L'industrie Du Fer Et de L'acier
L'industrie Du Fer Et de L'acier
L'industrie Du Fer Et de L'acier
Chapitre 73 - La sidérurgie
L’INDUSTRIE DU FER ET DE L’ACIER
John Masaitis
Le fer est très largement répandu dans l’écorce terrestre, où il se présente sous forme de
minerais divers (oxydes, hydroxydes, carbonates, sulfures, silicates et autres). Depuis la
préhistoire, l’être humain a appris à préparer ces minerais par lavage, concassage, criblage,
élimination de la gangue, et à les traiter par réduction (fusion), agglomération sur grille ou en
boulettes pour pouvoir les fondre de façon à obtenir du fer et de l’acier. A l’époque historique,
une industrie florissante du fer s’est développée dans de nombreux pays à partir des gisements
locaux de minerai et de la proximité de forêts qui fournissaient le combustible sous forme de
charbon de bois. Au début du XVIIIe siècle, la découverte de la possibilité de remplacer le
charbon de bois par le coke a révolutionné la sidérurgie, dont l’essor allait être le point de
départ de tous les autres progrès de la révolution industrielle. Les grands bénéficiaires furent les
pays dont les gisements de charbon et de fer étaient proches les uns des autres.
La fabrication de l’acier ne s’est véritablement développée qu’au XIXe siècle, avec l’invention
des procédés de fusion: la cornue Bessemer (1855), le four à sole généralement chauffé au gaz
de gazogène (1864) et le four à arc (1900). Depuis le milieu du XXe siècle, l’affinage à
l’oxygène, surtout le procédé LD (Linz-Donawitz) à lance, a permis l’élaboration d’aciers de
haute qualité à des coûts de production relativement faibles.
Aujourd’hui la production d’acier est un indice de la richesse nationale et elle est à la base de la
production de masse dans de nombreux secteurs industriels tels que la construction navale,
l’automobile, le bâtiment et les travaux publics, la construction mécanique, l’outillage et les
équipements industriels et ménagers. Le développement des transports, en particulier par mer,
ayant rendu le commerce international des matières premières (minerai de fer, charbon, fioul,
ferrailles et additifs) économiquement rentable, il a contribué à battre en brèche la position
privilégiée des pays possédant des gisements de minerai de fer à proximité de mines de
charbon. On a donc vu apparaître, dans des régions côtières des grands pays industriels, des
usines sidérurgiques et des aciéries importantes approvisionnées par des pays exportateurs qui
sont en mesure de satisfaire la demande en matières premières de haute qualité.
Au cours des dernières décennies, on a assisté à la mise au point des procédés dits de réduction
directe dans lesquels les minerais de fer, en particulier les minerais riches ou enrichis, sont
réduits en éponges de fer par extraction de l’oxygène qu’ils contiennent, ce qui permet d’obtenir
un matériau ferreux qui remplace la ferraille. Ces procédés connaissent un succès grandissant.
La production de fer et d’acier
En 1995, la production mondiale de fonte brute était de 578 millions de tonnes (voir figure
73.1), et celle d’acier brut de 828 millions de tonnes (voir figure 73.2).
L’industrie de l’acier traverse une ère de révolution technologique, et l’on observe une tendance
à l’accroissement des capacités de production par la construction de nouvelles installations sous
forme de petites usines à fours à arc utilisant des ferrailles d’acier (voir figure 73.3). Bien que
des usines intégrées fabriquant l’acier à partir du minerai atteignent des rendements records, les
aciéries à four à arc, avec des capacités de production de l’ordre de moins de 1 million de
tonnes par an, se banalisent dans les principaux pays producteurs d’acier du monde.
La fabrication du fer
Certaines grandes usines disposent de fours à coke sur le même site. Avant d’être chargés dans
le haut-fourneau, les minerais sont généralement soumis à des opérations spéciales de
préparation (lavage, calibrage par concassage et criblage, séparation des fines pour
agglomération sur grille ou en boulettes, tri mécanisé pour éliminer la gangue, calcination,
agglomération sur grille ou en boulettes). Le laitier évacué du haut-fourneau peut être
transformé sur place en vue d’autres utilisations, notamment la fabrication du ciment.
La fabrication de l’acier
La fonte brute a une forte teneur en carbone et en autres impuretés (principalement du soufre et
du phosphore). Il faut donc l’affiner, c’est-à-dire réduire sa teneur en carbone, oxyder et
éliminer les impuretés pour la transformer en un métal très malléable pouvant être forgé et
façonné. C’est l’objet de l’élaboration de l’acier, qui peut s’effectuer dans trois types de fours:
le four à sole, le convertisseur à oxygène (voir figure 73.6) et le four à arc (voir figure 73.7). La
plupart des fours à sole ont été remplacés par des convertisseurs à oxygène, dans lesquels l’air
ou l’oxygène sont injectés dans le fer en fusion, ou par des fours à arc alimentés en ferraille ou
en boulettes de fer spongieux.
Les aciers spéciaux sont des alliages auxquels on incorpore d’autres éléments métalliques pour
leur conférer des propriétés particulières dans un but précis (du chrome pour éviter la corrosion,
du tungstène pour augmenter la dureté et la résistance à haute température, du nickel pour
améliorer la résilience, la ductilité et la résistance à la corrosion). Ces éléments peuvent être
ajoutés dans la charge du haut-fourneau (voir figure 73.8) ou bien dans l’acier en fusion (dans le
four ou la poche de coulée) (voir figure 73.9). L’acier en fusion est déversé dans des
installations de coulée continue pour former des billettes (voir figure 73.10), des blooms (voir
figure 73.11) ou des brames. Il peut également être coulé dans des moules pour former des
lingots. La majorité de l’acier est produit en coulée continue (voir figure 73.12), ce qui offre à la
fois un rendement accru, une meilleure qualité, des économies d’énergie et une réduction des
coûts d’investissement et d’exploitation. Les lingots sont stockés dans des pits, c’est-à-dire des
fours en sous-sol équipés de portes, où ils peuvent être réchauffés avant de passer aux laminoirs
ou de subir d’autres transformations (voir figure 73.4). Certaines aciéries ont commencé à
fabriquer de l’acier en coulée continue. Les laminoirs font l’objet de l’article suivant; les
fonderies, le forgeage et la transformation sur presses sont traités au chapitre no 82, «La
transformation et le travail des métaux».
Les risques
Les accidents
Au cours de l’élaboration du fer et de l’acier, les hauts-fourneaux, les convertisseurs et les fours
à coke produisent d’importantes quantités de gaz. Après dépoussiérage, ces gaz sont utilisés
comme combustibles dans les différents ateliers; ils peuvent aussi être vendus comme matières
premières à des complexes chimiques. Tous contiennent d’importantes quantités de monoxyde
de carbone (22 à 30% pour le gaz de haut-fourneau, 5 à 10% pour le gaz de four à coke et 68 à
70% pour le gaz de convertisseur).
Il arrive que du monoxyde de carbone s’échappe du gueulard des hauts-fourneaux ou par des
fuites au niveau de la cuve ou encore des nombreuses canalisations de gaz installées dans les
usines, provoquant ainsi accidentellement de graves intoxications. Le plus souvent, ces cas
d’oxycarbonisme aigu surviennent à l’occasion d’interventions à proximité de hauts-fourneaux,
en particulier pendant des réparations. D’autres cas apparaissent lors de travaux à proximité de
fours chauds, de visites d’inspection des cuves, d’interventions près des gueulards ou des trous
de coulée ou de laitier. Les intoxications au monoxyde de carbone peuvent également être
causées par des émanations de gaz provenant de vannes à soupape hydraulique ou des boîtes à
eau dans les aciéries ou les laminoirs, ou être consécutives à l’arrêt brutal des souffleries, des
chaudières ou des aérateurs, à des fuites, à une mauvaise ventilation et à un dégazage préalable
insuffisant des cuves, des canalisations ou des équipements, ainsi que pendant la fermeture de
vannes sur des conduites.
Autres risques
Le travail sur des fours à gaz et en haut des batteries de cokéfaction, devant les hauts-fourneaux
et face aux fours, dans les fours, les répartiteurs et les lingotières pendant les réparations, en
lingotage et en coulée continue, implique dans chacun de ces cas des efforts pénibles dans une
ambiance surchauffée. Il faut donc mettre en place des programmes de prévention des troubles
liés à la chaleur.
En outre, en l’absence de moyens de protection appropriés, la lumière aveuglante provenant des
fours peut provoquer des lésions oculaires dues aux rayonnements infrarouges. Les opérations
manuelles telles que la pose de briques réfractaires dans le haut-fourneau ou les vibrations
transmises aux mains et aux bras par les ébarbeuses ou les meuleuses électriques peuvent créer
des problèmes d’ordre ergonomique (troubles musculo-squelettiques).
Les souffleries, les centrales à oxygène, les extracteurs de gaz et les fours à arc à haute
puissance génèrent des niveaux sonores importants susceptibles de provoquer des lésions
auditives. Les opérateurs travaillant sur les fours devraient être protégés par une enceinte
d’isolation phonique confinant la source du bruit ou par des cabines insonorisées. La réduction
de la durée d’exposition au bruit peut également se révéler efficace. Le port de protections
individuelles (casques ou bouchons d’oreille) est souvent exigé dans les zones très bruyantes
dans lesquelles une réduction appropriée du bruit ne peut être obtenue par d’autres moyens.
Les mesures de sécurité et de santé
L’organisation de la sécurité
La formation
La formation devrait comporter une information sur les risques, les méthodes de travail sûres,
les comportements permettant d’éviter les dangers et le port des équipements de protection
individuelle. L’introduction de nouvelles méthodes de travail peut appeler une formation
complémentaire, même pour les travailleurs ayant une longue expérience des fours anciens. La
formation et le recyclage du personnel à tous les niveaux sont particulièrement utiles; ils ont
pour objectif de permettre aux salariés de se familiariser avec les méthodes de travail sûres, les
comportements dangereux à proscrire, les règles de sécurité et les principales dispositions
légales sur la prévention des accidents. La formation devrait être assurée par des experts et faire
largement appel à des moyens audiovisuels performants. Il est conseillé d’organiser
régulièrement des réunions ou des rencontres de sécurité pour toutes ces personnes de façon à
consolider la formation et à développer l’esprit de sécurité.
Il importe de protéger efficacement toutes les parties dangereuses des machines et appareillages,
y compris les monte-charges, les bandes transporteuses, les arbres de transmission et les
engrenages des ponts roulants. Il faut aussi instaurer un système d’inspection, de contrôle et de
maintenance périodiques pour tous les équipements de l’usine, en particulier pour le matériel de
levage (ponts roulants, apparaux de levage, etc.). Une procédure de verrouillage devrait être
prévue pour la maintenance et les réparations. Les apparaux reconnus défectueux seront mis à la
casse. Les dispositifs de levage porteront clairement l’indication de la charge utile de sécurité et
les apparaux non utilisés seront rangés avec soin. Là où cela est possible, l’accès aux ponts
roulants devrait se faire par un escalier; si l’emploi d’une échelle verticale est inévitable, il faut
prévoir une crinoline. Il convient en outre de prendre des dispositions efficaces pour limiter le
déplacement des ponts roulants quand des personnes travaillent au-dessous. Il peut s’avérer
nécessaire, comme la loi l’exige dans certains pays, d’installer des appareils de coupure
appropriés destinés à éviter les collisions quand deux ou plusieurs ponts se déplacent sur un
même chemin de roulement.
Les locomotives, voies ferrées, wagons, cars de coulée ou bogies, et attelages devraient être
bien conçus et maintenus en bon état; le réseau sera doté d’un système efficace de signalisation
et d’avertisseurs. Il faut interdire de grimper sur les tampons et de passer entre les wagons.
Aucune intervention ne devrait être effectuée sur les voies tant que des mesures n’auront pas été
prises pour en contrôler l’accès et limiter les déplacements des engins qui y circulent.
Le stockage de l’oxygène exige de grandes précautions. La distribution sera assurée par des
réseaux de canalisations portant un marquage spécifique. Toutes les lances devraient être
maintenues en parfait état de propreté.
La lutte contre le désordre appelle une vigilance de tous les instants. Les chutes et les