BT Asie - Francais Voie Technologique - Sujet (21-Frantein1)
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SESSION 2021
FRANÇAIS
ÉPREUVE ANTICIPÉE
Dès que ce sujet vous est remis, assurez-vous qu’il est complet.
Ce sujet comporte 9 pages, numérotées de 1/9 à 9/9.
[…] Il faut que je les trouve. Bientôt il sera trop tard, il y a trop de monde, on me
bouscule, tout le monde piétine. Maintenant tout le monde aimerait avoir pris sa place
dans le stade. Désormais, ce n’est plus la colère qui m’écrase, mais l’étonnement et
la stupéfaction : une canette a éclaté à mes pieds, de la bière a éclaboussé mes
5 chaussures et mes bas de pantalon. Je ne bouge pas et je reste là, j’attends, je relève
la tête et j’entends les voix qui viennent du dessus des gradins, d’où l’on voit des
visages, des jeunes qui courent sur les hauts des gradins – ils sont là depuis combien
de temps ? Là-haut, tournés vers l’extérieur, vers nous, à regarder tous ceux qui
attendent encore d’entrer ? Et eux, de là-haut, ça les chauffe, ils s’excitent et piétinent,
10 ils font des gestes obscènes contre nous. Ils gueulent et jettent des canettes à moitié
vides qui explosent au sol. Les gens en bas, à côté de moi, n’ont pas peur et montrent
les poings en gueulant. J’en ai vu qui se mettent à leur tour à lancer des cailloux et
des bouteilles vides qui éclatent contre le mur d’enceinte.
Et les cris, les mouvements par à-coups du flot qui avance et pénètre dans
15 l’enceinte. Je n’y peux rien, je suis entraîné vers l’entrée, vers le sas où les policiers
et les agents du stade vérifient les billets. Mais je n’ai pas de billet. Je n’ai rien que
mon corps qu’on charrie1 et mes pieds qui refusent et freinent, dans la poussière, sous
la chaleur. Il ne faut pas, je me cabre, résiste, retiens. Les muscles se tendent et puis,
un instant, il y a derrière moi comme un trou. Je recule d’un grand pas en arrière. Puis
20 un autre. Je ne veux pas entrer maintenant, comme ça, sans elle. Où est-elle ? Elle.
Virginie2. Sans qui la finale n’est rien. Sans qui rien n’est rien. Ma colère tombe à cause
du besoin que j’ai de répit, de prendre le temps de retrouver mon souffle, en aspirant
profondément des goulées3 de cet air tiède et puant d’odeurs de merguez et de pots
d’échappement, saturé de poussière, que je recrache alors en petits souffles courts,
25 rapides. Ma poitrine se soulève au-dessus de cette odeur qui monte. Et moi qui hier
soir me sentais comme le roi du monde, tout entier occupé à gagner mon premier
travail et des billets pour une finale, me voilà avec l’impression de ne plus rien avoir
que le soleil au-dessus de ma tête.
1- Vous montrerez la manière dont le récit nous plonge avec réalisme au cœur
d’une foule de supporters hostiles.
Le candidat traite, compte tenu de l’œuvre et du parcours étudiés durant l’année, l’un
des trois sujets suivants :
Jennifer Hays est anthropologue : elle s’intéresse aux droits et à l’éducation des
peuples autochtones.
Il y a quelques années, alors que je travaillais parmi les San, au Nyae Nyae
Conservancy, en Namibie, un groupe de touristes d’Australie est venu pour une visite
guidée.
Les San, dits aussi Bushmen, sont des chasseurs-cueilleurs autochtones1
5 d’Afrique australe. Cette catégorie générale englobe environ 100 000 personnes et
plusieurs groupes linguistiques. Les San de Nyae Nyae sont connus comme
Ju/’hoansi. Comme dans nombre de sociétés égalitaires de petite taille, cette
autodésignation se traduit comme « les vrais gens ».
Je me glissai parmi les touristes pendant qu’un groupe de San, vêtus d’habits
10 traditionnels en peaux d’animaux, les menait dans la brousse. Assisté par un jeune
homme qui traduisait en anglais, le guérisseur local décrivit différentes plantes, leurs
usages médicaux et alimentaires. Les femmes montrèrent comment utiliser des bâtons
à creuser pour tirer des tubercules2 du sol sablonneux du désert. Les chasseurs firent
étalage des techniques de fabrication des arcs et des flèches, expliquant comment ils
15 extraient du poison d’une larve qui se trouve sous un arbre particulier afin d’en enduire
les projectiles. Ils confectionnèrent un collet3 pour attraper de petits oiseaux et
mammifères, et allumèrent un feu avec deux bâtons et de l’herbe sèche.
Les Australiens furent impressionnés et posèrent de nombreuses questions.
Alors qu’ils s’apprêtaient à quitter le village, je les écoutais vanter la culture des San.
20 Ce qui me poussa à leur demander s’ils voyaient des similitudes entre les San et les
Aborigènes de leur propre pays. À mon grand désarroi, un homme éclata de rire,
approuvé par plusieurs de ses compatriotes : « Les Aborigènes ? Ils n’ont plus aucune
connaissance de la sorte ! Ces parasites ne font que boire de l’alcool, mendier de
l’argent, vivre de l’aide du gouvernement ! » Mes efforts pour questionner leurs
25 stéréotypes furent accueillis avec le mépris de ceux qui « savent de qui ils parlent ».
Ces touristes ne s’intéressaient pas aux peuples de leur propre pays, qui ont
pourtant tant en commun avec les San. Comme tant d’autres, ils étaient venus à Nyae
Nyae en quête d’authenticité, voir de vrais Bushmen. Mais que signifie être un « vrai »
autochtone ?
1 Autochtones : originaires du lieu où ils habitent, et que leurs ancêtres ont également habité.
2
Tubercule : racine comestible.
3
Collet : piège formé à l’aide d’un nœud.
Texte : Monique Atlan, Roger-Pol Droit, Humain. Une enquête philosophique sur
ces révolutions qui changent nos vies, 2012.
Monique Atlan et Roger-Pol Droit ont écrit ensemble cet essai dans lequel ils
rapportent aussi le fruit de leur rencontre avec différents scientifiques, ici Gérard Berry,
un spécialiste de la science informatique.
Essai : Face aux défis du monde qui nous entoure, l’imagination nous permet-elle de
faire preuve d’ingéniosité ou peut-elle devenir une faiblesse ?
6
Idéalité : caractère de ce qui est idéal.
7
Quarks : en physique, particules élémentaires.