5-Region Vecteur de DVP Socio-Economi-Converti

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Master « La Décentralisation et la Gouvernance Locale »

Module :
Les Assises Théoriques de la Région en Droit Marocain

Titre de la recherche :
La région, vecTEUR de
développement SOCio-économiQUe
AU Maroc
Réalisé par : Encadrée par :

HANANE EL Dr KBIBCHI YOUNESS


GOURCHALE Chercheur en Sciences
ABDERRAHIM RADI Politiques FSJES Tanger
MILOUD ASTAITE Université
BILAL BRITAL ABDELMALEK ESSAADI
SOFYAN
BENADI

Année universitaire : 2020-2021

1
Plan de la recherche :

Introduction
Première partie : La région au Maroc : Etas des lieux du développement socio-
économique

Titre 1 : Les fondements constitutionnels de la région et le principe de la prééminence


économique

Axe 1 : Les fondements constitutionnels


Axe 2 : Le principe de la prééminence économique de la région

Titre 2 : Disparités socio-spatiales


Axe1 : La réalité du développent socio-économique : Disparités flagrantes
Axe 2 : Les déséquilibres territoriaux

Deuxième partie : La région acteur de développement socio-économique et de


l’aménagement du territoire

Titre 1 : La région acteur de développement économique


Axe 1 : Le développement économique et social
Axe 2 : L’aménagement du territoire
Titre 2 :L’attractivité des régions marocaines dans le cadre de la régionalisation avancée
Axe1 : Attractivité ou compétitivité ?
Axe 2 : les pôles de compétitivité : des leviers pour le développement régional.

Conclusion

2
Résumé
Notre recherche s’articule sur l’importance de la région et sa place prépondérante
dans les nouvelles réformes en matière de décentralisation. Cette position de
prééminence lui permet de jouer des rôles vitaux dans le développement socio-
économique .De cette position la région constitue des champs fertiles pour conduire des
politiques structurantes en matière de développement socio-économique.

3
Abstract

Our research focuses on the importance of the region and its prominent

place in the new decentralization reforms. This position of pre-eminence allows it to

play vital roles in socio-economic development. From this position, the region
Résumé en Anglais
constitutes fertile fields for carrying
: out structuring policies in terms of socio-

economic development.
Abréviations :
AREP:Agence Régionale de l’Exécution des Projets

CESE : Conseil Economique, Social et Environnemental

CCR :Commission Consultative de la Régionalisation

CT :Collectivité territoriale

PAC :Plan d’Action De la Commune

PAS : programme d'ajustement structurel

PDDPP:Programme de Développement de la Préfecture ou de la Province

PDR : Programme de Développement Régional

SRAT : Schéma Régional de L’aménagement du Territoire


Concepts clés :

Décentralisation. Régionalisation. Prééminence. Aménagement


du territoire. Attractivité. Compétitivité territoriale. Disparité.

Key Concepts:

Decentralization. Regionalization. Preeminence. Territory Development.


Attractiveness. Territorial competitiveness. Disparity
Introduction

« L’économie marocaine est restée pendant longtemps tributaire de la


géographie du pays et de l’héritage colonial, qui ont fait d’elle une économie
fragile et incapable de produire de la richesse et de répondre aux exigences
de la société marocaine. »1

Après son indépendance, le Maroc s’est trouvé noyé dans des


problèmes économiques, sociaux et environnementaux graves, qui sont un
résultat naturel de la concentration de la richesse dans l’axe atlantique ou
plus précisément dans la grande métropole de Casablanca ; l’économie
marocaine s’est caractérisée par un déséquilibre, une urbanisation
inachevée , un territoire déséquilibré , un parc logement dégradé et
insalubre à cause de l’exode rural2...

Les gouvernements qui se sont succédés ont pris le défi de la


reconstruction du pays et de son économie .Plusieurs plans ont vu le jour
allant du plan quinquennal pendant la période de 1960 -1964 où l’agriculture
et le secteur industriel ont été des axes principaux, le plan 1968- 1972 qui a
insisté sur la nécessité d’une répartition judicieuse des projets et des
équipements sur le territoire, en 1983 la mise en place du programme
d’ajustement structurel( PAS ) qui a réduit le champs d’intervention de l’Etat
dans les domaines économiques et sociaux, la question de l’aménagement
du territoire a été introduite timidement dans ce plan , c’est une cause qui
s’ajoute à d’autres qui ont contribué à l’échec de la plupart des plans.

Aussi, pendant cette dernière décennie, le Maroc a entamé des projets et


des plans de grande envergure qui touchent à tous les secteurs et les
domaines

1
Jaafari Maria,Revue Organisation et Territoire n°2, 2016,p :5
2
Abdelaziz Adidi, 2011. De l'aménagement du territoire au développement territorial : quelle transition et quelle
articulation ?, 1 ère Conférence Intercontinentale d'Intelligence Territoriale "I.C.I, Gatineau Canada. pp.11,
d’activité mais ils n’ont pas pu atteindre les résultats escomptés, la cause
principale c’est que ces stratégies ont été parachuté du centre vers le local et
n’ont pas parvenus de ce dernier , ils ont été territorialisées et non pas
conçues selon une approche territoriale , donc on déduit que le territoire a
été et restera l’origine du problème du développement socio-économique .

Le Maroc aujourd’hui est devenu conscient de cette réalité, c’est dans


le territoire où réside le problème et dans le territoire où il y a la solution , à
partir de ce temps l’Etat a décidé de faire du territoire le moteur et l’origine
du développement, c’est dans ce cadre que Sa Majesté le Roi Mohammed
VI -dans son discours de 20 Aout 2010 à l'occasion du 57ème anniversaire de
la Révolution du Roi et du Peuple -le grand chantier de la régionalisation
avancée faisant de la région un cadre spatial favorisant un développement
socio-économique équilibré tout en comptant sur ses propres potentialités et
compétences.

En effet, ce nouveau projet à travers les larges pouvoirs qu’il concède au


pouvoir régional, constituera pour celui-ci, à la fois une opportunité pour
prévaloir son savoir-faire en matière d’autogestion et de pilotage d’affaires.

Conscient de l’importance de la région comme échelon déterminant dans


les concrétisations des politiques publiques dans le territoire du pays. Le
Maroc a entrepris des réformes importantes en matière de décentralisation, en
optant pour la régionalisation avancée comme base incontournable
d’organisation du pays, et la région s’est vue dotée d’un positionnement de
prééminence par rapport à d’autres collectives territoriales.

Cela lui a permis d’être un élément principal dans la


promotion du développement socio –économique.

C’est dans ce contexte que s’inscrit notre recherche, il s’agit d’appréhender


le degré de contribution de cet échelon dans le développement de région en
partant de la question suivante : Dans quelle mesure la région constitue-t-elle
un vecteur de développement socio-économique et moyen de réduction des
disparités socio-spatiales ?
Cette problématique est déclinée en deux sous questions :

1) Comment la région, comme étant une collectivité territoriale, peut-t-elle


réduire les disparités existantes ?
2) Comment la région peut-elle attirer et retenir des activités socio-
économiques nouvelles et des facteurs de production de richesses ?

Les hypothèses relatives à notre problématique se présentent comme ce qui suit


:

-Hypothèse1 : Le renforcement du positionnement de la région pourrait lui


permettre de jouer son rôle de locomotive économique ;

-Hypothèse 2 : Le renforcement des mécanismes d’attractivité et de


compétitivité des régions pourrait créer un climat des affaires susceptible
d’instaurer des pôles économiques compétitives.

L’objectif de notre recherche est de déterminer le degré de contribution de la


région, comme étant une collectivité territoriale à place particulière dans les
dernières réformes, dans le développement socio-économique.

Le choix de la thématique de recherche provient d’abord de la place


imminente qu’a réservé la constitution et les lois en vigueur à la région en
tant que pivot de la mise en place des politiques publiques nationales au
niveau territoriale ,et ensuite en tant que moteur de développement socio-
économique de la région .

Et cela prouve la pertinence de cette recherche par rapport au module


« Les assises théoriques de la région en droit marocain » puisqu’il touche des
éléments vitaux dans ce module / : Décentralisation, régionalisation, et cela va
dans le sens de compléter et renforcer nos acquis concernant ce master
DGL en général.

Il est à noter que lors de l’élaboration de ce travail de recherche on a


rencontré des problèmes de choix judicieux des propos convenables en raison
de la pluralité des documents en relation avec le sujet.
On a essayé de traiter ce sujet en recourant à une approche analytique
pour mieux appréhender les intersections existantes entre les éléments mis en
relation : Développent, économie,…

Notre travail essaiera donc d’apporter quelques réponses à cette


problématique, qui ne prétendront en aucun cas être exhaustives, mais
elles formuleront plutôt une modeste interaction de notre groupe de recherche
avec ce débat fructueux du module « des assises théoriques de la
régionalisation au Maroc » en deux parties : nous tenterons –dans la
première - d’appréhender la région au Maroc : Etas des lieux du
développement socio-économique de la région, tandis qu’au la deuxième
partie se penchera sur La région comme acteur de développement socio-
économique et de l’aménagement du territoire. Et en guise de conclusion,
ce travail mettra en exergue ses aboutissements et s’ouvrira sur d’autres
questions qui seront sans doute susceptibles de formuler un ou des sujets
de recherches ultérieurs.
Première partie : Région au Maroc : Etas des lieux du
développement socio-économique

Le processus de décentralisation au Maroc a toujours été au cœur d’un débat à la


fois politique et constitutionnel, qui tendait vers la consécration d’une
régionalisation avancée.

Titre 1 : Les fondements constitutionnels de la région et le principe de la


prééminence « économique »

La décentralisation est devenue un choix inévitable pour un pays comme le


Maroc. La Constitution votée en 2011 a donné une très grande importance à la
consécration d’un tel processus tout en mettant en avant le rôle que peuvent jouer
les régions comme nouveaux territoires de développement économique.

Axe 1 : Les fondements constitutionnels de la région au Maroc.

Selon le premier article de la nouvelle constitution de 2011 «


l'organisation du royaume est décentralisée, elle est fondée sur une
régionalisation avancée »3.Le titre IX comporte 11 articles relatifs aux régions
et aux autres collectivités territoriales.

Il s’avère bien que le rôle que doit jouer la région dans les année à
venir est de grande importance sur tous les niveau, économique , social,
politique, culturel et environnemental. Ce rôle se réalisera à travers
l’approfondissement de la démocratie en redéfinissant la relation entre le
niveau central et les niveaux régionaux et infrarégionaux par une
réorganisation démocratique des

3
Le premier article de la constitution Marocaine de 2011
compétences entre l’État et les régions à travers la consécration des
principes directeurs de la régionalisation avancée selon le modèle marocain à
savoir l’unité nationale et territoriale, l’équilibre, la solidarité et la pratique
démocratique ; le respect des principes de libre administration et de
subsidiarité, le renforcement du processus démocratique à travers l’élection des
conseils régionaux au suffrage
direct et par la participation des collectivités territoriales à l’élaboration de la
politique générale de l’État à travers leurs représentants et à la gestion de
leurs affaires et en favorisant leur contribution au développement intégré et
durable4 .

Aussi la nouvelle constitution construit une assise pour une nouvelle


configuration de l’organisation territoriale du Royaume, favorable à un transfert
substantiel des compétences du centre aux régions, aux formes diverses de
partenariat et de contractualisation entre l’État et les régions, et entre les
collectivités territoriales et au développement de la déconcentration de
l’Etat central5. Elle porte également sur la mise en place d’un Fonds de
péréquation interrégionale et d’un autre Fonds de mise à niveau sociale
des régions6 .

Axe 2 : Le principe de la prééminence économique de la région

« Les fonctions économiques reconnues à la région ont imposé la


reconnaissance à cette CT d’une position de prééminence en la matière par
rapport aux autres CT . La prééminence économique dont bénéficie la région
a pour effet d’assurer une meilleure restructuration de la décentralisation »7 .En
plus
4
Les articles 135, 136 et 137 de la constitution Marocaine de 2011
5
Les articles 139 et 140 de la constitution Marocaine de 2011
6
Les articles 141 et 142 de la constitution
7
Tarik Zair, REGION ET REGIONALISATION AVANCEE AU MAROC, p 62
du fondement constitutionnel de cette position, le régime législatif consacré
depuis 2015 consacré à la régionalisation avancée reproduit le principe de
prééminence et en fait une règle imposable aux autres CT comme pour
l’ensemble des pouvoirs publics. Selon l’article 5 de la loi organique 111-14 «
La région assure un rôle prééminent par rapport aux autres CT » Cela ne
signifie pas l’existence d’une tutelle sur les CT mais, cette vocation de
prééminence ne peut s’exprimer que dans l’exercice de compétences
précises et ne peut s’apprécier d’une manière large.

Imposée comme une règle de détermination des compétences régionales, la


prééminence est inscrite dans le cadre d’un régime juridique particulier qui lui
fixe ses contours .Donc elle n’a pas un caractère général.

La pertinence de la prééminence économique

 La prééminence dans la nouvelle répartition des compétences, Ce


fondement présente l’intérêt d’introduire une grande clarté et une
exigence vitale en matière de décentralisation.
 L’effectivité de la prééminence économique au niveau régional, Il
s’agit d’une nouvelle situation dominée par la volonté de permettre
à cette CT d’intervenir dans des domaines précis avec des décisions
juridiquement imposables aux autres CT.
 Les considérations de l’efficacité dans la position économique de la
région : la position qu’occupe cette dernière dans le schéma
organisationnel adopté par le constituant s’inscrit dans une vision
particulière de l’exercice des responsabilités.
 Les modalités de mise en œuvre de la prééminence économique de la
région ont été délimitées par la constitution dans son article 143, et
l’article 5 de
LO n 111-14 reprend cette délimitation en faisant référence aux domaines
ayant trait à la planification de développement auxquels s’applique cette
règle de la prééminence économique.
 La mise en œuvre de institutionnelle de la prééminence économique
de la région ,il s’agit surtout de la place centrale de l’exécutif régionale
qui exerce des missions de pilotage régional et de conduite pour
l’adoption des documents de référence en matière de planification et
de l’aménagement du territoire .En plus ,les démarches participatives
prônées par la constitution de 2011 et les LO de 2015 relatives aux CT
occupent une place vitale dans le dispositif dédié à la décentralisation
.
Dans le même sens l’intervention des représentants de l’Etat en matière
d’assistance aux présidents des conseils régionaux ne peuvent qu’à
renforcer cette position.
 Les effets sur les CT infrarégionales, la mise en œuvre de la
prééminence économique laisse entendre des rapports particuliers
entre la région et les autre CT. Il en résulte une obligation de ces
dernières de prendre en compte les orientations établies par les PDR et
SRAT. Pour les CT infra- régionales, la prééminence instaure à leur
encontre une obligation d’insérer leurs outils de planification dans les
choix établis au niveau régional (PDP pour les provinces et préfectures,
PAC pour les communes.
Cependant , il semble que ce principe de prééminence et malgré
son importance ne constitue pas toujours un atout pour toutes les
régions du Maroc vu la répartition du territoire et des richesses qui
se veut « injuste ».
Titre 2 : Disparités socio-spatiales

AXE 1 : La réalité du développent socio-économique : disparités flagrantes

Le Maroc, en tant que pays en développement, connaît de fortes


inégalités socio-économiques, évoquant des inégalités entre la ville et la
campagne, entre le centre et la périphérie du pays, des régions et des villes. Ce
qui différencie le cadre de vie des habitants et favorise les migrations
spatiales. L’idée de traiter cette
question se justifie par le constat que le développement des territoires n’est pas
équitable et que l’écart ne cesse de se creuser entre la région centre et celle de
l’atlantique ou de la méditerranée ;il s’agit des régions qui disposent des
richesses naturelles et des ressources humaines et profitent de leur situation
géographique et monopolisent la grande part de l’économie nationale (la région
de Casablanca – Settat et la région de Tanger-Tétouan –Al Hoceima et les
régions périphériques qui souffrent à la fois de l’injustice humaine mais aussi
de la nature ( la région de l’oriental ).

En effet, les analyses montrent une concentration démographique et


socio- économique le long du littoral atlantique et des clivages entre la
région centre et les régions périphériques d’une part, et d’autre part, entre
les régions fortement urbanisées et les régions agricoles. Ces disparités
concernent plusieurs aspects socio-spatiaux à savoir le niveau
d’urbanisation, les taux de chômage et d’analphabétisme, les conditions
d’habitat et le niveau de revenus des ménages.

En termes de statistiques ; La préfecture de Casablanca compte 1


médecin pour 767 habitants, tandis que la province de Sidi Bennour, n’a qu’un
seul médecin pour
5.000 d’habitants !
Même constat pour le tissu économique et social : «3 régions sur 12
produisent 50% des richesses nationales et comptent plus de la moitié des
entreprises industrielles du pays. (…) Béni Mellal-Khénifra a un taux de
pauvreté de 14,4% contre une moyenne nationale de 4,8%»8

Le bilan socio-économique régional dresse le portrait de la dynamique


qu’ont connue les régions selon le nouveau découpage territorial du royaume.
Il en ressort que, en dépit des progrès réalisés, ces dernières n’en ont pas
bénéficié dans les mêmes proportions : les régions qui ont le mieux profité
du développement sont celles où l’investissement dans les qualifications des
capacités humaines était déjà, à la fin des années 1990, le plus important et
où l’urbanisation évoluait à un rythme significatif. Le caractère structurel
des disparités régionales en matière de développement socio-économique et
humain s’est relativement atténué depuis. Ces disparités se réduisent certes,
mais uniquement dans les domaines prioritaires comme la lutte contre la
pauvreté absolue et l’accès aux équipements sociaux et à la scolarisation de
base.

L’analyse des disparités régionales montre à quel point l’importance de la


prise en compte de la variable spatiale est fondamentale dans la mise en
œuvre des politiques publiques. Ni la nature des déficits socio-économiques ni la
vitesse de leur réduction ne sont uniformes au niveau régional. Cela
montre clairement la nécessité d’une politique de développement localement
repensée et centrée sur une redéfinition des besoins humains, économiques
et sociaux. 9

8
Par Finances News, Mercredi 01 Aout 2018
9 Le développement socio-économique régional ,Niveau et disparités, Oct 2018, Haut Commissariat au Plan
 Des inégalités territoriales inquiétantes

L'existence des inégalités territoriales est une réalité inquiétante au Maroc. C'est le
constat du CESE qui souligne que malgré les efforts accomplis par les pouvoirs publics, le
phénomène des inégalités demeure encore frappant et persistant ayant pour conséquence le
prolongement du déséquilibre qui a marqué le développement régional du Maroc195. En
termes d’inégalités territoriales, les espaces ruraux sont souvent les plus affectés et la
pauvreté tend à devenir un phénomène qui caractérise le milieu rural.

 Les disparités régionales accentuées

Pour Ali SEDJARI « deux raisons pratiques et urgentes qui ont précipité
l'élaboration d'une politique de régionalisation »10.
L'auteur avait évoqué une certaine inégalité quant aux politiques de
développement de l’Etat marocain qui ont failli dépasser l’inégal morcellement et
bannir la cruelle séparation entre le "Maroc utile" et le "Maroc abandonné" ou le
"Maroc inutile" hérités de l'époque du protectorat. Au delà de l'inégale répartition des
villes et de la trame urbaine et la forte concentration de l’activité, évoquées plus haut,
ceci avait pour conséquence le creusement des inégalités entre les différentes régions.
Les travaux concernant le développement humains ont bien mis en exergue les deux
espaces qui structurent le territoire national faisant apparaitre une configuration du
type centre-périphérie.

 La pauvreté en milieu rural: un phénomène qui persiste

Au Maroc, la question des inégalités territoriales n'est pas seulement une


simple disparité entre les différentes régions. C'est au sein même des
régions que ce phénomène est posé avec une grande acuité. La dichotomie
entre l'espace rural et l'espace rural est bien présente. Elle met en avant la
persistance du phénomène de la pauvreté qui touche de plus en plus les
populations rurales.

10SEDJARI A. (1981) "Structures administratives territoriales et développement local au


Maroc", Faculté des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales de Rabat (p. 163).
Le monde rural, qui abrite en 2014 plus de 13,5 millions d'habitants soit 40%
de la population totale. est connu par la persistance de la pauvreté et de la
précarité puisque 79,4% des personnes pauvres et 64% des personnes
vulnérables y vivent encore selon le CESE11

AXE 2 : Les déséquilibres territoriaux

Avec l’évolution de l’urbanisation, le Maroc est appelé à faire face au


phénomène des inégalités spatiales dont la répartition de l’armature urbaine et
la forte concentration de la population autour de la métropole casablancaise
constituent les deux facettes les plus visibles

Casablanca, représente 12% de la population marocaine et 25% de la


population urbaine, mais également, 29,5% des emplois du pays et 17,1% des
établissements économiques du pays. Les efforts considérables de la part de l’Etat,
depuis l’indépendance, ont permis la montée de nouveaux pôles régionaux.

Cependant, l’organisation spatiale est loin d’être équilibrée et la domination


de Casablanca et sa région n’a jamais cessé de se confirmer. D'où
l'accentuation des inégalités territoriales12

 L’inégale répartition spatiale de l’armature urbaine

L’accroissement de la population et du nombre de villes et de centres urbains


demeure sans doute parmi les phénomènes qui ont marqué l’espace géographique

11
Rapport du CESE (2017) " Développement du monde rural : défis et perspectives" Auto-saisine
n°29/2017... (p. 17).
12
Lhassan Badri ,La décentralisation au Maroc : quelles perspectives pour la gouvernance locale et le développement
territorial ? :(Cas de la régionalisation avancée) ,thése de doctorat, Université Grenoble, Alpes, 2019. P59
marocain durant la seconde moitié du XX° siècle. A l’instar des pays en
développement, le Royaume connaît un processus d’urbanisation rapide.
La question d’urbanisme au Maroc soulève deux remarques
essentielles.

Ce phénomène d’urbanisation connu par le Royaume est étroitement lié


à l’évolution démographique depuis l’indépendance.

L’ampleur des mouvements migratoires des campagnes vers les villes,


ajoutée à celle de l’accroissement naturel assez fort de ces espaces et le
maintien d'une structure agraire traditionnelle a engendré une poussée
démographique urbaine sans précédent avec des conséquences non
négligeables particulièrement en matière de gestion urbaine.

 La forte concentration de l’activité

Outre l’inégale répartition de l’armature urbaine dans un pays de plus en


plus urbanisé, la forte concentration de l’activité autour de la métropole de
Casablanca demeure la principale facette des déséquilibres de l’espace au
Maroc. Plusieurs facteurs d’agglomération expliquent la distinction de
Casablanca comme première région urbaine et poumon économique du pays

La ville de Casablanca bénéficie d’avantages naturels et humains


qu’elle a su mettre à profit afin de se maintenir à la tête des grandes
métropoles maghrébines. Comparativement aux autres villes de la côte
atlantique, Casablanca a un net avantage : les terrains y sont peu
accidentés, les plaines intérieures (Chaouia, Doukala) à fort potentiel
agricole et industriel, la proximité des gisements de phosphate sont des
avantages naturels qui ont joué en faveur de Casablanca
Malgré des efforts considérables au fil des années, et notamment
depuis le début des années 1990 et après la période d’ajustement structurel,
le Maroc n’a pas pu résorber les inégalités territoriales et sociales ainsi que la
pauvreté. C’est le grand enjeu pour le Royaume qui doit chercher à résorber
les déficits socio- économiques et chercher un certain équilibre entre les
différentes composantes du territoire national tout en mettant les collectivités
territoriales au cœur de l’action publique
Deuxième partie : La région comme acteur de développement socio-
économique et de l’aménagement du territoire

Avec ces dernières réformes, la région s’est vue attribuer les grandes
orientations en matière de développement économique .Et sa fonction dans le
domaine de l’aménagement du territoire est renforcée.

Titre 1 : La région comme acteur de développement économique


Axe 1 : Le développement économique et social
Aujourd’hui la région constitue les champs fertiles pour conduire des
politiques structurantes en matière de développement socio-économique. Il
s’agit d’un échelon intermédiaire entre l’Etat central et les autres
collectivités territoriales et notamment les communes perçues comme
collectivités de proximité. En matière de développement régionale , la loi
111- 14 relative à la région prévoit des compétences propres13 qui portent
principalement sur le
développement économique à travers l’amélioration de l’attractivité de l’espace
régional et le renforcement de sa compétitivité économique .En plus ,ces
compétences concernent le domaine de l formation professionnelle et la gestion
des ressources humaines , le développement rural , le transport , le tourisme
ainsi que la promotion de la coopération internationale .

Cette loi prévoit également des compétences partagées entre l’Etat et


la région. Il s’agit notamment des compétences dont l’exercice s’avère
efficace si
elles sont partagées. Elles concernent principalement, le développement
durable, l’emploi et la recherche scientifique, la protection de l’environnement
ainsi que la mise à niveau du monde rural. La loi prévoit également des
compétences
13
Article 82 de la Loi organique 111-14
transférées dans l’objectif d’élargir les compétences propres. Celles-ci concernent
essentiellement tous les équipements et infrastructures à caractère régional.

Le conseil régional est tenu de mettre en place, sous la supervision de son


président et pour une durée de 6 ans, son programme de développement régional
n(PDR) lors de la première année du mandat. Il œuvre également à son suivi, son
actualisation et son évaluation.

Afin d’assurer une cohérence en matière d’intervention publique,


l’élaboration des PDR nécessite la mise en avant de la démarche participative et la
coordination avec le wali de région qui a en charge la coordination des services
déconcentrés de l’administration centrale. Le PDR est également tenu de « suivre
les orientations stratégiques de la politique de l’Etat, et veiller à leur déclinaison au
niveau régional et prendre en considération l’intégration des orientations du
schéma régional d’aménagement du territoire (SRAT) et les engagements
convenus entre la région et les autres collectivités territoriales, leurs instances,
ainsi que les entreprises publiques et les secteurs économiques et sociaux dans
la région »14.

S’agissant de la région, le volet économique et la planification du


développement a toujours été présent depuis la création de cette institution.
« Pourtant, cette réaffirmation du rôle de la région dans le cadre de la
réforme actuelle mérite d’être mise en avant. La prééminence constitutionnelle
de la région ainsi que la consécration de la libre administration et du suffrage
universel direct, en passant par le renforcement du pouvoir exécutif régional
et l'adoption d'une nouvelle carte régionale sont des éléments nouveaux de
nature à faire de la région un réel acteur de développement économique »15 .

14
Article 83 de la loi 111-14.
15
Lhassan Badri ,La décentralisation au Maroc : quelles perspectives pour la gouvernance locale et le développement
territorial ? :(Cas de la régionalisation avancée) ,thése de doctorat, Université Grenoble, Alpes, 2019. P : 152
Considérée comme un domaine fécond pour le développement économique, la
région a été au centre des préoccupations des pouvoirs publics à travers
l’élaboration des plans régionaux et locaux. Ces plans visent la mise en relief
d’un projet de développement régional cohérent et ce, par le biais de la
définition d’une vision prospective globale et la recherche de la coordination
nécessaire entre les programmes de développement, notamment les
équipements qui ont un caractère local, initiés dans chaque région, en vue de
consolider leurs effets conjugués.

Ainsi a été introduite la dimension spatiale dans la stratégie de


développement nationale. Les retombées d’une telle démarche ont été
ressenties à travers l’émergence d’un certain nombre de centres et de
métropoles dans les différentes régions du Royaume qui sont devenus des
foyers de rayonnement et de promotion de l’activité économique, sociale et
culturelle, grâce aux équipements de base, aux zones industrielles et
économiques et au tissu industriel, commercial et de services existants16.

Axe 2 : L’aménagement du territoire

Au Maroc, la question de l’aménagement du territoire est globalement


une affaire de l’Etat central. La mise en place des infrastructures et
l’équipement du territoire national relèvent du champ de la planification
centralisée du développement du pays. Rappelons que la première
tentative en matière de régionalisation avait pour résultat la création de 7
régions en 1971 dans l’objectif de donner une dimension régionale à la
planification et à l’aménagement du territoire. Depuis que la région est érigée
en collectivité locale et la promulgation
16
Direction des Études et des Prévisions Financières, le développement régional p : 28
de la première loi organique relative à l’organisation de la collectivité régionale on
assiste à un transfert de compétences aux collectivités locales en matière
d’aménagement du territoire. Cette compétence est principalement
conservée pour le conseil régional.
Ainsi, et à titre de compétence propre, il incombe à celui-ci
l’élaboration du schéma régional d’aménagement du territoire et ce
conformément aux orientations et aux objectifs retenus au niveau
national et le soumettre à l’approbation du comité interministériel
d’aménagement du territoire17.
Outre cette compétence propre, le conseil régional donne son avis sur les
politiques d’aménagement du territoire national. Cette compétence consultative
est également reconnue pour les conseils préfectoraux et provinciaux ainsi que
pour les conseils communaux. Ces derniers sont tenus également de veiller au
respect des options et des prescriptions des plans et de tous autres documents
d’aménagement du territoire18.
Le débat sur l’aménagement du territoire au Maroc n’a été relancé que
récemment, et notamment au début des années 2000, avec l’adoption de la
charte nationale d’aménagement du territoire et du développement durable.
Celle-ci traduit les objectifs et les orientations en la matière. Elle est
considérée comme « un cadre référentiel pour l’établissement d’une législation
de l’aménagement du territoire, la création des structures et des mécanismes
de coordination devant assurer sa gestion, la réalisation de documents
d’orientation d’aménagement du territoire pour les niveaux national, régional et
local ainsi que pour l’identification des modes d’interventions et des projets de
développement les plus adéquats »19. Cette charte reflète une volonté de
modernisation des politiques publiques en matière d’aménagement du

territoire. Sa mise en œuvre et sa concrétisation est


17
Article 7 (al. 4) de la loi n° 47-96 relative à l’organisation de la région.

18
Article 38 de la Charte communale 78-00
19
Charte Nationale de l’aménagement et de Développement Durable ,p 66
assurée par la mise en place du schéma national d’aménagement du
territoire (SNAT) et les schémas régionaux d’aménagement du territoire
(SRAT). « Malgré
cette évolution, la question d’aménagement du territoire constitue l’un des
grands absents de l’action des collectivités locales. Ceci serait dû notamment
au manque de moyens des collectivités régionales, à la forte présence de
l’Etat au niveau régional et à la multitude des acteurs publics »20.
Etant donné l’importance de l’aménagement du territoire comme « une
action collective et volontaire qui vise à organiser de manière harmonieuse la
répartition des populations, des activités et des infrastructures dans l’espace et
dans le temps »21, l’aménagement du territoire constitue un grand défi pour
le Maroc.
Nous avons évoqué plus haut le problème lié à la forte concentration
des activités et de la population dans une partie du territoire autour de l’axe
atlantique allant de Kenitra et El Jadida. Un territoire qui s’étale désormais sur
deux grandes régions après la mise en place du nouveau découpage
régional en 2015.
Face à ce constat et vu la persistance des inégalités territoriales, la
question de l’aménagement du territoire demeure le principal axe de la
décentralisation marocaine et la réussite de la régionalisation en dépend
fortement. C’est ainsi que la nouvelle réforme donne une importance
particulière aux collectivités territoriales et notamment à la collectivité
régionale dans la mesure où
l’aménagement est désormais considéré comme une compétence propre
attribuée exclusivement au conseil régional. Conformément aux orientations du
Schéma National de l’Aménagement du Territoire (SNAT), les régions sont
appelées à devenir des échelons importants en matière d’aménagement et sont

25
amenées à
élaborer leurs propres documents d’aménagement. En matière de compétences
20
Lhassan Badri ,La décentralisation au Maroc : quelles perspectives pour la gouvernance locale et le développement
territorial ? :(Cas de la régionalisation avancée) ,thése de doctorat, Université Grenoble, Alpes, 2019. P : 152
21
DESJARDINS X. (2017) « L’aménagement du territoire », Armand Colin. (p. 13).

26
propres de la région, le nouveau texte relatif à la collectivité régionale,
contrairement à l’ancien, conserve une place importante, pour l’aménagement du
territoire.
Ainsi, il incombe désormais au conseil régional de mettre en place
son schéma régional d’aménagement du territoire conformément aux
orientations nationales et en concertation avec les autres collectivités
territoriales, les
administrations, les établissements publics ainsi que les représentants du
secteur privé concernés par le territoire de la région. Loin d’être une simple
déconcentration du schéma national, les SRAT ont pour finalité de traiter
les problèmes qui relèvent de la compétence régionale, notamment en
matière de développement local. Il s’agit d’un « document de référence pour
l’aménagement de l’espace de l’ensemble du territoire de la région »22 et qui
expriment (les SRAT) les politiques régionales dans les différents domaines.
Aux termes de la nouvelle loi organique « le schéma d’aménagement du
territoire vise particulièrement à parvenir à une entente entre l’Etat et la
région sur les mesures d’aménagement de l’espace et de sa mise en valeur,
selon une vision stratégique et prospective, de manière à permettre de
définir les orientations et les choix du développement régional »23. A ce titre,
le SRAT, vise la mise en place d’un cadre général de développement
régional à la fois durable et cohérent dans les espaces aussi bien urbains
que ruraux. Il fixe les choix des équipements et infrastructures qui
structurent l’espace régional24.
L’attribution de l’aménagement du territoire, à travers les SRAT, est
indissociable du nouveau rôle de la collectivité régionale en matière de
développement en général. La mise en œuvre de ces attributions, si importantes,

22
Article 88 de la loi 111-14
23
Article 89 de la loi 111-14

26
24
Conformément à l’article cité ci-dessus, le décret n°2-17-583 du 28/09/2017 fixe la procédure d’élaboration,
d’actualisation et d’évaluation des SRAT. (B.O. n° 6618 du 02/11/2017,

26
n’est pas à négliger. Ainsi, certains dispositifs apportés par la nouvelle
réforme méritent d’être évoqués.
La nouvelle conception de la décentralisation au Maroc a pour objectif
de faire de l’échelon régional une sorte d’interface entre l’Etat et les
autres collectivités territoriales. Ainsi, les attributions en matière de
développement
économique et de l’aménagement du territoire mettent en avant la planification
régionale à travers la mise en place de PDR et des SRAT.
La mise en œuvre des compétences régionales occupe une place centrale
dans la régionalisation avancée. Des agences régionales d’exécution des projets
(ou AREP) nouvellement créées dans le cadre de la nouvelle réforme25. Les
AREP ont pour missions 26 l’exécution des projets et programmes de
développement adoptés par le conseil régional. Elles apportent aux conseils
régionaux toute forme d’assistance juridique et d’ingénierie technico-financière
nécessaires à l’étude et à l’élaboration des projets et programmes de
développement. Elles peuvent également se charger de la gestion des
projets pour le compte de la région.
Toutefois, Il est important de souligner que les AREP sont créées au sein de
chaque région. Elles remplacent désormais les agences de développement des
préfectures et provinces déjà existantes qui sont en cours de liquidation27.
Outre la création des AREP dont le rôle reste très important, les
principaux dispositifs évoqués ici demeurent insuffisants pour garantir une
meilleure mise en œuvre des compétences régionales. « Le défi majeur pour les
conseils régionaux réside dans leur capacité à assumer pleinement leur rôle de
locomotive en matière de développement. Malgré une volonté affichée pour
une meilleure clarification des compétences des collectivités territoriales en
vue d’une spécialisation pour

25
Articles 128 à 144 de la loi 111-14.
27
26
Article 130 de la loi 111-14
27
Trois agences sont concernées : L’agence de développement des provinces du Sud, du Nord et del’Oriental.

28
chaque catégorie de collectivités, les régions devraient surmonter un nouveau
défi
: agir en complémentarité avec les autres collectivités de leurs territoires » 28.

Titre 2 :L’attractivité des régions marocaines dans le cadre de la


régionalisation avancée
La région marocaine d’aujourd’hui doit, à la une du projet de la
régionalisation avancée, aspirer à devenir la locomotive du développement
économique et social du pays et le vecteur mobilisateur de son propre potentiel
et des énergies de ses composantes. Par conséquent, pour assurer le
développement économique et social qui lui incombe désormais, chaque région
doit s’évertuer à augmenter sa compétitivité »29 et pouvoir attirer et retenir
des activités
économiques nouvelles et des facteurs de production, c’est-à-dire des
entreprises et leurs emplois, mais aussi des populations et leurs revenus,
qu’il s’agisse de résidents permanents ou de touristes. Or cette course des
régions marocaines vers l’amélioration de leur attractivité ne part par sur des
bases égales, illustré par la fameuse expression « le Maroc utile », dans la
mesure où historiquement le territoire marocain se caractérise par une forte
disparité régionale.30

Axe 1 : Attractivité ou compétitivité ?

Ces deux notions sont parfois confondues car au sens large elles se
rapportent toutes les deux à la performance économique. Toutefois, comme l’ont
bien montré
C. Rousseau et B. Mulkay (2006), il est nécessaire de les distinguer surtout si
l’on
28
Lhassan Badri ,La décentralisation au Maroc : quelles perspectives pour la gouvernance locale et le développement
territorial ? :(Cas de la régionalisation avancée) ,thése de doctorat, Université Grenoble, Alpes, 2019. P : 152
29
Rappelons au passage que la nation de compétitivité et d’attractivité sont très souvent confondus ,alors que la
première s applique à l’entreprise ,et la deuxième s’applique aux territoires.
30
Revue organisations et territoire n1 ,2015.
souhaite pouvoir en donner une mesure. « L’attractivité d’un territoire peut
être définie comme la capacité à attirer sur ce territoire les activités
nouvelles et les facteurs de production mobiles (capitaux, équipements,
entreprises, travailleurs qualifiés). Mais l’attractivité ne peut se limiter à cet
aspect offensif ; elle a aussi une dimension défensive via la capacité à
retenir les entreprises existantes. Le principal indicateur de l’attractivité est
la création d’entreprises nouvelles ou la création d’établissements par des
entreprises existantes ; on peut aussi utiliser les créations d’emplois dans les
nouveaux établissements et les variations d’emploi positives dans les
entreprises existantes »31
La compétitivité est une notion plus complexe qui concerne à l’origine les
entreprises et qui s’applique, par extension, aux nations ou régions. Pour
une entreprise, la compétitivité désigne avant tout sa capacité à faire
face à la
concurrence étrangère. Pour un pays ou une région, il ne peut en être de
même car, comme le dit bien P. Krugman (1994), seule une augmentation
de la productivité permet d’accroître la richesse d’une nation ; c’est donc la
seule
mesure pertinente de la performance économique d’un territoire. La définition
de la compétitivité territoriale a ainsi évolué d’une notion centrée sur les
échanges
extérieurs à un objectif d’amélioration du niveau de vie et du bien-être
social »32 . Mais comment rendre compte de tous ces champs de la
politique économique ? L’observatoire européen LEADER (Farrell G. et al.
1999) a tenté d’apporter une réponse à cette question. « Partant du principe
qu’un territoire devient compétitif s’il peut affronter la concurrence du
marché tout en assurant une durabilité environnementale, économique,
sociale et culturelle fondée sur des logiques de réseaux et d’articulation
interterritoriale, il propose d’approcher la compétitivité par quatre
dimensions : - une dimension économique via la mise en valeur des
atouts spécifiques du territoire et la maximisation de la valeur ajoutée locale ; -
une
31
Bernadette Mérenne-Schoumaker est géographe et professeur ordinaire à l’Université de Liège.
32
CAMAGNI R. (2005). Attractivité et compétitivité : un binôme à repenser. Territoires 2030. 1, 11-15
dimension environnementale via la mise en valeur d’un environnement considéré
comme spécifique tout en assurant la préservation et le renouvellement des
ressources naturelles et patrimoniales ; - une dimension sociale via une
conception partagée des projets et une concertation entre les différents
niveaux institutionnels ; - une dimension de positionnement dans le contexte
global via la capacité des acteurs à trouver leur place par rapport aux autres
territoires. »33

Axe 2 : les pôles de compétitivité : des leviers pour le développement régional.

La régionalisation avancée a pour but ultime la promotion d'un


développement économique et social intégré. « C'est ainsi que la CCR insiste
sur la nécessité de doter les régions, comme acteurs majeurs dans le
processus de la contractualisation »34, « d'instances de concertation qui
devraient constituer la base des partenariats public-privé efficaces » 35.
Ainsi, en matière de développement économique, et dans le cadre de la
contractualisation, les principales compétences partagées 36entre les Conseils
régionaux et l'Etat sont liées à l'amélioration de l'attractivité des espaces
territoriaux et le renforcement de la compétitivité, le développement durable,
l'emploi et la recherche scientifique appliquée.

En matière de compétences propres 37, les régions ont également pour mission
l'appui au développement économique à travers le soutien aux entreprises, la

33
CAMAGNI R., MAILLAT D. (2006). Milieux innovateurs. Théories et politiques, Economica Anthropos, Paris
34
La contractualisation devrait être prise au sens large du terme. Au-delà des contrats Etatrégions, les régions
ne doivent pas négliger la contractualisation avec les autres instances infrarégionales, et en particulier, les
collectivités territoriales. Il s’agit d’un élément central pour la mise en œuvre de la démarche territoriale. La
contractualisation pourrait être un moyen efficace pour limiter les enchevêtrements des compétences
insuffisamment clarifiés malgré le recours au mécanisme des blocs de compétences.
35
Rapport CCR/ Livre II, Opt. Cit. (p. 119).
36
Article 91 de la loi 111-14.
37
Articles 80 à 82 de la loi 111-14.
réalisation et l'organisation des zones d'activités économiques dans la région
ainsi que toutes initiatives ayant pour objet l'attraction des investissements
ainsi que la formation professionnelle, la formation continue, l’emploi.

La région peut également à titre de « compétences transférées »38,


et conformément au principe de subsidiarité, se charger de mettre en
place des infrastructures à dimension régionale. Le rôle de la planification
stratégique
régionale est d’une grande importance en matière de l’attractivité des régions.

Ainsi, le PDR, comme document de référence qui sert à la programmation


des projets et des actions concernant le territoire de la région, est conçu
pour « promouvoir le développement intégré et durable intéressant, en
particulier, l’amélioration de l’attractivité de l’espace territorial de la région et
le renforcement de sa compétitivité économique »39.

Dans ce cadre, les pôles de compétitivité, offrent la meilleure opportunité


pour la déclinaison de la politique de développement économique au niveau
régional.
Pour Claude COURLET 40 « un pôle d compétitivité peut se définir comme
la combinaison sur un territoire donné d'entreprises, de centres de
formation professionnelle, d'établissements d'enseignement supérieur et de
recherche engagés dans une démarche partenariale destinée à dégager des
synergies autour de projets communs à caractère innovant et disposant de
masses critiques nécessaires pour une visibilité internationale ».

38
Article 94 de la loi 111-14.
39
Décret n°2-16-299 (du 29 juin 2016) fixant la procédure d’élaboration du programme de développement
de la région, de son suivi, de son actualisation, de son évaluation et des mécanismes de dialogue et de
concertation pour son élaboration. B.O. n°6562 du 20/04/2017 (p. 392).
40
COURLET C. (2008), Opt. Cit. p. 101.
Ce sont ces synergies qui permettent aux entreprises et à tous ces
acteurs d'avoir une meilleure visibilité autant sur le plan national
qu'international et qui leur permet d'améliorer leur compétitivité41.

Aujourd’hui, la mise en relation des acteurs de l’innovation et la diffusion


des connaissances jouent un rôle important pour le développement économique.
C’est cette possibilité qu’offrent les pôles de compétitivité.

Pour le Comité Interministériel d’Aménagement et de Développement du


Territoire en France (CIADT) 42, il s’agit du rapprochement des acteurs industriels,
scientifiques et de formation d’un même territoire qui constitue une source
d’innovation dans la mesure où la proximité permet de stimuler la circulation des
informations et des compétences et permet la naissance de projets plus innovants.

Pour Joëlle FOREST, l’idée sous-jacente des pôles de compétitivité est « de


faire appel au patrimoine cognitif construit localement et d’institutionnaliser
les relations souvent informelles dans le but de faire émerger une
dynamique collective43.

Dans ce sens au-delà du PDR, la CCR appelle à promouvoir le


partenariat stratégique régional public privé. L’objectif pour la Commission est
de « favoriser l'émergence et l'intégration des réseaux et de groupes
d'entreprises, en encourageant toutes les formes d'échanges d'informations,
d'adoption de normes collectives, ou de programmes communs, ainsi qu'en
facilitant l'acquisition et la diffusion des connaissances44.

41
OUHEJJOU O. et SOSSI ALAOUI F-Z (2013) « Les pôles de compétitivité à l'ère de l'économie de la
connaissance: une nouvelle perspective de développement économique au Maroc", Economics and
Management of Networks Conférence, Agadir du 21 au 23 novembre 2013.
42
CIADT, 2007, Les pôles de compétitivité, http ://competitivite.gouv.f
43
FOREST J. « La production de connaissance à l’ère des pôles de compétitivité », Innovations 2010/ (n°32), pp.
129- 146 (p. 129).
44
Rapport CCR/ Livre II, Opt. Cit. (p. 119).
C’est d’ailleurs dans ce cadre que s’inscrit la réduction du nombre des
régions en faveur de l’élargissement de leurs tailles. Dans le contexte de
compétition économique internationale, la Commission estime que le Maroc
aurait tout intérêt à éviter le maintien ou la démultiplication des régions à
faible capacité
économique. C’est l’efficience qui est mise en avant. Autrement dit, c’est la
capacité des régions pour l’attractivité des investissements directs étrangers
sur leurs territoires qui est soulevée »45.

Les nouvelles régions sont appelées à « jouer le rôle d'appui direct au


secteur privé, d'analyse et de veille économique, et d'animation d'un espace
de concertation entre les représentants des autorités publiques, du secteur
privé et de la société civile 46. A cet effet, les régions doivent être dotées
d'instances de concertation non seulement pour réaliser et partager les
diagnostics des territoires qui constitueront la base des partenariats public-privé
efficaces, mais aussi pour favoriser l'émergence et l'intégration des réseaux et
de groupes d'entreprises, en encourageant toutes les formes d'échanges
d'informations, d'adoption de normes collectives, ou de programmes
communs, ainsi qu'en facilitant l'acquisition et la diffusion des connaissances
47
. La compétitivité est devenue un élément clé de la régionalisation.

En termes d’attractivité des régions marocaines, l’analyse statistique a révélé,


excepté la région du Grand-Casablanca et la région de Rabat-Salé-Azemmour-Zaïre,
un déficit dans la plupart des régions, ce manque d’attractivité aggravé par
un déséquilibre entre régions sont en déphasage avec les objectifs assignés
par le projet de la régionalisation avancée aux régions qui se trouvent
handicapées, pour

45
Rapport CCR/ Livre II ,Opt.Cit.(p.157).
46
Thèse Lhassan Badri.
47
Rapport CCR// Livre II ,(page.119).
pouvoir remplir les missions d’acteur de développement intégré et durable sur
les plans économique, social, culturel et environnemental des territoires.

Il incombe donc d’accélérer le rattrapage du retard en matière


d’infrastructures et d’équipements qui constitue une condition sine qua non
pour désenclaver les nombreuses régions sinistrées et accroître leur attractivité
et leur capacités à maintenir leurs populations, de repenser l’architecture et le
découpage des régions de façon à constituer chaque région autour de villes
métropoles pour améliorer leur attractivité et concentrer les efforts en matière
de construction d’infrastructures (transports, services publics),

Enfin une dernière mesure, pourrait être décisive, dans l’effort d’accroître
l’attractivité des régions, consiste à instaurer une fiscalité différentielle à titre
temporaire et sélective en faveur des régions en manque d’attractivité pour leur
donner plus de chances de drainer les investissements aussi bien des
marocains
que des étrangers. Par ailleurs, dans cette perspective de bonifier l’attractivité
des régions marocaines, suppose également l’adhésion et l’engagement de la
part de toutes les composantes de la population locale (citoyens, entreprises,
autorités locales, société civile) à participer à cette belle aventure et s’évertuer à
sa réussite.
Car à travers le monde, nombreuses expériences ont démontré que le
développement local d’un territoire est une stratégie d'organisation de ses
propres conditions de développement. il faut reconnaitre la pertinence des
actions locales pour la réalisation d'objectifs macroéconomiques nationales.
48
48
Revue organisation et territoire n1,2015.
Conclusion

En guise de conclusion, et en tenant compte de la place attribuée par


le législateur (la constitution et les lois en vigueur) à la région dans
l’organisation territoriale du Maroc ,et en rappelant les compétences qui lui
sont dévolues par la loi organique 111.14 et les textes d’application faisant
de cette CT le catalyseur du développement socio-économique et l’acteur
principal de la mise en place des politiques publiques de l’Etat au niveau
régional .

Aussi, un renforcement des mécanismes d’attractivité de la région va dans


le sens de consolider ce positionnement et réduire des inégalités socio-
spatiales.

Actuellement, La politique régionale entre dans un nouveau stade de


maturité avec les nouveaux enjeux politiques, économiques et sociaux. Elle
tend à créer une entité forte, distincte et autonome, Elle ne se limite pas aux
corrections des inégalités et disparités territoriales, mais elle agit en tant
qu’acteur de développement socio-économique de son territoire »49

Et malgré les progrès constatés au niveau du processus de


décentralisation grâce aux efforts déployés aussi bien par les autorités
publiques que par le reste des acteurs , il est à signaler que la région en tant
qu’entité territoriale présupposée jouir des principes constitutionnels
( prééminence et libre administration ) demeure loin de jouer son rôle aussi
bien politique ( Représentation des habitants de la région via les élections et la
participation à la gestion des affaires publiques )qu’ économique ;un objectif
qui ne peut être
atteint que par la mise en place d’un ensemble de procédures et de mécanismes
encourageants tels :

 Des mesures financières et fiscales incitatives


 La baisse du taux d’intérêt des crédits accordés par le fond
d’équipement des communes (FEC ) qui atteint en moyenne 5 %
HT (cas de la CT de Larache pour 12 000 000 DH sur 15 ans la
CT paiera plus de 5 500 000 DH d’intérêt) ;
49
Laila El Karamech,Répartition des compétences entre l’Etat et les CT : Conflits ou bonne gouvernance ?REMALD ,N
132/2020 P : 491
 Renforcement de la coopération CT et privé par une législation souple et
des motivations susceptible de relancer le développement socio-
économique ;
 Alléger le poids du contrôle administratif ;
 Doter les régions par des ressources humaines hautement qualifiées
et encourager la mobilité entre les CT et en se basant sur la
formation continue ;
 Repenser la division administrative et géographique actuelle des régions
en remédiant aux disparités socio-économiques d’abord et puis
spatiales ;
 Repenser les critères de candidature (niveau d’étude, appartenance à la
région …) et le mode de suffrage du président de la région de
manière qu’il soit direct et à base d’un programme politique et
économique ;
BIBLIOGRAPHIE
 Abdelaziz Adidi, 2011. De l'aménagement du territoire au développement territorial : quelle
transition et quelle articulation ?, 1 ère Conférence Intercontinentale d'Intelligence Territoriale "I.C.I,
Gatineau Canada
 Ayoub Lahrache, LE MATIN 03 juillet 2019
 Tarik Zair,REGION ET REGIONALISATION AVANCEE AU MAROC

 Lhassan Badri ,La décentralisation au Maroc : quelles perspectives pour la gouvernance locale et le développement territorial ? :(Cas de
la régionalisation avancée) ,thése de doctorat, Université Grenoble, Alpes, 2019.

 le décret n°2-17-583 du 28/09/2017 fixe la procédure d’élaboration, d’actualisation et d’évaluation des SRAT. (B.O. n° 6618
du 02/11/2017,

 Charte Nationale de l’aménagement et de Développement Durable ,


 DESJARDINS X. (2017) « L’aménagement du territoire », Armand Colin. .
 la loi n° 47-96 relative à l’organisation de la région.

 la Charte communale 78-00


 Direction des Études et des Prévisions Financières, le développement régional
 Rapport du CESE (2017) " Développement du monde rural : défis et perspectives" Auto-saisine
n°29/2017.

 Revue organisations et territoire n1 ,2015


 Revue organisations et territoire n2 ,2016

 CAMAGNI R. (2005). Attractivité et compétitivité : un binôme à repenser. Territoires 2030.

 CAMAGNI R., MAILLAT D. (2006). Milieux innovateurs. Théories et politiques, Economica


Anthropos, Paris

 Décret n°2-16-299 (du 29 juin 2016) fixant la procédure d’élaboration du programme de développement de la
région, de son suivi, de son actualisation, de son évaluation et des mécanismes de dialogue et de concertation
pour son élaboration. B.O. n°6562 du 20/04/2017 .

 COURLET C. (2008), Opt. Cit. p.

 OUHEJJOU O. et SOSSI ALAOUI F-Z (2013) « Les pôles de compétitivité à l'ère de l'économie de la
connaissance: une nouvelle perspective de développement économique au Maroc", Economics and
Management of Networks Conférence, Agadir du 21 au 23 novembre 2013.

 CIADT, 2007, Les pôles de compétitivité, http ://competitivite.gouv.f

 FOREST J. « La production de connaissance à l’ère des pôles de compétitivité », Innovations 2010/ (n°32), .

 Journal , LesEco.ma 29/10/2019


 Laila El Karamech,Répartition des compétences entre l’Etat et les CT : Conflits ou bonne
guvernance ?REMALD ,N 132/2020
SOMMAIRE :

Plan de la recherche..................................................................................2
Résumé.......................................................................................................................3
Abstract......................................................................................................................4
Abréviations…............................................................................................................5
Introduction..............................................................................................7
Première partie : Région au Maroc : Etas des lieux du développement socio-
économique..................................................................................................................................11
Titre 1 : Les fondements constitutionnels de la région et le principe de la prééminence
économique...............................................................................................................................11

Axe 1 : Les fondements constitutionnels.......................................................................11


Axe 2 :Le principe de la prééminence économique de la région.....12

Titre 2 : Disparités socio-spatiales....................................................................................15


Axe1 :La réalité du développent socio-économique : Disparités flagrantes.................15
Axe 2 : Les déséquilibres territoriaux.........................................................................18

Deuxième partie : La région comme acteur de développement s


ocio-économique et de l’aménagement du territoire............................................................21
Titre 1 : La région comme acteur de développement économique.............................21
Axe 1 : Le développement économique et social...........................................................21
Axe 2 : L’aménagement du territoire.............................................................................23
Titre 2 :L’attractivité des régions marocaines dans le cadre de la régionalisation avancée. 27
Axe1 : Attractivité ou compétitivité ?..........................................................................27
Axe 2 : les pôles de compétitivité : des leviers pour le développement régional
..........................................................................................................................30
Conclusion............................................................................................................35
Bibliographie...........................................................................................................................37
39

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