4 - La Polyarthrite Rhumatoïde
4 - La Polyarthrite Rhumatoïde
4 - La Polyarthrite Rhumatoïde
POLYARTHRITE RHUMATOÏDE
Pr. R.CHERMAT
Service de Médecine interne
CHU DE SETIF
Le 03/06/2020
1
UFAS Faculté de Médecine 5ème année Pr R. Chermat Rhumatologie : La Polyarthrite Rhumatoïde
SOMMAIRE
1. DEFINITION
2. PHYSIOPATHOLOGIE
3. DIAGNOSTIC POSITIF
4. DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
5. TRAITEMENT
2
UFAS Faculté de Médecine 5ème année Pr R. Chermat Rhumatologie : La Polyarthrite Rhumatoïde
1. DEFINITION
La polyarthrite rhumatoïde (PR) est le plus fréquent des rhumatismes inflammatoires
chroniques de l'adulte. Elle affecte préférentiellement la femme et peut survenir à n'importe
quel âge mais surtout entre 35 et 55 ans. La prévalence globale de la PR en 2005 est de 0,95
%. Sa pathogénie reste obscure, même si l'on pense qu'il s'agit d'une affection auto-
immune. Après une phase variable d'installation dans la maladie, la période d'état se
caractérise par une polyarthrite bilatérale, symétrique et destructrice, d'évolution
chronique. La PR est aussi une maladie systémique dont les manifestations extra
articulaires peuvent mettre en jeu le pronostic vital. Grâce à d'importants progrès
récemment effectués dans le domaine du diagnostic précoce et de la thérapeutique, le
pronostic global de cette affection est en voie d'amélioration.
2. PHYSIOPATHOLOGIE
La PR est une maladie auto-immune d’étiologie inconnue, multifactorielle avec
intrication de facteurs psychologiques (facteur déclenchant), hormonaux (sexe féminin,
périménopause), environnementaux (germes, tabac) et génétiques (terrain HLA DR4 dans
60% des cas et DR1 dans 30% des cas).
1-Schématiquement la PR est due à un ou des antigènes inconnus qui sont présentés au
lymphocyte T par une cellule présentatrice d’Antigène grâce aux molécules
d’histocompatibilité HLA classe II. Le lymphocyte T, en général de type T4 (mémoire)
devient ainsi actif, et sera à l’origine de certaines réactions:
1- Sécrétion de cytokines : par action directe ou par
l’intermédiaire d’autres cellules.
2- Activation des synoviocytes et des fibroblastes avec constitution du
pannus dont la chronicité entraîne la destruction de l’os et du cartilage.
3- Stimulation du lymphocyte B qui va se transformer en plasmocyte avec
sécrétion du facteur rhumatoïde et d’autres immunoglobulines, comme les anti
CCP.
Exo antigènes
Lysosome
HLAII
Endosome
Effecteur
3
UFAS Faculté de Médecine 5ème année Pr R. Chermat Rhumatologie : La Polyarthrite Rhumatoïde
3. DIAGNOSTIC POSITIF
4
UFAS Faculté de Médecine 5ème année Pr R. Chermat Rhumatologie : La Polyarthrite Rhumatoïde
- Radiographies:
Normales ou simple ostéoporose en bande métacarpo-phalangienne.
Échographie:
- des mains (MCP, IPP) abord face dorsale
- ou des pieds
L’IRM
- se développe actuellement dans le but de confirmer ou de montrer
précocement:
- l’existence d’une synovite
- l’absence ou présence d’érosions articulaires.
- Biologie:
a-Syndrome inflammatoire non spécifique (VS, CRP), anémie.
b-Facteur rhumatoïde
Le facteur rhumatoïde (FR) est un anticorps, immunoglobuline, de type IgM le
plus souvent, ayant une activité anticorps dirigée contre les immunoglobulines G
humaines ou animales.
Au début de la PR, la recherche de FR est positive (dans 50 à 60 % des cas
environ). La présence d’un taux significatif de facteur rhumatoïde dès le début de la
maladie est un élément de mauvais pronostic. Mais la présence de facteur rhumatoïde
est loin d’être synonyme de PR : le FR n’est ni indispensable ni suffisant pour affirmer
le diagnostic. Sa spécificité est de 75 à 85 % et sa sensibilité de 70 à 80 %.
c-Anticorps antipeptides citrullinés
Les anticorps antipeptides citrullinés (ou anti-CCP) sont des anticorps de développement
récent. Ils sont très intéressants pour le diagnostic précoce des polyarthrites rhumatoïdes.
Lorsque ce dosage est positif, il permet de prédire avec une spécificité supérieure à 95 %
le diagnostic de polyarthrite rhumatoïde mais il peut cependant être retrouvé positif dans
d’autres maladies inflammatoires (par exemple chez 5 % des syndromes de Gougerot-
Sjögren).
5
UFAS Faculté de Médecine 5ème année Pr R. Chermat Rhumatologie : La Polyarthrite Rhumatoïde
d-Autres marqueurs de la P R
- D'autres auto-AC sont reconnus comme de bons marqueurs de PR
-AC antipérinucléaires (APN) : retrouvés 75 à 80% des cas de PR, au cours de certaines
affections inflammatoires et chez moins de 5% de sujets sains.
- Leur dosage n'est pas encore fiabilisé.
-Les anticorps antikératine (AAK): présents dans 50% des patients atteints de PR.
-HLA DR4 reste un élément important du diagnostic
e-Etude du liquide synovial, voire biopsie synoviale plus pour éliminer d’autres
diagnostics.
-Liquide synovial: inflammatoire, riche en protéines et en cellules, surtout
polynucléaires avec taux de complément synovial (C4) abaissé.
Biopsie synoviale: le plus souvent, lésions de synovite subaiguë non spécifique.
Sont évocateurs: l’hyperplasie des villosités et des couches bordantes; la
néovascularisation et l’infiltrat lympho-plasmocytaire formant des nodules périvasculaires.
3.1.5. Critères diagnostiques : des critères ont été établis pour permettre au clinicien
d'asseoir son diagnostic devant un rhumatisme d'allure inflammatoire.
Critères de classification de la polyarthrite rhumatoïde (2009)
Les critères ACR 1987 et les modifications proposées par Liao et al. 2009
Sensibilité 63 % ; spécificité 72 %
Contre 25 et 86 % respectivement pour les critères ACR1987.
6
UFAS Faculté de Médecine 5ème année Pr R. Chermat Rhumatologie : La Polyarthrite Rhumatoïde
7
UFAS Faculté de Médecine 5ème année Pr R. Chermat Rhumatologie : La Polyarthrite Rhumatoïde
Phase tardive :
Articulations métacarpo-phalangiennes (subluxées),
Amyotropie des interosseaux et nodules rhumatoïdes des doigts
Déviation cubitale des doigts
8
UFAS Faculté de Médecine 5ème année Pr R. Chermat Rhumatologie : La Polyarthrite Rhumatoïde
5-Manifestations neurologiques:
- Névrites d'origine ischémique.
- Névrites sensitives distales.
- compression tronculaire (nerf cubital au coude ou nerf médian au poignet).
- compression médullaire due à une luxation atloïdo-axoïdienne (risque
d’aggravation lors d’une mobilisation sous anesthésie générale)
6-Manifestations ophtalmologiques
Syndrome de Gougerot-Sjögren ou syndrome sec: kérato-conjonctivite sèche
(Xérophtalmie) avec impression de sable dans les yeux, liée à un tarissement des
sécrétions lacrymales (mesuré par le test de Schirmer) et salivaires (xérostomie).
Il est dit secondaire lorsqu’il est associé à une autre maladie, souvent la PR. Le
diagnostic se fait sur la biopsie des glandes salivaires accessoires montrant un infiltrat
lymphoïde.
7-Manifestations musculaires
- amyotrophie satellite des arthropathies.
- myosite surtout si syndrome de Gougerot-Sjögren.
8-Amylose
- protéinurie souvent massive avec syndrome néphrotique; insuffisance rénale rapide;
- diagnostic et typage par biopsie rectale, salivaire ou rénale; pronostic réservé mais
intérêt des traitements immunosuppresseurs.
9- Manifestations hématologiques:
- Adénopathies (30 à 70 % des cas);
- Splénomégalie: l’association à une leucopénie responsable de surinfections à
répétition constitue le syndrome de Felty.
9
UFAS Faculté de Médecine 5ème année Pr R. Chermat Rhumatologie : La Polyarthrite Rhumatoïde
Signes biologiques
- Syndrome biologique inflammatoire:
Augmentation de la VS, CRP, alpha-2 et gammaglobulines; hyperplaquettose;
anémie inflammatoire avec taux élevé de ferritine.
Les marqueurs de la P R
Facteur rhumatoïde (FR)
Dans la PR, la sensibilité et la spécificité sont de 80%. Le FR reste absent dans
20% des PR mais peu apparaitre plus tard (30% des cas)
La présence de FR ne suffit pas à confirmer le diagnostic de PR mais sa
présence est un indice de mauvais pronostic
10
UFAS Faculté de Médecine 5ème année Pr R. Chermat Rhumatologie : La Polyarthrite Rhumatoïde
4. DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
Difficile au début, il dépend du mode de présentation de la maladie. L'American
College of Rheumatology (ACR) a proposé des critères de classification de la PR . Ils sont
souvent pris en défaut lorsqu’il s’agit de formes incomplètes ou atypiques. Souvent seule
l’évolution permet de préciser le diagnostic exact. Il est important de revoir le malade et de
n’utiliser à ce stade qu’un traitement symptomatique simple. L’utilisation d’une
corticothérapie à dose forte d’emblée risque de masquer les symptômes, ne permettant plus
de différencier une PR d’une autre maladie cortico-sensible.
4.1 .Mono-arthrite
Dans ce contexte, la première urgence diagnostique est celle de mono-arthrite
infectieuse, notamment tuberculeuse, par étude du liquide synovial, par biopsie de la
synoviale (cytologie, culture). Les maladies inflammatoires ne seront évoquées
qu’ensuite.
4.2. Polyarthrites d'origine infectieuse
- Septicémie, en particulier à streptocoque, staphylocoque ou gonocoque, surtout si
terrain immunodéprimé.
- Infections virales (hépatite B, hépatite C, rubéole, VIH).
4.3. Groupe des spondylarthropathies
- Comprend: arthrites réactionnelles, spondylarthrite ankylosante, rhumatisme
psoriasique, rhumatisme de la maladie de Crohn et de la rectocolite ulcéro-
hémorragique;
- révélées par une arthrite réactionnelle évocatrice si caractère asymétrique, atteinte
axiale et sacro-iliaque, talalgies, prédominance masculine, présence de l'antigène HLA
B27, manifestations extra articulaires (urétrite, iritis, diarrhée, lésions muqueuses
génitales ou buccales) réalisant une forme complète ou non de syndrome oculo-urétro-
synovial de Fiessinger-Leroy-Reiter; après infection à: Chlamydia, mycoplasme,
Yersinia, Shigella, Salmonella.
4.4. Connectivites
Syndrome de Gougerot-Sjögren primitif, en pratique le cadre différentiel le plus
fréquent: avec ses arthralgies migratrices, voire synovites sans érosion articulaire, taux
élevé de facteur rhumatoïde, syndrome sec buccal (xérostomie) et oculaire
(xérophtalmie) mesuré par le test de Schirmer et affirmé par la biopsie des glandes
salivaires accessoires.
Autres connectivites: lupus, connectivite mixte, sclérodermie. Valeur d’orientation de la
recherche des anticorps antinucléaires.
11
UFAS Faculté de Médecine 5ème année Pr R. Chermat Rhumatologie : La Polyarthrite Rhumatoïde
Fig.1 :
12
UFAS Faculté de Médecine 5ème année Pr R. Chermat Rhumatologie : La Polyarthrite Rhumatoïde
• DAS28
• Ce score permet de calculer l'activité de la PR à un instant donné, de
quantifier la réponse thérapeutique et d'introduire la notion de rémission
13
UFAS Faculté de Médecine 5ème année Pr R. Chermat Rhumatologie : La Polyarthrite Rhumatoïde
7. TRAITEMENT
A. Principes généraux
Le traitement de la PR doit être institué aussitôt que possible et comporte quatre grands
volets:
7.2.1. Méthotrexate:
Posologie: 7,5 à 15 mg / semaine en une seule prise per os ou par voie intramusculaire
(plus efficace et mieux tolérée).
Action plus rapide que les autres traitements de fond en 1 mois au lieu de 3 mois.
14
UFAS Faculté de Médecine 5ème année Pr R. Chermat Rhumatologie : La Polyarthrite Rhumatoïde
Contre-indications:
- Hépatopathies chroniques (éthylisme), affections respiratoires, insuffisance rénale.
- Association avec le Bactrim® (agranulocytose).
- Effet tératogène, nécessitant une contraception efficace.
Surveillance: hémogramme complet avec plaquettes, créatinine et transaminases une
fois par mois
Effets secondaires:
- Nausées, stomatite évitées par l'utilisation d'acide folique à faible dose
(Speciafoldine®, 1 cp à 5 mg / j sauf lors de la prise du Méthotrexate).
-Iinfections virales (zona, herpès) ou bactériennes (pneumocystoses).
- Hépatite cytolytique
- Leucopénie, thrombopénie, voire aplasie mécanisme toxique ou allergique;
-Pneumopathies d'hypersensibilité: accident rare mais pouvant être grave toux après
administration, dyspnée et fièvre; syndrome interstitiel clinique et radiologique.
7.2.3. Salazopyrine:
Posologie : progressive, atteignant 4 à 6 cp à 500 mg/j.
Surveillance: hémogramme chaque mois.
Effets secondaires: thrombopénie, leucopénie, éosinophilie, troubles digestifs,
érythème, induction d’anticorps anti-nucléaires.
7.2.4. Immunodépresseurs:
Ciclosporine: 2,5 à 5 mg/kg/J en deux prises à 12 heures d’intervalle.
Une surveillance: très rigoureuse de tension artérielle et fonction rénale.
Azathioprine (Imurel®): 2 cp à 50 mg /j.
Cyclophosphamide (Endoxan®) per os ou plutôt en perfusions mensuelles.
Avec ces médicaments, risque accru d'induction d'hémopathies (lymphomes).
7.2.5. Leflunomide:Arava
Arava : le Leflunomide est un inhibiteur métabolique proche du Méthotrexate.
Administration : Comprimés : dose de charge 100 mg/j/3 jours puis 20 mg/j.
Surveillance : comme Méthotrexate, récautions si désir ultérieur de grossesse.
Effets secondaires : Troubles digestifs, signes cutanés
7.2.6. Biothérapie.
a- Les anti-TNFa :
1- L’infliximab (anticorps monoclonal anti-TNFa chimérique avec un composant
murin : Remicade®) poslogie : 3-5mg/Kg IV : 1ère Semaine-2 ème 3 ème, puis
toutes les 8 semaines pendant une année.
15
UFAS Faculté de Médecine 5ème année Pr R. Chermat Rhumatologie : La Polyarthrite Rhumatoïde
b- Le Rituximab (MabThera®)
Est un anticorps monoclonal qui agit de façon sélective sur les lymphocytes B. Il
représente une nouveauté thérapeutique prometteuse pour le traitement de la
polyarthrite rhumatoïde.
Le rituximab est efficace en première ligne de biothérapie dans la PR naïve d’anti-TNF,
active malgré un traitement par MTX.
Présentation : 500mg/50ml
Posologie : 1 traitement= 2 perfusions IV lentes de 1000 mg à 15 jours d’intervalle
Contre-indications
- Hypersensibilité connue à l’un des composants du produit ou aux protéines murines
- Infections sévères évolutives
- Insuffisance cardiaque sévère (NYHA Classe IV) ou maladie cardiaque sévère non
contrôlée
d -inhibiteurs de kinase
Anti-JAK : nouveau TRT
1-Tofacitinib inhibe JAK1 et JAK3.
- en monothérapie chez des patients atteints de PR naïfs de méthotrexate
- a montré une meilleure efficacité structurale que le méthotrexate
2-Baricitinib : un 2ème anti-JAK inhibiteur de JAK1 et JAK2
16
UFAS Faculté de Médecine 5ème année Pr R. Chermat Rhumatologie : La Polyarthrite Rhumatoïde
• chirurgie tardive:
- arthroplasties de la hanche ou du genou, de l’épaule, du coude, des
métacarpophalangiennes;
- réalignement des avant-pieds avec arthrodèse;
- arthrodèse métacarpo-phalangienne du pouce ou du poignet.
B. Indications du traitement
Eléments communs:
- traitement médicamenteux général avec antalgiques, anti-inflammatoires non
stéroïdiens.
- traitement local: appareillages de repos, infiltrations, synoviorthèses
- réadaptation fonctionnelle.
17
UFAS Faculté de Médecine 5ème année Pr R. Chermat Rhumatologie : La Polyarthrite Rhumatoïde
PR avec signes systémiques: corticothérapie générale per os, à une posologie d'attaque
de 0,25 à 0,50 mg/kg/j, avec réduction progressive lorsque le délai d’action des traitements
de fond sera atteint;
PR active et désir de grossesse: corticoïdes, ciclosporine, Imurel.
18