES DE TARIS

ci-après. Elle va du f. 79 au f. 88. A ce feuillet, une brusque


interruption du récit nous avertit que nous nous trouvons en
présence d'un fragment. Dans un mémoire présenté au XIVe
Congrès des Américanistes, à Stuttgart, j'ai prouvé par des- arguments
de critique interne l'état fragmentaire du manuscrit, et m'appuyant
sur les mêmes arguments de critique interne, je suppose que cet
assemblage confus et diffus de données mythologiques et
ethnographiques constituait l'introduction d'un véritable traité d'antiquités
mexicaines.
Le titre du manuscrit, par un autre détail,, mérite notre attention.
Il est ainsi rédigé : « Hystoire du Mechique traduicte de Spannol. »
Mais cette dernière mention est raturée. La rature d'ailleurs me
semble remonter à la même époque que le reste du texte. Ceci
constaté, on peut se demander d'abord si l'on ne se trouve pas en
présence d'un morceau de fantaisie. Dans ce cas, Thévet aurait eu,
dans l'origine, l'idée de la publier comme une de ces adaptations
plus* ou moins littérales du castillan qui, à son époque,
rencontraient un si. grand succès. Puis il aurait renoncé à son projet. Bien
que ce genre . de supercherie ait été < familier [aux érudits du
xvie siècle, la vérité me paraît être autre. Thévet a bien traduit i là
un auteur espagnol; il a pensé à publier cette version. Puis il s'est
décidé à l'insérer dans sa Cosmographie, mais en y introduisant
certains changements, surtout quant à l'ordre des matières. Et ces
modifications, qui transforment l'œuvre ; première en une œuvre
personnelle, sinon originale, justifient la rature.
Quoi qu'il en soit, un long travail de comparaisons et de
déductions, résumé dans mon mémoire de Stuttgart, m'autorise к
identifier l'original espagnol de YHistoyre du Mechique avec le traité
des AntiguedadesMexicanas du franciscain André de Olmos, traité
aujourd'hui perdu, mais, que Mendieta cite, au prologue de son
livre II, comme l'une des sources qu'il consulta pour son Historia
Ecclesiastica Indiana^. On. voit dès Jors l'intérêt du manuscrit
inédit de Thévet et l'utilité qu'il y a à le faire connaître. Puisse la
lecture.de cette pâle version française hâter, la résurrection de
l'œuvre d'Olmos, ensevelie encore, nous l'espérons, sous la
«poussière de quelque bibliothèque ! Cette résurrection rendrait enfin

1. Publiée pari). J. Garcia Icazbalceta. Mexico,- 1870, in-4.


IlISTOYREfDU MECHIQUK. 3

possible la critique sérieuse, nette et précise,- d'un .grand1 nombre


d'historiens deJ'ancien Mexique, moines et aulres, et. soulèverait
un des, plis, du voile qui couvre encore le • passé précolombien de
l'Amérique moyenne.
Les mérites du P. Olmos ne nous sont connus que par ouï-dire;
et il serait, superflu d'y insister. Mais il convient de dire un. mot de
son traducteur présumé. André Thévet, né à Angoulême; se; fit
pendant sa longue vie (il mourut nonagénaire) une grande
réputation -de voyageur et de géographe. 11 aimait passionnément les
voyages et s'intéressait, un peu naïvement il est vrai; aux moindres
détails des civilisations qu'il visita. , L'ethnographie,* au xvie siècle,"
n'était pas constituée comme une* science; et :l'ou aurait vraiment
.

tort d'en faire un grief à Thévet. S'il estipeu exact et crédule, c'est
qu'il expose comme ;de simples -curiosités, comme des «singula-
ritez » les faits que l'ethnographie contemporaine s'impose le devoir,
d'étudier scientifiquement, consciente de l'importance des
inductions .qui s'amorceront sur ces faits.!
Ledivre capital de, Thévet, ouidunioins celui qu'il a*pu
concevoir comme stel,* est .sa Cosmographie universelle, punie en 1575.
Bien .antérieurement, : en 1554,. il avait publié la relation de ses
voyages enOrientet, en 1558, scelle de soivvoyage.au Brésil;*, Si
l'on veut, d'après les écrits mêmes de Thévet, dater ses 'différents
voyages, on sesheurtera à des difficultés sans : nombre; L'introduc-
tion-de la Cosmographie universelle nous apprend que ses voyages
ont duré J 7 ans oibenvironn Diaprés la •> С os то graphie du -Levant y
sonsvoyage d'Orient avait' commencé en 1549, 1 ; en 1550, nous le
trouvons, à> Ghalcédoine 2 et, en 1552, à Jérusalem3. En 1555, il
accompagna le chevalier de ;Villegagnon au* Brésil français.. Dans
ses ouvrages manuscrits, écrits plus tard, nous lisons qu'il a>fait
deux voyages en Amérique : le premier, en 1550, avec le fameux
pilote Guillaume le Testu4; le second, en 1555, avec le chevalier

!.. Cosmographie du Levant. Lyon, 1556, p. 16 de la préface.


2. Même édition, ch. XXIII, p. 78.
3. Même édition, ch. LI, p. 182.%
4. Ms. français n° 15454 t de la bibl. nat. de Paris, f° 103, .106 v°, etc.*
D'après un passage du ^Grand Insulaire et Pilotage /d'A. Thévet (Ms. fr. .
n° 15452), publié dans le Recueil de Voyages et de Documents pour servir a
L'histoire de la, Géographie, de MM. Schefer et Cordier (Le Discours de la\
4 SOCIÉTÉ s DES AMÉR1CANISTES DE PARIS
de ;Villegagnon. Comment concilier ce < voyage- de ! 1550 avecles
dates assignées par ïhévet lui-même à son séjour en Orient? M. le
Dr E.-T. Нашу,' s'appuyant sur un passage de la Cosmographie
universelle (1. VIII, ch. IX) et sur la chmnologie des voyages de
Pierre Gilles *, conclut que iïhévet aurait-été en Orient entre-1544
еЫ547. Je suis porté à l'admettre ; mais j'avoue que cette explica-
tionlaisse subsister bien des doutes : quel intérêt ^Thévet avait-il à
reporter vers 4 549- \ 552 un voyage qu'il aurait* fait » en^ 1544-4547?
Et si l'on attribue cette erreur à une simple négligence; on est encore
en* droit de se demander pourquoi la relation sur la' France
antarctique ne fait aucune' allusion à un voyage antérieur dans les mêmes
contrées/ Thévet explique les raisons pour lesquelles Villegagnon se
l'adjoignit comme compagnon de voyage : ih avait 'fait* un -voyage
en Orient et avait t rendu des г services à« la marine. S'il avait ! fait
antérieurement un voyage au Brésil avec Testu; c'était le-moment
ou jamais -de 'le signaler.
Mais cette question appartient plutôt à l'histoire > de la
géographie2. Iben est шпе qui' nousj intéresseras davantage; : lat date du
manuscrit ou, plus exactement; celle de l'original dont le manuscrit
présente! la -traduction." Ашспар. V«(f. 82),! nous* trouvons г les
indications suivantes: « Libre du compte des années; par le quel
« est trouvé qu'ils entrèrent en Mechique, le an de'Omec'alij qui
« estoytle 28iesme de leur premier temps; car, ils font quatre temps/
« chascung des quels vault 52 ans, et chascung de cestemps'avoyt
« quatre1 hebdomadas; que vault chascugne 13 ans,* et l'an avoyť
« dishuictmoySj-etle moys vingt jours ; tellement que ung an? vient

navigation^ de Jean- et .Raoul Parmentier, Paris, Leroux, 1883, > p.- 180)," ce
premier voyage avec Testu aurait eu lieu- en 1551.-. Cf. , Ms. fr. n°. 15452 ,
f° 193 v°.
1. Le père de la Géologie française, Pierre Gilles, ďÁlhi. Extrait des
Nouvelles Archives du Muséum, série II, Paris, Masson, p. 17.
2. Ouvrages consultés sur Thévet : Paul GafFarel, Histoire du Brésil français
au XVIe siècle, Paris, Maisonneuve, 1878: Id., Les singularitez de la France
antarctique, avec notes et commentaires, Paris, Maisonneuve, 1878. 'Id.-
Édition de J. de Léry : Histoire d'un voyage faict en la terre du Brésil, Paris,
Lemerre, 1880. H. Ilarrisse, Jean et Sébastien Cabot, dans Recueil de Voyages
et de Documents:.... de MM. Schefer etCordier, Paris, Leroux, 188*2. Heulhard,*
Villegagnon, roi ď Amérique, Paris, Leroux, 1897. J. S. Corbett; Drake and1
the Tudor Navy, 2 vol., 1898, etc.
HISTOYRE DU r MECHIQUE < # 5
«.à, faire 365 jours.. Ils demeurèrent doncques par les, chemins
« quatre. temps qui font 208, ans., Et estant arrivés au. Mechique,
«furent 28, ans àla.funder et alors entrèrent et commencèrent à
« compter despuis la arrivée jusques à présent que fut selon. nostre
« compte , l'an >de l'Incarnation de t Nostre Seigneur Jhesu .Christ
« MIIIGXXI. Tellement qu'il y a GGXXII ans que le;Mechique ast
« estéfundé, et avec le temps qu'ils ont mis en chemin, sont huict
«> temps des siens, et 22 ans et quelques jours, comme iLse. trouve
« au libre de leur compte, que font CGGGXX XVIII ans qu'ils sont
« sortis de leur païs. Et il y a GLXX ans que Mechique » est chef
«î deroiaulme. »
L'interprétation de ce passage présente de sérieuses difficultés.
Faut-il compter 222 ans depuis 1321 ou depuis 1321 + 28 = 1349 ?
Dans. le premier cas,, nous obtenons 1543; dans le second, 1. 1571 ;
;
eť aucune deices deux dates л\е, concorde avec la) donnée « ilya
(u 438 ans qu'ils sont sortis de leur ipaïs ». En .effet, 1543 — 438
= 1105, mais. 1105 + 208 .+ 28.= 1341 1 qui n'est pas la, date
assignée ai la fondation > de Mexico. , D'autre part, ,, 1571- — 438
= 1133, et 1133 + 208 donnent encore 1341.
Pour résoudre ces difficultés, il importe d'analyser soigneusement
le passage, en y faisant ressortir la suite des idées. Le Xiùhtonalli dit
que les Mexicains entrèrent « en Mechique » l'an ОтесаШ, qui est
le .28e de leur premier temps '. A ce propos, l'auteur donne
quelques détails sur le calendrier mexicain. Il interprète ensuite
cette date ОтесаШ (c'est1 indiqué par la conjonction doncques) par
rapporťau foyer d'émigration;, puis il l'identifie avec l'année .1321
et la. met. en relation . avec la date où il. écrit. Alors, ib résume,
citant.de nouveau son livre mexicain,1 toute la chronologie , et finit
par une consideration; sur la durée de la. royauté mexicaine. .
Cette analyse nous permet de négliger la distinction subtile, qui
nous inquiétait, entre l'arrivée au Mexique et l'entrée à Mexico. En
effet, on s'aperçoit aussitôt que l'auteur s'est senti gêné par ce fait :
les Mexicains ont fait leur entrée « en Mechique,» la* 28e année de
leur premier temps. Il en a trouvé cette explication - bizarre : ils
ont' peregrine quatre temps, et ont mis 28 ans à bâtir Mexico. Nous

1. Le mot temps , désigne ici le xiuhmolpilli ou cycle mexicain. L'an Ome-


callvest le deuxième de la 3e hebdomade ou tlalpilli, et le 28e du cycle. .
6, SOCIÉTÉ DES AMÉRICANISTKS DE PARIS
admettons* donc 1321* —[- 222 = 1543^ comme • la dale á laquelle
écrivait d'auteur. Mais la difficulté subsiste toufr entière pour les
438<ans qui se sont écoulés depuis l'origine des- pérégrinations.
Ici; nous constatons que l'auteur n'interprète plus lui-même.. Il
recourt à sa source : « comme il se trouve au libre de leur compte ».
Ce "chiffre 438; qui concorde avec la date 1523, regarde donc moins
la; dale de composition' de YHistoyre du Mechique>que celle- du
Xiuhtonalli: L'erreur s'explique par ce fait bien simple qu'ici
'l'historien copie littéralement sa3 source, sans prendre soin de l'adapter
à la date où il compose.
Cette interprétation pourrait paraître arbitraire si nous n'avions
pas l'indication que la royauté mexicaine existait5 depuis 170 ans.
L'origine de la royauté mexicaine,1 ou plutôt l'avènement d'Acama-
pichtli, s se placerait ainsi en 1543 — 170 = 1373. Or,5> c'est
approximativement la1 même date * que nous obtenons en ajoutante 1321
les 53 années de gouvernement de Tenuch, d'apr.ès la Cosmographie
universelle (t. II, f. 987 v°). Ce fait confirme* notre interprétation
et nous met en -présence d'un système chronologique déterminée

Entrée à Mexico 1 321


Durée des pérégrinations. 208 —}- 28 = 236 ans
Date du départ 1321 — 236 = 1085 ,
Avènement d'Acamapichtli 1373 ,
Composition du Xiuhtonalli . . 1523 .
Composition du ms. espagnol 1543 2

La question de savoir en quelle année Thévet a traduit YHistoyre


dwMechique ne présente pour nous qu'un intérêt secondaire. Il
nous suffit qu'elle soit antérieure à la composition et peut-être à' la
conception de la Cosmographie universelle ï Refondu dans ce vaste
répertoire, le manuscrit perdit beaucoup de son importance:1 Nous

1; La différence d'une année est parfaitement négligeable; Pour la faire


disparaître, il suffît, en effet, de compter les années du gouvernement de Tenuch
à partir de 132L inclusivement.
2. Cette chronologie - n'est pas sans analogie avec celle de- l'interprète du.
Codex Mendoza, que Thévet possédait. D'après cet interprète, la fondation de •
Mexico, que le « Mendocino » même rapporte à YOmecalli, date de 1324,
l'avènement d'Acamapichtli" de 1375; Tenuch aurait gouverné 51' ans.- Cf.
Anales -del Ma seo nacionál de Mexico,- 1. I, 1879, p. 120-122.
HISTOYRE DU MECHIQUE 7


le voyons passer presque inaperçu dans la collection Séguier-Coislin ;
de là, dans le vieux fonds de Saint-Germain-des-Prés, pour entrer
finalement à la bibliothèque nationale de Paris.:
D'autre part, le sort de la Cosmographie universelle elle-même
ne fut. pas heureux. Elle fut très longtemps et, souvent injustement,
frappée de discrédita De nos jours,- un certain revirement semble se
produire, et M. G. Musset pouvait écrire, en 1892- : « La critique
moderne devient tous les jours moins sévère pour ce
chroniqueur l. » M. Bastian s'estdonné la -peine de dépouiller la partie
mexicaine de la Cosmographie. • II en cite souvent, mais sans
critique, des passages, dans son livre intitulé : Die Culturlânder
des al ten Amerika 2. Rien ne prouvetqu'il- ait connu le manuscrit
de Thévet, dont la collation lui eût été indispensable, s'il avait
voulu faire de la critique.
Autorisé par ces exemples, j'ai cru le moment favorable pour
publier Y His toy re du Mechique qui, jusqu'à nouvel ordre, peut
fournir aux chercheurs des indications très précieuses. Pour faciliter
les recherches, je me suis efforcé, dansdes notes marginales, de
faire quelques rapprochements avec les textes les plus connus3. Les
notes au bas des pages sont presque exclusivement linguistiques :
j'y interprète autant que possible les termes nahuas, et j'en redresse
bien souvent l'orthographe vicieuse. Il m'arrive aussi,, mais plus
rarement, d'y commenter des faits. Une stable alphabétique des
termes nahuas,. placée à la fin de ces pages, en rendra, j'espère, la
consultation plus facile. Avant de laisser la parole au bon Thévet,
qu'il me soit en tous cas permis, sinon d'acquitter, du moins
d'affirmer ici une dette. Le présent travail a largement profité des
conversations de M. Lejeal et de ses leçons au Collège de France.
Mis en rapport par lui avec son maître, M. le professeur E.-T. Hamy,

1, Bulletin de Géographie historique et descriptive, 1892, p. 247.


2. 3 vol:, Berlin, 1878. !T. II, « Beitriige zu gesch. Vorarbeiten auf westl.
Hemisphere », p.- 379 ssq. : Zur Geschichte des alten Mexico. ,
3; Pour* ces rapprochements, je me suis borné à Mendieta et à Torquemada.
Je désigne ces deux auteurs par leur initiale, et j'indique autant que possible la
pagination, d'abord,-, et ensuite la subdivision en livres et chapitres.. Par la
lettre B, je renvoie aux passages de la Cosmographie cités par M: Bastian dans
ses Culturvôlker. Je donne enfin dansJa marge la pagination du manuscrit de
Thévet.
8 SOCIÉTÉ DES 'AMÉRICANISTES DE PARIS

j'ai reçu , de ce dernier, avec, le plus i encourageant accueil,- les


meilleures, indications,; principalement pour les; petits problèmes
d'histoire géographique que soulève la lecture du manuscrit: Enfin,
au début de, mon actuel\séjour à. Berlin, M., le professeur. Seler
m'ai fourni,; avec unes rare obligeance,; de nombreuses solutions
étymologiques. Je tiens à réunir leurs trois noms dans l'expression
de ma cordiale gratitude.

f. 79. HISTOYRE DU'MEGHIQUE (traduicte de spannol).

Chapitre I

Des premiers fundateurs de Tezcuq,


vile àhuict lieues 1 de Mechique.

M si, 114. Tezcuq c'est une vile principale située à huict lieues du
(VI 44) Mechique tant par eau que par terre, de la quelle ceux qui à
в и 400 présant la tienent afîrment avoyr esté eux et ses ancestres les
premiers fundateurs, à là façon suivante : ung jour de bon matin-
fut jetée une flèche du ciel, la quelle cheut en ung lieu diet Tez-
calque 2 qui à présent c'est une vile ; du pertuis de la quelle flèche
sortit ung homme et. une femme ; le nom de l'homme estoit Conte-

1. La. ville de Tetzcuco; dans la Cosmographie, elle est appelée Texcinq


par suite d'une erreur de copiste. La distance entre Tetzcuco et Mexico nTest pas
la même ici que celle indiquée par les Memoriales de Motolinia (« cinco léguas
detraviesa de agua », p. 5 et 6, éd. Garcia Pimentel). D'après Ла Relacion de
.Tezcoco ďe Pomar (Icazbalceta, Nueva Co/ecc, III, p. 3),. cette distance est
de 3 lieues par le lac, 7 lieues par le Nord et 8 lieues par le Sud.
2. Tezcalco ou Tetzalco dérive du mot tetzcalli (cf. tetzcal-tetl : albâtre, et
texcalli : roche). D'après Torquemada (t. II, p. 79, 1. VI, chap. 44), cette genèse
s'est produite ce en tierrade Aculma, que esta en termino de Tetzcuco dos
léguas, y de Mexico cinco ». Pomar signale, à une lieue à l'est de Tetzcuco,'
i

une petite colline appelée. en Chichimèque Telzcotl. Telle serait l'origine'du


nom de Tetzcuco. La colline porte encore le nom de Tetzco-tzinco.
HISTOYRE DUMECHIQDE» . У

comael1, c'est à dire teste, et Loli2 c'est à dire esparvier, le nom


de la femme estoit Compahli 3, c'est à« dire cheveux de certaine
herbe. Or, le diet homme ne avoit plus de corps que des aiselles en
hault; ni la femme de, mesme^ et engendroit > il metant sa-3 langue
dans la bouche de la femme. Ils ne cheminoint que à saultz comme
une pie ou- moneau. L'homme donc fit ung arc et des flèches avec
les quelles il tiroit aux oiseaux qui voloint, et si d'adventure il ne
tuoit'l'oiseau au quel tiroit, la flèche toumboibsus quelque coneilL
oils autre venaison, la quelle ils mangoint crue, car n'avointpas
encores l'usaige du feu et se vestoitf de; la < peau. Ceux-ci' eurent
six enfans et une fille 4, les quels s'en allèrent au dieu où à présent
est Tezcuq qui alors n'estoyt qu'une espoisse montaigne,1 pleine de
toute sorte de bestes des peaux des quelles ils se vestirent, et «tant
eux que elles ne.se rasoit iamais les cheveux. Ils-ofFroint/à la
terre de une herbe nomée en leur langaige tlacocacatl 5, en le nostre
veult dire herbe précieuse, à celle fin que • la terre, leur donna à

1 . Orthographe défectueuse, pour Tzontecomatl (zon-tli et tecomatl) qui veut


dire : tête séparée du corps. Ce nom fait défaut dans la Cosmographie.
2.4 Orthographe défectueuse, pour Tlotli= faucon, épervier. Le, nom dé cet
ancêtre, chez Mendieta et Torquemada, n'est pas un nom d'animal : il s'appelle
Aculmaitl, nom tiré de sa constitution fantastique.
3. Lisez Tzompachtli. Ce mot est traduit comme « capilli crispi » par
Hernandez [Historia plantar um Novœ Hispaniœ, I, p. 39, éd. de Madrid, 1790). Les
autres auteurs qui racontent cette légende nationale des Tezcucans insistent sur
l'origine solaire du premier couple : c'est le soleil qui envoie- sur terre la flèche.
Ici on se contente de dire que cela se passa le matin. Au surplus, le chap. , II
ne nous montre pas les Otomis comme les amis du soleil.
4. C'est sans doute par erreur que M. Bastian donne à Tzompachli six fils et
six filles.
5. Lisez tlaçoçacatl (tlaço-çacatl = herbe, paille, jonc). Avant l'introduction
proprement dite des divinités étrangères, il, aurait donc existé à Tetzcuco un
culte agraire, et ce culte aurait précédé la culture du maïs introduite par ceux
de Chalco. Cela semble assez étrange et l'on serait tenté de croire que ces
sacrifices s'adressaient plutôt au soleil qu'à la terre. On le supposerait d'autant
plus volontiers que dans un passage similaire à celui-ci, Motolinia leur attribue un
culte solaire : « No tenian sacrifîcios de sangre ni idolos, mas de llamar al sol
y tenerlo por dios, al cual ofrecian aves, culebras y mariposas »' [Memoriales
éd. Garcia Pimentel, 1903, p. 5). Malgré cela, je crois devoir m'en* tenir à la
version du manuscrit, parce que le chap. II nous présente ces mêmes hommes
comme adorateurs de la lune, en opposition avec les Popolucas, adorateurs du
soleil.
10 SOCIÉTÉ DES 'AMERICAN ISTES DE PARIS
manger. Vivoint ceux-ci en si grand paix- et amitié qu'ils ne eussent
osé faire ou dire chose d'ung à l'aultre qui le peust aucunement
faseheiv Mesmement si Tung trouvoit quelque beste morte que ung.
aultre eust frappé 'encores qu'il n'en sceust là où elle estoit, il ne la
pernoyt pas, maisiplus tosb le disoit aux aultres afin que celuy qui
la avoyttué, la alla quérir, tant ils estoint sans malice.' Aussi
bien ne s'en souciioynt pas du temps ni' savoy nt compter mois; ni
années, jusques à tant que1 les ^Mechiquiens1 leur aportèrentSides
calendriés, figurés de quelques caractères I. Ledict Loli doncques
et safemme^ furent1 les t premiers seigneurs de Tezcuq, mais ses
enfans s'en allèrent partie- païs voyr nouvelles terres et ils se
arrestoynt ou bon leur sambloyt,v tellement qu'ils peuplèrent
beaucoup de. lieux; mais ne arrestoint pas en aucunglieu tousiours, car
ne savoynt;poinct faire /maisons, ains vivoynt emdes cavernes qui
trouvoyntfaictes, ou faisoynt quelques petites maisons de branches
de arbres. et les îcouvroynt* dé herbes. La» chasse qu'ils^ faisoynt
la portoynt au seigneur qui estoyt- son père. Ils usoynt aussi de
telle abstinence envers les femmes que aussi tost que ung de eux
estoyt marié, il ne cognossoyt aultre femme que la siene, car ce
leur estoyt grand infamie 2. Le premier qui trouva idoles fust ung
des enfans de Loli, le quel aiant demeuré long/ temps hors ; de
Tezcuq, s'en vint vers son père et* aporta ung- idole nomé Tezca-
tlipuca3 eť lui dressa ung haustelà Tezcuq. Ел1 ce temps comman-

1*. Quelques-uns des traits de mœurs ici relatés manquent dans la


Cosmographie. Mais dans leurs grandes lignes ils ressemblent bien à la version
de Mendieta et deTorquemada. La ressemblance est surtout frappante avec les
Memoriales de Motolinia (p. 4 et 5, éd.J Garcia Pimentel) : « lis n'avaient' ni
maisons, ni habits, ni maïs, ni pain ; ils habitaient dans des cavernes et sur les
montagnes ; ils se nourrissaient d'herbes, de lapins et de lièvres qu'ils tuaient
à la chasse : ils obéissaient à un chef de clan ; ils étaient monogames ; ils n'avaient
pas de sacrifices sanglants ni d'idoles, mais adoraient le soleil ; les Culhuas leur
apprirent à cultiver la terre et à construire des maisons ; ils se marièrent ensuite
entre eux; les Mexicains leur apportèrent, avec les idoles, des sacrifices
sanglants. » J'insiste sur cette ressemblance entre- Motolinia et l'auteur du
manuscrit : elle est suffisante pour conclure à une source commune. Celle-ci ne
peut être que le fameux Xiuhtonalli du chap. V, que Motolinia cite sous le '
titre de Xihutonal amatl (p. 4).
2. Ici, comme ailleurs, la réglementation de l'adultère est une des première*
du droit civil.
3. Cf. Bastian, Die culturlánder, II, p. 427.
HISTOYRE-DU MECHIQUET 11

coynt ils désia à semer du maez et fîesoles qui sont quelques


semances qu'ils ont en Chalco i qui est à six lieues de TezcuqeX de
là ils transportarent la semence à Tezcuq et en semèrent.
Cependant Loli: vivoyh encore et estoyt -seigneur en.« Tezcuq; , mais il
mourust en ceste saison, et demeura héritier un sien fils le quel' se
maria1 iňcontiňant avec une fille 'dm seigneur < de <Culhuac<'in2 qui
est au près du Mechique, et ainsi qu'ils multiplioynt, ils se marioynt
les ungs avec «lès aultres, et ceste nacion comença à estre nomée les
Otomis3 et comencèrent àsbastir des. maisons. Ce segond seigneur
de Tezcuq eust un fils le quel seimaria avec une * fille duí, seigneur
Thèomulhilan 4; . mais il î fut- occis incontinent! par les**vasaux et
frères de sa femme, qui eurent despit de ce;mariage, et non contents
deJ'àvoir tué. se ruèrent sus ses i frères i et parens, et en. tuèrent
beaucoup. Lesplus vieuxdes frères de cette fille ^ mil* des
gouverneurs en ses terres, et estoiti fort s ingénieux/ et desiroyt f savoyr le
commencement de toutes choses, et^es enfans furent de mesme tet
vivoynt comme ;philosophes 6.

1. Ghalio dans la Cosmographie est une simple faute d'impression ; composé


vraisemblablement de challi — bouche et du suffixe со:
2. Située près du détroit unissant le lac deXochimilco à celui de Tetzcuco,
fut souvent confondue avec Acolhuacan. Sur l'étymologie de ces mots, ou trouve
des< choses, curieuses dans Mendieta, II, ch. 4 et • 33 ; Torquemada,* VI, .44;
Memoriales de Motolinia, p. 13.
3. Motolinia (Memor., p. 12) fait descendre les Otomis du sixième iils
d'Iztacmixcouatl, Otomitl; II faut remarquer qu'ici Motolinia ne représente pas
la version du Xiuhtonalli : à la pag'e 9,1 il nous avertit qu'il écrit ;sous la dictée
d'un ^vieillard des plus instruits. Cependant,; d'après* cette i version aussi, il y a
parenté entre les Otomis et les Chichimèques (Tetzcucans), car le même Otomitl
donna naissance à ceux-ci.
4. Erreur de transcription pour Tenochtitlan.
5. La Cosmographie dit : к le plus viel des frères de cestuy-ci. » La suite du
récit indique suffisamment que le personnage ici désigné n'est pas un Mexicain,
mais le seigneur des Otomis, dont il est question au chap.* IV.
6. Dans la Cosmographie, les origines tetzcucaness sont' décrites après lé récit
des pérégrinations des Aztèques. Cet ordre me paraît très raisonnable," Mexico
étant la capitale du pays conquis. Pourquoi le manuscrit parle-t-il de -Tetzcuco
en premier lieu? N'y a-t-il pas là une indication- de la» résidence de l'auteur?
Ecrivant à Tetzcuco, il est naturel d'admettre qu'il ait fait de cette ville le point
de départ de son histoire. ■
12 SOCIÉTÉ DES AMÉRICANISTES >DE PARIS

Chapitre II
Des barbes du soleill et comme a este' trouvé'< le feu;~

En ceste province àe'Tezcuq1 dessus descripte,' seigneurioynt des


Otomis,1 comme nous avons conté: -Mais* tout au près .vivoyt aultre
sorte fde 'gens- dits des1 Populoques l \ ers- la. iMistèque,, gens qui
adoroynt le soleill, comme les Otomis la^lune^croianteslre le
créateur de toutes les choses.-Et estoynt grands sorciers et enchanteurs
et les premiers qubtrouvèrent le feu, comme je ;vous conterai.' Uňg
de ces' Populoques, comme ils fusrenť oisifs et^gens quimeavoynt
soing de rien,1 prenant un baston fort sec,- aigu d'un costé; lé mit' sus
une 'pièce de bois aussi fort sèche par le coté aigu estant au soleill|
et sans i penser tournoyť le bâton sus la pièce de boys à manière de
tarayre à grand force;* avecques le quel mouvement quelques. petits
esclats sortoint d'un boys et de aultre,- et se* mouloynt fort mienu
jusques à tant que pour le grand. et continuel mouvement, que le
Indien faisoyt, le baston, se aluma par le moien.des esclats qui
conceurent soudain le feu.?; que aiant esté veu parles Populoques
leur fust merveille, et les principaux de entre eux ordonèrentpour
se faire plus»excelents que touts de faire ungs grand -feu,' et aiant
coupé beaucoup de bois, le emportarentau somet de plus haultes
montaignes de sa province et l'y mirent le feu, le quel'croisant et
la fumée fut veu par les Otomis, de quoy eux estant émerveillés et
ensemble courroucés, et comme honteux que aultres eussent trouvé
cela que eux, envoièrent des messagiers devers les Populoques pour
savoyr pour quoy ou qui leur avoytbaillé la hardiesse de ce faire
sans son commandement, car, disoynt-ils, faire un tel miracle

1. Les Populucas oibPupulucas, tribu > apparentée aux. Mixtèques et fixée


dans les districts de Tecamachalco et/Tehuacan (E. de Puebla, sur la frontière •
de l'Ei deiOaxaca)/ De même que^hontal^ce terme signifie ,«>. étranger » et
s'applique à des tribus très différentes ! du Mexique, et de l'Amérique centrale.
>

Cf. K; Sapper, Der • gegenwàrtige Stand der ethnographischen Kenntniss ,von


,

Mittel-Amerika, p. 6,- dansr Arch.' /"., Anthropologie, Braunschweig, 1904, L


2. Passage intéressant au point de vue ethnographique. Il nous décrit la>
production du feu par le frottement de deux morceaux de bois. Cf. les
représentations de cette opération dans le Codex Mendoza et dans d'autres mss.
Hl.STOYREDU MECIIIQUE . 13

convient à ,nous, non pas à. vous.^A. quojAess Populoques invent


response qu'ils- estoint si< bons comme- eux. et, de >avantaige pour f. so.
pouvoyr. faire cela. Par quoy les O tomis leur anoncèrent la guerre,
et eux aussi* se mirent en armes; mais .quand la bataille se vouloyt
librer,-.les Otomis demandèrent aux Populoques puisque son dieu
estoyt plus puissant, qu'ils leur. fissent8 quelque signe, ce que acor-
dant les Populoques, les Otomis leur demandèrent trois choses. La
première qu'ils fissent que uneiplanureroù ils i estoint fût. emplie de
maisons, ce que par l'art du diable fut incontinent faict;
demandèrent aussi qu'il ni eust plus rien, tout demeura comme
auparavant. La segonde fut qu'ils .fissent paroistre là beaucoup de gens
qui se tuessent, ce que fut faict, demandant que cela cessa, ni
eust plus rien. Dernièrement leur demandèrent à Heure de vespres
qu'ils fissent arrester le soleill le quel sourcier alant pour l'air,
trouva lei soleill, .ou pour mieux dire le diable lui apparut en
figure de soleill barbut, et lui demanda où il aloyt, au quel il
diet : je viens te prier que tu te arrestes, car, aultremenťces mes-
clians nos enemis ne devront pas là vantaige à toy ni à nous. —
Arrester, dit lé soleill; ne me est possible, car comme je soys grand '
dieu et seigneur, il y a. beaucoup de aultres dieux qui me»attendent
ici. devant, tellement qu'il me fault aler vite les trouver pour voyr
ce qui font. Mais pour satisfaire, à vos enemis, porte^ces mienes
barbes, qui est là chose que je estime plus que tout ce que je ay et
vos les donne comme à ceux que je aime plus que à touts aultres,
e dites. à ces. pervers que s'ils ne vous donent là victoire, je les
destruiray, touts,, sans que nul me demeure. Le sourcier donc se en
retourna aveques ces barbes, les quelles voiant les Otomis qui nen
avoint jamais veu (car ils se metent dès choses qui leur en garda
de venir) ,. furent fort esbahis et leur donèrent pour. lôrs la
vantaige. Estoynt ces, barbes de la, longueur de demi aune, ung peu
grosses et rousses l. Avoynt aussi ces Populoques aultre idole de le
estatur de ung homme lequel ils nomoynt Malleutl,2 que veult dire

1. La précision des détails est telle,' qu'il est, permis de, supposer que
l'auteur a vu les objets décrits. Ces barbes, qui constituent comme le noyau; de la
légende, ont en effet» existé,1* et étaient l'objet «dei la, vénération, des Indiens.
Quelques autres traits de cette légende se rapportent/ croyons-nous, à, certains
rites d'un culte du feu ou du soleil. ;
2. \malli, = prisonnier,, et teotl — dieu, c'est-à-dire l'âme, du prisonnier,
sacrifié représentée par un ossement orné de papier.
14 SOCIÉTÉ DES!AMÉRICAN1STES DE PARIS

dieu de papier, teinct err sang de hommes, pour ce que toutes les
foys qu'ils gagnoynť quelque bataille,1 lui sacrifioynt >■ le meilleur
esclave que prenoynt; en signe de action de graces, lui ostant'le
ceuren vie, eť moullantçen* le sang !du ceur un papier si-1 large
comme una main, le .quel luy attachoyt,- et1 selon le,conte!que les
Indiens tienent^ il avoyfsdésiale sang ^ dé' quatre vingts mille
sclaves, quand les Espaignols le trouvèrent, les quels le bruslèrent
avecques les barbes du soleill1 et aultres1 idoles.-

Chapitre III *

De la venue des Mechiquiens, de son chemin ou voiage,


et de V origine de ce nom Méchique.

Méchique,. c'est le chef et principale ville de, la nouvelle


Espaigne,, arcévesché, et où le viz roi et parlement se tient, tant
pour ce qu'elle est assise au milieu de la nouvelle Espaygne, que
pour ce qui est la meilleure place que soit en tout ce pais la. Le mot
de Méchique n'est pas le propre mot des Indiens ; ains lés naturels
du pais et courtisans disent Exic ! ou Echic seulement. Gé mot
donc Méchique, à ce que je puis comprandre, est composé dé trois :
met2 que veult. dire un arbre, Exic ou Echic3 qui veult chose
qui parde soubs jeté du vent, et quei, qui veult dire, de ; car leur
coutume est, quand ils sont demandés du lieu de là où ils sont, si
ils veulent dire : je suis de Paris, disent: je suis Paris de. Gomme
donc le lieu dont ils sont sortis, se.nommoyt Echy, adioutant dé
un cousté met et de l'autre que qui veult dire de, se fait Méchique.
в и 463. Revenant donc à nostre propos, ils sont venus de ung lieu ou il y
avoyt une grande roche — (pres la montagne de Tholman, que
ceux de la Floride nomment, (^шш'ге5 et autres Tu can, de la quelle

l'. Nous savons en effet qu'en nahuatl, m initiale se fait très peu sentir.
Inutile d'ajouter que l'étymologie de Mexico, qui suit, est delà fantaisie. •
2.! Metl = maguey, agave ou aloès d'Amérique.
3. Exi ou Echi indique, comme Qui vire, leur lieu d'origine.
4. Ce suffixe est со,1 par abréviation c, et signifie: dans, en.1 La phrase qui
suit est une note explicative du traducteur."
5. Les manuscrits mexicains n° 182 et 183 de la BiblJ'Nat. de Paris donnent'
d'intéressants détails sur ces régions qui appartiennent1 au •- pays des Indiens
111ST0YUIÍ DUiMECIllQUE' 15

sortent trois rivières qui se vont desgorger au goulfe de la mer


vermeille) — au.pied.de la quelle avoyt une fosse parla quelle sor-
toyt du vent, au près de la quelle roche vivoynt: deux frères, -des
quels chascung adouroyt ungdieu, et advint < qu'il eust noise entre
eux deux, tellement que le plus grand avoyt le meilleur et fouloyt
son frère, ce que voiant le dieu du moindre luy apparut et lui diet:
ne te fasches poinct que je "te mènerai à»ung;lieu.où;tu seras plus
grand seigneur que ton frère, pour tant assemble le plus de gens que
tu pourras et me suibs ; ce que il fit, cheminant avec toutes ses gens
jusques à une province nomée Culiacan l, la quelle sans faulte est
la plus * fertile que je - vis oneques . et est à. 200 * lieues < du
Mechiqueuvers l'Occident,, non gaire loing.de la mers dus Sul,< où
NuriOi de Guzman fut, quand, il acquosta la nuefva Galicie. Ils
demeurèrent long temps en ceste province où édifièrent temples et
maisons fort magnifiques et aultres belles choses. Long temps après
ou pour le vouloyr. de ses dieux ou. pour ,1e sien, ils deslougèrentde
làïpour aler chercher aultres lieux plus commodes et à leur. plaisir,
et aiant faict beaucoup de chemins arrivèrent" à. ung lieu fort
artificieux nommé Toich, [sept lieues de Chuquipila,1, au quel' lieu
il y a une roche de façon de une coige toute piquée sur Ле bout de
la quelle y a une belle maison faicte à mode de forteresse, merveil-

a Pueblos ». Le 182 n'est qu'un brouillon du 183. L'auteur de ces manuscrits


s'est proposé de localiser Quivire eť de 'montrer que le territoire ainsi désigné
a toujours appartenu à la couronne d'Espagne. .
1. Cette ville serait située 'à deux cents lieues de Mexico, et à trois cents
lieues du territoire des Zufiis. C'est laque l'armée de Franc. Vasquez Coronado
se réunit en mai 1539 pour l'expédition au Nouveau-Mexique. Cf. ms. mexicain
n° 182, f. 97 v°.
2. Je suis tenté d'identifier Toich avec Teul, qui se trouve dans le Zacate-
cas actuel. On lit, en effet, dans Ilistoria de la Conquista de Nueva Galicia,
par Mota Padilla (ch. X) : « Subió al grau Teul nombrado por todó el veino,
рог estar en éPel templo grande. . . estaba este pueblo de Teul en la mesa que
hace una pequena tajada en la circunferencia,- coii'solo una entradav ,
y en mediode la mesa,- en una plaza biencapaz, maiiaha una fuente : de
agua dulce ». Cette « fuente de agua dulce1» ne serait-elle pas la « si -belle
fontaine (voir page suivante) que Thé vet* localise dans son mystérieux Toich ?
On doit' remarquer, au surplus, que- Teul est situé (entre1 Guadalaxara, au
S., et Colotlan au N.) à dix remuas 'd'un 'point connu sous le nom de Juchi-
pila. • Si ;<nous identifions autant que*possible ces noms s propres,' nous1 ne
considérons pas pour cela ces récits comme historiques. Nous nous conten-
16 SOCIÉTÉ DES'AMÉRICANISTESDE PARIS
' leusement bien fáicte,' et haulte tantque se voyt toute la planure
de l'autour, eirla quelle1 il y a aussi de fort belles maisons et
édifices ou logoint dés diables/ Au plus hault lieu de ceste place; il y
avoyt une- si belle fontaine. et de si bonne eaue que jamais je- vis ni
croys soyt au monde. En* ce lieu ici ne lougerent pas long temps,
mais se en allèrent* à1 ChypilaS' ou y a asture ung couvent de
Mineurs, où ils demeurèrent en deux petits colineauxmon plus
distans l'ung de l'aultre1 que la largeur de une rivière que passe entre
deux,- là où ils firent de fort beaux édifices et délogèrent bien tost; et
se en alèrent à Chalpe2, huict lieues de là, où* lougerent1 aussi bien
peu, etbastirent un temple si sumptueux que à grand peine crois je
on faict les Romains chose plus belle.1 En touts les lieux- qu'ils arri-
voynt, la! première et plus principale1 chose qui faisoint,- cestoyt
pour les dieux temples et oratoires, les quels dieux- ils aportoint
avec soitoutsiours," et se appelloinť Tezcachipuca3, УЛг/г4, Cylo-
f. si. pucheli, et convieoynť ceux 'par 'là' où' ils passoynt à servir à ses
dieux et leur faisoynt bon traitement1 à -touts par le quel moien ils
attiroynt beaucoup de gens à * son amitié. A la par fin ils laissèrent
Chalpa ets'en vindrent au Mechique, et1 peuplèrent premièrement
en Tenainqueb à» deux lieux du Mechique où y a à présant un

coûterons d'y chercher ce que les Mexicains du xvie siècle racontaient- et croyaient
savoir sur leurs ancêtres; mais, même à ce point de vue, il faut bien admettre
qu'ils ont rattaché leurs récits à des localités existantes.
1. Peut-être une autre corruption de Xochipila ou Juchipila ; Alcedo (Dic-
cionnario : geografico,, etc.) mentionne dans cette localité l'existence' d'une
rivière et d'un couvent de Franciscains. ,
1..Xalpa de xalli-pan = sur le sable (Peňafiel: I, 130 ; II, 310).
3. Petite erreur de transcription pour Tezcatlipuca.
4. Dans la Cosmographie, nous lisons Yhim, et M. Bastian l'a cité sous cette
forme. Cette divinité est inconnue dans le panthéon mexicain, et nous croyons
qu'elle s'est glissée dans la traduction de Thévet par suite d'une erreur de
lecture.* Deux faits nous ont mis sur la voie de la vérité ; l'absence de conjonction,
et ensuite la mutilation du. nom de Uitzilopochtli, qui n'est représenté que par
sa dernière partie.1 Il faut en trouver la première partie dans Yhin : cela donne,
en admettant la confusion ordinaire de in avec ui : Huicylopucheli; La
première syllabe de-Yhin ne doit pas nous embarrasser: c'est la conjonction ef, en
espagnol. Le texte espagnol, disait donc : Tezcatlipuca y Huicylopuchtli.
.Thévet, ne connaissant pas la langue nahuatl, a luTezcachipuca; Yhin, Gylopucheli.
A défaut d'autres preuves, celle-ci suffirait à montrer que le manuscrit est
traduit de l'espagnol.,.
5. Orthographe fautive pour Tenaiucan.
H1ST0YRE.DU MECHIQUE:; 17
ventide Mineurs, aussi -peuplèrent en ung lieu nomé Chapultepet \
que, veult dire maison de soûlas, car il est en ung lieu. шгреи hault
où y a une fort bonne fontaine,- et beau Нешроиг plaisir. De ;là ils
vindrent au lieu où, est asture Mechiquej quiialors estoit-plainide
arbres qu'ils appellent me//, d'où, leur est venu: le commencement
de son nom, et après echic et de со ; la quelle ils ont.fundé et orné
de beaux édifices et temples et de là neiontplus bougé jusques à
présent.-

Ghapitrei TV
Du pacte que firent les Otomis avec ceux dé Mëchique,
et de la venue de ceux de Culhua:

Le seigneur des Otomis comme nous avons s diet2 au; premier


chapitre, estoyt homme-forts ingénieux i et qui désiroyt savoyr le
commencement de toutes les choses. Mais ce luy estoyt t impossible,
veu qu'il ne cognoissoyt poinct Dieu sinon i ses idoles aux i quels il
fit édifier de fort magnifiques) temples;, faisant démoulir* ceux* qui
son père avoytfaict! faire pour ce qu'ils estoynt trop petits. Gestuy
donc fut le premier.! qui i commença à . guerroier,-. et . a/ esté > fort
heureux, et fust durant lestemps de Ueuemontu Cumaci 3 premier
seigneur des Mechiquiens qui estoynt désia en Mechique ; combien
qu'ily<avoyt quelques rebellions et discorde entre eux^ toutes fois
vivoynt empaix et se marioynt en^ semble,- et croisante en s grand
nombre, les: circunvoisins aimoynt fort les s femmes mechiquienes
pour- ce qu'elles estoynt. plus belles et plus courtoises,' comme sont

l. Dans la Cosmographie: Ghapultequet. Lisez Chapultepecy de chapulin


(langouste) ettepetl (montagne) + c. La même localité est indiquée par Motolinia
[Memor., p. 6) comme la dernière station avant Tentrée à Mexico.
2.1 Ce chapitre se rattache à la fin du premier: Nous sortons brusquement de
la légende pour suivre le règne de Nezahualcoyotl^ qui fut, selon M: E. .Boban,
le 9e soi-disant empereur .de .Tetzcuco. On. place, d'ordinaire ce . règne ,- entre
1431 et 1472. Nezahualcoyotl est peint ici comme un -grandi novateur,» bon
guerrier/ grand législateur et justicier, grand prêtre très pieux, entouré d'une
cour brillante, bref, comme un grand chef- de tribu, indienne, tel que: pouvait
l'entrevoir un Espagnol du xvi8 siècle.
3. Encore un exemple d'une mauvaise coupure de. mots : .Ueue, Monte-
.

cumaci.,Montecumatzin est le révérentiel de Monteçuma; ueue signifie vieux»


Montézuma I aurait régné vers 1440-1469. Il fut non pas le premier, mais le
cinquième grand chef de Mexico.
Société des Amérieanistes de Paris. 2
18 SOCIÉTÉ '. DES AMÉR1CAN1STES DE PARIS


encores plus que aulcune des aultres. El ainsi que quelcungs dupais
prochain adulteroynt i avec elles;; les. Mechiquiens faicte la alliance
avecques ceux de Tezcuq, leur feirent la guerre, et les aiant vaincus
et rendus soubs sa subjection, les féirenť tributaires hors que ceux
de Cuitlauac1 pour ce qu'ils estoynt enclos de eau et aussi' estoynt
forts et puissants, tellement que ne le peurent jamais vaincre,-' et
pour ce firent paix entre eux. Ce diet seigneur de ïezcuq du >costé
des Otomis a esté le premier qui fit sacrifice de hommes 'et qui
mangoyt de la chayr humaine. Cestuj mesme inventa les mestiers
mequaniques comme charpentier,- orfèvre, cousturier, courdonier
etc. Aussi proufita il beaucoup à la république, car. il a eu cent
quarente enfens masles.-Cestuj-ci commença à faire loys et juger
et constitua ung parlement en son pays. Il pourtoyt grand révérence
aux- dieux et avoyt grand- soing* des temples et» cérémonies; il
ordona laussi* que les > jeunes: 'hommes et filles dancessent ! aux
temples despuys le soyr jusques àminuict pour donner plaisir aux
dieux; II miten sa maison des officiers comme maistre de* haulell
someiiler et ^aultres, г et ordona « qu'il eust en sa, ville» de Tèzcuq
marché.. Au(comencement,àlsi,vestoyntf ses dieux de* papier, car
ils, ne avoynt aultre chose pour lors, mais aussi» tost que* ce seigneur
commença à gaigner de.lor et de l'argent » et des soies," iHeur fit
faire des vestemens les ^.plus s beaux qu'il ;peut avec - beaucoup , de
perles précieuses, belles plumes) et aultres choses: les meilleures
qu'ils trouvoynt, leur sèment le<:temple s de roses et'de fleurs ; et
dançant tousiours davant eux tant ceux de «la vile que les prochains
voisins,' les quels ler diable abeusoyť leur îfaisant i manger quelque
herbe quils noment nauacatl 2 la quelle les faisoyt hors de sens
et voyr beaucoup de visions.. Ce, seigneur de Tezcuq, fit mourir
deux hommes qui abusoyt l'ung de l'aultre et ordonna, que touts
ceux qui seroynl esté trouvés en tel acte fussent occis, et; semblable-
ment les adultères; Après la mort de cestuy-ci succéda ung sien
fils qui procura en tout imiter son père, le quel avoyt nom iVeca-
huatl pilciutli3 qui veulťdire petit jeun; il gaigna avec l'aide des

1. Guitlahuac, composé de cuitla-hua-c.


2. Lisez nanacatl = champignon.
3. Nezahualpiltzintli ' est le révérentiel (suff. tzinli) de Nezahualpilli. Le
nom signifie: seigneur qui jeûne. Ce successeur de Nezahualcoyolt" aurait
régné de 1472 à 1516.
HISTOIRE DU MECIilQUE 19
Mechiquiens par armes beaucoup de païs et en tout le reste de sa
vie imita sonipère ; et après sa mort fut seigneur ung sien fils le
quel regnoyt quand les Espaignols arrivèrent en ce païs-là * : mais
il mourut bien tost, après, sans estre. chreslien, car le baptême ne
L se! exerçoyt pas encore ; au ; quel, succéda * ung sien < fils qui fut
chrestien et vesquit et mourut fort;bien selon d'Eglise, aiant • reçu
touts les sacrements et aiant faict son testament. Les seigneurs
doncques qui jusques à ce dernier ont gouverné à Tezcuq sont
quinze2.
Mais tournant au poinct que avions oublié de la venue de ceux
de Ciilhua'6 qui est -à deux* lieues: du Mechique. Ceux disent
avoyr esté du costé des Mechiquiens 4, les quels demeurant à
Culiacan (du quel nous avons ici desus parlé). Une compaignie de f. 82
eux estoyt sortie combatre contre quelques aultres et quand ils furent
de retour, leur seigneur ne se contentant pas de ce qu'ils avoynt
faictne les voulutpas recevoir, par quoy estant contraincts de chercher
lieu où demeurer se en alèrent à lulab. qui est à douze lieues de
Mechique, et aiant demeuré là quelque temps, leur seigneur mourut
et fut eshi en son lieu »ung aultre nomé Vamac6, le queL estant
seigneur appareut une vision en le peuple de ung homme qui
sembloyt toucher le ciel de sa teste,- de quoi ce seigneur et tout ce
peuple espouvantés s'en sortirent du lieu, et vindrentà Culhua qui

1. En effet, Cacamatzin ne régna que quatre ans.


2. Ce nombre de quinze ne correspond pas avec ceux dont l'auteur a parlé:
L'erreur* se place,, croyons-nous, avant le -règne de Nezahualcoyotl, dont les
prédécesseurs ne sont pas mentionnés.
3. D'après PefiafieL (I, 126) ce .mot serait composé de coltic = chose
courbée, et du suffixe hua qui indique la possession. Culhuacan est situé à
2 lieues au nord de Mexico (Motolinia, Memor., p. 6).
4. A cet endroit la Cosmographie présente une légère différence : « et se dit
être (sorti des1 reliques des Mexiquiens». Une phrase' des Memoriales de
Motolinia (p. 5) se rapproche ; sensiblement de, celle í du manuscrit :>« Estos
mexicanos algunosquieren sentir que son de los mesmos de Gulhua .»
5. D'après- Motolinia;'. ces s tribus > auraient 'passé par. Tullantzinco л- avant
d'aller à Tulla, qui t se trouve à douze» lieues au- nord de Mexico. Toutes ces
ressemblances corroborent l'hypothèse que nous avons . émise j plus haut:
l'auteur du manuscrit et Motolinia se sont servis d'une source commune, qu'ils
indiquent l'un et l'autre, sous le nom de XihuionaliS
6. 'Lisez Uemac. D'après le récit de Sahagun, ce 'seigneur fut mêlé aux
aventures de Quetzalcouatlà Tullan (trad. Jourdanet, p.; 211 ssq.).
20 SOCIÉTÉ DES : AMÉRICANISTES - DE PARIS

est à deux lieues de Mechique. Ceux-ci ont introduict les sacrifices .


avec ceux de Tezcuq> et par leur bonne -mode i ils se firent aimer de
touts et introduirent leur sacrifices. Eť ceuxjmesmes, comme Ion
diet,, aportèrent :1e maiz,- papier, .couton et encens; car les Otomis
vivoynt simplement sans* avoyr riens de ceci; d'où Ion estime ceux
de Culhua gens nobles et vertueux: .

Chapitre V
De la coustume de compter lès i années,
et de la fundacion dû Mèchiquç.

Les Mechiquièns ont ung libre comme gens plus grandes et chef
du païs, le quel est intitulé XeKutonali l, qui veult dire libre du
compte des * années, par le quel est trouvé qu'ils entrèrent en
Mechique le an de Omecali 2 qui, estoyt lé 28iesme de : leur, premier
temps ; car, ils font quatre temps, chascvmg des quels vault
52* ans, et chascung de ces temps avoyt quatre hebdomadas 3 que
vault chaseugne 13 ans, et l'an avoyt dix huict moys, et le mois
vingt jours; tellement que ung an vient à faire 365 jours 4. Ils
demeurèrent . doneques par les chemins quatre temps qui. font
208 ans. Et estant arrivés au Mechique, furent 28 ans à là funder et
alors entrèrent et commencèrent à compter, despuis .la arrivée
jusques à présent que fut selon nostre compte l'an de l'Incarnation
de Nre Seigneur Jhesu Christ: MIIICXXI. Tellement qu'ihy a
CCXXII ans que le Mechique ast esté fundé, et avec le temps qu'ils
ont mis en chemin, sont huict temps des siens et' 22 ans et quelques
jours, comme il' se trouve au libre de leur compte,, que font
CCCCXXXVIII ans qu'ils sont sortis de leur païs. Et il y a CLXX ans
que Mechique est chef de roiaulme. Ceci est le plus certain compte,
que nous avons seu trouver, car la * première carte qu'ils onts du
{

J. D'après les .Memoriales de Motolinia,1 ce, livre était intitulé : Xihutonal


amatl, qui veut dire : « libro de la cuenta de los afîos » (p. 4)^ La bonne
orthographe serait Xiuhtonalli.
2. Orne calli veut dire deux maisons.
3. Le terme mexicain est tlalpilli (tla.-ïlpi\\i).
4. Il y a évidemment une erreur de 5 jours. Pour l'explication réelle de ce
chapitre, je renvoie à l'introduction.
HISTOYRE DU MECIIIQUE 21
commencement de ce compte est désia presque toute effacée *, de
sorte que à grand peine se peut y lire ce que est escript. Geste
figure qui est ici de sobs2 estoyt escrite au mesme libre.
Ils divisent Van en quatre parties
comme nous, esté, autumne,,
printemps et hiver; à chascung de ces
temps donoyt cinc mois 3. L'une
moitié de Vannée estoyt de pluie
despuis nre avrill jusques à
septembre, et en ce mesme temps dure
la chaleur. Les . au lires six' mois
sont secs et froids. Ile cueillent leur
forment en novembre et décembre.
Ils. commençoynL du midy à tochtli à compter leurs quatre
temps etungrtemps achevé aloynt à Г aultre. De toute sorte, tant
que la première hebdomade duroyt qui estoynt treze ans, ils con-
toynt 1. 2. 3etc. ans de tochtli, sus tant de temps, pasant de là après
les treze ans, aloyt à açatl'eï contoynt de, mesme 1. 2. 3 ans etc.
De acatl sus le mesme «temps jusques à ce queretournoyt à tochtli
et adioutointiung temps, qui estoyt 52 ans, et ainsi conséquement
tournoytf comme nous* faisons auiourdhuy qui contons aux s cens
sus mille que a que Nre Seigneur mourut', et- achevé ce cent,1 reco-
mençons à ung,; adioutant un aultre cent au nombre jusques à
aultre cent. Et ceste compte leur est fort iuste et la gardent encores.

1. Cette indication d'un livre plus ancien plaide en faveur de l'hypothèse de


la composition * plus récente du Xiuhtonalli.
2. La figure montre les 4 signes symboliques * présidant chacun à un. des
4 points cardinaux. Le point central d'où partent ces 4 directions est' indiqué
par une banderole sur laquelle nous lisons, en commençant par • le ,bas, telal,
continuant en haut vers la droite, xi, et en h aut à gauche, co. Ilfaut lire, croyons-
nous, tlalxicco = nombril de la terre. •
3. Cette remarque manque d'exactitude; car 4x5 mois donneraient une
année de 20 mois. Dans la Cosmographie, où ces détails se suivent dans un ordre
différent, l'inexactitude est plus grande encore. Ces quatre divisions de l'année
s'appellent temps,- comme le cycle de 52 ans, et chaque saison, est indiquée par
un des mots r tochtli (été),1 acatl (automne), tecpatl (printemps) et calli (hiver).
Gemelli aussi applique aux saisons ces signes ■symboliques, mais d'une, façon
différente i chez lui, tochtli « s'applique au printemps, acatl à l'été, tecpatl à
l'automne, et calli * à l'hiver. Cf. Orozco ty Berra, Anales del Mus. : пас. de
Mexico, I, p. 299.
22 SOCIÉTÉ DES AMÉRICANISTES DE PARIS

Chapitre VI
f- 83. De la opinion qu'ils avoynt de la creacion du monde et de ses dieux,
et de la destruction du monde et des deux.

Croiojent les Mechiquiens et beaucoup de ses circunvoisins qu'il


y avoyt treze cieux *, au premier des quels estojt ung dieu.nomé
Rintentli 2, dieu des années. Au segond, la déesse de la terre
Rontli'Á. Au troisième Chalcintli 4 , que iveult dire maison de una
déesse. Au quatriesme, Tonatio5, qui estle soleill; Au cinquiesme,
cinc dieux chascungde diverse coleur. à cause de cela dits Tonaleq 6,
au sixiesme Mitlantentli "', qui est. dieu des enfers. Au septiesme,
Tonacatentli et Tonacacilmatl8, deux dieux. A Thuictièsme Tlàlo-
catentW3', dieu de la terre. Au neufviesme Calconatlànsii0y\mg des

1. Les divinités des 13 cieux répondent aux seigneurs des 13 heures du jour
représentés dans le Codex Borbonicus, et dans le Tonalamatl Aubin ; 1. Xiuhte-
cutli; 2. Tlaltecutli ; 3.'Ghalchiuhtlicue;4.Tonatiuh ; 5iTlaçolteotl ;б:Теоуао-
miqui ; 7. Xochipilli-cinteotl;: 8. Tlaloc; 9. Quetzalcouatl ; 10.r Tezcatlipoca ;
ll..Mictlantecutli ; 12..Tlauizcalpantecutli ; 13.11amatecutli. Cf. Seler,
Commentaire du.Tonalamatl Aubin, p. 26-31.
2. Altération de Xiuhteuctli = seigneur de l'année, qui est le dieu du feu.
3. LV initiale prouve que ce mot est corrompu. Je voudrais y trouver le
nom de la déesse Couatlicue. La disparition de la syllabe finale eue ou que
(ressemblant à la conjonction espagnole) n'a rien d'extraordinaire. Dans le
Codex Fuenleal, où l'orthographe des noms propres est aussi très défectueuse,
nous trouvons de même Ghalchiutli pour Chalchiutlicue, femme de Tlalocate-
cutli. (Garcia Icazbalceta, Nueva Coleccion... III, p. 235.
4. Malgré la traduction « maison de una déesse », nous pensons que ce mot est
une altération de Chalchiuhtlicue.
5. Tonatiuh, le dieu solaire.
6. Tonal-é-quê = ceux qui possèdent, le i soleil]' c'est-à-dire < les /5 :Ciupi-
piltin.
7. Mictlanteutli.
8.Tonacateutli, et Tonacaciuatl (cilmatl est une, fausse lecture de cihuatl);
9. Tlalocan teutli.
10. Je suppose que ceci est une fausse transcription de Queçalcouatl.' Comment
est-elle'
la première partie s'est-elle perdue," et comment la terminaison ansi s'y
jointe? La syllabe que s'est souvent abrégée "q, Ansi peut avoir été le commen-1
cement d'un mot comme ansimismo. Thévet aurait donc ici mal lu et mal traduit. «
HISTOYRE DU MECHIQUE ' 23

principaulx idoles, du quel, et des aultres nous, parlerons après. Au


dixiesme Tezcatlipuca, aussi idole principal. A l'onziesme Yoalten-
tli l\ qui iveult dire dieu de la nuict ou de l'obscurité.* Au dou-
ziesme Tlàhuizcalpan tehutli 2, qui veult dire dieu de i'aulbe du iour.
Autreziesme et dernier plus hault," avoyt ung dieu nomé Теошъ, que
veult dire. deux dieux, et une déesse, nomée Omecinatl 4, que veult
dire deux, déesses. Oultre tous ceux-ci croyoynt-ils qu'iLy avoyt
beaucoup de aultres dieux en chascungides cieux. Quant à:la créa-
cion du monde, commeiils content,*, ses mageurs leur disoynt que le
monde avoyt1 esté destruict une^fois, et les gens avoynt esté créé de в и, 4is.
roches; -Et:que еш la^première créacion • lès dieux i avoynt i, créé

quatre, solèills i soubs^ quatre, figures, selon que i est í monstre *par ses
libres, leipremier des quels se appeloyť Chachuich tonajo5 qui est
comme dieu de, pierres précieuses, et que ceux: qui ont vescu soubs
ce soleillmouroynt noies et. quelques ung se tournèrent empoiçons,
et : touts- vivoynt: de une?, herbe de, rivière . nomée aciantHK Le
segond soleill se disoyt Chalchiuh tonaiuh1 et ceux qui vivoynt en
ce temps' mangoynt ?de ;une herbe nomée centencupič et mou-
reurent touts ^bruslés du feu du ciel, des quels les ungs retournèrent
en poules,, les aultres en papallons, lés aultres en chiens. Le troy-

1. Youalteutli.
2. On est presque surpris, au milieu de ces fautes de transcription, de
trouver le nom de Tlauizcalpantecutli aussi correctement écrit. Ce nom est composé
de tlauizcalli (aube du jour) -pan-tecutli.
3. Ometeutli pour Ometecutli (qui présidait à la naissance des garçons)., La
syllabe ome a pu être omise par Thévet dans sa transcription, à cause de la
ressemblance avec le mot précédent, nomé.
.

4. Omeciuatl présidait à la naissance des filles.


5. Altération de Ghalchiuh-tonatiuh, qui. répond probablement à Atonatiuh
(soleil d'eau), Ghalchiuhtlicue étant la déesse de l'eau.
6. i Cette herbe s'appelle aciciutli dans le Codex Fuenleal. Formes
corrompues de acecentli ou acicintli (compos, de atl-centli, une « herba aquatica » citée
par Hernandez) = mauvaise herbe.
7. Cette répétition du même soleil d'eau est probablement due à l'influence
de l'idée de pluie. En effet, une de ces périodes cosmogoniques est désignée
,

généralement du nom de Quiauhtonatiuh (soleil de pluie), ou Tlequiavitl, ou >


encore Tletonatiuh (soleil de feu).
8. Dans le Codex Fuenleal : cintrococopi. Formes altérées de cencocopi =
ivraie, plante qui ressemble à la tige du maïs (cintli ou centli).
24 SOCIÉTÉ' DES' AMÉRICANISTES DE PARIS

siesme soleilb ses appelloyť . Yioanoatiuh1 que veult rdire » soleill


obscur ou1 de nuictl Ceux' qui wescurent soubs 'cestuici mangoynt
mirre et résinede pins des quels il y. a grande ï abondance j en ce
païs-là, et ceux-ci moururent.de; tremblements de terre et furent
mangés de bestes saulvages,' qu'ils Yvomeniquenamenti 2 qui veult
aussi dire géans des quels.ena.en ceste nouvelle Espaignescomme
nous** conterons après.'Le quatriesme soleilbse nomoyt , Ecatona-
tuich3 que veult dires soleill de* air; ceux qubvesquirent soubs :ce
soleill semourrissomtdeunfruict qui vient em une; arbre nomée
mizquitl 4f de la quelle :sl grand nombre en Ла nouvelle tEspaigne,
dû quel fruict les 'Indiens font grand, estime;: et • en? font de > pains
pour porter en cheminant; etpour garder :pour le long de l'année,
et certes cest ungbon fruict ; ceux-ci moururent parttempestes.de
vents et' se changèrent en synges. Ghascungde ces soleillsne duroyt
que* 23 ians *et se perdoyt^ incontinent.* Et' leur restant demandé
puisque desoleiliperisoyt avec Леэ hommes,* comment (après sor-
toynt et se produisoynt aultres soleills et aultres hommes; respon-
dirent que les dieux faisoynt aultres soleills et hommes. Ils disent
aussi que ses ancestres leur ont diet que le monde avoyt esté des-
truict toutpar eaux^ et ainsufurent toutes les gens noies à cause
des péchés quils avoynt comis envers les dieux, oultre ce quils
estoynt descendus en enfer où les âmes estoynt bruslées, et à ceste

1. Youaltonatiuh. Cette période répond, croyons-nous, à ce que les Annales


de Quauhtitlan appellent : Ocelotonatiuh (soleil' du jaguar). En effet, le jaguar
est l'emblème de la terre, et aussi dé la nuit. Dans lesditess Annales, cette
période d'obscurité se place avant celle du feu. Cf. Codex Borgia, erlauterťvon*
Dr Ed. Seler, t. I, p. 92 et 204. Berlin, 1904.'
2. Quinametin est le pluriel de quinametli qui signifie géant. Les géants
jouent un grand rôle dans les légendes mexicaines. Les détails ici annoncés sur
les géants ne figurent pas dans la partie du ms. que nous possédons.
3i Eecatonatiuh. La dénomination de ces diverses périodes, ainsi que leur
ordre de succession, diffèrent" d'un auteur à l'autre. L'ordre qui semble le plusi
généralement adopté : 1° Atonatiuh, 2° Tlaltonatiuh (Ocelotonatiuh, ou Youalto-*
natiuh), 3° Eecatonatiuh, 4° Tletonatiuh, s'écarte assez bien de celui de notre
manuscrit. Celui dès Annales de Quauhtitlan: 1° Atonatiuh, 2° Ocelotonatiuh,'
3° Quiauhtonatiuh, 4° Eecatonatiuh, s'en rapproche davantage.
4.' Prosopis dulcis. Arbuste très commun au Mexique, dont le fruit est Tali-
ment de contrées plus ou moins cultivées, mais ne peut pas être considéré
comme l'aliment ordinaire des Indiens du Mexique.
IIISTOYRE; DU MECHIQUE ;
cause ceux qui furent créés après ï firent brusler. louts les corps1,, et
gardoynt la cendre pour, ce qu'ils attendoynt que Symitlateutl 2 qui
estoyt dieu des enfers les laissa sortir et que par ainsi resusciteroynt
aultre foys: En quoy/ sevoyt biemquede diable i leur.idisoyb une
vérité pour leur faire à croire millei mensonges.

Chapitre VII

De la segondé créàcion du monde et de l 'homme,


dé la, terre et du vin.

Après la destruction du premier monde, comme à la fin du,


chapitre prochain passé avons compté, , ils content .la créàcion du
segonde en telle façon. Après que les eaux eurent passé de desus
la terre la quelle ils disent ne avoyr poinct esté destruicte, elle, fut f. 84.
de rechef adornée et remplie de toutes les choses qui estoynl
nécessaires pour l'iisaige de l'homme que les dieux créèrent après. *Ceste
dernière creacion attribuent les Mechiquiens au dieu Tezcatlipuca
et à ung, aultre diet Ehecatl, c'est-à-dire aér, les quels disent avoyr
faict le ciel en ceste sorte. Il y avoy t une déesse nomée- Tlaltentl 3 qui
est la mesme terre la quelle selon eux avoyt figure de homme, autres
disent que de femme, par la bouche de la quelle entra le dieu iTezcat-
lipuca, et ung sien compaignon, diet Ehecatl, entra par l'ombrill,1
et touts deux se assemblèrent au cœur de la déesse qui est le milieu
dé la terre et se estant' assemblé formarent le ciel fort poisant, à
cause de quoy beaucoup de aultres dieux rvindrent aider, à le
monter en hault 4 et après qu'il fut monté là où il est à présent quelques

1; Le chapitre XI nous donne une autre origine de la coutume de la


>

crémation : les serviteurs de Quetzalcouatl brûlèrent son cadavre, • et" de là cet usage
se généralisa.
2. A cet endroit,- la Cosmographie donne < une orthographe plus ,reconnais-
sable: Mitlantentli pour Mictlantecutli;
3. Tlalteutli.
4. Le Codex Fuenleal (ch. V) rapporte1 un < mythe 'qui n'estpas sans^analo-
gie avec celui-ci. Les dieux font passer quatre chemins par le centre de la terre,
et créent quatre hommes pour les aider à remonter le ciel. Tezcatlipuca et
Quetzalcouatl (les mêmes dieux créateurs que dans notre ms.) se changent en arbres.'
26 SOCIÉTÉ DES i AMÉRICANISTES DE PARIS
ungs de- eux demeurèrent le soubstenant a fin qu'il ne. tomba, le
quel ils disent avoyr esté faict le premier -jour de l'an, mais ils me
savent, pas combien il y ař que ce fut, toutes fois leur semble qu'il
y: a cent temps de ceux que nous avons diet, que fontt 10.200 ans *.
La ^segonde année .furent ifaictes îles estoiles,* par» aultres dieux
només Citlaltona et Citlaline 2 sa femme.
La nuict aussi disent avoir esté faicte par aultres [dieux només
Yoaltentli, et sa femme Yacahuiztli 3. Le dieu Tlaloc, qui est dieu
des eaux, fit ceste mesme année Гёаие, la pluie, et pour ce qu'ils
disent que les nuées sortent des monts, ils appellent tous les monts
Tlaloqs 4 que veult . dire seigneurs. Mitlanteuth 5, c'est-à-dire
dieu de enfer funda l'enfer le huictiesme an. Tout ceci faict, les
M 77-78 dieux Tezcatlipuca et Ehecatl délibérèrent de faire homme qui
Tlli% Poséda la terre, et incontinent le diet Ehecatl 6 descendit en enfer.
^IiWe Pour démander à Mitlantentli dé la cendre des morts pour en faire
399- des aultres hommes, le quel dieu de enfer bailla seulement un os
dé largeur de une aulne 7 et quelque cendre, et incontinent quil
Iúy eust baillé le os, s'en repentit fort, car c'estoit là chose la quelle
ilvouloy plus que tout ce qu'ilavoyt, et par ainsi suivit Ehecatl,
pour lui reprendre l'os ; mais Ehecatl fuiant, l'os lùy cheut en terre
et se rompit, par quoy le homme sortit petit ; car, ils disent que les

A l'aide* de ces hommes et de ces arbres, les dieux remontent le ciel. Tezcatli-'
риса et Quetzalcouatl parcourenťle ciel' remonté et tracent un chemin qui est-
la voie lactée. ,
1. La Cosmographie donne ici le chiffre 50.200.' Ni l'un^ni l'autre de ces
chiffres n'est exact, 100X52 égalant 5.200 ans. Ce mythe étrange nous montre
bien un procédé d'information des premiers missionnaires : ils posent des
questions toutes faites, auxquelles les Indiens répondent tant bien que mal.
21: Dérivés de citlallin : étoile. Gitlaline est une orthographe fautive pour cit-
lallicue ou citlallin icue. Gitlaltonac = étoile brillante (tona = qui jette des
feux). Sahagun la considère aussi comme une déesse (trad. Jourdanet, p. .456).
3. Tacauiztli (yacatl-uitztli = épine pointue) est en effet la femme de Youal-
teutli, dieu de la nuit. Cf. Sahagun (trad. Jourdanet, p. 458).
4. Tlaloque, pluriel de Tlaloc. D'après M. Seler, ce nom dérive du verbe tlaloa,
faire pousser. La traduction « seigneurs » qui, est ici donnée doits provenir
d'une confusion avec le mot tlatoqve.
5. Mictlanteutli (le seigneur du lieu des morts).
6. D'après Mendieta, ce rôle serait joué par Xolotl.'
7. D'après la Cosmographie, cet os aurait eu une longueur de quatre pieds.
La largeur n'y est pas indiquée.
HISTOYRE DU MECHIQUE'ï 27

hommes du- premier monde estoynt forť grands: comme géans; il


donc aporta le reste dé l'os et de la cendre et se en alla'à<ung(/)az-
tli) l queveult dire grand ЛПэге; en le quel appellá1 touts lés aultres
dieuxpour là créacion du premier homme;; les quels ensemble!se
sacrifièrent des Sarigues, et ainsi; commencèrent; le * premier 'jour la
créacion de :Л 'homme lub formant Ле/ corps ;î le^quel^se* mouvoyt
incontinent, et'^le quatriesme jour,' estoyt faict l'homme et la femme;
mais ils ne furentspasdncontinent touts grands; sinon selon le. cours
naturel. Après qu'ils ïfurentfaiets,* les i nourrit ung dieu,' diet1 Cho-
lutl^que . veulť dire! coq des Indes; le* quel les nourrit-' avec f pain
moullé non pas avec laictv Le» nom dé ce premier «homme ne savent
pas, mais disent qu'il futerééen une caverne ; ew>Tamoanchanï en
laîprovince de Quanhuahuac^ que lesiEspaignols nomenttCàer/га-
vaca;\ au1 marquisat du marquis <- del* iVàHe;- Tout^ceci estantsfaict,
et aigréableaux dieux;ils dirent entre soy : voici l'homme sera tout
tristep si1 nous ne -faisons -quelque chose^pour Ле resjouir,' et afin
qu'iiprenne plaisir de vivre en 1аЛегга;г et quUL nos loue et chante
et danse.* Ce que oui par le dieu: Ehecatl, dieu de air,* en son .cœur
pensoyt i ourpourroit-il-Г' trouver i quelque*" liqueur ) pour -"bailler à
l'homme pour:le faire esióuir. En quoy pensant; lui vint à* lamé-
moire une déesse .vierge, nomée? May auetl 5, lai quelle gardoyt une
déesse, sa, grand mère, nomée Cicimitl Peb se > en alla1 incontinent
.devers i elles, Лез quelles trouva dourmant,. et ibesveilla la vierge,
et luy-dict: « jeteiviens quérir, pour te mener au monde. » Atquoy
elle acorda incontinent; et ainsL descendirent touts deux, 1иуЛа
portant sus ses espaules ; et, incontinent qu'ils arrivèrent à la terre,
se changèrent en^uniarbre touts deux, la. quelle a deux branches,

1. Lisez apaztli qui. signifie «vase.. Très probablement, l'original espagnol, a


employé le mot lebrillo. D'où la: fausse traduction de.Thévet, « grand livre ».
On remarquera,- du reste, qu'il a mis le terme paztli entre parenthèses, ce qui
indique qu'il a hésité dans sa traduction.
2. Xolotl; coq d'Inde est la tradution de uexocotl. s,
3. Tamouan ichan est traduitpar M.;Seler comme «sdas Haus ; des Herab-
steigens,, Haus • der, Geburt,: Urheimat »> (Commentaire du Codex, Borgia, I,
.

p. 184. Berlin,. 1904). L


4. Lisez Quauhnauac = près des arbres ou près des bois.
5. Mayauel, déesse de l'agave.
6. Tzitzimitl, plur. Tzitzimime. Les.Tzitzimime sont des divinités des étoiles,*
et aussi des esprits des ténèbres, malfaisants.
28 SOCIÉTÉ^ DES AMÉRICANISTES DE PARIS/
f- 85. des quelles l'une s'appelle Quecalhuexotl,,1 que estoit celle de Ehe-
catl, et Faultre Choquicauitl 2 qui estoyt celle de la vierge. Or, sa
grand, mère qui dourmoyt,-. quand elle fut esveillée et que elle ne
trouva pas sa niesse, appella incontinent des aultres déesses, > qui se
noment Cicimime et descendirent toutes en la terre cherchant Ehe-
çatl ; et à ceste saison les deux branches de arbres se rompirent l'une
de l'aultre," et celle de la vierge fut cogneue incontinent de la, déesse
vielle, la quelle, la print et- la -rompant bailla à chascune des aultres
déesses une pièce,; et la mangèrent ;,mais la branche de Ehecatlne
la rompirent pas,- mais la laissèrent là ;,la quelle,' aussii tost que les.
déesses furent anontées au ciel';> se (retourna» ens sař première forme
de Ehecatl,Ae quel amassa les: ostde .la '.vierge;: que j less déesses
avointt. mangé,., e tî. les s. enterra, ■ ets declà"x»sortiti\un> arbre/ qu'ils
appellent imetl 3 de ïquoy. font! les -Indiens le vin qui;boyvenbet
s'enjvrent; mais; ce;n'est pas à cause de ce, vin; ains pour quelques
racines qu!ils noment: ucpactli^ qiiLmettent dedens. Par, les quatre
soleills. des quels ! avons compté, .ils en te ndoynt quatre eages/чсот-
bienque ils ne savent; pas bien déclairer,' mais noussle déclairerons
avantlplus amplement. Quelques autres disent que. la terre fut créée
en ceste ;sorte : Deux dieux Calcoatl 5 etiTezcatlipuca aportèrent la
déesse des la terre Atlalteutli^ dés cieux en bas, laquelle estoyt
pleinei para toutes les- joinctures- de ieux et.de. bouches,', avec les
quelles elle.imordoyt,; comme une beste;saulvaige,- et, avant qu'ils,
fussent bas,»il;y avoyt desia de l'eaue, laquelle ils ne savent* qui la
créa, sur la quelle ceste déesse cheminoit.» Ce ;queïvoiantles> dieux

1. Quetzalhuexotl est composé de quetzalli et huexotli ou uexotl = saule. Le


Codex Fuenleal (ch. V) parle de la même métamorphose, mais la rapporte à un
*

autre mythe. L'arbre s'appelle incorrectement quezalhuesuch.


2. Lisez xochiquauitl,1 arbre qui produit un fruit recherché.
3. Ce mythe de l'origine. du vin? est très intéressant; La place qu'occupe ce
mythe dans l'ensemble de cette genèse (mexicaine mérite aussi i l'attention. La ,
création du vin suit celle de l'homme et la complète : le vin est appelé à réjouir
l'homme afin qu'il chante et danse et loue les dieux.
-4.' Dans la Cosmographie i nous lisons .tepacthv La -véritable orthographe, est
ocpatli, qui est' une herbe servant à la fabrication du vin de maguey.1
5. Quetzalcouatl, qui est le même dieu que Ehecatl.
6. Tlalteutli qui s'appelle aussi Ilamatecutli « la vieille déesse.». Cf. Seler,
Gesammelte Abhandlungen ■ zur Amerikanischen j Sprach- und Alterthums-
t

kunde, II, p. 1000. Berlin, Asher, 1904.t


HISTOYRE ,DU MECHIQUE , 29

dirent Fung à Taultre : «il est besoing^de faire.la terre», et ceci


disant se changèrent touts deux en deux. grands serpents, ,des quels
l'ung saisit la déesse depuis la-main droicte iusques au pied gauche,
Faultre de la main gauche au pied droit, et laf pressèrent tant, que
la firent rompre pour lamoitié, et de la moitié devers lesespaules
firent la terre, et l'aultre moitié la, emportèrent au ciel, 'de quoi les
aultres dieux furentfort fâchés.» Après ce faict, ,pour récompanser
la dite déesse de laterreidu domaige que.lesideux dieuxlui avoint
faict,i touts s les < dieux, descendirent Ла consoler, et ordonèrenLque
delleisortit tout le fruict nécessaire pouríkuvie des.hommes; et
pour ce faire, firent de ses cheveux arbres, et fleurs etlherbes, de sa
peau l'herbe fort menue et petites fleurs, des ieux puix et" fontaines
et petites cavernes,! de la bouche .rivières, et grandes cavernes,? du
nais valées de montaignes, des espaules montaignes. Et ceste déesse
pleuroyt quelques fois la nuict/ désirant mangericeurs de hommes
etme se:vouloyt taire iusques à- ce que l'on Лиу- bailla, ni .vouloyt
porter fruict, si, n'est oyt arrousée de sang de. hommes l.

Chapitre VIII

De la créacion du soleill, selon ceux de Tezcuq.

Ces Indiens affirment avoyr eu une déesse citlaline, là quelle


envoia du ciel 1600 enfans siens à une vile nomée Teotihuacan,2, т и,
près de Tezcuq; les quels, si tost* que .arrivèrent en la ditte .vile * If 4
périrent. Après ceux-ci, environ 26 ans 3 après que le monde avoyt
esté' créé, et avoyt demeuré tout' ce temps1 obscurci des ténèbres à
fáulte de soleill' se assemblèrent troys dieux Tezcatlipuca, Ehècatl

l. Ce. mythe, curieux! a Ла> prétention t de donner, une explication -simple i et.
identique de beaucoup de choses très différentes. II/ semblerait d'après lui que
le sacrifice humain se rattache, du moins par son origine,1 au culte agraire* r .
2. г D'après Mendieta (p., 77-78), Gitlallicue envoya ses 1.600 enfants à-Chico-
moztoc. Gela tient à ce que ce fait mythologique y est rattaché à la création de
l'homme.,
3. C'est1. sans doute. par suite d'une simple négligence que la Cosmographie
donne ici un chiffre différent : 8 ans ou environ.».
30 SOCIÉTÉ ■ DES ' AMERICAN ISTES DE PARIS

м 79-80 et Citlalecue déesse ', les* quels ordonèrent;de faire le soleill qui
T ii, 77 esclaira la terre. En ce temps mesme,1 y avoyt un aultre dieu, nomé
в H,' 399. pilciutentli 2, etsa femme se appelloyť Chuquiquecal ъ\ les quels
avoynt ung fils nomé' Choquipili Í4 et'ung aultre qui n'estoyt pas
sién,( mais lenourrissoint, qui se appelloyt Nanauaton b; du- quel
le père sesdisoit Izpatl 6,; et la mère'Cuzcamianh1; les' quels pre-
noint corps de hommes eťfigure quand bon 'leur- semblohV; quand
donc les dieux vouloynt faire le soleill ,* touts ces comptes eťaultres
faisoynUpénitence pour pouvoyr mériter de1 estre soleil! et offroint
f. se. aux troy s 'grands dieux "perles précieuses, encenset aultres choses
forť riches. 'Mais Nanauaton,1 comme il fut pouvre, il ne * avoyt' rien
pour offrir,1 mais -il ' se • sacrifiyoit avec: une • espine,' se * piquant' à
menujet'offroit de ce qu'il pouvoyt avoir combien que*pouvre.ř II
se assembla avec ses frères, et «fit ung grand» feu» devant les ! dieux;
les quels dirent que celuy qui se meteroyt dans le feu seroyt soleill;
Alors Nanauaton se mit* dans le feu par, art magique,1 en' la quelle
il estoit bien savant ; et se en alla en enfer \- et' de là aporta beaucoup
de riches pièces et fut eslu pour estre soleill 8.

1. Autre forme altérée pour Citlallicue (citlallin — icue : sa jupe).


2. Lisez Piltzinteutli. C'est le nom d'un dieu solaire. Cf. Seler,
Commentaire du Codex Féjérvary-Mayer, p. 22 et 34:
3. Lisez Xochiquetzal ' (fleur brillante). C'est la déesse des fleurs et de
l'amour.
4. Lisez Xochipilli (jeune dieu des fleurs).
6.' Est-ce
5. Forme une
diminutive
altération
deNanauatl
de itzpatli
(il buboso).
ou ixpatli, nom générique de plantes
médicinales ?; Cela me paraît d'autant plus probable qu'Izpatl nous est présenté
comme magicien.!
7. Lisez Cozcamiauh (cozcatl : bijou, etmiauatl : bouton, fleur, épis de maïs)
= collier de maïs en fleur. D'après Sahagun (trad. Jourdanet, p. ,75), ce serait
un surnom de la déesse de la terre, Ilamatecutli.
8. Ce mythe est rapporté, avec quelques modifications, par de nombreux
auteurs : Sahagun (trad ..Jourd.-,-, 479-482),' -Mendieta^ (II,' 2),' Torquemada (VI,
41), le Codex Fuenleal (Núeva Cols de Garcia Icazbalceta, III,' p. 235-236),'
Veytia d'après Bustamante (éd.- de Gomara,- 1826, I,! p. 174). Nous en signalons
deux essais d'interprétation : Mi Bastian1 (Culturvôlker; II,1 p. -408) y trouve
l'indication d'une génération descendue du ciel et qui s'est perdue; Les hommes,
d'origine souterraine, lui ont succédé. Un homme fait ce qu'un héros n'osait
pas faire : il se jette dans le feu, et esťélevé à la fonctionde soleil.- Il exige
alors la mort des héros et se montre bienveillant pour les hommes. Cette inter-
HISTOYRE.DU MECHIQUËS 31

Chapitre IX;

De la créacion du monde selon ceux de là' province de Chalco.

En aultre province, momée Chalco, ■ comptent' avoyr esté» l'eairla


première chose du monde,- mais quils; ne savent^ ausspqui la fît.' Et
que descendirent du ciel quelques dieux només Cemecatl^, Tezcat-
lipuca et Chiconaui et Ehecatl % touts fils de Atlatime 3,' déesse- des
estoiles,- la quelle disenťavoyr faict les estoiles; le soleill etlá lune ;
et les dieux,1 ses fils,1 firent l'homme; mais ils ne savent" en quelle
année ce fut. Oultre ce disent avoyr neuf ciels,' mais quils ne savent
où est le soleill, ni la lune,ni les estoiles,1 ni les dieux. Leblai quilé
mangent se appelle maï'z,1 fut < faict de cette sorte?: les dieux'descen-
dirent touts en1 une» caverne, où^ung dieu nomé> Pieciutentli is se
estoyt couché avec une ) déesse inoméd Choquijceli,i de la « quelle
nacquistiung dieu, dicť- Ciuíentlý, le quel;se mitdesoubs .la terre,'
et de ses cheveux sortit* le couton; et de ung* eouill une fort bonne

prétation est moins basée sur l'étude individuelle de chaque mythe que sur la
combinaison de ces mythes dans Sahagun et Mendieta. M. Chavero est allé plus
loin : il considère ce mythe solaire dans la version du Codex Fuenleal, qu'il
juge plus ancienne que celle de Sahagun et de Mendieta. D'après cette version,
Quetzalcouatl (dieu de l'étoile matinale) est le père du soleil," et Tlaloc (dieu des
nuages) le père de la lune. Cf. Anales del'Museo пас. de Mexico, I, p. 376 ss.
l.,.Ce eecatl, nom donné à Tezcatlipoca ou à Iztac Mixcouatl.' Cf." Seler,
, Codex Féjérvary-Mayer, p. 52, 54, 61^ etc. Berlin, 1901.
2. Ghiconaui et Ehecatl ne sont pas deux divinités ; mais Ghiconaui Ehècatl
(9 vents) désigne parfois Quetzalcouatl. Cf. Seler. Cod. Féjérvari-Mayer, p. 145.
3. Nous avons déjà dit que la déesse des étoiles s'appelle Gitlallicue ou
Citlallin icue.
4. Faute d'orthographe pour Piltzinteutli. Ce nom se rencontre fortement
mutilé dans le Codex Fuenleal; on peut y lire : Picenticli, Pincetuli, Piciciu-
| tecli, Pilcetecli. Cf. Garcia Icazbalceta, Nueva Goleccion, III, p. 235, 238, etc.
5. Cenleotl ou Cinteotl, de centli ou cintli = maïs,- et teotU Le mythe qui
suit est bien conforme aux idées mexicaines sur le maïs.
к--:

32 SOCIÉTÉ i DES, AMÉRICANISTES DE PARIS

semence quils mangent volountiers, nomée Sanctlhqez l, de ťaultre


un aultre, du naisung aultre semence, nomée chia 2, qui est bonne
à bouyre en temps de esté, des doigts sortit ung fruict nomé
camotP qui est comme des naveaux fort bon fruict, des oungles
aultre sorte de maïs large qui est le forment quils mangent à présent,
et du reste du corps luy sortit beaucoup de aultresfruicts, les quels
les hommes ceuillent et sèment : et pour ce estoyt ce dieu aimé des
aultres dieux el'appelloint Tlacopili^ qui veult dire seigneur aimé.
Or,- est-il temps de savoyr qui estoyt ce Tezcatlipuca du quel les
Indiens font grand compte, et nous avons parlé si souvant de luy à
ceste cause.. Ce nom! est. composé de, troys>tezcatl, quiiveult dire
mirouer, t lep и ca ,5, composé i aussi de tletl qui s veult, dire lumière,
etpuctli, fumée ; et de touts ceux dis ont composé .ce, nom
Tezcatlipuca; à cause qu'ils disent qu'il portoyt tousiours ung.mirouer fort
M 80-81 luisant avecques soy, et que fumoyt à cause des encens1 et; choses
tii, 78 odoriférantes qu'il portoyt. Disent, aussi que ce mesme dieu a créé
(Vi, 43). pajr^ le quel 6 aparut en figura noire avec i une grand espine .'toute
sanglante en signe de sacrifice,, au .quel .diet de à\Q\uTezcatlipucai :
• <^Viença,\ vaťan oultre la^mair, ,à la maisonidm soleill! leiquela
beaucoup de musiciens et trompetaires avec, soy, qui luy, servent. et
chantent, entre les :quelsi il y a quelques 'ungs deitroySipiés,'. les
aultres qui ont les toureillesssi grandes s que; luy couvrent tout) le
corps, et, estant arrivé à bord de l'eau, appelleras mes niesses Esa-

1. Cette forme est évidemment corrompue. Nous croyons qu'il s'agit ici de la
racine comestible appelée cacatzli dans l'édition de Kingsborough, et catateztli
dans l'édition de Bustamante, par Sahagun (Livre XI, chap. 6, par. 9) ??
2. Le chia ou chian est une plante dont la graine .sert à faire de l'huile et
donne par l'infusion une boisson .mucilagineuse- très agréable; nutritive et
rafraîchissante. Cf. R. Siméon, Dictionnaire de la langue nahuatl.
3. Le camotli est une racine de la famille des convolvulacées. Cf. Sahagun,
trad. Jourdanet, p. 519 et 736.
4. Tlaçopilli, composé de tlaçotla : aimer, et pilli : seigneur. M. Seler [Codex
Fèjèrvary-Mayer, p. 64, 98) traduit tlaçopilli par noble prince, et le considère
comme un surnom de Xochipilli.
5. La Cosmographie a omis, les mots : « composé aussi de tletl » et traduit
tlepuca = lumière. La traduction classique de ce nom est (tezcatl-popoca)
brillant miroir.
6. La Cosmographie dit : auquel il apparut. Le contexte indique
suffisamment, me semble-t-il, que c'est Eecatl qui apparaît comme, le serviteur.de,
Tezcatlipoca. Nous nous en tenons donc au texte du manuscrit,
HISTOYRE DU MECHIQUE 33
capachtli l- qui' est. tortue et à- Acilmatl2^ qui est demi-femme,
demi-poiçon, et à- Alicipatli 3 qui est la valeine et' diras à toutes qui
se facent ung pont affin que tu puisses passer, et me amèneras de
chez le soleill les musiciens avec leurs instruments pour me faire
honeur », et, ce diet, se en alla, sens estre plus veu. Alors le dieu
de l'air s'en alla au bord de l'eaue et appela les susnomés, et vindrent
incontinent et se firent pont par le quel il passa. Le quel voiant
venir, le soleill diet à ses musiciens: « Voici «venir le meschant;
personne ne luy responde, car celuy qui luy respondra, ira avec
luy. » Ces dits musiciens estoynt vestus de quatre coleurs : blanc,
rouge, geaune et verd. .Adonc estant arrivé, le- dieu de l'air- les
appela en chantant; au quel respondit incontinent l'ung d'eux, et
s'en alla avec luy et porlala musique qui est celle quils usent à pré- f. s?
sent en ses dances en honeur de ses dieux, comme nous faisons avec
les orgues. Ils disent aussi que Tezcatlipuca leur apparoisoit en вн, 389.
figure de. singe et parloyt par les espaules. Autres foys en figure de
oiseau le quel frapant des aisles faisoyt grand bruict et resveilloit
ceux qui dormoint quand il vouloyt parler à eux. Et ainsi leur per-
suadoit, comme nous recompterons plus emplement en suyvant
nostre histoyre 4 de luy faire sacrifice, car il voioyt quils estoynt
cruels et se plaisoit du sang des hommes, le quel sacrifice ils fai-
soint, ouvrant le cousté du ceur aux esclaves tout en vie, et leur
arrachoynt le ceur, et luy faisoynt manger avant i qu'il mourut. Et

1. Esacapachlli se présente avec les apparences d'une erreur, de lecture, et


on le cherche vainement dans les répertoires. Je crois qu'il faut laisser de côté
la première syllabe, et lire acatapachtli. Ce mot, qui ne figure pas non plus au
dictionnaire, s'expliquerait • comme composé de acatl = roseau et tapachtli
— coquillage de rivière ou de mer (Sah., trad. Jourd., p. 712). Pour la
composition de ce mot, nous nous autorisons d'un terme analogue : acacueyatl, qui
désigne une espèce de grenouille. De même, acatapachtli désignerait une espèce
de tortue. Mais comment la syllabe es est-elle venue se préposer à ce mot? Pour
l'expliquer, il suffit de reconstituer le texte espagnol, et dédire par exemple :
la tortuga que es acatapachtli. Thévet aurait une fois de plus mal coupé les
mots, et mal traduit? ?
2. Lisez aciuatl (atl— ciuatl) = femme d'eau. L'orthographe acihuatl a donné
lieu à l'altération acilmatl.
3. Acipactli, composé d'atl= eau et de cipactli = crocodile. .
4. Ces développements se4rouvent probablement dans la partie que Thévet
n'a pas traduite, ou que nous n'avons pas de sa traduction.,
Société des Amer icanis tes de Paris. â
34 SOCIÉTÉ- DES' AMÉRICANISTES DE PARIS

ils estimoient celny; meilleur, maistre et plus digne de honeur* qui


faisoint, mieux ce sacrifice '..

m 82-83 Chapitre X
T(vi,745)°
(11,5) De ung idole,' nomé Queçalboatl, de son origine, euvres et temps
BI4824S1" qui régna.

qu'il*
Aux histoires de ce peuple sauvage, se trouve y avoyt ung
dieu, nomé Comachtli 'l qui print pour femme une déesse, nomée
Chimalma 3, la quelle eust dé luy des enfans entre les quels y avoyt
un nomé"
Queçalcoatl] le quel naquit à Nichatlanco 4 et fut mené à
son grand' père et mère qui le nourrirent, car sa mère mourut de
couches de luy. Le quel après avoyr esté nourri fust mené chez son
père, mais pour ce qu'il'estoyt fort aimé de son père, le haisoynt
ses aultres frères, tant quils proposèrent de le tuer, et pour ce faire
le menèrent avec fraude à une grand* roche, nomée Chalchonolte-
petl 5 qui veultdire roche où l'on faict brusler, et le laissèrent là,
et se descendirent en bas, et mirent le feu à l'entour de la roche;
mais Queçalcoatl se mit dans ung trou, qui avoyt en la roche, et
ses frères s'en allèrent pensant Г avoyr tué; mais, eux s'en estant
aies, il sortit de la roche avec un arc et des flesches, et tira à une
biche et la tua ; et la pernant sus ses espaules, la emporta chez son
père 6 et arriva plus tost que ses frères, et dona la biche à son père-;
etses frères, estant venus," furent émerveillés de le.voyr,' et pen-

1. Ces détails semblent indiquer que ce n'est pas le culte de Tezcatlipuca qui
a inauguré les sacrifices humains.1
21 Camaxtli est' la- même divinité que Mixcouatl (Seler, Cod. Fejervary
Mayer, p. 198)!" Et, de -fait,1 Motolinia donne comme père1 à- Quetzalcouatl,
Iztacmixcouatl [Mem., p. 12). Plusieurs traits du récit qui suit font allusion à
cette parenté avec le dieu des chasseurs.
3. M.' Seler traduit Ghimalman par « der liegende Schild » ou* « auf einem
Schild liegend » [Cod. Fej. Mayer, p. 184).
4. Je propose de lire Michatlauco (de michi, poisson, et atlauhtli, gorge).
5. Lisez Tlachinol-tepec. Cf. Codex Mendoza,, f. 14-14.
6. Les chasseurs étaient les bons serviteurs de Gamaxtli.
HISTOYRE DU -MECHIQUE Зо

sèrent le tuer en aultre sorte: et ainsi le menèrent sus ung arbre,


luy disant quiltireroyt de là aux oiseaux, luy estant sus l'arbre luy
commencèrent à tirer des flesches; mais, comme il estoit discret, se
laissa toumber en terre, feignant estre mort. Ce que voiant, ses
frères s'en allèrent à la maison; et eux, estant partits, Queçalcoatl
se leva et tua ung coneill, et le porta à son. père, avant que ses
frères arrivassent. Le père qui se dobtoit de ce que ses frères luy
vouloint faire, luy demanda ou estoynt ses frères; le quel luy res-
pondit qu'ils s'en venoint, et s'en alla de avec son père à une aultre
maison. Cependant, ses frères vindrent auxquels le père demanda
oùv estoyt son frère; ils respondirent1 qu'il venoit: Alors,* il' les
reprint de ce quils vouloyt'tuer son frère ; de quoy eux estant fas-
chés, se proposèrent aussi de tuer son père; ce que firent le menant
à une montaigne. Après l'avoyr tué, vindrent quérir Queçalcoatl,
et luy firent croire que son père se estoit changé en roche, ensemble
luy persuadoynt- qu'il sacrifia et offrit quelque chose à ceste roche,
comme lions, tigres, aigles, biches et papillons, pour avoir occasion
dé le tuer, car il' ne pourroit pas trouver ces bestes ; à quoy il ne
voulant obéir, le voulurenťtuer, mais il se eschapa de entre eux, et
se en ala sus un arbre, ou, qui est plus veresemblable, sus la mesme
roche, et à coups de flèches les tua touts ; ce que faicť, ses vasaulx,
qui Taimoyntt fort, le vindrent quérir honorablement,' et prindrent
les testes de ses frères et luy ostant le cerveau, de dans .firent des
coupes à boire, et s'enivrèrent incontinent *, et de là se vindrent à
terre de Mechique, et demeura quelques jours en ung vilaige, nomé
Tùlancingo *, et de là s'en alla à Tula, où onne savoyt encore que
s'estoit de faire sacrifice ; et par ainsi;1 comme il aporta l'usaige du
sacrifice, fut tenu pour dieu, aux quels il' enseigna beaucoup de
bonnes choses,- temples pour luy etaultres choses, et dura 160 ans
pour dieu en ce païsr

1. Ni Motolinia, ni Sahagun, ni Mendieta, ni Torquemada ne rapportent


cette première partie de la légende de Quetzalcouatl.'
2. Tullantzinco. Cette localité aurait aussi servi de résidence aux Culhuas
avant leur arrivée à Tullan [Memoriales de Motolinia ; p. 5). .
36 SOCIÉTÉ DES AMÉRICANISTES s DE PARIS

Chapitre XI

De la venue de Tézcatlipuca à Tula


et dé comme fît fuir Queçalcoatl!

Queçalcoatl vivoyt fort à son aise en Tula, estant adoré pour


dieu; mais, comme la vérité, ne se peultiong temps tenir cachée,
advint que arriva à Tula un aultre dieu, du quel nous. avons parlé
par ici davant Tézcatlipuca, le quel en arrivant de envie qu'il
avoyt de Queçalcoatl tachoyt à faire mal au puple de Tula pour ce
que le adoroyt et. ensemble à Queçalcoatl, iL entra en Tula en
figure de pouvre,1, et prenoyt, à toutes heures, diverses figures et
faisoit peur à ceux de Tula et à Queçalcoatl, le quel encores qu'il
fust diable aussi bien que luy, toutes fois il y a des diables les ungs
plus grands que les aultres ; car, comme ils sont esté faicts de
anges, et il y a des anges les ungs plus grands que les aultres,
aussi les diables. Or, ce Queçalcoatl estoyt moindre que Tezcatli-
puca, et pour ce le craignoyt-il : ung jour doneques Tézcatlipuca
alla au temple de Queçalcoatl. Là, où estoynt beaucoup de serviteurs
qui gardoynt unhaustel, où estoyt une efigie de Queçalcoatl et ung
mirouer que les Indiens estimoynt beaucoup; car, selon; que
Queçalcoatl leuravoyt faict croire, par le moien de ce mirouer, toutes
les foys qu'ils auroint à faire de pluie, et luy demanderoynt avec ce
mirouer, il leur bailleroynt ; entrent donc. Tézcatlipuca,, en le
temple, il trouva. les gardes endormies, et s'en alla droiťa l'haustel
et desrroba le mirouer, . et le cacha . desoubs une pallace où
couchoynt les gardes; ce que faict, se en alla. Les gardes," estant
esveillés, et ne trouvant le mirouer, estoyntfort marrits le cherchant;
mais Tézcatlipuca trouva une vielle en son chemin, et. lui diet :
« Vaten au temple et di à ces gardes que ce qu'ils cherchent qu'il est
desoubs sa paillace, et tu seras bien aimée d'eux. » Ce que la vielle
fit. Gependen Tézcatlipuca se changoyt en figures de divers: ani-

1 . Sahagum raconte en détail les exploits de Titlacauan à Tullan. Trad, ,


Jourd.. 209 ss.
HISTOYRE DU'MECHIQUE- 37

maulx et monstres, taschant faire peur? aux gens : il se fît * aussi


couper les cheveux, ce que les Indiens n'avoynt jamais veu, et se en
alla au temple de; Queçalcoatl, et destruict sa* figure, la rompant
et getant par terre,: et ce faisant em diverses figures, frapoyt ises
serviteurs, et touts ceux de Tula ^ qui voiant cela se. en fuirent et
laissèrentda vile; et Queçalcoatl voiant ceci eust peur et se enfuit
aussi avecques quelques ungs de ses serviteurs; de quoy.Tezcatlipuca
fut bien aise. Queçalcoatl se en alla de là à Tenaçuia l et demeura
là quelque' temps, et de là • s'en alla en Cullinacan.2 où ; demeura
aussi long temps, mais l'on ne sait combien. De là il .passa les
montaignes, et s'en alla en Quantiquechula 3 et dressa ung temple
et ung haustel pour soy, et estoyt adoré, pour dieu, et ni avoyt
que luy, et là demeura 290 ans, et laissa là un i seigneur nomé
Maclalchochitl 4, et s'en alla en Acholula 5 où demeura 160 ans,
où luy firent ung temple fort magnifique du quel il y a encore
grand partie ; car estoyt bien basti et beau, le quel les géans
avoyt faict, comme nous dirons après. De là, s'en alla à Cempoala 6
vile principale en la mer de Espaigne, où premier arriva le
marquis Don Cortès, quand il alla en ce païs ; mais, à présant
est. toute desmolie, comme les Espaignols ont faict à beaucoup

1. Lisez Tenayuca.
2., Je propose de lire Cullivacan ou bien Gulhuacan. Dans la dernière
hypothèse, Thévet aurait changé Ли en lin ; c'est une erreur de lecture très
ordinaire. Dans le premier cas, nous serions en présence d'une forme culiuacan
parallèle à Gulhuacan. M. Seler rencontra cette forme dans le chant de Giua-
couatl ; pour lui, l'insertion de Vi s'explique par le désir d'éviter le choc de
2 consonnes. En effet, le v est une consonne qui se prononce comme le w anglais
(Ges. Abhandlungen zur Amer. Sprach- u. Alterthumskunde, II, 1057. Berlin,
Asher, 1904).
3. La même localité que celle désignée du nom de Quauviquechula ou
Quauhquechula par Motolinia (Memor., p. 104-105). Elle est située à 8 lieues
de Huexutzinco.
4. Je crois qu'il faut lire Matlac xochitl (10 fleurs) qui est le nom d'un jour.
Les Mexicains donnaient habituellement à leurs enfants le nom. du jour où ils
étaient nés. Mais il s'agit peut-être aussi de matlal xochitl, fleur d'un bleu
foncé.
5. Gholula ou Gholollan. Il s'agit ici du Cholula historique de l'état de
Puebla; Ce nom dériverait de choloa = fuir, et signifierait donc: lieu de la
fuite ,
6. De Gempoalli (vingt) et lan ; ce nom veut donc dire : le lieu des vingt.
38 SOCIÉTÉ ! DES t AMÉRICAN1STES ' DE PAHIS .

de aul 1res. En ceste vile,- demeura 260 ans,1 et jusques en ce, lieu
le poursuivoyt Tezcatlipuca ; le quel se»voiant tant .persécuté i de
ce Tezcatlipuca* s'en* fuit- en. un .désert, et, tirât un:coupjde
flèche > à ung arbre, et .se- mit s de dans le partuis de la flèche,
et ainsi ; mourut;; et ses > serviteurs», le? prindrenf; et le brus-
lèrent, et de : là, demeura la coustume de brusler les ♦ corps
morts l. De la fumée que sortit: de son' corps, , disent avoyr. esté
faicte une. grande estoyle que, se appelle Hesper V Gestuy Queçal-
contl n'eust jamais femme ni enfens 3. Aultres i disent? que quand il
devoyt mourir isen alla en. ung lieu.....

1. Nous avons appelé l'attention plus haut-sur une autre .origine ; de la


coutume de la crémation. Cf. chap. VI, p. 25.
2. D'après Mendieta, l'âme de Quetzalcouatl se changea en une comète de
mauvais présage (II, ch. 5, p. 82-83 ; cf. Torquemada, Mon. Ind., VI, 45, tome
II, p. 79-2).
3. Ce détail est confirmé par Motolinia (Mem., 13) : « No fui casado, ni tomó
mujer, antes dicen que vivió honesta y castamente. »
HISTOYRE'DU MECHIQUE: 39

INDEX DES NOMS NAHUATL

Chiconaui eecatl, IX p. 31.


Chimalma, X p.- 34.
Acatapachtli, IX p. 33. Chypila, v. Juchipila ou Xochipila.
Acatl, Vp. 21. Cholutl, v. Xolotli
Acholula, XI p. 37. Choix, III p.
Aciantli, v. Acicintli. Choquicauitl, v. Xochiquauitl.
Acicintli, VI p. 23. Choquijceli, v. Xochiquetzal.
Acilmatl, v. Aciuatl. > Choquipili, v. Xochipilli:
Acipactli, IX p: 33. Chuquipila, v. Xochipilla.
Aciuatl, IX p. 33.. Chuquiquecal, v. Xochiquetzal.
Altcipatli, v. Acipactli. Cicimitl, v. Tzitzimitl.
Atlalteutli, v. Tlalteuctli. Cicimime, v. Tzitzimime.
Atlatime, v. Gitlallicue. Cylopucheli, v. Uitzilopochtli.
Cincocopi, VI p. 23.
Cinteotl, IXp. 31. .
Ciuatla, Vp. 21.
Galcoatl;' v. Quetzalcouatl. Cintentl, v. Cinteotl.
Galconatlansi,- v. Quetzalcouatl. Citlafecue, v. Citlallicue.
Calli, V p. 20 et 21:. Citlaline,v. Citlallicue.
Camachtli, X p. 34. ^ Citlaliue, v. Citlallicue.
Gamotli, IX p. 32. Gitlallicue.VII, VIIIr IX pp. 26/29 et
Catateztli, IXp. 32. 30.
Ceecatl, IX p. 31. Citlaltonac, VII p. 26.
Gemecatl, v. Ceecatl. ; Gomachtli, v. Camachtli.-
Cempoala, XI p. 37.1 Compahli, v.- Tzbmpachtli.'
Centencupi, v. Cincocopi. Gontecomael, v. Tzontecomatl.
Chachuich tonaiuh, v. Chalchiuh Couatlicue, VI p. 22.
tonatiuh. Gozcamiauh, VIII p. 30.
Chalchiuh tonatiuh, VI p. 23. . Cuernavaca, VII p; 27.
Chalchiutlicue, VI p. 22. Cuitlauac, IV p. 18.;
Chalcintli, v. Chalchiutlicue. Culhua, IV p. 19.
Chalchonoltepetl, v. Tlachinoltepec. Culhuacan, XI p. 37.
Chalco,I p. 11. Culiacan, III et IV pp. 15 et 19.
Chalpe, v. Xalpa. Culiuacan, XI p. 37.,
Chapultepec, III p. 17. Cullinacan, v. Culiuacan ou
Chia, IX p. 32. Culhuacan.
Chiconaui, v. Chiconaui eecatl. Cuzcamianh, v. Cozcamiauh.
40 SOCIÉTÉ î DES ï AMÉRICANISTES - DE PARIS
E Nezahualpiltzintli, IV p. 18. ^
Nichatlanco, v. Michatlauco.
Eecatl, VII pp. 25, 26, 27, 29, 31.
Ecatonatiuh, VLp.24..
Echi, v. Exi. О
Ehecatl, v. Eecatl.
Esacapachtli, v. Acatapachtli. • Ocpatli, VII p. 28.
Exi, III pp. 14 et 17. Omecalli, V p. 20.
Omeciuatl, VI p. 23.
Qmeteutli, VI p. 23.
I, Otomi, I, IV pp. 11, 12, 13, 17, 18,20.
Yacauiztli, VII. p. 26.*
Yhin, v. Uitzilopochtli.
Yoaltentli, v. Youalteutli.
Youalteutli, VI, VII pp. 23, 26.
Youaltonalîuh, VI p. 24. Pieciutentli, v. Piltzinteutli.
Ixpatli, VIII p. 30.- Pilciutentli, v. Piltzinteuctli.
Izpat], v. Ixpatli. Piltzinteutli, vin ; ix pp. зо; 31.
Popoluca, II pp. 12, 13.
Populoque, v. Popoluca. -
Puctli (popoca), IX p. 32.
Juchipila, III p. 16.
.

Q
L
Loli, v. Tlotli. Quanhuahuac, v. Quauhnahuac.
Quantiquechula, v. Quauhquechula/
M Quauhnahuac, VII p. 27Г
Quauhquechula, XI p. 37.
Maclalchochitl,' v. Matlacxochitl. Quenametzin, VI p. 24.
Xbpp.22,"
Malteutl, II p. 13. Quetzalcouatl, VI, VII, X,
Matlacxochitl, XI p. 37. 28, 34-38.
Mayauel, VII p. 27: Quetzalhuexotl, VIL p. 28.
Metl, III, VII' pp. 14, 17,28. 16,' 17,' Quivira, III p. 14,
Mexique, III pp. 8, 11, 14, 15,
19, 20, 35.
Michatlauco, X p. 34] R
Mictlanteutli, VI, VII pp. 22, 25, 26.
Mizquitl, VI p. 24. Rintentli, v. Xiuhteutli.
Rontli, v. Couatlicue.
N '

Nanacatl, IV p. 18. " S


Nanauaton, VIII p. 30.
Necahuatl pilciutli, v. Nezahual- Sanctlhqez, v. Gatateztli.
piltzintli. Symitláteutl, v. Mictlanteutli.
HISTOYRE DU MECH1QUE 41
Tonacaciuatl, VI p, 22.
Tonacateutli, VI p. 22.
Tonaleque, VI p. 22.
Tonatiuh, VI p. 22.
Tamoanchan, VII p. 27.
Tucan, III p. 14.
Tecpatl, V p. 21.
Tenainque, v. Tenajuca. Tulancingo, v. Tullántzinco.
Tenayuca, III, XI pp. 16 et 37. Tullan, IV, XI pp. 19, 35, 37.
Tullántzinco, X p. 35.
Tenuchtitlan, I p. 11.
Tzitzimitl, VII p. 27.
Teomuthilan, v. Tenuchtitlan. Tzitzimime, VII p. 28.
Teotihuacan, VIII p. 29. Tzompachtli, I p. 9.
Teotlalpa, V p. 21. Tzontecomatl, I p. 9.
Teotli, v. Ometeutli.
Teul, III 15.
Tezcalco, I p. 8. V
Tezcalque, v. Tezcalco.
Tezcatl, IX p. 32. Uamac, v. Uemac.
Tezcatlipoca, I, III, VI, VII, VIII, IX, Ucpactli, v. Ocpatli.
X, XI pp. 10, 16, 23, 25, 26, 28, 29, Uemac, IV p. 19.
31, 32, 33, 36, 38. Ueuemont Cumaci, v. Ueue montecu-
Tezcuco, I p. 8, 9, 11. comatzin.
Tholman, III p. 14. Ueue montecumatzin, IV p. 17.
Tlaçoçacatl, I p. 9. Uitzilopochtli, III p. 16.
Tlaçopili, v. Tlaçopilli. Uitztla, Vp. 21.
Tlaçopilli, IX p. 32.
,

TIachinoltepec, X p. 34.
Tlaloc, VII p. 26. , X
Tlalocanteutli, VI p. 22.
Tlaloque, VII p. 26.
Tlaltentli, v. Tlalteutli. Xalpa, III p. 16.
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Tlalxicco, V р. 21 . Xiuhteutli, VI p. 22.
Tlapco, V p. 21. Xiuhtonalli, V p. 20.
Tlauizcalpantecutli, VI p. 23. Xochiquauitl, VII p. 28.
Tletl, IX p. 32. Xochipilli, VIII p. 30.
Tlotli, I p. 9. Xochiquetzal, VIII p. 30 et peut-être,
Tochtli, Vp. 21. IX p. 31.
Toich, v. Teul. Xolotl, VII p. 27.

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